Séance du
jeudi 18 septembre 2008 à
17h
56e
législature -
3e
année -
11e
session -
62e
séance
GR 479-A
Mme Virginie Keller (S), rapporteuse. Je vais vous présenter le cas de M. D., né en 1981 - il a donc 27 ans aujourd'hui - d'origine albanaise, célibataire et sans enfants. Il a suivi l'école obligatoire dans son pays mais n'a pas de formation professionnelle particulière. Il a quitté l'Albanie à l'âge de 17 ans, puis a résidé dans plusieurs pays d'Europe, notamment en Italie et en Belgique, avant de venir en Suisse. Reparti ensuite en Italie, il a trouvé un travail d'installateur en ascenseurs, réalisant ainsi un salaire mensuel de 1500 euros. Il a été extradé d'Italie en Suisse en janvier 2007 et est détenu depuis lors en Suisse. M. D. a été condamné le 19 février 2008 par le tribunal à une peine privative de liberté de cinq ans pour infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants. Au moment de son arrestation, il avait déjà effectué une détention préventive d'un an et vingt et un jours, il lui restait donc au moment de sa condamnation un solde de trois ans, onze mois et neuf jours à purger. Les deux tiers de la peine seront atteints le 27 mai 2010, et il pourra alors bénéficier d'une éventuelle libération conditionnelle. Sa libération est prévue pour le 27 janvier 2012.
La demande de grâce qu'a déposée M. D. est justifiée ainsi: il souhaite rentrer en Albanie au plus vite afin d'assumer l'entretien de sa famille, notamment de ses parents âgés, d'un frère et d'une soeur, qui ne semblent pas pouvoir subvenir à leurs besoins. Du reste, il avait amené lors du procès les justificatifs prouvant qu'il versait effectivement régulièrement de l'argent en Albanie afin de subvenir aux besoins de sa famille. Cependant, dans son recours en grâce, il n'expose aucun élément nouveau qui aurait pu permettre à la commission de grâce de statuer en sa faveur.
C'est à un vrai roman policier que ressemble l'instruction du dossier de M. D. et de celui, datant de 2004, de trois autres personnes qui ont été jugées à Genève. A cette époque, ces dernières ont dénoncé M. D. pour avoir fait partie d'un réseau de trafiquants d'héroïne, pour lequel elles avaient identifié M. D. comme ayant acheté et revendu deux fois trois kilos d'héroïne. A ce moment-là, si vous vous souvenez bien, M. D. était parti en Italie.
Ce qui est assez troublant dans ce dossier, c'est que M. D. avait un casier judiciaire vierge et que, depuis 2004, il travaille tout à fait régulièrement, légalement et sagement en Italie et entretient sa famille. La commission s'est donc évidemment demandé s'il fallait entrer en matière sur cette demande de grâce. Certains ont été quelque peu interpellés par le fait que M. D. semble être revenu dans le droit chemin depuis cette affaire de 2004 mais, néanmoins, la commission a estimé qu'elle ne possédait pas d'éléments nouveaux suffisamment clairs pour pouvoir se prononcer sur cette demande de grâce. De plus, étant donné qu'on ne pouvait pas juger à nouveau, qu'on statuait sur un cas de vente de drogue aggravé par le fait que la personne n'est pas toxicomane et qu'elle a appartenu, semble-t-il, à ce réseau, il nous a semblé qu'il n'était pas possible d'entrer en matière sur le recours en grâce. Par conséquent, la commission a statué à l'unanimité, je crois - je regarde M. Constant parce que... Oui, c'est bien à l'unanimité que la commission a voté contre cette demande de grâce.
Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet de la grâce) est adopté par 59 oui (unanimité des votants).