Séance du jeudi 11 février 2010 à 17h
57e législature - 1re année - 5e session - 22e séance

M 1739-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Anne-Marie von Arx-Vernon, Guy Mettan, Luc Barthassat, Jean-Claude Ducrot, Michel Forni, François Gillet, Béatrice Hirsch, Pascal Pétroz, Véronique Schmied : Pour un congé paternité

Débat

Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Très brièvement, Monsieur le président, au nom du groupe démocrate-chrétien, je tiens à remercier le Conseil d'Etat, qui a répondu à cette motion avec beaucoup de créativité. En effet, le Conseil d'Etat a fait la proposition complémentaire d'augmenter les prestations allouées lors de la naissance d'un enfant. Nous ne pouvons que nous réjouir que ce Conseil d'Etat ait pris tellement en considération l'importance des pères auprès de leurs enfants.

Une voix. Bravo !

Mme Fabienne Gautier (L). Autant le groupe libéral peut tout à fait comprendre qu'un père dont l'épouse vient de mettre un enfant au monde a besoin d'être auprès de lui, de ses enfants, de son épouse et de sa famille, autant on peut comprendre le congé paternité, puisque pas mal d'entreprises déjà l'ont mis en place. Mais comme on a pu le lire dans la presse il n'y a pas plus de deux jours, nous avons de nouveau, à Genève, créé une genevoiserie. Nous avons voulu nous distinguer et accorder plus que le reste de la Suisse. Cinq jours de plus, puisque, au niveau fédéral et dans beaucoup de cantons, l'administration a cinq jours pour le congé paternité, alors que Genève en accorde dix. Nous l'avions déjà fait pour le congé maternité, pour lequel nous accordions deux semaines de plus que la loi fédérale. Et là, nous nous distinguons une fois de plus. Croyez-vous qu'un canton dont la dette dépasse les 12 milliards a besoin de se distinguer de la sorte ? Croyez-vous que ces congés ne coûtent rien à l'administration ?

De plus, on peut également lire dans le rapport du Conseil d'Etat qu'un père peut prendre à ses frais deux semaines supplémentaires. Je dis bien: à ses frais. Mais cela signifie que, en plus des cinq semaines de vacances qu'il a déjà - voire six pour certains - il aura deux semaines de plus qu'il pourra prendre à ses frais, deux semaines pendant lesquelles il ne sera pas à son travail pendant l'année. Ou l'on devra le remplacer, ou son travail prendra du retard. Est-ce normal que, dans un service, du retard soit pris, alors que l'on voit les lenteurs qu'il y a déjà dans les services de l'Etat pour mettre en place des mesures votées par notre parlement ? Je ne parlerai que du système de contrôle interne, pour vous donner un exemple.

Nous prendrons acte de ce rapport, mais nous tenions à souligner que, pour les libéraux, ces genevoiseries commencent à devenir insupportables et coûtent très cher à nos contribuables.

Le président. Merci, Madame la députée. Je rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, que le temps de parole est limité à trois minutes par groupe. La parole est à Mme Carrard.

Mme Prunella Carrard (S). Le groupe socialiste remercie le Conseil d'Etat de sa réponse et va évidemment soutenir cette motion. Nous espérons que cela pourra ouvrir la voie, également, pour envisager prochainement un congé parental, pourquoi pas ?

En ce qui concerne les genevoiseries, effectivement, il y en a. Nous espérons que les employeurs genevois seront aussi prompts à mettre la main au porte-monnaie en augmentant les allocations familiales.

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Weiss, à qui il reste... disons quarante-cinq secondes.

M. Pierre Weiss (L). Merci de votre générosité, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, on a parlé de genevoiseries; il y en aura d'autres. Elles concerneront en particulier la baisse des recettes que le canton ne manquera pas d'observer, notamment dans le secteur qui est probablement celui qui présente la plus forte valeur ajoutée, à savoir le secteur financier. Alors c'est très bien ! Augmentons les prestations sociales, augmentons - avec l'appui de certains magistrats, y compris et même dans les rangs de l'Entente - le coût de fonctionnement de l'Etat, et puis baissons les recettes. C'est une excellente politique, cela s'appelle «gribouille» !

M. Gabriel Barrillier (R). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous savions que nos collègues PDC avaient une certaine obstination. (Remarque.) Je constate qu'ils ont obtenu satisfaction. En d'autres termes, comment saupoudrer pour s'attirer la sympathie de la fonction publique ? Je n'irai pas plus loin.

Mais j'aimerais dire ici que c'est bien de montrer l'exemple avec l'argent des autres. C'est bien ! Mais je constate que, par exemple, l'allocation de naissance est déjà de 1000 F. Elle est donc prévue par la loi. Et là, on rajoute encore 500 F pour les naissances dans la fonction publique. Cela fait 1500 F. Je puis vous dire que, dans les branches de l'économie, notamment celles qui sont constituées de PME, d'artisans, nous ne pouvons pas offrir des conditions aussi généreuses. Dès lors, nous prenons acte, mais avec une certaine suspicion.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme von Arx-Vernon, à qui il reste deux minutes et trente secondes.

Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Je crois que l'important est de ne pas perdre de vue que ce congé paternité est encore tout à fait modeste et que nous pouvons nous réjouir lorsque des entreprises privées, performantes - multinationales pour certaines - ont misé sur le congé paternité comme un outil de gestion des ressources humaines. Ce n'est pas seulement pour faire plaisir aux familles. C'est parce qu'elles ont pu vérifier qu'il y avait un réel retour sur investissement, dans la mesure où, lorsqu'un employé est particulièrement reconnu dans son engagement, au niveau non pas de la société, mais de sa famille, il est beaucoup plus investi et régulier, et il a beaucoup plus l'esprit d'entreprise. Donc il y a un aspect extrêmement important dans le principe du congé paternité: le retour sur investissement. Le parti démocrate-chrétien y tient autant que pour la famille.

Mme Mathilde Captyn (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je n'avais pas prévu de prendre la parole sur cette question. Après les propos - magnifiques ! - de Mme Gautier, cependant, je n'ai pas pu m'empêcher d'appuyer sur le bouton, parce que je voulais simplement rappeler qu'il y a quelques genevoiseries qui amènent à de réelles avancées en termes de prestations sociales. Rappelons tout de même que la genevoiserie qui équivalait à l'assurance-maternité cantonale... (Remarque.) ...a quand même poussé le niveau fédéral à légiférer pour l'ensemble de la Suisse sur la question. Il est extrêmement important de le rappeler. C'est une avancée pour l'ensemble des familles en Suisse. Rappelons aussi, et même proposons peut-être aux membres du parti libéral - puisque Mme Gautier s'est plainte des retards que créent les congés paternité au sein de l'administration publique - de se donner la règle de ne plus devenir pères ! Ainsi, vous ne prendrez pas de retard dans vos activités respectives ! (Commentaires.)

Quoi qu'il en soit, on peut saluer la décision du Conseil d'Etat de mettre en place un congé paternité au sein de l'administration publique. On peut surtout se réjouir du jour où l'ensemble des employés de ce canton auront droit à un congé paternité. Car aujourd'hui, malgré tout, les bénéficiaires d'un congé paternité restent une minorité des employés de ce canton. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. Je profite de votre intervention pour vous transmettre au nom du Bureau - et, j'imagine, de tout le Grand Conseil - nos meilleurs voeux pour l'événement heureux que vous attendez pour juin ! La parole est à Mme Amaudruz.

Mme Céline Amaudruz (UDC). Le groupe UDC va suivre ce rapport, bien que nous ne soyons pas du tout d'accord sur le fait de passer de cinq à dix jours. Je ne vois pas pourquoi les fonctionnaires auraient droit à plus de privilèges que d'autres sociétés qui ne peuvent s'accorder ces droits, notamment les PME. J'ai vu que, dans ce rapport, on prend exemple sur les instituts bancaires. Pour une fois, on les cite en exemple. Normalement, on dit qu'ils ont trop de bonus, trop de salaire; mais pour une fois, ce qu'ils font est bien. Donc je suis assez étonnée qu'on les prenne comme exemple. De plus, le fait d'accorder dix jours de manière non consécutive n'est vraiment pas profitable. Donc nous ne sommes pas du tout contents avec ce rapport.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Slatkine, à qui il reste dix secondes.

M. Ivan Slatkine (L). Merci, Monsieur le président. Dix secondes me suffiront. Je voulais seulement rappeler au groupe des Verts que, après un petit décompte que nous avions fait lors du débat sur les allocations familiales, le groupe libéral s'est révélé être celui qui a le plus d'enfants. (Remarque.) Nous sommes de nombreux pères à avoir plus de deux enfants, voire trois ou même quatre. Je voulais simplement le rappeler, pour ne pas que vous fassiez croire que nous sommes des pères sans enfants, Madame Mathilde Captyn. (Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Mme Captyn a entendu votre appel et y répondra.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, le Grand Conseil a demandé un certain nombre de mesures par l'intermédiaire d'une motion. Deux d'entre elles concernaient la fonction publique. Nous avons, ma foi, suivi rigoureusement les invites de cette motion. Nous sommes d'accord. Donc je suppose que les motionnaires en sont satisfaits, ainsi que le Grand Conseil qui a voté cette motion.

Quant à la question spécifique aux entreprises, le parti pris du Conseil d'Etat a été de favoriser les familles, d'une part par le biais de la baisse fiscale, qui concerne quand même un nombre important de personnes, et d'autre part par le projet de loi sur les prestations complémentaires pour les familles. Donc on parle vraiment de la classe moyenne d'un côté, et des personnes qui ont le plus de peine à joindre les deux bouts de l'autre. Par contre, introduire des discriminations fiscales pour conduire des entreprises à donner cinq jours de congé paternité paraît un peu disproportionné.

Par rapport à ce que j'ai entendu, je dirai d'abord qu'il n'y a pas que les banques qui donnent des congés de dix jours. Ce sont, de façon générale, les groupes qui ont une valeur ajoutée relativement forte. De plus, je me permets tout de même de rappeler à certains que l'évolution de l'Etat fait qu'une partie - une majorité aujourd'hui - des collaborateurs de l'Etat ont une formation tertiaire: bachelor ou master. Par conséquent, quand on compare des entreprises, il faut aussi faire des comparaisons avec les entreprises ayant une majorité de ces profils, qui ont généralement une valeur ajoutée un peu plus forte.

Reste la question du passage de 300 F à 500 F, qui ne faisait pas partie du panier de la motion, mais des discussions en cours avec la fonction publique. Ce n'est rien d'autre qu'une indexation, en réalité, puisque, contrairement à toutes les autres primes et toutes les autres indemnités, ces primes-là n'étaient pas indexées. Nous avons donc profité de compléter le panier pour un coût de 500 000 F, à mettre en lien, tout de même, avec la partie famille de la baisse fiscale, qui n'est pas loin des 300 millions si on y ajoute le splitting et les déductions. Donc je pense que, en gros, le panier est équilibré et que vouloir profiter de cette occasion pour faire un numéro sur les fonctionnaires privilégiés est un peu déplacé.

Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1739.