Séance du
vendredi 22 février 2008 à
17h
56e
législature -
3e
année -
5e
session -
26e
séance
M 1756
Débat
La présidente. Je vous rappelle que nous sommes toujours en catégorie II: trois minutes par groupe sont imparties. Monsieur Gillet, vous disposez de trois minutes, ensuite un député de votre groupe pourra encore s'exprimer trois minutes.
M. François Gillet (PDC). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, hier soir, nous avons abordé cette question du chômage et nous avons entendu à plusieurs reprises certains députés insister sur le problème particulier du chômage des jeunes. C'est vrai, il est particulièrement dommageable de se trouver sans emploi, lorsqu'on est en passe de démarrer une vie active.
Quel est le contexte de cette motion ? La question du chômage des jeunes touche trois lois de notre République. D'abord, la nouvelle loi en matière de chômage - cela a été dit hier soir. Ensuite, la loi récemment votée par notre parlement concernant la formation professionnelle et l'information scolaire et professionnelle. Enfin, la LIP, la loi sur l'instruction publique, qui, comme vous le savez, va devoir être modifiée dans un proche avenir, concernant le cycle d'orientation. Mesdames et Messieurs, les réponses à la problématique du chômage des jeunes se trouvent à l'intersection de ces trois lois.
Il faut rappeler aussi que deux départements sont concernés par cette question: le département de la solidarité et de l'emploi et le département de l'instruction publique. On pourrait même dire que le département de l'économie, d'une certaine façon, est également concerné par cette question. Il est donc difficile de trouver des réponses à cette problématique sans une réelle concertation et une cohérence d'ensemble de l'action de notre canton sur ce point.
Petit rappel également. Le parti démocrate-chrétien souhaitait que cette motion soit une motion rassembleuse. Nous avons donc accepté de reporter la date de dépôt de cette motion pour pouvoir discuter avec les différents groupes afin de modifier le texte que nous avions envisagé. Cela a été fait: des députés du groupe libéral, des députés du groupe radical, des députés des Verts et des députés du groupe socialiste nous ont fait part de leurs remarques, et des modifications ont été apportées à ce texte. Nous regrettons malgré tout que les signataires de cette motion soient exclusivement démocrates-chrétiens. Nous aurions réellement souhaité élargir l'adhésion à cette motion.
Nous savons que cette motion suscite quelques réserves dans cette enceinte. Certains nous ont déjà dit qu'elle enfonçait des portes ouvertes, que les choses avaient déjà bougé dans ce domaine... Ce que l'on peut dire, c'est que, effectivement, un certain nombre de portes sont - je dirai - entrouvertes depuis le dépôt de notre motion - et nous nous en réjouissons - notamment s'agissant de la concertation entre les départements, surtout sur l'implication des milieux professionnels au niveau du cycle d'orientation. Mais d'autres portes, il faut le dire, sont aujourd'hui encore complètement fermées, et nous pensons qu'il est urgent de les ouvrir.
La présidente. Pardonnez-moi, Monsieur le député, je vous indique simplement que vous avez déjà parlé trois minutes - vous pouvez continuer, puisque votre groupe a droit à six minutes, mais je voulais le vous signaler.
M. François Gillet. Merci, Madame la présidente. En fait, sans entrer dans les détails, Mesdames et Messieurs les députés, la loi en matière de chômage n'a pas de spécificité concernant le chômage des jeunes, et c'était une bonne chose, nous l'avons soutenue. Il est maintenant nécessaire que nous trouvions le moyen d'assurer une cohérence de l'action de l'Etat, par rapport à la problématique du chômage des jeunes, en interaction avec ces lois et les départements concernés. Notre motion va essentiellement dans ce sens: trouver le moyen d'assurer une cohérence de cette politique, trouver le moyen de faire en sorte que les nombreux partenaires qui agissent dans ce domaine, qu'ils soient cantonaux, communaux ou associatifs, puissent faire part de leurs expériences, que nous puissions mieux informer le public de ce qui existe et que les milieux professionnels puissent davantage être impliqués dans les actions... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ...menées pour lutter contre le chômage des jeunes.
Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs, notre groupe vous demande, dans la mesure où cette question a déjà été abordée sous différents angles en commission de l'économie et en commission de l'enseignement, et pour que le Conseil d'Etat puisse nous faire rapport dans les meilleurs délais sur ce qui se fait déjà, sur ce qui est prévu d'être développé encore dans ce domaine, de bien vouloir accepter de renvoyer directement cette motion au Conseil d'Etat. Cela nous permettra d'avoir une vision globale de cette problématique importante qu'est le chômage des jeunes à Genève. (Applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG). Je ne peux que regretter ce qui se passe dans cet hémicycle ! Il me semble que chaque groupe parlementaire peut, en tout temps, demander le renvoi en commission. Maintenant - c'est nouveau, ça vient de sortir - quand le temps de parole d'un groupe est utilisé, il ne peut même plus demander le renvoi en commission ! Pfut ! Moi, je ne trouve pas le procédé très démocratique, mais nous en reparlerons: le MCG enverra un courrier au Bureau du Grand Conseil.
Cela étant dit, Mesdames et Messieurs, vous venez de parler du chômage des jeunes... Vous voulez que je vous dise quelle est la réalité du chômage des jeunes, notamment pour les apprentissages ? Alors, je vous dirai que les entreprises genevoises ne veulent plus engager d'apprentis parce que cela coûte trop cher et parce que les maîtres d'apprentissage doivent suivre des cours de formation. Et puis, suite aux accords de libre circulation, on peut désormais se passer de formation, puisque nos voisins français, apparemment, forment mieux les apprentis que nous, à Genève.
Vous voulez parler du chômage des jeunes ?! A Vernier, il y a deux semaines, nous avons auditionné six jeunes entre 18 et 25 ans. Les six, sans exception, ont dû arrêter leur apprentissage parce qu'ils n'avaient pas de quoi subvenir à leurs besoins ! Et où ont-ils terminé ?! A l'Hospice général, parce qu'ils arrivent à y toucher 2100 F par mois, ce qui leur permet de survivre ! Avec les 600 F qu'ils gagnaient pendant leur apprentissage, ils n'arrivaient ni à payer leur studio ni leur assurance, ni le reste !
Vous voulez qu'on parle de l'aide aux chômeurs ?! Alors, quand nous vous proposons de mettre en place un Contrat Citoyen, Mesdames et Messieurs les députés - qui n'était pas discriminatoire, puisqu'il autorisait même les entreprises à engager des travailleurs européens, et les entreprises qui l'auraient respecté auraient bénéficié d'abattements fiscaux, taxes professionnelles, etc. - eh bien, vous vous êtes tous gaussés en disant qu'il s'agissait encore d'une attaque contre les frontaliers ! Mais c'est vous qui en faites des boucs émissaires ! Parce que vous n'êtes pas capables de travailler main dans la main, en dehors des clivages politiques ! La preuve: les déclarations qui ont été faites il y a dix minutes dans ce parlement contre le Mouvement Citoyens Genevois ! (Protestations.)
Mesdames et Messieurs, je prends la population à témoin pour savoir qui dit que nous faisons partie de la région genevoise et qui, finalement, «se fout» des résidents genevois ! C'est bien le message que vous avez donné avant !
Eh bien, nous, nous continuerons à défendre les résidents genevois, les chômeurs et les petites gens, parce que, apparemment, le parti socialiste - la «gauche caviar» - est complètement déconnecté des personnes qui sont dans le besoin et qui n'ont pas de travail ! (Commentaires.)
Une voix. Qu'il est pénible !
La présidente. Monsieur le député, je vous l'ai déjà demandé à plusieurs reprises, vous devez vous adresser à la présidence. Par ailleurs, j'aimerais que vous fassiez preuve d'un peu de retenue dans ce parlement, ne serait-ce que par égard pour les personnes qui assistent aujourd'hui à la séance. (Applaudissements.) Monsieur Gabriel Barrillier, vous avez la parole.
M. Gabriel Barrillier (R). Un peu d'humour ! Je constate que notre collègue Stauffer a déjà retrouvé son naturel, lui qui, hier, avait adopté le ton d'un candidat au Conseil d'Etat: très modéré... très «soft». Le chômage des jeunes est inadmissible, certes, mais la polémique n'est pas de mise pour un tel sujet !
Je tiens à féliciter le groupe PDC d'avoir déposé cette motion qui relève un vrai problème, contrairement à plusieurs de ses motions, que nous avons traitées hier et qui étaient discutables. Cette motion-ci fait un inventaire tout à fait complet des difficultés et des problèmes que rencontre une frange de notre jeunesse pour trouver un emploi après la formation.
M. Jeanneret - il est absent, pour le moment - a signalé hier, au cours d'un débat - qu'une dizaine d'apprentis qui avaient suivi une formation au CEPTA et qui avaient obtenu un CFC n'avaient pas trouvé de travail. C'est vrai, et je pense que ce sont - il ne faut pas se voiler la face - des situations inacceptables. L'ensemble des acteurs qui s'occupent de la formation professionnelle et, ensuite, de l'accompagnement des jeunes doivent améliorer leur collaboration, leur coordination - c'est leur objectif - pour éviter des situations de ce genre et pour leur permettre de trouver un emploi. Parce que ces situations, je le répète - et je peux l'attester, car je suis, avec d'autres dans cet hémicycle, très engagé dans la problématique de l'apprentissage et de la formation professionnelle - sont inacceptable.
Le groupe PDC a énuméré toutes les portes qui ont été entrouvertes et celles qui devraient s'ouvrir davantage - dont une meilleure coordination - mais j'aimerais tout de même vous rappeler que les bases ont été décidées par ce parlement avec l'acceptation de la révision de la loi cantonale sur la formation professionnelle et avec la promulgation d'une loi sur l'information et l'orientation professionnelle.
Pour le reste, je puis attester qu'enfin se développe une véritable collaboration transversale entre les départements. C'est nécessaire pour apporter, une fois pour toutes, des solutions crédibles à ce problème difficile qu'est le chômage des jeunes.
Je voudrais tout de même terminer en signalant que 95% des jeunes filles et des jeunes gens qui obtiennent un CFC trouvent un emploi. Il ne faut donc pas non plus avoir un discours misérabiliste. Je vous remercie.
Le groupe radical, bien évidemment, soutient cette motion et son renvoi au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
La présidente. Monsieur Weiss, je vous donne la parole. Je vous signale que Mme Fabienne Gautier, de votre parti, est inscrite et que vous avez droit à trois minutes par groupe.
M. Pierre Weiss (L). Je voudrais exprimer l'accord du groupe libéral tant sur les considérants que sur les invites de cette motion. Nous l'approuvons sans réserve.
Permettez-moi toutefois d'ajouter en introduction, Madame la présidente, que, si l'on peut ne pas être d'accord sur la forme des interventions de tel ou tel dans cette enceinte, on peut aussi ne pas être d'accord sur le fond. En effet, dépeindre la situation genevoise comme étant catastrophique - comme le font certains - c'est, d'une part, montrer une méconnaissance de la réalité et, d'autre part, tenter d'éveiller des peurs dans la population qui ne correspondent précisément pas à la réalité. Voilà, d'ailleurs, comment l'on peut définir une politique populiste. J'en ai terminé sur ce point.
Concernant la motion, je note que tous les considérants et toutes les invites s'imposent d'évidence, et je ne reprocherai pas à nos collègues PDC d'affirmer des choses qui sont non seulement nécessaires, mais d'autres qui existent déjà. Je relève simplement qu'il faut apporter un complément à l'exposé des motifs, et le Conseil d'Etat n'y manquera certainement.
Il est par exemple affirmé que les jeunes «...rencontrent d'énormes difficultés pour s'insérer rapidement dans le monde du travail...». Certes, mais si l'on compare la situation des différentes classes d'âge de chômeurs, l'on constate que ceux qui rencontrent les plus grandes difficultés sont les travailleurs de 50 ans et plus. Le chômage des jeunes - et même pour les 16/20 ans - est, premièrement, à peine différent de la moyenne de la population suisse et, deuxièmement, se marque par une durée d'attente nettement inférieure qu'elle ne l'est pour le reste de la population des chômeurs. En d'autres termes, la situation dans notre pays est certes problématique, mais, en réalité, pour la catégorie des jeunes, elle est nettement meilleure que dans d'autres pays. L'apprentissage dual est en particulier une des raisons de cette bonne situation. Et je peux simplement témoigner, après mon collègue Barrillier, que la collaboration est maintenant extrêmement forte: les commissions extraparlementaires s'occupent des liens entre le monde des organisations du travail - patronat, syndicats et l'Etat, notamment l'office de formation et de perfectionnement professionnels - ce qui ne peut qu'améliorer le système.
La présidente. Je vous remercie, Monsieur le député. Il reste trente-cinq secondes à Mme Fabienne Gautier.
Mme Fabienne Gautier (L). Merci, Madame la présidente. Je serai rapide, car tout a déjà été dit. Mais j'aimerais simplement souligner la collaboration que nous avons actuellement avec la direction de l'Action sociale et l'Hospice général, qui a mis sur pied un projet de stage «Incite+», piloté par ces deux services dont je viens de parler, qui a pris langue avec toutes les associations professionnelles et leur a envoyé des documents. Le but est d'offrir des stages d'une durée de six mois à des jeunes qui ne trouvent pas d'emploi, pour essayer de les réinsérer dans le monde du travail et leur redonner goût à la vie professionnelle.
Je dois relever que cette collaboration est très active et qu'elle génère des effets très positifs. De plus, cela répond à la nouvelle collaboration que nous avons avec les services de l'Etat.
M. François Thion (S). Nous ne pouvons qu'être d'accord avec cette motion. D'ailleurs, le parti socialiste a toujours insisté, tout au long des travaux sur la loi sur le chômage, pour que l'on prenne des mesures en faveur des jeunes de moins de 25 ans. Nous sommes tout à fait d'accord s'agissant du rapprochement entre l'office cantonal de l'emploi et l'office pour l'orientation de la formation professionnelle et continue. J'ai travaillé personnellement dans les deux commissions concernées et je sais l'importance de tels rapprochements.
Dans les considérants de la motion, vous exprimez votre crainte que les jeunes ne se dirigent vers des études longues et qu'ils doivent arrêter la filière entreprise en cours de route, après quelques années au collège, parce qu'ils ont des notes insuffisantes et qu'ils doivent se diriger dans une autre direction. Nous avons maintes fois abordé ce problème, mais nous ne trouvons pas vraiment de solution. Bien sûr, il faut promouvoir la formation professionnelle ! Bien sûr, il faut promouvoir l'apprentissage ! Mais il ne faut pas oublier que les jeunes - on l'a constaté - veulent aller aussi loin que possible dans leurs études, et ils doivent changer d'orientation lorsqu'ils n'ont pas les notes suffisante. Et puis, par ailleurs, certaines professions manuelles ne sont pas très bien cotées dans la population, notamment parce que les salaires sont peu élevés. Il faudrait peut-être agir à ce niveau-là.
Nous soutenons la motion déposée par les députés PDC, tout en leur signalant qu'ils auraient aussi pu appuyer le groupe socialiste quand celui-ci a présenté des amendements sur la loi sur le chômage demandant, précisément, des stages pour les jeunes. Nous l'avons fait en commission, et vous l'avez refusé ! Nous l'avons fait en plénière, et vous l'avez refusé ! C'est tout à fait incohérent de votre part !
Il y aurait encore beaucoup de choses à dire, mais je ne veux pas monopoliser la parole. Je demande simplement le renvoi de cette motion à la commission de l'économie, car certaines invites ne sont pas très claires.
M. Gilbert Catelain (UDC). L'ensemble des éléments abordés dans cette motion ont été traités soit en commission de l'économie soit en commission de l'enseignement. C'est vrai, le PDC a l'habitude de faire des copier-coller des débats de commission pour les transformer en motions, ce qui n'enlève toutefois rien à leur pertinence, puisque ces problèmes ont été discutés, évoqués, reconnus et que des solutions ont été apportées.
Il a été dit que le chômage des jeunes était faible en Suisse, proche de la moyenne nationale... Nous pouvons même nous en féliciter: à titre de comparaison, le taux en Suisse est quatre fois moins élevé qu'en France ! Par contre, il est vrai également que le chômage des jeunes est nettement supérieur à Genève qu'à Zurich. L'étude PISA 2006 a clairement démontré que c'était dû à l'inadéquation entre l'offre de formation, la structure de formation et le marché du travail.
D'un autre côté, nous sommes confrontés à un problème démographique, à savoir le vieillissement de la population. Dans les services publics, nous savons que des générations d'instituteurs vont partir à la retraite ces prochaines années. Il en est de même pour les personnes travaillant dans les services sociaux. Nous allons donc devoir faire face à une véritable pénurie de main-d'oeuvre dans les années qui viennent. C'est une aubaine pour la nouvelle génération qui va arriver sur le marché de l'emploi, pour autant que celle-ci soit armée pour affronter ce dernier.
Ce parlement a empoigné le problème, puisqu'il a aidé le Conseil d'Etat dans ce sens en adoptant deux projets de lois qui sont cités dans cette motion. A savoir la nouvelle loi sur le chômage, qui facilite et anticipe aussi le traitement du chômage, qui accélère la prise en charge des chômeurs, et le projet de loi sur l'orientation professionnelle, puisque nous avions constaté en commission de l'enseignement qu'il y avait un réel problème en matière d'orientation: aujourd'hui, beaucoup trop de jeunes en formation soit ne réussissent pas leur formation professionnelle soit l'interrompent. Je pourrai donner l'exemple de l'Espagne, qui, à l'entrée de l'université, oriente très précisément les étudiants en fonction de leurs capacités et de leurs besoins. Et le taux d'échec en première année d'université est beaucoup plus faible en Espagne qu'il ne l'est en France.
Le problème de pénurie de main-d'oeuvre n'est pas forcément lié aux Accords bilatéraux. Pour l'illustrer, je dirai ceci: dans mon secteur où nous n'engageons que des ressortissants suisses, où la formation est rémunérée au minimum à 3200 F pour un jeune de 20 ans - qui n'aura donc pas besoin de faire appel à l'Hospice général - nous avons un mal fou à recruter des jeunes qui disposent d'une formation.
La présidente. Monsieur le député, il vous faut conclure, vous êtes arrivé au terme de votre temps de parole !
M. Gilbert Catelain. Je vais conclure, Madame la présidente. Je pense qu'il n'est pas nécessaire de renvoyer cette motion en commission. Il vaudrait mieux avoir un rapport sur l'efficacité réelle des deux projets de lois que nous avons votés. Par contre, nous devons faire un effort manifeste dans le domaine de l'instruction publique, notamment en adoptant...
La présidente. Veuillez terminer, Monsieur le député !
M. Gilbert Catelain. ...la nouvelle loi sur le cycle d'orientation, pour permettre à nos jeunes d'affronter le marché de l'emploi avec les meilleures armes possibles.
La présidente. Je passe la parole à M. François Gillet, à qui il reste une minute et cinq secondes.
M. François Gillet (PDC). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais ajouter une chose aux propos de M. Weiss. Il s'agit d'un élément qui a été évoqué lors de nos débats concernant la loi en matière de chômage: le chômage des jeunes est très particulier - le professeur Flückiger l'avait rappelé - parce qu'il est le plus sensible à la conjoncture. Aujourd'hui, la conjoncture est bonne, et ce chômage a tendance à se stabiliser, ce qui est une bonne chose, mais nous savons que la conjoncture varie, et il serait particulièrement opportun de profiter de la bonne conjoncture d'aujourd'hui pour mettre en place des stratégies qui permettront, le moment venu, d'être prêts à affronter de nouvelles difficultés.
Alors, faut-il ou non renvoyer cette motion à la commission de l'économie ? La difficulté, comme je l'ai dit tout à l'heure, est que nous sommes à l'intersection de plusieurs lois et de plusieurs départements. Nous pensons que les discussions ont déjà été partiellement menées dans les deux commissions concernées et qu'il serait plus urgent que le Conseil d'Etat nous donne des résultats tangibles sur ce qui se fait déjà dans ce domaine...
La présidente. Monsieur le député, s'il vous plaît, vous devez conclure ?
M. François Gillet. ...et des pistes sur ce qu'il compte faire encore dans ce sens.
Je souhaiterais tout de même que le groupe socialiste - cela a été rappelé - qui a été très actif dans les débats sur la loi sur le chômage concernant les jeunes, s'associe au renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.
La présidente. Deux personnes du parti socialiste se sont inscrites: il ne leur reste que cinquante-cinq secondes. Qui prend la parole: M. Deneys ou Mme Emery-Torracinta ?
Mme Anne Emery-Torracinta (S). En fait, je souhaitais répondre à certaines remarques de M. Stauffer. La première concerne les places d'apprentissage. Il y a des places d'apprentissage dans le canton de Genève, Monsieur Stauffer, le problème, c'est qu'il y a une inadéquation entre la demande des jeunes et l'offre des entreprises. Dans la pratique, on se rend compte que certains apprentissages sont plus attrayants que d'autres. Par exemple, beaucoup de jeunes veulent entreprendre un apprentissage de commerce - secteur où il manque des places - par contre, ils ne souhaitent pas faire un apprentissage de ferblantier. Il y a donc un vrai travail à effectuer en termes d'information professionnelle.
Vous avez attaqué la «gauche caviar», Monsieur Stauffer... Eh bien, peut-être que cette gauche-là aurait aimé que le MCG défende hier le projet de loi qu'elle a déposé sur les indemnités journalières ou sur le recouvrement des pensions alimentaires. Et puis, j'aimerais vous dire que la «gauche caviar», comme vous l'appelez, ce sont simplement des personnes qui votent contre leurs intérêts particuliers, parce qu'ils font passer les intérêts de la collectivité avant les leurs. Et nous sommes fiers, au parti socialiste, de défendre ces valeurs-là ! (Applaudissements.)
M. Christian Bavarel (Ve). Pour le groupe des Verts, la motion ne semblait pas le meilleur outil législatif pour travailler sur ce sujet... Nous aurions préféré utiliser la voie du projet de loi. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Néanmoins, nous pouvons tout à fait souscrire à l'objectif de la motion proposée par le parti démocrate-chrétien.
Nous constatons très clairement que la formation reste un rempart contre le chômage; effectivement, même si les jeunes bien formés doivent attendre un peu, ils trouvent en général relativement rapidement du travail. Mais les jeunes qui n'ont pas de formation, eux, ne sont pas du tout protégés par rapport au chômage de longue durée.
Le projet de loi concerne plus particulièrement les apprentis ou ceux qui n'ont pas entrepris d'études. Les universitaires, en effet, sont moins touchés par ce problème. Certes, après l'université, ils vont connaître un temps d'attente avant de pouvoir travailler, et c'est toujours difficile de terminer une formation et de commencer sa vie professionnelle par du chômage - nous en convenons - mais ils finissent par trouver du travail. Nous sommes davantage préoccupés par les jeunes qui se trouvent fragilisés en raison de leur manque de formation.
La problématique de l'apprentissage... Nous sommes dans un monde en perpétuel mouvement, avec des idées nouvelles et, malheureusement, nous entrons dans un processus un peu à la française, c'est-à-dire que l'on pousse les jeunes à entreprendre des études universitaires et à considérer l'apprentissage comme une formation de deuxième classe.
Pourtant, l'apprentissage est un mode de formation, qui pourrait être résumé par cette phrase: «On a vu ce que vous êtes; vous serez ce que je suis.» Le maître a été apprenti et l'apprenti pourra devenir maître. C'est la grande force de l'apprentissage, contrairement à l'enseignement classique où l'enseignant détient le savoir et l'élève, lui, ne sera peut-être jamais enseignant, ne serait-ce que parce que, souvent, il ne suit pas le même cursus. En médecine et en droit, le système de l'apprentissage a été adopté: si l'on regarde les fins de cursus dans ces domaines, on voit bien qu'il s'agit de situations d'apprentissage, preuve de la qualité de ce mode de formation.
Le problème pour nous aujourd'hui, c'est qu'il faut rester extrêmement attentifs au fait que les formations aboutissant au CFC ne deviennent pas des formations butoir. Auparavant, les jeunes obtenaient d'abord leur CFC, ensuite, ils pouvaient passer un brevet et, enfin, une maîtrise. Le parcours professionnel pouvait se dérouler de cette manière. Maintenant, les jeunes passent un brevet, ils passent un CFC - un certificat fédéral de capacité - mais les cadres sont des gens qui sortent des HES, par le biais d'une filière gymnasiale. Dans beaucoup de professions, il était possible de gravir les échelons à partir du CFC, ce n'est plus le cas maintenant. Les détenteurs d'un CFC plafonnent et il leur est de plus en plus difficile d'accéder à des postes à responsabilités. Ayant passé un CFC, je vous rends attentifs à cette problématique: il faut que la filière CFC permette aux personnes d'accéder à d'autres formations si elles désirent faire évoluer leur carrière; il faut que des passerelles soient mises en place. Nous courons aujourd'hui le risque de créer des sortes de voies de garage professionnelles, car, malheureusement, la dictature du diplôme se fait de plus en plus sentir. Il faut avoir fait HEC en était jeune. Un CFC d'employé de commerce ne vous permet plus de grimper au sein d'une banque, et c'est regrettable !
La présidente. Vous devez conclure, Monsieur le député !
M. Christian Bavarel. Oui, Madame la présidente. Nous allons suivre la proposition des socialistes de renvoyer cette proposition de motion en commission. Si jamais cette proposition est refusée, nous la renverrons au Conseil d'Etat.
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Eric Stauffer, à qui il reste trente secondes.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Madame la présidente. Monsieur Weiss, je pense que vous ne vous promenez pas dans certaines communes suburbaines comme Vernier ou Onex... Si c'était le cas, vous verriez que vos propos sont complètement erronés.
Ensuite, je répondrai à ma collègue socialiste que la dignité commence par un emploi et non pas par l'assistanat. Parce que vous, ce que vous prônez, c'est l'assistanat dès la fin des études secondaires ! Et c'est ce qui ne va pas chez les socialistes ! Et puis, si parfois je m'emporte, c'est vrai...
La présidente. Monsieur le député, s'il vous plaît, vous devez conclure !
M. Eric Stauffer. ...c'est simplement parce que j'ai la passion de défendre les Genevois pour des sujets qui me tiennent à coeur.
La présidente. Vous devez conclure ! (Exclamations.)
M. Eric Stauffer. Et nous voulons défendre ces citoyens envers et contre tout, certaines fois contre ce parlement, et je le regrette !
La présidente. La parole est à Mme Sandra Borgeaud, qui dispose d'une minute et demie pour intervenir.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Merci, Madame la présidente. Je rappelle que je suis cosignataire de cette motion, ce qui veut dire que le chômage des jeunes me tient aussi à coeur, autant que le chômage des personnes âgées. Comme je l'ai dit hier, j'aimerais qu'il n'y ait pas de ségrégation et que l'on aide toutes les catégories de personnes.
J'ai entendu dire beaucoup de choses au niveau de la formation. C'est vrai, aujourd'hui, un jeune qui a des diplômes commence par timbrer au chômage - c'est sa première activité - parce que les patrons voudraient engager des universitaires de 22 ans qui ont dix ans d'expérience professionnelle... Il serait peut-être temps de se réveiller et de constater que cela est totalement impossible !
Et pour les jeunes qui ont suivi des études secondaires, universitaires, eh bien, c'est toujours le même problème qui se pose: le manque d'expérience !
Par ailleurs, les jeunes montrent peu d'intérêt pour certaines professions. Il faut donc revaloriser certains emplois, que ce soit dans le domaine de l'hôtellerie, de la restauration, du paysagisme, les métiers manuels en général, qui sont boudés au profit des professions du tertiaire - le secrétariat, l'informatique. En matière de recherche d'emploi, ça explose: tout le monde a la même formation et tout le monde veut le même emploi. Ce n'est pas possible ! Les métiers manuels sont malheureusement beaucoup moins bien payés que les métiers du tertiaire, et cela fait des années et des années...
La présidente. Madame la députée, s'il vous plaît, vous devez conclure !
Mme Sandra Borgeaud. Oui, Madame la présidente, je vais conclure ! - ...donc, cela fait des années et des années qu'on le dit. Je voudrais aussi signaler que les conseillers au chômage ne sont pas toujours compétents. Un exemple...
La présidente. Il vous faut conclure, Madame !
Mme Sandra Borgeaud. S'il vous plaît, je voudrais terminer, Madame la présidente !
La présidente. Je suis désolée, Madame la députée, c'est pareil pour tout le monde !
Mme Sandra Borgeaud. Pendant que vous me demandez de conclure, on perd du temps ! (Brouhaha.) Un exemple: le chômage refuse une formation de secrétaire médicale à une secrétaire administrative, parce que c'est considéré comme une reconversion... C'est une aberration ! Alors, puisque vous prônez la formation, donnez-là et arrêtez de trouver toutes les excuses pour refuser de payer les cours !
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat, si vous veniez à lui renvoyer cette motion, l'acceptera avec plaisir. Cela lui permettra, outre d'examiner les invites, de rappeler aussi certains principes qui guident sa politique en matière de chômage des jeunes, d'instruction publique ou d'insertion. Cela lui permettra également de rappeler un certain nombre de faits.
Madame Borgeaud, vous avez affirmé tout à l'heure quelle était l'importance des diplômes universitaires pour trouver d'un emploi. Je vous ferai remarquer que le meilleur diplôme contre le chômage est aujourd'hui l'apprentissage, le CFC. Toutes les statistiques en matière de chômage le montrent, à Genève comme dans les autres cantons suisses. Il faut donc mener une politique volontariste en matière d'apprentissages, parce que ce sont des formations professionnelles qui sont conformes aux besoins du marché. Elles permettent aux jeunes d'obtenir une première expérience professionnelle qui est très valorisée sur le marché du travail. C'est la raison pour laquelle le département de l'instruction publique et le département que je préside coorganisent des événements comme la Cité des métiers pour, précisément, encourager l'apprentissage. Il reste, je le répète, le meilleur remède contre le chômage des jeunes et contre le chômage tout court.
Si vous nous renvoyez cette motion, nous pourrons aussi vous expliquer les remèdes qui sont proposés. La création de SEMO ? Ce sont assurément de très bonnes initiatives. Je tiens toutefois à rappeler qu'il y a des places libres disponibles dans les SEMO de Genève et qu'elles sont aujourd'hui trop importantes par rapport à la demande. Cela doit aussi susciter quelques interrogations. Nous reviendrons également sur les autres mesures qui sont listées dans votre motion, que le Conseil d'Etat acceptera avec plaisir.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets tout d'abord le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'économie, comme cela a été demandé.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1756 à la commission de l'économie est rejeté par 60 non contre 17 oui et 1 abstention.
Mise aux voix, la motion 1756 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 66 oui contre 4 non et 7 abstentions.