Séance du
jeudi 24 janvier 2008 à
20h30
56e
législature -
3e
année -
4e
session -
19e
séance
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de Mme Loly Bolay, présidente.
Assistent à la séance: MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, François Longchamp et Mark Muller, conseillers d'Etat.
Exhortation
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. David Hiler, Robert Cramer, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Caroline Bartl Winterhalter, Didier Bonny, Maurice Clairet, Stéphane Florey, Pierre Kunz, Georges Letellier, Pascal Pétroz et Véronique Pürro, députés.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
La présidente. Madame Emery-Torracinta, vous demandez la parole: je vous la donne.
Mme Anne Emery-Torracinta (S). Au nom du groupe socialiste, je demande l'ajout, puis le traitement en urgence de la motion 1806: «Pour une convention collective à Gate Gourmet».
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez trouvé sur vos places cette motion, qui figure à l'ordre du jour. La majorité qualifiée est nécessaire pour accepter l'ajout et le traitement en urgence.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour de la proposition de motion 1806 est rejeté par 32 non et 22 oui.
La présidente. Mme Sylvie Droin, Mme Linda Chabal, M. Raphaël Martin et M. Philippe Guntz sont assermentés. (Applaudissements.)
Annonces et dépôts
Néant.
Premier débat
La présidente. Nous sommes au point 138 de notre ordre du jour. Il s'agit du premier point urgent que vous avez décidé de traiter ce soir.
M. Eric Bertinat (UDC), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, comme vous avez pu le constater à la lecture de mon rapport, le problème de la vidéosurveillance a provoqué un débat nourri, et c'est finalement à une majorité tout à fait relative que ce projet a été adopté.
La question du respect de la sphère privée est revenue souvent lors de notre débat et je me permets de rappeler la réponse que lui a donnée M. Moutinot en indiquant que l'Etat était prêt à prendre des dispositions provisoires, dans l'attente d'une prochaine décision sur le projet de loi 9870 actuellement à l'étude en commission.
Je me permets également de revenir sur le projet initial, qui culminait à un peu plus de 6 millions de francs et qui, suite aux diverses discussions en commission, a été amendé et ramené à 4,7 millions de francs. Pourquoi cette diminution ? Parce que de nombreux commissaires aux finances ont estimé qu'il n'y avait pas là véritablement priorité, mais que, afin de préparer au mieux Eurofoot 2008 et assurer au maximum la sécurité durant cet événement, l'installation de caméras de surveillance sur des trajets publics à risque était une idée qui méritait d'être étudiée. Le projet initial prévoyait trente-et-un sites sur la voie publique et quinze sites diplomatiques, et les commissaires n'étaient pas vraiment satisfaits de ce projet. Les collaborateurs de M. Moutinot l'ont donc modifié, portant à trente-deux le nombre de sites sur la voie publique et laissant les quinze sites diplomatiques. Seize caméras seront donc installées prioritairement, avec le vif souhait de la commission des finances qu'elles soient fonctionnelles pour l'Eurofoot.
Même si les débats ont porté principalement sur la sécurité durant la période d'Eurofoot, ces caméras de surveillance ont quand même une raison d'être: en effet, afin de lutter contre l'insécurité grandissante, de nombreux commissaires ont estimé que nous avons besoin de moyens complémentaires et que la vidéosurveillance en est un. Voilà pour ce qui est de mon introduction.
M. Christian Bavarel (Ve), rapporteur de minorité. Je suis surpris d'entendre parler d'une faible majorité avec neuf voix en faveur du projet de loi, contre quatre oppositions et une abstention ! Faut-il comprendre que les fronts ont peut-être un peu changé depuis ce vote ?
Pour la minorité, le débat porte surtout sur une question de principe, plutôt que sur une somme ou un volume. De quoi parle-t-on ce soir ? D'installer dans la rue des caméras de vidéosurveillance pour contrôler nos citoyens, supprimant de la sorte les relations et nuances qu'impliquent les rapports humains.
J'ai l'impression qu'on est en train, depuis le 11 septembre 2001, d'abandonner certaines valeurs liées à notre démocratie et que nous donnons ainsi raison aux terroristes. Il y a un mode de vie nos pays et nous avons une volonté démocratique qui signifie deux choses: que les hommes et les femmes sont libres et responsables. Alors, j'ai l'impression que nous faisons face à des attaques en règle de ce mode de vie et de cette manière de faire: nous avons accepté de nous laisser fouiller avant de monter dans tout avion et de donner le moindre couteau suisse ou coupe-ongles... Nous avons décidé qu'il y avait beaucoup de règles et de libertés que nous pouvions abandonner totalement, sous prétexte de la peur, de la délinquance, etc.
Ce projet de vidéosurveillance s'appelle «Cyclope». Il m'a semblé que c'était surtout un projet borgne ! Borgne, parce qu'il voyait la vie avec un oeil policier uniquement et qu'il oubliait totalement une dimension aussi importante que la liberté. Je reconnais volontiers que la sécurité est indispensable pour vivre dans une démocratie, la liberté l'est toutefois aussi !
Je suis encore surpris de réaliser à quel point nous acceptons une intrusion dans la vie privée des uns et des autres - les moeurs d'un pays voisin semblent montrer que même la vie privée du chef de l'Etat est quelque chose de parfaitement public... Lorsque je me promène dans la rue avec mon épouse - ou avec une amante - je n'ai pas forcément envie d'être filmé ni de retrouver ces images sur internet ! Je pense que vous non plus, chers collègues ! Et vous ne souhaiteriez pas non plus que, à l'appui de ces images, des policiers ou d'autres personnes puissent aller dire que tel ou tel notable s'entend très bien avec son épouse, ou le contraire...
Peut-être est-ce notre habitude d'être devant les caméras de Léman Bleu qui nous fait croire que la vie est comme dans certaines émissions de «télé-poubelle»: que vous devez être filmés dans votre lit, vous promenant dans la rue, mâchant un chewing-gum, en train de vous mettre un doigt dans le nez, etc. Cette sorte de surveillance omniprésente me semble extrêmement désagréable ! George Orwell décrivait déjà une société affolante dans «1984», son roman d'anticipation: nous sommes en 2008 et je trouve qu'on accepte petit à petit ce modèle. On commence à trouver qu'il est normal d'être surveillé en permanence, on est suffisamment infantilisé pour ne plus être capable... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)
La présidente. Excusez-moi, Monsieur le rapporteur, je suis désolée de vous interrompre, mais il y a trop de brouhaha ! Certains députés préfèrent tenir des conversations privées - sans doute fort intéressantes, mais qui n'ont rien à voir avec ce débat - et ils sont priés de les poursuivre ailleurs !
M. Christian Bavarel. Je vous remercie de maintenir l'ordre dans cette salle. Visiblement, les caméras de surveillance ne semblent pas être suffisantes pour cela: une présence humaine est donc encore nécessaire au sein du Grand Conseil. Heureusement, d'ailleurs !
Dans «1984», George Orwell décrivait un monde que nous sommes en train d'accepter, et cette perte de valeurs m'affole. Je me rends compte qu'aujourd'hui, dans le canton de Vaud, lorsqu'un ex-conseiller national libéral a des ennuis à propos des caméras de surveillance, il demande à un conseiller aux Etats Vert de le défendre. (Commentaires.) Vous me direz peut-être que c'est facile; c'est néanmoins la réalité ! J'espère donc qu'on arrivera à garder ce sentiment, ce côté libertaire, ce goût de la liberté qui peut être le nôtre, qui fait que nous avons vraiment envie d'un monde dans lequel nous soyons libres et responsables. Friedrich Dürrenmatt, lorsqu'il s'adressait à Václav Havel, disait que la Suisse est une prison et que les Suisses eux-mêmes ne le savent pas, parce qu'ils sont leurs propres gardiens... Cela aussi, il me semble que nous l'avons oublié !
Je pense que nous tous, qui sommes députés, qui votons des normes et qui restreignons les libertés de nos concitoyens - chaque fois que nous légiférons, c'est une restriction des libertés - nous devrions fréquenter les galeries d'art plus souvent, celles d'art contemporain en particulier. Je pense au MAMCO et à d'autres endroits intéressants. Je citerai l'oeuvre de Fabrice Gygi, artiste genevois de renommée internationale, déjà mentionné dans mon rapport: il a beaucoup travaillé sur la contention des foules, sur cette sorte d'omniprésence et de volonté de considérer l'être humain non plus comme un individu, mais comme une masse - masse qu'il faut maîtriser, que ce soit par des coussins de rétention ou par différents types de mouvements. Aujourd'hui, c'est d'une manière électronique que nous souhaitons contrôler nos concitoyens... Pourquoi ne pas imaginer que, demain, tout le monde soit muni d'une puce électronique ? On aboutit à des systèmes affolants, et nous continuerons à nous battre contre ces différentes mesures proposées.
Pour terminer, la commission des finances s'est prononcée avant que les travaux sur le fond de ce sujet soient menés par la commission judiciaire - on semble très impatient de gérer les choses en vue de l'Euro 2008... Cela fait des années que je dénonce les coûts liés à cet événement - je rappelle que trois matches de football se joueront à Genève. Et nous parlons d'une somme de 20 millions de francs pour permettre trois matches de football à Genève ! J'ai l'impression que cet Euro 2008 constitue une excuse pour nous faire claquer des millions de francs qui appartiennent à la collectivité... C'est assez surprenant !
Que la fête du football soit la plus totale possible, que les gens aient un maximum de plaisir, nous sommes d'accord avec ça. Néanmoins, le goût de la liberté me semble aussi être quelque chose d'essentiel pour une collectivité. C'est pourquoi je vous appelle à refuser ce projet de loi pour l'instant, mais j'interviendrai certainement une nouvelle fois en fin de débat.
M. Gabriel Barrillier (R). Le rapporteur de minorité a abordé l'aspect éthique de cette problématique. Il est vrai qu'à l'occasion de l'examen de ce crédit d'étude notre Grand Conseil doit être guidé par le principe de la proportionnalité entre la protection de la sphère privée et la sauvegarde de l'ordre public. Cette problématique est juste, il faut la poser. Alors, qu'en est-il ? En acceptant de participer et d'organiser cette manifestation de l'Euro 2008, les autorités suisses et genevoises se sont engagées à assurer la sécurité de la population et des visiteurs, qui vont, d'après mon collègue, se compter par centaines de milliers - peut-être un million si l'on considère les événements festifs qui sont organisés autour des matches de football. Certes - cela a été rappelé - ces manifestations devraient en principe être pacifiques, puisque vouées au «roi» ou au «dieu Football» ! Toutefois, l'expérience de ces dernières années nous montre que les comportements collectifs qui accompagnent ce type d'événements peuvent dégénérer en des débordements dangereux pour les personnes et les biens, c'est comme ça !
Nous savons que des mesures intelligentes et sérieuses ont été prises pour encadrer le cheminement des visiteurs. Dès lors, l'installation de huit à dix caméras en des endroits stratégiques aura sans doute un effet dissuasif et facilitera le travail de la police. Je n'ai pas eu l'impression, en lisant le rapport, qu'il y avait un élément répressif dans ces installations. D'ailleurs, il y a des caméras dans les trams à Genève et je ne crois pas que cela ait provoqué des difficultés !
Dans ces conditions - Monsieur le rapporteur de minorité, je m'adresse à vous - le groupe radical, ayant pesé et mesuré la proportionnalité entre la manifestation monstre qui est prévue et l'installation qui est demandée, est arrivé à la conclusion que ce principe de proportionnalité était appliqué raisonnablement.
Une chose, cependant - et là je vous rejoins: nous avons quand même l'impression que ces investissements sont demandés dans l'urgence, alors que la date de la manifestation est connue depuis très longtemps. Nous voterons néanmoins ce crédit. J'ajoute une note personnelle: même si je ne partage pas vos craintes, j'ai beaucoup apprécié l'approche poétique que vous avez introduite dans votre rapport de minorité. C'était une piqûre de rappel vraiment agréable et je vous en remercie.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Madame la présidente, mes chers collègues, vous savez que l'on ne peut pas accuser le parti démocrate-chrétien d'encourager la dérive sécuritaire. (Huées. Commentaires.) Ça, non ! Je suis tout à fait tranquille par rapport à cela ! Non, vraiment !
Je fais juste un petit aparté pour répondre à mon éminent collègue Barrillier. Ce n'est pas une question d'urgence, Monsieur Barrillier, le projet devait être traité déjà depuis le mois d'avril 2007. Donc, si aujourd'hui il paraît en urgence, c'est notre responsabilité de députés de n'avoir pas traité cet objet suffisamment à temps.
Pourquoi allons-nous soutenir ce projet ? Pour les trois raisons suivantes: d''abord, par rapport au projet initial, ce projet a été réduit et limité à des lieux qui nous semblent tout à fait acceptables pour mettre en place une vidéosurveillance qui n'empiète pas sur les sphères qui peuvent sembler privées, étant donné que cela se passe dans la rue. Alors, si l'on imagine que la sphère privée c'est effectivement un endroit que l'on doit préserver, je pense que, dans la rue, nous ne pouvons pas revendiquer cette même notion de sphère privée !
Deuxièmement, à défaut d'avoir encouragé l'Eurofoot 2008, à défaut de le vouloir - même si pour certains c'était à l'insu de leur plein gré - cet événement fera que Genève pourra pendant quelques jours donner l'impression d'être le centre du monde, avec tous les avantages que cela induira, parce qu'il y aura des retombées économiques intéressantes. Ce sera une autre manière de faire connaître une Genève dynamique, vivante, rigolote et festive - et ça, ça me plaît beaucoup ! Toutefois, il y aussi des risques, inhérents à des manifestations et à des foules surexcitées.
Le troisième élément, c'est que la vidéosurveillance a un effet préventif, nous en sommes quand même convaincus. C'est maintenant prouvé. C'est quand même une manière de faire passer un message et de dire que l'on ne peut pas faire n'importe quoi, n'importe où: on indique que le domaine public nous appartient et que nous devons le respecter.
Pour le parti démocrate-chrétien, il n'y a donc aucun problème à voter ce projet.
M. Eric Stauffer (MCG). C'est quand même assez cocasse que ce soient les libéraux qui prônent l'installation de caméras, quand on se souvient d'une certaine prestation, dans notre hémicycle, qui a été donnée à voir à nos concitoyens un fameux soir ! Vous voyez que les années se suivent et ne se ressemblent pas... Non, ce qu'il faut dire, en fait, Monsieur le rapporteur de minorité, c'est que vous n'avez pas raison sur ce sujet, et pour plusieurs motifs.
Déjà, pour refuser les caméras, vous avez choisi comme argument le fait que nous allions être filmés dans la rue, dans nos chambres à coucher ... Non, ça n'a rien à voir avec ça ! Là, vous êtes en train d'induire la population en erreur. Nous ne sommes pas en train de prôner «drugs, sex and rock'n'roll» ou de dire «peace, my brother» ! Ce n'est pas du tout ce que nous voulons faire, soyons sérieux !
J'aimerais que vous alliez vous promener un peu, le soir, dans certains endroits névralgiques de Genève, par exemple à la place des Volontaires. (Rires.) C'est juste une honte pour cette ville, pour ce canton, pour notre République ! Il y a là, tous les jours, des revendeurs de drogue, alors que des adolescents s'y promènent. C'est absolument innommable ! (Brouhaha.) Si vous avez encore des doutes, Mesdames et Messieurs les députés, je vous encourage à voir le journal télévisé que le Mouvement Citoyens Genevois a réalisé et lors duquel nous sommes allés interviewer les dealers sur place...
Une voix. Bravo !
M. Eric Stauffer. ...pour que la population genevoise ait une vision absolument parfaite de ce qui se passe !
Une voix. C'est une apologie du trafic !
M. Eric Stauffer. Oui, oui ! Apologie du trafic... Mais c'est ce que je disais, mon frère: sexe, drogue et rock'n'roll ! C'est ce que vous êtes en train de prôner ! Et nous, on veut de la sécurité ! De la sécurité pour nos concitoyens... (Remarques. Rires.) A une petite différence près, je rejoins notre collègue Anne-Marie von Arx quand elle dit que les endroits publics nous appartiennent. Non, ils appartiennent aux citoyens de ce canton, qui sont en droit de prétendre à la sécurité ! Et ces caméras vont avoir un effet dissuasif; elles pourront aussi être utilisées pour faire de la répression. Parce que maintenant, il y en a assez, il faut rendre les quais du bord du lac aux citoyens de ce canton ! Il faut les enlever à ces dealers qui nous polluent la vie - et qui polluent la vie - et provoquent de l'insécurité. Et pas seulement un «sentiment d'insécurité», que certains prennent plaisir à gausser urbi et orbi ! C'est vraiment de l'insécurité ! Regardez les statistiques ! Regardez le nombre de plaintes et d'arrestations liées au trafic de drogues ! Eh bien, ces caméras seront un outil pour tenter d'endiguer ce qui se passe !
L'Euro 2008 sera un événement sportif, et ce n'est pas la raison pour laquelle nous avons décidé de soutenir l'installation de ces caméras ! Toutefois, ça pourra aussi être utile pour cela.
Maintenant, je rebondis sur les propos de M. Bavarel, Madame la présidente. Monsieur le député, vous prétendez que ces trois manifestations vont être d'un coût exorbitant... Si j'ai bien compris, vous êtes pour le sport, mais chez les autres. Eh bien, ce n'est pas dans cette société et ce n'est pas ce genre de société que le MCG aimerait voir pour l'avenir de Genève ! Nous, ce que nous voulons, c'est de pouvoir proposer des manifestations sportives avec une sécurité certaine pour nos concitoyens. Et si ces caméras peuvent contribuer à aller dans ce sens, c'est un bien !
Je conclus en disant que nous soutiendrons ce projet de loi. Je sais que vous aviez compris, Madame la présidente, mais, pour les distraits de cet hémicycle, je le répète: nous soutiendrons ce projet, qui est une bonne chose. Et évidement que la vidéosurveillance doit être exercée dans certains lieux précis, et pas dans toutes les rues - ou dans les chambres à coucher, Monsieur Bavarel, comme vous vouliez le faire croire auparavant ! (Commentaires.)
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je suis choquée de ce que j'entends dire par la minorité. Le but n'est pas de surveiller tout le monde, comme s'il n'y avait que des criminels, mais bien d'avoir un minimum de sécurité. La plupart des gens demandent cette surveillance ! Oseriez-vous mettre en cause la bienveillance de cet outil, qui sert à retrouver des criminels et des délinquants ? Il n'y a pas de raison qu'un hors-la-loi puisse passer à travers les mailles du filet. Cette surveillance se pratique dans d'autres villes du monde et cela fonctionne parfaitement bien. S'il n'y a rien à signaler, les images sont détruites ! Les personnes qui trouvent cette surveillance choquante ont peut-être quelque chose à se reprocher. (Huées. Rires.) On ne place pas des caméras dans vos appartements ! Alors, ne suscitez pas une psychose qui n'a pas lieu d'être ! Il s'agit d'assurer du mieux possible la sécurité de notre population et non pas de pénétrer dans la vie privée des gens, cela ne nous intéresse absolument pas !
Je vous recommande donc de voter oui à ce projet de loi. Nous sommes une république, nous sommes censés être intelligents et pragmatiques et nous occuper du bien-être de nos concitoyens. Nous devons accepter l'idée que la plupart d'entre eux puissent avoir peur. Si ce n'est pas votre cas, tant mieux ! Si vous ne vous faites pas de souci en vous baladant à 3h du matin, tant mieux pour vous ! Ce n'est pas forcément le cas de tout le monde. Et même si sur 100% des gens les 95% sont corrects, les 5% qui restent sont ceux qui engendrent la terreur dans la ville de Genève ! Pour en avoir le coeur net, il suffit d'aller se balader la nuit, au lieu de dormir, pour constater de visu ce qui se passe réellement ! Il faut donc arrêter de pratiquer la politique de l'autruche, il faut cesser de vouloir anéantir tout ce qu'on essaie d'améliorer, et surtout - surtout ! - il faut cesser d'occulter ce que tout le monde souhaite en disant que ça ne vous intéresse pas ! C'est exactement comme avec la pédophilie et les abus sexuels: je vois que vous dirigez vos votes contre les personnes. En tout cas vous ne vous basez pas sur les textes, puisque vous ne les avez pas lus !
Donc, cela permettra peut-être de sauver une vie, celle d'un enfant, si quelqu'un peut voir, grâce à une caméra de surveillance, qu'il est en train d'être enlevé ou en train d'être abusé. A bon entendeur !
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, la surveillance des citoyens par l'Etat est haïssable ! En tant que libéral, j'ai horreur d'une société dans laquelle l'Etat prétend tout régir, tout diriger, tout interdire et tout surveiller ! Mais je n'aime pas davantage une société où les plus faibles, ceux que vous défendez d'habitude ou en tout cas prétendez défendre, notamment les personnes âgées, peuvent avoir peur - et dans de nombreuses circonstances. Elles ont - hélas ! - souvent raison d'avoir peur. Bref, en tant que libéral aussi, je ne peux pas aimer une société dans laquelle l'Etat n'est pas capable d'assurer la sécurité des habitants !
Je constate qu'aujourd'hui nous demandons à la police de faire régner l'ordre en toutes circonstances, y compris lors d'événements extraordinaires du type de l'Euro 2008, qui sera une fête, bien sûr, mais une fête avec des foules et avec des hooligans ! Pour ça, alors qu'on demande à la police de faire régner l'ordre en toute circonstance, on lui donne des moyens miteux ! Parce que ce «Cyclope», Monsieur Bavarel, c'est Polyphème après qu'il s'est déjà pris le pieu dans l'oeil: c'est un aveugle, votre cyclope ! Aujourd'hui - lisez l'exposé des motifs du Conseil d'Etat - on a des caméras qu'on ne peut pas commander à distance. Elles regardent là où elles regardent et peu importe ce qui s'y passe ! La police de sécurité internationale nous explique qu'il y a les caméras d'un côté et les agents de l'autre et qu'ils ne voient donc pas ce qui se passe sur les écrans. Il s'agit donc d'une sorte de cyclope qui n'aurait pas l'oeil en face du trou ! Et puis, malgré les moyens disponibles, on n'a aujourd'hui pas de moyens de relecture, pas de moyens de stockage ! C'est «one man, one camera» ! L'efficacité est rigoureusement nulle, de même que l'économie en matière de personnel ! Et cette indigence survient dans un contexte où les besoins ne cessent d'augmenter ! A cause de l'Euro 2008 d'une part, mais aussi à cause d'autres phénomènes, par exemple le fait que l'armée ne sera plus chargée de la sécurité de la Genève internationale. Cela nécessitera la mise en place de moyens cantonaux, qui aujourd'hui n'existent pas. Une autre cause est encore l'augmentation d'une certaine insécurité et d'une certaine délinquance. Je me refuse pour ma part à imaginer une certaine société dans laquelle les parents disent à leurs enfants de ne pas aller se promener du côté du rond-point de Rive parce qu'ils s'y feront casser la figure !
Alors, Monsieur Bavarel, votre rapport est absolument magnifique. D'abord, il est poétique, comme le disait M. Barrillier qui est sensible à la poésie. Toutefois, poèmes mis à part, très franchement, c'est un peu court, Monsieur le rapporteur de minorité ! Vous avez une vision du rôle de l'Etat en matière de sécurité qui n'est pas même libérale, elle est franchement libertaire ! Vous prônez un désengagement absolument total de l'Etat, vous prônez une sorte de néolibéralisme sauvage en matière de sécurité ! (Commentaires.) Je peux vous assurer que ça, ce n'est pas notre conception du rôle de l'Etat dans ce domaine. Ensuite, Monsieur le rapporteur, vous êtes dans le déni, parce que les caméras, elles sont déjà là ! Elles sont partout ! Il n'y a pas seulement celles qui permettent à certains d'entre nous de parler directement à la population. Il y également les caméras qui sont, par exemple dans le secteur privé, dans les magasins, dans les banques. De même, dans le secteur public: où étiez-vous quand les TPG ont introduit la vidéosurveillance ? Vous étiez où quand votre Conseil d'Etat, avec votre majorité, a autorisé un certain nombre de communes à installer des caméras, au Grand-Saconnex ou à Vernier, commune qui n'est pas particulièrement une commune de droite ? Non, Monsieur Bavarel, je vous invite à ouvrir l'oeil, ou plutôt les deux, pas comme le cyclope: vous constaterez que la vidéosurveillance est là et qu'il ne s'agit pas de la nier, mais de la dompter ! Il s'agit de la dompter pour faire en sorte de la rendre compatible avec nos libertés publiques. C'est la raison pour laquelle, au-delà de tous les principes, ce projet de loi est parfaitement acceptable: d'une part, parce qu'il limite à l'essentiel la pose de caméras de vidéosurveillance, à l'essentiel et même, après avoir été redimensionné, à quelque chose qui ressemble peut-être à un tout petit peu moins que l'essentiel. Et ensuite, parce que ce parlement, à la suite du Conseil d'Etat, est en train de se doter d'une législation extrêmement contraignante en matière de protection des données personnelles. C'est la fameuse loi à l'étude en commission judiciaire, une loi qu'il s'agira même d'amender et les libéraux proposeront des amendements, notamment pour faire en sorte que le préposé à la protection des données puisse émettre un avis sur tous les emplacements de pose de caméras de vidéosurveillance pour qu'il ne s'agisse pas d'une compétence qui serait entièrement laissée à l'administration.
Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, malgré toutes les réticences des libéraux face à la sécurité étatique, pour la sécurité de nos concitoyens, nous vous recommandons de voter oui à ce projet de loi.
Mme Mathilde Captyn (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je me demande bien où notre Etat de droit s'en va ce soir. Car, c'est simple, le fond du débat sur la vidéosurveillance, c'est l'expression de la méfiance de l'Etat à l'égard de ses citoyens ! La majorité du parlement qui souhaite aujourd'hui installer des caméras de vidéosurveillance partout à Genève est très inquiétante. C'est l'expression d'une tendance au délire sécuritaire qui peut, avec le temps, très mal tourner.
Pourquoi la vidéosurveillance est-elle dangereuse, inefficace et inutile ? La vidéosurveillance est dangereuse, parce qu'elle constitue une atteinte potentielle à pas moins de six formes de libertés garanties par la Constitution fédérale: la liberté personnelle, l'intégrité physique, l'intégrité psychique, la liberté de mouvement, le droit d'être protégé contre l'emploi abusif de données personnelles et la liberté de réunion. Une base légale est dès lors nécessaire. Or, la seule base légale existante aujourd'hui est une loi qui n'a pas moins de vingt-six ans, la loi sur les informations traitées automatiquement par ordinateur - la LITAO - qui n'est pas du tout adaptée. Le Conseil d'Etat, à majorité de gauche, faut-il le rappeler, prend par conséquent bien des risques à fonder une telle action sur une base légale aussi légère !
La vidéosurveillance est dangereuse sur le plan symbolique, car c'est l'outil d'un Etat sécuritaire dont le message est clair: «Attention, vous êtes filmés !» C'est un outil liberticide, qui tue la spontanéité. La vidéosurveillance culpabilise le citoyen qui se sent sous contrôle et elle renforce ainsi son instinct grégaire. La vidéosurveillance entache l'Etat de droit par l'effet de menace qu'elle produit et elle atténue du même coup la responsabilité individuelle. La vidéosurveillance est dangereuse, car elle augmente le sentiment d'insécurité en transmettant le message que les lieux publics où il y a des caméras sont dangereux. Faudrait-il donc se méfier de toute personne suspecte dans le périmètre où il y des caméras vidéos ? Les caméras ne remplaceront jamais l'intervention de policiers en leur âme et conscience sur les lieux d'un délit. Ce n'est pas une technologie objective, car nous savons tous à quel point l'image est source d'interprétations, donc de subjectivité.
La vidéosurveillance est inefficace car, dans la pratique, les expériences de mise en place de caméras vidéo n'ont pas permis de constater une réelle baisse des infractions. Les TPG ont certes constaté une sensible baisse de la petite délinquance au sein des bus et des trams, mais le bilan est mitigé. Or, dans la rue, l'efficacité d'un tel outil est encore plus discutable. La vidéosurveillance est inefficace, car les images filmées seront forcément d'abord analysées par des policiers. Le temps de donner l'alerte, une intervention sur les lieux sera alors moins rapide qu'avec une police déjà présente dans le quartier. Cet outil n'augmente donc en rien ni l'efficacité ni la rapidité des interventions et des enquêtes de la police.
La vidéosurveillance est aussi inutile, car elle ne va pas empêcher d'agir celui qui veut se comporter mal. Il y aura peut-être une sensible baisse des infractions pendant quelques années, le temps que les gens s'habituent à l'idée d'être filmés de manière permanente, le temps peut-être que certains s'achètent des cagoules... C'est une idée à courte vue, une politique du court terme !
Ce soir, la volonté d'une majorité de ce parlement de vouloir installer des caméras partout n'est, dans le fond, que l'effet d'une mode; pire: d'une idéologie qu'on commence à bien connaître ! Interdire la mendicité, évacuer tous les squats, filmer la population sur les lieux publics: nous vivons l'application du néo-conservatisme, de l'hygiénisme social et de la «tolérance zéro» !
Enfin, une dernière question, concernant justement le long terme: comment pouvons-nous garantir dans le futur qu'il n'y aura pas de dérive dans l'utilisation de la vidéosurveillance ? C'est impossible ! Dès le moment où un tel dispositif est installé, il est facile de l'étendre, mais il sera en revanche bien moins facile de revenir en arrière !
Donc, pour éviter l'installation durable du délire sécuritaire, je vous engage, Mesdames et Messieurs les députés, vous l'aurez compris, à refuser ce projet de loi ! (Applaudissements.)
La présidente. Sont encore inscrits: MM. Jean-Claude Ducrot, Alberto Velasco, Christian Brunier, Gilbert Catelain, Roger Deneys, Pierre Losio, Roger Golay, Christian Bavarel, Eric Bertinat, Eric Stauffer et, enfin, le président du conseil d'Etat, M. Laurent Moutinot. Le Bureau décide de clore la liste des orateurs.
M. Jean-Claude Ducrot (PDC). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je serais près de partager l'angélisme de M. Bavarel. Pourquoi seulement «près» ? Je connais votre sensibilité, vous avez vécu comme moi, durant le mois de décembre, l'arrivée à Genève de quelque 40 000 jeunes dans le cadre des manifestations culturelles et cultuelles de Taizé: il n'y avait ni forces de police, ni caméras de surveillance, et tout s'est admirablement bien passé ! Nous souhaiterions évidemment que les 40 000 pseudo-visiteurs de l'Euro 2008 soient empreints d'autant de joie et de pacifisme, dirais-je, de venir à Genève, puisqu'il s'agit d'un jeu. Or, pour l'Euro 2008, je ne peux malheureusement pas partager votre angélisme ! Quand vous partez de liberté ou d'un côté libertaire, non plus ! Il ne s'agit pas d'être libertaire, il s'agit de préserver la liberté ! La liberté de tout citoyen de pouvoir circuler en toute sécurité ou dans la meilleure des sécurités dans cette ville. Parce que la liberté de chaque citoyen s'arrête là où sa liberté est entravée par des actes délictueux. Or, les expériences qui ont été menées dans différents corps de police - certaines ont déjà du recul - avec la surveillance par caméra, ont montré très nettement qu'il y avait une réduction des délits. Et c'est cela, Mesdames et Messieurs, qui est important ! Il ne s'agit pas de fliquer - excusez le terme - grâce à des caméras tous les coins de rue de notre république, il s'agit de les placer là où, manifestement, comme avec les radars sur la route, il y a une nécessité de prévention ! C'est cela qu'il est important de prendre en compte.
Ensuite, je dirai que nous avons à Genève un certain nombre de policiers insuffisants... (Exclamations. Rires. Applaudissements.) Un nombre insuffisant de policiers !
Une voix. Comme ça, c'est mieux !
M. Jean-Claude Ducrot. Excusez mon lapsus ! Nous avons-là un futur prix Champignac ! Nous avons un nombre insuffisant de policiers et les caméras de surveillance ne sont qu'une aide auxiliaire pour la police ! Et nous ne pouvons pas reprocher au président du Conseil d'Etat de vouloir absolument mener une réflexion sur la pose de ces caméras en des endroits bien ciblés. Connaissant le président du département des institutions, je sais qu'il est un garant de la liberté individuelle de chacun et nous pouvons compter sur lui dans ce domaine-là pour rester cohérent par rapport aux endroits où devront être positionnées ces caméras.
Dès lors, je regrette de ne pas partager votre angélisme, Monsieur Bavarel. Je le souhaiterais, mais la réalité étant ce qu'elle est, nous avons un devoir de protection envers nos concitoyens !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je salue à la tribune notre ancien collègue Jean-Claude Dessuet. (Applaudissements.) Je passe la parole à M. Alberto Velasco, pour le groupe socialiste.
M. Alberto Velasco (S). D'entrée, j'aimerais dire à M. Jornot que je ne m'inscris pas dans «l'archéolibéralisme» ou le néo-libéralisme sauvage. Je vais m'inscrire dans un libéralisme résistant: celui que vous avez abandonné en la matière, puisque les libéraux sont supposés représenter la protection de l'individu face à l'Etat omniprésent.
M. Renaud Gautier. Tentaculaire !
M. Alberto Velasco. Un «Etat tentaculaire», d'après mon collègue Renaud Gautier, et il a raison ! En l'occurrence, avec ce projet, il commence à développer ses tentacules. Et les libéraux, nantis de cette mission protectrice de l'individu, auraient dû être les premiers à dire «niet» ! Que s'est-il donc passé ? Je vais vous dire pourquoi les libéraux ont viré casaque - partiellement en tout cas !
Le premier projet était beaucoup plus important: il prévoyait des caméras un peu partout, notamment à la rue de la Corraterie et dans le quartier des banques. C'est à ce niveau que l'affaire s'est gâtée, Mesdames et Messieurs ! Des libéraux ont dit en commission des finances: «Cela ne nous plaît pas ! Cela ne va pas ! Monsieur Moutinot, revoyez votre copie !»
Une voix. Eh oui ! (Rires.)
M. Alberto Velasco. Alors, on a invoqué les principes de la protection de l'individu, et blablabla, et je t'en donne ! M. Moutinot est revenu avec un projet de loi quelque temps plus tard, effectivement, et, Monsieur Gautier, vous avez bien fustigé les fonctionnaires ! La Corraterie a disparu du projet, de même que le quartier des banques ! Et les libéraux ont alors dit: «No problem, on y va !» Qu'est ce qui restait comme emplacements pour les caméras, dans le projet ? La gare, Plainpalais, etc. Là où il n'y a pas de banques ! C'est bien pour cela que vous êtes d'accord d'accepter ce projet-là !
Alors franchement, de quoi parle-t-on ici ? De trois matches ! Chers concitoyennes et concitoyens, chers députées et députés: trois matches ! Et pour trois matches, on voudrait mettre en place un bastringue pareil ? (Rires. Commentaires.) D'accord, peut-être quatre !
Des voix. Non, trois ! (Chahut.)
M. Alberto Velasco. Pour trois matches, on va investir une telle somme ? Nous sommes d'accord d'installer des caméras, mais, à ce moment-là, qu'elles soient installées dans le stade ! Et qu'on diffuse les matches dans tous les quartiers de la ville de Genève pour tous ceux et celles qui ne pourront pas se payer l'entrée au stade ce jour-là ! Là, nous serions d'accord. Mais pour trois matches... S'il vous plaît !
De plus, avec ces caméras, il faudra effectivement que quelqu'un soit derrière le moniteur ! Il faudra aussi maintenir ce système en état de marche ! Et il faudra de temps en temps changer le système, parce que ce genre d'équipement dure trois ou quatre ans au maximum, pas plus ! Donc, tout cela à un coût ! Ne serait-il pas plus logique d'engager des gendarmes, pour les placer là où il le faut et pour que la population puisse avoir avec eux un contact, un contact humain, le contact par la parole ?
Mme Borgeaud a soulevé un problème important tout à l'heure: celui de la suspicion ! Elle a dit que si l'on n'a rien à se reprocher, il faut accepter ce dispositif de surveillance... C'est le début de la suspicion ! A ceux qui ne veulent pas de ces caméras vous dites que, s'ils n'en veulent pas, c'est qu'il y a un problème... La suspicion, c'est quand un Etat commence à s'approcher des rivages du fascisme. Enfin, on n'en est pas là, mais je voudrais dire à Mme Borgeaud qu'elle fasse attention quand elle parle de cela !
Mesdames et Messieurs les députés, je pense que nous sommes - en tout cas mes collègues et moi - très attachés à l'ordre républicain. Et l'ordre républicain, c'est avant tout le respect de tout citoyen et le respect de l'individualité des citoyens. Et je pense que vous, les libéraux, vous aviez un rôle important à jouer ! Mais nous allons reprendre aujourd'hui votre rôle - celui que vous aviez au XVIIIe siècle, pas celui du XXIe siècle - et nous défendre l'ordre républicain.
C'est pour cela que nous demandons aujourd'hui de suspendre, en attendant le projet de loi qui concerne la protection des données et qui est aujourd'hui à la commission judiciaire - ce sujet est aussi étudié en sous-commission - eh bien, nous demandons de mettre ce projet au congélateur, et pas au frigo ! Dès que ce projet aura été voté par le Grand Conseil, on pourra en discuter à ce moment-là.
Madame la présidente, pour vous qui suivez très bien les débats, j'ai fait une proposition qui est la suivante: c'est de mettre ce projet de loi au congélateur. Pas au frigo, ce n'est pas la même chose ! Le frigo, c'est un renvoi en commission. (Commentaires. Rires.) A moins cent degrés ! Et dès qu'il y aura un retour, dès que la loi sur la protection des données aura été votée par ce Grand Conseil, notre groupe sera d'accord de rediscuter des caméras. Voilà ! (Applaudissements.) Je n'ai pas fini ! Si cette proposition est rejetée, notre groupe sera dans le regret de ne pas pouvoir entrer en matière. Mon collègue Brunier clarifiera cette position après, peut-être. En principe, je crois que c'est comme ça que les choses vont se passer. (Applaudissements.)
La présidente. Si j'ai bien compris, vous demandez l'ajournement, Monsieur le député. La procédure pour une demande d'ajournement est la même que pour un renvoi en commission: l'article 78A de notre règlement prévoit une seule prise de parole par groupe. Dès à présent, c'est trois minutes par groupe. Ensuite, comme pour un renvoi en commission, cette proposition sera mise aux voix - si elle est rejetée, on reviendra au débat. On est d'accord. Je donne la parole à M. Catelain, pour le groupe UDC. Uniquement sur la demande d'ajournement.
M. Gilbert Catelain (UDC). Je m'étonne de cette demande d'ajournement puisque, si je lis le rapport, je vois qu'en commission les socialistes se sont exprimés en faveur de ce projet de loi. Il est totalement incompréhensible qu'ils soient contre aujourd'hui !
Je rappelle que ce projet de loi est d'abord une réponse minimale à un enjeu international, à savoir la protection des ambassades et la protection d'une manifestation de l'ampleur internationale de l'Eurofoot. Aujourd'hui, des organisations telles que l'ONU investissent des sommes très importantes dans la protection de leurs sites. Par exemple, à Genève, l'ONU est en train de créer une brigade canine antiexplosifs. Et la perception des risques n'est pas du tout la même entre notre parlement et les partenaires que sont l'ONU et les organisations internationales !
Finalement, ce projet de loi vise à contrôler un certain nombre de mouvements de foules, sur un axe qui part du Bachet-de-Pesay et va jusqu'au rond-point de Rive en passant par le carrefour de l'Etoile. On aurait même pu imaginer que cet axe aille plus loin, avec la surveillance de la zone des Vernets - dans laquelle se dérouleront un certain nombre de manifestations - voire le renforcement de la surveillance dans la zone de la gare Cornavin.
Il s'agit d'un projet qui se limite à huit caméras, indépendamment de la partie qui concerne les organisations internationales. Seulement huit caméras ! Soit beaucoup moins que celles qui sont déjà en place aujourd'hui dans le stade de la Praille ! (Brouhaha.) Beaucoup moins que celles qui sont en fonction dans les bus TPG ou en gare Cornavin. (L'orateur est interpellé. La présidente agite la cloche.)
La présidente. Monsieur le député, il s'agit de s'exprimer uniquement sur l'ajournement !
M. Gilbert Catelain. Le débat n'a pas lieu d'être ici, étant donné qu'il se tient en commission judiciaire, respectivement en sous-commission, puisque nous y traitons de la loi sur l'information du public et l'accès aux documents - la LIPAD - respectivement de la loi sur la protection des données. Vu le peu d'enjeu de ce projet de loi et vu la possibilité qu'aura ce parlement d'évaluer son impact et de demander le démantèlement des installations de vidéosurveillance à l'issue de l'Euro 2008, il est inutile de renvoyer ce projet de loi en commission, par rapport aux délais à respecter.
La présidente. Pour le groupe des Verts, je passe la parole à M. Pierre Losio. Il ne désire pas prendre la parole sur l'ajournement, alors je donne la parole à M. Roger Golay. Uniquement sur l'ajournement, en trois minutes !
M. Roger Golay (MCG). Comme vous tous, le groupe MCG est très sensible à la protection de la sphère privée. Il faut savoir qu'aujourd'hui il y a des systèmes de vidéosurveillance cryptés. Ce n'est pas la balade de M. Bavarel qui intéressera la police ou qui que ce soit d'autre, il s'agit simplement de faire diminuer cette criminalité !
J'en viens à la raison pour laquelle nous refusons cet ajournement. On a pu voir qu'à Annecy où des caméras ont été installées, il y a eu une baisse considérable de la criminalité. C'est donc quelque chose de positif. Après les attentats de Londres, la population britannique a exigé une réponse très rapide de la part de la police. Elle l'a obtenue, grâce aux caméras de vidéosurveillance ! De même, l'auteur d'un meurtre crapuleux commis dans la gare de Bruxelles a pu être identifié par le biais de telles caméras. Je pense donc que demander l'ajournement pour retarder l'exécution de ce projet, c'est mettre la sécurité de notre cité en péril, en quelque sorte.
D'autre part, laissez-moi sourire quand j'entends M. Velasco dire qu'il faut s'opposer à ces caméras pour le respect de l'ordre républicain ! D'autant plus que la gauche a exigé des caméras dans les postes de police ! (Brouhaha.) Madame Captyn, vous prétendez que ces caméras représentent une menace... A vous entendre, la menace ne proviendrait que de la police ! (Brouhaha.) Vos considérants ne tiennent pas la route et c'est pour cela que nous nous opposerons à l'ajournement de ce projet de loi. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
La présidente. Merci. La parole est à M. le rapporteur de minorité... Qui ne souhaite pas s'exprimer. Et vous, Monsieur le rapporteur de majorité ? Non plus. Monsieur Gautier, souhaitez-vous prendre la parole ? Vous renoncez. Alors, je la donne à M. Halpérin.
M. Michel Halpérin (L). Très brièvement, je m'exprimerai sur la demande d'ajournement. D'abord, en remerciant notre présidente d'avoir bien voulu traduire la notion de congélation que je ne trouvais pas dans mon règlement et de l'avoir transformée en ajournement.
Ensuite, je voudrais m'étonner que M. Velasco, si j'ai bien compris le sens de sa démarche, aspire à devenir libéral et fait le choix de proposer l'ajournement d'un projet qui émane d'un conseiller d'Etat, dont il n'est pas totalement éloigné, qui, lui, demande l'urgence !
Il faudra choisir avec M. Moutinot si vous voulez l'urgence ou si vous voulez l'ajournement, mais il me semble que les deux notions s'excluent un peu l'une l'autre !
Nous, nous sommes d'avis que le sujet est urgent, Monsieur le député ! Et c'est la raison pour laquelle nous allons nous opposer à cet ajournement. Il est urgent parce que le sujet de la sécurité est bien trop important pour le mettre en congélation voire en surgélation. La population comprendrait mal cette forme de désinvolture vis-à-vis d'elle. (Applaudissements.)
La présidente. La parole n'est plus demandée à propos de l'ajournement et...
Mme Sandra Borgeaud. Si !
La présidente. Madame Borgeaud, je vous donne la parole. Ensuite, M. le président du Conseil d'Etat s'exprimera.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je m'opposerai à cette demande d'ajournement ou à tout renvoi parce que, pour moi, ce serait manquer de respect vis-à-vis de la population. Encore une fois: il y a des gens qui ne se sentent plus en sécurité. Je pense que ces caméras ne seront pas là seulement pour l'Eurofoot 2008, pour la simple et bonne raison que les problèmes peuvent continuer après !
Quand j'entends dire... (Brouhaha. Remarque.) S'il vous plaît, Madame Keller, j'aimerais terminer ! Quand on dit que ce projet servira simplement à pénétrer dans la vie des gens, c'est totalement faux ! Et j'aimerais vous rappeler, Mesdames et Messieurs les députés, les caméras qu'il y a dans cette salle et qui vous filment pour la diffusion des séances sur Léman Bleu: elles n'ont franchement pas l'air de vous déranger, bien au contraire ! Par ailleurs, quand vous allez faire vos courses dans un magasin, vous êtes aussi filmés et je ne pense pas que vous avez les yeux rivés au plafond pour savoir où se trouvent les caméras ! Il y a de nombreux endroits où c'est courant et cela ne vous dérange pas, alors arrêtez d'en faire une psychose !
Pensez aux gens, pensez aux personnes qui pourraient devenir de futures victimes ! Nous sommes dans une république qui se doit d'assurer la sécurité de ses citoyens. Et si nous ne nous en occupons pas, je ne vois pas à quoi sert ce parlement ! Il n'a plus lieu d'être, et chacun pourrait agir comme bon lui semble ! Donc, nous avons un pouvoir, et nous nous en servons. Ce problème est urgent et je veux qu'on le vote ce soir !
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Cette demande d'ajournement est motivée par le fait que vous n'avez pas encore voté la loi sur la protection des données personnelles, la LPDP. J'ai déjà dit en commission, et je le répète en plénière, que, dans l'hypothèse où vous voteriez le projet «Cyclope» - ce que je vous demande de faire - le conseil d'Etat appliquera, jusqu'au vote par votre parlement, les critères très stricts figurant dans le projet de loi sur la protection des données personnelles.
J'ajoute que si votre parlement venait, dans le vote de ce projet-ci, à introduire des critères plus stricts, nous appliquerions évidemment ces critères dès qu'ils seraient votés.
Deuxième élément: ce projet ne se justifie de toute évidence pas par le seul Eurofoot. En revanche, il serait tout à fait idiot de mettre ces caméras en place le 15 juillet, après l'Eurofoot, si l'on pouvait les avoir déjà pour le début de cette manifestation !
Mis aux voix, l'ajournement du rapport sur le projet de loi 10027 est rejeté par 53 non contre 30 oui et 1 abstention.
La présidente. Nous revenons à notre débat. Je vous rappelle que les députés suivants sont encore inscrits sur la liste désormais close: Mme et MM. Christian Brunier, Roger Deneys, Pierre Losio, Christian Bavarel, Eric Bertinat, Eric Stauffer, Mathilde Captyn et, enfin, le président du Conseil d'Etat, Laurent Moutinot.
M. Christian Brunier (S). Mesdames et Messieurs les députés, la vidéosurveillance et tout ce qui tourne autour est un sujet éminemment délicat qu'il faut traiter avec mesure. Je vais peut-être me mettre tout le monde à dos, mais, comme on est plus ou moins au milieu du débat, c'est peut-être l'heure de la synthèse.
Si je résume ce qui a été exprimé, j'ai entendu des gens dire que, si l'on ne votait pas tout de suite ce projet de loi, Genève se retrouverait dans une situation de totale insécurité; le MCG a dit que c'était un projet qui pouvait sauver Genève de l'insécurité; j'ai aussi entendu, à gauche, des gens qui disaient que ce projet marquait le début d'un Etat policier. Cela m'a inquiété, car j'avais l'impression de m'être trompé de projet de loi ! J'ai donc sauté sur ce dernier pour contrôler son contenu. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en train de débattre au sujet de huit sites qui seraient surveillés par des caméras: cela n'assurera pas la pleine sécurité de Genève et, inversement, cela ne signifiera pas que l'on instaure un Etat policier à Genève ! Donc, il faudrait peut-être raison garder, de même que garder le sens de la mesure !
On doit parler de principes, ils sont importants, mais ce n'est pas rendre service aux Genevois que d'exagérer, tant sur la sécurité qu'on pourra offrir que sur l'Etat policier qu'on risque d'instaurer. Je dis que nous sommes dans un débat difficile, parce qu'il faut trouver le juste équilibre entre sécurité et liberté. Ce n'est pas évident, c'est un peu comme la notion d'efficacité: j'ai entendu des personnes dire que les caméras étaient efficaces à 100% et d'autres dire que ce n'était pas efficace... Si l'on étudie le sujet et que l'on regarde ce qui s'est passé dans les villes ayant mis en place une surveillance vidéo, la situation n'est ni entièrement en blanc ni en noir, c'est gris foncé ou gris clair. Oui, la sécurité est assurée, mais on sait que dans certaines villes qui ont abusé de ce type de dispositifs, cela a plutôt contribué à instaurer un sentiment d'insécurité excessif. Dans certaines villes des Etats-Unis, on enlève maintenant les caméras, parce qu'on a constaté qu'en les installant partout on effraie les gens ! Qui en déduisent que l'insécurité doit être vraiment terrible, puisqu'il a des caméras partout. Là aussi, il faut trouver la juste mesure !
Ce qui me gêne dans tout ce débat, ce n'est pas de savoir si l'on va installer cinq, huit ou dix caméras, c'est surtout l'utilisation que l'on pourra faire des images, selon les emplacements surveillés ! Nous avons une promesse orale du Conseil d'Etat qui nous dit qu'une législation existe pour ce qui est de la protection des données et de la défense de la sphère privée et des lois complémentaires seront proposées. Néanmoins, les villes ayant installé des caméras et réussi à préserver les libertés sont allées bien plus loin. On n'a pas besoin de se rendre à des milliers de kilomètres pour avoir des exemples. Prenons celui de Lyon - la loi française est assez stricte en matière de protection des données, de l'image et de la personnalité. Néanmoins, Lyon, qui a installé un certain nombre de caméras, de manière relativement modérée et réfléchie, a établi. en plus de toute la législation existante, un code éthique de huit pages. C'est un code éthique qui va beaucoup plus loin que la législation déjà en place et dont le but est d'assurer réellement les libertés ! Un travail colossal a été accompli pour envisager tous les cas de figures, un gros travail a notamment été réalisé en ce qui concerne le cryptage des images. C'est aussi le cas à Genève, mais, à Lyon, ils ont également travaillé sur les possibilités de non-modification des images - on sait qu'il existe malheureusement des possibilités de truquer une image - et je ne suis pas sûr que cette question soit prise en compte dans la législation genevoise. Lyon a fait cet effort, et je pense qu'il faut partir dans cette dynamique.
Certains d'entre nous ont cité les TPG, exemple local de mise en place de la vidéosurveillance. Le conseil d'administration était composé de personnes de droite et de gauche, qui ont travaillé ensemble - à l'époque, je faisais partie de ce conseil d'administration - et qui sont allées plus loin que la législation existante. Nous avons aussi établi des règles éthiques sur la conservation des images: qui a le droit de les regarder, combien de temps on les conserve, etc. On a donc été bien plus loin que la législation !
Je vous rappelle aussi qu'à Montréal, ville qui a une longue expérience des caméras de surveillance, la commission d'accès à l'information vient de rendre un rapport affolant dans lequel des gros problèmes sont relevés. La ville a fait enlever des caméras et une vingtaine de règles ont été établies en urgence pour préserver la sphère privée - des caméras filmaient notamment chez les gens, ce qui était inacceptable ! - ils ont donc fait marche arrière. Ils avaient cru que ces caméras permettraient d'améliorer la sécurité, mais, finalement, cela dérange plutôt les citoyens ! Il faut donc trouver le sens de la mesure. L'exemple le plus inquiétant est celui de Sherwood, ville du Canada, qui vient de faire un essai. Au terme de ce dernier, Sherwood a complètement renoncé à installer des caméras de surveillance: la vidéosurveillance n'a eu aucun effet sur la sécurité et, en plus, elle pose de gros problèmes en termes de respect des libertés individuelles.
Tout n'est donc pas tout noir ou tout blanc, et il faut faire très attention ! Nous devons travailler sur les règles d'éthique, or on fait tout à l'envers: le gouvernement nous a donné des engagements et on est quand même en train de placer les caméras, avant d'avoir défini les règles éthiques ! Malgré les promesses du gouvernement ! Cela ne nous paraît pas acceptable !
Finalement - et c'est pourquoi je voterai contre ce projet ce soir - l'ajournement aurait été une très sage décision. On aurait pu procéder très rapidement, afin de remettre la priorité sur la définition de règles éthiques, mais la majorité d'entre vous ne l'a pas voulu. Je vous rappelle quand même que nous allons engager 5 millions de francs: peut-être obtiendrions-nous plus d'efficacité si ces 5 millions étaient affectés à la protection humaine du territoire, c'est-à-dire en procédant à l'engagement de policiers supplémentaires.
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, dans ce sujet des caméras de surveillance, il est important de raison garder. Ceux qui se disent les partisans de la sécurité ne doivent pas exagérer par des propos qui se veulent rassurants pour la population genevoise ni prétendre que les personnes opposées à ce projet de loi sont en faveur de l'insécurité, de la chienlit, des trafiquants de drogue, etc. Ce n'est simplement pas exact !
Je vais vous donner un exemple très précis. J'ai entendu M. Stauffer évoquer la place des Volontaires et M. Bertinat nous parler des organisations internationales: ce sont des problématiques complètement différentes ! Et ce ne sont pas des réponses identiques que l'on peut leur apporter !
Je ne suis pas opposé par principe aux caméras de surveillance, mais je pense qu'il faut savoir si l'on s'intéresse à la problématique du terrorisme ou à celle de la petite délinquance.
Si ce procédé peut être utile dans certains cas, il ne faut pas se faire d'illusion: l'objectif des caméras n'est pas de prévenir les délits. Ça n'empêche pas les délits ! Il est complètement faux de croire que cela empêchera des délits graves ! Cela va simplement rendre les délits un peu plus dangereux à commettre pour les personnes qui seraient tentées par la petite délinquance. Il n'empêche qu'un criminel organisé prendra toutes les précautions nécessaires pour ne pas être reconnu, en fixant par exemple des fausses plaques d'immatriculation sur son véhicule. Donc, cela ne changera rien du tout, il faut en être conscient !
Le vrai problème, à mon avis, c'est ce que je lis à la page 3 du rapport de la commission des finances, reprenant les propos d'une fonctionnaire du département: «La pose de caméras dans des rues comme celle de la Corraterie est justifiée par le fait que ces rues peuvent être utilisées par des manifestations de tous genres pour lesquelles la polices est mobilisée. L'ajout de caméra permettrait ainsi de décharger les effectifs de police dans ce genre de situation et de les envoyer vers d'autres lieux où leur présence est requise.» Résultat des courses, et c'est là où je veux en venir, le but principal de ces caméras de surveillance est de permettre le repérage et, éventuellement, l'identification. Il s'agit de permettre l'identification et l'arrestation des auteurs de forfaits après un délit et de demander des dommages et intérêts. Mais le délit n'aura pas été empêché, le crime aura été commis ! C'est bien ça le problème ! Le jour où une vitrine de la Corraterie est brisée, la police serait ailleurs parce qu'il y a des caméras ?! Ce n'est pas sérieux ! Comment fera le commerçant dont la vitrine aura été brisée ? Il attendra qu'on ait analysé les bandes vidéo, qu'on ait identifié et trouvé l'auteur ? Cela ne résout donc pas les problèmes !
Je ne suis pas opposé aux caméras par principe - en ce qui concerne le terrorisme, il peut être utile de repérer les personnes qui se déplacent autour des organisations internationales - toutefois, cela n'a aucun sens pour la petite délinquance ! Je vous invite donc, tant que des règles n'auront pas été définies et tant que l'on ne sait pas très bien pourquoi on mettrait en place des caméras, à refuser ce projet de loi.
M. Eric Stauffer (MCG). Finalement, la gauche, vous voulez défendre qui ? Vous voulez protéger qui ? Les petits dealers, comme vous dites ? La petite criminalité ? Si je vous comprends, Monsieur le député, vous dites que cela ne va rien changer, tout va rester exactement pareil. Mais alors, si vous en êtes si convaincu, pourquoi la gauche et votre groupe n'ont-ils rien fait pour changer la situation à la place des Volontaires ? Pourquoi n'avez-vous rien fait pour changer la situation de l'école qui est sur le quai du Seujet ? Durant la journée, des enfants et des bambins jouent dans le préau de cette école, et la nuit c'est un vrai ghetto à dealers ! Allez voir le journal télévisé du MCG sur son site internet ! (L'orateur est interpellé.) Nous sommes allés là-bas interviewer des dealers qui vendent de la cocaïne, qui vendent des joints, etc. Ça, c'est de l'insécurité, ça c'est le problème ! Quand un banquier hollandais se fait assassiner sur les quais parce qu'il s'est malheureusement promené au mauvais endroit au mauvais moment, ce n'est pas seulement un sentiment ! Il y a vraiment de l'insécurité, Monsieur le député ! (L'orateur est interpellé.)
Qu'a fait votre groupe pour endiguer l'insécurité ?
On ne parle pas de huit caméras, on parle du principe ! C'est le principe que nous sommes en train de voter ce soir ! C'est un pas important pour Genève et c'est pour cela qu'il faut le soutenir ! Alors, arrêtez de nous bassiner en nous parlant de la liberté et de l'intégrité ! Une intégrité de quoi ?! L'intégrité des citoyens honnêtes qui aimeraient retourner se promener sur les quais du bord du lac et, aussi, qui aimeraient ne pas avoir peur de se planter une seringue dans le pied en passant dans les préaux des écoles, comme aux Eaux-Vives ? La société que vous prônez n'est définitivement pas ce que veut le Mouvement Citoyens Genevois !
Je vous encourage donc à accepter ce projet de loi tel qu'il est et j'espère qu'on pourra aller un peu plus avant, en des endroits très ciblés et névralgiques, pour nettoyer cette ville de toute cette racaille qui nous pollue la vie !
Une voix. Bravo ! (Brouhaha.)
Une autre voix. Bravo ! Au karcher ! Tu as oublié le karcher !
La présidente. Monsieur le député, mesurez vos paroles, s'il vous plaît ! Nous sommes dans un parlement ! La parole est à M. Renaud Gautier, mais il n'est pas là...
Une voix. Si, il est là !
La présidente. Monsieur Renaud Gautier, souhaitez-vous toujours prendre la parole ?
M. Renaud Gautier (hors micro). Oui !
La présidente. Dépêchez-vous de rejoindre votre place, mais ne tombez pas !
M. Renaud Gautier (L). Excusez-moi, Madame la présidente, j'étais en train d'essayer de convaincre... Je voudrais répondre à mon excellent ami Alberto Velasco, un libéral de coeur qui essaie de devenir président de son parti, et apporter une toute petite nuance à son raisonnement.
Vous vous rappelez, mon cher collègue, que comme d'autres projets qui viennent du DIAE et de la police, les explications qu'ils nous ont fournies étaient assez curieuses, puisque, dans le fond, la vocation de la Corraterie et le danger révolutionnaire de la Corraterie provient «du fait que les Vieux-Grenadiers y défilent, les écoles de police y défilent, les promotions y défilent et encore un ou deux autres cortèges.» Cet argument nous a effectivement bien amusés en commission des finances ! Je me suis permis de dire que maintenant qu'on connaissait tous les tenants d'Al-Qaida, il était temps de les faire arrêter !
Le problème, en l'occurrence, c'est que si la logique si bien exposée par mon collègue Olivier Jornot s'explique, c'est qu'il y avait au départ un certain manque de cohérence dans le projet qui vous était présenté. Le conseiller d'Etat, qui paraît-il est encore du même parti que vous, a compris qu'il manquait peut-être une sorte de cohérence. Nous savons aussi, vous comme moi, que le problème de surveillance des ambassades est important et qu'il est possible qu'à terme la Confédération y participe moins. Il fallait donc effectivement prévoir, avant qu'il ne soit trop tard, comment surveiller ces lieux-là, de même que tous les lieux internationaux qui participent aussi à l'économie genevoise. Le débat a en effet été un peu plus aigu lorsque nous avons parlé du choix de certains emplacements et pas d'autres. En l'occurrence, je suis reconnaissant au conseiller d'Etat d'avoir compris qu'en l'état, dans un premier temps, il fallait limiter cette vidéosurveillance à des lieux qui pourront potentiellement être des lieux de troubles cet été - ce que l'on ne souhaite pas, évidemment !
M. Christian Bavarel (Ve), rapporteur de minorité. Je vais reprendre un ou deux points que vous avez exposés et vous donner mon avis. Je rappellerai simplement certains risques qui nous ont été indiqués comme étant majeurs et sur lesquels il fallait que nous revenions, parce qu'ils seraient dangereux pour notre démocratie. Il s'agissait entre autres du picoulet, ce joyeux foutoir des collégiens lors de la fête de l'Escalade. Je ne savais pas que la farine était un danger pour la démocratie... C'est gênant à l'intérieur d'une voiture, j'en conviens, c'est gênant sur les habits aussi, mais, de là à renoncer à des valeurs fondamentales pour lutter contre de la farine, je ne suis pas sûr que cela soit nécessaire.
Je répondrai à M. Stauffer...
Une voix. Il n'est pas là !
M. Christian Bavarel. Qu'il soit là ou pas n'est pas important, car je répondrai surtout à ses arguments ! Je répondrai que je traverse la place des Volontaires tous les soirs en rentrant de ce Grand Conseil. De même, le mercredi, après la commission des finances où nous siégeons entre cinq et six heures selon les jours, je m'arrête parfois à l'Usine. Cet endroit alternatif, vous savez, avec ces gens affreux qui font de l'art et de la culture - choses terribles - et qui sont épris de liberté ! Oui, je connais suffisamment bien la place des Volontaires pour savoir qu'à l'entrée de l'Usine ce milieu anarchisant avait installé une lime géante comme symbole anarchiste pendant des années. Oui, je suis issu des milieux alternatifs ! Oui, cette culture alternative m'est chère, même si, comme tout le monde le sait, elle est appelée à devenir la culture officielle, si je considère les nombreux artistes qui aujourd'hui en sont issus et se vendent fort bien dans des milieux chers à M. Cuendet ! Donc, je connais bien la place des Volontaires !
Monsieur Stauffer, regardez une fois les murs de l'Usine, parce que visiblement vous n'y êtes pas allé souvent: il y a des caméras ! Vous ne vous en rendez pas compte, étant donné que c'est ça l'objet magique qui devrait apporter la sécurité ! Elles sont là ! Elles ne marchent pas. (Remarque.) Je vous dis que ça ne marche pas ! (Brouhaha.) Eh oui, Monsieur Stauffer, nous n'avons pas les mêmes valeurs, et politiquement j'en suis ravi ! Vous savez très bien que chaque fois que nous ne sommes pas d'accord, j'en suis ravi, ce qui prouve bien que nous défendons des gens et des valeurs différentes, ce qui me va parfaitement !
Je reprends les propos de Mme Sandra Borgeaud, qui nous disait qu'il y avait des problèmes d'insécurité. J'en conviens tout à fait. Je conviens que c'est extrêmement désagréable pour les personnes qui ont vécu une agression, ce sont des événements traumatisants.
Les Verts ont proposé différentes solutions. Nous pensons qu'il faut une présence humaine pour reprendre le quartier de la place des Volontaires. Juste un peu plus loin, vous avez le quai des Lavandières, c'était un endroit un peu sordide le soir, mais on y a installé le dispositif de sécurité qui nous convient le mieux: «La Barje» ! Il s'agit d'un bistrot installé au bord de l'eau et créé par des personnes du milieu associatif. Depuis, le soir, vous pouvez passer sur le quai des Lavandières sans aucun problème ! Je pense donc que le dispositif de sécurité qui serait le plus utile à la place des Volontaires, ce serait un stand de glaces. Il suffit de ramener de la vie et des êtres humains dans ces endroits pour pouvoir dire simplement que les citoyens s'y trouvent bien. A partir de ce moment, vous obtiendrez une baisse de la criminalité.
Exemple. J'habite à côté des Libellules, un quartier de HBM: on a remis des plantages au pied des immeubles; on se retrouve là entre voisins; on se parle entre voisins. Lorsqu'il y a un problème, il nous arrive effectivement d'appeler les forces de police, or il y a des possibilités de dialoguer et, surtout, il y a une vie sociale ! C'est cette vie sociale qui est importante: elle instaure de la sécurité. Et lorsque vous êtes agressés ou embêtés dans ce type d'endroits, il y a des gens à qui parler, des citoyens responsables, et pas seulement une caméra ! Pour nous, c'est vraiment une autre manière de voir la sécurité !
Je vous rappelle d'ailleurs que les pires drames de la société surviennent malheureusement à domicile, dans 80% des cas - c'est la raison d'être de toute la loi que nous avons prévue et voulue dans ce Grand Conseil. Malheureusement, les pires exactions sont le fait de proches, et les caméras de surveillance ne vont pas les empêcher. C'est donc le lien social qui va pouvoir nous aider à lutter contre les problèmes de pédophilie et contre les meurtres qui surviennent dans les familles. Nous sommes convaincus que l'amélioration de la sécurité dépend aussi de la qualité de vie - une existence moins précaire réduit les problèmes de dépendances à toutes sortes de produits - et nous travaillerons, bien évidemment, dans le respect des forces de police qui sont là. Lorsque les policiers arrivent aux domiciles des gens, ce sont toujours des moments poignants, et lorsque des policiers sont confrontés à des suicides plusieurs fois par semaine, ça devient difficile ! Pour nous, il est aussi important que les policiers soient sur le terrain parmi des gens normaux, dans la rue, au milieu de tout le monde !
Pour répondre à M. Jornot, si j'en crois ce qu'il nous décrivait, ce «Cyclope» est aveugle, ce qui complique les choses. En plus, il a l'oeil pas en face du trou ! Vous nous proposez de voter pour un projet qui, à votre avis, ne fonctionne pas et qui coûtera 500 000 F par caméra... On pourrait juste encore ajouter un petit investissement de 50 F pour un petit cache noir afin de protéger ces objectifs si chers ! Je vous rappelle simplement, Monsieur Jornot, qu'Ulysse s'est caché sous un mouton pour s'échapper et que le cyclope n'a rien vu ! (Rires. Commentaires.) C'était peut-être un mouton noir, Monsieur Jornot ! En tout cas, ce que vous nous proposez, c'est un système aveugle !
C'est peut-être avec ce monde pluriel, ce monde différent de celui auquel vous aspirez, que nous voulons construire une société dans laquelle il fait bon vivre. Cette société de surveillance électronique nous inquiète: nous préférons une société où les gens vivent ensemble, où ils ont du lien social et où l'on peut fonctionner ensemble.
Je ne m'arrêterai pas avant d'avoir eu le plaisir de vous relire ce joli poème de Prévert que j'ai inséré dans mon rapport. (Brouhaha.) Vous l'avez tous lu, mais il est joli et je ne peux pas m'empêcher de vous le relire. Seuls les Philistins sont insensibles à la liberté et insensibles à la poésie ! Monsieur Gros, je vous recommande de relire le texte de Georges Brassens, «Les oiseaux de passage». Peut-être que si la poésie ne vous touche pas, vous pourrez toutefois comprendre deux ou trois choses. Il ne s'agit pas du texte du rapport et je vois que vous n'avez pas lu ce texte ! Je vais donc vous le lire, afin que vous puissiez en profiter ! (Rires.) Il s'intitule: «Pour faire le portrait d'un oiseau». Le voici:
«Peindre d'abord une cage
avec une porte ouverte
peindre ensuite
quelque chose de joli
quelque chose de simple
quelque chose de beau
quelque chose d'utile
pour l'oiseau
placer ensuite la toile contre un arbre
dans un jardin
dans un bois
ou dans une forêt
se cacher derrière l'arbre
sans rien dire
sans bouger...
Parfois l'oiseau arrive vite
mais il peut aussi bien mettre de longues années
avant de se décider
Ne pas se décourager
attendre
attendre s'il le faut pendant des années
la vitesse ou la lenteur de l'arrivée de l'oiseau
n'ayant aucun rapport
avec la réussite du tableau
Quand l'oiseau arrive
s'il arrive
observer le plus profond silence
attendre que l'oiseau entre dans la cage
et quand il est entré
fermer doucement la porte avec le pinceau
puis
effacer un à un tous les barreaux
en ayant soin de ne toucher aucune des plumes de l'oiseau
Faire ensuite le portrait de l'arbre
en choisissant la plus belle des ses branches pour l'oiseau
peindre aussi le vert feuillage et la fraîcheur du vent
la poussière du soleil
et le bruit des bêtes de l'herbe dans la chaleur de l'été
et puis attendre que l'oiseau se décide à chanter
Si l'oiseau ne chante pas
c'est mauvais signe
signe que le tableau est mauvais
mais s'il chante c'est bon signe
signe que vous pouvez signer
Alors vous arrachez tout doucement
une des plumes de l'oiseau
et vous écrivez votre nom dans un coin du tableau.»
Mesdames et Messieurs les députés, je pense que la liberté et la démocratie ressemblent étrangement à l'oiseau et j'ai peur que l'oeil du cyclope ne les effraie. C'est pourquoi je vous demande tout gentiment de refuser ce projet de loi. (Applaudissements.)
M. Eric Bertinat (UDC), rapporteur de majorité. Donnons-nous raison aux terroristes en nous dotant de caméras vidéo ? C'est la question que nous pose notre collègue Bavarel. Nous n'avons visiblement pas la même «vision» de la sécurité ! Je n'ose pas parler de «valeurs», étant donné que ça a l'air d'être un mot qui fâche ici. Celui qui a la conscience tranquille ne craint pas la surveillance, même dans des lieux critiques ! La vidéosurveillance ne peut que recueillir le soutien de ceux qui veulent plus de sécurité et plus de liberté. Les seuls qui ont intérêt à s'y opposer - outre les maris infidèles, cher Monsieur Bavarel - ce sont les voyous qui ne respectent pas la loi.
Je voudrais apporter une autre précision quant aux problèmes que va soulever l'Eurofoot et peut-être - je dis bien peut-être - l'arrivée de hooligans. Monsieur Velasco, je suis désolé de vous le dire, mais vous avez tout faux quand vous proposez d'installer des caméras dans le stade, que ce soit à l'intérieur ou même à l'extérieur du stade ! Parce que si les hooligans viennent à Genève, ce n'est pas pour voir du foot, c'est pour faire de la casse, c'est pour boire, c'est pour causer du vandalisme ! Ils n'iront pas au stade de la Praille, ils viendront à Genève ! C'est là que les caméras de surveillance seront utiles. Et là où il y aura des caméras de surveillance, rien n'empêche qu'il y ait également des policiers. Après les troubles, les images prises pendant ces manifestations seront, à n'en pas douter, très utiles.
Autre remarque sur le rôle des caméras, qui peuvent être très utiles. Je vous rappelle, entre autres, toutes les images qui ont été prises en Angleterre suite à un rapt d'enfant. Cela, je crois qu'il faut bien l'inclure dans notre raisonnement, l'utilité des caméras n'est pas limitée aux manifestations, mais bien à ce qui peut se passer tout au long de l'année. Ce qui me permets d'insister sur le fait que l'Eurofoot n'est qu'une étape. On en a beaucoup parlé, mais, une fois que ces caméras seront installées, il est évident que, l'Eurofoot passé, elles garderont toute leur raison d'être et continueront à rendre des services à la société et à rassurer la population.
Bien que je n'aie pas visité l'ONU depuis longtemps, où siège le Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme, je voudrais quand même relever que ses locaux sont bardés de caméras. Sur une des dernières photos que j'ai vues, il y en a jusque dans l'entrée ! Là, cela n'a pas semblé poser tant de problèmes à toutes les personnes qui militent pour les droits de l'Homme ! Aussi, je ne peux que vous recommander d'accepter ce projet de loi.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, Mme la députée Captyn a raison ! Nous faisons en permanence l'objet d'une surveillance: lorsque nous utilisons notre carte de crédit, lorsque nous utilisons notre téléphone, lorsque nous entrons dans un commerce... Ces mille et une surveillances sont liberticides et je les crains !
Celle que je ne crains pas, c'est la vidéosurveillance de la police genevoise. Pourquoi ? Parce que c'est une vidéosurveillance publique, démocratique, sous le contrôle du gouvernement et sous votre contrôle ! C'est cette vidéosurveillance que nous devons accepter ! En revanche, je souhaite que nous nous retrouvions tous ensemble, lorsqu'il s'agira de mettre de l'ordre dans les milliers de caméras qui vous filment jour après jour sans autorisation, sans que nous puissions contrôler qui regarde les images, sans que nous ayons un contrôle sur la conservation des images et leur distribution. Ces caméras-là sont inacceptables et j'espère que nous pourrons, tous ensemble, prendre les mesures qui nous permettrons de les éliminer !
En revanche, assimiler les tâches de sécurité de la police genevoise à ces comportements liberticides revient un peu à confondre les pommes et les poires ! Une fois encore, je déplore que le calendrier politique n'ait pas permis que les lois soient votées dans le bon ordre, mais l'importance du sujet fait que les engagements que j'ai pris devant votre commission judiciaire, devant celle des finances ainsi qu'en plénière, peuvent vous donner l'assurance que, jusqu'à ce que vous ayez stabilisé les règles, nous allons nous comporter de la manière la plus respectueuse qui soit des droits des citoyens.
Il a été dit aujourd'hui des choses assez étonnantes sur la vidéosurveillance. Le but fondamental - essentiel - de la vidéosurveillance, c'est celui d'aide à la décision, c'est-à-dire de savoir ce qui se passe en certains endroits stratégiques pour diriger l'action de la police. Vous dites, Monsieur Bavarel, qu'on ferait mieux de placer des policiers dans ces lieux: oui mais ! Les policiers sont formés à une police de proximité, au maintien de l'ordre et à différentes tâches. Je ne suis pas sûr qu'il soit très souhaitable de les confiner au rôle de piquet ! Parce que c'est de cela qu'il s'agit ici ! Et je pense qu'il est nécessaire que le personnel dont j'ai la charge soit doté de moyens de surveillance un tout petit peu raisonnables et adéquats ! C'est une chose que d'avoir une police qui va vers les gens, qui se rapproche des gens, qui discute et assure une présence physique; et c'est une autre chose que d'obliger un certain nombre de membres de la police à passer des nuits dehors à regarder ce qui se passe - surtout quand il ne se passe pas grand-chose !
On a redimensionné ce projet à la demande de la commission des finances - effectivement, pour la Corraterie, je n'ai pas compris pourquoi les caméras avaient disparu... Mais bon ! Je m'y suis rallié et ne ferai pas d'autres commentaires en ce qui concerne cette rue.
Vous avez dit, Monsieur Bavarel, que vous craigniez que l'on puisse pister et filer des gens. Non ! Parce qu'avec huit caméras sur huit sites différents, il est rigoureusement exclu de suivre une personne sur un trajet long ! On peut la voir à un endroit, point à la ligne ! Mais, on ne peut pas la voir ailleurs ! Il est donc exclu, avec ce système, de pouvoir filer des gens !
On a beaucoup parlé de l'Euro 2008 et vous avez vu que les sites qui restent prévus pour l'implantation des caméras sont des grands carrefours. L'intérêt est de savoir où les choses se passent, où les cortèges se dirigent, qui va où - pas «qui» à titre personnel, évidemment - et quels sont les grands objectifs qui peuvent intéresser et être touchés, pour pouvoir faire intervenir la police à bon escient. Parce qu'aujourd'hui le nombre de patrouilles qui partent dans le vide, à la suite de l'appel angoissé d'un citoyen, est considérable ! Il y a donc une vraie déperdition de forces de police, il y a une vraie imbécillité à ce genre de manoeuvres, que nous essayons d'éviter grâce à des moyens un peu plus sophistiqués, comme cette vidéosurveillance.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, on n'est pas dans l'univers de Georges Orwell dans cette affaire, de loin pas ! Il ne s'agit pas, non plus, du parapluie nucléaire qui nous protégera de toutes sortes de dangers, Madame Borgeaud ! Il s'agit d'une modeste aide à la décision, que je vous demande de bien vouloir accepter. (Applaudissements.)
Mis aux voix, le projet de loi 10027 est adopté en premier débat par 53 oui contre 31 non.
La loi 10027 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10027 (nouvel intitulé) est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 54 oui contre 26 non et 4 abstentions.
Premier débat
La présidente. Je rappelle, avant de vous passer la parole, Monsieur le rapporteur, que la commission suggère de tenir ce débat en catégorie II. Le Bureau propose un temps de parole de quatre minutes par groupe, rapport compris.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur. D'abord, je salue le choix de l'urgence pour ce débat puisque le partenariat enregistré existe depuis le 1er janvier 2007, après avoir été approuvé en vote populaire par la population suisse. Il est donc grand temps que notre canton se dote de la loi d'application !
Le Conseil d'Etat a élaboré son projet de loi en suivant deux préceptes. Premièrement, en élaborant une série de modifications législatives imposées par le droit fédéral et, d'autre part, en veillant à réaliser, chaque fois que c'était possible, l'égalité entre les partenaires d'un côté et entre les couples mariés de l'autre.
En commission judiciaire, ce sont essentiellement trois débats de fond qui ont eu lieu. Le premier concernait le partenariat cantonal. La question était de savoir si ce partenariat devait ou non être maintenu. La commission a décidé de ne pas ouvrir un débat là-dessus et de maintenir le partenariat cantonal, à la suite de la proposition du Conseil d'Etat.
Le deuxième débat a été extrêmement technique et concernait la procédure civile. Il s'agissait de savoir s'il était absolument indispensable de mentionner les partenaires à côté des couples mariés dans une série de dispositions de la loi de procédure civile concernant le divorce et ses suites. La commission a demandé au Conseil d'Etat de prévoir dans ce domaine un certain nombre de propositions nouvelles. Ces propositions ont été faites et elles ont satisfait tout le monde, parce qu'elles ont permis de réaliser l'égalité, tout en étant formulées de manière neutre dans la loi et en englobant tous les cas de figures possibles.
D'ailleurs, de la même manière, en matière de procédure civile, ce projet de loi a englobé le projet de loi 10107 du Conseil d'Etat qui concernait les rapports d'évaluation du service de protection des mineurs. Le Conseil d'Etat pourra donc retirer son projet si celui-ci est voté.
Enfin, le troisième débat que nous avons eu est intervenu en fin de procédure à propos d'un amendement visant grosso modo à supprimer les neuf dixièmes du projet de loi. Cet amendement a été finalement refusé.
J'aimerais terminer sur ma proposition d'un certain nombre d'amendements de forme dont la liste figure dans le rapport. Ces amendements visent à s'assurer qu'on ne confonde pas «partenariat» et «partenariat enregistré», c'est-à-dire qu'il n'y ait pas de confusion entre le partenariat fédéral et le partenariat cantonal. D'autre part, un certain nombre d'amendements visent à tenir compte des modifications législatives intervenues depuis le dépôt du projet de loi par le Conseil d'Etat. Cela étant, je vous recommande voter l'entrée en matière.
La présidente. La parole n'étant pas demandée, je fais voter la prise en considération de ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 9936 est adopté en premier débat par 66 oui et 1 abstention.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 4.
La présidente. Il y a un premier amendement à l'article 5, comme le disait le rapporteur. Le voici: «Le Tribunal tutélaire est l'autorité compétente pour accorder à un partenaire enregistré...».
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 59 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'article 5 (nouvelle teneur) ainsi amendé est adopté par 65 oui (unanimité des votants).
Mis aux voix, l'article 6 est adopté, de même que les articles 7 et 8.
Mis aux voix, l'alinéa 1 de l'article 9 (souligné) est adopté, de même que les alinéas 2 à 6.
La présidente. A l'alinéa 7 de l'article 9 (souligné), il y a également un amendement à l'article 5, alinéa 2, lettre b (nouvelle teneur) de la loi concernant l'adaptation au coût de la vie des pensions servies aux retraités et pensionnés de l'Etat, des établissements hospitaliers et des caisses de prévoyance (B 5 30). Il s'agit aussi du terme «enregistré» qu'il faut ajouter: «Bénéficiaires de pensions de conjoint ou partenaire enregistré survivant: Les normes ci-après ne sont valables que si la pension n'excède pas 50% de la pension maximale à laquelle aurait eu droit l'époux ou le partenaire enregistré décédé:».
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 68 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'alinéa 7 ainsi amendé de l'article 9 (souligné) est adopté par 70 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'alinéa 8 de l'article 9 (souligné) est adopté, de même que les alinéas 9 à 12.
La présidente. A l'alinéa 13 de l'article 9 (souligné) - article 4, intitulé «Fin du partenariat» (nouvelle note), alinéa 4 et 5 (nouveaux) de la loi sur le partenariat (E 1 27) - il y a un amendement à l'alinéa 4: «Le partenariat est dissous d'office si l'un des partenaires ou les deux s'engagent par un partenariat enregistré, avec effet au jour de l'enregistrement de celui-ci.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 67 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'alinéa 13 ainsi amendé de l'article 9 (souligné) est adopté par 68 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'alinéa 14 de l'article 9 (souligné) est adopté, de même que l'alinéa 15.
La présidente. Je donne la parole à M. Yves Nidegger.
M. Yves Nidegger (UDC). En fait, ma demande a été ignorée parce que vous étiez prise par la lecture des articles, mais j'ai demandé la parole au moment où on abordait la partie qui touche au code de procédure civile. Je ferai une remarque, parce qu'elle est générale et qu'elle touche un certain nombre d'articles. Il s'est développé pendant les séances de commission un malaise chez certains commissaires et pas uniquement chez le «Neinsager» qui vous parle, ni uniquement chez ceux de son groupe, mais également, paraît-il, chez ceux d'autres partis qui ont ressenti la chose de la même façon. Ce malaise est d'ailleurs allé grandissant.
Le rapporteur de majorité à tout à fait raison, lorsqu'en conclusion il nous explique que le législateur fédéral a fait du «pacs» une institution de droit suisse, dans le droit civil suisse, et qu'il ne convient évidemment pas que le législateur cantonal fasse de la résistance. C'est tout à fait un point de vue qu'il faut suivre, mais qu'il faut prolonger dans toute sa logique: on peut faire de la résistance en s'opposant aux conséquences en droit cantonal du droit fédéral posé et il s'agit évidemment de ne pas en faire.
On peut faire aussi de la résistance en s'opposant à l'esprit contenu dans le droit fédéral ou en faisant des «genevoiseries» qui iraient délibérément plus loin que le droit fédéral. Dans ce cas-là, le droit fédéral a été adopté par l'ensemble du peuple suisse, et non pas juste par des parlements élus. Dans le droit fédéral, on a pris la peine de mettre des limites extrêmement claires et extrêmement nettes, avec des interdits très forts, qui sont combattus aujourd'hui par certains lobbies qui auront peut-être d'ailleurs un jour gain de cause, mais aujourd'hui ces limites sont là. Je veux parler du fait que le pacs est une institution qui règle - et est présentée comme telle - les rapports totalement privés entre deux personnes, à l'exclusion tout à fait nette et franche de toute notion de filiation. En effet, en droit suisse - ce n'est pas le cas dans tous les pays - l'adoption par des couples enregistrés est interdite. Et la procréation artificielle assistée l'est également.
Le législateur a clairement voulu dire qu'il s'agit là d'une institution qui concerne uniquement les deux partenaires qui doivent être traités partout où cela est possible de manière égale aux couples mariés, mais c'est aussi une institution qui, à la différence du mariage, est totalement amputée de la dimension verticale qu'est la filiation. C'est d'ailleurs tout à fait logique: un droit libéral ne fait pas des lois autour de la sexualité. Il en fait en revanche, et c'est le cas du mariage, autour des questions des enfants, de la filiation et de la transmission des héritages, des droits de cité, du nom, des patrimoines, etc. C'est de cela qu'il s'agit.
Alors, le législateur cantonal n'a tout simplement pas le droit, quoiqu'il en pense, lui, d'anticiper d'éventuels futurs développements en ce qui concerne l'adoption et la présence d'enfants adoptés conjointement par des partenaires enregistrés, parce que le droit fédéral s'y oppose !
En conséquence de quoi, il est tout à fait absurde de prévoir dans un code de procédure cantonal l'audition d'enfants, s'agissant de séparation et s'agissant de divorce - donc de mesures protectrices d'un côté et du divorce de l'autre. Si l'on entend les enfants et si l'on statue sur le sort des enfants, c'est parce que les couples mariés exercent en commun des droits parentaux, l'autorité parentale et la garde. A partir du moment où le couple se sépare et que l'exercice commun de ces droits parentaux ne peut plus être exercé ensemble, il revient au juge de dire quel droit sera exercé par quel parent.
Il est évident que l'on ne va évidemment pas traiter la chose de la même façon dans les cas où, par définition, il n'y a pas de droits parentaux exercés en commun parce qu'il n'y a pas d'enfants communs. Un malaise s'est effectivement développé au sein de la commission parce que toutes ces normes constituent au fond une sorte de marquage de territoire dans toutes les parties du droit civil où c'est possible. Un marquage de la présence des partenaires enregistrés en tant que conjoints est tout à fait logique. Toutefois, que l'on associe chaque fois les partenaires enregistrés à des parents - ou que l'on fasse apparaître les mots «partenaires enregistrés» chaque fois qu'il est question de parents - n'est pas logique du tout.
On peut considérer que le partenariat enregistré est un grand avancement de la civilisation. On peut aussi considérer, c'est une question d'opinion, que c'est un phénomène éphémère, qui n'a jamais existé dans les codes civils depuis le code d'Hammourabi jusqu'à aujourd'hui. Le partenariat enregistré redisparaîtra peut-être de nos codes après expérimentation et il ne restera finalement que comme le reflet d'un moment tout à fait particulier de notre histoire, dans l'occident postmoderne.
Peu importent les opinions, il n'en reste pas moins que, s'agissant de toute la partie concernant le code de procédure civile, ce projet de loi qu'une majorité d'entre vous semblent vouloir adopter tel qu'il est ne sera pas voté par le groupe UDC qui s'abstiendra.
Mme Michèle Künzler (Ve). La diatribe que nous venons d'entendre était assez calme, il est vrai, et on ne voyait tout d'abord pas très bien où l'orateur voulait en venir. Mais finalement, on a compris.
Soyons simplement pragmatiques ! S'agissant des enfants, il y a beaucoup de partenaires parmi les couples homosexuels qui ont eu des enfants dans une relation hétérosexuelle précédente. Je pense qu'il est donc nécessaire de prévoir cela dans une loi. D'ailleurs, quand vous parlez de la loi qui prévoit l'audition des enfants d'un couple au moment de son divorce, je vous signale qu'une autre loi prévoyant l'abrogation de cette disposition pour les couples hétérosexuels est justement à l'étude.
En la circonstance, il s'agit d'être pragmatique, de voir la vie en face, telle qu'elle est, parce que toutes sortes de groupes familiaux existent. Je pense qu'il est préférable d'en prévoir les diverses possibilités, même concernant les enfants d'un conjoint homosexuel. En effet, lorsque ces enfants ont vécu dix ans en compagnie du partenaire d'un de leurs parents, il est nécessaire, si ces parents se séparent, qu'une manière de régler les relations futures existe.
Je pense que nous avons bien fait de prévoir ce cas. Ce serait juste anachronique de vouloir revenir en arrière ! (Applaudissements.)
M. Jean-Michel Gros (L). Mesdames et Messieurs les députés, M. Nidegger a fait état d'un malaise qui a parcouru la commission lors de la discussion de ce sujet. Je n'irai pas jusque là ! M. Nidegger a juste un peu semé le trouble et il fallait donc que cet article soit clarifié. Ce qui a été fait, parce que le Conseil d'Etat nous a fait des propositions, que nous avions d'ailleurs demandées.
L'article 361 concerne la suspension de la vie commune et les rapports qui sont établis en cas de divorce, en ce qui concerne les enfants. Il est vrai qu'à cette occasion on parlait des «partenaires enregistrés» et que cela pouvait créer un certain doute, puisque, dans ce cas, la loi fédérale interdit spécifiquement les enfants communs. Alors, nous avons inscrit, à la place: «les parties». Cela veut dire que c'est où l'un où l'autre des conjoints qui peut être concerné par cette affaire et cela répond tout à fait à l'article 27, alinéa 2, de la loi fédérale qui permet à un partenaire de se voir accorder le droit d'entretenir des relations personnelles avec l'enfant de l'autre partenaire.
Ce n'est donc pas du tout en contradiction avec la loi fédérale, et c'est pour cela que nous avons maintenu le texte, en modifiant un mot qui prêtait certes à confusion. Toutefois, de là à parler de malaise dans la commission, c'est aller un peu loin !
Mis aux voix, l'alinéa 16 de l'article 9 (souligné) est adopté, de même que les alinéas 17 à 30.
La présidente. A l'article 5B, alinéa 3 (nouvelle teneur), je pense qu'il s'agit d'une suppression... Monsieur le rapporteur, ai-je bien compris ? Je vous donne la parole.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur. Madame la présidente, la loi en question n'existe plus. Donc, il s'agit de biffer tout l'alinéa 31, intitulé: «Loi sur l'assistance publique (LAP) du 19 septembre 1980» et de décaler la suite en conséquence.
La présidente. C'est bien comme cela que nous l'avions compris.
Mis aux voix, cet amendement - suppression de l'alinéa 31 de l'article 9 (souligné) - est adopté par 64 oui (unanimité des votants).
Les alinéas 32 à 36 deviennent les alinéas 31 à 35.
Mis aux voix, l'alinéa 31 de l'article 9 (souligné) est adopté, de même que les alinéas 32 et 33.
La présidente. Nous en sommes à la page 56 du rapport. Nous sommes saisis de plusieurs amendements. Monsieur le rapporteur, à l'article 5, alinéa 7 (nouvelle teneur), vous proposez également de biffer cet article. Est-ce bien exact ? Vous voulez la parole ?
M. Olivier Jornot. Non, merci.
Mis aux voix, cet amendement - suppression de l'article 5, al. 7 (nouvelle teneur) - est adopté par 61 oui et 1 abstention.
La présidente. A l'article suivant, nous sommes en présence d'un deuxième amendement. Article 7, alinéa 4 (nouvelle teneur), al. 5 (abrogé), il s'agit de biffer cet article.
Mis aux voix, cet amendement - suppression de l'article 7, al. 4 (nouvelle teneur) - est adopté par 64 oui (unanimité des votants).
La présidente. A l'article 8, alinéas 1 et 4 (nouvelle teneur), vous nous proposez également de biffer totalement cet article.
Mis aux voix, cet amendement - suppression de l'article 8, al. 1 et 4 (nouvelle teneur) - est adopté par 64 oui (unanimité des votants).
La présidente. Nous sommes à l'article 26, alinéa 3 (nouvelle teneur). Un amendement propose la suppression de cet article.
Mis aux voix, cet amendement - suppression de l'article 26, al. 3 (nouvelle teneur) - de est adopté par 64 oui (unanimité des votants).
La présidente. A l'article 36, il est proposé de supprimer la dernière ligne: «L'article 5, alinéa 3 n'est pas applicable dans ce cas.»
Mis aux voix, cet amendement - suppression de la 2e phrase de l'article 36 - est adopté par 61 oui (unanimité des votants).
Mis aux voix, l'alinéa 34 ainsi amendé de l'article 9 (souligné) est adopté par 61 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'alinéa 35 de l'article 9 (souligné) est adopté.
Troisième débat
La loi 9936 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9936 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 62 oui contre 2 non et 5 abstentions.
La présidente. Je vous remercie de votre excellent travail, Monsieur le rapporteur.
Des voix. Bravo !
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Je voulais exprimer ce que vient de dire votre présidente, c'est-à-dire remercier votre commission judiciaire de son infinie patience à traiter ce projet et je voudrais remercier le rapporteur du travail de bénédictin - d'orfèvre, devrais-je dire - qu'il a effectué et qui nous a permis de mettre un terme à ce dossier ! (Applaudissements.)
Débat
La présidente. Nous sommes au point 62 de notre ordre du jour, objet que vous avez décidé de traiter en urgence. Il est inscrit en catégorie II, avec prévoit trois minutes de prise de parole par groupe. Je passe la parole au deuxième signataire de cette motion, M. Jean-Marc Odier, pour qu'il nous la présente.
M. Jean-Marc Odier (R). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion a été déposée le 26 novembre par les membres de la commission des finances et elle fait suite aux travaux sur le budget 2008. Nous avons fait le constat suivant: l'évolution de la masse salariale entre 2005 et 2008 a été relativement bien maîtrisée, puisqu'il y a une augmentation de 1.3% et que les dépenses générales de l'Etat ont diminué. Ce n'est toutefois pas le cas des subventions puisque durant cette même période celles-ci ont augmenté de 7%, sans prendre en considération les effets de la RPT et de l'introduction des normes comptables IPSAS ! Nous n'avons pas eu d'explications sur les réelles augmentations, pour savoir d'où elles provenaient exactement.
C'est la raison pour laquelle cette motion demande simplement au Conseil d'Etat de faire un inventaire des nouvelles subventions octroyées entre 2005 et 2008 et de celles qui ont augmenté pendant cette même période. Le Conseil d'Etat était d'accord avec cette demande en commission des finances. Il s'agirait donc d'obtenir cet inventaire et des explications sur les augmentations. Voilà, c'est l'objectif de cette motion qui aurait dû être votée en même temps que le budget 2008.
M. Christian Bavarel (Ve). J'ai un peu l'impression que nous nous trouvons dans un système «ceinture et bretelles». On en a déjà mis une première couche pour resurveiller les subventions avec la LIAF, qui va nous occuper en commission avec des justifications sur les projets de lois, des explications pour toutes les subventions ou un contrat de prestation, et j'en passe...
Là, ce que vous nous demandez, c'est d'en remettre encore une couche supplémentaire. Comme si l'énorme couche qu'on vient de mettre n'était pas suffisante ! Avec si peu de confiance, on ne peut tout simplement plus travailler !
Vous pouvez bien décider que député est un métier à plein temps, à soixante ou quatre-vingts heures par semaine... Pourquoi pas ? Mais, dans ce cas, il va falloir nous salarier correctement, pour que nous puissions passer notre vie au Grand Conseil !
Si vous ne voulez pas de ça, vous devez considérer que les mesures qu'on a prises sont déjà extrêmement vigoureuses et rigoureuses. La commission des finances va déjà passer la moitié de son année à essayer de traiter de l'ensemble des subventionnés !
Honnêtement, les Verts ne comprennent pas très bien votre intention de vouloir en remettre une couche supplémentaire. Nous allons déjà devoir traiter d'un nombre effarant de sujets sous une certaine forme, et vous demandez encore de les aborder sous une forme encore différente ! Ceinture ou bretelles ? Je ne comprends pas: choisissez !
M. Renaud Gautier (L). Bien qu'il se fasse tard, allons-donc faire un peu de quincaillerie et expliquons le sens de la ceinture et des bretelles !
Commençons par la «ceinture»: il s'agit du plan financier quadriennal qu'a proposé le Conseil d'Etat au cours de sa législature. Nous avons légèrement dépassé la moitié de la durée de la législature et je crois raisonnable de penser qu'un certain doute peut surgir quant à l'atteinte des objectifs de ce plan. Dans la mesure où nous sommes très soucieux de soutenir le Conseil d'Etat dans ses efforts constants pour atteindre ses objectifs de législature, il nous paraît nécessaire de demander à celui-ci les informations sur l'évolution des subventionnés, puisque nous - ou plutôt le Conseil d'Etat - prenons un peu de retard avec la LIAF. Ce n'est pas à vous que je le rappellerai !
De façon que l'on ne vienne pas vous dire, Monsieur Bavarel, que vous êtes responsable en tant que député, parce que vous n'avez pas signé et validé les 350 contrats de prestations et que sera de votre faute si tel ou tel subventionné vient pleurer vers vous dans la rue, où il n'y aura pas, je vous le rappelle, de caméras de la police ! Il faut donc encourager le Conseil d'Etat à nous fournir tous les éléments nécessaires sur les variations des subventions, de façon que celui-ci nous rassure par rapport à son plan financier quadriennal.
Je vous rappelle que nous avons vécu cette année une situation où le budget a changé. C'était un peu comme ces vieux dessins animés: on voyait l'image du budget se transformer à cause des changements apportés aux subventions. Vous savez qu'il faut quatre mois au Conseil d'Etat pour ôter 20 millions. Ici, calmement, on demande au Conseil d'Etat de nous donner d'ici à mars des éléments sur la progression de l'évolution des subventions octroyées, afin de voir si cette progression est en accord ou pas avec les objectifs du superbe plan financier que le Conseil d'Etat s'est fixés jusqu'à la fin de la législature. C'est la raison pour laquelle bretelles et ceinture vous disent: «C'est une évidence, acceptez !»
M. Alain Charbonnier (S). Mesdames et Messieurs les députés, je crois que les députés signataires de cette motion et ceux qui la soutiennent font la sourde oreille, voire font les aveugles. Ils font les aveugles, parce que les chiffres, on les voit quand même, année après année ! En ce qui concerne les subventions en général, les chiffres sont constamment communiqués par le Conseil d'Etat. Les députés signataires font les sourds, parce qu'on a essayé plusieurs fois de leur expliquer, en tout cas pendant la dernière séance de la commission des finances, lors de l'élaboration du budget, que les subventions ne sont pas uniquement accordées à des associations, mais qu'il s'agit aussi d'allocations à des personnes physiques, qui sont régies par des lois. Il y a des augmentations, évidemment, puisqu'il y a une augmentation du nombre de personnes à l'assistance publique ! Il y a aussi une augmentation du nombre de jeunes qui font des études.
Tout ça fait évidemment que les subventions augmentent, mais ce n'est pas en allant comparer des chiffres, semaine après semaine, que vous pourrez intervenir là-dessus. Ayez un jour le courage de changer les lois, mais arrêtez d'en rajouter des couches ! La dette a pu diminuer de 1 milliard de francs: c'est évidemment à cause des effets conjoncturels, mais c'est aussi et surtout, il faut le saluer, grâce à une efficience accrue au niveau du fonctionnement de l'Etat. Alors, arrêtez, et laissez le Conseil d'Etat travailler ! Sinon, faites des propositions, mais faites-les de façon définitive et de façon claire !
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Alberto Velasco, à qui il reste une minute trente.
M. Alberto Velasco (S). Je trouve un intérêt à cette motion, pour la raison suivante. C'est récurrent de la part de M. Kunz, de venir avec ce genre d'idées: il y tient et il insiste ! Puisque le Conseil d'Etat va travailler là-dessus, j'aimerais que nous calculions ces changements dont il est question en francs constants. En francs constants, puisque nous parlons des années 2005 à 2008 ! M. Kunz revient beaucoup plus loin en arrière, lui - c'est ce que j'ai compris. Et la question que vous posez est de savoir comment il se fait qu'en trois ans les subventions aient augmenté de 7%. J'aimerais que le Conseil d'Etat réponde à la question en disant de combien ces subventions ont augmenté en francs constants. En plus, il faudra qu'il tienne compte de l'effet induit sur les chiffres par l'augmentation de la population.
Peut-être qu'on verrait alors, à francs constants et à population constante, qu'en réalité ces subventions n'ont pas forcément augmenté !
Mesdames et Messieurs les députés, si l'on veut faire cet exercice, faisons-le totalement, correctement et de manière scientifique !
M. Guy Mettan (PDC). Le parti démocrate-chrétien soutiendra cette motion pour deux raisons. M. Bavarel n'est pas sans le savoir, la première raison est que la commission des finances est souvent accaparée par le travail et les projets de lois qui lui sont soumis, notamment en période budgétaire où nous nous trouvons être confrontés à des centaines de pages et des milliers de lignes, sans qu'on puisse vraiment identifier toutes les subventions qui ont augmenté. Cette motion aura dans le fond pour effet d'anticiper le travail de la commission, en permettant d'identifier à l'avance les subventions qui auraient augmenté, de manière que les députés puissent se faire une meilleure opinion sur ce sujet.
La deuxième raison, c'est que, connaissant les petits travers de notre Etat, on sait très bien que la tendance à Genève est de soutenir les subventionnés, non seulement avec des bretelles, mais aussi avec une ceinture. Je pense que ce n'est pas mal que l'on puisse choisir de rationaliser et de les soutenir non pas avec et les bretelles et la ceinture, mais peut-être seulement avec les bretelles ou la ceinture ! Cela devrait donc nous permettre de nous faire une meilleure idée sur cette question.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Bavarel, vous désirez reprendre la parole ? Il vous reste une minute vingt.
M. Christian Bavarel (Ve). Ce sera simplement une couche de plus et des lignes de plus à lire. Plus vous demandez de l'information, moins vous êtes satisfaits ! Vous demandez toujours plus d'information en croyant que cela va aller mieux ! Vous augmentez seulement la pile de paperasse à traiter et, pour finir, c'est ceinture, bretelles et fixe-chaussettes, qui sont, comme chacun le sait, les jarretelles de l'homme. Néanmoins, c'est uniquement décoratif !
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat est très sensible au soutien que le député M. Gautier vient d'apporter aux efforts que le Conseil d'Etat poursuit pour respecter son plan financier quadriennal et, par conséquent, c'est très volontiers que le Conseil d'Etat accepte cette motion et que nous vous donnerons les explications que vous souhaitez recevoir.
Pour rassurer M. Bavarel, sans essayer de faire un volume littéraire sur cette question, le document de travail sera le plus clair possible, le plus synthétique possible et, pour répondre à M. Velasco, aussi pédagogique que possible également.
Mise aux voix, la motion 1800 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 47 oui contre 28 non et 1 abstention.
La présidente. Je propose d'arrêter là nos travaux. Je vous souhaite une très bonne nuit. A demain, 15h !
La séance est levée à 22h45.