Séance du
jeudi 13 mars 2008 à
17h
56e
législature -
3e
année -
6e
session -
28e
séance
M 1745
Débat
La présidente. Cette proposition de motion est classée en catégorie II - comme toutes les autres - c'est-à-dire trois minutes de parole par groupe. On nous a annoncé des amendements. Si c'est le cas, la procédure devra être explicitée. Le groupe socialiste peut-il me dire si des amendements ont effectivement été déposés ? (Remarque.) Oui ? Bien. Je passe la parole au premier signataire de ce texte, M. Guy Mettan... (Brouhaha.) Ou à M. Pierre Weiss ? (Commentaires.) Les auteurs de la proposition de motion s'expriment en général en premier !
M. Pierre Weiss (L). Sur ce point important de notre ordre du jour concernant la création de nouvelles zones d'activités, dont le texte a été rédigé par mon collègue Mettan - avec l'aide d'un certain nombre de députés dont la liste figure sur le tiré à part qui vous a été remis - la question qui se pose est de savoir si le Conseil d'Etat, compte tenu des problèmes qui se posent en termes de surfaces disponibles, entend mettre à disposition des entreprises de nouveaux terrains. On remarque, lorsqu'on se penche sur les demandes qui sont faites par ces dernières, qu'elles font face à une raréfaction en termes de surfaces... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ...aussi s'agit-il de savoir quelles sont les intentions de déclassement éventuel de terrains de ce type, quelles sont également les entrées en matière pour les fonctionnements mixtes... (Brouhaha.)
La présidente. Pardonnez-moi de vous interrompre, Monsieur le député, mais on a de la difficulté à vous entendre, tant il y a du bruit dans la salle. Alors je remercie...
M. Pierre Weiss. Madame la présidente, est-ce important ?
La présidente. Je remercie MM. les députés de bien vouloir être attentifs aux propos de M. Weiss qui est en train de nous présenter cette motion.
M. Pierre Weiss. Madame la présidente, merci de venir à mon secours ! Je reformule donc ce que je viens de dire: s'agissant de cette proposition de motion, il y a des besoins qui se posent pour les entreprises; le développement du secteur industriel à Genève est, je crois, un objectif auquel nous tenons tous, et il s'agirait de voir de quelle façon le Conseil d'Etat entend y répondre. Voilà la raison pour laquelle nous avons déposé ce texte, en particulier valable pour la rive gauche de notre canton, dans la zone de la Pallanterie.
M. Jacques Jeannerat (R). Comme l'a dit Pierre Weiss, cette proposition de motion a tout son sens, pour deux raisons: d'abord, l'industrie genevoise est en très bonne santé et a donc besoin de place pour se développer. Deuxièmement, les deux grandes zones industrielles créées ces dernières années - la Zimeysa et la Ziplo - arrivent bientôt à saturation.
L'industrie de pointe, comme je le disais, va continuer à se développer à Genève, il est donc nécessaire de créer de nouvelles zones industrielles et d'activités, surtout, comme le mentionne l'invite de la proposition de motion, le long des axes de communication, c'est-à-dire de l'autoroute, notamment pour que les camions qui livrent et prennent la marchandise dans les entreprises puissent immédiatement accéder aux réseaux autoroutiers.
Toutefois, il est indispensable que cette proposition de motion transite par la commission de l'économie, parce qu'elle invite à créer de nouvelles zones d'activités mixtes et que cette notion de mixité dans les zones est à prendre avec sérieux et doigté.
En effet, pendant longtemps à Genève, les zones industrielles et d'activités étaient fermées à toute activité commerciale. Il y a quinze ans, il était même impossible de mettre un bancomat dans une zone industrielle. Les choses ont évolué, et je crois qu'il faut faire attention: nous devons permettre à ces zones d'activités d'avoir une certaine activité commerciale, notamment pour ceux qui y travaillent, mais en même temps pouvoir assurer au secteur industriel des surfaces disponibles à des tarifs acceptables pour celui-ci.
C'est la raison pour laquelle le groupe radical et moi-même vous invitons à renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'économie, notamment pour étudier attentivement cette notion de mixité dans les zones.
M. Roger Deneys (S). Les socialistes sont évidemment soucieux de développer des zones pour les industries genevoises qui doivent poursuivre leur activité. D'ailleurs, nous avons appris avec stupéfaction le projet de l'entreprise Similor Kugler de déménager à Laufon. Cela nous semble particulièrement inquiétant, et nous espérons donc que les terrains nécessaires seront à disposition des entreprises qui souhaitent s'implanter en dehors de la zone habitée aujourd'hui.
Il n'empêche que les socialistes ont déposé deux amendements, pour changer d'une part le titre et d'autre part l'invite, en ajoutant la notion de zone industrielle et artisanale. En effet, selon nous - et cela rejoint les propos de M. Jeannerat - il ne faut pas accepter n'importe quelle activité commerciale dans ces zones, et je vais prendre comme exemple le secteur de la Praille... (Brouhaha. L'orateur s'interrompt. La présidente agite la cloche.)
La présidente. Excusez-moi, Monsieur Deneys, vous avez raison de vous interrompre ! Mesdames et Messieurs, merci de faire silence ! Je crois que cela va mieux, Monsieur le député, vous pouvez continuer.
M. Roger Deneys. Merci, Madame la présidente ! Je voulais donc prendre en exemple le secteur de la Praille. Aujourd'hui, en face du centre commercial, vous avez des immeubles qui sont la propriété de la Fondation pour les terrains industriels - FTI - où le loyer est de 170 F le mètre carré par an, alors que, juste en face, au centre commercial, le loyer annuel est de 400 F le mètre carré. Et c'est très simple ! Vous avez là une distorsion au niveau économique, qui empêche les petites entreprises de s'implanter, et les socialistes ne souhaitent donc pas que nous développions de nouvelles zones pour des centres commerciaux avec de tels loyers.
D'autre part, le groupe socialiste est aussi très attentif au fait que ces zones pourraient accueillir des activités culturelles, si les loyers sont raisonnables - des activités culturelles, notamment, parce qu'il n'y a généralement en ces lieux pas de problèmes de bruit la nuit. C'est un élément qui nous semble considérable, car il permet de concilier des activités économiques et culturelles importantes avec le respect de la paix des citoyens qui souhaitent dormir.
Nous vous invitons donc à accepter nos deux amendements et nous ne nous opposerons certainement pas au renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'économie, à défaut de le soutenir, parce que le terme «mixte» est trop fort pour nous.
M. Guy Mettan (PDC). Tout d'abord, vous me permettrez de remercier les deux cosignataires qui ont pris la parole avant moi, MM. Weiss et Jeannerat. Je me trouvais effectivement à la salle des Pas-Perdus et ils ont, avec éloquence, défendu le bien-fondé de cette proposition de motion.
J'aimerais juste ajouter deux points. Tout d'abord, si ce texte est important aux yeux de toutes celles et ceux qui l'ont signé, c'est parce que ce serait la première fois que l'on met l'accent sur la création d'une zone industrielle et d'activités sur la rive gauche du lac, puisque toutes les actuelles zones économiques se trouvent soit à Meyrin, soit dans le bassin de Plan-les-Ouates, et qu'aucune d'entre elles n'existe donc sur la rive gauche.
Or vous n'êtes pas sans savoir que de très nombreux frontaliers viennent depuis Annemasse ou la région de Thonon-Douvaine et qu'il serait important, en termes de transport et de qualité de vie, de pouvoir fixer une partie de ces activités et de ces personnes qui viennent travailler à Genève dans une zone industrielle qui soit proche de cette région française.
Deuxièmement, nous voyons à long terme. Et nous avons voté, lors de la dernière session du Grand Conseil, le principe d'une grande traversée du lac, qui irait du Vengeron jusqu'à la Belotte. Eh bien, avec la traversée sous Vésenaz, qui ressortirait justement dans la zone de la Pallanterie, nous aurions ce fameux axe de transport évoqué dans la proposition de motion, où l'on pourrait créer à la fois une zone d'activités et une infrastructure de transport qui correspondraient bien à la région en question.
M. Jeannerat a parlé de la mixité, et je crois que c'est important. A nos yeux, Monsieur Deneys, la mixité n'est pas l'idée de créer, comme le font les Français, de nombreux supermarchés à la périphérie de la ville, mais de permettre de développer certaines activités commerciales. Je pense par exemple au magasin Ikea, qui requiert une certaine surface, mais qui apporte aussi des emplois et une certaine valeur ajoutée à l'industrie genevoise. Il ne s'agit pas, là, de mettre n'importe quoi ou n'importe quel commerce !
Par conséquent, Monsieur Deneys, je reconnais que votre idée de zone artisanale est tout à fait intéressante, mais le groupe démocrate-chrétien recommande de renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'économie, où nous pourrons tout à fait entrer en matière afin de rajouter le côté artisanal qui, à mon avis, fera bon ménage avec le côté industriel et commercial et, au fond, augmenterait cette notion de mixité à laquelle nous tenons. Mais je ne vois pas la nécessité de changer cela immédiatement et, donc, d'accepter vos amendements ce soir. On pourra très bien le faire en commission, et je crois que nous serons tout à fait d'accord d'entrer en matière sur ce sujet.
M. Gilbert Catelain (UDC). Le chef du département M. Cramer a eu l'occasion de présenter à la commission d'aménagement du canton la vision «Genève 2030», selon laquelle, en résumé, il y aurait 200 000 habitants supplémentaires dans la région, dont 100 000 à Genève, et 100 000 emplois supplémentaires, dont 80% sur le territoire de notre canton. C'est la preuve que le département a déjà réfléchi à la notion des besoins en terrains industriels et aux infrastructures qu'il va falloir créer pour accueillir ces 80 000 emplois en vingt ans.
Cette proposition de motion, selon nous, reste timide - mais je comprends que son auteur le soit. En effet, un jour, il dépose un texte visant à supprimer des zones d'activités industrielles et artisanales - je pense à la motion 1730 actuellement traitée en commission, qui propose de supprimer la zone artisanale des Ateliers Sécheron et de la transformer en logements - et, le lendemain, est déposée une autre motion qui indique le contraire, à savoir qu'il faut accroître les zones d'activités... Je comprends donc que, finalement, l'invite engage simplement le Conseil d'Etat «à étudier la possibilité...». Alors que l'enjeu est beaucoup plus important: il faut véritablement créer de nouvelles zones d'activités, parce que nous devons accueillir 80 000 emplois dans les vingt ans à venir !
D'autre part, la commission d'aménagement du canton s'apprête à voter à l'unanimité, au niveau de l'Entente du moins, la suppression d'une zone d'activités à la Plaine, dans le cadre d'un projet de loi de déclassement présenté par le Conseil d'Etat, sans que soit exigée une compensation de cette suppression de zone d'activités. Il s'agirait donc d'ajouter dans cette proposition de motion qu'il faut non pas simplement créer, mais au moins, et déjà, maintenir les zones d'activités existantes ! Par exemple, grâce à des compensations au niveau des zones d'affectation.
A mon sens, il convient de renvoyer ce texte à la commission d'aménagement du canton, puisque tout le problème de l'affectation des zones y est actuellement traité, notamment via la motion 1730 du PDC. C'est la raison pour laquelle nous proposons que les demandes d'amendements soient renvoyées avec la motion directement à la commission d'aménagement pour y être examinées.
La présidente. Merci, Monsieur Catelain. Mesdames et Messieurs les députés, il y a donc deux propositions de renvoi en commission. Nous verrons tout à l'heure à laquelle vous choisissez de renvoyer ce texte.
Mme Michèle Künzler (Ve). Je dois donner raison à M. Catelain: on a déjà examiné cette question en commission d'aménagement, où tout un plan a été étudié. Il est vrai que c'est assez surprenant de la part du PDC qu'il propose de supprimer aux Charmilles une zone industrielle et artisanale pour y mettre des logements et, aussi, de créer de nouvelles zones ailleurs !
La première tâche à accomplir, et je crois que le département l'a fait, c'est d'identifier tous les secteurs que l'on pourrait développer. Concernant les deux lieux cités, il va bientôt y avoir le déclassement de Bernex-Est - à la Pallanterie, c'est déjà fait. Je me demande donc vraiment à quoi cette motion sert !
Ce qui est dangereux dans cette proposition de motion, c'est la mixité. Parce qu'on sait très bien ce que peuvent donner les zones mixtes sans réglementations, si l'on ne prend pas en compte le différentiel de rendement entre les activités diverses en maintenant un loyer différencié. On voit très bien que les activités artisanales seront chassées de lieu en lieu et on a l'impression que l'on veut s'en débarrasser. En réalité, on ne veut accueillir à Genève que des activités qui rapportent, c'est bien et c'est intéressant, mais il y en a de nombreuses autres qui sont tout à fait nécessaires, que ce soit la menuiserie ou la carrosserie - même si je n'aime pas les voitures, c'est utile ! (Exclamations.) - et qui doivent trouver leur place dans notre canton. Or ce n'est pas avec ces motions qu'on va avancer, et si vous voulez vraiment accepter ce texte, il vous faudra le renvoyer à la commission d'aménagement.
En premier lieu, il faudrait densifier les zones d'activités. Parce que, lorsqu'on voit toutes les zones occupées, comme en Ville de Genève, par des voitures parquées sur une surface pour la vente, excusez-moi, mais c'est un gaspillage de terrain ! On ne peut plus accepter que les zones industrielles soient simplement des parkings à voitures ! C'est la première chose à régler. Et il existe de nombreuses possibilités de densifier ! Nous sommes allés visiter la zone des Charmilles: une partie est très active; quant à l'autre, il y aurait vraiment de quoi faire pour améliorer la situation. Il en va de même au Lignon, où la moitié du secteur est occupée par des stockages de pierres pour la Ville de Genève. Franchement, on peut faire mieux comme activité !
Par conséquent, il faut commencer par densifier avant de procéder à des déclassements et de créer des zones commerciales. D'autant plus que, je vous le rappelle, un rapport est paru en Suisse, dans lequel il est dit qu'on arrive à saturation. Et dans beaucoup de cantons on renonce à créer de nouvelles zones commerciales, parce qu'il y en a déjà trop ! Du reste, le porte-monnaie des gens n'est pas extensible: si vous mettez un centre commercial d'un côté, l'autre côté va péricliter. On arrive à saturation ! C'est la raison pour laquelle je serais, pour ma part, presque d'accord de refuser ce texte. Sinon, la seule possibilité consiste à le renvoyer à la commission d'aménagement du canton, si vous y tenez.
La présidente. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Amsler, tout en rappelant au groupe libéral qu'il lui reste quatre minutes et quarante secondes. Je vous dis cela parce que M. Renaud Gautier s'est aussi inscrit.
M. David Amsler (L). Je vais être bref. Tout d'abord, le groupe libéral est bien évidemment très favorable à cette proposition de motion. Je note aussi avec satisfaction que finalement, pour des raisons diverses, tout le monde est assez disposé à mener une réflexion globale sur les zones du canton.
Je voulais également vous indiquer qu'il est prévu dans la zone de la Pallanterie, mentionnée dans ce texte, un projet d'extension, avec une zone sportive et éventuellement un P+R. Mais tous ces éléments ont en réalité plus trait à l'aménagement du territoire qu'à l'économie, c'est pourquoi nous serons, nous aussi, favorables à un renvoi de cette proposition de motion à la commission d'aménagement du canton plutôt qu'à celle de l'économie.
Ce que je demanderai aussi, en complément à ce texte, c'est que nous menions une réflexion de fond sur les dérogations possibles dans les zones industrielles. Mme Künzler l'a mentionné, il existe aujourd'hui de nombreuses zones en Ville de Genève qui ne sont plus affectables à des activités industrielles et artisanales. Je souhaite donc que, dans l'analyse de cette proposition de motion, nous réfléchissions également à ces dérogations dans les zones industrielles et artisanales. Je pense notamment au quartier de Sécheron, qui aujourd'hui voit son caractère changer d'année en année.
Ma dernière demande, c'est que cette proposition de motion soit traitée rapidement, parce que je crois que nous sommes tous conscients de la problématique que génère aujourd'hui la rigidité autour de ces régimes de zones. Je suggère donc un renvoi à la commission d'aménagement du canton et un traitement rapide par le Conseil d'Etat.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Gautier, à qui il reste deux minutes et cinquante secondes.
M. Renaud Gautier (L). J'aimerais rappeler que certains d'entre vous n'ont pas participé à la séance de la commission de l'économie - à laquelle doit être renvoyée cette proposition de motion - où M. le conseiller d'Etat Unger a présenté la problématique des zones industrielles, de la saturation dont elles souffrent et des difficultés dues au manque d'engouement que peuvent manifester certains propriétaires à laisser construire ces zones industrielles.
Ce que je voulais dire essentiellement, c'est que cette proposition de motion parle de mixité et que c'est une bonne chose. Il ne faut donc pas la réduire en suivant les propositions des socialistes, mais bien la laisser telle quelle. Il convient en effet d'étudier l'ensemble des moyens nécessaires pour favoriser le développement de l'industrie à Genève, qu'elle soit grande, moins grande, voire petite, et ce dossier-là doit d'abord être examiné par la commission de l'économie avant d'être traité par celle de l'aménagement, puisque cette proposition de motion ne postule pas de déclassement de terrains.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Alain Etienne, pour le groupe socialiste, à qui il reste trois minutes et quarante secondes.
M. Alain Etienne (S). J'aimerais confirmer que le débat est largement ouvert au sein de la commission d'aménagement du canton, puisque nous avons reçu le rapport du Conseil d'Etat sur l'utilisation des zones industrielles et que nous avons déjà entamé la discussion. D'ailleurs, nous y traitons également une proposition de motion radicale sur la mixité des zones industrielles.
On dit toujours que notre ordre du jour est engorgé... Or le PDC a déposé une nouvelle proposition de motion ! Je conseille donc à ce groupe de tenir compte des objets en suspens dans les diverses commissions !
Quoi qu'il en soit, je le répète, le débat est actuellement ouvert à la commission d'aménagement, c'est pourquoi j'invite notre parlement à y renvoyer ce texte.
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Gillet, à qui il reste deux minutes et trente secondes.
M. François Gillet (PDC). J'aimerais répondre à deux précédentes interventions. D'abord, à M. Catelain, qui s'étonne que le parti démocrate-chrétien propose de nouveaux développements de zones industrielles, alors que, parallèlement, il suggère de convertir la zone de Châtelaine en zone de logements.
Je crois que, dans un canton qui se développe comme le nôtre, il faut être capable d'évoluer, notamment dans la localisation des différentes zones d'affectation de notre territoire. Il est évident que, si un certain nombre d'anciennes zones industrielles se prêtent aujourd'hui magnifiquement au logement, parce qu'elles sont centrales, il ne paraîtrait pas très opportun de s'interdire de telles réflexions. Par conséquent, je pense qu'il n'y a pas de contradiction à proposer de construire des logements là où cela s'y prête et à inventorier un certain nombre d'autres zones où, à l'inverse, l'industrie et le développement économique se justifient.
Par rapport au débat qui consiste à savoir à quelle commission il faut renvoyer cette proposition de motion, il est vrai que l'une des questions soulevée par ce texte est celle de la mixité. Il s'agit en réalité de savoir quels types d'activités nous sommes prêts à accepter dans de telles zones. Et il est nécessaire d'identifier les activités qui s'y prêtent d'un point de vue économique.
Je peux vous confirmer que certaines zones industrielles de notre canton connaissent encore des difficultés liées au manque d'infrastructures et de services, qui pourraient pourtant permettre aux milliers de personnes qui y travaillent d'éviter des déplacements inutiles. Les communes sont souvent sollicitées pour aménager certains services qui font défaut, mais leur marge de manoeuvre est limitée. Il est donc important, sur un plan économique, de cadrer les limites de cette mixité. Et il paraît logique au parti démocrate-chrétien que ce soit la commission de l'économie qui se charge de cette réflexion.
Que la commission d'aménagement réfléchisse parallèlement à un inventaire des périmètres de notre canton qui pourraient à terme accueillir ce type de zones paraît également logique, mais c'est une réflexion parallèle, qui n'est pas la même. Nous maintenons donc notre demande de renvoi à la commission de l'économie.
M. Roger Deneys (S). Suite aux propositions de renvoi en commission, les socialistes retireront leurs amendements et souhaitent vraiment que cette question de la mixité soit étudiée en détail, quelle que soit la commission dans laquelle est renvoyé ce texte.
J'aurais même tendance à dire qu'en fait le parti démocrate-chrétien - mais ce n'est pas la première fois - fait la démonstration par l'absurde des limites de ses propositions !
En effet, M. Mettan donne Ikea comme exemple de mixité dans une zone industrielle. Mais lorsque vous mettez ce magasin dans une zone industrielle, toute la surface est déjà bouffée par ce mastodonte ! De plus, les moyens financiers de l'enseigne suédoise sont incomparables avec ceux de toutes les petites entreprises et indépendants de ce canton ! Par conséquent, si c'est cela, la mixité que vous souhaitez, c'est juste n'importe quoi ! Et c'est une catastrophe pour les petites entreprises, parce qu'Ikea crée peut-être des emplois précaires, saisonniers, etc., mais en l'occurrence vous faites crever tous les menuisiers de la région et, en plus, vous générez un trafic automobile intense ! Bref, la mixité, peut-être; mais alors, il faut vraiment la définir et ne pas accepter des mastodontes à n'importe quel prix.
M. Claude Jeanneret (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, c'est vrai qu'une proposition de motion telle que celle-là laisse un peu perplexe, parce que je ne vois pas qui a envie que Genève ne puisse pas développer son activité industrielle et commerciale ! Mais il existe un problème plus fondamental. On lit dans les considérants qu'il est important de créer des emplois pour lutter contre le chômage, alors je ne veux pas ressasser l'éternel leitmotiv du MCG, mais j'aimerais juste dire au passage que ces considérants sont un peu ridicules, tout comme l'est la proposition de motion. En effet, cela fait des années que, proportionnellement, Genève est le champion de la création d'emplois en Europe; on a créé en tout cas 15 à 20 000 emplois; pendant la même période, le nombre de frontaliers a augmenté de 30 000 - et je ne parle pas de nos amis vaudois dont le nombre croît de manière exponentielle - et l'on a toujours 25 000 demandeurs d'emploi ! Parce qu'il faut être conscient qu'il est facile de dire que le chômage est stabilisé ou qu'il diminue, mais c'est un gros mensonge politique ! En effet, avec la nouvelle loi sur le chômage, les chômeurs resteront peut-être moins de temps au chômage; mais ensuite, s'ils n'ont pas de travail, où iront-ils ?! A l'assistance ! Alors, c'est de toutes ces personnes qu'il faut tenir compte ! Et pas seulement de celles qui sont inscrites au chômage.
Maintenant, quand on parle de mixité...
Une voix. Vous avez voté la loi !
M. Claude Jeanneret. Oui, cela ne fait rien, elle est très bonne, la loi ! Ce n'est pas la loi qui est mauvaise ! Donc, concernant la mixité - et là je rejoins mon collègue Deneys - ce n'est pas en ayant des monstres comme Ikea que l'on va la créer ! La mixité serait intéressante si l'on commençait à réfléchir à l'idée que, lorsqu'on développe des zones d'activités, on doit aussi établir des zones de logements. Parce qu'il ne sert à rien de créer de l'activité si c'est pour faire venir des gens du canton de Vaud ou de la France voisine ! Il faut quand même être réaliste ! Un jour, Genève n'aura plus de contribuables sur place ! C'est quand même dramatique de voir qu'on ne développe qu'un côté, sans tenir compte du tout.
Pour en revenir à cette proposition de motion, je dois dire qu'elle est totalement insuffisante ! Elle ne ressemble à rien du tout, et qu'on la renvoie à l'une ou l'autre des commissions revient au même pour le MCG ! Ce qu'il faut, c'est la reprendre à la base et la rendre intelligente !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. David Amsler, à qui il reste une minute et dix secondes.
M. David Amsler (L). Je ne vais utiliser que dix secondes ! Je souhaite juste vous dire qu'on se rend effectivement compte que, dans le traitement de cette proposition de motion, les deux sujets que sont l'aménagement et l'économie sont très imbriqués. Cependant, dans un premier temps, il faut que ce soit la commission de l'économie qui exprime les besoins de ces zones. Je retire donc la recommandation que j'avais faite tout à l'heure, de renvoyer ce projet à la commission d'aménagement du canton, et vous suggère à présent de le renvoyer à la commission de l'économie.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Catelain, vous aviez aussi demandé que ce texte soit renvoyé à la commission d'aménagement: êtes-vous d'accord que l'on vote tout à l'heure sur un renvoi à la commission de l'économie ? (M. Gilbert Catelain ne répond pas.) Monsieur Catelain, vous êtes avec nous ? (Brouhaha. Rires.) Monsieur Catelain, vous avez demandé tout à l'heure que l'on renvoie cet objet à la commission d'aménagement: maintenez-vous votre proposition ? (M. Gilbert Catelain acquiesce.) Très bien ! La parole est à M. le conseiller d'Etat Pierre-François Unger.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion vient à point, non pas pour savoir à ce stade-là où il faut localiser d'éventuelles zones industrielles et artisanales, mais s'il en faut ou non. Or il est évident qu'il en faut, puisque nous avons dû refuser, Monsieur Etienne, l'implantation d'un certain nombre d'entreprises par défaut de surfaces.
Voilà la première question, mais il convient aussi de dire que les zones industrielles doivent être réaménagées. Je crois que c'est Mme Künzler qui indiquait qu'elles pouvaient être densifiées, c'est vrai, certaines industries peuvent désormais se constituer sur les étages et plus uniquement sur les rez-de-chaussée, car toutes n'ont pas besoin d'avoir accès au rail. Il suffit de voir les nouvelles industries horlogères dans la Ziplo pour se rendre compte qu'elles peuvent avoir quatre, cinq ou six étages, et qu'on y travaille à chacun d'eux sur un type industriel. Il en va de même de Serono, par exemple, qui possède des laboratoires jusqu'au sixième ou septième étage. Il s'agit donc certainement de repenser les zones industrielles en termes de densité.
Mais il en faut plus, parce qu'il restera un certain nombre d'industries qui nécessitent d'avoir un accès direct. C'est l'industrie que je qualifierai de plus lourde, mais qui est très importante pour Genève, comme Sécheron, ABB et bien d'autres entreprises qui ont besoin de bénéficier de surfaces relativement grandes, et cela - pour pouvoir continuer à y gagner leur vie - à un prix relativement raisonnable, c'est-à-dire celui de la zone industrielle.
Je reconnais que j'aimerais réellement que cette proposition de motion soit renvoyée en commission de l'économie, pour qu'on puisse définir ce nouveau profil de l'industrie à Genève, qu'on parle de la mixité et qu'on tombe d'accord sur la définition de ce terme. En effet, j'en conviens, je ne vois pas ce que de grandes zones commerciales ont à faire en zone industrielle, sauf lorsqu'elles ont des caractéristiques particulières. D'ailleurs, l'une d'elles, qui a été citée, les possède. Mais la zone industrielle n'est a priori pas faite pour les supermarchés, ces derniers devant être logés ailleurs.
Alors renvoyez cette proposition de motion à la commission de l'économie, et nous verrons là aussi les travaux en cours. Les membres de cette dernière se sont concertés avec ceux de l'aménagement, puisque ce sont des horizons qui nous portent relativement loin, mais on pourra vous dire quelles sont les zones sur lesquelles vous aurez à vous prononcer en matière de déclassement à court terme. Je pense à Bernex-Est, pour lequel un projet de loi viendra devant votre parlement avant la fin de l'année. Mais il faudra avoir bien défini ce que l'on veut, où et comment on le veut, si l'on souhaite que les choses aillent à une vitesse suffisante pour permettre à Bernex-Est de nous tirer une épine du pied, ce qui est indispensable.
D'autre part, personne n'a mentionné ce soir un projet pourtant phare pour Genève, à savoir la Praille-Vernets-Acacias. Cette région - pour laquelle je crois que l'enthousiasme de votre parlement, comme celui de toutes celles et ceux qui en entendent parler, est manifeste - nécessitera de définir, elle aussi, une mixité, puisqu'on y veut 6000 logements supplémentaires et 20 000 emplois de plus. Alors de quelle mixité parlons-nous ? Le seul élément sur lequel je suis sûr que nous pourrons nous mettre d'accord, c'est que cette zone devra être industrielle et artisanale, qu'elle soit mixte ou non. En cela, je préavise favorablement l'amendement du parti socialiste, parce que c'est le titre de la loi; ce dernier concerne les zones industrielles et artisanales, dont on a autant besoin l'une que l'autre, cela a été dit, mais sans qu'elles ne soient forcément toutes deux nécessaires au même endroit.
Et lorsque nous travaillons avec les différents industriels de la zone de la Praille-Vernets-Acacias, nous voyons que certains désirent rester, se développer, admettre même une promotion de leur valeur immobilière, représentée soit par une pleine propriété, soit par un droit de superficie, alors que d'autres, au contraire, préfèrent envisager de quitter cette zone, comprenant que leurs activités n'y ont pas un immense avenir. C'est la raison pour laquelle nous devons ensemble faire cette cartographie, qui permettra à ce grand projet de se réaliser. Je vous suggère donc réellement de renvoyer tout d'abord cette proposition de motion à la commission de l'économie.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons donc voter en premier lieu sur le renvoi de ce texte à la commission de l'économie.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1745 à la commission de l'économie est adopté par 49 oui contre 36 non et 2 abstentions.