Séance du
vendredi 19 septembre 2008 à
20h45
56e
législature -
3e
année -
11e
session -
66e
séance
PL 10306-A
Premier débat
M. David Amsler (L), rapporteur. Après le repas, l'assistance est un peu clairsemée... Le sujet que nous examinons est néanmoins intéressant, puisqu'il s'agit de l'achat par l'Etat de Genève des bâtiments sis sur les parcelles n° 2177 et 2179 de la commune d'Onex. En préambule, je relève qu'il n'y a pas de rapporteur de minorité, puisque ce projet de loi a fait l'objet d'un vote à l'unanimité de la commission des travaux. En fait, il a été retiré des extraits au début de la séance précédente et certains députés ont cru qu'il s'agissait du vote du projet, puisque l'urgence avait été demandée par le Conseil d'Etat. En réalité, c'était un vote pour sortir ce projet de loi des extraits, d'où ma présence ce soir pour vous le présenter.
De quoi s'agit-il ? Ce sont deux bâtiments loués par l'Etat de Genève. On lit dans l'exposé des motifs que l'Etat de Genève loue ces deux bâtiments pour un montant de 2 594 652 F par année. Pour une valeur de bâtiment de 40 928 600 F - qui est un peu inférieure au montant au projet de loi, puisqu'il y a probablement des frais d'acquisition - on voit, si l'on fait un rapide calcul, que le rendement brut de ce projet est d'environ 6,4% pour le propriétaire actuel du bâtiment. Après déduction des charges d'environ 1,4% pour un bâtiment neuf, il reste un rendement net de cette location pour le propriétaire d'environ 5%. La commission a jugé que c'était un bon investissement pour l'Etat de Genève, puisque la dette coûte entre 2 et 2,5% à l'Etat. Avec 5% de rendement net d'un côté, entre 2 et 2,5% de l'autre, le calcul est vite fait. C'est pourquoi la commission, à l'unanimité, a voté en faveur de cet achat.
Je me suis quand même un peu renseigné afin de savoir pourquoi un groupe avait demandé de retirer ce projet de loi des extraits en vue d'un débat. Effectivement, on peut se demander comment cet achat a été couvert par la trésorerie de l'Etat, puisqu'il n'était probablement pas inscrit aux investissements, étant donné que l'Etat exerçait un droit d'emption sur ces bâtiments. Sans avoir plus de détails, la commission a jugé que ce qui comptait, c'était la rentabilité de l'investissement. Et puis, nous faisons confiance au Conseil d'Etat pour couvrir cet achat par les investissements prévus en 2008.
Encore une chose sur le PPP - partenariat public-privé - puisque ce projet s'y apparente: il a été financé par des privés et loué par l'Etat. C'est ce que j'appellerai en quelque sorte un «avorton» de PPP, puisqu'en cours de partenariat public-privé l'Etat rachète le bien. Je crois que l'on ne peut que souligner la sagesse du Conseil d'Etat de l'époque d'avoir inscrit ce droit d'emption dans le bail ou en annexe du bail qu'il signait avec le propriétaire. Je pense que le Conseil d'Etat avait préféré louer ce bâtiment, puisque les rentrées de l'Etat étaient faibles ou même déficitaires pendant ces années-là. Aujourd'hui, je pense que l'Etat est dans une meilleure situation et qu'il était sain d'inscrire ce droit d'emption pour que l'Etat puisse acquérir ces bâtiments et procéder à un bon investissement.
Voilà, Madame la présidente, les raisons qui ont fait que la commission a voté à l'unanimité ce projet de loi, et je me réjouis d'entendre l'intervention de ceux qui ont demandé de le retirer des extraits.
M. Mario Cavaleri (PDC). Je voulais me joindre aux félicitations et remerciements qu'a exprimés M. Amsler, rapporteur de la commission des travaux, s'agissant du droit d'emption. Je crois qu'il faut relever que l'administration effectue très bien son travail - et c'est l'occasion de saluer cela - parce que, si cette clause n'avait pas été introduite dans le contrat de bail à loyer, nous n'aurions effectivement pas la possibilité d'acquérir un bâtiment à des conditions très intéressantes. Et je veux ici saluer la mémoire de feu M. Béat Vuagniaux, qui a négocié ce contrat dont on voit que la République va pouvoir bénéficier.
M. Olivier Wasmer (UDC). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, j'étais membre de cette commission, qui, à l'unanimité, a voté ce projet de loi. Or mon groupe n'était pas tout à fait d'accord pour une chose. Comme l'a très bien expliqué le rapporteur, le prix d'acquisition, les amortissements et les intérêts coûteront de toute façon moins cher que le prix de la location. Ce n'était donc pas tellement la vente de cet immeuble à l'Etat, mais la politique du fait accompli, que l'UDC entend à nouveau dénoncer. En effet, ce droit d'emption était prévu dans le contrat de bail il y a déjà plus de deux ans... Il y a déjà plus de deux ans que la commission des travaux s'est intéressée à ces bâtiments pour l'office cantonal de la population. Et l'on nous dit simplement après deux ans, soit à peine deux mois avant l'échéance de ce droit d'emption, qu'il faut malheureusement voter cela en urgence, et sans que ce montant de 40 millions de francs - c'est là que le bât blesse - ait été budgété dans les comptes de 2008 ! L'UDC s'insurge contre ce procédé, car il voit qu'une fois de plus l'Etat nous met devant le fait accompli et ne tient absolument pas compte de l'avis des commissaires.
Je remercie M. Amsler de son très bon rapport, lequel reflète l'esprit ayant prévalu en commission. Il faut savoir que c'était une très bonne acquisition pour l'Etat, pour lui épargner de devoir payer des loyers, ce d'autant que le prix d'achat me semble encore raisonnable aujourd'hui par rapport à ce qu'il pourrait être d'ici à une année. Par contre, l'UDC déplore, une fois de plus, que le Grand Conseil et les citoyens soient mis devant le fait accompli.
M. Gilbert Catelain (UDC). Le rapporteur, M. Amsler, a bien expliqué l'enjeu de ce projet de loi et l'intérêt financier qu'il y avait à acheter. J'aimerais ajouter une précision. L'analyse de la situation actuelle se base sur une estimation valable en 2008, qui ne le sera peut-être pas en 2010, 2015 ou 2020... En effet, on peut très bien imaginer une situation toute différente d'ici à cinq ou dix ans. On le voit très bien actuellement dans le milieu financier: les actions UBS qui atteignaient des sommets il y a encore deux ans ne valent plus pipette aujourd'hui !
Se pose la question de la cohérence quant à la prise de position de nombreux commissaires de cette enceinte. Je crois que le parti radical avait déposé une motion sur le partenariat public-privé - le PPP - qui s'appliquerait très bien dans un canton comme Genève, particulièrement endetté. Or je me demande si cela vaut le coup de s'endetter de 40 millions de francs supplémentaires, ce qui va encore plomber notre cotation bancaire au niveau des emprunts. Finalement, ne devrions-nous pas avoir une ligne de conduite ? Soit nous privilégions le partenariat public-privé - et à ce moment-là, nous n'achetons plus, parce que nous avons un contrat qui indique: «Nous payons 5% par année, et dans cinquante ans le bâtiment est à vous», soit nous achetons aujourd'hui.
Donc, ce parlement n'est pas très clair au niveau de la politique d'investissement. Sommes-nous favorables à l'achat ? A ce moment-là, nous le disons, et nous ne renvoyons pas des motions au Conseil d'Etat pour signaler que nous sommes en faveur du partenariat public-privé ! Ou alors, nous sommes pour le partenariat public-privé !
Sur cet objet, par rapport à toute notre discussion de ces derniers mois, par rapport aussi à l'engagement du département des constructions et des technologies de l'information - lequel s'est engagé à aller de l'avant dans ce partenariat public-privé et à nous présenter un premier projet - je pense que, typiquement, celui-là ne doit plus en être un. Là, il n'y avait aucun enjeu politique, cela aurait pu faire l'objet d'un contrat de partenariat public-privé. Et pour cette raison-là, à titre personnel, je m'abstiendrai.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Comme mes préopinants l'ont signalé, nous étions - et nous sommes toujours - unanimes concernant l'achat de cet objet. J'aimerais seulement relever qu'ici le partenariat public-privé est effectivement de très court terme. C'est vrai que sur cet objet loué en totalité par l'Etat de Genève est suspendue une épée de Damoclès: vu le délai de préemption très court, si un autre amateur, un éventuel propriétaire, se profile à l'horizon, l'inflation peut aussi être à la clé. Surtout dans ce quartier. Je pense que le partenariat public-privé a joué, on va dire, en faveur du propriétaire, étant donné que ce partenariat est de très court terme et qu'il existait peut-être déjà les plans localisés de quartier. Sur un quartier qui se développe !
Je crois qu'on n'avait pas le choix en décidant d'acheter cet objet, et aujourd'hui je vous recommande de l'accepter.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai beaucoup apprécié que M. le rapporteur loue la sagesse du Conseil d'Etat d'alors, parce que cette fameuse clause de préemption, c'est moi qui l'avais demandée à l'époque, avec, il est vrai, la collaboration précieuse de M. Béat Vuagniaux, que nous regrettons tous.
Je regrette aussi que l'urgence nous ait conduits à vous présenter ce projet très rapidement, il aurait été préférable qu'on le fasse avant. Ce sont des erreurs qui se produisent, je vous prie de ne pas nous en tenir rigueur. C'est manifestement - et vous l'avez compris par votre vote en commission - une bonne affaire pour l'Etat de Genève. Je vous demande par conséquent d'accepter ce projet de loi. (Brouhaha.)
Le partenariat public-privé, c'est plus compliqué qu'il n'y paraît, car vous soulagez le compte de fonctionnement à un moment donné, pour l'alourdir les années qui suivent... Et comme, forcément, ce genre d'exercices ne sont pas gratuits, si vous faites le calcul total il y a des objets sur lesquels cela peut se concevoir et d'autres où c'est une assez mauvaise affaire. Nous ne sommes pas là pour refaire le monde en matière de financement, mais pour acquérir un immeuble qui rend les services que l'on attendait et qui aujourd'hui - ou plus exactement aussitôt après votre vote - rendra les mêmes services à l'Etat de Genève, et surtout aux administrés, pour beaucoup moins cher qu'aujourd'hui !
La présidente. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Monsieur Gautier, avez-vous demandé la parole ? Je crois que c'est une erreur... (Commentaires.) Est-ce une erreur ?
M. Renaud Gautier. Oui, bien sûr, Madame la présidente.
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant ainsi plus demandée, nous allons nous prononcer sur ce projet de loi. Auparavant, je remercie M. Amsler, qui a dû rédiger son rapport dans un délai très bref.
Mis aux voix, le projet de loi 10306 est adopté en premier débat par 53 oui et 7 abstentions.
La loi 10306 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10306 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 50 oui et 7 abstentions.