Séance du
vendredi 22 février 2008 à
15h30
56e
législature -
3e
année -
5e
session -
25e
séance
PL 10088-A
Premier débat
M. Christophe Aumeunier (L), rapporteur. J'aimerais m'exprimer brièvement sur ce projet de loi un peu particulier.
Vous vous souvenez sans doute de ce que le Grand Conseil a adopté le 17 février 2006 une loi permettant la surélévation de six mètres des immeubles situés en deuxième et troisième zones, et ce dans le respect des normes qui protègent le patrimoine. Deux référendums se sont alors opposés à cette loi et ce n'est que leur jonction qui a permis leur aboutissement.
A ce stade, il convient une fois de plus de saluer l'esprit consensuel voulu par le conseiller d'Etat Mark Muller, qui a désiré adopter une voie pragmatique pour favoriser la construction de logements. Ainsi, il a souhaité la mise en place d'un groupe de travail réunissant les référendaires et les rédacteurs de la loi qui avait été votée. Ce dernier a travaillé de nombreux mois et ses efforts ont débouché sur un accord qui a permis la rédaction du PL 10088, dont il est question ce soir.
Il s'agit en définitive dans cet accord de prévoir une modification des gabarits de trois à six mètres en fonction de la largeur de la rue. C'est donc là une différence par rapport à la loi qui avait été votée, puisqu'on permet une modification de gabarit également pour les immeubles à construire, ce qui est une bonne chose, dans la mesure où l'on peut ainsi obtenir davantage de nouveaux logements.
Il s'agissait en outre d'offrir une garantie supplémentaire en matière de protection du patrimoine, puisque le projet de loi prévoit des cartes indicatives dans les quartiers sensibles. Ces cartes, qui sont en cours de réalisation par le département, montreront de manière indicative les immeubles qui peuvent être surélevés et ceux qui ne le peuvent pas.
Concernant le régime transitoire, il est utile de rappeler que, pendant la réalisation des cartes indicatives, il y a possibilité pour les propriétaires de déposer des requêtes en autorisation pour surélever. Ces requêtes sont soumises au droit actuel, mais, au moins, les choses ne sont pas bloquées et les propriétaires qui le souhaitent peuvent surélever.
J'aimerais enfin préciser que le conseiller d'Etat Mark Muller a strictement indiqué que, s'agissant du régime dérogatoire prévu par la loi sur les constructions et les installations diverses, les articles 10 et 11 sont maintenus et resteront applicables sous la nouvelle loi 10088, que la majorité de la commission vous invite donc à voter, afin de contribuer à la lutte contre la pénurie de logements.
Mme Michèle Künzler (Ve). Il est étonnant de voir qu'un projet aussi important pour la modification du visage de notre ville soit traité lors d'une séance consacrée aux extraits. Mais nous avons pu finalement trouver un accord. Les problèmes que nous dénoncions ont été résolus, c'est-à-dire qu'on ne construira pas deux étages supplémentaires dans des rues étroites, ni aux endroits où le patrimoine ne le permet pas. Tous ces éléments ont donc été pris en compte.
J'aimerais toutefois lancer une petite pique: on aurait pu y arriver plus tôt si, dans sa précipitation, l'Entente n'avait pas fait usage de force et de rapidité en votant une loi à toute allure, un vendredi soir à 22h45, au lieu de prendre le temps de la réflexion. Ma foi, on ne gagne pas de temps à vouloir aller vite ! Et il vaut parfois mieux s'attarder à discuter, car on voit qu'ainsi on peut arriver à un accord.
J'ai demandé à des communes extérieures - Vernier, Carouge - de venir à la commission, parce que le visage de leur commune suburbaine et urbaine se modifiera lui aussi, puisqu'on pourra construire des immeubles de vingt-neuf mètres, c'est-à-dire de deux étages de plus qu'actuellement. Les gens étaient d'accord, et je pense que c'est plutôt dans ces périmètres-là qu'on luttera contre la crise du logement, parce qu'en ville les rehaussements d'immeubles amèneront quelques logements supplémentaires mais ne résoudront pas la crise. Nous saluons donc vivement l'accord qui a été trouvé et espérons que, la prochaine fois, nous parviendrons à un tel consensus avant de lancer des référendums !
La présidente. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Jornot, avec un «t» ! (Rires.)
M. Olivier Jornot (L). Merci, Madame la présidente ! J'aimerais apporter ma contribution aux réjouissances collectives qui entourent ce projet de loi, mais je ne peux pas laisser Mme Künzler dire que la majorité aurait des reproches à se faire, pour avoir voté à l'époque un projet de loi ensuite frappé de référendum. Parce que cette majorité a émis une proposition qui a fait avancer le dossier. Mais ce qui fait toute la différence entre ce qui s'est passé à l'époque et maintenant, c'est l'attitude du département, qui apporte, ou non, sa contribution à la résolution des problèmes techniques. En effet, lorsque vous avez une matière aussi complexe que celle-là, il est bien évident que, si les députés doivent faire leur cuisine dans leur coin et se heurtent à un mur, les choses ne peuvent pas bien avancer.
Cela étant, à quelque chose malheur est bon, puisque le référendum a permis d'améliorer l'exercice. En effet, on avait auparavant une loi de surélévation, et on a maintenant une loi qui permet d'élever les gabarits partout, et non seulement aux endroits où des immeubles sont déjà construits. De ce point de vue, on ne peut donc que se réjouir de cette concertation et du résultat auquel tous les partenaires sont parvenus.
J'aimerais ajouter un mot, pour terminer, sur la question du référendum. L'excellent rapport de M. Aumeunier indique que des discussions ont eu lieu en commission sur la portée du vote de cette loi, qui annule la précédente, par rapport au référendum. Je crois qu'il n'y a pas de doute à avoir à ce sujet, la loi contre laquelle le référendum a été lancé sera dans un instant abrogée et les droits des référendaires ne seront pas lésés, puisqu'ils ont obtenu ce qu'ils voulaient, à savoir l'abrogation de cette loi. En outre, il n'y a pas d'abus, puisque la loi nouvelle est différente de l'ancienne. Par conséquent, je crois pouvoir dire que, à moins qu'un référendum-surprise émane à nouveau de je ne sais où contre cette loi, nous pourrons tranquillement la faire entrer en vigueur, sans vote populaire et avec le soutien de tous.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Deux personnes du groupe radical se sont inscrites pour prendre la parole. Je vous rappelle donc, Messieurs Kunz et Barrillier, qu'il n'y a qu'une intervention par groupe dans les débats accélérés. Voilà, M. Kunz renonce au profit de M. Barrillier, à qui je cède la parole.
M. Gabriel Barrillier (R). La priorité va quand même au chef ! C'est lui qui doit s'exprimer ! (Rires.)
Je ne voulais pas prendre la parole, mais, après la petite pique de Michèle Künzler, j'aimerais quand même rappeler que les auteurs de ce projet de loi l'avaient déposé à la fin d'une législature. Ces deux auteurs, radicaux, se nommaient Hugues Hiltpold et Hervé Dessimoz.
Des voix. Büchi !
M. Gabriel Barrillier. Oui, Büchi ! C'étaient donc Büchi et Hiltpold. (Commentaires.) Oui, heureusement que vous êtes là pour rectifier ! (Rires.)
C'est vrai que la décision par rapport à ce texte a été prise rapidement. Mais a-t-on été trop vite ? Moi je pensais en tout cas que ce projet de loi était bon.
Ensuite, il faut quand même souligner, chers collègues libéraux, le rôle joué par votre nouveau magistrat, le conseiller d'Etat Mark Muller qui, au début de la législature suivante, a tenté de chercher une solution de compromis. Et je note... Moi je n'y croyais pas, à ce compromis, parce que je trouvais que c'était un peu fort de café de lancer un référendum puis de négocier sous la pression et la menace de ce dernier.
En outre, je dois relever, avec surprise, que les deux auteurs du projet de loi, MM. Büchi et Hiltpold, ont collaboré très honnêtement à la recherche d'un compromis. Ce fut donc un accouchement un peu difficile et problématique, mais si le résultat est de mettre sur le marché plusieurs centaines de logements et, ainsi, de résoudre, pour une petite partie, la crise du logement, je crois que l'exercice en valait la chandelle.
Une voix. Bravo !
M. Alberto Velasco (S). Je ne voulais pas intervenir... (Rires.) ...mais, après ce que j'ai entendu, j'aimerais quand même remettre l'église au centre du village, comme on dit !
Monsieur, je veux bien que le nouveau magistrat, M. Mark Muller, pour qui j'ai beaucoup de sympathie, c'est vrai... Mais enfin, de là à dire qu'il était l'architecte de l'accord...
Une voix. Oui, il ne faut quand même pas exagérer !
M. Alberto Velasco. Ecoutez, c'est très simple, M. Hiltpold, qui ne siège plus ici, est venu un jour vers moi, qui suis vice-président de l'Asloca, et m'a demandé si les référendaires étaient d'accord de discuter. Et à partir de là s'est enclenché un processus ! Des commissions se sont engagées de part et d'autre et ont fait un travail extrêmement intéressant, que je salue ici, et qui, grâce à son intelligence et à son ouverture, a finalement convenu au Conseil d'Etat. Voilà comment les choses se sont passées et c'est très bien ainsi ! Et je salue cet accord !
Une voix. Bravo Alberto !
Mis aux voix, le projet de loi 10088 est adopté en premier débat par 55 oui et 2 abstentions.
La loi 10088 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10088 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 58 oui et 2 abstentions.