Séance du
jeudi 14 juin 2007 à
17h
56e
législature -
2e
année -
9e
session -
41e
séance
PL 8700-A
Premier débat
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. Ce projet de loi a été déposé tout au début de l'année 2002, quelques mois après l'entrée en vigueur dans notre canton du nouveau système d'imposition des véhicules à moteur, qui se caractérisait par deux modifications substantielles. Premièrement, l'abandon du système d'imposition des véhicules privés selon la cylindrée - qu'on appelait «système des chevaux fiscaux» - remplacé par un procédé selon la puissance, qui était destiné - mais on aura peut-être l'occasion d'en parler davantage au point suivant de l'ordre du jour - à mieux lutter, entre autres, contre les émissions de CO2. Il s'agissait donc, en clair, d'un système de fiscalité écologique. Le deuxième aspect de cette réforme est celui de la modification de l'imposition des véhicules utilitaires, avec un passage de l'imposition selon la charge utile à l'imposition selon le poids total.
La commission fiscale a pris son temps pour étudier ce projet. Elle a en effet mis cinq ans à le faire, non sans désemparer, puisqu'il y a eu plusieurs pauses, dont certaines de plusieurs années. Et, assez rapidement, il est apparu que la commission allait se focaliser sur l'aspect des véhicules utilitaires et abandonner la question des véhicules privés, parce que, ce qu'il faut rappeler, c'est que le projet de loi avait précisément pour ambition de brider un certain nombre de hausses d'impôts qui avaient résulté du nouveau système.
En matière de véhicules privés, en revanche, plusieurs personnes auditionnées avaient tant loué le nouveau système qu'il paraissait difficile de revenir en arrière. J'en veux pour preuve, par exemple, que plusieurs représentants de la Coordination Energie sont venus vanter le fait que le nouveau système était efficace, puisqu'il permettait d'imposer la puissance, et, par prolongement, de diminuer les émissions de CO2. Tant et si bien que la commission s'est concentrée sur le deuxième aspect, celui des véhicules utilitaires, parce que là, il y avait eu ce qu'on pourrait appeler un dérapage, à savoir que la masse fiscale prélevée sur ces véhicules était passée de 2,9 à 4,9 millions, soit une hausse de 70%. Le parc n'ayant évidemment pas évolué dans une telle proportion, c'est à une véritable hausse d'impôt d'une ampleur similaire que les détenteurs, souvent des petites et moyennes entreprises, avaient été confrontés.
M. Roger Jenni, directeur adjoint du Service des automobiles et de la navigation, a élaboré, pour la commission, un barème permettant de corriger cette hausse involontaire et de le faire en respectant l'inflation qui était survenue entre-temps, de telle manière qu'on puisse véritablement considérer une masse fiscale rigoureusement exacte à francs constants.
Et c'est cette solution que la commission a adoptée après de très nombreuses auditions et débats.
Ce n'est donc pas, Mesdames et Messieurs les députés, une baisse d'impôt qui vous est proposée aujourd'hui, mais un simple correctif par rapport à une situation qui n'a pas été voulue et qui a eu comme effet que, pendant cinq ans, des contribuables ont été amenés à payer une charge fiscale excessive, sans avoir la possibilité, comme d'autres catégories de la population, d'obtenir de l'Etat qu'il les rembourse.
D'autre part, le fait qu'un rapport de minorité ait été déposé contre ce projet de loi pose ou devrait poser à la majorité de ce parlement un certain nombre de questions sur l'opportunité de tenter des compromis en commission, tant il est vrai qu'un rapport de minorité contre un objet aussi consensuel et aussi évident ne s'impose en rien, et qu'il trahit uniquement la volonté de pouvoir faire des moulinets politiques. On peut donc se demander si c'est justifié dans le cas de cette affaire, qui reste, somme toute, mineure, même si, pour les contribuables concernés, la hausse d'impôt en question était massive et doit être corrigée.
Je vous invite donc à adopter ce projet de loi dans la version réduite mais néanmoins pertinente, telle qu'elle est ressortie des travaux de la commission.
La présidente. Avant de passer la parole au rapporteur de minorité, je voudrais dire à MM. les députés de ne pas se sentir obligés de garder leur veston, il fait vraiment très chaud ! (Brouhaha.)
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Je pense que les députés devraient aussi essayer de rester tranquilles, ce serait probablement plus facile de travailler, ça les fatiguerait moins et on pourrait certainement respirer un peu mieux ! Mais peut-être que ça viendra...
Pour revenir à ce projet de loi et à ce qu'en a dit mon collègue Olivier Jornot, je dois avouer que je suis un peu surpris de son interprétation des faits, parce qu'il est très clair que nous, minorité, du moins les socialistes, étions prêts à entrer en matière sur ce projet de loi qui visait à réduire les hausses d'impôt enregistrées sur les véhicules de livraison. Mais je ne vois pas tellement de compromis élaboré sur ce texte ! Nous aurions été prêts à entrer en matière si nous avions pu avoir une discussion sur l'autre projet de loi, qui constitue le point 14 de notre ordre du jour, concernant la taxation accrue des véhicules polluants. Parce qu'il est vrai que, pour l'un comme pour l'autre, l'objectif est de favoriser les véhicules les plus écologiques, et que, dans le cadre de cette réflexion, on pourrait revenir à la situation antérieure pour les véhicules de livraison.
Mais c'est aussi la rhétorique de M. Jornot qui est assez étonnante, quoique habituelle chez les représentants du parti libéral. En effet, s'il dit qu'il ne s'agit pas d'une baisse d'impôt, parce qu'on revient à la situation d'il y a cinq ans par un correctif, eh bien moi, Mesdames et Messieurs les députés, Mesdames et Messieurs les libéraux, je vous propose de supprimer la baisse d'impôt de 12% ! Et ce n'est pas une hausse d'impôt, c'est un correctif !
Avec ce genre de raisonnement, tout changement est un correctif, Monsieur Jornot ! Donc, soyons concrets, il s'agit bien de rebaisser l'impôt sur les véhicules de livraison.
Fondamentalement, comme je l'ai dit, on peut entrer en matière s'il s'agit de mettre cela en rapport avec une taxation plus écologique des véhicules. Mais, en tant que tel, je trouve que ce n'est pas nécessaire en soi. Les taxes automobiles à Genève ne sont pas particulièrement élevées, elles sont même plutôt en dessous de la moyenne suisse et ce ne sont que les voitures extrêmement puissantes qui sont taxées davantage que dans le reste du pays. Donc, dans ce sens-là, il n'y a pas fondamentalement besoin d'entrer en matière.
Certes, c'est peut-être toujours ça de pris pour les entreprises, mais, à nouveau, ce ne sont pas des cadeaux intéressants à long terme. On aurait plutôt intérêt à encourager le remplacement des véhicules qui consomment et polluent beaucoup, parce qu'on sait bien que le prix de l'énergie va augmenter. Donc, toute la fiscalité qui va dans le sens de taxer davantage les véhicules qui consomment ou polluent beaucoup va dans la bonne direction. Les autres, ma foi, ne font pas face à la réalité.
Il ne s'agit pas de faire de la politique politicienne, mais d'élaborer des compromis globaux. Et ici, je pense que, s'il va être question du renvoi en commission du rapport PL 9501-A qui se trouve au point suivant, on pourrait également renvoyer notre projet de loi à la commission fiscale, afin que les deux projets soient étudiés ensemble et qu'on en fasse une réflexion globale. (Brouhaha.)
Mme Michèle Künzler (Ve). J'aimerais d'abord remercier les rapporteurs, particulièrement le rapporteur de majorité qui a bien résumé les circonstances de ce projet de loi datant de cinq ans. Toutefois, il enjolive un peu la situation ! Il est clair que le projet de loi, à l'époque... Il visait à revenir en arrière sur la taxation. On l'avait communément appelé «projet Porsche», car, au fond, il émanait des députés qui avaient des grosses cylindrées et qui ne voulaient pas payer d'impôts, ou moins. (Brouhaha.) Et c'est pour ne pas perdre la face qu'on s'est rabattu sur une annexe du projet de loi concernant la taxation des véhicules utilitaires, ce qui n'était ni le but ni l'utilité première de ce texte. Ce que nous aurions dû faire, c'est le retirer.
Nous avons essayé de chercher un compromis, parce que, même si nous pensons qu'il est important d'augmenter la taxation des véhicules extrêmement polluants, en l'occurrence, on pouvait quand même donner un petit coup de pouce symbolique aux entreprises et aux petits entrepreneurs. Et c'est vrai que, dans ce sens-là, nous avions décidé d'accepter ce projet de loi. Mais, la réalité, c'est qu'en cours de route le compromis... Et là, le rapporteur de majorité, encore une fois, travestit un peu la vérité, quand il dit qu'il n'y avait pas de volonté de compromis. Au contraire ! Nous nous y sommes tenus, et si nous nous sommes finalement abstenus, c'est parce que la deuxième partie, c'est-à-dire le projet de loi que nous traiterons tout à l'heure, a été purement et simplement rejetée. C'est la raison qui nous a fait nous abstenir. En effet, nous sommes d'accord de donner ce petit coup de pouce, mais pas plus. Nous pensons que les entreprises doivent d'abord apprendre à mieux gérer leur parc de véhicules, notamment de livraison, et ce n'est pas une imposition de 100 F ou 200 F supplémentaires qui changera quoi que ce soit ! (Brouhaha.)
En outre, il faut distinguer l'essentiel de l'accessoire. Il y a quand même à Genève, je le rappelle, environ 13 000 véhicules de livraison... Contre 213 000 voitures de tourisme ! C'est donc sur ces dernières qu'il faut agir en priorité. Parce que là, il y a une action à mener ! Quand on voit que l'Europe, pour 2006, fixe des normes de 100 grammes par kilomètre et que nous, nous sommes en train d'exonérer ou de favoriser des voitures qui en consomment le triple, ça ne va pas ! (Brouhaha.)
Là, je crois qu'il faut agir ! Et je suis très contente d'avoir appris que les démocrates-chrétiens et les radicaux veulent changer d'attitude, c'est positif, et j'appelle à ce qu'on arrive à un meilleur consensus sur ce projet.
D'autre part, il faut rappeler que le Conseil fédéral vient d'édicter de nouvelles mesures qui tiendront compte non seulement du CO2, mais aussi du NOx, du bruit et des particules fines, et c'est plutôt dans une vision globale qu'il faut voir cette progression.
C'est pourquoi nous continuerons à nous abstenir sur ce projet de loi qui est, somme toute, assez anecdotique maintenant, mais que nous mènerons la bataille pour le suivant, le PL 9501.
M. René Desbaillets (L). «Enfin !», seraient tentées de dire les PME qui assument tout un tissu de livraisons sur le canton de Genève. «Enfin», parce qu'il aura fallu plus de cinq ans pour réussir à corriger - mais nous n'y sommes pas encore parvenus, car il nous reste à voter le texte - une erreur qui a été commise, non pas par la précédente législature mais par celle d'encore avant. En effet, c'est en juin 2001, lors du vote sur la question de pénaliser les véhicules les plus polluants et d'encourager à acheter des voitures qui le sont moins, que s'est introduit ce changement de taxation des voitures de livraison et des petits véhicules légers de moins de 3500 kg, et qu'on a commencé à prendre en compte le poids total du véhicule plutôt que la charge utile. Ces modifications ont conduit à une augmentation moyenne de plus de 70% de l'impôt automobile, pour environ 10 000 véhicules de livraison sur le canton de Genève ! C'est pour cela que cette loi est nécessaire. Il s'agit presque d'un retour à la situation antérieure, mais pas tout à fait, puisque, dans les nouvelles tarifications, il est tenu compte de l'inflation.
Cela étant, je ne veux pas répéter ce qu'a dit le rapporteur de majorité, mais j'aimerais quand même faire quelques remarques sur le rapport de M. Deneys. Il juge que ce projet de loi est totalement improductif pour les PME - libre à lui de le dire - et pour la pollution... J'aimerais simplement lui signaler qu'un entrepreneur, un marchand ou un commerçant, inclut les frais de livraison dans le prix de ses produits. Et l'intermédiaire va encore passer à la caisse à raison de 7,6% pour la TVA, ce qui fait que vos produits deviennent plus chers.
Et que voit-on, Monsieur Deneys, vous qui êtes très proche des consommateurs ? Que ceux-ci se plaignent de ce que les produits, notamment alimentaires, sont trop chers à Genève. Et que font-ils dans pareil cas ? Ils vont les acheter en France. Quel est le résultat ? Nous avons un maraîcher qui parcourt cinq kilomètres pour venir ouvrir son banc de marché et qui refait cette distance pour rentrer chez lui; et pendant la matinée, il aura servi environ - je me suis renseigné - cent clients... Et que font ces cents consommateurs, s'ils vont faire leurs achats en France ? Ils parcourent chacun dix kilomètres pour se rendre dans un marché ou un supermarché français, et encore dix pour revenir, c'est-à-dire vingt kilomètres ! Je vous laisse faire le calcul: ce sont deux mille kilomètres parcourus par ces personnes qui vont faire leurs achats ailleurs, en voiture, pour économiser quelques centimes, alors qu'un maraîcher ne ferait que dix kilomètres pour venir sur un banc de marché.
Partant de là, les mesures à prendre pour réduire la pollution sont les suivantes: inciter les consommateurs à acheter dans les magasins qui se trouvent près de chez eux et, donc, à ne pas se déplacer; favoriser plutôt le déplacement des marchés de proximité, des camionnettes, que ce soit celle du vendeur de limonade ou du dépanneur de télévision; ne pas taxer ces véhicules de proximité - ou éventuellement ceux qui viennent inutilement de loin - et, encore une fois, faire en sorte que le consommateur achète près de chez lui, parce que, lorsqu'il va dans un supermarché en France voisine, il pollue bien plus que la camionnette du livreur genevois.
Je vous recommande donc de voter cette loi immédiatement. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Michel Forni (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, je me permettrai de faire un petit historique pour apporter aux citoyens une vision complète de ce qui se passe depuis environ 1999.
Ce projet de loi que nous discutons ce soir illustre trois paradoxes. Le premier est celui d'un principe d'écotaxe, ou d'impôt incitatif, qui complète les taxes fédérales sur le carburant et la TVA, et qui doit permettre à l'Etat de conduire une politique axée sur un développement durable et d'influencer le comportement des usagers. Ce principe a été développé en 1999 et, depuis, les années ont passé allègrement.
Le deuxième paradoxe est celui - il faut en convenir - de l'industrie automobile, qui a toujours eu du mal à procéder à des changements en termes de sécurité, de normes d'émissions, de pollution, de smog et également vis-à-vis du réchauffement climatique. Il faut reconnaître que c'est sous la contrainte législative, mais aussi en raison du certain succès de voitures maintenant hybrides et de l'augmentation du prix du baril de pétrole que les incitateurs arrivent à marier des technologies permettant d'offrir aux Genevois à deux ou à quatre roues des moyens moins polluants et peut-être aussi moins taxables.
Le troisième paradoxe découle des économistes du domaine de l'environnement, qui plaident en faveur de taxes additionnelles sur le carbone - nous en reparlerons lors du débat sur le projet de loi suivant - et qui tentent de développer des armes de type bonus ou malus, mais qui produisent aussi, malheureusement, des effets pervers, et c'est ce qui se retrouve dans le sujet qui nous occupe maintenant, ainsi que dans celui que nous traiterons tout à l'heure.
Ces trois paradoxes ont été amalgamés dans un ancien projet de loi qui encourageait - il faut le savoir - le transfert modal, c'est-à-dire une perception de l'impôt automobile ainsi qu'un transfert écologique, mais avec des astuces, notamment celle de taxer, comme cela a été dit, en fonction de la puissance et non plus de la cylindrée, de paramètres distinguant voitures de tourisme et véhicules utilitaires et, enfin, d'adopter des tarifs de conversion.
Cette miniréforme a malheureusement entraîné des effets négatifs, on l'a évoqué, occasionnant une surtaxe - et le but de ce projet de loi est de corriger cela - créant une surcharge administrative et aboutissant finalement au barème échelonné prenant en compte le parc des véhicules genevois.
Nous sommes donc face à une hybridation, une situation d'une logique pseudo-scientifique et un peu parapolitique, qui a pour toile de fond une forme d'augmentation d'impôt qui était démesurée pour les véhicules utilitaires.
Dans ce contexte, la maturation d'un projet est longue. Elle aboutit à des antagonismes, à des compromis, et finalement à des «éco-frictions économico-législatives» qui font que ceci est adopté par les uns et rejeté par les autres.
Ce soir, le PDC vous suggère d'adopter ce projet de loi, mais de le prendre aussi comme un tremplin vers la motion qui sera traitée tout à l'heure par les partis radical et démocrate-chrétien, de façon à proposer réellement aux citoyens genevois, dans une forme de taxation correcte, une destination claire face à la fiscalité et l'écologie.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, à vous écouter, surtout vous, Mesdames et Messieurs des bancs d'en face, plus on taxe les véhicules, plus on va dans le bon sens ! Pour vous, les Verts, accentuer la taxation des véhicules, même pour les entrepreneurs, c'est bien ! Eh bien non, ce ne l'est pas ! Vous ne donnez pas le bon signal, notamment aux PME genevoises. Et, non, vous ne faites pas de l'écologie et vous n'aidez pas non plus la République à avancer avec ce genre de position !
Il faut aussi que les citoyens sachent que, quand nous venons proposer des solutions pour endiguer, précisément, cette pollution, par exemple par la création d'une ceinture verte destinée à empêcher les 65 000 frontaliers d'utiliser tous les jours leur véhicule... (Exclamations. Brouhaha.) ...et pour que l'air genevois et des Genevois soit plus respirable, eh bien ça, ça ne vous intéresse pas, et vous criez à la discrimination ! (Brouhaha.) Mais aujourd'hui, c'est vous qui êtes en train de discriminer les citoyens de ce canton en leur mettant des taxes et des taxes, et encore des taxes ! Et un jour vous n'aurez plus de taxes. Parce qu'à force de convoiter l'argent du riche on finit par voler celui du pauvre ! J'en ai terminé, merci. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Gabriel Barrillier (R). Je crois que tout a été dit. (Brouhaha.) Pour ce qui nous concerne, l'essentiel était de corriger la décision qui avait été prise en 2002, notamment à l'égard des véhicules utilitaires. On a rappelé qu'il y en avait environ 10 000, dont la camionnette de notre collègue Desbaillets... (Remarques.) Et je crois, Collègue Stauffer, que cette correction va être appréciée par, justement, les artisans qui avaient été trop lourdement frappés.
Je ne vais donc pas m'étendre plus longtemps sur cette question, il faut voter ce projet de loi et corriger la situation. Et pour une fois, ces détenteurs et artisans auront une baisse des taxes et non une hausse. C'est une bonne nouvelle, on va voter ce texte à l'unanimité, je pense !
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. De nombreuses choses ont été dites et les différents aspects liés au fait que nous allons simplement corriger un acte involontaire ont été assez largement évoqués.
Je voudrais juste préciser que, effectivement, lorsque l'on annule les effets d'une hausse involontaire, on peut difficilement parler de baisse, mais je crois que, avec M. Deneys, nous n'arriverons jamais à nous mettre d'accord sur les hausses, les non-baisses, les corrections, etc. Nous avons une conception un peu différente des choses lorsqu'il est question, par une sanction populaire, de baisser les impôts.
J'aimerais aussi évoquer un aspect qui nous permettra, comme l'a fait M. Forni tout à l'heure, de créer en quelque sorte une passerelle vers le point suivant de l'ordre du jour: lorsque les auteurs de ce projet de loi ont accepté en commission de retrancher toute la partie concernant les véhicules privés, ils n'ont fait rien d'autre que de se convertir - oui, Madame Künzler, ils se sont convertis à la fiscalité verte et à l'idée que les véhicules automobiles devaient être imposés, entre autres, selon les nuisances qu'ils occasionnent, avec un résultat qui, nous a-t-on promis lors des travaux en commission, est extrêmement bien corrélé, notamment sur les émissions de CO2. C'est dire qu'en 2002 nous étions visionnaires dans ce parlement. Certains partis, dont le mien, ont mis quelques années à s'en rendre compte, aujourd'hui c'est fait, et cela prouve qu'on n'a absolument pas besoin d'aller plus loin.
Mais pour revenir à cet objet, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à l'accepter.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. En tout cas, ce qu'il y a de sûr, c'est que vous vous êtes «auto-converti» à l'écologie, et c'est bien le cas de le dire pour un sujet comme celui-là ! Parce que la preuve que vous donnez de votre conversion, c'est-à-dire renoncer à la partie concernant les véhicules privés, n'est pas si flagrante que ça!
Mais j'aimerais revenir sur les propos de M. Stauffer qui, comme toujours, ne sont pas très nuancés. Il faut d'abord remarquer que, sur ce projet de loi, les Verts se sont abstenus. C'est peut-être une conséquence indirecte du «M' Hodgerisme», mais, en tout cas, pour nous, socialistes, la situation est très claire: il n'est pas question d'accepter un projet de loi pareil sans accord sur le PL 9501 qui va suivre.
Monsieur Stauffer, je vous parle tout à fait en connaissance de cause, parce que je suis moi-même patron d'une petite entreprise et que je fais des livraisons avec un véhicule. Mais je ne possède pas de véhicule d'entreprise, j'utilise Mobility. Je paie une voiture quand je livre et un vélo quand j'en ai besoin. C'est bien moins cher qu'une voiture.
Et pour répondre à M. Desbaillets, je partage bien entendu son souci que les Genevois consomment et achètent à Genève plutôt qu'en France voisine ou encore plus loin, mais, soyons sérieux, Monsieur Desbaillets, ce n'est pas en baissant la taxe automobile de 70%, donc, en gros, en la réduisant de moitié... Vous allez peut-être passer de 1000 F à 500 F ! Je ne sais pas combien de salades on peut livrer en une année, mais je ne suis pas sûr que l'incidence sur le prix de celles-ci soit mesurable, surtout que celui de l'essence aura augmenté pendant le même laps de temps.
Donc, Monsieur Desbaillets, je crains fort que votre calcul ne tienne pas la route - pour rester dans le sujet... C'est vrai que cela constitue peut-être un signal pour les entreprises, mais il n'est pas très malin, parce que, à nouveau, on ne leur fait pas prendre les bonnes mesures à temps, et celles qui paieront l'essence à trois francs le litre et qui n'auront pas acheté suffisamment tôt un véhicule qui consomme moins vont se retrouver avec des factures énormes ! Alors, on aurait intérêt à les inciter aujourd'hui à changer de véhicule et on devrait même, d'une certaine façon, leur donner une aide sous forme financière, parce que les investissements ne sont pas toujours faciles à réaliser pour les entrepreneurs.
Fondamentalement, la question est de savoir comment provoquer des changements de comportement, et le signal que constitue une baisse de taxe ne va en tout cas pas dans la bonne direction.
L'incidence de ce projet de loi nous paraît relativement faible, c'est pour cela que je vous invite à le renvoyer en commission fiscale pour qu'il soit étudié avec le PL 9501 et la motion des radicaux et du PDC.
La présidente. Si je comprends bien, Monsieur le rapporteur, vous demandez le renvoi de ce projet de loi à la commission fiscale. Comme nous avons cette demande, les orateurs suivants s'exprimeront sur ce renvoi, à raison d'une personne par groupe.
M. Eric Stauffer (MCG). Evidemment, le groupe MCG va s'opposer, avec toute son énergie, au renvoi en commission. Et non, Monsieur Deneys, le parti socialiste n'a pas la primeur de la pensée universelle: il faut arrêter de raisonner pour les gens et de leur dire qu'il faut qu'ils achètent ceci ou cela ! Cela ne marche pas comme ça, il y a une liberté en Suisse, ça fait partie de la démocratie, et fort heureusement vous ne représentez pas la majorité !
Donc nous, nous accepterons ce projet de loi, car il s'agit d'une correction et non pas d'une baisse, comme l'a très bien dit mon collègue Olivier Jornot. Alors ne profitez pas de cette erreur qui s'est produite en 2001, parce que, franchement, dire: «Il y a eu une erreur, mais ne baissons pas, continuons à taxer !», ce n'est pas digne ! Et ça ne marche pas comme ça !
M. Gabriel Barrillier (R). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe radical s'oppose au renvoi en commission, étant donné que tout a été dit et que la mesure doit entrer en vigueur le plus rapidement possible.
M. René Desbaillets (L). Le parti libéral s'oppose également à ce renvoi en commission, parce que nous pensons qu'il ne faut pas mélanger le projet de loi 8700 avec le 9501. Cela n'a rien à voir, la situation des véhicules utilitaires est totalement différente. D'ailleurs, les propriétaires de ce genre de véhicules aimeraient bien pouvoir en changer et acheter une voiture utilitaire qui consomme moins. Malheureusement, si vous connaissiez un peu le marché, vous sauriez que, en gros, le seul véhicule diesel de livraison peu polluant et capable de rentrer dans un parking souterrain est fabriqué par une marque bien connue, avec une étoile sur le capot, et coûte 60 à 70 000 F, alors que vous trouvez des petites camionnettes pour trois fois moins. Je vous laisse donc faire le calcul de la différence, vous économisez quand même un certain nombre de litres d'essence et de taxes...
La présidente. Sur le renvoi en commission, Monsieur le député !
M. René Desbaillets. Nous sommes donc contre le renvoi en commission.
M. Philippe Guénat (UDC). Pour le groupe UDC, il en va de même. Ce projet de loi est bon, on en a discuté, on est passé par monts et par vaux pour le faire adopter. Par conséquent, nous nous opposerons à un renvoi en commission.
Mme Michèle Künzler (Ve). Nous refuserons nous aussi de renvoyer ce projet de loi en commission. Les éléments principaux ont été soulignés, et il faut là vraiment distinguer l'essentiel de l'accessoire. Il ne s'agit que de 13 000 véhicules, les autres étant au nombre de 213 000. Il faut donc axer le débat sur les points importants.
D'autre part, je pense que ces taxations sur les véhicules de livraison ont peu d'incidence sur le facteur de décision d'achat. A mon sens, il faut plutôt agir au niveau de la gestion du parc des véhicules, mais c'est là un autre problème qu'on ne peut pas résoudre à travers ce projet de loi.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, on pourrait certes imaginer un système encore meilleur que celui qui est présenté dans ce projet de loi, mais il faut noter que les défauts qu'il se propose de corriger sont bien réels et par conséquent, pour l'ensemble des arguments qui ont été évoqués, notamment en faveur des petites et moyennes entreprises, le Conseil d'Etat vous prie de suivre les conclusions du rapporteur de majorité.
Je dois toutefois déposer un amendement, parce que, dès lors qu'il touche à la fiscalité, ce projet doit être soumis au peuple. Et, compte tenu des élections fédérales de cet automne, nous n'aurons pas la possibilité matérielle d'organiser un scrutin permettant une entrée en vigueur au 1er janvier 2008.
Par conséquent, le Conseil d'Etat dépose un amendement pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2009. J'en suis absolument navré, mais, matériellement, je ne vois pas comment nous pourrions faire autrement.
Dès lors, je vous invite à accepter le projet de loi qui vous est soumis, avec cette modification.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 8700 à la commission fiscale est rejeté par 65 non contre 16 oui et 4 abstentions.
Mis aux voix, le projet de loi 8700 est adopté en premier débat par 52 oui contre 28 non et 4 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article 416, al. 2 et 3 (nouvelle teneur).
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté.
La présidente. A l'article 2 (souligné), nous somme saisis d'un amendement du Conseil d'Etat demandant une entrée en vigueur de la présente loi au 1er janvier 2009.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. J'aimerais simplement vous dire que, effectivement, la question de la date d'entrée en vigueur a été évoquée en commission et que la majorité a estimé qu'il était nécessaire de donner un signal clair par rapport à l'erreur qui a été commise à l'époque. Il s'agit donc de pouvoir dire maintenant que nous allons rectifier cette faute et que nous le ferons le plus rapidement possible.
Quelles conséquences cela va-t-il avoir ? Eh bien, comme le texte est soumis au référendum obligatoire, il y aura un vote en début d'année prochaine. Alors nous ferons comme toutes les fois où, par le passé, des modifications sont intervenues en cours d'année sur la fiscalité des véhicules automobiles, et où il a fallu attendre un peu avant d'envoyer certains bordereaux.
Tout à l'heure, je ne sais plus qui ironisait sur le faible nombre de bordereaux qui étaient concernés par cette opération, alors ça ne doit que vous inciter d'autant plus facilement à considérer que, en effet, une dizaine de milliers de bordereaux peuvent parfaitement être retenus pendant quatre mois, sans que la santé financière de l'Etat de Genève n'en vacille pour autant.
Car je crois que dire que l'on repousse à dans une année et demie la correction de cette erreur serait particulièrement malvenu vis-à-vis de ceux qui en sont les victimes, c'est pourquoi je vous invite, sans que cela n'ait aucune conséquence sur l'exercice des droits politiques ni sur les finances de l'Etat, à rejeter cet amendement.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 54 non contre 15 oui et 16 abstentions.
Mis aux voix, l'article 2 (souligné) est adopté.
Troisième débat
La loi 8700 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 8700 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 55 oui contre 17 non et 12 abstentions.