Séance du jeudi 12 mars 2009 à 20h30
56e législature - 4e année - 6e session - 28e séance

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Eric Leyvraz, président.

Assistent à la séance: MM. François Longchamp, Robert Cramer, Pierre-François Unger, Charles Beer et Mark Muller, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. David Hiler, président du Conseil d'Etat, et Laurent Moutinot, conseiller d'Etat, ainsi que MM. Michel Forni, Claude Marcet, Yves Nidegger et Pascal Pétroz, députés.

Annonces et dépôts

Néant.

E 1603-A
Prestation de serment de M. BOILLAT Olivier, élu Juge au Tribunal de la jeunesse

Le président. M. Olivier Boillat est assermenté. (Applaudissements.)

E 1655-A
Prestation de serment de 13 Juges assesseurs à la commission cantonale de recours en matière administrative, spécialisés dans les affaires fiscales pour statuer en matière fiscale (E 1604, E 1605, E 1606, E 1607, E 1608, E 1609, E 1610, E 1611, E 1612, E 1613, E 1614, E 1615, E 1618)

Le président. M. Damien Bonvallat, M. Yves Chevrier, Mme Laurence Dematraz, M. Yves Dupont, M. Philippe Ehrenström, M. Christian Fischele, Mme Elisabeth Gabus-Thorens, M. Claude Miffon, Mme Myriam Nicolazzi, Mme Magali Orsini, Mme Delphine Perrella, M. Joseph Riedweg et M. Patrice Schär sont assermentés. (Vifs applaudissements.)

E 1656-A
Prestation de serment de 11 Juges assesseurs à la commission cantonale de recours en matière administrative, de formation juridique pour statuer en matière de police des étrangers (E 1624, E 1625, E 1626, E 1627, E 1628, E 1629, E 1630, E 1631, E 1632, E 1634, E 1637)

Le président. Mme Alexandra Clivaz-Buttler, M. Henri Corboz, Mme Thi Bach Nga Croisier-Vu, Mme Marina d'Angelo Cornu, M. Pascal Junod, Mme Véronique Mauron-Demole, Mme Kieu-Oanh Nguyen Oberhaensli, Mme Delphine Perrella, M. Jacques Pagan, Mme Marie Saulnier Bloch et Mme Isabelle Uehlinger sont assermentés. (Vifs applaudissements.)

E 1657-A
Prestation de serment de 6 Juges assesseurs à la commission cantonale de recours en matière administrative, spécialisés en matière de construction, d'urbanisme et d'hygiène publique pour statuer en matière de constructions (pris en dehors de l'administration) (E 1638, E 1640, E 1641, E 1642, E 1643 et E 1644)

Le président. M. André Bagattini, M. Christian Pirker, M. Jean-Luc Richardet, M. Nicolas Rufener, M. Athanase Spitsas et M. Claude Zuber sont assermentés. (Vifs applaudissements.)

Mesdames et Messieurs les députés, nous allons maintenant aborder l'urgence demandée par le Conseil d'Etat, à savoir le point 175 de notre ordre du jour.

R 566-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la proposition de résolution de Conseil d'Etat : Développement du quartier Praille Acacias Vernets
Rapport de majorité de M. Michel Ducret (R)
Rapport de minorité de M. Alain Etienne (S)
RD 763-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil relatif au projet de résolution du Grand Conseil concernant le développement du quartier Praille Acacias Vernets - La Ville en Arve
Rapport de majorité de M. Michel Ducret (R)
Rapport de minorité de M. Alain Etienne (S)

Débat

M. Michel Ducret (R), rapporteur de majorité. La proposition de résolution qui nous est soumise maintenant, après avoir été traitée à la commission d'aménagement, représente un instant important dans l'histoire de notre canton. Elle est peut-être un signe que nous voulons un réel développement et un réel progrès pour l'ensemble de notre collectivité. Dans le cas contraire, ce serait le signe d'une démission que nous ne pouvons accepter...

En commission, une majorité s'est très clairement dessinée pour aller de l'avant avec ce projet. Certes, celui-ci peut paraître iconoclaste, extrêmement difficile à mettre en oeuvre et risque de poser toutes sortes de problèmes à notre collectivité, mais la majorité est persuadée que nous saurons, ensemble - tous ensemble - résoudre les problèmes qui se présenteront. Parce que les défis qui sont posés par notre aménagement du territoire et notre situation politique particulière - le canton est enserré entre la France et le canton de Vaud dans un territoire relativement petit, dont nous voulons préserver un maximum de qualités, notamment au niveau environnemental - imposent de chercher des solutions.

Or cette résolution propose une solution, et il n'y en a pas trente-six mille... Il faut donc aller de l'avant avec ce projet, qui représente une réelle possibilité de faire face aux problèmes que nous rencontrons, en particulier maintenant, à savoir qu'il est terriblement difficile d'habiter dans le canton, ce qui est contradictoire avec le nombre d'emplois générés par l'attractivité économique de Genève. Cette possibilité de répondre à ce problème est relativement unique et procède d'une certaine logique, puisqu'elle propose une véritable extension de la ville contiguë à l'urbain existant. Par conséquent, c'est la ville qui va croître. Il ne s'agit pas d'implantations relativement artificielles à l'extérieur de la ville ou dans sa périphérie.

Ce choix, je le répète, va évidemment poser un certain nombre de problèmes, notamment en matière de circulation, de déplacements et d'équipements publics. Ceux qui auront pris le temps de lire le rapport de majorité savent quels sont les principaux problèmes auxquels nous serons confrontés.

Il y a d'ailleurs un problème dont on ne peut pas faire abstraction: nous ne pouvons pas aller de l'avant dans ce projet en négligeant les aspects qui sont liés au maintien du tissu industriel. Certes, celui-ci demande beaucoup moins d'équipements lourds que ce qui avait été prévu à l'époque de la création de la Praille, mais il suppose malgré tout de rester relié à un raccordement de type ferroviaire, ne serait-ce que pour favoriser une politique des déplacements des marchandises qui soit plus favorable à l'environnement que celle que nous connaissons aujourd'hui. C'est une tendance inéluctable, qui se généralisera en Europe, et il faut pouvoir répondre à cette demande dans l'avenir. C'est important dans la réflexion concernant le déplacement des industries installées sur ce site.

Aujourd'hui, c'est une zone industrielle; demain, ce sera une partie de la ville. C'est ce qui vous est proposé; c'est un choix, un choix essentiel que la majorité vous invite à soutenir, pour permettre au Conseil d'Etat d'avancer dans ce projet.

J'aimerais encore, avant de céder la parole à d'autres intervenants, vous signaler qu'une coquille s'est glissée en page 20 de mon rapport, alors que le texte que j'ai rendu était juste. Il ne s'agit pas d'une proposition de motion, mais bien d'une proposition de résolution amendée - R 566 - et je vous prie de bien vouloir prendre note de cette correction. Je vous en remercie. Monsieur le président, je reprendrai la parole plus tard.

M. Alain Etienne (S), rapporteur de minorité. En déposant cette proposition de résolution, le Conseil d'Etat a voulu ouvrir le débat devant ce parlement et la population de Genève. Par le dépôt de ce rapport de minorité, le parti socialiste s'engage également dans le débat, car il considère qu'il doit en discuter et exprimer clairement ce qu'il pense de cette résolution et du projet de développement concernant Praille-Acacias-Vernets - PAV.

Je dirai tout d'abord que le parti socialiste s'y oppose, et sur la forme et sur le fond. S'agissant de la forme, nous ne comprenons pas pourquoi le Conseil d'Etat propose un projet de résolution devant ce parlement alors que, dans le même temps, il a mis à l'enquête publique le projet de loi de déclassement concernant le même périmètre Praille-Acacias-Vernets ! Nous ne voyons pas comment ce parlement pourrait influencer le projet de loi de déclassement, alors qu'il est encore en train de discuter de la résolution en commission ! A quoi bon proposer des amendements sur la résolution, puisque le projet de loi est déjà mis en consultation ?! La démarche du Conseil d'Etat est difficile à comprendre.

En outre, nous n'avons aucune garantie. Le Conseil d'Etat nous indique qu'il y a encore beaucoup d'études à effectuer et que celles-ci seront présentées lors de l'examen du projet de loi de déclassement Praille-Acacias-Vernets. Les études n'étant pas achevées, nous ne savons pas ce que contient ce projet de loi, lequel, d'ailleurs, ne nous a pas été présenté en commission. Il nous a seulement été indiqué que nous pouvions le télécharger sur internet pour voir de quoi il s'agissait, mais aucun lien n'a été fait entre la résolution et le projet de loi ! Par conséquent, sur la forme, le parti socialiste ne veut certainement pas donner carte blanche au Conseil d'Etat.

Par ailleurs, nous considérons que le parlement doit jouer son rôle. La majorité a indiqué à plusieurs reprises en commission qu'il ne fallait pas trop entrer dans les détails, qu'il ne fallait pas non plus proposer un «inventaire à la Prévert», ni vouloir trop en faire, et qu'il fallait laisser les mains libres au Conseil d'Etat... Nous avons pu le constater car, lorsque nous avons présenté des amendements concernant la problématique des transports - par rapport à la proposition du PDC sur l'implantation des bâtiments pour la formation - la majorité nous a invités à faire attention, à ne pas en rajouter et à laisser les mains libres au Conseil d'Etat. Eh bien - j'insiste - le parti socialiste considère que le parlement doit jouer son rôle: c'est très important à nos yeux !

Historiquement, le PAV a été l'un des enjeux des dernières élections au Conseil d'Etat en 2005. Nous l'avons constaté: alors que l'on se battait pour résoudre la crise du logement et essayer de construire dans les grands périmètres d'aménagement concerté prévus par le plan directeur cantonal, tout d'un coup, les candidats au Conseil d'Etat sont venus avec ce projet de développement Praille-Acacias-Vernets... Les socialistes ont alors rappelé qu'il fallait agir sur l'ensemble du territoire et appliquer le plan directeur. Et nous avons considéré que le projet Praille-Acacias-Vernets risquait de faire oublier les priorités en cours dans notre canton, par rapport aux grands projets de déclassement que représentent les Communaux d'Ambilly à Thônex, La Chapelle-Les Sciers à Plan-les-Ouates, ou les Vergers à Meyrin.

Nous nous sommes rendu compte qu'une grande énergie avait été mise dans le projet de Praille-Acacias-Vernets, et nous avons aussi compris dans les propos du Conseil d'Etat une fois élu - notamment dans son discours de Saint-Pierre ou dans ses déclarations à la presse - que ce dernier allait vendre le patrimoine de l'Etat, qu'il voulait vendre des terrains pour améliorer les finances publiques. Et, à ce moment-là, nous avons vraiment commencé à nous inquiéter, parce qu'il nous semblait que le Conseil d'Etat n'avait aucune stratégie concernant le développement du canton de Genève !

Une autre raison qui justifie notre opposition sur la forme, c'est le degré de connaissance de ce dossier dans la population et au sein des partis. Nous nous apercevons en effet que certains milieux sont déjà bien informés, alors que les députés n'ont pas reçu beaucoup d'informations concernant ce projet de loi de déclassement, même si le texte de ce projet est à disposition sur internet. Nous savons aussi que le Conseil d'Etat consulte la société civile. Alors je pose la question suivante: les partis politiques font-ils partie de la société civile ? Peuvent-ils également participer à cette discussion en tant que tels ou en tant qu'association ? Comme je l'ai indiqué dans mon rapport, il serait bienvenu que le Conseil d'Etat invite des députés ou des membres des différents partis à la table de la discussion, via les différentes commissions d'urbanisme internes auxquelles ils participent, pour qu'ils aient le même degré de connaissance que la Chambre genevoise immobilière ou que la Fédération des métiers du bâtiment par exemple. Sur la forme, il est important que les partis - et ce, dès à présent - puissent bénéficier du même degré de connaissance en amont que les autres associations.

J'en viens au déroulement des concours qui ont été lancés. Concernant le masterplan, le Conseil d'Etat a décidé de ne pas tenir compte du concours international «Genève 2020», qui avait été organisé par la Fédération des architectes suisses. Il a préféré lancer un mandat d'études parallèles... Alors les socialistes posent les questions suivantes: quelle est la valeur de ce plan ? Un mandat d'études parallèles suffit-il à donner une image directrice quant au développement de ce périmètre ? Les entreprises sur place ont-elles été consultées durant ce mandat d'études parallèles ? Voilà les questions que nous posons ! Peut-être aurait-il mieux valu lancer un nouveau concours international, pour récolter le plus grand nombre d'idées concernant le développement de ce périmètre...

Venons-en aux raisons de notre opposition sur le fond. En commission, nous avons déposé deux amendements. L'un demandait qu'une zone de développement soit créée sur l'ensemble du périmètre, et l'autre de pouvoir user du droit de superficie. En effet, un certain nombre des terrains appartenant à l'Etat, il était important pour le parti socialiste que l'Etat fasse usage du droit de superficie pour ces différents terrains. Ces deux amendements ayant été refusés, le parti socialiste a pris la décision de présenter un rapport de minorité.

Le parti socialiste ne veut pas se laisser enfermer dans la stratégie du Conseil d'Etat: il fait voter une résolution, il demande au Grand Conseil de l'appuyer dans sa démarche et, ensuite, au moment de soumettre le projet de loi de déclassement, lorsqu'il y aura des critiques, voire des oppositions, il viendra nous dire que nous avons voté la résolution ! Nous risquons donc d'être pris au piège avec la démarche employée par le Conseil d'Etat...

Le parti socialiste tient à exprimer sa ferme volonté: il faut appliquer le plan directeur cantonal, construire dans les zones de développement, densifier la zone villas, prévoir des déclassements en zone agricole et appuyer ces mesures simultanément. Or, malgré tous les efforts qui ont été effectués pour ce périmètre, que constate-t-on aujourd'hui ? Que les constructions qui étaient prévues dans ces grands périmètres - qui sont déjà déclassés - ne sont pas encore réalisées ! Alors que se passe-t-il au niveau de l'Etat et de l'administration ? Pourquoi les dossiers n'avancent-ils pas ? Il a également fallu traiter le projet d'agglomération, cela fait donc beaucoup de dossiers que l'administration doit traiter en même temps. Nous posons donc la question suivante: l'Etat a-t-il toujours les ressources internes nécessaires pour faire avancer simultanément tous ces dossiers ? Nous ne le pensons pas ! Les résultats escomptés ne sont pas au rendez-vous !

J'aimerais également rappeler ici que le projet PAV - Praille-Acacias-Vernets - qui concerne un grand périmètre...

Le président. Monsieur le rapporteur, il va falloir terminer: vous avez dépassé les sept minutes imparties, mais vous pourrez reprendre la parole plus tard !

M. Alain Etienne. Alors je reprendrai la parole tout à l'heure ! Pour terminer sur ce point, je dirai que le projet Praille-Acacias-Vernets n'est pas une friche industrielle - cela a été rappelé dans l'exposé des motifs du Conseil d'Etat - or tous les exemples, toutes les expériences que l'on nous a cités, que ce soit Lyon Confluence ou ce qui s'est fait à Zurich, ont été réalisés sur des friches, c'est-à-dire des endroits où l'on peut agir !

Voilà, je reviendrai ultérieurement sur ce qu'est actuellement le projet Praille-Acacias-Vernets.

M. Claude Jeanneret (MCG). Je dois dire que les propos de nos amis socialistes me laissent quelque peu perplexe. Tout à l'heure, le MCG a voté socialiste mais, là, il me semble que bloquer le travail de l'Etat dans ce dossier Praille-Acacias-Vernets ressemble davantage à une nomenklatura qu'à une évolution souhaitable dans la conjoncture difficile que nous connaissons, qui impose de trouver une solution pour Genève. Certains en arrivent à confondre un projet comme les Communaux d'Ambilly, où il n'y a aucune infrastructure - il faut tout créer: les égouts, etc. - et un développement comme Praille-Acacias-Vernets, où tout existe déjà et où l'on réalise un projet sur quelque chose de concret... Mais cela n'a rien à voir: c'est totalement différent !

Je suis d'accord de reconnaître qu'une loi est en préparation et qu'il faut parfois attendre. Mais aujourd'hui le gouvernement, quelles que soient ses possibilités par rapport à son infrastructure administrative, doit absolument trouver des solutions pour permettre à Genève, dans ces toutes prochaines années, de se développer au niveau industriel et administratif, ainsi que de créer des activités réelles, tout cela en osmose avec l'habitat. De plus en plus, il faudra faire en sorte que les habitations soient proches des lieux de travail, que ce soit pour des raisons écologiques, pratiques ou de temps. C'est une nécessité pour l'avenir ! Il faut donc cesser de dire qu'il faut attendre, que l'on va regarder la loi ! Au contraire, Mesdames et Messieurs les députés, il faut lancer un message fort à notre Conseil d'Etat pour lui dire que nous attendons de sa part une étude pratique, une étude concrète ! Nous ne lui demandons pas de grandes idées philosophiques... Non, nous voulons des projets qui débouchent sur quelque chose de concret, sur des constructions ! Nous en avons besoin, et nous n'avons plus le temps d'attendre ! En outre, étant donné la conjoncture actuelle, si l'on arrive à développer des travaux et des constructions dans cette zone, cela nous aidera à sortir de la crise qui s'annonce actuellement.

Il me semble donc tout à fait illogique - cela échappe à toute réflexion tant citoyenne qu'économique ou conjoncturelle - de déclarer aujourd'hui qu'il faut attendre la loi ! Au contraire, il faut dire au Conseil d'Etat qu'il peut y aller, qu'il doit nous faire des propositions et trouver une solution ! Et la seule solution que nous ayons à Genève, pour le moment - tant qu'il n'y a pas de nouveaux déclassements - c'est Praille-Acacias-Vernets ! Alors, s'il vous plaît, Messieurs les conseillers d'Etat, nous attendons de vous des propositions concrètes, des propositions intéressantes ! C'est là que réside l'avenir à court terme, c'est-à-dire dans les années qui viennent ! En effet, nous avons de nombreux projets à long terme, mais ils ne sont jamais réalisés... Nous devons donc nous remuer et réagir: il faut que le parlement donne, au moins une fois, un signal fort pour que l'on agisse maintenant et non pas dans vingt ans !

Une voix. Bravo !

Mme Ariane Reverdin (L). Le parti libéral entend soutenir cette résolution, car elle représente un signe politique très important en matière d'aménagement. Cette résolution nous paraît néanmoins encore très vague, en raison de l'ampleur du périmètre ainsi que de la tâche à accomplir.

Il est donc grand temps de laisser au Conseil d'Etat la possibilité d'étudier la faisabilité des intentions contenues dans cette résolution et de préciser ses intentions ainsi que sa politique d'urbanisation. En effet, pour l'instant, tout est inclus dans cette résolution, mais il n'y a pas de ligne clairement définie. Il est grand temps aussi que notre canton devienne entreprenant en matière de développement urbain, et c'est pour toutes ces raisons que le parti libéral entend soutenir avec force cette résolution.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). La réflexion que les socialistes ont menée sur la résolution dont nous discutons est indissociable du projet de loi qui a été mis à l'enquête publique presque simultanément. Il nous paraît discutable - et M. Etienne le relève dans son excellent rapport de minorité - d'avoir voulu précipiter la mise à l'enquête publique du projet de déclassement, alors même que des discussions animées ont eu lieu autour de la proposition de résolution 566 et que celle-ci a fait l'objet d'un rapport de minorité de notre groupe. Bien plus, la résolution et le projet de loi devraient se répondre et constituer une armature solide, alors que des critiques sont émises à l'une comme à l'autre...

Il nous semble nécessaire que le politique définisse correctement l'aménagement souhaité, afin que des professionnels puissent finaliser l'image urbanistique des périmètres concernés par le PAV. Or, aujourd'hui, les instruments légaux ne jouent plus le rôle premier. Ils devraient pourtant permettre de gérer les objectifs, mais ceux-ci sont trop vagues. L'articulation entre «plan directeur de quartier» et «plans localisés de quartier PAV» est imprécise, alors que ces derniers devraient permettre de vérifier à une échelle plus fine les éléments forts du plan directeur de quartier. On nous dit que celui-ci «tiendra compte, dans la mesure du possible, des plans directeurs communaux»... Cette interprétation est contestable, dans la mesure où l'adoption des plans directeurs de quartier et des plans directeurs communaux engage réciproquement l'Etat et les communes quant au suivi de leurs contenus et objectifs d'aménagement !

Le projet PAV recouvre une vaste zone, et il est important d'avoir un fil conducteur qui consolide les priorités du projet et qui réponde à des questions aujourd'hui toujours sans réponse. En effet, le concept de mixité des activités énoncé est vague, et il n'y a aucune stratégie pour préserver le tissu artisanal dit «de proximité», ni pour organiser le relogement des entreprises sur le site ou ailleurs. Aucune zone industrielle et artisanale nouvelle n'est adoptée dans son principe. Il est impératif d'associer les communes susceptibles d'accueillir ces activités dans cette réflexion, et il est tout aussi impératif de repenser la rationalisation de ces zones et de leur localisation pour éviter une ségrégation du territoire en termes sociaux et d'emplois. Très clairement, les communes qui accueillent des activités industrielles et artisanales à peu de valeur ajoutée doivent voir les activités économiques sur leur territoire diversifiées - le cas de Vernier est ici emblématique...

Ces entreprises sont extrêmement sensibles au prix des locaux, et les mécanismes que gère la FTI doivent être préservés. Il en va de même pour les entreprises nouvelles - start-up - qui, souvent, recherchent le même type de locaux. L'une des solutions est la construction par la FTI de «centres artisanaux» adaptés à ces besoins, mais avec une densité supérieure.

Ensuite, la mixité est au centre de ce développement, mais reste très peu décrite, tant sur le plan des logements que des activités. Il est impératif de viser des pourcentages selon les secteurs. En effet, ces développements se feront dans le temps, et les pourcentages permettent d'avoir en tout temps une vision du quartier en devenir avec une image pertinente et continue. De manière générale, les socialistes soutiennent donc, dans son principe, la proposition de la Communauté genevoise d'action syndicale visant à tendre vers l'équilibre: un emploi - un logement.

Ajoutons encore que créer une nouvelle zone de développement à Genève qui renforce le déséquilibre logements/emplois au profit des activités est d'autant plus discutable qu'il n'est nullement fait référence dans le projet de loi aux logements d'utilité publique - LUP. Il est donc nécessaire de mentionner qu'il y aura un minimum de LUP sur ce territoire, soit 25% au moins, ne serait-ce que pour donner enfin corps au protocole d'accord sur le logement qui, bien que signé, n'a encore abouti à aucun résultat significatif sur les périmètres d'importance.

Signalons encore que l'ouverture de l'ensemble du périmètre à la construction de tours est problématique et laisse leur implantation à l'opportunité foncière. La dispersion éventuelle des projets n'est pas souhaitable sur le plan urbanistique. Même si du point de vue projectuel leur concentration dans le «pôle» de l'Etoile semble plus favorable, leur réalisation semble compromise du point de vue géologique. Tout cela sent la précipitation.

Si l'on continue le catalogue - et il n'a de loin pas le charme de celui de Leporello ! - on remarque qu'une bonne partie des terrains appartiennent à la FTI. Il n'est rien dit, au vu du changement de zone en cours, sur une modification éventuelle du rôle de la FTI, et donc de ses statuts. Sera-t-elle, dès lors, toujours en charge de ce périmètre et, dans le cas contraire, qui assurera le suivi qui est le sien ? Qui assurera le relais avec les entreprises ?

Encore deux remarques. L'importance du rail, dans ce secteur, est évidente. La définition du rôle de desserte des terrains industriels doit être établie. Et, enfin, le secteur G Acacias - Bord de l'Arve est emblématique du creux ressenti, en termes de priorités, de programme et de faisabilité. L'affectation prévue est on ne peut plus vide: «affectation mixte, logements, activités tertiaires, entreprises sans nuisances ou moyennement gênantes». Or ce secteur est celui qui comprend le site de la caserne des Vernets. Il n'est rien dit sur l'existant et sur le départ éventuel de la caserne, alors même que des projets culturels voient le jour à l'initiative de particuliers.

Un projet ne saura émerger sans afficher des priorités et des ambitions partagées. Les socialistes auraient donc aimé que des réponses soient apportées à leurs interrogations, avant tout déclassement, de manière que ce projet PAV ne soit pas qu'un slogan ou une coquille vide.

M. Gabriel Barrillier (R). Mesdames et Messieurs les députés, que voulons-nous faire ?

Une voix. Voter !

M. Gabriel Barrillier. Créer un quartier urbain de la dimension - je ne sais pas si cela a été évoqué par les deux rapporteurs - de quartiers entiers que nous connaissons, comme les Pâquis ou les Eaux-Vives. Nous ne voulons pas construire une ville à la campagne: nous voulons agrandir la ville, avec toutes ses couleurs, sa proximité, sa vie. C'est cela, l'objectif du PAV ! Et 230 hectares: c'est énorme !

S'agissant de la méthode, peut-être que le Conseil d'Etat nous donnera tout à l'heure des précisions sur la façon dont il a empoigné ce problème. La méthode est critiquée par les socialistes - vous venez de le signaler et je crois que le rapporteur de minorité l'a fait aussi - parce qu'ils estiment que ce n'est pas la bonne méthode, qu'il faut d'abord consulter, qu'un projet de loi est élaboré en même temps... Mais alors donnez-nous une réponse sur la bonne méthode à suivre pour associer les communes, la population, les acteurs et les professionnels afin de réaliser ce quartier ! C'est énorme, et vous n'avez pas donné de réponse !

En ce qui me concerne, je pense que la méthode est bonne. Cette dernière - on l'a vu - repose sur une initiative privée, qui a réfléchi à cette problématique. Ensuite, le Conseil d'Etat a pris les choses en main et a établi un canevas: le masterplan - je ne sais pas si l'on peut appeler cela comme ça... (L'orateur est interpellé.) Oui, c'est pour cela que je parle de «canevas» - avec des lignes directrices - lequel est soumis au Grand Conseil, sous la forme d'une résolution. Alors, bien sûr, chers collègues socialistes, nous aurions pu - nous, parlement - établir ce rapport et cette résolution, mais vous comprendrez bien que nous n'en avons ni les moyens ni la possibilité ! Toutefois, au cours des dix séances de la commission d'aménagement, nous avons eu toute latitude pour examiner, pour digérer et pour faire des propositions ! Le rapport qui sort aujourd'hui est le résultat d'un véritable travail de négociation. Nous avons ciselé le texte et chaque virgule a été étudiée. Nous y reviendrons peut-être tout à l'heure... Je ne sais pas si nos collègues PDC vont déposer leur amendement ou si c'est déjà fait... Si tel est le cas, nous aurons l'occasion d'expliquer pourquoi nous avons choisi cette méthode.

Pour réaliser le PAV, Mesdames et Messieurs les députés, il faut éviter plusieurs écueils. Le premier écueil, c'est de vouloir charger ce grand périmètre avec trop de projets précis. Et c'est précisément ce que nous reprochons à nos collègues PDC: c'est de vouloir proposer des éléments trop précis. Si nous chargeons ce projet avec trop d'idées et d'espoirs, nous allons faire couler le bateau ! C'est le premier écueil.

Le deuxième écueil - et, là, je m'adresse aussi aux socialistes - c'est de figer la maîtrise du foncier et la problématique des procédures. On nous a expliqué - et je crois que c'est juste - que les procédures en matière d'aménagement et d'autorisations de construire seront des procédures ad hoc, c'est-à-dire des procédures plus souples qui permettront aux professionnels et aux investisseurs de s'exprimer plus librement, tout en maintenant - évidemment, on ne va pas faire n'importe quoi ! - une certaine maîtrise par les pouvoirs publics. En effet, si vous figez le foncier, vous allez rebuter les investisseurs ! Et ce n'est pas l'Etat, tout seul, qui va pouvoir réaliser ce quartier urbain ! Il va falloir faire collaborer les privés avec le public. Il y a vingt, trente ou quarante ans, on parlait de «sociétés d'économie mixte». C'était à la mode, après la Deuxième Guerre mondiale... Actuellement, nous parlons de «partenariat public-privé». Et je crois qu'il faut véritablement - je m'adresse toujours aux socialistes - faire un effort intellectuel... (Protestations.) ...pour comprendre qu'il n'est pas question de privatiser, mais de faire collaborer le privé et le public ! (Commentaires.)

Troisième écueil, chers collègues: nous n'allons pas pouvoir tout faire en même temps. C'est évident ! Il s'agit d'un processus de longue haleine. Alors ne cherchons pas à tout faire simultanément, au risque - je le répète - de faire couler le bateau.

Et puis - j'insiste sur ce point, et là je m'adresse plutôt de ce côté-là - vous ne pouvez pas imaginer construire et réaliser un nouveau quartier vivant, comprenant des infrastructures et offrant autant d'emplois que de logements, sans avoir un système de mobilité crédible et performant. Et ce système de mobilité, de transport, de déplacement - le rapporteur de majorité l'a bien décrit... (Remarque.) Mais non, il n'y a pas de problème ! Il repose en grande partie, mais pas seulement, sur une dorsale de RER. Il n'y a pas de PAV sans un RER efficace: ça, c'est absolument clair ! Mais, comme l'a dit le rapporteur de majorité, il faudra que le commerce vive: il conviendra donc également de prévoir un accès individuel contrôlé à ces activités.

Pour conclure, j'aimerais quand même insister sur le fait qu'une grande majorité de la commission a voté cette résolution. Je le répète: chaque phrase a été négociée. Et je rends hommage à tous les partis, en particulier aux Verts qui ont su dans certains cas retirer des propositions pour permettre de trouver un consensus. Et c'est la raison pour laquelle j'en appelle, une fois encore, aux socialistes, pour les convaincre qu'ils ne doivent pas craindre la réalisation du PAV. Il n'y aura ni étatisation ni privatisation ! Essayez, chers collègues socialistes, d'imaginer que ce projet puisse se réaliser avec des privés, avec la maîtrise des pouvoirs publics, et abandonnez la méfiance que vous exprimez ! Il faut cesser de vouloir une planification, j'allais dire «à la soviétique», mais c'est peut-être un peu exagéré ! Vivez avec votre temps: il est possible de réaliser des projets sur la base d'une collaboration entre le public et le privé. En conclusion, le groupe radical votera cette résolution à l'unanimité.

M. Stéphane Florey (UDC). Le groupe UDC est globalement satisfait de la résolution telle qu'issue des travaux de la commission. Elle donne un cadre général au projet de développement du quartier Praille-Acacias-Vernets. Elle est aussi le fruit d'un large consensus et contient les principaux éléments que la majorité de la commission souhaitait y voir figurer, sans pour autant entrer dans les détails. En effet, la population attend surtout des projets de logements, et cet objectif figure clairement dans la résolution, tout comme la création de nouvelles places de travail. Nous serons toutefois particulièrement attentifs au projet de loi de déclassement qui devrait découler de cette résolution et être déposé, selon les dires du conseiller d'Etat Mark Muller, à partir du mois de juin, car pour nous c'est ici que se trouve le véritable enjeu du projet PAV. Pour toutes ces raisons, nous accepterons cette résolution, et nous vous invitons à faire de même.

Mme Michèle Künzler (Ve). On se trouve face à une résolution dont le but est tout de même de soutenir un projet majeur pour notre canton. Pour moi, ce développement est essentiel pour Genève. Nous aurons enfin une extension de la ville, et il ne faut pas rater cette occasion !

Nous avons essayé, mais c'est vrai que cette résolution est, disons, un peu molle - cependant, vous l'avez dit, nous avons retiré certains éléments. Quoi qu'il en soit, nous pensons qu'il faut vraiment avoir de l'ambition pour réaliser un quartier de haute qualité environnementale, parce que c'est ce qui est nécessaire à cet endroit. Cela veut dire un quartier dense, et cela signifie aussi un quartier où il y a une mixité. En effet, il faut cesser de faire de la planification à l'ancienne, qui séparait les activités humaines: d'un côté, le boulot, de l'autre, le dodo, et puis des activités de loisirs ailleurs. Ce n'est plus tolérable ! Mais nous pensons aussi - cela figure en filigrane dans les textes - qu'il faut en faire un quartier de culture. Nous ne devons pas faire de cet endroit un quartier quelconque. Il faut que ce soit un vrai projet, suffisamment ambitieux, qui ait un vrai souffle ! C'est ce qui manque, et je pense qu'il faut aller plus loin !

Certes, ce projet n'est pas encore mûr: le déclassement n'est pas encore effectué et il manque certaines options, mais il faut, par cette résolution, marquer notre volonté d'aller de l'avant. C'est d'ailleurs l'objectif de cette résolution. Il faut montrer que nous avons envie que ce quartier change de statut: qu'il ne soit plus seulement un quartier artisanal, mais aussi un quartier de logements, un véritable développement de la ville. Et c'est dans ce sens que cette résolution est importante.

Elle finit sur la concertation... Et là il y a un enjeu fondamental pour réussir ce projet: il ne pourra pas aboutir sans une large concertation. Nous en sommes au début, ce ne sont que des prémisses de la concertation ! Mais, pour cela, il faudra nous en donner les moyens. En effet, si le Conseil d'Etat se contente de demander aux personnes présentes dans une salle ce qu'elles en pensent, ce n'est pas de la concertation. Faire de la concertation, c'est vraiment travailler avec des citoyens, des groupes d'intérêt, des partis, pour donner envie de créer un projet et de le réaliser ! Nous n'en sommes pas tout à fait là pour l'instant: nous n'en sommes qu'au début.

En conclusion, cette résolution exprime notre envie de changer ce quartier, et c'est une bonne chose, raison pour laquelle nous voterons cet objet.

M. Christophe Aumeunier (L). Je dirai tout d'abord quelques mots sur le rapport de minorité. Après des travaux extrêmement consensuels, qui ont vu des dizaines d'invites être votées à l'unanimité, un rapport de minorité a été déposé, qui plonge les socialistes dans l'incertitude la plus profonde. C'est un paradoxe face à un projet qui est très fortement soutenu par un Conseil d'Etat à majorité rose-verte ! En réalité, il semble que les griefs soulevés par le parti socialiste relèvent simplement d'un manque de confiance en soi, de craintes face au développement et d'une véritable peur de l'avenir. D'autre part, on nous indique que le plan directeur cantonal ne serait pas appliqué... C'est totalement faux ! Le plan directeur cantonal est respecté !

On nous explique aussi qu'il ne faudrait rien changer... Et pas un mot - pas un mot - des socialistes sur la pénurie de logements ! Pas un mot pour dire que les Genevois souhaitent la création de logements, qu'ils en ont besoin, qu'ils en veulent tout de suite et maintenant, et que, en outre, les entreprises genevoises ont besoin de terrains pour se développer et que nous devons effectivement saisir cette opportunité extraordinaire d'avoir un périmètre situé dans une zone urbaine, une zone équipée, une zone qui verra la Genève du XXIe siècle émerger !

Il s'agit de rassurer les entreprises, nous dit-on... Mais les entrepreneurs sont des entrepreneurs, Mesdames et Messieurs les députés, et ils comprennent, lorsqu'il y en a, qu'il faut saisir les opportunités ! Ce n'est pas demain que les entreprises seront mises à la porte ! Elles ne doivent pas le craindre: elles savent que c'est du long terme; c'est la possibilité, peut-être, de quitter Praille-Acacias-Vernets. Il faut savoir qu'aujourd'hui les transporteurs ne veulent aller dans ce quartier qu'à 5h du matin, parce qu'il est très difficile pour les camions de s'y rendre en pleine journée. Eh bien oui, c'est une mutation de ce quartier que nous souhaitons: c'est véritablement saisir des opportunités pour que nous puissions tirer plus de ce quartier pour le bien des Genevois.

La densité et la qualité, nous dit-on du côté des Verts... Eh bien oui, exactement: la densité et la qualité ! Et nous savons que nous pouvons y arriver parce que, en définitive, nous collerons ainsi avec les quartiers durables, avec une économie durable. Et nous collons aussi parfaitement avec le projet de territoire suisse, qui fait l'objet d'études très fouillées à Berne. Cela prouve, en définitive, que c'est bien la direction que nous devons suivre.

Nous avons des préoccupations communes avec les socialistes, mais ils croient que la résolution n'y répond pas, alors qu'elle le fait. Plus de logements... Oui, plus de logements, mais pour toutes les catégories, pas uniquement certaines catégories de logements ! Au moins 12 000 logements dans le périmètre... Oui, c'est ce que nous souhaitons tous ! Vous réclamez une application de la loi sur les LUP et, en définitive, des proportions LUP... Nous sommes d'accord ! Je vous comprends, personnellement, s'agissant d'une application de la loi sur les LUP ! Mais alors, soyez cohérents: faites en sorte de soutenir cette loi sur les LUP ! Faites en sorte que la Ville l'applique ! Faites en sorte que l'initiative de l'ASLOCA, qui souhaite, de manière complètement incohérente, 80% de logements LUP, soit refusée ! Soyez cohérents ! Aujourd'hui, vous nous dites que vous souhaitez que les LUP soient appliqués, et nous n'avons pas de divergence sur ce point.

La qualité des espaces publics est essentielle, et nous nous rejoignons aussi sur ce point. C'est effectivement par le biais de la qualité des espaces publics que ce quartier sera agréable à vivre.

Enfin, vous critiquez le manque de concertation... Mais l'essence même de la résolution est de favoriser une concertation ! Le processus législatif actuel ne prévoyait pas cette concertation. Le Conseil d'Etat - et il faut l'en remercier - a saisi l'opportunité de nous proposer un texte, lequel a été complètement amendé par la commission - cela a été dit tout à l'heure par le représentant radical: nous avons modifié l'ensemble des douze invites de ce texte. Il faut donc remercier le Conseil d'Etat d'avoir proposé un processus de concertation très fort !

Voilà, j'en ai fini avec le rapport de minorité... On peut être beaucoup plus enthousiaste en voyant les bonnes raisons qu'il y a de développer ce quartier, la nécessité de le requalifier: la vision d'avenir, la vision à long terme, la vision de tirer un meilleur parti d'une partie de la ville. Il s'agit de répondre aux besoins des Genevois en matière de pénurie de logements et de mise à disposition des terrains disponibles pour les entreprises. Il s'agit d'une localisation qui nous permet de disposer d'équipements et de dessertes de transport, de construire la ville en ville et d'avoir une très bonne accessibilité. Il s'agit aussi de saisir une occasion d'une politique anticyclique... En effet, tout va trop vite pour vous, Mesdames et Messieurs les socialistes, mais, à force de ne pas aller trop vite, vous n'allez nulle part, et nous attendons toujours vos propositions ! Cette opportunité de développer un quartier de cette taille en période de crise est une opportunité merveilleuse que nous devons saisir !

Quelques-uns critiquent le processus... Mais il est tout à fait logique ! Nous sommes, en matière d'aménagement du territoire, en train de souhaiter déclasser un périmètre, et c'est après que nous définirons les infrastructures. Nous définirons ensuite les priorités en termes d'urbanisme, à savoir les espaces publics, les affectations, les formes urbaines. Et puis, nous ferons la démonstration, en définitive, que nous savons mettre à disposition des Genevois un quartier urbanistiquement et architecturalement moderne: celui du XXIe siècle, celui auquel ils aspirent !

En conclusion, parce que nous, libéraux, sommes confiants dans ce développement, parce que nous souhaitons sortir de la pénurie de logements et également entrer dans le XXIe siècle, nous vous proposons d'adopter cette résolution et de prendre acte du rapport.

M. Guy Mettan (PDC). Il me revient la difficile tâche d'expliquer pourquoi il ne vaut pratiquement pas la peine de voter cette résolution si vous n'acceptez pas l'amendement que le parti démocrate-chrétien vous propose. Et ce pour la simple raison que cette résolution est quasiment vide de sens ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Tout d'abord, après avoir entendu les propos de Mme Reverdin selon lesquels la résolution est vague et n'a pas de lignes bien définies, je me demande pourquoi, Madame Reverdin, il faudrait voter une résolution vague, aux lignes si indéfinies ? J'ai aussi entendu Mme Künzler nous dire que cette résolution n'a pas du tout de souffle, mais qu'il faut tout de même la voter... Madame Künzler, pourquoi, pour un projet de cette importance, voudriez-vous qu'on vote une résolution qui manque totalement de souffle ? Et elle manque de souffle, parce que toutes les invites qui nous sont proposées sont complètement redondantes. En bref, cette résolution n'est pas du tout nécessaire pour que le Conseil d'Etat puisse réaliser ces invites !

Première invite: le Conseil d'Etat doit respecter, à l'occasion de l'élaboration du projet de loi de modification de zones et des plans d'affectation du sol, certaines options générales d'aménagement... Mais cette résolution n'est pas nécessaire pour que le Conseil d'Etat respecte, à l'occasion de l'élaboration du projet de loi, les options générales d'aménagement citées ! Il peut le faire sans la résolution !

Ensuite, il doit garantir la cohérence du projet PAV avec les grands projets, notamment celui de La Chapelle-Les Sciers. Le Conseil d'Etat peut également le faire sans la résolution !

Et puis, il doit inscrire le PAV dans la trame du plan directeur cantonal... C'est possible sans la résolution !

Il doit encore élaborer des projets de plans d'affectation du sol, etc. Nul besoin de cette résolution pour le faire !

Par ailleurs, il doit se référer au masterplan, adopté en mars 200... Là non plus, elle n'est pas nécessaire !

D'autre part, il doit proposer des solutions permettant d'admettre des tours... C'est la même chose !

Il doit élaborer une trame des espaces publics... C'est possible sans cette résolution !

Il doit émettre des suggestions relatives à la réalisation d'un ou plusieurs équipements publics emblématiques... C'est la seule invite intéressante ! Du reste, c'est ce que nous proposons avec notre amendement mais, bizarrement, vous le combattez... Cette invite propose quelque chose de nouveau, alors que tout le reste - je le répète - est redondant.

Je continue. Le Conseil d'Etat doit proposer un plan d'affectation du sol et une image directrice adaptés aux caractéristiques du PAV... Une résolution n'est pas nécessaire pour cela !

Il doit présenter au Grand Conseil un suivi des travaux... Il n'y a pas non plus besoin d'une résolution pour le faire !

Il doit mener prioritairement les études relatives aux secteurs de l'Etoile, Grosselin, etc. C'est faisable sans la résolution !

Et, enfin, il doit assurer une concertation de qualité... Il n'est pas nécessaire d'adopter une résolution pour que cela se fasse, puisque vous vous concertez en permanence !

Mesdames et Messieurs les députés, Genève avait un grand penseur, Denis de Rougemont, qui a dit ceci: «Il ne sert à rien de deviner l'avenir, il faut le décider ! Jadis, on pouvait étudier le passé pour comprendre le présent, et même pour prévoir l'avenir mais, aujourd'hui, il faut partir de l'avenir pour préparer l'avenir.» Si je vous livre cette citation, c'est parce que la résolution qui nous est proposée vient du passé, est inspirée par le passé et, pire, elle est tournée vers le passé ! Alors que le projet Praille-Acacias-Vernets qui nous est soumis ce soir est prévu pour fixer l'avenir de Genève durant les vingt à trente prochaines années, nous dit-on, que constate-t-on ? Que cette résolution ne propose rien de nouveau, comme je l'ai dit tout à l'heure ! Les douze invites sont toutes sectorielles, procédurales, réglementaires, elles donnent des gabarits... Cette résolution, je le redis, n'a aucun souffle, aucune vision, aucun contenu. Vous ne trouverez rien de tout cela.

Le pire, c'est qu'à aucun moment le texte ne fixe une orientation quelconque et nous explique pourquoi nous devrions investir du temps et des milliards pour réaliser cette future zone. On ne nous donne pas les raisons pour lesquelles il faudrait investir dans ce projet !

Mesdames et Messieurs les députés, il se trouve qu'aujourd'hui à midi j'ai eu la chance de déjeuner avec le prix Nobel de l'économie, Joseph Stiglitz, qui a été reçu au BIT et qui nous a parlé des moyens de résoudre la crise. Eh bien, il nous a expliqué qu'il ne servait à rien d'investir dans des projets du passé, de sauver une industrie automobile qui est complètement dépassée sur le plan technique et sur le plan de son modèle d'affaire ! Il nous a en revanche indiqué que, pour préparer l'avenir, il fallait investir dans l'avenir, c'est-à-dire dans la formation, dans la recherche et dans l'innovation. Voilà que nous avons la chance de donner à ce quartier une orientation - c'est notre rôle, à nous, politiques, de fixer des orientations - et on nous propose une résolution qui comporte douze invites, dont onze sont du bouillon pour les morts !

Je vous propose simplement d'accepter notre amendement, qui inscrit dans le projet du PAV la possibilité d'affecter - au moins en partie - ce projet à l'innovation, à la recherche, à un campus commun entre l'université et les HES. Et cela, Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas un projet élitaire, c'est un projet qui concerne en tout cas 25 000 personnes: 15 000 étudiants, 4000 étudiants HES, 3000 ou 4000 enseignants. Au bas mot, 25 000 personnes seraient concernées par cet amendement !

On peut aussi envisager des activités culturelles, comme des bibliothèques, puisqu'on sait que des bibliothèques qui ouvrent jour et nuit, comme à l'EPFL ou dans les campus américains, créent une animation positive sur le campus.

Voilà pourquoi je vous demande, Mesdames et Messieurs, chers collègues, d'accepter notre amendement. Parce qu'il représente une manière de fixer un cadre et permet d'affecter cette zone et ces milliards que nous allons investir à une activité en la définissant. C'est notre rôle, à nous, députés, de le faire ! C'est notre rôle en tant qu'élus de prendre des responsabilités et de fixer des orientations. Car si nous votions la résolution telle qu'elle nous est proposée ce soir, que se passerait-il ? Cela reviendrait à couper ce projet en rondelles. Certes, nous aurions une loi générale, mais on nous dirait que l'on ne peut pas inscrire une orientation, parce que la loi prévoit un projet de déclassement et qu'il ne sert à rien d'insister...

Le président. Monsieur le député, il faut penser à conclure !

M. Guy Mettan. Oui ! Je m'arrête maintenant, mais je reprendrai la parole plus tard, puisque j'ai encore droit à sept minutes. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)

M. Olivier Wasmer (UDC). Je déplore les esprits chagrins qui continuent de hanter cette république et qui, une fois, s'opposent à la traversée de la rade, une autre, à l'agrandissement de Balexert, ou encore à la construction de tel ou tel immeuble ! Aujourd'hui, ils s'opposent à un projet, comme l'a dit le rapporteur de majorité, tout à fait novateur et révolutionnaire pour Genève - je m'étonne, du reste, que des gens de gauche ne soient pas sensibles à cet aspect révolutionnaire - d'une ville créée dans la ville ! Mais je voulais surtout relever - mon excellent préopinant Christophe Aumeunier l'a dit tout à l'heure - que les socialistes n'ont pas du tout parlé de logements... J'ai entendu des critiques par rapport au changement de zone, j'ai entendu parler de «mixité», mais je suis surpris que des gens qui se targuent de défendre les locataires n'aient pas rappelé qu'il manque aujourd'hui 10 000 logements à Genève ! Je n'ai pas non plus entendu dire qu'à peine 1500 logements ont été construits cette année ! Alors que cette résolution - vous le savez tous - propose 20 000, voire 30 000 logements, c'est-à-dire assez pour rattraper le retard que nous avons pris depuis près d'un demi-siècle !

Aujourd'hui, vous évoquez les problèmes que poserait un éventuel changement de zone... Mais je ne vois pas où est le problème, Mesdames et Messieurs les députés qui vous opposez à cette résolution ! Nous avons près de 250 hectares de zone industrielle qui seront changés en zone de développement, laquelle, vous le savez, est contrôlée par l'Etat !

Nous avons évoqué des problèmes de droit de superficie... Mais que voulez-vous de plus: faire des études ? Le Conseil d'Etat et la grande majorité d'entre nous souhaitons construire enfin des logements, réaliser une nouvelle ville et donner une opportunité de créer des emplois près des logements, et vous vous y opposez ? Vous vous y opposez, comme vous le faites systématiquement pour le CEVA ou pour les parkings de proximité ! Aujourd'hui, je ne peux que déplorer cette politique ! Je vous le répète, à vous, défenseurs des locataires: ce projet permettra de construire 20 à 30 000 logements, alors, avant de voter - et j'espère que vous voterez de la bonne manière - pensez à vos clients locataires, qui attendent tous de pouvoir trouver un appartement, parce que le taux de vacance actuel est de moins de 1% !

Le président. Merci, Monsieur le député. Doivent encore prendre la parole M. Stauffer, Mme Fehlmann Rielle, Mme Guinand Maitre, M. Deneys, M. Mettan, Mme Borgeaud, M. Ducret et M. Etienne. Le Bureau clôt la liste des orateurs. Monsieur Stauffer, je vous donne la parole.

M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Cher collègue, Guy Mettan, quel discours ! Quel réquisitoire contre le conseiller d'Etat qui fait partie de votre alliance ! En effet, vous dites que onze des douze invites de cette résolution sont «du bouillon pour les morts», qu'elles ne veulent rien dire et qu'elles sont redondantes. Sauf une invite - entre parenthèses, nous allons soutenir l'amendement que vous proposez - que vous voulez améliorer... Mais est-ce à dire, cher collègue député, que le conseiller d'Etat en charge du département des constructions et des technologies de l'information n'est pas compétent à vos yeux ? Est-ce à dire qu'il n'a pas le charisme ou l'envergure nécessaires pour résoudre la crise du logement à Genève ? Je suis vraiment surpris par ces propos mais, d'une certaine manière, je peux m'y associer, car il est vrai que nous avons besoin à Genève de 4000 logements par année et qu'on en construit à peine 1500 ! La situation empire et les Genevois continuent à souffrir de ne pas trouver de logement.

Alors, c'est vrai, l'on peut être extrêmement étonné de l'attitude des socialistes, mais j'y vois une explication... Si la crise du logement était résorbée, ce serait la fin de l'ASLOCA, la fin du levier électoral, la fin du parti socialiste ! (Commentaires.) Et c'est probablement là que réside le problème: en fin de compte, entretenir la crise de l'immobilier en pratiquant des loyers exorbitants que subissent les citoyens genevois alimente les caisses de l'ASLOCA ! Et on lance des initiatives basées sur la peur des citoyens de se retrouver jetés à la rue ! Eh bien, c'est lamentable, laissez-moi vous le dire ! Pour notre part, nous soutiendrons cette résolution, car Genève a un réel besoin de construction de logements.

Alors, certes, notre conseiller d'Etat n'a pas forcément été très adroit mais, enfin, il ne vous est pas demandé aujourd'hui que le premier coup de pioche soit donné demain matin, en cassant tout, en érigeant des tours et je ne sais quoi encore ! Il avait peut-être besoin d'être rassuré, de tâter la température de ce parlement pour être encouragé: une façon de dire que le parlement le suit, qu'il attend qu'on lui soumette un PLQ et qu'il verra en fonction des zones de déclassement proposées, en fonction des répartitions entre les LUP, le secteur des affaires et les logements non subventionnés. Mais quoi qu'il en soit, Genève a besoin de logements !

Nous allons soutenir le conseiller d'Etat, car il en a besoin, mais nous sommes aussi susceptibles de l'interpeller lorsqu'il fait des bêtises et qu'il ne veut pas rénover l'hôpital des enfants, par exemple; nous sommes capables de le clouer au pilori, comme nous l'avons fait ! Mais en l'occurrence, nous allons le soutenir. Le message doit être clair: Genève a grand besoin de logements. De plus, dans cette période de crise économique, nous avons besoin de relance, de fournir des emplois et de créer des richesses, des commerces et une mixité dans certains quartiers. Nous soutiendrons donc cette résolution en la renvoyant au Conseil d'Etat.

M. Michel Ducret (R), rapporteur de majorité. J'aimerais tout d'abord rappeler que ce projet de loi de déclassement - que nous n'avons pas encore devant nous - ne constitue, au fond, que le passage d'une zone industrielle à une autre zone, et la résolution dont nous parlons ce soir représente une impulsion pour aller, ou non, dans ce sens. Le Conseil d'Etat, à juste titre, ne veut pas mettre en place un processus qui ne serait pas suffisamment soutenu, c'est évident !

Autre remarque: la société civile, c'est d'abord nous, le Grand Conseil, qui sommes censés la représenter et, que je sache, aucun de nous ne fait de la politique à plein temps ! Or cette résolution prévoit précisément une consultation avec les divers acteurs, ainsi qu'une collaboration entière avec les communes, ce qui me paraît extrêmement important.

J'en viens maintenant à l'intervention du PDC. J'aimerais dire une chose claire: il a été décidé très largement en commission de ne pas entrer en matière sur les désirs détaillés des uns ou des autres et de ne pas faire un inventaire à la Prévert des desiderata de tout un chacun sur ce périmètre. Car, à ce niveau d'avancement des études, si l'un d'eux devait être accepté, les autres ne pourraient être refusés. Il n'y aurait, dès lors, plus assez de place sur ce périmètre pour accéder aux désirs de tous. Nous en sommes donc restés à des généralités, en mentionnant très clairement la nécessité d'intégrer des équipements publics majeurs dans le corps de la résolution et en insistant sur les synergies possibles, grâce à la proximité, avec les besoins universitaires dans le texte du rapport. Il a été procédé de même pour les transports collectifs, pour les besoins culturels, etc.

Par ailleurs, le PAV n'a pas, Mesdames et Messieurs, vocation à être un projet de campus universitaire. Le campus de l'EPFL et de l'UNIL à Lausanne est beaucoup plus important que le PAV, et il a été réalisé en plein champ ! Si l'on suivait la proposition du PDC, il n'y aurait plus de PAV: ce ne serait qu'un projet de campus universitaire !

Le PAV est un projet de quartier urbain qui doit être très diversifié, qui doit en priorité permettre de construire les logements qui manquent à Genève depuis des années et d'offrir des places supplémentaires pour des activités économiques, cela dans le cadre d'une très grande mixité. Et le moteur de cette réalisation doit être l'économie, parce que, Mesdames et Messieurs, les pouvoirs publics n'ont tout simplement pas les moyens financiers de le réaliser entièrement seuls. Ce projet est ambitieux, et il ne semble pas judicieux de le saboter d'emblée, par clientélisme, ainsi que le propose le PDC. Nous aurons déjà, Mesdames et Messieurs, assez de choses à faire. J'invite ceux qui ne veulent que de l'étatisme, alliés occasionnels, une fois de plus, de ceux qui ne veulent rien, à le voter.

Il ne s'agit pas non plus, Mesdames et Messieurs les députés, de planifier à la soviétique - ou, si vous préférez, à la façon d'un camp romain - une ville nouvelle réalisée et financée par les autorités, mais bien d'ouvrir un périmètre à la société civile, un nouveau périmètre où l'initiative privée pourra s'exercer et réaliser ce que l'Etat ne peut faire, faute tout simplement de moyens.

Et les dossiers avancent ! Certains investisseurs sont prêts à démarrer, notamment dans les zones prioritaires. Il y a même un projet d'écoquartier complet. En fait, l'attitude que proposent les socialistes, c'est de ne rien faire, c'est de rester enfermés dans nos fortifications. Le discours socialiste de ce soir s'apparente à celui des rétrogrades du XIXe siècle, lors de l'avènement des chemins de fer, qu'aujourd'hui ils disent tant aimer ! Ils peignent le diable sur la muraille, cherchent les failles et imaginent que cela pourrait faire tourner le lait des vaches... Eh bien, non, Mesdames et Messieurs les députés, depuis lors, les vaches aiment voir passer les trains, et l'humanité s'est développée, s'est industrialisée ! Certes, cela a généré des inconvénients pour la nature et l'environnement, mais aussi des avantages, Mesdames et Messieurs, car il ne faut pas oublier que l'on vit deux ou trois fois plus longtemps aujourd'hui qu'à cette époque.

Je voudrais rappeler que le but de cette résolution est de donner une impulsion, mais cette impulsion est majeure pour l'avenir de Genève. Ce qui est proposé, c'est d'abattre le tabou des zones existantes. C'est une décision comparable à celle de démolir les fortifications, décision prise par des radicaux, comme James Fazy, en 1842, ce qui a permis d'offrir à Genève un développement dont aucune ville en Suisse n'osait rêver. Mesdames et Messieurs les députés, soyons ceux qui veulent aller de l'avant, ceux qui sont prêts à assumer un avenir pour Genève, un futur pour notre canton !

M. Alain Etienne (S), rapporteur de minorité. Je vais poursuivre l'exposé que j'avais commencé tout à l'heure. Je disais que le PAV n'était pas une friche industrielle. Et les socialistes, contrairement à ce qui a été prétendu, ont des propositions à faire. Ces terrains, qui sont situés sur le périmètre Praille-Acacias-Vernets, sont propriété de l'Etat. Ils ont donc été acquis par des contributions publiques, et c'est la raison pour laquelle le parti socialiste a voulu inscrire dans la résolution le principe du droit de superficie. Mais la majorité n'est pas entrée en matière sur cette proposition.

Je suis vraiment étonné de ce débat et, notamment, des propos de M. Barrillier du parti radical, qui défend les petites et moyennes entreprises. Pour nous, il est essentiel de préserver le tissu artisanal de proximité à l'intérieur de la ville. En effet, il va y avoir un nouveau développement dans ce quartier: il est prévu que de nombreux nouveaux emplois soient créés, que s'y installent des sociétés actives dans les services à caractère financier, ainsi que dans les technologies de pointe, qui auront besoin de spécialistes, et l'on y verra aussi peut-être le siège de sociétés internationales. Alors on va proposer aux petites et moyennes entreprises de les reloger ailleurs, en périphérie de la ville, et ce sont les entreprises à haute valeur ajoutée qui viendront s'installer dans le centre... Les petits, comme d'habitude, seront relégués à l'extérieur !

Il faut faire attention de ne pas reproduire les erreurs du passé. Je pense par exemple aux communes de Vernier ou d'Onex, qui se plaignent aujourd'hui de ne pas avoir assez d'entreprises à valeur ajoutée chez elles et qui se demandent ce que nous faisons avec ce projet - et c'est bien la crainte du parti socialiste - puisqu'il prévoit que s'y installent essentiellement des entreprises à haute valeur ajoutée. Les autres entreprises et les petits artisans qui sont actuellement sur place devront s'installer à Versoix, à Colovrex - comme cela a été proposé - ou ailleurs. Et ça, ce n'est pas le modèle de société que prône le parti socialiste ! Il défend les petites et moyennes entreprises qui peuvent rester sur le site.

Par ailleurs, nous défendons cette zone parce que nous savons très bien que les prix du terrain vont augmenter. Or, si nous voulons que certains artisans et industries puissent poursuivre leur activité, il faut maintenir le prix du terrain suffisamment bas. En réalité, en défendant ce projet comme vous le faites, vous allez faire partir ceux qui n'auront pas les moyens de rester, ceux qui ont investi beaucoup d'argent pour créer leurs propres infrastructures ! Je rigole également suite à la prise de position quant au devenir du parking de l'Etoile P+R. En effet, certains ont déclaré qu'il allait être démoli, alors qu'il a été financé par l'argent de l'Etat.

J'en viens - vous en avez parlé, Monsieur Ducret - à la place du rail. Le Conseil d'Etat nous indique que les études ne sont pas terminées... En ce qui me concerne, je crains que le rail de Praille-Acacias-Vernets ne soit enlevé, parce que les sociétés financières ou de hautes technologies n'ont pas besoin du rail et de ce type d'équipement. Nous éprouvons donc également des craintes quant à la place du rail dans ce périmètre.

S'agissant de la mixité entre logements et emplois, nous avons indiqué que nous souhaitions trouver un équilibre, dont le principe serait un emploi pour un logement. Or, comme nous l'avons signalé au Conseil d'Etat, la proportion de logements par rapport aux emplois a été nettement sous-estimée. Dans l'exposé des motifs, le Conseil d'Etat parle de 6000 logements supplémentaires, alors qu'il en faudrait beaucoup plus ! Quand on évoque la mixité entre logements et activités, on pense forcément aux questions de nuisances, notamment dues au bruit et à la circulation. Comment songer à créer des logements, lorsqu'il y a des entreprises en activité ? Nous imaginons bien quel modèle de société vous souhaitez pour le quartier Praille-Acacias-Vernets: vous voudrez y installer des entreprises silencieuses, et celles qui génèrent du bruit ne pourront pas rester. Quel poids aura un petit artisan par rapport aux entreprises à haute valeur ajoutée qui sont prévues ?

En ce qui concerne le problème du logement, que nous avons évoqué, j'aimerais savoir quelle place est prévue pour les logements d'utilité publique - les LUP - à Praille-Acacias-Vernets. Le projet de loi de déclassement est muet à ce sujet, et nous souhaiterions donc que le Conseil d'Etat nous indique combien il prévoit de logements d'utilité publique dans ce périmètre. Le parti socialiste en réclame en tout cas 25%, car c'est une nécessité. M. Aumeunier et d'autres en ont parlé: il faut du logement pour tous, et le parti socialiste tient à ce qu'il y ait du logement social dans ce périmètre.

Pour nous, la zone de fond reste une zone industrielle et artisanale. Le protocole d'accord ne prévoyait du reste pas la possibilité d'y mettre du logement d'utilité publique. Donc, actuellement, la loi ne prévoit pas de pouvoir le faire dans cette zone et, sur ce point aussi, nous attendons que le Conseil d'Etat nous donne des engagements.

L'un d'entre vous a prétendu que le parti socialiste ne faisait pas de propositions... J'aimerais tout de même vous rappeler à ce sujet que, depuis de nombreuses années, notamment lors de l'adoption du dernier plan directeur cantonal, tous les plans d'aménagement concerté ont été déclassés. Ce qui se passe, c'est que les constructions tardent à être réalisées, notamment en raison des résistances des communes et des habitants proches de ces périmètres. Je vous citerai le projet Frontenex-La Tulette - le fameux PAC - qui aurait normalement dû être réalisé, mais l'Entente a laissé filer ces terrains pour effectuer des constructions avec une densité bien moindre. Alors ne venez pas dire aujourd'hui aux socialistes qu'ils ne font pas de propositions ! Le parti socialiste demande avec force que l'on construise, avec les densités prévues dans le plan directeur cantonal !

J'en viens à la mixité sociale et aux tours... Pourquoi limiter l'affectation des tours au secteur tertiaire et à des logements de haut standing ? Pourquoi la mixité sociale ne peut-elle pas s'appliquer dans les tours ? Quelle est votre vision de la société ? Nous ne comprenons pas pour quelle raison il ne pourrait pas y avoir de mixité sociale aussi dans les tours du centre urbain qui doit être réalisé.

D'autre part, quels sont ces nouveaux instruments d'aménagement du territoire qui vont être mis en place pour le PAV ?

Le président. Monsieur le député, il va falloir terminer ! Vous pourrez reprendre la parole encore une fois.

M. Alain Etienne. Le Conseil d'Etat évoque, dans son projet de loi de déclassement, un PLQ «spécial PAV» très souple... Le parti socialiste pose donc la question suivante: si le plan localisé de quartier est beaucoup plus souple, où se font la véritable concertation et la négociation ?

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). En entendant les propos de M. Mettan, on ne peut qu'être amusé en constatant que ce bel unanimisme est en train de se lézarder... Quant à nous, qui avons été traités de «Neinsager», nous avions soutenu en commission les propositions du PDC concernant la possibilité de réaliser un pôle de formation ainsi que des logements pour les personnes en formation. Cette résolution fait des propositions, mais il ne s'agit pas de figer les choses à ce stade. Il semble que les députés qui se sont exprimés ne l'ont pas vraiment compris.

Je tiens à répéter, même si M. Etienne a exprimé une grande partie de ce que je souhaitais dire, que les socialistes ne s'opposent pas à ce projet du PAV. Du reste, il n'en est pas vraiment un pour l'instant: c'est plutôt une intention... Nous avons tout autant à coeur que les autres groupes de faire en sorte que des projets intéressants soient réalisés et que nous arrivions à un aménagement harmonieux dans ce périmètre. Mais, contrairement aux autres, nous ne souhaitons pas donner un blanc-seing au Conseil d'Etat qui, je le rappelle, dans le projet de loi de déclassement mis à l'enquête publique, avait déjà prévu la résolution dans l'exposé des motifs. En termes de procédure, c'est tout de même un peu curieux ! Nous avons l'impression que le Grand Conseil comptait pour du beurre, ce qui nous a valu de nous agiter quelque peu en commission d'aménagement...

Nous souhaitons en tout cas spécifier que, pour nous, certains principes sont garants d'un aménagement harmonieux, dont le principe de mixité sociale - cela a été dit à plusieurs reprises - et celui de l'équilibre entre logements et emplois. Or le masterplan prévoyait 20 000 emplois et 20 000 autres emplois suite à l'aménagement du PAV. Avec 40 000 emplois pour, finalement, 6000 logements, il est évident que l'équilibre souhaité n'est pas respecté: on est loin du compte ! Nous souhaitons simplement mettre en évidence ces aspects et rappeler que, si l'on veut un aménagement qui permette aux habitants de travailler à proximité de leur logement et de leurs loisirs, il faut absolument aboutir à cet équilibre. Or le projet de loi de déclassement indique que l'équilibre n'est pas respecté; on va certainement évoluer dans ce sens, mais les choses ne sont absolument pas claires...

M. Etienne a aussi évoqué la question de la mixité des activités. Il faudrait assurément densifier un peu plus certaines activités qui sont actuellement situées dans le périmètre du PAV, mais le Conseil d'Etat semble vouloir détruire un certain nombre de bâtiments existants. Or a-t-on bien réfléchi au coût que représenterait le déplacement de ces entreprises ? A l'heure où nous parlons de crise - certains la vivent déjà, et du reste la commission de l'économie traite une résolution qui demande de donner des impulsions au Conseil d'Etat et de lui prodiguer des conseils afin d'arriver à juguler cette crise - il semble justement qu'on ait quelque peu oublié, dans le débat sur le PAV, les petits entrepreneurs... On a l'air de ne penser qu'aux tours de haut standing et d'oublier ceux qui sont actuellement implantés sur ce site et le coût que leur déplacement occasionnerait. Au lieu de mener une réflexion sur un aménagement qui permettrait de densifier davantage et d'utiliser de manière plus intelligente ce périmètre pour maintenir les activités des petits artisans et des petits entrepreneurs, on préfère envisager des tours, alors que l'on sait - les études géologiques le montrent - qu'il ne sera probablement pas possible de les implanter.

Ce sont tous ces problèmes que nous voulions aborder mais, malheureusement, les invites que nous avions proposées - elles ont déjà été évoquées par M. Etienne à plusieurs reprises - ont tout simplement été balayées par la commission, et c'est pour cela que nous sommes opposés à cette résolution.

Encore un dernier mot concernant la concertation. S'agissant du processus de concertation, les réponses étaient très vagues jusqu'alors. Mais quand nous avons demandé en commission s'il y avait des ressources supplémentaires, à l'interne, pour pouvoir mener à bien ce projet, la réponse a été très claire: pas de ressources supplémentaires ! Alors, Mesdames et Messieurs les députés, notamment de l'Entente, vous qui voulez toujours restreindre le budget et diminuer les dépenses financières de l'Etat, si vous désirez vraiment qu'un beau projet pour Genève soit mis en oeuvre, il serait peut-être temps de libérer des ressources supplémentaires pour que le groupe pressenti - avec la directrice, Mme Bietenhader, qui est tout à fait compétente - puisse réaliser ce projet en partenariat et dans une véritable concertation.

Si nous avons refusé cette résolution, c'est parce que nous ne voulons pas nous lier les mains et que des options irréversibles soient prises à ce stade. Mais, bien évidemment, les enjeux seront discutés lors des débats sur le plan de déclassement, et nous pourrons reprendre les discussions à ce moment-là. Pour l'heure, nous allons accepter l'amendement du PDC, et nous verrons en fonction du résultat du vote si nous refusons ou acceptons cette résolution.

Mme Geneviève Guinand Maitre (S). J'avoue avoir été un peu surprise des réflexions qui ont été faites selon lesquelles nous ferions de la résistance par rapport à cette résolution... Vous savez à quel point les socialistes souhaitent des logements, alors nous accuser de vouloir faire de ce périmètre un champ pour les vaches me paraît plus qu'excessif ! Le moins que l'on puisse dire, c'est que nous voulons des logements, mais peut-être pas à n'importe quel prix ! Que craignez-vous dans le fait que nous menions une réflexion plus approfondie sur le type de développement que nous désirons pour ce PAV ? Nous avons entendu qu'essayer de garder la maîtrise du foncier allait être dissuasif... J'ai peine à le croire ! Pour nous, la maîtrise du foncier est une chose relativement importante. Je doute fort, vraiment, que plus personne n'ait envie de construire sous prétexte que nous aurions la maîtrise du foncier !

En ce qui concerne le type de logements, nous n'avons aucune garantie sur les 25% minimum de LUP que nous souhaitons. Or il me paraît tout à fait essentiel d'avoir cette garantie pour que nous puissions adhérer à une quelconque résolution au sujet du PAV.

Un autre élément nous semble également très important, à savoir les espaces publics. Oui, il faudrait créer des espaces publics, mais avec quel financement ? Etre sûr que ce sont les communes qui vont les payer, c'est prendre un risque que ces espaces publics soient peu ou mal traités. Nous savons pourtant que ces derniers sont essentiels pour tous les quartiers qui vont se développer. Or, en réalité, nous n'avons pas vraiment la garantie du financement ni une vraie réflexion sur ces espaces publics !

Vous nous accusez de ne rien vouloir faire, de rester les bras ballants... Vous dites que vous êtes les seuls à présenter des beaux projets et à avoir envie de faire avancer Genève. Non ! Franchement, non: nous ne marchons pas ! Nous aussi nous voulons une Genève qui se développe avec un PAV réussi mais, pour ce faire, il nous semble qu'il faut réfléchir aux meilleures conditions qui nous permettent de nous mettre d'accord sur cette résolution. Je ne crains pas que la population voie que nous refusons cette résolution ce soir, car nous ne faisons que la reporter. Dans notre esprit, il ne faut pas bâcler les choses dans ce domaine: c'est trop important ! (Applaudissements.)

M. Roger Deneys (S). Je ne vais pas ajouter grand-chose aux propos de mes préopinants socialistes... (Exclamations.) Il n'empêche que le problème est que les socialistes émettent des doutes, pas forcément sur la résolution elle-même, mais essentiellement sur les arguments avancés par la grande majorité de droite de ce parlement. Je dois dire que, pour moi, il s'agit d'un projet de résolution de «tours molles», ce qui, pour un Conseil d'Etat entièrement masculin, peut être inquiétant... (Rires.) On parle en effet de tours de 175 mètres: c'est sans doute la seule proposition extrêmement précise de cette résolution ! Et puis, il y a l'amendement PDC... Moi je pense que nous pouvons être d'accord sur les principes, mais les inquiétudes éprouvées par les socialistes sont quand même fondées sur ce que nous constatons aujourd'hui. Le quartier Praille-Acacias-Vernets a déjà fait l'objet de projets de lois dans ce parlement - je pense à la Fondation de valorisation - et l'on a vu des biens vendus, à Pictet notamment ou à des investisseurs privés. Ces projets sont donc de nature à inquiéter les socialistes, parce que la maîtrise du foncier, comme l'a rappelé ma collègue tout à l'heure, est un élément extrêmement important. Monsieur Aumeunier, nous partageons bien entendu le souci de construire du logement mais, pour nous, ce n'est pas n'importe quels logements et à n'importe quel prix !

D'une certaine manière, je trouve la résolution presque préférable aux différents arguments que j'ai entendus ce soir dans cette salle...

M. Robert Cramer. Excellent !

M. Roger Deneys. Excellent, exactement ! La sagesse du Conseil d'Etat me plaît... Je me sens de plus en plus proche du Conseil d'Etat... Je suis à deux places du Conseil d'Etat ! (Commentaires.)

Pour toutes ces raisons, je suis très perplexe, et je pense que, d'une certaine manière, la majorité du Grand Conseil, qui est souvent arrogante et a de la peine à écouter les arguments de la minorité, ne nous donne pas les garanties suffisantes pour accepter certains projets. Projets que nous soutenons par ailleurs et que nous encourageons parce que, nous, nous voulons construire la ville en ville ! Nous ne voulons pas étendre les constructions partout, à n'importe quel prix, de plus en plus loin - même si ça plairait à M. Barrillier - car cela implique de construire des routes et d'envisager des transports publics en plus. Je le répète, nous, nous voulons construire la ville en ville; nous voulons une ville de qualité; nous voulons de la mixité et nous voulons des garanties sur les prix ! Or, pour l'instant, nous n'avons rien de tout cela ! J'imagine que les choses peuvent encore venir après, mais il est vrai que les discours entendus dans ce Grand Conseil à cet égard sont peu rassurants, et ils le sont encore moins pour des gens qui ne sont pas représentés ici ce soir. A mon avis, vous devriez en tenir compte pour la suite de nos travaux !

M. Guy Mettan (PDC). Je voudrais corriger certaines impressions. Tout d'abord, le parti démocrate-chrétien soutiendra la résolution ! (Exclamations.) Si notre parti est déçu - et je réponds aussi à M. Stauffer, qui prétendait que nous voulions critiquer M. Muller - c'est parce que cette résolution est tout à fait acratopège... Comme dirait la Revue: elle n'a pas de calories ! Nous avons retenu la leçon, Monsieur Muller ! Nous voulons la doper, lui donner des calories, parce que nous trouvons que, précisément, le défaut de cette résolution, c'est son manque d'ambition ! Or, pour un projet de cette envergure, il serait opportun d'avoir de l'ambition et d'oser le dire, y compris dans cette enceinte.

Monsieur Ducret, vous nous avez dit qu'il fallait laisser le campus à Lausanne, parce que le campus de l'EPFL de Lausanne est soi-disant plus grand... Non, le campus de l'EPFL n'est pas plus grand que celui que l'on pourrait réaliser à la Praille !

M. Michel Ducret. Je n'ai pas dit ça !

M. Guy Mettan. C'est ce que vous avez dit ! Les étudiants sont plus nombreux à Genève qu'à Lausanne, et nous pourrions créer un campus, si l'on y joint les HES, qui serait plus... (L'orateur est interpellé par M. Michel Ducret.)

Le président. Monsieur Ducret, s'il vous plaît !

M. Guy Mettan. ...plus important que celui de Lausanne et, surtout, complémentaire à ce dernier, puisqu'il serait inutile de nous lancer dans une concurrence sans lendemain avec cette ville.

Ce que nous défendons ce soir, c'est une vision de Genève. Nous voulons savoir dans quel but nous faisons les choses. Monsieur Ducret, nous vous avons bien entendu, mais à aucun moment vous ne nous avez expliqué à quoi étaient destinés les plans d'affectation des sols, les projets de déclassement à la Praille ! Il n'y a aucune explication ! On nous dit qu'il faut construire des logements, que l'on va faire ceci, que l'on va faire cela mais, en réalité, on ne sait pas pourquoi on veut le faire... Nous, nous posons la question, et nous voulons une réponse ! Prenons nos responsabilités, donnons une orientation: c'est le rôle de l'Etat, c'est le rôle des élus de donner une orientation !

L'Etat est propriétaire du terrain... Mais ce projet n'a rien à voir avec celui des Communaux d'Ambilly, Monsieur Ducret, où des logements vont être construits, ce qui est une excellente chose ! Dans le projet qui nous occupe, les choses sont différentes: la Praille est une zone urbaine et, l'Etat étant propriétaire d'une bonne partie des terrains, il peut justement donner une direction, établir un plan directeur, proposer une orientation. C'est ce que nous voulons ! M. Cramer fixe des orientations pour le développement des trams... Personne ne le conteste: au contraire, on l'applaudit...

M. Robert Cramer. Quoique...

Des voix. Quoique...

M. Robert Cramer. Merci !

M. Guy Mettan. ...quand les projets sont bons - mais ils sont généralement plutôt bons !

Alors pourquoi, dans le domaine des travaux publics - le domaine de M. Muller - ne ferions-nous pas la même chose, puisque nous sommes propriétaires des terrains et que c'est notre responsabilité, en tant qu'Etat, de donner cette orientation ? Ce n'est pas aux privés de décider de ce qu'il faut réaliser dans ce périmètre: c'est à nous, élus, de le faire ! Car si tel n'est pas le cas, qu'arrivera-t-il ? On nous présentera la loi générale de déclassement, et on nous dira que ce projet est un projet de déclassement et que nous n'avons pas à dire ce qu'on va y mettre, que cela concerne des aspects purement techniques de déclassement ! Et, ensuite, on nous proposera des plans d'affectation du sol... On va faire une «lottizzazione», comme dirait notre ami Losio, c'est-à-dire couper en rondelles le projet global. Et à chaque fois qu'on nous soumettra une rondelle - un projet - on nous dira que ce n'est pas le moment de décider s'il faut réaliser un campus, une bibliothèque, un local pour les affaires culturelles; qu'on pourra le faire ailleurs, après, autrement ! Et, ainsi, dans vingt ans, on se retrouvera avec un projet qui ne ressemble à rien. Alors, certes, des acteurs du secteur privé - les investisseurs, les promoteurs immobiliers - auront trouvé leur bonheur financièrement parlant, mais aucun projet emblématique pour Genève n'aura été réalisé, comme le Conseil d'Etat prétend vouloir le faire !

Je le dis clairement: ne ratons pas l'occasion ! Le train passe ce soir... Si nous ne le prenons pas maintenant, nous ne pourrons plus rien faire, parce que l'on nous dira que c'est trop tard. Voilà pourquoi il faut accepter cet amendement.

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Que n'ai-je pas entendu ce soir ! Nous avons encore passé des heures sur le même sujet ! Certaines choses me choquent... On nous parle de réfléchir... (Rires.) J'ai l'impression que c'est un mot nouveau, pour vous ! (Rires. Exclamations.) En effet, qu'est-ce qu'on réfléchit dans ce parlement ! Voilà bientôt quatre ans que je siège dans ce parlement, et je constate que nous réfléchissons beaucoup, mais que rien ne se fait ! (Rires.) Je voudrais vous dire... (L'oratrice est interpellée.) Ah, tu vois, moi j'arrive toujours quand on ne m'attend pas ! (Rires.)

J'aimerais simplement attirer votre attention sur un point: cela fait vingt ans, voire plus, que l'on parle du fait que nous avons besoin de logements à Genève. Ce n'est donc pas la première fois que des propositions sont formulées à ce sujet et ce n'est certainement pas non plus la première fois qu'elles sont refusées, sous prétexte qu'il faut mettre un parc ou autre... Je lis qu'un amendement propose la création d'une bibliothèque, alors qu'il y en a une à la Madeleine, ce qui n'est tout de même pas très loin du centre de la Praille ! Il me semble que les Genevois ont plus envie de se loger que d'aller consulter des livres, qu'ils peuvent finalement trouver partout à Genève.

J'ai entendu dire que ce dossier était bâclé... Moi j'ai toujours envie de dire que rien n'est irréparable en politique: la preuve ! Je ne crois pas que l'on puisse utiliser le mot «bâclé», alors que cela fait des années et des années que ce sujet est discuté au parlement ! Vous n'en avez pas marre, vous, d'entendre toujours les mêmes discours ? Ça suffit ! Une résolution nous est maintenant soumise - je vous rappelle que nous avons décidé de la traiter en urgence - et cela fait bien deux heures que nous en discutons et que nous n'avons rien fait d'autre ! C'est toujours la même chose ! Et pourtant, au moment du vote, vous allez finalement tous dire oui ! C'est vraiment magnifique !

Je tiens donc à vous rendre attentifs: pour une fois que nous avons des propositions concrètes, arrêtez de toujours mettre des bâtons dans les roues, comme vous le faites continuellement ! Personne n'est parfait ! Si c'était le cas, ça se saurait et, de toute façon, ce n'est pas dans cette enceinte qu'on trouverait quelqu'un de parfait ! Alors, à partir de là, nous n'allons pas encore «rebalancer» cette résolution au Conseil d'Etat, ou bien la renvoyer en commission ou je ne sais où, alors que nous avons tous la volonté d'aboutir.

Je vous rappelle que nous avons déjà un très gros problème en ce qui concerne les décharges, les déblais, etc. Genève est saturée à ce niveau. Cela fait vingt ans que l'on tire la sonnette d'alarme à ce sujet, mais personne ne veut l'entendre: on préfère mettre des jolies petites fleurs que de creuser les trous qu'il faudrait pour résoudre ce problème. Je suis désolée, mais je ne peux pas soutenir tous les projets ! Je veux bien faire des compromis mais, là, j'arrête: je n'en fais plus ! (Rires. Exclamations.) Maintenant, je veux qu'on avance ! (Brouhaha.) C'est une nécessité: nous sommes là pour ça ! Il est de votre responsabilité d'aller de l'avant dans ce dossier, car je suis sûre que chacun ici entend tous les jours des gens se plaindre qu'il faut attendre trois ans, voire quatre, pour trouver un logement... Je vois que ça fait rire beaucoup de monde... La vérité n'est jamais bonne à entendre, mais je ne fais que dire tout haut ce que les gens pensent tout bas. Je suis spontanée, et vous n'allez pas me changer à mon âge: je suis trop vieille ! (Commentaires.) Alors arrêtez de mettre la tête dans le sable ! Sortez-la ! D'autant que le printemps arrive et qu'il fait beau ! Acceptez que l'on construise des immeubles, pour que les gens puissent avoir un toit sur leur tête, fonder une famille et avoir un appartement digne de ce nom, dont le prix du loyer soit convenable pour tout un chacun. J'imagine que tout le monde ici a un logement dont il est content... (Brouhaha.) Madame Virginie Keller Lopez, je n'ai interrompu personne, alors ayez la gentillesse d'en faire de même ! Je suis députée comme vous, et j'ai le droit de m'exprimer autant que vous ! Par conséquent...

Le président. Il faut terminer, Madame la députée !

Mme Sandra Borgeaud. Je conclus, Monsieur le président ! Mesdames et Messieurs, je vous invite, puisque vous avez accepté le traitement en urgence de cette résolution, à la voter et à prendre acte du rapport, pour que, une fois n'est pas coutume, on puisse avancer dans nos travaux ! Merci !

M. Alain Etienne (S), rapporteur de minorité. S'agissant du PLQ Praille-Acacias-Vernets, je vous ai indiqué à quel moment se passent la concertation et la négociation. Il faudra encore voir, juridiquement parlant, comment ces PLQ «nouvelle teneur» pourront être élaborés.

Mais j'aimerais vous faire part d'une autre inquiétude que nous avons... Monsieur Mettan, écoutez bien, c'est un souci supplémentaire, mais il me semble que votre groupe, en commission, a voté le principe ! Le voici: quel est le lien avec le projet de loi 10259, qui vient d'être voté par la commission d'aménagement ? Ecoutez bien: ce projet de loi prévoit que, en dérogation de la loi générale sur les zones de développement, le Conseil d'Etat peut, après consultation du Conseil administratif ou du maire de la commune, renoncer à l'établissement d'un plan localisé de quartier si le prix d'un concours d'urbanisme et d'architecture validait un projet ! Or que risque-t-il de se passer ? Que le Conseil d'Etat - on a parlé de l'eau tout à l'heure - trouve un financier, organise un concours et, hop, vogue la galère ! Mais dites-vous bien que, dans ce cas, il ne sera pas nécessaire de demander son avis au Conseil municipal de la commune concernée: il suffira que le maire accepte pour que le projet soit réalisé ! Alors, là encore, cela pose un problème par rapport à ce qui peut se passer dans la manière de gérer le projet Praille-Acacias-Vernets.

Je ne vais pas m'exprimer - d'autres collègues l'ont fait - sur la raison pour laquelle il faut mettre l'ensemble du périmètre en zone de développement, pour éviter toute spéculation foncière... Ni sur le droit de superficie, qui a déjà été évoqué.

S'agissant de la qualité des espaces publics, nous avons demandé au Conseil d'Etat en commission comment serait financé l'aménagement de ces espaces publics. Cette question est essentielle pour les communes, parce qu'il n'est pas pensable de reporter sur ces dernières le paiement de l'ensemble de cette requalification des espaces publics. Il faudra trouver un accord entre l'Etat, les communes et le privé. En effet, si le privé souhaite un quartier avec une certaine qualité de vie, il doit pouvoir participer à ce financement !

Quant au soutien aux activités culturelles et aux logements pour étudiants, il est essentiel pour amener de la vie dans un quartier. Je ne sais pas si vous allez en ville dans les quartiers des banques mais, à 17h, c'est mort ! Il faut donc trouver des moyens de mettre de la vie dans ces quartiers.

La concertation, nous en avons parlé, est très importante. Effectivement, l'Etat n'a actuellement pas les ressources financières pour mener cette concertation à grande échelle. Nous attendons donc du Conseil d'Etat qu'il fasse ce qu'il faut pour qu'elle puisse se faire.

En conclusion, je dirai que le parti socialiste veut qu'un véritable débat s'engage. Ce débat semble escamoté, puisque le projet de loi de déclassement est déjà déposé et que nous, députés, n'avons pas pu avoir d'influence sur le dépôt de ce dernier. Le débat aura lieu lorsque le projet de loi sera soumis à notre parlement, mais - Monsieur Mettan, vous l'avez dit - on nous dira à ce moment-là que nous devons nous en tenir à nos prérogatives concernant les projets de lois de déclassement. De ce fait, une majorité de ce parlement veut accorder une fois de plus une totale liberté au Conseil d'Etat.

Je rappelle les deux points que nous voulions voir inscrits dans cette résolution: la mise en zone de développement de l'ensemble du périmètre et le principe du droit de superficie. Ces deux amendements ayant été refusés en commission, le parti socialiste vous demande de rejeter cette résolution et de vous abstenir sur le rapport divers.

M. Michel Ducret (R), rapporteur de majorité. Tout d'abord, on a l'impression ce soir que le parti démocrate-chrétien n'a pas participé aux travaux de la commission d'aménagement... C'est dommage, parce qu'il aurait pu présenter ce soir un autre rapport de minorité: cela aurait été plus logique par rapport à la position exprimée tout à l'heure par M. Mettan.

Quant à la finalité du projet PAV, M. Mettan devrait lire le rapport de majorité. Il y trouverait les réponses à ses questions - à moins qu'il ne lise aussi mal qu'il entend - et ce qui est dit à propos des campus universitaires romands ! Je ne reviendrai pas sur cet aspect des choses.

Le parti socialiste oublie, pour sa part, que les communes devront être associées à ce projet. Il semble n'avoir que peu confiance en la pérennité de sa majorité de gauche en Ville de Genève, l'un des principaux interlocuteurs pour l'avancement de ce projet PAV. En soi, c'est une bonne nouvelle, Monsieur Etienne !

Le parti socialiste croit qu'un bon artisan est un artisan bruyant... Soit ! Rions ! Aujourd'hui - on le sait - l'artisanat devient de moins en moins bruyant et cohabite de mieux en mieux, dans la plupart des cas, avec un voisinage habité, ce que prouvent tous les jours d'ailleurs des quartiers comme les Eaux-Vives, les Pâquis ou la Jonction.

Le parti socialiste imagine que le siège de l'UBS serait mieux à Champigny ou à Collex-Bossy qu'à Zurich, et qu'il ira là-bas, tout naturellement, parce que c'est plus joli... Bon ! Rions aussi ! A dénier les réalités, on ne fait que rêver, mais ce n'est pas ainsi que l'on vit, Mesdames et Messieurs.

Par contre, les problèmes légitimement soulevés par le parti socialiste ont reçu, pour la plupart, des réponses qui figurent dans le rapport.

Enfin, les socialistes pensent qu'en se réunissant autour d'une table où brûle une bougie, ils font quelque chose, alors qu'il n'y a que la bougie qui fond, Mesdames et Messieurs ! (Commentaires.)

Votre prudence de ce soir, Mesdames et Messieurs les socialistes, c'est très clairement de l'immobilisme ! En fait, par rapport à vos inquiétudes - que l'on peut comprendre et dont certaines sont légitimes - nous pouvons vous répondre ceci: allez de l'avant avec cette résolution et restez attentifs ! Soyez actifs: participez aux processus qui vont être mis en place, puisque vous y êtes invités ! Allons tous de l'avant ! Soyons positifs, avec un projet utile pour l'avenir de notre canton !

M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Au début de cette législature, le Conseil d'Etat a décidé de lancer une réflexion pour vous proposer, d'ici à la fin de la législature, le déclassement du périmètre Praille-Acacias-Vernets... Ce périmètre représente à peu près la même superficie que les Pâquis, Saint-Gervais et les Eaux-Vives réunis, soit environ 130 hectares. Et si, à la fin de la législature, vous votez le déclassement qui vous sera proposé, vous aurez voté le déclassement le plus important de l'histoire de notre canton.

Et, plutôt que de nous «contenter», entre guillemets, de vous soumettre un projet de déclassement, nous avons décidé qu'il convenait de vous permettre d'avoir un débat préliminaire - débat que vous avez eu très largement en commission pendant une dizaine de séances et que nous avons à nouveau ce soir. Alors, Monsieur Etienne, je crois que vous devez reconnaître que ce débat a lieu et qu'il n'est pas courant que, avant même de débattre d'un projet de loi de déclassement, vous puissiez vous prononcer sur les lignes directrices d'un projet d'urbanisme de ce type.

En préambule, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais, au nom du Conseil d'Etat, vous remercier pour la qualité des débats qui ont eu lieu en commission, et pour la qualité et la richesse des débats que nous avons ce soir. Je souhaite que cela débouche sur un signal fort, un vote à une très large majorité en faveur de cette résolution. J'aimerais aussi adresser mes remerciements aux rapporteurs de majorité et de minorité, pour la qualité des rapports qui ont été rendus.

Que ressort-il de ces débats ? Du point de vue du groupe PDC, ce projet n'a pas de souffle, il est peu enthousiasmant... Je ne partage pas votre avis ! Cette résolution ne vous excite peut-être pas beaucoup, Monsieur Mettan - à titre personnel, j'ai rarement été émoustillé à la lecture d'une résolution... (Rires.) - mais pourtant, ce que le Conseil d'Etat vous propose à travers celle-ci, c'est une véritable vision d'avenir pour Genève, pour notre région, et je crois au contraire qu'il y a là quelque chose de véritablement enthousiasmant.

Sans reprendre toutes les invites de la résolution, j'aimerais insister sur quatre éléments importants et novateurs dans ces propositions. Tout d'abord, la concertation. Oui, la concertation est un élément extrêmement important dans le développement de ce projet, et nous menons cette concertation actuellement à tous les niveaux. En premier lieu, ici même, puisque - fait exceptionnel - nous débattons d'un projet d'urbanisme avant même que l'on vous soumette le projet de loi de déclassement.

Ensuite, nous menons la concertation avec les communes. Trois d'entre elles sont concernées par ce périmètre: la Ville de Genève, la Ville de Lancy et la Ville de Carouge. Ces trois communes sont associées dans le comité de pilotage politique du projet, de manière à nous permettre d'avancer, en commun, après avoir débattu des grandes lignes du projet.

Autre niveau de concertation: la direction du projet rencontre régulièrement l'ensemble des milieux associatifs concernés, qu'il s'agisse des associations de locataires, ou des associations qui se préoccupent de mobilité, de culture ou d'immobilier et d'économie. Il y a donc une très large concertation qui va se poursuivre avec l'ouverture, dès le mois prochain - cela sera annoncé publiquement - d'un vaste processus participatif qui, cette fois, pourra permettre à la population de s'exprimer.

Deuxième élément important de ce projet de résolution: l'urbanisme, qui est proposé avec des points forts, puisque l'accent est mis sur l'environnement, les espaces publics et la mobilité. Ces éléments feront également l'objet d'une annonce au début du mois prochain.

Pourquoi faisons-nous tout cela, avez-vous demandé, Monsieur Mettan ? Cette question est parfaitement légitime; il faut toujours demander, lors des débats, pourquoi un sujet est mis sur la table ! La réponse me semble claire: nous voulons étendre la ville de Genève - la ville avec un «v» minuscule - la zone urbaine de notre canton, dans un périmètre qui se situe au centre de notre agglomération, pour y créer les logements dont nous avons besoin. Et ce ne sont pas 6000 logements qui sont proposés - c'était, c'est vrai, l'intention du Conseil d'Etat au début, au moment où il a déposé cette résolution - car, aujourd'hui, les projections nous amènent à proposer le double, c'est-à-dire 12 000 nouveaux logements ! Il s'agit d'une extension de la ville pour créer de nouveaux quartiers sympathiques, de qualité, avec des équipements publics emblématiques et où il fera bon vivre.

Relisez l'invite de cette résolution qui figure à la page 22 ! Elle propose de réfléchir à la création d'équipements publics emblématiques. Alors, de grâce, ne figeons pas ce que nous allons faire dans ce quartier pour les dizaines d'années à venir ! En effet, c'est sur dix, vingt, voire trente ans, que nous allons développer ces quartiers, et ce n'est pas le lieu aujourd'hui de définir si nous voulons y réaliser des établissements d'enseignement, un centre culturel, une nouvelle cathédrale, un zoo, une fontaine, des bassins ou dieu sait quoi !

Aujourd'hui, nous devons poser les bases, les grandes lignes directrices sur la façon dont nous voulons nous y prendre.

Il y aura très certainement du logement pour étudiants; il y aura des bâtiments universitaires... C'est un quartier qui se prête tout naturellement à la réalisation de bâtiments universitaires ou de HES, du simple fait de la proximité, de l'autre côté de l'Arve, d'Uni-Mail et de Sciences II notamment. Il est évident qu'il y aura une extension de ce quartier universitaire à cet endroit, mais il n'est pas nécessaire de l'indiquer dans la résolution de façon aussi précise que vous le souhaitez. D'ailleurs, en commission, nous avons eu un large débat sur cette question, et nous avons trouvé un consensus, un compromis pour intégrer la notion de formation dans l'une des invites. Il me semble que c'est largement suffisant. Aller au-delà, ce serait entrer trop dans le détail, ce serait une description trop précise de ce que nous voulons y faire, et il est trop tôt aujourd'hui pour cela.

Troisième élément que j'aimerais évoquer ici: la question de l'emploi et celle des entreprises. Il a été dit, avec raison, qu'il s'agit d'un quartier où plusieurs centaines d'entreprises sont en activité aujourd'hui, ce qui représente des milliers d'emplois, et il convient ici d'indiquer ce que nous voulons faire avec ces entreprises. La première chose, c'est que chaque entreprise aura le choix de poursuivre son activité à cet endroit, de se déplacer ailleurs dans le périmètre ou de s'installer dans un autre périmètre - que nous devrons trouver, car il est nécessaire de disposer de nouvelles zones industrielles. Ou alors - et à titre personnel, c'est ma préférence - nous allons tenter d'amener un certain nombre de ces entrepreneurs - comme l'a dit justement M. Aumeunier tout à l'heure, ce sont des personnes qui ont l'esprit d'entreprise - à participer à l'effort, au développement immobilier, et à se transformer - pourquoi pas ? - en promoteurs immobiliers. Et je peux d'ores et déjà vous dire qu'un grand nombre d'entrepreneurs présents sur le site ont envie de développer ce nouveau type d'activité pour eux, à savoir une activité de promotion immobilière.

Nous voulons par ailleurs créer de nouveaux emplois. Qui, aujourd'hui, peut nier qu'à Genève nous avons besoin de créer des emplois ? C'est probablement le problème numéro un qui se pose à nous aujourd'hui et qui va se poser à nous ces prochains mois. Or nous avons là l'occasion unique de créer de nouvelles surfaces pour attirer de nouvelles entreprises.

Enfin, Mesdames et Messieurs, nous devons bien évidemment parler du logement. Je l'ai indiqué tout à l'heure, notre ambition en termes de nouveaux logements a augmenté: elle a doublé. Nous souhaitons pouvoir offrir dans ce quartier environ 12 000 nouveaux logements. Quelles catégories de logements ? C'est une question pertinente, qui a été soulevée par le groupe socialiste en particulier, mais pas seulement, puisqu'elle a aussi été posée par toute une série d'associations, dans le cadre de l'enquête publique. Comme cela a été rappelé, environ trois quarts du périmètre sont en mains publiques... C'est déjà une garantie que de nombreux logements sociaux seront mis à disposition dans ce quartier ! Dans quelle proportion très exactement ? C'est une question - c'est vrai - qui n'est pas traitée dans la résolution, mais nous pourrons l'aborder, j'en suis persuadé, dans le cadre des débats que nous aurons prochainement à propos de la loi de déclassement. En effet, comme vous le savez, la loi de déclassement comportera deux volets: un volet géographique, avec un changement du régime des zones, qui est de la compétence du Grand Conseil, et puis un autre volet, plus administratif, plus technique, plus juridique, où nous fixerons un certain nombre de règles particulières pour le périmètre de Praille-Acacias-Vernets. C'est dans ce cadre que nous aurons tout loisir de définir des règles particulières sur la proportion de telle ou telle catégorie de logements à construire dans ce futur périmètre.

Voilà quelles sont les lignes forces spectaculaires qui sont proposées dans cette résolution, et il me paraît quelque peu injuste, non seulement à l'égard du Conseil d'Etat, mais aussi à l'égard de la commission d'aménagement et des nombreuses personnes qui travaillent sur ce projet, de prétendre qu'il manque de souffle ! Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit d'un quartier urbain du futur, dont nous serons toutes et tous fiers dans quelques années. Et en votant cette résolution, Mesdames et Messieurs les députés, vous allez en poser les premières fondations ! (Vifs applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets tout d'abord l'amendement du PDC concernant la R 566. Je vous rappelle qu'il s'agit d'une nouvelle invite, dont voici la teneur: «à proposer des solutions permettant de construire, dans le périmètre considéré, un grand nombre de logements pour les personnes en formation - HES et universités notamment - et permettant d'implanter de nouveaux bâtiments pour les HES et l'université ainsi qu'une bibliothèque».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non contre 24 oui et 7 abstentions.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je mets maintenant aux voix la proposition de résolution 566.

Mise aux voix, la résolution 566 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 73 oui contre 9 non et 2 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Résolution 566

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous n'avons pas pour habitude de voter lorsqu'il s'agit de prendre acte d'un rapport mais, puisque M. Etienne a demandé que l'on s'abstienne, je vous le soumets.

Le Grand Conseil prend acte du rapport de commission RD 763-A par 69 oui et 14 abstentions.

M 1870
Proposition de motion de Mmes et MM. Anne-Marie von Arx-Vernon, François Gillet, Fabiano Forte, Mario Cavaleri, Béatrice Hirsch, Guy Mettan, Guillaume Barazzone, Nelly Guichard, Michel Forni, Jean-Claude Ducrot, Didier Bonny, Pascal Pétroz : Demandant la création d'un fonds de secours pour aider les PME-PMI à lutter contre la crise

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en débat de catégorie II. Chaque groupe a droit à trois minutes, plus trois pour l'auteur. L'auteur désire-t-il prendre la parole ? Allez-y, Madame la députée !

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, dans cette proposition de motion le parti démocrate-chrétien sert juste de vecteur aux PME et PMI qui, vous le savez, sont extrêmement inquiètes en ce moment, car elles subissent les conséquences directes et indirectes de la crise économique. (Brouhaha.) Le problème principal qu'elles rencontrent est le manque de trésorerie, de fluidité de trésorerie, alors que leurs carnets de commande sont pleins. En effet, lorsque les clients tardent à les payer, leurs disponibilités financières en sont immédiatement affectées. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Mesdames et Messieurs les députés, vous connaissez tous des petites et moyennes entreprises qui se trouvent aujourd'hui dans cette situation. Vous savez exactement quelles sont les conséquences d'un manque de trésorerie momentané pour des PME et PMI qui sont par ailleurs saines et qui, s'il n'y avait pas cette période de crise tout à fait particulière, n'auraient pas besoin d'être dépannées ponctuellement.

Et vous savez très bien, Mesdames et Messieurs les députés, qu'une PME ou une PMI qui se trouve momentanément en difficulté et qui ne peut plus payer les salaires, les charges sociales et les fournisseurs - alors que, je le répète, ses carnets de commande sont pleins - risque de déposer le bilan très rapidement: en trois, quatre, six mois ! C'est très rapide !

Mesdames et Messieurs les députés, ce soir le parti démocrate-chrétien vous demande de bien vouloir accepter cette motion et de la renvoyer à la commission de l'économie où elle pourra être étudiée... (L'oratrice est interpellée par un conseiller d'Etat.) Oui, en commission, c'est ce que je viens de dire, Monsieur le conseiller d'Etat ! Mesdames et Messieurs, nous vous demandons donc de bien vouloir la renvoyer à la commission de l'économie, où elle sera examinée avec l'excellente résolution, issue du parti radical, qui est actuellement à l'étude. Nous nous permettons de vous prier de prendre vraiment très au sérieux cet appel au secours de nombreuses PME-PMI qui, j'insiste, sont saines, mais qui peuvent avoir besoin d'une aide ponctuelle. Il faudra encore examiner la manière d'apporter cette aide. (Brouhaha.) Nous avons évoqué des pistes...

Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît !

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von. ...en parlant de la Fondation d'aide aux entreprises, en parlant de la Banque cantonale, mais nous savons qu'il y a d'autres pistes que le Conseil d'Etat ne manquera pas de nous indiquer.

Je vous remercie donc de faire bon accueil à cette proposition de motion et de la renvoyer à la commission de l'économie.

M. Jacques Jeannerat (R). Les considérants de cette motion sont logiques et bien fondés, et la crise exige des réponses urgentes à ces considérants.

Il faut toutefois relever que les invites doivent être étudiées très attentivement, et je suis d'accord avec Mme von Arx qu'il faut renvoyer cette motion en commission, car des questions se posent. La première interrogation est la suivante: quel est le véritable degré de tarissement des crédits aux entreprises à Genève ?

Deuxième question importante: l'indépendance de fonctionnement opérationnelle de la Banque cantonale est-elle préservée avec les invites que nous propose le parti démocrate-chrétien ? C'est une question à laquelle il faudra répondre en commission de l'économie.

Et, enfin, troisième question: peut-on, sur le plan législatif, exiger que la BCGe alimente un fonds tel que prévu par la motion ? C'est une question à laquelle nous devrons également répondre en commission.

Les radicaux suivent donc les démocrates-chrétiens en demandant le renvoi de cette motion en commission.

M. Renaud Gautier (L). L'essentiel de cette proposition de motion tient dans la phrase suivante, qui figure en page 4: «Les délais de paiements, principale conséquence de la crise, rendent généralement la vie dure aux entrepreneurs qui, après avoir épuisé leurs réserves, peinent à assurer les salaires et autres frais généraux.»

Ce sujet est déjà débattu à la commission de l'économie, et l'un des problèmes que nous avons évoqué est la lenteur avec laquelle l'Etat paie ses factures. Un certain nombre de mesures sont en train d'être prises, et il est par conséquent inutile de dupliquer le travail qui se fait déjà dans cette commission. Pour cette raison, nous suggérons de laisser cette motion là où elle est et de ne pas la renvoyer en commission !

M. Pierre Weiss (L). Lorsque l'on dépose un objet, il faut évidemment s'assurer, par prudence, qu'il convient à ceux au nom de qui l'on est supposé agir. Or, dans ce cas, on veut en quelque sorte imposer à une entreprise une nouvelle charge - je ne dirai pas qu'on la prend «en otage» - sans nécessairement se soucier des effets que cela peut avoir sur sa situation. A mon avis, autant les considérants sont pertinents pour l'essentiel, autant la deuxième invite pose un certain nombre de problèmes, qui ont été rappelés par mon collègue Jeannerat.

Par conséquent, la commission de l'économie - pour autant qu'elle se voie confier l'étude de cette motion - devra faire bien attention à ne pas générer un effet contre-productif et, qui plus est, à prendre en considération la législation existante. Rappelez-vous la peine que nous avons eue, Monsieur le président, à sortir cette banque des affres dans lesquelles elle était plongée ! Ce n'est probablement pas le moment aujourd'hui de lui imposer des charges qui rappelleraient le passé !

Voilà la raison pour laquelle, Monsieur le président, je suggère de faire preuve à la fois de compréhension sur le fond et de prudence sur la forme face à cette motion.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Cuendet, vous avez une minute !

M. Edouard Cuendet (L). Merci, Monsieur le président. Cette proposition de motion pose un problème légal. En effet, elle veut au fond imposer à la Banque cantonale des obligations qui ne sont pas conformes à son statut de banque surveillée par l'Autorité de surveillance des banques, et donner des droits d'ingérence à l'un des actionnaires. Il y a par conséquent un risque juridique majeur que d'autres actionnaires - car il y en a 8500 - s'opposent, par la voie judiciaire, à ces mesures. Je vous recommande donc de ne pas entrer en matière sur cette motion, qui pose des problèmes légaux fondamentaux et qui met en péril la liberté opérationnelle de la Banque cantonale. Nous savons les dégâts que cela a causés, il y a quelques années, et qui ont coûté plus de 2 milliards au canton ! C'est reprendre un exercice tout à fait irresponsable ! Par conséquent, je vous invite à ne pas mettre un danger de plus sur la place financière genevoise, et à ne pas entrer en matière sur cette motion.

M. Roger Deneys (S). Je vais compléter les propos de M. Cuendet: en l'occurrence, je pense que la Banque cantonale de Genève n'est pas la seule à avoir connu des malheurs ces derniers temps ! Il semble que certaines banques privées, dont le canton de Genève n'était pas actionnaire, ont aussi connu quelques difficultés.

Pour le reste, j'aimerais ajouter que les difficultés de la Banque cantonale de l'époque avaient aussi une certaine connotation politique, et il me semble que le parti auteur de cette motion n'était pas complètement étranger à la gestion de cette Banque cantonale et aux déboires qu'elle a connus à l'époque. (Rires.) Alors j'espère que cela ne se renouvellera pas !

Plus sérieusement, en tant que patron d'une petite entreprise, je pense qu'il est fondamental, en période de crise, de garantir autant que possible aux PME l'accès à des liquidités. Et, Monsieur Cuendet, je ne suis pas d'accord avec vous en ce qui concerne la première invite: je trouve qu'elle mérite d'être discutée. Cette invite demande de prendre des mesures urgentes pour créer un fonds de soutien aux PME-PMI et ne parle pas de la Banque cantonale. Je pense que, sur cette piste-là, nous pouvons certainement rassembler une large majorité, et c'est pour cela que je vous invite également à renvoyer cette motion à la commission de l'économie.

Bien entendu, la deuxième invite pose différents problèmes: la question de la légalité, celle des garanties... Heureusement - en tout cas en Suisse - les banques sont soumises à certains principes de garantie avant de prêter de l'argent ou de le mettre à la disposition d'entreprises. Ce n'est pas toujours facile pour les PME-PMI, mais il faut évidemment maintenir ce mode de faire !

Je vous invite donc à renvoyer cette motion à la commission de l'économie.

M. Damien Sidler (Ve). Il émane de cette proposition de motion du PDC une volonté de bien faire, on peut le relever. Toutefois, comme cela a été indiqué par plusieurs d'entre nous, la deuxième invite pose de sérieux problèmes au niveau de sa compatibilité avec le droit et en termes d'ingérence dans les affaires de la banque. A cet égard, il faut absolument éviter de répéter les erreurs du passé !

Je vous propose donc de renvoyer cette motion à la commission de l'économie, pour l'étudier dans le calme et prendre le temps de la réflexion.

M. Philippe Guénat (UDC). En lisant cette proposition de motion, on réalise non seulement que certaines personnes ou partis politiques ont la mémoire courte, mais aussi que l'histoire se répète. En effet, nous sommes encore en train d'éponger les milliards de pertes laissés par la précédente direction, il y a juste dix ans! On avait beaucoup reproché à la BCGe de l'époque que sa direction était sous le joug de certains politiciens, surtout proches du PDC. Les derniers jugements concernant la cacade de la BCGe ont été rendus il n'y a pas si longtemps, et voilà que ce même parti nous demande aujourd'hui, sans sourciller, d'obliger la BCGe à mettre à disposition des fonds pour des entreprises rencontrant des difficultés financières !

Les initiants du PDC ont-ils réalisé que cette banque, après tout ce qu'on lui a reproché, allait investir l'argent de ses 9000 actionnaires et, surtout, de ses épargnants - pour la plupart des Genevois - à fonds perdus dans des sociétés qui, malheureusement, risquent bien de partir en faillite ? Non, ce n'est pas sérieux ! Du reste, les statuts, comme M. Cuendet l'a évoqué, lui interdisent d'engager de l'argent dans des opérations à hauts risques préalablement identifiés. Par conséquent, je dirai que cette motion est dangereuse, parce que vous n'avez pas pensé aux risques qu'une telle proposition allait faire courir à la banque au niveau de son «rating», alors qu'elle vient d'obtenir, juste maintenant en décembre, un A suite à un très dur labeur de sa nouvelle direction - que je tiens à féliciter par ailleurs. En effet, obtenir un «rating A» permet à la banque d'emprunter de l'argent sur le marché international pour le prêter, précisément, aux PME genevoises. Je suis moi-même chef d'entreprise et je suis aussi confronté à de réels problèmes de trésorerie, et je peux vous assurer que la situation économique de notre canton est très préoccupante: nous n'avons encore rien vu par rapport à ce qui va se passer cet automne ! Toutefois, au nom des épargnants et de toutes les banques, quelles qu'elles soient, jamais je n'accepterai de voir mes économies vilipendées pour des projets risqués, fût-ce pour faire plaisir au PDC !

Monsieur le président, ce dont les entreprises ont besoin aujourd'hui, c'est de commandes et de clients ! Mais ce problème n'est pas abordé par cette motion...

La première invite mérite effectivement d'être approfondie, et je suggère à M. Jeannerat, qui est en train de travailler sur une résolution à la commission de l'économie, de l'inclure dans cette dernière afin d'étoffer le projet - puisque nous y parlons de l'aide aux entreprises et de la sauvegarde de la culture genevoise - et de la traiter à ce moment-là.

En conclusion, Monsieur le président, les députés UDC de ce Grand Conseil refuseront énergiquement cette dangereuse motion.

M. Guy Mettan (PDC). Je suis étonné par les propos de certains députés dans cette enceinte, mais je constate en tout cas qu'ils ont bien lu la note transmise par la Banque cantonale expliquant pourquoi il ne fallait pas entrer en matière sur notre projet ! D'ailleurs, certains ont cité la note telle quelle, je l'ai sous les yeux.

Je vais essayer de vous convaincre du contraire, et je suis aussi surpris d'entendre certains propos dans la bouche des libéraux. En effet, il ne faut quand même pas oublier que, ces six derniers mois, l'ensemble des banques ont perdu - ont «craché» - des milliards et des milliards de francs dans des actions pourries et dans des crédits pourris. Et maintenant, lorsqu'on demande à notre Banque cantonale - qui vient de recevoir un milliard d'argent frais, selon les déclarations de M. Goetschin à la commission de l'économie, un milliard dont elle ne sait que faire, puisque personne ne veut emprunter d'argent et que les taux sont à zéro - d'affecter 25 misérables millions, ce qui ne représente même pas un quarantième du milliard qui vient de rentrer, pour aider nos PME - ce qui correspond d'ailleurs exactement à la mission de cette banque - eh bien on nous le refuse ! Mais nous n'avons jamais indiqué dans notre motion qu'il fallait aider des entreprises pourries ! Nous demandons d'aider les PME genevoises qui se portent bien, mais qui ont des problèmes de trésorerie: c'est tout !

De plus, avec ce que vous nous proposez ce soir, que prépare-t-on ? Le fameux «credit crunch» ! Plus aucune banque ne prête: en effet, les banques ont prêté n'importe quoi, n'importe comment à n'importe qui, et maintenant elles n'osent plus sortir un franc de leur caisse et ne veulent plus prêter aux PME, qui forment le tissu économique, la richesse de notre canton, et qui offrent l'essentiel des emplois !

Nous, nous demandons juste d'élargir quelque peu le champ des possibilités et de ne pas rester figés sur le passé, comme toujours. La Banque cantonale a perdu des milliards... Mais les 25 millions que nous demandons ne représentent même pas les provisions que la banque doit faire sur les risques de change ! Ce ne sont même pas les provisions qu'elle a dû faire - nous allons, je pense, examiner ses comptes la semaine prochaine ou la semaine suivante - sur la baisse des «assets» ! Donc ce n'est rien du tout ! Mais ce n'est pas possible, parce qu'on ne veut pas aider nos PME et nos PMI. En outre, nous n'avons jamais dit qu'il fallait prêter de l'argent à des PME genevoises pourries ! Celles dont nous parlons ne sont pas pourries: elles sont saines, mais elles ont un problème de trésorerie ponctuel. Cela dit, si vous n'entrez pas en matière sur cette proposition, elles iront mal, mais à ce moment-là ce sera trop tard pour venir pleurer ! (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Eric Stauffer (MCG). Je suis quand même très surpris du discours du PDC... (Exclamations.) Monsieur Mettan, je suis désolé, mais si vous dites que nos PME se portent bien, eh bien elles n'ont qu'à se rendre dans une banque avec leur bilan, leurs carnets de commande, et demander un relais de trésorerie ! Je ne vois pas quelle banque ne leur prêterait pas ! Même l'UBS prêterait de l'argent, elle qui vient d'engranger 60 milliards, justement pour résorber les conséquences des subprimes aux Etats-Unis !

Je ne comprends vraiment pas votre démarche: si vous voulez aider les PME, commencez par supprimer la taxe professionnelle et baisser la fiscalité des entreprises ! Ça, ça donnerait de l'oxygène aux entreprises et les rendrait plus dynamiques ! Et si vous voulez aller encore plus loin, eh bien reprenez tout le fatras administratif auquel sont confrontées les PME et simplifiez-le: vous verrez que les PME vont croître et être beaucoup plus dynamiques. Cela créerait vraiment un appel d'air ! Mais vous, ce que vous proposez, ce n'est ni plus ni moins qu'un «Etat-maman» qui banque en cas de problème ! C'est super, sauf que ce n'est pas le rôle de l'Etat, je suis navré de vous le dire ! Je le répète, il faut être sérieux.

Vous vous êtes opposés auparavant à une augmentation de 50 francs des allocations familiales, et vous venez nous proposer maintenant une mesure qui n'a aucune base légale et, surtout, qui n'est pas du tout cohérente ! Si votre motion proposait d'encourager les PME en abaissant la fiscalité, les taxes, etc., je comprendrais, parce que cela donnerait un signal fort ! Mais le message que vous faites passer avec votre motion, c'est que les banques ne font plus leur job et que l'Etat doit financer ! Alors à ce moment-là élaborez un projet de loi pour nationaliser toutes les entreprises de Genève, comme ça nous n'aurons plus de problème ! Au moins, au niveau trésorerie, tout roulera dans le meilleur des mondes ! Ainsi, vous rejoindrez le parti socialiste, dont vous êtes de plus en plus proches ! Pour faire comme dans le bloc de l'Union soviétique... (Exclamations.) ...avec une marque de savon, une marque de shampooing, et je pense que nous aurons bouclé la boucle ! J'insiste: il faut être sérieux.

Et puis, si je peux me permettre de donner un petit conseil, très modestement et très humblement: il me semble - je n'en suis pas sûr - que le conseiller d'Etat PDC de votre parti est le ministre de l'économie... Alors, avant de déposer des textes aussi farfelus que celui-ci, vous auriez dû consulter Pierre-François Unger, éminent conseiller d'Etat: il aurait peut-être pu vous éclairer et vous donner quelques sages indications pour votre motion ! (Exclamations.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Velasco, à qui il reste une minute vingt.

M. Alberto Velasco (S). Merci, Monsieur le président. Je pense que cette proposition n'est pas adéquate pour les raisons qui ont été exposées ici mais, malgré tout, il faut prendre cette motion extrêmement au sérieux parce que, dans un proche avenir, nombre de petites entreprises qui font la richesse de ce canton vont être endettées ! Elles vont être endettées ! Par conséquent, j'appelle le Conseil d'Etat à mettre en oeuvre un plan de désendettement à moyen et long terme, car cela va s'avérer nécessaire ! C'est vrai que ce n'est pas le rôle de la Banque cantonale d'alimenter ce fonds, Mesdames et Messieurs du PDC: c'est celui des autorités publiques. Sur ce point, on ne peut pas être d'accord avec vous ! La Banque cantonale, qui a enregistré d'excellents résultats, doit payer des impôts à l'Etat. Mais, Mesdames et Messieurs les députés, que vous demandiez aux collectivités publiques d'alimenter un fonds pour faire en sorte, justement, que ces entreprises ne tombent pas en faillite, ça, c'est une autre chose ! C'est pour cela que les socialistes pensent que la deuxième invite pose un problème.

Néanmoins, Mesdames et Messieurs les députés, le problème que soulèvent ici les députés du PDC est réel: les petites et moyennes entreprises vont au-devant de difficultés que nous devons prendre très au sérieux.

M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Cette motion pose effectivement deux questions qui sont d'apparence complémentaire, mais qui sont en réalité très différentes l'une de l'autre.

La première question concerne l'aide aux entreprises, notamment les petites et moyennes entreprises, petites et moyennes industries. C'est une question clé, à l'heure actuelle, puisque nombre de ces entreprises sont au bord de la faillite en raison d'un manque de trésorerie. Et, contrairement à ce que vous avez dit, Monsieur le député, ce sont des entreprises saines, qui ont souvent effectué le travail pour lequel elles n'arrivent pas à se faire payer, par effet boule de neige de tous ceux qui ne paient pas dans les délais... (Remarque.) Dont l'Etat ! C'est avoué, et l'on en discute à la commission de l'économie ! Vous ne nous prendrez pas en défaut sur ce point: on a d'ailleurs identifié quelques-uns des endroits où cela peut coincer, notamment le rôle important des mandataires auxquels des factures sont envoyées et qui mettent des semaines à les vérifier, pour que l'on puisse ensuite libérer l'argent.

Il y en a donc pour tout le monde, mais il faudra examiner ces éléments de près. Il n'en reste pas moins que ce problème est réel et bien concret !

Nous avons un peu plus de trente structures à Genève qui peuvent aider les entreprises, mais l'une d'entre elles est particulièrement performante, à savoir la Fondation d'aide aux entreprises - FAE - car elle peut apporter une aide multiple: sur le plan financier, par du coaching ou en prenant des participations - ce qui peut être important au moment de la transmission, par exemple, d'une entreprise vendue dans une période de difficulté et à qui il faut injecter un peu d'argent à ce moment-là.

Je vous soumettrai un projet de loi dans dix jours, je l'espère, après l'approbation de mes collègues du Conseil d'Etat... (L'orateur est interpellé par un autre membre du Conseil d'Etat.) Elle m'est acquise, voyez-vous ! (Rires.) A deux, nous représentons une large majorité ! Je vous présenterai, disais-je, un projet de loi modifiant le financement de la Fondation d'aide aux entreprises. Elle est en effet de loin la plus rapide, en termes de réactivité, et elle pourrait même, le cas échéant - mais j'aimerais bien que l'on n'en arrive pas là ! - prendre le relais des paiements en retard des mandataires, pour verser l'argent dû à ceux qui ont fourni une prestation. Mais on pourrait espérer que les mandataires fassent aussi diligence puisque, soi-disant, ce sont des professionnels qualifiés.

Le deuxième volet de votre motion me pose un problème plus sérieux. Pour ma part, je n'ai pas reçu de courrier de la Banque cantonale de Genève. Je ne sais pas s'il faut la forcer, ou pas, à faire des choses de quelque nature que ce soit... Ce que j'ai voulu faire avec la Fondation d'aide aux entreprises - et il y a eu plusieurs réunions à ce sujet - c'est précisément enlever une sorte d'exclusivité à l'une des banques comme étant une banque de relais caution après analyse de la FAE. Et, dans la pratique, on observe que d'autres grandes banques commerciales sont très réactives et fonctionnent finalement très bien avec la Fondation d'aide aux entreprises, comme c'est d'ailleurs aussi le cas de la BCGe dans certaines conditions. Je trouverais au fond extrêmement dommage, au-delà de toute considération légale, que l'on enlève la concurrence entre ces banques commerciales, qui doivent séduire aussi les PME. En effet, un jour il faudra bien reconstruire - et reconstruire avec toutes les banques - la circulation financière, suite au trouble de cette dernière qui est la conséquence principale de la crise financière, et donc de la crise économique.

C'est la raison pour laquelle je vous proposerai probablement en commission d'abandonner cette deuxième invite, quitte à la remplacer en donnant de l'importance au dialogue entre le gouvernement et l'ensemble des institutions bancaires de crédit, avec lesquelles nous savons pouvoir travailler à l'heure actuelle. Je vous remercie donc de renvoyer ce projet en commission.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi de la proposition de motion 1870 à la commission de l'économie.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1870 à la commission de l'économie est adopté par 38 oui contre 29 non.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je lève la séance et vous donne rendez-vous demain. Le programme est le suivant: à 15h, nous traiterons les extraits, de 16h à 19h, l'ordre du jour bleu et, à 20h30, nous étudierons la dernière urgence. Merci, bonne nuit à toutes et à tous, et à demain !

La séance est levée à 23h05.