Séance du
vendredi 4 mai 2007 à
20h45
56e
législature -
2e
année -
7e
session -
35e
séance
M 1696
Débat
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion déposée en juin 2006 vous rappellera l'affaire dite de l'Université où, à côté de quelques malversations reprochées à un certain nombre de professeurs, il était question d'un rapport d'audit. Un rapport d'audit dont on ne savait pas très bien s'il avait ou non été communiqué, mais dont on sait qu'il n'était en tout cas pas arrivé à son ou ses destinataires légitimes. Pourtant, la loi sur la surveillance de la gestion administrative et financière et l'évaluation des politiques publiques, la LSGAF, prévoit des règles extrêmement strictes sur la façon dont il y a lieu de traiter les audits en précisant en particulier à qui il convient de les transmettre, une fois ceux-ci établis. L'Université est soumise à cette loi, le Conseil d'Etat aurait dû être informé de l'ouverture d'une procédure d'audit et le rapport aurait dû être transmis au Conseil d'Etat, à la commission des finances, à la commission de contrôle de gestion, à l'Université et à l'inspection cantonale des finances.
A l'époque, le MCG avait déposé un projet de loi visant à modifier notre règlement pour obliger en quelque sorte à un dépôt rapide des rapports d'audit auprès de notre Conseil. Ce projet de loi avait été refusé tant en commission des droits politiques que devant ce plénum car la loi sur le règlement du Grand Conseil (LRGC) n'est pas le lieu adéquat pour traiter cette question.
Il s'agit en réalité aujourd'hui de se poser la question suivante: puisqu'il y a des règles strictes inscrites dans la loi et qu'elles ne sont pas respectées, comment résoudre ce problème ? Eh bien, en se demandant pourquoi l'Etat pose des règles sans prévoir aucune sanction lorsqu'elles ne sont pas respectées !
Cette proposition de motion vise simplement à faire en sorte que la LSGAF soit dotée de sanctions et que ceux qui ne respectent pas les règles, par exemple en ce qui concerne la transmission des audits, puissent être sanctionnés, notamment lorsqu'ils appartiennent à des corps qui ne sont pas soumis à un droit disciplinaire, voire lorsqu'il s'agit de prestataires de services extérieurs à l'administration.
Cette proposition de motion a été transmise pour signature à l'ensemble des membres de la commission des droits politiques, raison pour laquelle des représentants de différents partis l'ont cosignée et je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à la renvoyer au Conseil d'Etat.
Mme Catherine Baud (Ve). Je serai brève. Effectivement, ce qui s'est passé l'année dernière à l'Université nous a amenés à nous interroger sur le respect des formes des procédures et le système des sanctions applicables. L'idée de cette proposition de motion est apparue, comme l'a dit le député M. Jornot, suite à un constat de non-transmission d'audit.
Puisqu'il existe un régime détaillé de transmission de ce type d'enquête prévu par la loi sur la surveillance de la gestion administrative et financière et l'évaluation des politiques publiques, il est tout à fait opportun de prévoir en corollaire un régime de sanctions dans le cas de violation de ces règles. Nous soutenons donc le renvoi de cette proposition de motion au Conseil d'Etat.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai signé cette proposition de motion. Je vous invite aussi à la soutenir massivement. La seule chose que l'on peut regretter, c'est la perte de temps par rapport au projet de loi qui avait été déposé par le MCG, qui allait dans le même sens que cette proposition de motion. Prétendument pour une simple question de forme, ce projet de loi avait été refusé par l'ensemble du Grand Conseil. Je pense plutôt qu'il s'agissait par ce refus de ne surtout pas permettre au MCG d'obtenir un bilan positif. (Commentaires.)
M. Eric Stauffer (MCG). Simplement pour dire que nous nous étions vraiment battus en commission pour notre projet de loi. J'aimerais juste vous en rappeler la teneur, très brièvement. Nous voulions imposer au Conseil d'Etat qu'il annonce sans délai à la commission de contrôle de gestion tout audit effectué par l'ICF et qu'il remette dans les cinq jours son rapport d'audit, une fois celui-ci terminé.
Ce qui se passe n'est pas normal et ce n'est pas démocratique. J'aimerais simplement vous rappeler que le Conseil d'Etat, avec tout le respect qu'on lui doit, est là pour exécuter ce que son parlement lui dicte. Quand le Conseil d'Etat arrive, par un biais ou un autre, à conserver un rapport d'audit pendant une année dans un tiroir... Avec le scandale de l'Université comme nous l'avons tous vécu, avec ce sentiment de honte par rapport à ce qui s'est passé...
La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Je vais conclure. Je dirai simplement que les choses ont effectivement changé, depuis une année, et le MCG est une force de proposition qui finalement commence à être entendue - et bien entendue - au sein de ce parlement.
M. Guy Mettan (PDC). Je voudrais d'abord rassurer nos amis du MCG pour leur dire que le parlement n'a rien contre eux, mais si on avait pris en considération leur projet de loi, les rapports de l'ICF n'auraient dans ce cas plus eu aucune importance. Pourquoi ? Parce que si on veut que l'ICF fasse correctement son travail, il faut lui donner une certaine liberté d'action. Sachant que le rapport de l'ICF devait être publié immédiatement, on aurait pris des précautions infinies pour éviter une exploitation de ce rapport par certains partis - dont le vôtre en particulier. L'ICF aurait été au fond limitée dans son travail. Or ce n'est pas ce que l'on veut. On veut que l'ICF puisse travailler en toute indépendance et c'est pour cela qu'une certaine confidentialité, une certaine discrétion, est exigée pour ces rapports. Sinon, ça ne sert plus à rien et les rapports seraient vides de toute substance.
Maintenant, le parti démocrate-chrétien est évidemment d'accord avec les invites de cette proposition de motion et soutiendra son renvoi, même si, en l'occurrence, comme on l'a vu, le cas de l'Université dont on s'est emparé il y a une année, s'est dégonflé en cours de route. On pense qu'il est effectivement important que certaines sanctions soient prises pour éviter que, justement, de tels problèmes se répètent dans des établissements autonomes. Toute loi doit prévoir des sanctions pour le cas où elle n'est pas respectée.
La présidente. La parole est à M. Claude Jeanneret à qui il reste 50 secondes.
M. Claude Jeanneret (MCG). J'aimerais juste rappeler quelque chose à mon cher collègue Mettan. Je crois qu'il faut bien connaître le travail de l'ICF avant de juger si elle a besoin ou non des rapports. J'aimerais juste rappeler une chose: si nous ne sommes pas mis au courant des rapports et des enquêtes qui sont menées, l'ICF ne le sera pas non plus. La preuve, c'est que le fameux rapport de l'Université qui a été découvert avait été caché à l'ICF !
On ne peut donc pas dire que l'ICF travaille sur ces rapports. C'est nous qui pouvons travailler sur ces rapports, l'ICF et ses professionnels de la gestion et de la comptabilité peuvent, eux, étayer ces rapports.
M. David Hiler, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat accueille favorablement cette motion. Il est vrai que nous allons vraisemblablement devoir, dans un délai assez court, revisiter la LSGAF, de manière à détecter les manques qu'elle peut contenir par rapport à ce qui a pu se produire dans le passé. Nous allons l'adapter à toute une série de réalités nouvelles, notamment l'adoption des normes IPSAS non seulement par le petit Etat, mais aussi par les grandes entités du consolidé. Ainsi, c'est bien volontiers que nous réfléchirons - de façon générale à vrai dire - à la question des sanctions.
Toutefois, par rapport à certains propos tenus par M. Stauffer, je crois qu'il faut bien dissocier les situations et M. Jeanneret l'a fait parfaitement correctement. Une chose est qu'une entité ait un rapport d'audit et qu'elle le dissimule. Cela n'est pas tolérable, mais d'une façon générale, je n'ai jamais vu qu'un rapport de l'ICF soit dissimulé !
Il s'agit simplement de procédures que vous connaissez tous: un rapport est établi, l'«audité» répond, puis le rapport est consolidé, la réponse écrite circule et enfin vous recevez ce rapport, en même temps que le Conseil d'Etat qui doit, lui - ça, c'est nouveau - statuer sur chacune des recommandations. C'est ce que nous avons instauré. C'est un certain travail, c'est un travail qui n'a jamais été fait. Le Conseil d'Etat statue sur chacune des recommandations pour les approuver ou ne pas les approuver et il fixe un délai.
Mesdames et Messieurs les députés, votre souci rejoint, je crois, le souci du gouvernement et de tous les citoyens qui souhaitent en effet que certaines règles soient respectées au sein de l'Etat de Genève. Un manquement de l'Université dans la transmission d'un audit a attiré votre attention et j'espère que nous pourrons vous donner satisfaction dans un délai très raisonnable.
Mise aux voix, la motion 1696 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 73 oui et 1 abstention.