Séance du
jeudi 14 juin 2007 à
17h
56e
législature -
2e
année -
9e
session -
41e
séance
PL 9501-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
La présidente. Avant de passer la parole à Mme Leuenberger, je vais d'abord demander à Mme la secrétaire de bien vouloir lire les courriers 2447, 2449 et 2450 correspondant à ce sujet.
Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Un petit rappel, peut-être, en préambule: ce projet de loi a été rédigé il y a deux ans par Sami Kanaan, président de l'ATE, et moi-même, et cosigné notamment par un député libéral visionnaire, M. Gautier. Il avait fait l'objet d'une conférence de presse avec Mme Isabelle Chevalley, présidente d'Ecologie libérale, dont plusieurs députés PDC, radicaux et libéraux font partie, et cette dernière avait elle-même présenté un projet similaire dans le canton de Vaud. Nous avions déposé ce projet de loi suite à la ratification du Protocole de Kyoto, signé le 16 février 2005 par la Suisse, qui a ainsi pris l'engagement de réduire ses émissions de CO2 de 8% d'ici à 2010.
Entre-temps, le GIEC - Groupe International d'Experts sur l'Evolution du Climat - a présenté à Paris son rapport sur les problèmes climatiques, dont le constat est non seulement alarmant mais incontournable et indéniable: il n'y a plus de doute sur le fait que l'être humain, en moins de cinquante ans, a transformé les conditions climatiques par des rejets de CO2 monstrueusement excessifs dans l'atmosphère.
Autre constat incontournable: en Suisse, et particulièrement à Genève, la ville la plus motorisée au monde, la source principale de ces émissions de CO2 est le trafic routier. Et les experts ont malheureusement observé que, bien qu'on ait pris des mesures pour diminuer le trafic pendant ces dernières années - notamment par des ralentissements ou des transferts modaux - ces efforts ont été anéantis par l'arrivée sur le marché, depuis dix ans, de véhicules surdimensionnés, de type tracteurs urbains. De plus, dans 90% des cas, ces voitures n'ont aucune fonction utilitaire et sont là simplement par effet de mode.
Forts de tous ces constats, que font les députés de la droite en commission fiscale ? Malgré les déclarations faites dans leur programme politique, de se préoccuper de l'écologie, ils refusent de voter l'entrée en matière de ce projet de loi et, donc, d'en débattre, alors que le département a présenté des scénarios et des variantes plausibles et étayés qui figurent en annexe de ce PL 9501.
L'Accord de Kyoto, c'était en 2005. On est à présent en 2007 et, d'ici à trois ans, on devra avoir réduit nos émissions de CO2 de 8%. Alors, si vous aviez travaillé correctement, on aurait pu voter ce projet de loi ce soir.
De plus, vos arguments contre ce texte sont toujours les mêmes: «Oui, mais il y a les avions; oui, mais il y a les transports par camion, inutiles; oui, mais ces mesures sont locales et ne représentent pas grand-chose au niveau mondial.» Oui, c'est vrai que ce projet de loi ne prétend pas tout résoudre, mais présentez donc des projets pour les autres sujets, on les soutiendra ! Bien sûr, ce projet est local, mais, jusqu'à nouvel avis, l'Accord de Kyoto et les engagements pris sont sectoriels et il n'y a pas de gouvernement mondial pour les rendre obligatoires.
D'autre part, Genève est une ville internationale; alors, si l'on ose introduire une taxation pour les véhicules les plus polluants, cela aura une valeur de symbole, cela fera boule de neige et d'autres cantons, voire d'autres nations, en feront peut-être de même.
Mon dernier point concerne l'aspect financier: ce projet de loi, en l'état, rapporterait environ 32 millions. Mais c'est du pain béni ! Pourquoi le refuser ? Comment ne pas comprendre que les coûts engendrés d'ici à quelques décennies par un réchauffement climatique, par les effets migratoires et les catastrophes écologiques, seront colossaux, incommensurables et incomparables avec cette disposition qui n'est qu'une petite mesure préventive.
Pour moi, cette taxe relève d'une nécessité fiscale ! Rouler avec des véhicules - et là, je m'adresse à Monsieur Stauffer - trop grands, trop polluants, trop émetteurs de CO2, ce n'est pas sans répercussions financières pour toute la collectivité publique. En effet, cela nuit à l'environnement: pour construire ces gros véhicules, il faut beaucoup d'énergie, et il en faut aussi pour les entretenir. Il y a également des conséquences sur l'aménagement du territoire: les routes ne sont pas extensibles à l'infini, ni les parkings. Cela provoque en outre des répercussions sur la santé, puisque l'air pollué est respiré par tout le monde, et enfin, sur la sécurité, parce que, souvent, ces véhiculent gênent la visibilité des autres usagers plus modestes. Pour moi, il est donc normal que ces conducteurs paient plus.
En conclusion - je crois qu'il faut le dire et le redire, mais ce ne sera certainement pas entendu - les écotaxes, sont selon moi, l'outil fiscal de demain pour faire changer les comportements, pour faire des économies d'énergie, pour lutter contre l'effet de serre et pour remplir les caisses de l'Etat.
Au lieu d'augmenter les impôts ou de baisser les prestations, il faut vraiment commencer à instaurer une fiscalité écologique. Et si l'on a un comportement adéquat, on ne sera pas taxé - je pense en effet qu'il n'est pas nécessaire d'aller s'acheter un string en ville avec un véhicule de deux tonnes et demie... Donc l'idée, c'est de taxer l'énergie et pas le travail, et j'ai vu avec plaisir que, dans le programme des radicaux, cela figure en toutes lettres.
Ainsi, si vous avez vraiment compris l'ampleur de ce problème, vous devriez voter ce projet de loi. (Applaudissements.)
M. Roger Golay (MCG), rapporteur de majorité. Ce projet de loi 9501 a été déposé le 1er mars 2005. Il consiste à modifier la loi générale sur les contributions publiques. En substance, les auteurs de ce projet proposent de modifier la LCP, plus précisément l'article 415, afin que les véhicules automobiles destinés au transport de personnes et comportant neuf places au plus puissent être taxés d'après la puissance effective de leur moteur, calculée en kilowatts, ainsi qu'en fonction des quantités émises de CO2 et de particules fines, exprimées en grammes par kilomètre.
Le but premier de ce projet de loi est donc de taxer plus fortement les véhicules dont les émissions de CO2 sont élevées et d'accorder un rabais à ceux qui en rejettent moins. En somme, les auteurs proposent de surtaxer les véhicules gourmands en énergie.
L'impact financier de ce projet serait considérable, puisqu'il augmenterait de plusieurs millions de francs les recettes globales sur la taxe des véhicules.
De plus, en cas d'adoption de ce texte législatif, le peuple devrait se prononcer, conformément à ce que la constitution prévoit lorsqu'il s'agit de modifier l'assiette fiscale.
La commission fiscale a traité ce projet de loi pendant neuf séances et a donc étudié d'une manière très approfondie cette proposition, puisqu'elle a, en outre, procédé à de nombreuses auditions de spécialistes. C'est donc en parfaite connaissance de cause que nous avons pu nous déterminer et ainsi décider de ne pas entrer en matière sur ce projet de loi.
En effet, tout au long de nos travaux, nous avons pu constater que ce texte est inapplicable dans sa forme actuelle. Il faut savoir que les données concernant le CO2 n'existent pas pour les véhicules antérieurs à 1997, et, de ce fait, le système bonus/malus ne pourrait pas leur être appliqué. Pour les 70% des véhicules restants, nous relevons que le projet de loi ne fait pas de différence entre un véhicule qui parcourt peu de kilomètres et un autre qui en couvre énormément. De plus, cette taxe sur le CO2 serait arbitraire, car elle ne tiendrait compte que des éléments qui figurent sur la fiche d'homologation et non pas de la pollution réelle. Si vous y ajoutez que les données publicitaires et des constructeurs ne sont généralement pas fiables, vous comprendrez que nous sommes dans l'approximation absolue. Or, ni l'arbitraire ni l'approximation n'ont leur place en démocratie.
Quant aux quantités d'émissions et de particules fines par type de véhicule, celles-ci ne sont répertoriées dans aucun fichier informatique de l'administration fédérale et cantonale. Cependant, la Confédération veut rendre obligatoires les filtres à particules au niveau fédéral. Et la norme européenne Euro 4, entrée en vigueur en 2005, tient déjà compte de l'émission de particules. A l'heure actuelle, 80% des véhicules diesel neufs mis en circulation sont dotés de systèmes de rétention de particules fines. Il sied de préciser encore que, selon M. Kunz, du Service cantonal de la protection de l'air, le filtre garantit actuellement la retenue d'environ 99% des particules fines. Cela montre qu'aussi bien les constructeurs que les conductrices et conducteurs d'automobiles sont parfaitement conscients de leur responsabilité environnementale et sont prêts à agir correctement.
Ce projet est en réalité un impôt supplémentaire voulu par les autophobes, qui se cachent derrière l'environnement pour accentuer la pression fiscale. Ce que visent ces milieux, c'est la collectivisation des transports.
D'autre part, la norme Euro 5 est actuellement en discussion et son entrée en vigueur, en conformité avec l'Union européenne, est fixée à 2009.
Soulignons encore que, lors de la visite technique périodique des véhicules au SAN, les émissions de CO2 et de particules fines ne sont pas mesurées. Même s'il est techniquement possible de le faire, la mesure du CO2 fournirait une photographie instantanée qui ne correspondrait pas nécessairement au CO2 moyen émis par le véhicule selon les cycles urbains et mixtes.
De plus, l'automobile est déjà fortement taxée. Le détenteur d'une voiture paie une taxe prélevée par la Confédération d'environ 85 centimes par litre d'essence pour les véhicules à essence, et de 89 centimes par litre pour les véhicules équipés d'un moteur diesel. De ce fait, les voitures qui consomment le plus sont déjà pénalisées par ce biais.
Selon les spécialistes, dont M. Spierer, du Service cantonal de l'énergie, la taxe actuelle progressive en fonction de la puissance en kilowatts a précisément été choisie car elle traduit clairement l'impact environnemental. Les professionnels du domaine s'accordent en outre à dire que le critère de la puissance est le plus représentatif, surtout parmi les plus simples. La puissance en kilowatts est donc une bonne base pour juger des différentes pollutions d'un véhicule, que ce soient le bruit, les émissions de poussières, de pneus et de freins.
L'automobile est la vache à lait de ses opposants et il convient de rappeler ici que la taxe actuelle est déjà une action dissuasive pour les gros véhicules. Elle encourage clairement le public, lors du renouvellement du véhicule, à se tourner vers des voitures qui peuvent être exonérées d'impôt.
Une taxation linéaire, comme le prévoit le PL 9501, comporte en outre une part antisociale qui ne peut qu'étonner de la part de ses initiants. Il ne leur a pourtant pas échappé qu'elle pénalise les familles qui, par obligation, doivent utiliser des plus gros véhicules et donc plus gourmands en énergie. Comme si cela ne suffisait pas, nous avons également relevé que ce projet ne tient pas compte du critère personnes transportées/consommation. Or, selon le principe du pollueur-payeur, que les initiants aiment à mettre en avant, cet aspect de la question est essentiel si l'on veut aboutir à une répartition équitable de l'effort environnemental.
Il est totalement utopique de penser que les automobilistes changeront de voiture sur la base d'une nouvelle taxe. Les classes défavorisées et moyennes de la population n'en ont tout simplement pas la possibilité. D'autre part, ce projet ne s'occupe absolument pas de la pollution causée par les machines de chantier qui est phénoménale et se trouve, de plus, principalement en milieu urbain.
On a donc tous compris, une fois de plus, que l'objectif n'est pas de lutter efficacement contre la pollution mais, comme je l'ai dit, de collectiviser les transports.
C'est pourquoi la majorité s'est nettement et unilatéralement affirmée à la commission fiscale, sous l'impulsion de nos collègues PDC et radicaux, et vous invite à vous opposer à ce projet de loi qui n'est qu'un impôt déguisé de plus. Merci.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. En écoutant M. Golay et en repensant aux déroulements des travaux, on a un peu l'impression que l'on sait que la planète va brûler mais qu'à Genève, en gros, on s'en fiche un peu... Et ce n'est pas génial.
J'aimerais d'abord revenir sur les propos selon lesquels les automobilistes seraient des vaches à lait, et plus particulièrement dans ce projet de loi. Mais c'est totalement faux ! Je pense qu'il faut insister là-dessus: ce projet de loi, dans sa formulation initiale, visait à faire baisser la taxe automobile de 50 F ou 100 F pour les véhicules qui émettent moins de CO2 que la moyenne genevoise. Le compromis élaboré par le Conseil d'Etat permet d'ailleurs d'exonérer de taxe automobile 10 000 véhicules genevois, notamment les petites voitures et les plus récentes, et de les exonérer totalement ! Alors ne venez pas me dire, Monsieur Golay, que c'est antisocial, parce que ce sont justement les voitures petites ou récentes qui sont épargnées.
J'ai un graphique où l'on voit très bien que l'une des voitures qui est particulièrement visée par ce projet de loi - ça ne vous étonnera guère - c'est la Porsche Cayenne Turbo, qui consomme bien au-dessus de la moyenne, mais même une VW Touareg 4X4 bien connue aurait une modeste augmentation de la taxe automobile. Donc, ne venez pas me dire que ce sont des automobilistes vaches à lait, c'est tout simplement mensonger.
En outre, le projet de loi initial amenait 31 millions de francs de recettes fiscales supplémentaires, et ces 31 millions seraient tout à fait utiles, justement, pour baisser le prix des abonnements TPG pour les familles modestes ou pour prendre d'autres mesures en matière de mobilité douce.
Pour rester sur le projet de loi lui-même, je dirai que le compromis élaboré par les services du Conseil d'Etat et du département, après de longs travaux et des études relativement complexes, a permis d'atteindre un modèle qui est fiscalement neutre. Donc, on arrive peut-être à une augmentation de 2 millions de francs de recettes fiscales sur l'ensemble du parc automobile genevois. C'est très difficile d'atteindre l'équilibre exact, mais fondamentalement il s'agit de tenir compte, non seulement de la puissance des véhicules, parce que c'est bien sûr un premier facteur, mais aussi des émissions de CO2, puisque, à puissance identique, certains véhicules en rejettent davantage. Le but de ce projet de loi est donc de dire que si votre voiture pollue plus, vous devez payer davantage. Et je pense que c'est un objectif raisonnable.
Tous les partis ont entendu les conclusions du GIEC concernant le réchauffement climatique: tout le monde, ou presque, a vu le film d'Al Gore; des représentants de tous les partis de l'Entente ont eu l'occasion de s'exprimer à ce sujet et on sait aussi que Claude Haegi fait une promotion soutenue de ce film, pour montrer qu'il est temps d'agir aujourd'hui. On a le moyen d'influencer modestement le type d'achat des Genevois: en leur disant que, s'ils souhaitent acquérir une voiture, il faut qu'ils en choisissent une qui pollue le moins possible, parce qu'on ne pollue pas comme on veut. C'est un message tout à fait compréhensible pour tous les citoyens, ça ne pose aucun problème.
Concernant les coûts, je dirai qu'il n'y a pas que la taxe automobile, Monsieur Golay. On sait très bien que la pollution atmosphérique a des répercussions directes sur la santé, notamment celle des enfants. J'ai ici un article, traduit dans la «Revue Médicale Suisse» - excellente revue au demeurant - et intitulé: «L'impact démontré de la pollution automobile sur les enfants néerlandais». Cet article date d'avril 2007, c'est un article médical, il n'est pas tiré d'une revue dont vous allez contester la validité scientifique.
Je suis désolé, Monsieur Golay, si l'on a des voitures polluantes, eh bien, ce sont les taxes d'assurance-maladie qui vont augmenter, ainsi que l'absentéisme au travail et, fondamentalement, cela va aussi engendrer des coûts indirects - par exemple en ce qui concerne l'entretien des bâtiments, parce qu'on sait très bien que le patrimoine doit aussi être nettoyé. C'est donc la santé publique, au sens large, qui subit les conséquences de cette inconscience automobile.
Mais, à nouveau, ce projet de loi ne vise pas du tout à interdire quoi que ce soit, il intègre simplement le principe du pollueur-payeur. Et je me pose justement une question: tous les partis politiques parlent d'action, surtout en cette année d'élections nationales, mais alors, si on n'agit pas avec des méthodes de type pollueur-payeur, est-ce que vous allez soutenir des mesures d'interdiction de types de véhicules ? Je pense que non.
Ici, on prend des mesures relativement modestes. Je rappelle que la taxe automobile genevoise est déjà en dessous de la moyenne suisse, alors que le parc automobile est, lui, constitué de voitures plus chères que la moyenne nationale, donc la marge de manoeuvre existe à Genève et il est faux de prétendre le contraire.
Pour conclure, je dirai simplement qu'il a encore été relevé récemment dans la «Tribune de Genève» que notre canton avait un rôle à jouer sur le plan international pour tout ce qui concerne le développement durable, notamment par rapport aux agences onusiennes ou à d'autres organisations non gouvernementales actives dans le domaine du climat, et ce n'est pas en étant aussi inconscient, dans une ville et un pays aussi riches, qu'on va donner des signaux positifs.
Je vous invite donc, au minimum, à renvoyer ce projet de loi en commission fiscale.
M. Guillaume Barazzone (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, lors de la lecture des courriers qui nous ont été envoyés par différentes associations, vous avez pu prendre conscience de la nécessité d'atteindre toute une série d'objectifs, notamment en matière de diminution de la pollution, mais aussi en fonction d'engagements internationaux, puisque la Suisse a ratifié le Protocole de Kyoto et que le Conseil national ainsi que le Conseil fédéral entendent, depuis un certain nombre d'années, parvenir à ces buts, comme d'ailleurs les parlements cantonaux devraient le faire.
Vous avez aussi pu entendre la nécessité de lutter contre un problème de santé publique, qui est un thème dont on parle moins bien qu'il soit, à mon sens, tout aussi important. La pollution de l'air, comme l'a dit M. Deneys, a des impacts négatifs, notamment sur les plus fragiles, c'est-à-dire les enfants et les personnes âgées, et nous devons absolument faire en sorte que ces populations fragiles soient protégées et que la pollution diminue.
Le parti démocrate-chrétien partage ces objectifs, et il nous faut donc agir. Je le dis d'emblée, notre groupe demandera, contrairement à ce qui est indiqué dans le rapport, le renvoi de cet objet en commission, parce que les résultats, après neuf séances de commission, et alors que tous partis confondus ont dit vouloir atteindre ces objectifs, ne sont pas satisfaisants. Nous devons donc véritablement travailler pour faire en sorte qu'un compromis soit trouvé et que quelque chose de positif en matière de pollution de l'air sorte de cette commission.
Mais ce projet de loi a un défaut majeur, Mesdames et Messieurs, qui tient à l'inadaptation de la mesure proposée, selon laquelle il faut appliquer le barème et les valeurs seuils à tout le parc automobile existant, avec le but du projet de loi qui vise à prendre des mesures afin d'orienter les consommateurs vers l'acquisition de véhicules moins polluants.
Monsieur Deneys, vous parliez aussi de cela, mais, dans l'idée d'orienter, il y a la notion de choix et cela signifie par définition qu'il est question de choisir un nouveau véhicule, on ne parle donc pas de ceux qui ont déjà été achetés. Or, de notre point de vue, et ce sera le sens d'un amendement qui sera déposé en commission, le projet de loi ne doit porter que sur les véhicules qui seront immatriculés à l'avenir, car l'incitation fiscale n'a de sens que s'il s'agit de ces véhicules-là. Alors, à moins de vouloir, sans le dire vraiment, comme certains, taxer et sanctionner ceux qui ont déjà acquis une voiture, par exemple en 1988 ou dans les années 90, ce qui constituerait d'une certaine manière un impôt déguisé, la seule manière d'atteindre le but fixé par les initiants est d'appliquer le principe du bonus/malus ou du pollueur-payeur aux nouveaux véhicules uniquement.
Si cette solution devait être acceptée, il faudrait vraisemblablement que nous rediscutions des valeurs seuils pour que celles-ci, ainsi que les normes définies dans le projet de loi, ne soient pas sans objet. En effet, il s'agira véritablement d'être incitatif et l'on sait que, plus le temps avance, plus les normes sont respectées par les constructeurs, et donc plus la nécessité d'avoir des seuils qui correspondent à ceux du marché est importante.
S'agissant maintenant de ce projet de loi, il est soumis au référendum obligatoire, comme vous le savez, puisqu'il est question de modifier l'assiette fiscale. Et en ce sens, nous considérons que d'amender ce projet de loi, comme je viens de vous l'expliquer, permettra vraisemblablement de convaincre davantage le peuple d'accepter ce texte, ce qui ne serait probablement pas le cas avec la mesure proposée puisque, si l'on décidait aujourd'hui de soumettre une augmentation fiscale à 213 000 détenteurs de véhicules, il y a tout lieu de penser que cela ne serait pas accepté par la population.
Alors, dans cet esprit, Mesdames et Messieurs, le parti démocrate-chrétien vous invite à renvoyer cet objet en commission et vous proposera l'amendement tel que je vous l'ai exposé précédemment. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
La présidente. Nous sommes donc saisis du renvoi de ce PL 9501 à la commission fiscale. A ce propos, je vous rappelle l'article 78A de notre règlement qui prévoit que, lorsqu'une demande de renvoi en commission est formulée, la discussion porte alors uniquement sur celle-là et qu'un seul député par groupe peut s'exprimer, à raison de trois minutes par personne.
M. Gabriel Barrillier (R). Je vais m'exprimer, sur le renvoi évidemment ! Mais j'aimerais dire ici qu'effectivement il arrive que les circonstances changent, pas seulement en politique mais également sur le plan technique ou scientifique. C'est la raison pour laquelle le parti radical genevois - je tiens à le souligner ce soir - a voté il y a quelques jours un nouveau programme qui prévoit tout à fait clairement un impôt automobile lié aux émissions de CO2.
Je ne vais pas m'étendre plus longtemps sur ce sujet, mais cette décision unanime de notre parti doit maintenant être concrétisée, et c'est pourquoi le groupe ici présent a choisi à l'unanimité de reprendre l'examen de toute cette problématique. Mais ce n'est pas faire injure au travail qui a été effectué pendant plus de dix séances ! Nous avons simplement le courage de regarder les choses en face, et pour cette raison, afin d'être constructifs, nous avons concocté une proposition de motion qui donne une certaine direction au Conseil d'Etat pour appuyer les travaux de la commission. Je me réjouis que le groupe démocrate-chrétien, qui s'est exprimé juste avant moi, ait immédiatement trouvé cette idée excellente... (Rires.) ...et qu'il ait accepté de signer la motion. On ne va donc pas se faire concurrence en la matière, parce que le sujet est beaucoup trop sérieux.
J'aimerais aussi ajouter que nous n'avons pas découvert le développement durable comme sur le chemin de Damas... Nous avons quand même des précurseurs, et je me permets ici de rappeler le travail et les messages que nous ont donnés depuis de nombreuses années MM. Petitpierre, Büchi, notre collègue Dessimoz, et, dès lors, nous proposons également...
La présidente. Sur le renvoi en commission, Monsieur le député !
M. Gabriel Barrillier. Nous acceptons le renvoi en commission du projet de loi et de la motion que nous avons concoctée en votre faveur.
La présidente. Monsieur le député, la motion sera bien sûr traitée après le débat sur le projet de loi.
M. Alberto Velasco (S). Tout d'abord, j'aimerais dire que, eu égard à l'ensemble de nos collègues inscrits pour prendre la parole dans ce débat, vous auriez dû, Monsieur Barazzone - bien que je salue votre proposition - demander le renvoi en commission à la fin du premier tour du débat: cela aurait permis aux différents groupes de donner leur point de vue. Parce que, là, vous tuez le débat d'entrée, après avoir vous-même longuement parlé ! Il y a donc un problème dans ce Grand Conseil... Nous, la gauche, on s'exprime peu parce qu'on a moins de représentants, et, en plus, on nous ôte la possibilité de débattre avec une demande de renvoi direct en commission. Il y a deux poids deux mesures ici que je n'accepte pas.
La présidente. Profitez de vos trois minutes !
M. Alberto Velasco. Non, Madame, je parlerai un peu plus. (Rires.) C'était juste une mise au point.
Tout d'abord, Madame la présidente, j'aimerais quand même saluer l'excellent travail qu'a fourni l'administration concernant ce projet de loi. Nous avons eu des documents extraordinaires. Je le dis, car ces personnes, en tant que techniciens - entre autres - ont fait un travail de fond rarement vu depuis que je siège dans ce Grand Conseil. Je tenais à saluer cela. Et le refus de ce projet de loi est donc d'autant plus regrettable qu'il y avait, derrière, une étude extrêmement minutieuse faite par l'administration.
Monsieur Golay, rapporteur de majorité, vous dites que les fonctionnaires ont signifié que l'émission des particules n'était pas liée à l'émission de CO2. Mais il faut aller jusqu'au bout de leur raisonnement ! Je vais vous dire ce qu'ils ont expliqué. Par intégrité intellectuelle, ils ont indiqué qu'il n'y avait pas, aujourd'hui, la possibilité de corréler la puissance de l'automobile à la quantité de particules émise. Mais ils ont ajouté qu'il y avait bien un lien entre la puissance du véhicule et l'émission de particules. Simplement, ils n'arrivent pas à chiffrer ce lien, mais il existe bel et bien, puisque, plus on consomme, plus on émet de particules et de CO2. Ça, c'est la vérité ! Donc le cas des particules pose problème en regard de la quantification, contrairement au CO2, pour lequel il est possible de faire une corrélation.
Alors, je me réjouis et salue la position de mes collègues radicaux et PDC, car je pense que, dans la situation actuelle, il est judicieux de renvoyer ce projet de loi en commission.
Mais ce que j'aimerais dire aussi, chers collègues, c'est que des incitations ont été prévues, par exemple au niveau des Services industriels, quand ils ont... Aujourd'hui, on fait des audits gratuits, pratiquement, où l'on démontre que, si l'on mettait réellement en place ces audits, les entreprises pourraient justement faire des bénéfices et amortir l'installation... Mais ça ne se fait pas.
La conclusion - et je sais que M. Cramer partage cet avis - c'est que malheureusement, aujourd'hui, on a constaté les dégâts, notamment environnementaux, et qu'on en arrive donc à devoir imposer une certaine contrainte. Oui, Mesdames et Messieurs les députés, c'est malheureux à dire, mais la situation aujourd'hui est telle que, pour préserver les futures générations...
La présidente. Sur le renvoi en commission, Monsieur le député !
M. Alberto Velasco. ...on doit aller dans le sens...
La présidente. Monsieur le député, je vais devoir couper votre micro, cela m'ennuierait beaucoup.
M. Alberto Velasco. Madame, la démocratie, s'il vous plaît !
La présidente. Eh bien oui, j'applique le règlement. C'est cela, la démocratie. (Applaudissements.)
M. Alberto Velasco. Non, la démocratie, ça va au-delà du règlement ! La démocratie, Madame, c'est que la droite dispose de plus de temps que la gauche !
La présidente. Vous avez largement dépassé votre temps de parole, Monsieur le député, il faut conclure !
M. Alberto Velasco. Alors, Madame, laissez se dérouler le débat entre les différents groupes ! Evidemment que nous ne nous opposerons pas à un renvoi en commission, mais, Madame la présidente, je tiens ici, pour la quatrième fois, à redire mon regret que ce parlement soit réduit à son expression la plus minimaliste.
La présidente. Je ne suis pas l'auteur du projet de loi qui a été voté récemment concernant notre règlement.
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, je m'efforcerai de respecter très scrupuleusement le temps de parole qui m'est imparti, pour autant, bien entendu, que vous en décomptiez cette première phrase !
Etrange axiome que nous avons entendu aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, qui consisterait à dire que, lorsqu'un objet est traité longuement en commission, il est interdit de le refuser. Mais qu'est-ce que cela signifie ? Que, désormais, pour pouvoir refuser un objet, il faut le faire de but en blanc parce qu'on n'a pas aimé le titre ? Je crois qu'il faut être sérieux !
Ce projet de loi a été étudié longuement et de manière approfondie dans une dizaine de séances de la commission fiscale. De surcroît, cela faisait suite aux débats sur le PL 8700, qui, dans une large mesure, traitait du même objet, et où de nombreux représentants des milieux écologistes - je l'ai dit tout à l'heure, au point précédent de l'ordre du jour - sont venus nous vanter le système actuel d'imposition, en disant combien il était justement corrélé avec les émissions de CO2, combien c'était une fiscalité verte que nous avions introduite à Genève et qu'il ne fallait surtout pas changer ce système.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe libéral, après tant de travail, tant d'études et tant d'auditions, n'acceptera pas le renvoi en commission qui nous est soudain demandé, suite à une volte-face de différents partis dont les commissaires avaient pourtant eux aussi, avec enthousiasme et détermination, décidé qu'il ne fallait pas voter ce projet de loi.
Pourquoi faut-il le refuser ? Non seulement parce qu'il a été étudié de fond en comble, mais aussi du fait que, de surcroît, il n'est pas sauvable, car il enfonce des portes ouvertes, introduit des distorsions, et pourrait conduire à ce que des véhicules extrêmement puissants soient exonérés, uniquement parce que le hasard ferait qu'ils produisent moins de CO2.
J'aimerais, pour terminer, vous citer cette excellente proposition qui vient d'être faite par le parti radical suisse - dont, je crois, l'une des fractions de notre parlement est la section genevoise - qui suggère de supprimer l'imposition cantonale des véhicules, en échange d'une augmentation de la taxation du carburant, parce que, nous expliquent les radicaux suisses, c'est là que se situe la véritable incitation à polluer moins. (Brouhaha.)
Mesdames et Messieurs, je vous invite à refuser le renvoi en commission.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je n'accepterai pas ce projet de loi et m'opposerai également à son renvoi en commission.
J'aimerais déjà relever que vous avez la chance d'être en commission et de pouvoir débattre, et je ne vois pas pourquoi, à chaque fois que nous avons des séances plénières, nous refaisons les débats. Les commissions servent à cela !
Sauf le respect que je dois à tous mes collègues ici, j'ai envie de dire que la maladie de la gauche, c'est de taxer tout le monde et toujours plus, d'étrangler les gens, de les empêcher de vivre... L'argent ne fait pas le bonheur, bien qu'il y contribue... (Remarques.) Et il ne remplace pas pour autant l'intelligence humaine. Donc, les campagnes d'information, la publicité, les conférences et le dialogue valent mieux que l'argent.
De plus, les gens ne sont pas idiots. On ne peut pas leur demander de payer pour tout en leur disant: «Paie et tais-toi.»
Vous n'avez pas non plus le droit d'exiger que les gens modestes achètent une voiture neuve pour qu'elle soit conforme à vos exigences. Ainsi, vous creusez encore plus le fossé entre les riches et les pauvres, et c'est totalement inadmissible !
Nous avons un Bureau des automobiles très compétent, notre pays est très strict par rapport aux autres, et je ne crois pas que nous voyions souvent dans d'autres cantons des voitures poubelles...
La présidente. Sur le renvoi en commission, Madame la députée !
Mme Sandra Borgeaud. Je terminerai, parce que je n'ai pas la possibilité de m'exprimer en commission, Madame la présidente. (Brouhaha.) J'aimerais rappeler que le SAN est très compétent, qu'il fait des efforts, que des systèmes de catalyseurs ont été mis en vigueur, que les vieilles voitures passent le contrôle antipollution chaque année et les neuves, tous les deux ans... Alors, s'il vous plaît, arrêtez de prendre les gens pour des vaches à lait, responsabilisez-les et trouvez d'autres solutions, mais qui soient pour le bien de tout le monde. (Applaudissements.)
Mme Michèle Künzler (Ve). Nous nous réjouissons évidemment que certains aient un peu pris conscience des problèmes et qu'ils veuillent maintenant retourner en commission. J'ai l'impression que le chemin de Damas commence à être drôlement encombré... Il y en a qui se sont déjà remis en marche et d'autres qui sont encore un peu stationnaires, mais dont on espère qu'ils pourront faire la suite de leur conversion.
Pour l'instant, le Département fédéral de l'énergie et de l'environnement a établi de nouveaux critères. Malheureusement, ils ne sont pas encore traduits en français, mais vous pourrez voir en commission ces nouveaux critères qui tiennent compte de toutes les émissions, du bruit et des particules fines, et je pense que, là, on aura une taxation sérieuse et intéressante.
C'est la raison pour laquelle je vous demande de renvoyer ce projet de loi en commission. Parce que c'est là qu'on peut vraiment discuter.
M. Gilbert Catelain (UDC). Je crois que, dans cette enceinte, nous sommes tous conscients des enjeux liés à l'évolution du climat, même si nous ne sommes pas forcément d'accord sur les moyens de régler les problèmes qui en découlent. L'histoire a démontré par le passé que, généralement, les solutions socialistes, dans différents domaines, n'étaient pas les bonnes, puisqu'on a vu l'effondrement des pays de l'Est qui avaient appliqué une doctrine pourtant approuvée par vos milieux.
Dans différents domaines donc, et aussi sur le plan écologique, il suffit de regarder l'état de la mer d'Aral pour s'en convaincre. (Brouhaha.) Concernant la taxation de ces véhicules,...
La présidente. Sur le renvoi en commission, Monsieur le député !
M. Gilbert Catelain. ...qui va être discutée dans le cadre d'un éventuel renvoi en commission, nous devons prendre conscience qu'il y aura deux politiques: une, fédérale, qui introduira probablement la taxe sur le CO2 au niveau des carburants, et l'autre, cantonale, car Genève possède aussi la taxe automobile. Donc, c'est une pénalisation pour notre canton et le citoyen genevois.
Or nous devons être incitatifs ! On pourrait, par exemple, imaginer que Genève donne une prime à l'achat d'un véhicule neuf non polluant. Soyons incitatifs !
Le projet de loi, tel qu'il est présenté, et l'amendement déposé par le groupe démocrate-chrétien auraient deux conséquences contradictoires: le premier va plomber le marché de l'occasion, alors que l'amendement, lui, va le booster, puisqu'il sera effectivement très intéressant de racheter sur ce marché un véhicule ancien, polluant.
Pour ces motifs, le groupe UDC vous recommande donc de refuser le renvoi en commission. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Roger Golay (MCG), rapporteur de majorité. Je suis un peu surpris par les leçons de morale dispensées par les bancs d'en face !
Il faut savoir que ce projet de loi a été déposé il y a deux ans, juste avant les élections du Grand Conseil et qu'ensuite vous l'avez laissé roupiller pendant deux ans. Et maintenant, vous le ressortez juste avant les élections du Conseil national... Alors, je pense que c'est une simple gesticulation politique et électorale que vous êtes en train de nous faire, plutôt que la démonstration d'une certaine conscience que vous avez soi-disant à propos de l'environnement.
Par rapport au renvoi en commission, je vous rappelle que nous avions dit qu'il valait mieux taxer les véhicules qui entrent en circulation plutôt que ceux qui le sont déjà. Vous n'en avez pas tenu compte, et aujourd'hui le PDC revient à la charge avec une prétendue proposition innovante en la matière. Mais non ! Ça a été discuté et nous vous avions demandé de revenir avec un autre projet parce que nous ne voulions pas traiter un «projet de loi sparadrap». Tout simplement !
Donc, pour ces raisons, je vous incite à refuser le renvoi de ce projet de loi en commission et à rédiger un nouveau texte qui, précisément, comporte cette proposition qui avait déjà été évoquée en commission.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Tout d'abord, concernant votre rapport de majorité, Monsieur Golay, j'aimerais quand même insister sur le fait que vous auriez pu y mettre ce que j'ai moi-même inséré dans mon rapport de minorité, c'est-à-dire le document préparé par l'administration, visant justement à élaborer un compromis qui n'augmentait pas les recettes fiscales. (Remarque.) Je suis désolé, un rapporteur doit fournir les annexes qu'il veut voir figurer dans son rapport. Et heureusement que je l'ai fait, parce qu'ainsi on peut au moins voir quelles sont les propositions concrètes ! Mais comme les députés ne lisent pas les rapports... Mme Borgeaud, du moins, ne le fait manifestement pas, sinon elle aurait su qu'il y a 30 000 automobilistes qui pourraient voir leur taxe automobile diminuer de 50 à 100%. (Remarques. Brouhaha.)
Pour le reste, Monsieur Jornot, vous avez dit tout à l'heure qu'il fallait être sérieux... Alors soyons-le sur ce projet de loi !
Monsieur Golay, quant à vous, vous dites: «Oui, on aurait pu quand même entrer en matière si on avait pris que les véhicules neufs.» Eh bien justement, pour cela, il aurait fallu entrer en matière, Monsieur Golay ! Ainsi on aurait pu l'étudier ! Nous l'avons dit en commission, nous étions prêts à examiner un modèle basé sur le compromis du département qui ne taxait que certaines catégories de véhicules. Nous étions d'accord de le faire ! Alors qu'ici on perd du temps.
Et je vous rappellerai aussi, Monsieur Golay, que le TCS a indiqué lors de son audition qu'il était prêt à entrer en matière si un compris était trouvé. Le TCS, Monsieur Golay !
D'autre part, j'aimerais signaler aussi, concernant ce projet de loi...
La présidente. Sur le renvoi en commission !
M. Roger Deneys. Bien entendu, sur le renvoi en commission ! Personnellement, si je salue le PDC et les radicaux, qui sont prêts à travailler sérieusement cette fois, avec des propositions et des variantes, la question que je me pose, c'est de savoir à quel moment on aura des résultats. Parce que le geste politique, c'est de renvoyer en commission, mais ce qu'on attend, ce sont des actes concrets. J'espère qu'ils viendront bientôt et que ce n'est pas juste une promesse électorale. (Applaudissements.)
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat, constatant les difficultés que vous aviez rencontrées dans vos travaux en commission fiscale, a pris la décision, dans sa séance du 2 mai, de demander à l'administration de préparer un projet visant à taxer les voitures de tourisme en tenant compte des émissions de CO2 et de la puissance, de manière que le concept de développement durable auquel nous sommes tous attachés soit concrétisé dans cette matière et dans la fiscalité automobile. Ce projet devrait être soumis au Conseil d'Etat dans le courant de cet été, et sera par conséquent transmis à votre Grand Conseil et à sa commission fiscale dès que nous l'aurons avalisé.
Il aura pour avantage évidemment - vous me permettrez de le relever - d'éviter un certain nombre de problèmes que comporte le projet dans la version qui vous est proposée aujourd'hui, parce que la notion de particules fines se prête à des difficultés de définition.
L'entrée en vigueur - je suis navré de revenir sur ce sujet, mais, comme précédemment, elle pose problème - ne peut pas intervenir à une autre date que le 1er janvier, c'est quand même plus simple, et il faudra bien entendu, comme vous l'avez voulu, que ce projet induise une neutralité des ressources de l'Etat, étant rappelé que, dans le précédent, on avait un allégement et qu'il faudra donc trouver une mesure compensatoire.
Ceci pour dire que le Conseil d'Etat entend, en toute hypothèse, faire en sorte d'avoir une taxation des véhicules automobiles écologiste et respectueuse des engagements que la Suisse a pris dans le cadre du Protocole de Kyoto. A partir de là, ce projet suivra son cours et je suis persuadé que vous lui réserverez bon accueil. Et si vous décidez de renvoyer en commission celui qui vous est soumis aujourd'hui, les deux pourront être traités simultanément.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 9501 à la commission fiscale est adopté par 51 oui contre 27 non et 2 abstentions. (Applaudissements.)
La présidente. Je vous rappelle qu'est liée à ce projet de loi la motion 1768, dont le renvoi en commission sera également soumis au vote.
M. René Desbaillets (L). Bien sûr que le parti libéral acceptera le renvoi en commission de la motion 1768, mais nous sommes convaincus que ce n'est pas au travers de taxes forfaitaires qu'on va arriver à diminuer les émissions de CO2. Au contraire ! Les Genevois s'empresseront d'amortir cette taxe le plus rapidement possible et vont donc rouler un maximum. C'est comme un abonnement de ski, l'impôt automobile ! Vous avez payé un abonnement, donc vous amortissez ! En effet, quand vous avez un abonnement de ski, plus vous skiez, moins cela vous revient cher. Voilà le raisonnement que les gens auront. (Brouhaha.)
La seule façon de faire réfléchir le citoyen qui circule, c'est au travers du prix de l'énergie, que ce soit de la benzine, du mazout, du gaz etc., c'est le prix de l'énergie qui va faire avancer les progrès techniques et diminuer la consommation.
D'autre part, comme Mme Leuenberger l'a rappelé, Genève est la ville la plus motorisée du monde, donc ce n'est pas qu'un problème de pollution, mais aussi de blocage de la ville par la circulation, et il faut donc encourager un maximum de gens à prendre les transports publics.
Et encore une fois, pour prendre facilement ces transports publics, il faut avoir un abonnement. Par conséquent, les libéraux proposeront en commission de réfléchir à un système qui permettrait à toute personne ayant payé son impôt automobile d'avoir en complément également l'abonnement Unireso. De ce fait, les gens possédant une voiture, au lieu de descendre, par exemple, jusqu'au parking Saint-Antoine, laisseront leur véhicule au parking de l'Etoile et prendront ensuite les transports publics. C'est le cumul des deux qui va pousser les gens à réfléchir et faire véritablement diminuer notre circulation en ville. Mais quand on n'a pas d'abonnement, on pense tout de suite aux francs qu'on doit sortir, et souvent, si on n'est pas remboursé, on continue la route en voiture. Voilà, je vous remercie et le groupe libéral renverra cette motion en commission.
M. Gilbert Catelain (UDC). On peut se poser la question de savoir si on renvoie ou non cette motion en commission, car si l'on considère que la taxe sur le CO2 au niveau du canton n'est pas une bonne solution, il ne sert à rien de le faire. (Remarques. Brouhaha.) Il serait déjà intéressant d'observer ce qui va se passer au niveau fédéral dans ce domaine, sachant qu'un élément qui sera déterminant est l'augmentation programmée et continue du prix du litre d'essence, et c'est bien cela qui va faire changer les comportements et pas forcément la taxe sur l'immatriculation des véhicules.
J'ai le sentiment que nous sommes très présomptueux de notre capacité, par des mesures de nature fiscale, à agir sur l'évolution du climat et sur nos engagements par rapport aux Accords de Kyoto. (Brouhaha.)
J'accorde beaucoup plus de crédit aux dispositions prises ces vingt dernières années par les constructeurs, qui ont fait réduire la consommation d'environ 30%. Et c'est certainement les mesures incitatives vis-à-vis de ces mêmes constructeurs qui nous permettront, grâce à une politique gagnant-gagnant, incitative pour le consommateur, d'atteindre des objectifs au niveau de la réduction des émissions de CO2.
Dans ce canton, nous prêchons pour parvenir aux buts découlant de la ratification du Protocole de Kyoto, pourtant nous faisons tout l'inverse: lorsque nous bloquons la circulation, lorsque des milliers de véhicules sont arrêtés inutilement et que leur moteur tourne au ralenti, alors qu'on sait qu'une voiture immobilisée pollue beaucoup plus qu'en roulant.
Nous avons beaucoup à faire dans l'amélioration de la circulation et de la fluidité du trafic, grâce à des mesures passives qui ne coûtent rien et qui ne vont pas braquer les citoyens contre leurs autorités.
Pour ces motifs, et en tenant compte du fait que nous sommes un canton frontière, en concurrence avec les transporteurs vaudois et frontaliers, notamment en raison de l'accord sur le cabotage, il me paraît complètement naïf de se tirer un autogoal en voulant être plus royaliste que le roi. Nous refusons donc le renvoi de cette motion en commission.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Les socialistes soutiendront le renvoi à la commission fiscale de cette motion ou s'abstiendront. Cette dernière vient en complément du PL 9501 et ne mange pas de pain.
J'ai quand même envie de dire à MM. Catelain et Desbaillets que toutes les mesures sont complémentaires. Le prix du carburant est certes un facteur important, mais la taxe automobile s'y ajoute, le tarif du parking aussi, et toutes ces mesures devraient permettre de prendre à l'avenir des décisions plus sages, et c'est cela qui compte pour nous.
Evidemment, en ce qui concerne les objectifs poursuivis par le Protocole de Kyoto, ce n'est peut-être pas grâce aux efforts que Genève fera qu'on va voir une différence - parce que cette ville représente relativement peu d'habitants à l'échelle de la planète - mais il n'empêche que ce genre de mesures a un impact réel et immédiat sur la santé de nos concitoyens. Et ça, il ne faut pas l'oublier ! C'est pour cela que je vous invite à soutenir le renvoi en commission de cette motion.
Mme Anne Emery-Torracinta (S). Ce sera très bref, j'aimerais juste adresser une remarque à M. Desbaillets. J'ai été extrêmement intéressée par sa proposition concernant les abonnements TPG gratuits, mais je m'étonne un peu de l'incohérence des libéraux, puisque, lorsque nous avons voté la loi sur l'aide sociale individuelle, leur parti s'était acharné à refuser une distribution d'abonnements TPG aux adolescents des familles bénéficiant de cette aide. Donc je vous pose la question, Mesdames et Messieurs les députés: où est la cohérence ? (Applaudissements.)
M. René Desbaillets (L). Je pense que Mme Torracinta m'a très mal compris ! Je n'ai pas parlé d'abonnements gratuits, j'ai juste dit de réfléchir à un système conjoint, cumulatif. Ça pourrait être un ou deux abonnements, mais moyennant paiement, bien sûr !
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1768 à la commission fiscale est adopté par 64 oui contre 11 non et 6 abstentions.