Séance du
vendredi 22 février 2008 à
15h30
56e
législature -
3e
année -
5e
session -
25e
séance
RD 730
Débat
M. Jacques Follonier (R), rapporteur. J'aimerais tout d'abord solliciter votre mansuétude pour mon intervention, parce que, vous l'aurez peut-être compris, nous aurions souhaité que ce rapport sur l'Université passe en plénière. Cependant, vu l'urgence de l'examen de cet objet, le seul moyen était de le traiter dans les extraits. Dès lors, nous essayerons de faire en sorte que nos prises de parole ne prennent pas trop de temps.
Ce rapport sur l'Université est important et nous y avons consacré un grand nombre d'auditions dans le cadre de notre sous-commission. Nous avons travaillé sur la base du rapport ICF, qui a déclenché, vous vous en souvenez, beaucoup de remous sur la problématique des frais de déplacement, de réception et des indemnités de l'Université. C'est dommage, mais cela me permet aussi de rétablir un peu la situation ce soir, puisque ce rapport ICF porte en réalité non pas sur ce seul sujet mais sur dix-sept points. La question des indemnités et des frais de déplacement n'en était donc qu'une seule sur dix-sept, et il est bien évident que nous nous sommes également attardés sur le traitement des seize autres points.
De ces travaux, il est ressorti finalement sept recommandations, que nous souhaitons exposer à notre Grand Conseil, et qui sont d'ailleurs classées en ordre croissant.
La première recommandation concerne la gestion des fonds DIP et non DIP. Pour simplifier, il convient de savoir exactement où va l'argent qui est versé par le département - donc par l'Etat - à l'Université, et à quoi il sert. En effet, on s'est aperçu qu'il est très difficile d'avoir une comptabilité relativement claire sur cette gestion des fonds.
La deuxième recommandation touche le contrôle interne. Nous avons été stupéfaits de voir que, au niveau de l'Université, il n'y avait pratiquement aucun contrôle interne, ce qui, pour un navire comme l'Université, paraît relativement faible. C'est donc un point qu'il faudra corriger assez rapidement.
La troisième recommandation concerne les ressources humaines. A cet égard, nous aimerions souligner que, en tout cas il y a quelques mois, à l'époque où nous avons rédigé notre rapport, la gestion de ces ressources humaines était assurée par une direction bicéphale, c'est-à-dire qu'il y avait deux directrices. Nous avons donc voulu rappeler qu'un système dans lequel les ressources humaines étaient gérées par deux directrices n'était pas souhaitable, d'autant moins qu'il s'agissait de directions à mi-temps. Nous espérons donc que ce point sera corrigé.
Quatrièmement, nous avons souhaité indiquer qu'une comptabilité centralisée serait intéressante. En effet, elle est aujourd'hui dispatchée entre différents corps, qui devraient donc finalement se réunir, de manière que les dépenses soient beaucoup mieux gérées et, surtout, peut-être mieux calculées.
Le point 5 porte sur le statut du corps professoral. Il traite bien sûr du cahier des charges, mais il y a un autre élément qui nous paraissait important et qui a d'ailleurs soulevé de nombreuses réflexions, c'est la question des gains accessoires. Nous avons souhaité dire très clairement à l'Université qu'il était normal que le rectorat ait connaissance de ce que font ses employés. Ainsi, si un professeur enseigne ailleurs, nous pensons qu'il est anormal que le rectorat n'en soit pas informé. Il y a une raison à cela, c'est qu'aujourd'hui c'est le cas, et il me semble que pour l'instant, dans la future loi, c'est une possibilité, alors que j'estime que ce doit être un devoir pour le rectorat de savoir cela. Il devrait y avoir l'obligation de déclarer ces gains, de manière non seulement à les contrôler, mais également à accroître l'aura de l'Université de Genève. En effet, plus un professeur enseigne à l'extérieur, plus cette aura grandit.
Le point 6 concerne l'articulation entre le DIP et l'Université, qui est un des aspects ayant posé beaucoup de difficultés à l'Université tout au long de ces années. Il y a eu exactement le même problème que celui que j'ai mentionné tout à l'heure, c'est-à-dire une direction bicéphale - administrative d'une part et financière de l'autre - du côté du département et, finalement, une seule personne est restée en charge de toute cette articulation. C'est probablement ce qui a conduit à beaucoup de difficultés dans le cadre de l'évolution de l'Université, raison pour laquelle il sera bon de prévoir une meilleure articulation.
La dernière des recommandations, la plus importante pour nous, porte sur un élément qui a engendré, je pense, toutes les dérives que nous avons connues dans le cadre de l'Université, à savoir la convention d'objectifs. Ceux qui siégeaient déjà à l'époque savent que, lorsque nous avons traité en son temps de cette convention, le Conseil d'Etat et le département avaient annoncé qu'ils la réaliseraient. Or les années ont passé et cette convention n'a jamais été matérialisée. Elle a certes vu le jour sous forme de bons sentiments de la part de l'Université, lorsqu'un directeur a eu l'idée d'en faire une sorte de passage interne pour indiquer ce qu'il souhaitait, mais cela n'a jamais été une vraie convention d'objectifs. Nous rappelons par conséquent à ce Grand Conseil, et surtout à ceux qui préparent la future loi sur l'Université, qu'il est impératif que cette convention d'objectifs soit non seulement préparée, mais également signée avant que la loi ne soit votée par notre Grand Conseil. C'est d'ailleurs une des promesses que nous a faites M. Charles Beer, et j'espère bien qu'elle sera respectée.
Pour terminer, je dirai que, après avoir émis ces recommandations, nous avons sollicité deux auditions, celle du département et celle de l'Université, et aussi bien le rectorat que le département ont indiqué qu'ils étaient d'accord avec les remarques que nous avions faites et qu'ils étaient prêts en grande majorité à les suivre. C'est la raison pour laquelle nous vous demandons aujourd'hui de renvoyer ce rapport non pas au Conseil d'Etat, mais à la commission de l'enseignement supérieur, afin qu'il puisse servir de base de traitement à la future loi qui est en cours.
La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe la parole à M. Claude Jeanneret, coauteur de ce rapport.
M. Claude Jeanneret (MCG), rapporteur. Je suis plus que d'accord avec les propos qui viennent d'être tenus. J'aimerais juste soulever un point: notre rapport n'est pas composé de critiques négatives, mais objectives, et il se veut constructif.
Je dois dire que, par rapport à certaines remarques qui avaient été faites par l'ICF, nous sommes beaucoup plus réticents sur le point de vue financier. Concernant les travaux accessoires des professeurs, ce n'est pas uniquement pour que l'on connaisse leurs gains que nous souhaitons qu'ils mentionnent dans leur rapport au recteur l'argent gagné, mais, dans la mesure où ces professeurs sont des ambassadeurs de l'Université de Genève auprès de ceux à qui ils apportent leur savoir, il est normal que celle-ci soit au courant de ce que ces derniers font en dehors de leurs travaux en son sein.
D'autre part, contrairement à l'analyse initiale du rapport ICF, nous avons dans notre compte rendu un peu atténué les écarts, qui ont été effectués plus par habitude que volontairement. Il y a longtemps que les choses se passent de cette manière, et, si un jour on se rend compte qu'elles ne sont plus d'actualité, il s'agit de les corriger, mais pas de faire un procès pour faire un procès !
La question de la convention d'objectifs est beaucoup plus gênante. Cette dernière était prévue dans les nouveaux statuts de 2003, et ce qui me dérange, c'est que, tant du côté du Conseil d'Etat que de celui de l'Université, elle n'a pas encore été réalisée à ce jour, malgré une loi qui la leur imposait. Il me semble pourtant que c'est le début d'une grande sagesse de savoir ce que l'on confie comme travail à son partenaire et à quelles conditions, avant de lui octroyer plusieurs centaines de millions de subsides par année.
Voilà, Madame la présidente, la raison pour laquelle j'ai pris la parole. Je soutiens ce rapport et demande surtout à notre Grand Conseil de bien vouloir l'adresser à la commission de l'enseignement supérieur, de manière que nos remarques - qui, espérons-le, seront appréciées pour leur objectivité - puissent aider à l'élaboration des nouveaux statuts et de la nouvelle loi sur l'Université.
La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur. Je ferai tout à l'heure voter le parlement sur ce renvoi en commission.
Mme Janine Hagmann (L). Comme vous le savez tous, l'Université a traversé de grosses turbulences, qui ont failli coûter la belle image de marque dont Genève jouit. Heureusement, notre Université est tout de même restée classée dans les meilleures d'Europe, souvenez-vous en !
Or, si l'Université a traversé d'aussi grosses turbulences, c'est peut-être parce qu'elle n'avait pas l'habitude de la transparence que doit avoir toute institution autonome. Mais je crois qu'on y arrive, car il y a maintenant une évolution dans les moeurs; on a vu d'ailleurs le rapport de la Cour des comptes demandant de la transparence pour toutes les institutions autonomes. L'Université devra donc dorénavant être transparente, montrer qu'elle a de l'argent public et qu'elle ne peut, par conséquent, pas faire ce qu'elle veut car, encore une fois, l'argent qu'elle reçoit et qui représente une grosse somme est public.
Vous savez d'autre part que le rapport Béguin a tout de même un peu minimisé les turbulences de l'Université. Un journaliste a dit à ce propos que la montagne avait accouché d'une souris. C'est peut-être vrai, mais je pense que nos deux collègues de la commission de contrôle de gestion ont fait un travail très précis et pointu, en reprenant tout ce que l'Université avait à se reprocher dans un rapport qui est intéressant.
La seule chose qui me gêne personnellement, c'est que ça, c'est le passé. Et le passé, c'est vraiment derrière nous ! On ne veut plus sortir des cadavres des placards ! La commission de l'Université s'est mise à l'oeuvre depuis plusieurs mois, elle travaille avec énergie, se réunit chaque semaine avec une grande conscience et consacre beaucoup de temps à l'Université, pour préparer un projet de loi pour l'avenir. Alors je suis d'accord qu'elle prenne connaissance du gros travail fourni par nos deux collègues de la commission de contrôle de gestion, mais que MM. Follonier et Jeanneret sachent que les membres de la commission de l'université ont maintenant reçu la convention d'objectifs; ils ont discuté avec le chef du département, le recteur de l'Université ainsi que les vice-recteurs, et le projet de loi sur l'Université qui va vraisemblablement sortir d'ici à quelques semaines de cette commission permettra de garder à Genève un phare indispensable en ayant une Université qui rayonne.
Mme Anne Emery-Torracinta (S). Je serai brève, parce que je crois que Mme Hagmann a dit l'essentiel. Je voudrais toutefois rassurer les deux rapporteurs. Votre rapport arrive, vous m'en excuserez, un peu comme la grêle après les vendanges, parce qu'au fond la plupart de vos recommandations ont été prises en considération, et notamment celle sur les activités accessoires. Nous avons en effet déjà discuté d'un amendement - sur lequel, je pense, nous serons d'accord - selon lequel les activités accessoires «devront» être déclarées, et non pas «pourront».
Quant à la convention d'objectifs, Mme Hagmann l'a bien dit, nous en avons déjà parlé. Il est donc un peu dommage que votre dernière séance ait lieu en septembre et que ce rapport arrive à l'ordre du jour seulement aujourd'hui.
D'autre part, j'abonde aussi dans le sens de Mme Hagmann: ce rapport doit être remis au Conseil d'Etat, car les députés de la commission de l'enseignement supérieur en ont pris connaissance et l'utiliseront, mais cela ne doit pas aller au-delà.
La présidente. Merci, Madame la députée. (Remarque.) Monsieur Follonier, je suis désolée... (La présidente est interpellée.) Oui... Bien, je vous donne la parole parce que nous sommes en avance mais, dans un débat accéléré, vous savez qu'il n'y a qu'une prise de parole possible.
M. Jacques Follonier (R), rapporteur. Je vous remercie, Madame la présidente. Je serai donc très bref.
Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai que nous arrivons un peu tard, mais soyez quand même conscients que nous avons largement discuté de notre rapport avec les membres de la commission de l'enseignement supérieur. Vous étiez, pour la plupart, déjà au courant de ce que nous préparions depuis des mois; ce rapport n'était donc pas si indispensable.
Néanmoins, il y a un point sur lequel j'aimerais insister. Vous avez parlé de la convention d'objectifs, alors rappelez-vous qu'elle doit être signée, parce que c'est cela, la grande problématique ! Ce n'est pas seulement qu'elle existe, mais bien qu'elle soit signée et adjointe à la loi. C'est la raison pour laquelle je crois que vous n'avez pas tout à fait raison, Madame Emery-Torracinta, il faut renvoyer ce rapport à la commission de l'enseignement supérieur, pour qu'il puisse être joint à la loi. Je crois que cela serait une bonne chose.
La présidente. Nous allons maintenant voter sur le renvoi de ce rapport à la commission de l'enseignement supérieur. C'est dans ce sens-là que je vous ai laissé reprendre la parole, Monsieur Follonier, pour que vous puissiez expliquer pourquoi vous recommandez de le renvoyer à cette commission. Et si votre proposition est refusée, nous voterons sur le renvoi de ce texte au Conseil d'Etat.
Mis aux voix, le renvoi du rapport divers 730 à la commission de l'enseignement supérieur est adopté par 36 oui contre 12 non et 7 abstentions.