Séance du
vendredi 14 mars 2008 à
17h
56e
législature -
3e
année -
6e
session -
31e
séance
PL 9513-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
M. David Amsler (L), rapporteur de majorité. Nous étudions ce soir simultanément les PL 9513 et PL 9966. Vous verrez dans le document que vous avez reçu que, si ces deux dossiers sont traités par deux projets de lois différents, ils ne font en revanche l'objet que d'un seul acte de vente, raison pour laquelle il n'y a qu'un seul rapport.
La commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève a siégé à huit reprises pour traiter de ces deux objets. Vous avez vu dans le rapport de majorité que la commission a d'abord été saisie des dossiers le 26 mai 2004, puis le 8 septembre 2004. Lors de ces deux séances, il n'a été question d'analyser qu'un des deux projets de lois, le 9513, qui concernait les Halles de Carouge. Puis, la commission a été saisie d'un autre projet de loi, relatif à un immeuble de charme situé à côté de ces halles, qu'elle a examiné le 20 septembre et le 11 octobre 2006. Lors de ces séances, la commission a validé les prix de vente de ces deux objets.
Cette année, la commission a de nouveau siégé à trois reprises pour analyser ces deux projets de lois, d'où la difficulté de suivre le fil de cette opération. Le 16 janvier 2008 tout d'abord, la fondation nous a informés qu'un acte de vente reliant les deux objets avait été signé, avec une vente en bloc. Cette dernière nous a aussi bien expliqué les difficultés qu'elle avait eues à mettre en valeur et à réaliser ce gage.
Le 6 février 2008, la commission s'est rendue sur place pour se rendre compte de l'état de ces deux bâtiments et se faire une idée in situ de ces deux projets de lois. Finalement, ce n'est que le 20 février, puis le 5 mars 2008, que la commission a validé ces ventes.
Je profite de ce rapide historique pour ajouter que la commune de Carouge a été sollicitée à plusieurs reprises afin d'indiquer si l'achat de ces deux objets l'intéressait. Cette dernière a renoncé à faire valoir son droit de préemption et, même, à formaliser son intérêt par une proposition.
M. Velasco, rapporteur de minorité, a aussi récemment rappelé à la Ville de Genève qu'elle aurait pu être intéressée par ce site pour reloger certaines activités qui se trouvent aujourd'hui principalement sur le site d'Artamis, sauf erreur. Toutefois, vous l'avez appris par la presse, la Ville de Genève a également renoncé à s'intéresser à ce projet de relocation des artisans d'Artamis dans le secteur des Halles de Carouge.
Dans son rapport de minorité, M. Velasco retrace le même historique que celui que je viens de vous faire et demande que cette vente soit différée dans le temps. J'espère cependant que mon rapide survol, qui résume les quatre ans de procédure de vente de ces objets, vous convaincra du bien-fondé de la décision de la majorité de la commission, qui vous propose quant à elle de vendre cet objet.
Vous verrez encore dans le rapport que nous avons eu une petite discussion sur le prix de vente, puisqu'il a été proposé que celui-ci soit relevé à l'addition des deux prix de repli, ce qui faisait une différence d'environ 300 000 F par rapport au montant de la vente totale. Cette proposition a été refusée par la majorité de la commission, et c'est finalement la somme de 5 400 000 F qui a été retenue pour l'addition de ces deux ventes.
Voilà, Madame la présidente, c'était effectivement une longue histoire ! L'Etat subit une perte assez importante dans ce dossier, même très importante, puisqu'elle représente environ 80% de la valeur du gage, soit environ 17 160 000 F. Cette casserole trouve donc aujourd'hui une issue dans ce montant de 5 400 000 F, que la majorité de la commission vous recommande d'entériner ce soir.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. En premier lieu, je tiens à remercier le rapporteur de majorité pour l'objectivité de son rapport, ce qui me permet de ne pas revenir sur les éléments factuels puisqu'ils sont relatés de manière extrêmement adéquate. Nous sommes donc d'accord sur les faits, et je pourrais même approuver les principes financiers qui règlent ce dossier. Cependant, à mon avis, cette affaire est politique, et c'est la raison pour laquelle mon groupe a décidé de rédiger ce rapport de minorité. Je tiens à préciser que je remplaçais Mme Véronique Pürro et que c'est à ce titre que je siégeais dans cette commission.
Comme l'a dit mon préopinant, on se retrouve avec 17 millions de perte dans cette affaire concernant les anciennes Halles de Carouge, que certains d'entre vous connaissent, et un petit immeuble adjacent que nous sommes allés visiter.
On peut bien sûr se poser la question de savoir à quoi on aurait pu affecter ces Halles situées au centre de Carouge, dans le Vieux-Carouge. Elles ne sont certes pas énormes, mais cet équipement aurait quand même pu servir à de nombreux usages: crèche, petits artisans, commerces, artistes, bref, il existe de multiples possibilités. Je suis donc extrêmement perplexe quand je vois l'attitude de la Ville de Genève - notamment à gauche, je dois le reconnaître, chers collègues - et de Carouge, qui était également à gauche à l'époque et qui, je l'admets, a pourtant l'habitude des grands discours sur les équipements publics, sur le fait qu'il faut investir... Car là, il y avait une affaire en or ! En effet, on apprend que cet objet fait perdre 800 000 F à la fondation et que le but de cette dernière était donc de s'en départir. Ainsi, si une collectivité publique - que ce soit la Ville de Genève ou de Carouge, à l'époque - l'avait accepté, la fondation aurait été prête à discuter et même à descendre en dessous des 1 600 000 F ! Je ne comprends donc toujours pas quelle est la raison intrinsèque qui a amené à l'époque la Ville de Carouge et maintenant la Ville de Genève à ne pas acquérir cet objet. Vraiment, je n'y comprends rien ! A moins que les voies de la Fondation de valorisation soient impénétrables pour nous, députés !
Il est possible que la fondation ait aussi fait son lobbying et que les élus en question aient laissé tomber cette affaire. Mais j'aurais aimé, par exemple, que la Ville de Genève se déplace - ou qu'elle envoie quelqu'un visiter et étudier cet objet, mais rien ! - d'autant plus que, derrière ces Halles de Carouge, il y a quand même un parc... Il y aurait pu y avoir une crèche, ç'aurait été sympathique !
Et je m'étonne de l'attitude de la Ville de Carouge, car ces halles sont situées dans le Vieux Carouge, au centre de cette ville qui est appelée à se développer toujours plus ! Les loyers pratiqués au centre de la Ville de Carouge ont grimpé et vont continuer à le faire, alors je trouve que ce serait politiquement extraordinaire qu'une collectivité publique détienne un tel bâtiment et puisse le mettre à disposition à des prix au mètre carré accessibles pour les petits commerçants - cela aurait permis à des petits commerçants de s'installer dans ces halles en payant des loyers qui ne sont pas de 52 000 F comme précédemment. D'ailleurs, ces halles sont tombées en faillite précisément parce qu'on demandait un loyer de 52 000 F à ceux qui s'y établissaient.
Mais on aurait très bien pu envisager, selon le prix auquel la commune aurait acquis ces halles, qu'elle procède à des aménagements très légers et qu'elle fixe donc des loyers tout à fait accessibles à ces petits commerçants. Ce qui aurait aussi permis de réactiver ce centre !
Eh bien, je suis très étonné de tout cela. Et je suis convaincu, Madame la présidente, que si les collectivités publiques et les politiques veillaient à l'intérêt du bien commun, on ferait en sorte que ces halles redeviennent un équipement public. C'est pour ces raisons que, dans mon rapport, je demande à surseoir à cette vente, afin qu'on établisse un acte de bien commun et qu'on demande à ces collectivités publiques de reconsidérer leur position et de ne pas voir cette situation par le trou de la lorgnette.
Par conséquent, Madame la présidente, comme vous l'avez vu dans mon rapport, je demande non pas de refuser l'opération mais d'y surseoir, afin qu'on ait une discussion plus sérieuse avec les collectivités publiques.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Si j'ai bien compris, vous demandez l'ajournement de ces deux projets de lois. C'est donc une proposition ferme, que je mettrai aux voix avant de faire voter le projet de loi.
Mme Michèle Künzler (Ve). Il s'agit donc de deux objets différents: une maison typiquement carougeoise et les anciennes Halles de Carouge, mais seulement la partie inférieure, le haut étant occupé par un appartement.
L'objet a été extrêmement bien discuté à la commission et nous sommes même allés exceptionnellement visiter ces halles, puisque, au début, nous nous étions dit qu'elles pouvaient être intéressantes pour la collectivité. Toutefois, une fois sur place, ces halles se sont révélées bien petites !
On a proposé à M. Pagani, de la Ville de Genève, d'aller les voir et éventuellement de les acheter pour reloger Artamis. Mais attendez ! Cette surface ne mesure même pas 500 mètres carrés ! On parle de construire des lofts, mais je vous le dis tout de suite: ce sera un seul loft ! De plus, la moitié de ce bâtiment est frappée d'une servitude de passage pour accéder au parc situé derrière.
Nous sommes donc allés sur place et avons vu l'immeuble, qui est certes joli et intéressant mais, même en fixant le mètre carré à 10 000 F, on n'arrive pas à trouver un prix supérieur à ce qui a été proposé par la Fondation de valorisation. Je crains même qu'on ait obtenu un très bon prix, parce que j'ai vu la semaine dernière une maison typiquement carougeoise de 500 mètres carrés à vendre à 2 millions de francs. Et là, on en tire 5 400 000 F ! De plus, l'intérieur de cet immeuble est malheureusement totalement abîmé. En réalité, il n'y a plus aucun charme dans les aménagements intérieurs, tout a été banalisé ou détruit. Donc, honnêtement, je pense qu'il faut vendre ! J'ai rédigé de nombreux rapports de minorité, et quand c'est nécessaire j'interviens pour sauver l'intérêt public. Mais là, franchement, on a fait le tour de la question: on s'est rendu sur place, on a analysé la situation, et je pense que la meilleure décision est de vendre ces halles, qui nous coûtent quand même, bon an mal an, 800 000 F en intérêts ! Par conséquent, le fait de surseoir à cette vente représente une dépense mensuelle de presque 100 000 F, et je pense que cela n'en vaut pas la peine.
M. Olivier Wasmer (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, Mme Künzler vous a presque tout dit sur ces Halles de Carouge, qui n'en ont malheureusement que le nom, puisqu'il s'agit de locaux qui sont vides depuis près de dix ans. Ils ont été complètement dénaturés, n'ont plus de plafond et, surtout, sont malheureusement gênés par une servitude de passage, qui fait que les propriétaires du jardin situé derrière les halles ont le droit de les traverser. Cet objet est donc complètement dévalorisé.
La commune de Carouge, qui a longtemps été sollicitée pour acheter ces halles, car on pouvait imaginer créer un complexe commercial, a toujours décliné l'offre, même à un million, puisqu'il n'y a effectivement aucun intérêt commercial. Il faut savoir que les commerçants qui s'y trouvaient il y a une dizaine d'années ont tous fait faillite, de même que le propriétaire des halles. En effet, à l'époque, on louait à des petits commerçants des emplacements, tenez-vous bien, 54 000 F par an ! C'est dire que de garder ces halles en l'état n'était purement et simplement pas viable.
Comme l'a très bien relevé M. Amsler dans son rapport de majorité - confirmé en cela par Mme Künzler - pour valoriser le petit hôtel particulier contigu aux Halles de Carouge, il faudrait la superficie de celles-ci pour créer un loft et aménager des jours. Après plusieurs interventions de certains commissaires pour retarder cette vente, la commission s'est donc rendue sur place, parce qu'il n'y avait qu'une visite des lieux qui permettait de se faire une idée. La commission a constaté que ces halles ne pouvaient plus être utilisées et qu'il valait effectivement mieux créer un loft - et non pas trois ou quatre - pour valoriser l'hôtel d'à côté. C'est dire que le prix de 5 400 000 F que la fondation a réussi à trouver par le biais d'un acquéreur... D'ailleurs, il faut savoir qu'il n'y en a pas eu dix, ni trois, ni deux; la fondation est intervenue à plusieurs reprises et n'a malheureusement trouvé personne, malgré toutes ses démarches. Les halles ont été reproposées à la Ville de Carouge, qui les a refusées, et donc aujourd'hui, 5 400 000 F, comme l'a dit Mme Künzler, confirmant les propos de M. Amsler, est un excellent prix ! En outre, cet objet nous coûte 800 000 F par année: plus le temps passera, plus il nous reviendra cher. Alors, comme l'a dit très justement Mme Künzler, il s'agit aujourd'hui de sauvegarder l'intérêt public, puisqu'à l'évidence aucun autre acquéreur potentiel ne s'est présenté à ce jour, bien qu'un député nous ait promis qu'il avait trouvé quelqu'un pour plus d'un million.
Pour ces diverses raisons, l'UDC s'opposera à tout ajournement de cette vente et vous recommande d'adopter ces projets de lois.
M. Roger Deneys (S). Je dois dire que je ne suis pas très optimiste quant aux chances de succès d'un éventuel autre usage que celui qui est envisagé aujourd'hui en réalisant des lofts. Cependant, en entendant M. Wasmer, je ne peux m'empêcher de penser qu'il y a un petit côté «souk» dans ce Grand Conseil. On a l'impression que c'est: «Yes, buy one, take two, it's a good price, my friend ! It's a good idea, you buy ! Very very quick ! Good price !» Mais ce n'est pas sérieux ! En réalité, l'argument de Mme Künzler, selon lequel ce dossier nous coûte cher en intérêts - 100 000 F par mois... Et il a été ajouté que cela dure depuis dix ans. Eh ben alors ! De toute façon, vu la somme gaspillée dans ce dossier, on n'est plus vraiment à un mois près !
Je vous l'ai dit, je ne suis pas certain qu'on arrive à trouver une autre solution qu'un loft, mais il n'empêche que ce dossier mérite d'être étudié, et donc la proposition de M. Velasco est très raisonnable. J'aimerais quand même vous rappeler que l'utilité publique d'un loft est absolument nulle ! Et ici, on a affaire... Je pense qu'il ne faut pas non plus se faire d'illusions au niveau économique: on ne peut pas simplement placer des petits commerçants en leur fixant des loyers qui sont le quart du prix de ce qui se trouve dans le secteur, parce que ce serait tuer ceux qui sont déjà en place ! Il s'agit donc d'envisager une autre solution, pour des activités différentes et, à mon avis, cela mérite d'être encore étudié, parce qu'on sait très bien comment négocie la Fondation de valorisation. Si vous lisez mon rapport de minorité concernant le dossier Marziano, vous verrez comment la Fondation de valorisation propose les biens à l'Etat ou aux communes ! C'est: «Nous avons décidé de vendre le bien à tel prix. Etes-vous intéressés, oui ou non ?» Je suis désolé, mais ce n'est pas une négociation sérieuse entre deux entités publiques. Il s'agit quand même d'une Fondation de valorisation financée par les contribuables ! Et de collectivités publiques pour lesquelles on paie tous des impôts ! Ce n'est pas sérieux comme négociation !
Alors pour «gagner» un ou deux millions, c'est-à-dire en réalité ne pas les perdre, on voudrait simplement vendre le plus vite possible ?! Je suis désolé, ce dossier mériterait qu'on prenne encore un peu de temps pour étudier d'autres possibilités. Je vous l'ai dit, je ne suis pas certain qu'on y arrive, mais il me semble quand même très précipité, parce qu'une offre se présente tout à coup, de la concrétiser tout de suite. Je trouve cela vraiment dommage !
M. Thierry Cerutti (MCG). Le MCG trouve scandaleux que la Fondation de valorisation ait fait le jeu des promoteurs immobiliers, en autorisant des lofts luxueux aux Halles de Carouge: cela nuit aux petits commerçants - lesquels amènent un point positif et un commerce de proximité à Carouge - et nous le déplorons donc profondément.
De plus, la fondation a mandaté une société pour effectuer de prétendus sondages dans les Halles de Carouge. En réalité, la situation était totalement différente, puisque cette société a commis des déprédations, de façon que les halles ne trouvent plus preneur.
Pour ces raisons, le MCG ne soutiendra pas la vente de cet objet.
Mme Michèle Künzler (Ve). J'aimerais juste préciser qu'un ajournement ne résoudrait rien dans le sens où, si l'on veut réfléchir à une autre solution, il faut refuser la vente. En effet, ce n'est qu'un tel refus qui permettrait de trouver un autre acquéreur.
Je rappelle que, lorsqu'on est ici en procédure de vote, c'est que l'acte est signé et en attente de réalisation. On donne l'accord sur une signature.
Personnellement, je refuserai cet ajournement et la vente, et je répète qu'ajourner ce projet ne résoudrait rien.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. J'aimerais dire que, dans cette histoire, l'Etat aura perdu 17 160 000 F, auxquels s'ajoutent les 800 000 F annuels dépensés pendant dix ans - ce qui fait 8 000 000 - le total s'élève donc à 25 160 000 F: 25 millions ! Et l'on vient nous dire qu'un acquéreur serait prêt à payer 4 millions, mais que si l'on accepte ce prix, cela ferait un million de moins. Or mon collègue Deneys a tout à fait raison: on n'est pas à un million près ! Ni à 4 millions près ! On est à 25 millions près dans cette histoire ! Et que nous dit-on ?! Qu'on va liquider cela ?!
Ce que gagne la collectivité publique, ce sont des lofts au centre de Carouge... Des lofts ! On réanime le centre de Carouge en créant des lofts ! On parle de logements sociaux, d'amener la population au centre-ville, et on va construire des lofts ! Trois lofts au centre de Carouge ! Voilà à quoi servent les acquis de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève: 25 millions dépensés pour qu'un entrepreneur aménage des lofts au centre de Carouge !
Concernant le petit hôtel situé à côté des halles, j'ai vu des projets, par exemple à Saint-Jean, où de petits immeubles de ce genre ont servi à construire des crèches d'enfants. Oui, Mesdames et Messieurs les députés, la Ville de Genève l'a fait !
Par ailleurs, je suis allé visiter les Halles de Carouge et, bien que je ne sois pas architecte mais ingénieur, je peux vous garantir que, à l'utilisation, ces halles sont en très bon état et on aurait pu, moyennant peu de travaux, installer soit des artistes, soit des petits commerçants ou artisans. Et à ce sujet, M. Pagani a tort: personne n'a prétendu loger dans ces halles tout Artamis ! Personne ne l'a prétendu ! Et il faut savoir que le conseiller administratif de la Ville de Genève a soutenu qu'il était arrivé trop tard dans ce dossier, parce que l'objet avait déjà été vendu. Mais ce n'est pas vrai ! On n'avait encore rien décidé ici ! Cela signifie donc que la Ville n'avait pas le dossier en main ! En effet, elle aurait pu, comme collectivité publique, s'adresser à l'Etat ou à la fondation pour dire qu'elle était intéressée et qu'elle voulait voir la totalité du dossier; elle aurait pu se rendre sur place pour étudier l'objet, etc., mais rien n'a été fait !
Ce que je constate dans cette affaire, c'est qu'il y a de la part des pouvoirs publics une sorte d'abandon d'une vision du futur et de l'opportunité de munir ces halles, situées au centre, d'équipements publics qui satisfassent au bien commun.
D'autre part, Mme Künzler a indiqué qu'il y avait une servitude de passage dans ces halles mais, d'après ce que j'ai compris - peut-être me suis-je mépris, car je suis arrivé tard dans la commission - l'acquéreur de ces lieux bénéficiera de la possibilité de lever cette servitude. Alors si lui peut le faire, je ne vois pas pourquoi d'autres ne le pourraient pas, par exemple une collectivité publique !
Je suis extrêmement étonné que nous, citoyens et citoyennes de cette république, ayons mis 25 millions sur la table avec cet objet - car c'est nous qui payons ! C'est la République qui paie ces 25 millions ! - et que ce Grand Conseil soit incapable de dire qu'il ne veut pas de ces lofts dans ce lieu mais des équipements publics, alors qu'il met 25 millions. Je m'étonne qu'on ait une approche aussi financière de cette histoire et non d'utilité publique. J'en suis surpris et je m'interroge. Lorsqu'on a perdu 2,3 milliards, on ne se pose pas la question de savoir si on va perdre 1 ou 2 millions ! On se demande si ces équipements vont servir aux futurs citoyens et citoyennes, ou aux petits commerçants, artistes ou jeunes, bon dieu ! C'est cela qu'il faut savoir ! Donc je m'étonne et je m'énerve !
Madame la présidente, peut-être que le fait de demander l'ajournement ne constitue pas la solution. Mme Künzler a sans doute raison ! Je ne connais pas toutes les arguties de la loi et des corpus de lois, mais mon attitude est très claire, et ce qui compte c'est l'attitude politique que je veux montrer dans cette affaire.
S'agissant des 25 millions que l'on utilise aujourd'hui, j'aimerais qu'on attende le bon moment pour être bien sûr qu'il n'y a pas d'autre possibilité de rentabiliser cette vente pour l'Etat et les citoyens et citoyennes. C'est cela que je souhaite ! Alors s'il faut attendre, attendons. Et si la solution, Madame Künzler, est de refuser cette vente, eh bien nous la refuserons ! Mais je ne voulais pas avoir une attitude totalement négative, parce que si dans un ou deux mois l'impéritie de nos autorités, de notre Grand Conseil et des collectivités publiques est telle qu'il faut se résoudre à vendre, on le fera ! Mais, au moins, donnez-nous les moyens de dire à ces gens qu'on a déjà dépensé 25 millions !
La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur. Si j'ai bien compris, vous renoncez à votre demande d'ajournement. (Commentaires.) Non ? Vous maintenez votre proposition. Dans ce cas, excusez-moi, je vous ai mal compris !
M. David Amsler (L), rapporteur de majorité. J'ai failli ne pas réintervenir, mais je vais quand même le faire. Malheureusement, M. Velasco ne peut pas se substituer aux décisions des conseillers administratifs, ni de la Ville de Carouge ni de la Ville de Genève, malheureusement pour lui !
J'aimerais vous donner un petit élément de réflexion, que vous pouvez lire dans les deux rapports, et vous verrez très bien que ces Halles de Carouge ne sont pas vendables toutes seules. J'en veux pour preuve que le prix de repli fixé par la commission n'a même pas pu être financé par l'acquéreur de ces halles. Donc, je crois qu'il faut vraiment suivre cette proposition de vente. Mme Künzler l'a encore dit, ces halles ne sont pas vendables toutes seules; ce n'est que le fait de les lier avec cet immeuble situé à côté, qui lui a pu être financé de manière un peu plus importante que le prix de repli, qui nous fait nous approcher de l'addition de ces deux prix de repli.
Je n'en dirai pas plus et vous recommande simplement d'accepter ces projets de lois et de vendre ces deux objets ensemble sans tarder.
M. Roger Deneys (S). Je voulais insister sur la transformation des Halles de Carouge, prévues actuellement pour des activités artisanales - même si elles sont vides depuis de nombreuses années - en loft. En effet, c'est un signal extrêmement négatif que nous donnons à toutes les petites entreprises genevoises et à tous les artisans et indépendants, qui font de nombreux efforts pour rester en place dans le centre-ville. Je parle d'ailleurs en connaissance de cause, puisqu'à l'autre bout de la ville, à la Jonction, je subis le même sort avec une partie de mes locaux. Je suis du reste très content, j'ai des petits jeunes de la «Boîte à boulots» qui m'aident, David et Eddy, et ils sont très efficaces. Mais cela ne résout pas nos problèmes, parce que je n'ai pas envie d'aller m'installer je ne sais où en rase campagne. Je tiens à rester dans le tissu urbain, car je fais partie de l'économie de proximité.
Je trouve donc qu'il est extrêmement regrettable, pour ne pas dire scandaleux, que nous renoncions à des locaux utilisables pour des activités commerciales afin d'en faire un loft. C'est totalement scandaleux ! D'autant plus que nous manquons de surfaces à des prix raisonnables. Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'il est de notre devoir de faire passer ce message: nous ne sommes pas d'accord avec ces transformations !
Une voix. Bravo !
M. Thierry Cerutti (MCG). J'aimerais ajouter que la fondation est allée jusqu'à prétendre que les Halles de Carouge étaient maudites, en prétextant que jamais les commerces n'ont fonctionné, et pour cause ! Le Mouvement Citoyens Genevois a bien sûr investigué et a découvert que, à l'époque, le crédit octroyé par la BCG était proche de 20 millions de francs. Si bien que, pour payer le montant astronomique des intérêts, l'ancien propriétaire louait 16 mètres carrés pour un montant annuel de 54 000 F, ce qui est énorme ! Comment voulez-vous qu'un petit artisan puisse assumer un tel loyer ? C'est tout simplement impossible ! Il est donc de notre responsabilité de réhabiliter les Halles de Carouge pour les artisans et les petits commerçants qui sont, je vous le rappelle, les premiers générateurs d'emplois dans notre canton.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. J'aimerais juste dire que je demande l'appel nominal !
J'ai également oublié de vous signaler que j'ai été contacté il y a trois ou quatre jours par une organisation, l'association Oseo, qui cherchait justement des petits ateliers. Je l'ai donc renvoyée à la Fondation de valorisation. Vous voyez que, si on fait correctement de la publicité, il y a des gens qui s'intéressent à ces objets !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Etes-vous soutenu pour l'appel nominal ? Vous l'êtes !
Mis aux voix à l'appel nominal, l'ajournement sine die du rapport sur les projets de lois 9513 et 9966 est rejeté par 57 non contre 20 oui.
Mis aux voix, le projet de loi 9513 est adopté en premier débat par 52 oui contre 21 non et 2 abstentions.
La loi 9513 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9513 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 55 oui contre 21 non et 1 abstention.
Mis aux voix, le projet de loi 9966 est adopté en premier débat par 54 oui contre 21 non et 1 abstention.
La loi 9966 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9966 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 52 oui contre 21 non et 3 abstentions.