Séance du jeudi 3 mai 2007 à 17h
56e législature - 2e année - 7e session - 31e séance

La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de Mme Anne Mahrer, présidente.

Assistent à la séance: MM. Charles Beer, président du Conseil d'Etat, Laurent Moutinot, Robert Cramer, Pierre-François Unger, David Hiler et François Longchamp, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. Mark Muller, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes et MM. David Amsler, Eric Christophe Berdat, Maurice Clairet, Christiane Favre, Jacques Follonier, Renaud Gautier et Patricia Läser, députés.

Procès-verbal des précédentes séances

Le procès-verbal de la session des 22 et 23 mars 2007 est adopté.

Discussion et approbation de l'ordre du jour

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous cite les projets de lois renvoyés sans débat dans les commissions:

Projet de loi du Conseil d'Etat approuvant le compte administratif de l'Etat de Genève et la gestion du Conseil d'Etat pour l'année 2006 (PL-10023)

à la commission des finances;

Projet de loi du Conseil d'Etat concernant le bouclement de diverses lois d'investissements (PL-10024)

à la commission des finances;

Projet de loi de Mmes et MM. Michel Forni, Guy Mettan, Anne-Marie von Arx-Vernon, Gabriel Barrillier, Luc Barthassat, Mario Cavaleri, Catherine Baud, Jean Rossiaud, Pascal Pétroz, Marie-Françoise de Tassigny, Virginie Keller Lopez, Béatrice Hirsch-Aellen, Christian Brunier modifiant la loi sur l'Université (C 1 30) (Pour réévaluer le statut des maîtres d'enseignement et de recherche ainsi que des professeurs titulaires de l'Université de Genève, et redéfinir une procédure d'acquisition du titre de professeur adjoint dans le cadre d'une disposition transitoire exceptionnelle) (PL-10016)

à la commission de l'enseignement supérieur;

Projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit de 6'046'000F destiné à financer un système d'imagerie vidéo de la police (PL-10027)

à la commission des finances;

Projet de loi du Conseil d'Etat d'application des dispositions fédérales en matière de protection de la population (PL-10014)

à la commission judiciaire et de la police;

Projet de loi de Mmes et MM. Jacques Jeannerat, Pierre Weiss, Christophe Aumeunier, Alain Meylan, Ivan Slatkine, Marie-Françoise de Tassigny, Guy Mettan, Michel Ducret, Gabriel Barrillier, Jacques Baudit, Pierre Kunz, Frédéric Hohl, Jean-Marc Odier, Patricia Läser, Louis Serex ouvrant un crédit d'étude de 3'500'000F pour la réalisation d'une traversée urbaine sous-lacustre de Genève (PL-10015)

à la commission des travaux;

Projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit d'investissement de 9'962'781F pour les travaux de rénovation des façades et toitures du bâtiment sud du Collège Calvin à la rue Théodore-de-Bèze (PL-10025)

à la commission des travaux;

Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites (L 4 05) (PL-10026)

à la commission d'aménagement du canton;

Projet de loi de Mmes et MM. Antonio Hodgers, Esther Alder, Sylvia Leuenberger, Catherine Baud, Anne Mahrer, Mathilde Captyn, Jean Rossiaud, Emilie Flamand, Brigitte Schneider-Bidaux, Morgane Gauthier, Damien Sidler, Ariane Wisard-Blum, Michèle Künzler, Hugo Zbinden renforçant l'attractivité des transports publics (PL-10017)

à la commission des transports.

La discussion immédiate n'étant pas demandée sur l'un de ces points, ces projets de lois sont renvoyés dans les commissions précitées.

Mme Michèle Ducret (R). Je demande le traitement en urgence du point 58, soit le rapport PL 9666-A sur la nouvelle constitution.

Mis aux voix, le traitement en urgence du rapport PL 9666-A est adopté par 49 oui (unanimité des votants).

La présidente. Nous traiterons cet objet demain, à 17h.

M. Roger Deneys (S). Je demande le traitement en urgence des points 76 et 77 de notre ordre du jour, soit les deux volets de l'initiative 126 «Energie-Eau: notre affaire ! Respect de la volonté populaire». En effet, le délai pour une prise de décision échoit le 12 août 2007 et je suis très inquiet, car je crains que l'on n'y arrive pas. Il me semble que l'on pourrait traiter ces deux points en urgence pour prendre une décision rapidement, afin de passer en votation populaire, d'autant plus que notre commission de l'énergie était unanime sur le volet concernant l'eau.

Mis aux voix, le traitement en urgence des initiatives IN 126-1, IN-126-1-D, IN 126-2 et IN 126-2-D est rejeté par 36 non contre 29 oui et 2 abstentions.

M. Christian Brunier (S). Ma demande est triple. Premièrement, je souhaite que la motion que vous avez sur vos places - vous l'avez reçue hier par messagerie - visant à interdire l'affiche discriminante de l'UDC soit inscrite à l'ordre du jour. Deuxièmement, qu'elle soit traitée en même temps que la résolution - car je pense qu'elle fera aussi l'objet d'une demande d'inscription à l'ordre du jour - qui condamne cette affiche. Troisièmement, que ces deux objets soit traités en urgence.

Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour de la proposition de motion 1760 est adopté par 40 oui contre 28 non et 3 abstentions.

Mis aux voix, le traitement en urgence de la proposition de motion 1760 est adopté par 37 oui contre 27 non et 5 abstentions.

M. Guy Mettan (PDC). Pour le même motif, je vous demande, Madame la présidente, d'inscrire à l'ordre du jour et de traiter en urgence la résolution 526, qui condamne les procédés d'affichage discriminatoires et méprisants.

Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour de la proposition de résolution 526 est adopté par 72 oui et 1 abstention.

Mis aux voix, le traitement en urgence de la proposition de résolution 526 est adopté par 66 oui (unanimité des votants).

La présidente. Ces deux objets seront donc traités ce soir, à 20h30.

M. Gabriel Barrillier (R). Je souhaiterais que l'on traitât... (Exclamations.) ...le point 94 en urgence, soit le rapport M 1712-A. Pour cela, il faut d'abord retirer cet objet des extraits.

La présidente. Je vous soumets donc le traitement en urgence du point 94, soit le rapport M 1712-A qui, en réalité, sera traité au point 115 bis de notre ordre du jour.

Mis aux voix, le traitement en urgence du rapport M 1712-A est adopté par 70 oui (unanimité des votants).

La présidente. Cet objet sera donc traité ce soir, à 20h30. Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe que le Conseil d'Etat nous demande d'inscrire à l'ordre du jour le PL 10029, projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant au Conseil d'Etat divers crédits supplémentaires et complémentaires pour l'exercice 2006. Je vous soumets cette proposition d'inscription.

Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour du projet de loi 10029 est adopté par 66 oui (unanimité des votants).

La présidente. Ce projet de loi est donc renvoyé à la commission des finances.

Correspondance

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez trouvé sur vos places l'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil. Cet énoncé figurera au Mémorial.

Réponse du Grand Conseil au recours au Tribunal fédéral de l'Alliance de gauche contre la décision du Grand Conseil invalidant l'initiative populaire 136 "Touche pas à mon Hôpital et aux services publics" (copie à la Commission législative) (voir correspondance C 2378 et C 2381) (C 2406)

Réponse du Conseil d'Etat à la procédure de consultation fédérale relative à la loi sur le Tribunal fédéral des brevets et la loi sur les conseils en brevets (C 2407)

Lettre de M. MIRIMANOFF Jean, juge au Tribunal de première instance, annonçant sa démission au 30 septembre 2007 (C 2408)

Arrêt du Tribunal fédéral du 28 mars 2007 rejetant le recours de MM. SLATKINE Ivan et PETROZ Pascal contre la décision du Grand Conseil relative à la validité de l'initiative populaire "Fumée passive et santé" (IN 129). (Transmis à la Commission législative et à la Commission de la santé pour information) (Voir correspondance C 2275, C 2315, C 2343, C 2352 et C 2368) (C 2409)

Arrêt du Tribunal fédéral du 28 février 2007 (expédié le 29 mars) rejetant le recours de la Coopérative Rhino contre la décision du Grand Conseil du 22 juin 2006 déclarant invalide l'IN 132 "Pour la réalisation du projet RHINO en Ville de Genève" (copie à la Commission législative) (Voir correspondance C 2262, C 2297, C 2323 et C 2342) (C 2410)

Arrêt du Tribunal fédéral du 29 mars 2007 rejetant le recours de M. HIMMELBERGER Rolf contre la loi 9326 sur la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients adoptée le 7 avril 2006 par le Grand Conseil (transmis au Département de l'économie et de la santé (DES) et à la Commission de la santé) (voir correspondance C 2258, C 2282, C 2312 et C 2357) (C 2411)

Courrier de Mme MEYER Francette, maire de la ville de Carouge, transmettant une résolution du Conseil municipal de Carouge concernant une demande d'audition à la Commission des travaux concernant le déménagement du service des automobiles et de la navigation (transmis pour information à la Commission des travaux) (C 2412)

Lettre de M. GENIER Michel, secrétaire général de l'institution commune des taxis et limousines, concernant l'IUE 408 présentée par le député M. STAUFFER Eric le 22 mars 2007 (C 2413)

Réponse du Conseil d'Etat à la procédure de consultation fédérale relative à la disposition constitutionnelle sur le hooliganisme (C 2414)

Réponse du Conseil d'Etat à la procédure de consultation fédérale relative à une modification de l'article 111 du code civil (suppression du délai de réflexion de 2 mois) (C 2415)

Réponse du Conseil d'Etat à la procédure de consultation fédérale relative au mandat de négociation pour un accord de libre-échange et de partenariat économique bilatéral avec le Japon (C 2416)

Avis du Tribunal fédéral fixant la séance de délibération publique dans le recours de l'ASLOCA contre la décision du Grand Conseil invalidant l'initiative populaire 133 "pour un financement juste et durable de la politique sociale du logement par l'or de la Banque Nationale Suisse" (copie à la Commission législative) (voir correspondance C 2263, C 2301, C 2334 et C 2369) (C 2417)

Courrier de Mme LILLA Colette concernant la durée des concessions funéraires accordées dans les cimetières (voir point 103 de l'ordre du jour) (transmis aux Commissions des affaires communales et des droits de l'Homme pour information) (C 2418)

Courrier du Conseil d'Etat transmettant au Grand Conseil copie de la réponse de Mme CALMY-REY Micheline, Présidente de la Confédération, concernant la résolution 516 du Grand Conseil pour le respect des Conventions de Genève et du droit d'asile dans la ville d'Achraf (voir correspondance C2347) (C 2419)

Réponse du Conseil d'Etat à la procédure d'audition fédérale relative à l'ordonnance sur les parcs d'importance nationale (ordonnance sur les parcs, OParcs) (C 2420)

Réponse du Conseil d'Etat à la procédure de consultation fédérale relative au manuel du Modèle de compte harmonisé (MCH2) (C 2421)

Courrier de M. BRULHART Jean-Claude, président du Conseil municipal de la commune de Meyrin, concernant la résolution présentée par M. JIMENAY Arthur, au nom du groupe DC, demandant de revoir le tracé officiel du TCMC (voir correspondance C 2399 et pétition n° 1514) (C 2422)

Réponse du Grand Conseil au recours au Tribunal fédéral de M. DOBLER Olivier contre l'élection de juges par le Grand Conseil lors des sessions du 25 et 26 janvier 2007 et 22 et 23 février 2007 (copie à la Commission judiciaire et de police) (voir correspondance C 2392) (C 2423)

Réponse du Conseil d'Etat à la procédure de consultation fédérale concernant le rapport et l'avant-projet relatifs à la modification du code pénal suisse concernant le contre-projet indirect à l'initiative populaire "Pour l'imprescriptibilité des actes de pornographie enfantine" (C 2424)

Réponse du Conseil d'Etat à la procédure de consultation fédérale relative à l'harmonisation dans le domaine des subsides à la formation (C 2425)

Réponse du Conseil d'Etat à la procédure de consultation fédérale concernant l'ordonnance 5 relative à la loi sur le travail et l'ordonnance sur la protection des jeunes travailleurs (C 2426)

Annonces et dépôts

La présidente. Monsieur Mettan, vous avez demandé la parole ?

M. Guy Mettan (PDC). Oui, Madame la présidente ! Pour annoncer le retrait d'un projet de loi, c'est le bon moment ? Bien, il s'agit du retrait du projet de loi suivant - actuellement pendant à la commission des finances - étant donné que le frein aux dépenses a été accepté par le peuple:

Projet de loi de Mmes et MM. Guy Mettan, Anne-Marie Von Arx-Vernon, Nelly Guichard, Pierre-Louis Portier, Patrick Schmied, Stéphanie Ruegsegger, Mario Cavaleri, Jean-Claude Egger, Luc Barthassat, Philippe Glatz modifiant la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève (D 1 05) (PL-9416)

M. Pierre Kunz (R). Le groupe radical informe ce Grand Conseil qu'il retire les deux projets de lois suivants actuellement pendants devant la commission des finances:

Projet de loi de MM. Daniel Ducommun, Bernard Lescaze modifiant la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève (D 1 05) (PL-8143)

Projet de loi de Mmes et MM. Pierre Kunz, Michèle Ducret, Hugues Hiltpold, Jacques Follonier, Patricia Läser, Gabriel Barrillier, Frédéric Hohl, Michel Ducret, Jean-Marc Odier, Marie-Françoise de Tassigny, Jacques Jeannerat modifiant la loi sur la surveillance de la gestion administrative et financière et l'évaluation des politiques publiques (D 1 10) (PL-9959)

Il en est de même pour le projet de loi suivant qui est actuellement pendant à la commission de l'économie:

Projet de loi de Mme et MM. Pierre Kunz, Jean-Michel Gros, Gilles Desplanches, Ivan Slatkine, Caroline Bartl, Jacques Jeannerat, Jean-Marc Odier, Claude Marcet, Georges Letellier modifiant la loi sur le tourisme (I 1 60) (Suppression de la taxe hôtelière, des taxes additionnelles et de la taxe d'encouragement au tourisme) (PL-8971)

La présidente. Il est pris acte de ces retraits. Mesdames et Messieurs les députés, les pétitions suivantes,parvenues à la présidence, sont renvoyées à la commission des pétitions:

Pétition demande de détournement du trafic de transit passant de la route de Collex par la «Voie Albert» (P-1619)

Pétition pour la condamnation des «crimes» commis par les régimes communistes totalitaires (P-1620)

Pétition contre le projet de fermeture des maisons de vacances pour aînés "Florimont" et "Nouvelle-Roseraie" (P-1621)

Pétition contre le démantèlement du Centre d'Animation pour retraités (CAD) (P-1622)

Pétition : Violences à l'école enfantine (P-1623)

Pétition pour le maintien du Petit Beaulieu en l'état actuel (P-1624)

Pétition pour une sécurité sur nos quais (P-1625)

Pétition concernant le personnel du CIP, des EPSE et de l'Atelier les Cordiers (P-1626)

Par ailleurs, la commission de contrôle de gestion nous informe qu'elle désire renvoyer la pétition suivante à la commission de la santé:

Pétition : Non à l'Opération Victoria (P-1606)

D'autre part, vous avez trouvé sur vos places la question écrite suivante qui est renvoyée au Conseil d'Etat:

Question écrite de M. Renaud Gautier : Mise en oeuvre de la LAsi et de la LEtr dès le 01.01.2008 (Q-3614)

Enfin, nous avons reçu les réponses du Conseil d'Etat aux questions écrites suivantes:

Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Mme Jeannik Dami : "Poli-Ger" : luxe ou besoin (Q-3363-A)

Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Mme Erika Sutter-Pleines : "Pour un questionnaire d'entrée unique" (Q-3472-A)

Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de M. Pierre Froidevaux : Quel encadrement pour les médecins privés qui se chargent d'une clientèle de toxicodépendants ? (Q-3552-A)

Ces questions écrites sont closes.

Réponse du Conseil d'Etat Q 3363-A

Réponse du Conseil d'Etat Q 3472-A

Réponse du Conseil d'Etat Q 3552-A

GR 471-A
Rapport de la commission de grâce chargée d'étudier le dossier de Monsieur G. C. P.

Mme Anne Emery-Torracinta (S), rapporteuse. Le cas qui nous est soumis ce soir concerne une demande de grâce qui a été déposée par M. G.C.P. Il s'agit du quatrième recours en grâce qu'il dépose auprès de ce Grand Conseil: deux fois en 2005, une fois en 2006. Il demande maintenant un allégement de sa peine.

Le 12 mars 2004, M. G.C.P. a été condamné à sept ans de réclusion et à suivre un traitement ambulatoire en prison pour actes d'ordre sexuel avec des enfants et contraintes sexuelles. Sa libération définitive est prévue le 22 novembre 2011.

Petit rappel des faits. M. G.C.P. est né en 1959. Il a été marié et divorcé trois fois. Il a eu six enfants de son premier mariage, entre 1979 et 1989. Il a été interpellé et arrêté, au fond, un peu par hasard, à l'occasion de l'arrestation en Allemagne d'un fournisseur d'images pédophiles sur Internet. La police allemande ayant trouvé son adresse électronique dans le fichier de ce fournisseur d'images, elle l'a fait suivre aux autorités suisses qui, elles-mêmes, l'ont transmise à la police genevoise, qui a donc interpellé et arrêté M. G.C.P. en février 2002.

A cette occasion, 260 photos à caractère pédophile ont été trouvées dans son ordinateur et, en les examinant, on s'est aperçu que l'une de ses filles - celle qui était née en 1989 - figurait sur plusieurs d'entre elles. Une enquête a donc été menée et a révélé alors des actes d'ordre sexuel, du type attouchements, qui ont du reste été niés à plusieurs reprises par l'accusé lors de l'instruction. Ces actes ont été pratiqués entre 1996 et 2002 sur deux de ses filles, et, plus particulièrement, sur l'une d'entre elles qui, apparemment n'avait pas la capacité de résister à son père. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)

L'enquête - et c'est à mon sens assez grave aussi - montrera que la mère était au courant de ces pratiques, puisqu'elle avait surpris son mari quelques années auparavant avec sa fille aînée et qu'elle s'en était alors ouverte à une assistante sociale, qui, après une enquête extrêmement sommaire, avait conseillé de ne rien faire et de ne rien dire... Il s'avérera que les fils étaient apparemment aussi au courant de cet état de chose et que l'un deux avait également prévenu une éducatrice, laquelle n'avait rien fait...

C'est donc, comme je l'ai déjà dit, un peu par hasard et à la suite de ce qui s'est passé en Allemagne que M. G.C.P. a été arrêté. Il a fait huit mois et quatre jours de prison préventive à Champ-Dollon, dans des circonstances que son avocat qualifie de «cauchemardesques»... Vous pouvez d'ailleurs assez bien imaginer ce qui se passe, lorsque des gens accusés de pédophilie se retrouvent en prison !

Une expertise psychiatrique a été ordonnée pour l'instruction et a conclu à la responsabilité restreinte de l'accusé. Je vous cite quelques extraits du rapport. On a parlé de «troubles graves de la personnalité assimilables à un développement mental incomplet»; on a parlé de «fonctionnement borderline» et de «personnalité dépressive». Lors du procès lui-même, le psychiatre estimera que la responsabilité de l'accusé était de l'ordre de 40%, à savoir qu'il le considérait donc plus comme irresponsable que réellement responsable. Au téléphone, ce psychiatre m'a d'ailleurs confirmé que la personnalité de l'accusé était très immature et qu'il avait énormément de peine à faire la différence entre l'enfance et l'âge adulte.

Quant au procès, Mesdames et Messieurs, il s'est déroulé en mars 2004 dans un climat survolté. C'était le tout début du procès de l'affaire Dutroux, et vous savez quel était l'état d'esprit de l'opinion publique à ce moment-là: il fallait à tout prix punir la pédophilie de manière extrêmement sévère.

Selon l'avocat, mais aussi selon l'expert psychiatre, le procès s'est déroulé dans une atmosphère tendue: le jury était déjà convaincu par avance de la culpabilité de l'accusé, le procureur était déchaîné et une peine sévère était réclamée. Le psychiatre lui-même - il me l'a dit - a été massacré en audience. Il n'avait pas l'habitude de ce type d'expertise - c'était la première fois - et il n'a pas su résister aux questions du procureur et de l'avocat de la partie civile. Il s'est un peu embrouillé et a été confus, ce qui fait qu'en fin de compte le jury n'a pas retenu les conclusions de son expertise qui montrait une faible responsabilité de l'accusé. Le jury a conclu que celui-ci était responsable à 75% et, finalement, la peine qui lui a été infligée a été très lourde. Je ne veux pas dire lourde dans l'absolu - je ne vais pas me prononcer ici sur ce que devrait être le type de peine dans ces circonstances - mais lourde par rapport à des peines infligées à Genève à ce moment-là pour des cas semblables. Et cette peine est d'autant plus lourde si l'on admet que la responsabilité de l'accusé était fortement restreinte. D'ailleurs, à ce propos, je vous signale que la «Tribune de Genève», à l'époque, a qualifié cette peine «d'extrêmement sévère».

Malgré ces éléments, malgré également le fait que la commission a très longuement travaillé sur ce cas - j'ai moi-même entrepris pas mal de démarches pour creuser le dossier - la commission a reconnu à une très grande majorité que la justice avait fait son travail et que ce parlement n'avait pas à se substituer à la Cour d'assises. En conséquence, elle vous recommande, à une très forte majorité, de rejeter la demande de grâce de M. G.C.P.

J'aimerais toutefois, Madame la présidente, si vous me le permettez, à titre personnel, terminer par deux remarques.

La première remarque est la suivante. Indépendamment de la profonde aversion que j'éprouve face aux faits reprochés à M. G.C.P., je ne peux m'empêcher de constater que cette affaire nous rappelle, hélas, que justice n'est pas forcément synonyme d'équité. Et que, parfois, les tribunaux sont bien trop tributaires des mouvements de balancier de l'opinion publique. On le voit bien dans ce cas: les faits, bien que connus de plusieurs personnes, n'ont pas été dénoncés alors que, quelques années plus tard, on vient crier au loup !

Deuxième remarque. Si je comprends et adhère au raisonnement qui consiste à réaffirmer clairement la séparation des pouvoirs et, partant, que nous n'avons pas à nous substituer à la justice, je m'interroge néanmoins sur le rôle que doit jouer le parlement en matière de grâce. Et je pense là, Mesdames et Messieurs les députés, que ce sera un excellent sujet de réflexion pour l'assemblée constituante que - j'espère - nous déciderons de mettre en place demain.

C'est pour ces deux raisons, Mesdames et Messieurs les députés, que mon vote personnel exprimera un avis différent de celui de la très grande majorité de la commission de grâce.

Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet de la grâce) est adopté par 58 oui contre 2 non et 8 abstentions.

E 1477
Election d'une ou d'un Juge suppléant-e au Tribunal cantonal des assurances sociales, en remplacement de Mme SOMMER Monika, démissionnaire (entrée en fonction immédiate)

La présidente. Est parvenue à la présidence la candidature de Mme Diana Zehnder, présentée par l'Union démocratique du centre.

Etant seule candidate, Mme Diana Zehnder est élue tacitement.

Elle prêtera serment ce soir, à 20h30.

E 1485
Election d'un membre du parti Socialiste au Conseil d'administration de la Fondation du Palais des expositions (PALEXPO) (89) - PA 438.01, art. 6 et 9 (art. 8 Incompatibilité : les membres du Conseil d'administration ne doivent, ni directement ni indirectement, être fournisseurs de la fondation ou chargés de travaux pour son compte); les membres sont de plein droit membres du Conseil de fondation pour la Halle 6 (PA 439.01 art. 6 al.3) - en remplacement de Mme ORSINI Magali, démissionnaire. Entrée en fonction immédiate - durée du mandat : jusqu'au 28 février 2010

La présidente. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Olivier Mutter, présenté par le parti socialiste.

Etant seul candidat, M. Olivier Mutter est élu tacitement.

E 1486
Election d'un assesseur du parti Socialiste à la Commission cantonale de recours de police des étrangers (CCRPE) (20) - F 2 10 art. 4 (de formation juridique) - en remplacement de M. GRODECKI Stéphane, démissionnaire - Durée du mandat : du 1er juin 2007 au 28 février 2010

La présidente. Est parvenue à la présidence la candidature de Mme Valérie Carera, présentée par le parti socialiste.

Etant seule candidate, Mme Valérie Carera est élue tacitement.

E 1492
Election d'un assesseur du parti Radical à la Commission cantonale de recours de police des étrangers (CCRPE) (20) - F 2 10 art. 4 (de formation juridique) - en remplacement de M. JUGE Nicolas, démissionnaire (entrée en fonction immédiate, durée du mandat : jusqu'au 28 février 2010)

La présidente. Est parvenue à la présidence la candidature de Mme Marina d'Angelo Cornu, présentée par le parti radical.

Etant seule candidate, Mme Marina d'Angelo Cornu est élue tacitement.

Le point 15, l'élection 1493, désignation d'un membre au Comité SSR idée suisse Genève / Radio-Télévision Suisse Romande, est reporté à la session des 24 et 25 mai prochain.

E 1494
Election d'une ou d'un Juge de Justice de paix et Tribunal tutélaire, en remplacement de Mme PROZ JEANNERET Fabienne, élue Juge au Tribunal de la Jeunesse (entrée en fonction : 1er septembre 2007)

La présidente. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Claude François Wenger, présenté par le parti des Verts.

Etant seul candidat, M. Claude François Wenger est élu tacitement.

Il prêtera serment ce soir, à 20h30.

E 1495
Election d'une ou d'un Substitut-e du Procureur général, en remplacement de Mme KRONBICHLER Diane, élue Juge au Tribunal de première instance (entrée en fonction immédiate)

La présidente. Est parvenue à la présidence la candidature de Mme Daniela Jobin-Chiabudini, présentée par le parti libéral.

Etant seule candidate, Mme Daniela Jobin-Chiabudini est élue tacitement.

Elle prêtera serment ce soir, à 20h30.

E 1496
Election de deux Juges assesseurs au Tribunal cantonal des assurances sociales représentant les employeurs, en remplacement de Mme DESCLOUX Giovana, démissionnaire avant la prestation de serment, et de Mme JOBIN-CHIABUDINI Daniela, démissionnaire (entrée en fonction immédiate). Une formation spécifique est requise (cf. E 2 05.05)

La présidente. Est parvenue à la présidence la candidature de Mme Nathalie Bloch, présentée par l'UAPG.

Etant seule candidate et avec un préavis positif du département des institutions, Mme Nathalie Bloch est élue tacitement.

Elle prêtera serment ce soir, à 20h30.

Une nouvelle inscription sera ouverte pour l'élection du ou de la deuxième juge assesseur au TCAS - représentant cette fois les employeurs. Elle figurera à l'ordre du jour de la session des 24 et 25 mai 2007 (E 1500).

Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe que les caméras de la chaîne de télévision Arte - qui s'intéresse aux télévisions locales et qui a souhaité filmer un moment de notre séance de parlement - tournent en ce moment dans la salle.

IUE 395-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Alain Meylan : Fonds national d'infrastructures et projets genevois (bis)

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 395-A

IUE 396-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Christian Brunier : sur la campagne trompeuse du Conseil d'Etat concernant l'initiative « Pour une meilleure prise en charge en EMS »

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 396-A

IUE 397-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Georges Letellier : Les dioxines ? Dans votre assiette bien sûr !

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 397-A

IUE 398-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de Mme Laurence Fehlmann Rielle : A propos du transfert de charges en matière culturelle

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 398-A

IUE 399-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Eric Stauffer : Palettes ZONE DE NON DROIT ou l'échec du Conseil d'Etat !

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 399-A

IUE 400-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Christian Brunier : sur les filatures douteuses de la police genevoise

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 400-A

IUE 401-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Gilbert Catelain : Quelles sont les possibilités d'économie financière dans le domaine des ressources humaines à l'Hospice général ?

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 401-A

IUE 402-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Pierre Weiss : De la collégialité

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 402-A

IUE 403-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Roger Deneys : Prise en charge des frais médicaux des détenus de Champ-Dollon par la LaMAL

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 403-A

IUE 404-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Roger Deneys : Stationnement à Plan-les-Ouates : à quand des mesures sérieuses ?

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 404-A

IUE 405-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Roger Deneys : Bus D comme ... Désintérêt, Désinvolture ou Dysfonctionnement ?

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 405-A

IUE 406-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Olivier Jornot : Y a-t-il une différence entre le mensonge et l'argument de campagne ?

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 406-A

IUE 407-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Pierre Weiss : Plus de 250 millions de nouvelles charges structurelles : quelles mesures le Conseil d'Etat entend-il prendre pour respecter son plan financier quadriennal ?

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 407-A

IUE 408-A
Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente écrite de M. Eric Stauffer : Combien de chauffeurs de taxis sont au bénéfice de l'aide sociale de l'Hospice Général, ceci en violation du droit sur le travail au noir...

Annonce: Session 06 (mars 2007) - Séance 29 du 23.03.2007

Cette interpellation urgente écrite est close.

IUE 408-A

La présidente. Nous passons maintenant aux projets de lois portant sur des aliénations de biens immobiliers par la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe.

PL 10018
Projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner les feuillets PPE 1646 nos 16 et 17, de la parcelle de base 1646, plan 1, de la commune de Cologny

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe.

PL 10019
Projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner le feuillet PPE 1643 n° 18 de la parcelle de base 1643, plan 1, de la commune de Cologny

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe.

PL 10020
Projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner le feuillet PPE 1643 n° 17, de la parcelle de base 1643, plan 1, de la commune de Cologny

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe.

PL 10021
Projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner le feuillet PPE 1643 n° 6, de la parcelle de base 1643, plan 1, de la commune de Cologny

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe.

PL 10022
Projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner le droit de superficie distinct et permanent grevant les parcelles 2935 et 2936, plan 87, de la commune de Genève, section Plainpalais

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons maintenant au point 27 de notre ordre du jour.

IN 130
Initiative populaire 130 "Suppression des cadeaux fiscaux au profit des très hauts revenus pour le rétablissement social des finances cantonales"
IN 130-C
Rapport de la Commission fiscale chargée d'étudier l'initiative populaire 130 «Suppression des cadeaux fiscaux au profit des très hauts revenus pour le rétablissement social des finances cantonales»
Rapport de majorité de M. Hugues Hiltpold (R)
Rapport de minorité de Mme Mathilde Captyn (Ve)

Débat

M. Hugues Hiltpold (R), rapporteur de majorité. Je voudrais rappeler en préambule que ces initiatives font suite au vote de l'initiative 111 dite «initiative des 12%» qui fut votée à une très forte majorité en 1999.

Cette initiative prévoit, d'une façon générale, de revenir à la situation qui prévalait avant le vote de l'initiative des 12% en augmentant la fiscalité. Pour accroître les recettes, elle préconise trois mesures: tout d'abord, pour les revenus imposables inférieurs à 100 000 F pour une personne, ou 130 000 F lorsqu'il s'agit d'un couple, de maintenir la baisse de 12% qui avait été votée. Pour les revenus imposables compris entre 100 000 F et 210 000 F, respectivement 130 000 F et 240 000 F lorsqu'il s'agit d'un couple, de supprimer partiellement la baisse de 12%, par paliers de 1% par tranche de 10 000 F. Pour tous les revenus supérieurs à 210 000 F, respectivement 240 000 F lorsqu'il s'agit d'un couple, de supprimer totalement la baisse de 12%.

L'impact général de cette initiative est de 120 à 130 millions par an.

La commission a traité cette initiative en une seule séance, ce qui a permis à la majorité de ses membres de constater que celle-ci avait deux inconvénients: d'une part, en induisant une modification de la courbe du barème, elle posait un problème de hausse d'impôt différenciée et, d'autre part, elle renforçait la progressivité de l'impôt.

D'une façon générale, la majorité de la commission a également estimé que les hausses d'impôts ne résoudraient pas les problèmes que Genève connaît actuellement et qu'il fallait engager un certain nombre de réformes structurelles. De ce point de vue, elle ne partage pas le voeu des initiants. En outre, la fiscalité à Genève est lourde par rapport à d'autres cantons, et il ne faudrait pas l'alourdir davantage.

C'est pour toutes ces raisons que la majorité de la commission a décidé de refuser cette initiative et de refuser aussi de lui opposer un contreprojet, ce qui, d'ailleurs, était l'avis du Conseil d'Etat.

Mme Mathilde Captyn (Ve), rapporteuse de minorité. Je rappelle que l'objectif de cette initiative est de rétablir partiellement la situation fiscale des habitants du canton, qui prévalait avant la baisse d'impôt de 12% acceptée par vote populaire en 1998.

Les socialistes et les écologistes de la commission fiscale soutiennent cette initiative. Pour quelles raisons ? D'abord, parce que l'argument principal en faveur de cette baisse d'impôt s'est révélé faux: la baisse d'impôt de 12% sur les personnes physiques n'a pas engendré de nouvelles recettes indirectes pour l'Etat grâce à une relance de la consommation. Au contraire, la perte annuelle de recettes a été estimée à 330 millions de francs par année, soit un total de 2,31 milliards en sept ans ! Cette initiative a donc plutôt représenté un magnifique cadeau fiscal pour les revenus les plus élevés du canton !

La volonté exprimée aujourd'hui par l'initiative 130 de revenir à l'ancienne situation fiscale s'appuie sur deux arguments principaux. Le premier est tout simplement basé sur la définition même du développement durable: un développement qui réponde aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. Pourtant, Genève fait aujourd'hui tout le contraire ! Avec une dette qui nous coûte près d'un million par jour en intérêts, le budget de l'Etat ne peut non seulement pas répondre aujourd'hui à toutes ses prérogatives, mais, en plus, il compromet la santé future du service public et des prestations sociales. Plus grave encore, et malgré le mirage des comptes 2006 de l'Etat - pour reprendre l'expression de la manchette du «Temps» - le budget actuel ne permet pas d'être dans les chiffres noirs en période de croissance économique moyenne. Il faut donc augmenter les impôts, mais de manière solidaire.

Un deuxième argument nous a convaincu de l'utilité de cette initiative, c'est que la baisse de 12% d'impôt serait maintenue pour les revenus imposables jusqu'à 100 000 F pour les célibataires et 130 000 F pour les couples mariés. Or, ce sont précisément les personnes concernées par ces tranches de revenus, soit la classe moyenne, moyenne basse, qui ressentent le plus fortement le poids de l'impôt. Cette initiative propose donc une plus grande redistribution sociale et va dans le sens d'une plus grande solidarité entre les habitants de ce canton. Et c'est tant mieux !

Pour conclure, nous faisons confiance au Conseil d'Etat dans son objectif de rétablissement des finances publiques à long terme. Nous souhaitons simplement accélérer ce processus en nous portant en faveur de cette initiative, et nous vous engageons à faire de même. (Applaudissements.)

M. Jean-Michel Gros (L). Contrairement au cochon, dans lequel on dit volontiers que «tout est bon», tout, dans cette initiative, est mauvais ! Il n'y a pas un seul article, pas un seul argument, à retenir ! Tout d'abord, l'initiative repose sur des aprioris qui sont faux ! Et ce n'est pas parce que certains d'entre vous - je parle aux députés des bancs d'en face, bien entendu - nous ressassent ces a priori à longueur de séances du Grand Conseil qu'ils en deviennent plus vrais !

L'initiative 111, qui a diminué l'impôt de 12%, a entraîné une baisse des recettes fiscales, nous dit-on... C'est faire preuve d'un aveuglement total, Mesdames et Messieurs, que de le prétendre ! Les recettes de l'impôt sur les personnes physiques n'ont pas cessé d'augmenter ! De 1999, date de l'entrée en vigueur de l'initiative 111, à 2003, elles ont progressé de 2,3 à 2,8 milliards, alors même qu'elles avaient baissé durant la décennie précédente !

Autre argument: l'initiative 111 n'a favorisé que les classes les plus aisées... Il faudra alors m'expliquer comment une baisse linéaire de 12% peut ne favoriser qu'une catégorie de contribuables ! Evidemment - évidemment ! - elle n'a pas concerné les 25% des contribuables qui ne payent pas un centime d'impôt, car, c'est vrai, Mesdames et Messieurs les membres de l'Alternative - et Pierre Dac l'aurait dit avant moi - 12% de zéro, cela ne fait pas grand-chose ! (Rires.)

L'initiative n'aurait favorisé que la thésaurisation et non pas une consommation accrue... Alors, là, Mesdames et Messieurs, les initiants se transforment en extralucides, car c'est un événement extrêmement difficile à estimer, notre canton ne prélevant pas d'impôt sur la consommation ! Quoi qu'il en soit, l'augmentation constante des recettes fiscales a une raison: elle est due soit à une augmentation de la consommation, soit à une augmentation des revenus, soit à une plus forte implantation des hauts revenus sur notre territoire ! Sinon il n'y a pas d'explication à cette augmentation des recettes.

L'initiative 111 - prétendent encore les initiants - a engendré une baisse des prestations sociales... Mais alors, où passe la formidable croissance des dépenses que nous observons chaque année ? Dans l'achat de crayons ?! Dans les paies des fonctionnaires ?! Non, je ne le crois pas ! Si lors de chaque discussion budgétaire, une majorité de ce Grand Conseil consent à une augmentation de la dette, n'y a-t-il pas le moindre sou pour les prestations sociales ?

L'initiative 130 n'étant basée que sur des contrevérités, le parti libéral demande de la rejeter sans hésitation, car elle est fâcheuse pour Genève. En modulant le poids de la hausse fiscale de manière différenciée, elle se contente de modifier le barème, la courbe. Or, si Genève se situe dans la moyenne suisse en matière de fiscalité, les impôts concernant les personnes physiques sont exponentiels selon les revenus. Oui, Mesdames et Messieurs les députés, à Genève, il vaut mieux être pauvre et malade que riche et bien portant ! (Exclamations.) Etant donné que 5% des contribuables assument 50% des impôts, je vous laisse imaginer ce que le déménagement d'un seul de ces contribuables coûterait au canton ! Oui, car, que l'on soit pour ou contre, la concurrence fiscale intercantonale existe bel et bien ! Et cette diminution de 12% était un petit pas - un petit pas ! - dans le sens d'une meilleure compétitivité de Genève.

Il reste des efforts colossaux à faire pour réduire notre train de vie et notre dette. Quand nos dépenses par habitant dépassent de 40% celles de Zurich, quand l'endettement par habitant est six fois supérieur à celui de ce canton, nous avons le devoir d'agir ! Car il ne me semble pas que la vie à Zurich ressemble à Germinal !

Accepter cette initiative serait une véritable catastrophe pour Genève. Le signal donné serait évidemment du plus mauvais effet pour l'arrivée de nouvelles entreprises, pour lesquelles l'imposition des cadres est un critère important - si ce n'est pas le seul - du choix de leur implantation.

En conclusion, le groupe libéral, en accord parfait, d'ailleurs, avec le Conseil d'Etat - qui, me semble-t-il, n'est pas forcément de droite - vous demande de rejeter cette initiative ! (Applaudissements.)

Mme Michèle Ducret (R). Il a été fait allusion ici à l'initiative 111... Moi, je voudrais évoquer l'initiative 113, qui est plus récente. Je rappellerai en effet aux initiants des deux initiatives 130 et 131 que l'initiative 113 a été refusée sans appel par le peuple au mois de mai 2003, par 60% des votants. Les citoyens genevois, Mesdames et Messieurs, ne veulent pas d'augmentation d'impôt ! Quand une initiative qui prévoit une augmentation d'impôt est refusée par 60% des votants, c'est que la population n'en veut pas !

Par conséquent, j'approuve ce qui a été dit en commission; j'approuve le rapport de majorité, et le groupe radical refusera, bien entendu, l'initiative 130 et accepte aussi l'idée de ne pas présenter de contreprojet.

M. Alberto Velasco (S). A l'époque, le groupe libéral déclarait au sujet de cette initiative - le conseiller d'Etat Olivier Vodoz était alors président du département des finances: «Cette opération devrait favoriser la relance sachant que, parmi les personnes physiques, on compte un grand nombre de commerces, de sociétés de personnes, de professions libérales, et induire un allégement des charges propice à une certaine promotion économique.» Et, plus loin, le rapporteur de l'époque disait: «Ainsi, la perte de ressources fiscales devrait être compensée de manière notable et cette baisse devrait engendrer une augmentation de la population active résidente et élargir l'assiette fiscale.»

Or - et M. le rapporteur de majorité l'a dit tout à l'heure - nous devons aujourd'hui faire des réformes structurelles, parce que, année après année, notre déficit atteint environ 320 millions, ce qui correspond d'ailleurs assez au montant des pertes fiscales engendrées par la baisse d'impôt de 12%.

C'est vrai que les libéraux n'avaient pas complètement tort de penser que la baisse d'impôt faciliterait la relance... Mais, Messieurs, que s'est-il passé ? Certaines personnes - celles dont les revenus imposables sont les plus bas - ont économisé 6,80 F et d'autres - les plus aisées - 7 728 F ! Ne me dites pas qu'une personne qui a un revenu de plus d'un million a besoin de 7 728 F pour faire face à ses dépenses ? Les gens aisés ont suffisamment pour vivre ! A l'époque, il aurait fallu inverser le barème: il aurait fallu que la baisse d'impôt permette aux plus faibles d'économiser 7 728 F et aux plus riches 6,80 F ! Cela aurait certainement eu un effet sur la relance ! Et peut-être qu'aujourd'hui la situation serait meilleure. (Applaudissements.) Mais vous, vous avez fait le contraire: vous êtes allés à l'encontre de toute logique, même libérale ! Et cette mesure allait à l'encontre de la logique libérale !

Comme M. le rapporteur de majorité l'a dit tout à l'heure, il faut faire des réformes structurelles... Et l'on assiste effectivement à des coupes.

Je tiens à vous dire, Mesdames et Messieurs, que la fonction publique - ce sont des chiffres fournis par le département des finances - a apporté sa contribution à raison de 1,5 à 2 milliards de francs suisse, par le biais des baisses de salaires. C'est donc une sacrée contribution de sa part ! Mais les citoyens ont aussi contribué... Vous avez vu dernièrement que le Conseil d'Etat s'est engagé dans un processus de baisse des effectifs de 5%, ainsi que dans une baisse sur le fonctionnement, et nous avons assisté à des baisses de prestations, au niveau de l'Hospice général, etc. Alors, affirmer que cette baisse fiscale n'a pas eu d'incidence sur les prestations sociales est tout à fait faux !

Pour ce qui est de la dette, ce n'est pas avec l'équilibre budgétaire que l'on arrivera à l'amortir. Il faudrait des excédents d'environ 300 ou 400 millions, ou, même, de 600 millions par année ! Et il est vrai que, si cette baisse d'impôt n'avait pas été appliquée, nous aurions aujourd'hui 320 millions de plus. Et avec l'équilibre que nous avons retrouvé, nous serions en mesure de rembourser la dette ! Oui, Mesdames et Messieurs, il ne suffit pas de l'équilibre budgétaire pour être en mesure de rembourser la dette: il faut créer des richesses ! Il faudrait que nos comptes montrent 600 millions d'excédents par année pour pouvoir commencer à payer la dette !

Et c'est pour cette raison, Mesdames et Messieurs, que la baisse des impôts de 12% n'a pas permis d'améliorer la situation. Du reste, M. Olivier Vodoz, président du département des finances, libéral, l'avait bien dit à l'époque: il ne fallait pas toucher à la fiscalité, il ne fallait pas baisser les impôts, car cela modifiait l'assiette fiscale et touchait la structure même de l'Etat. Aujourd'hui, si nous voulons rembourser la dette, il n'y a effectivement que deux solutions: créer des richesses ou réformer l'Etat pour arriver à diminuer les dépenses d'au moins 300 ou 400 millions. Et ceux qui siègent à la commission des finances, chers collègues, savent ce que signifie une telle diminution des dépenses... Nous passons déjà des heures et des heures pour trouver une coupe de 10 millions, alors, pour arriver à faire des coupes à raison de 400 millions, il faudra des années et des années !

Mesdames et Messieurs les députés, je pense en effet que l'Etat doit améliorer son efficacité et qu'il faut réaliser des économies dans les secteurs où c'est possible... Il ne sert à rien de faire des dépenses inutiles, bêtement. Mais, je vous en prie, aujourd'hui nous devons absolument faire appel à la solidarité de toutes et de tous !

Je vous invite par conséquent à voter cette initiative. (Applaudissements.)

Mme Michèle Künzler (Ve). Pour les Verts, il semble important de pouvoir reposer cette question... Certes, elle arrive peut-être un peu trop tôt, parce que les mesures mises en place par le Conseil d'Etat commencent à porter des fruits, mais ils sont encore très minimes. Il faut donc pouvoir reparler de ce sujet. En effet, on nous a parlé de crise des recettes, de crise des dépenses... Mais il faut agir sur les deux niveaux: il faut à la fois augmenter les recettes et diminuer les dépenses ! C'est la seule manière de faire pour arriver à réduire la dette !

Et vous, malheureusement, vous avez plutôt continué à «affamer» l'Etat. Vous proposez toujours des baisses d'impôts... (Brouhaha.) Maintenant, vous ne proposez plus des baisses d'impôt de 2 ou 300 millions, parce que vous avez appris à avoir un minimum de décence, et elles restent au fond des tiroirs. Mais vous continuez à en proposer d'autres: 20 millions par-ci, 5 millions par-là ! Le grignotage continue ! Et cette baisse régulière des revenus de l'Etat ou la non-progression des recettes aggravent la dette. Il est donc vraiment urgent d'agir, car tout l'argent que nous versons pour les intérêts pourrait servir à des projets beaucoup plus utiles !

Nous vous invitons donc à voter cette initiative. Nous savons que cette question n'est jamais populaire, mais il faut quand même la poser.

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Mon collègue Alberto Velasco a dit l'essentiel... Il a en effet rappelé - il faut le dire à chaque fois que cela est nécessaire, et c'est le cas dans ce débat - que l'initiative des libéraux dite «des moins 12%» n'avait profité qu'aux riches et pas aux gens les plus modestes.

Je voulais toutefois revenir sur les propos tenus par Jean-Michel Gros tout à l'heure. Il a voulu faire de l'esprit en disant qu'à Genève il valait mieux être pauvre et malade que riche et bien portant... Quel beau trait d'esprit ! Le problème, c'est qu'il y a en effet à Genève des travailleurs pauvres qui n'arrivent pas à boucler leurs fins de mois, tout simplement parce qu'ils ne gagnent pas suffisamment d'argent, et qui doivent donc solliciter des subsides de l'assurance-maladie, des allocations complémentaires, etc., tout cela dans un canton où il y a de plus en plus de millionnaires. Il faut donc savoir de qui on se moque !

Je rappellerai aussi que les prestations sociales versées aux bénéficiaires de l'Hospice général ont encore été diminuées et que, quand il s'est agi de remettre en vigueur les forfaits vêtements et TPG, eh bien, il ne s'est pas trouvé grand-monde, à part la gauche et les Verts, pour soutenir cette proposition !

Dans un canton où l'on se targue d'avoir une certaine qualité de vie, où l'on pense que la fiscalité doit être plus équitable, il faut tenir compte de ces éléments et ne pas continuer à laisser le fossé se creuser si nous voulons maintenir une certaine cohésion sociale.

Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à voter cette initiative.

La présidente. Merci, Madame la députée. Le Bureau a décidé de clore la liste des intervenants. Sont inscrits: M. Gilbert Catelain, Mme Loly Bolay, M. Claude Jeanneret, M. Michel Forni et, bien sûr, M. le conseiller d'Etat, David Hiler. Monsieur le député, Gilbert Catelain, vous avez la parole.

M. Gilbert Catelain (UDC). Merci, Madame la présidente. Dans une période de crise des recettes pour les uns, de crise des dépenses pour les autres, ce canton, avec l'appui de l'Alternative et du centre, a réévalué les classes de fonction de l'administration à raison de 30 à 50 millions de francs par année. Cumulé sur dix ans, l'impact de ces mesures représente globalement, au minimum, 300 millions de francs... Si nous, le Conseil d'Etat et ce parlement, avions pris l'engagement d'une stricte rigueur budgétaire, nous aurions résolu le déficit budgétaire depuis plusieurs années et nous aurions commencé à rembourser la dette !

Cette initiative ne tient pas compte de certains éléments: l'introduction du nouveau certificat de salaire l'an prochain, qui, pour passablement de salariés, va impliquer une hausse d'impôts. Elle ne tient pas compte non plus de la hausse de 50% des prélèvements sociaux de ces vingt dernières années ni de l'annonce du Conseil d'Etat, qui vise à supprimer les avantages fiscaux de toute une série de catégories professionnelles.

Il aurait donc été préférable d'attendre, avant de lancer cette initiative, de savoir quel sera l'impact de deux mesures: d'une part, l'introduction du nouveau certificat de salaire et, d'autre part, la suppression des avantages fiscaux, qui étaient négociés auparavant par les branches professionnelles avec le département des finances.

Je ne reviendrai pas non plus sur les risques que fait courir cette initiative en matière de recettes, puisqu'une évasion fiscale pourrait torpiller l'impact voulu par cette initiative. Pour tous ces motifs, l'UDC recommande de la refuser.

Mme Loly Bolay (S). En cinq ans, la dette de l'Etat de Genève a augmenté de 3,2 milliards ! Et l'initiative libérale «de moins 12%» prive l'Etat de Genève de 320 millions de francs environ par année, soit près de 2 milliards depuis son entrée en vigueur. Or il faut se rappeler qu'à l'époque les libéraux, lorsqu'ils ont lancé leur initiative, avaient promis que leur initiative n'aurait aucun impact négatif sur les finances cantonales. On voit le résultat aujourd'hui: 2 milliards en moins dans les caisses de l'Etat !

En tout cas, l'initiative libérale a montré une chose: c'est qu'elle a uniquement bénéficié à ceux qui ont des revenus confortables !

Alors, que demande l'initiative 130 ? Elle ne propose pas d'augmentation d'impôt. Elle vise à revenir d'une manière partielle à la situation qui prévalait avant la diminution d'impôt de 12%. C'est-à-dire qu'elle vise à supprimer le cadeau fiscal qui a été fait, grâce à l'initiative libérale, à ceux qui ont des revenus substantiels: les célibataires qui gagnent plus de 210 000 F et les couples mariés qui gagnent plus de 240 000 F.

Et l'initiative 130 tend à rendre à l'Etat une partie des ressources perdues par l'initiative libérale en préservant le pouvoir d'achat des personnes dont les revenus sont faibles. En effet, pour les revenus inférieurs à 110 000 F pour les célibataires et 130 000 F pour les couples, cette initiative n'aura aucune incidence. Cela signifie, Mesdames et Messieurs les députés, que 80% des contribuables ne seront absolument pas concernés par l'initiative 130.

C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, je conclurai en vous rappelant ce que disait Jean-Jacques Rousseau: «Le riche porte la loi dans sa bourse.»

Mesdames et Messieurs les députés, merci de soutenir cette initiative. (Applaudissements.)

M. Claude Jeanneret (MCG). Je crois que cette initiative populaire, aussi louable qu'elle puisse paraître, ne propose qu'un petit remède à une grande maladie...

Nous avons hérité, par des chemins divers, de 13 milliards de dettes - potentiellement, 16. Je ne pense pas que ce soit en prenant des dispositions qui ressemblent à des emplâtres sur des jambes de bois que l'on va améliorer les choses !

On parle de modifier structurellement le canton en révisant les lois fiscales, mais il faudrait aussi revoir les lois sur la construction ! A partir du moment où l'on n'arrive pas à garder à Genève les personnes qui gagnent bien leur vie pour qu'elles dépensent leur argent sur place, ce qui stimule l'économie locale, de façon que tout le profit du développement de ces dernières années bénéficie à Genève, ce n'est pas un peu plus ou un peu moins d'impôt qui va changer quelque chose. Et puis, surtout, ce n'est pas nécessairement maintenant qu'il faut crier au loup ! On a laissé le gouvernement s'endetter pendant longtemps. Aujourd'hui, le gouvernement montre une certaine volonté de redressement; ce dernier s'opère, même s'il est minime. Et puis, si la baisse d'impôt n'était pas intervenue - je rappelle qu'elle a été votée par le peuple - je ne crois pas que les mesures qui sont prises maintenant pour assainir la gouvernance l'auraient été. En effet, comme l'argent n'aurait pas manqué, l'Etat aurait continué à dépenser plus, ce qui est logique.

Cette initiative n'est pas souhaitable, et c'est la raison pour laquelle le MCG la refusera.

M. Michel Forni (PDC). Cette initiative repose sur des apriori dont la plupart sont faux. Et, surtout, elle ne tient pas compte des mesures qui ont déjà été prises par le Conseil d'Etat.

Au-delà de la guerre des chiffres de tout à l'heure, il faut tout de même prendre la mesure - il ne faut surtout pas les sous-estimer - de certains éléments qui ont déjà été évoqués: je veux parler du certificat de salaire et de la suppression de certains avantages fiscaux. L'un des risques qui existe toujours est de stimuler l'évasion fiscale...

Dans ces conditions, le PDC propose de rejeter cette initiative, et, en accord avec ce qui a déjà été proposé par le Conseil d'Etat, d'approuver le rapport de majorité.

M. Hugues Hiltpold (R), rapporteur de majorité. J'ai beaucoup entendu, sur les bancs socialistes et Verts, parler de l'initiative libérale... Alors certes, le parti libéral était l'auteur de cette initiative, mais je voudrais tout de même rappeler que c'est le peuple qui a voté cette dernière, et cela à une très forte majorité. Et cette majorité - je vous le rappelle également - est composée de partis de gauche... En effet, l'électorat à Genève est tel qu'il n'est pas possible que des gens de gauche n'aient pas voté cette initiative.

Madame Künzler, je voudrais revenir sur vos propos. Vous affirmez que nous affamerions l'Etat si, d'aventure, nous ne soutenions pas cette initiative... J'attire simplement votre attention sur le fait que cette initiative est, ni plus ni moins, une hausse d'impôt, et ce dès un revenu de 100 000 F.

J'aimerais également - et j'en terminerai par là - attirer votre attention sur l'élément suivant: Genève a le revenu le plus haut de Suisse, mais le plus bas de Suisse une fois appliquées toutes les déductions, dont l'impôt... Cela démontre bien que la fiscalité, en comparaison avec d'autres cantons, est bien trop importante à Genève, et il faut donc bien, à un moment donné, s'atteler à cette question. Le peuple l'a d'ailleurs très bien compris: lors de votations sur des questions fiscales, les hausses de fiscalité sont systématiquement refusées alors que les baisses de fiscalité sont généralement acceptées.

C'est pour toutes ces raisons que je vous invite à refuser cette initiative, ce que le peuple ne manquera pas de faire, j'en suis convaincu.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Lors du discours de Saint-Pierre, notre Conseil a, de fait, fixé sa position par rapport à cette initiative et par rapport à toutes sortes d'éléments concernant les finances publiques.

Le Conseil d'Etat a indiqué qu'il entendait d'abord travailler sur les réformes à apporter à l'Etat en visant d'abord et fondamentalement les gains de productivité. Il a également précisé que, lorsqu'il lui paraîtrait qu'il pourrait faire la preuve auprès de la population que cette réforme - dont on a tant parlé, mais dont les effets ont quelque peu tardé à apparaître - serait apparente à tout le monde et que chacun dans la population aurait l'impression que chaque denier est bien utilisé, et s'il devait, dans ce contexte, faire face à des déficits, il pourrait demander au peuple de voter des propositions, d'augmentation d'impôt, certes, mais, aussi, de diminution de prestations.

A partir de là, nous avons entendu, sur tous les bancs, beaucoup de choses justes... Oui, il serait préférable d'avoir suffisamment de logements pour toutes les catégories de la population à Genève ! Cela serait une excellente chose, et cela serait de nature à augmenter les recettes fiscales. Oui, les recettes fiscales n'ont cessé d'augmenter - il faut le dire - depuis 1997, à raison de 3% à peu près par année.

Oui, encore - il faut le dire aussi - l'initiative libérale acceptée par le peuple, proposait une réduction proportionnelle favorable aux hauts revenus. Une réduction qui se ferait sur le barème, notamment sur les plus basses classes du barème, aurait aussi un caractère égalitaire ou inégalitaire: chacun payerait 1500 F de moins, les riches comme les pauvres. Après, chacun pense ce qu'il veut selon ses orientations...

Quoi qu'il en soit, le Conseil d'Etat aimerait vous rendre attentifs au fait que nous sommes convaincus d'atteindre l'objectif que nous nous sommes fixé pour ce qui est de l'exercice en cours. Maintenant, il faut savoir que les finances publiques de notre canton vont subir des pressions importantes ces prochaines années. Nous n'en avons pas la confirmation officielle, mais nous entendons bruissement sur bruissement, comme quoi la RPT ne sera pas de 90 millions, mais vraisemblablement 50 millions de plus. Et nous avons quelques raisons de croire que cela sera le cas, puisque l'impôt qui augmente le plus fortement à Genève est l'impôt à la source, et c'est précisément cet impôt qui pose problème.

Pour votre information, sur les quatre premiers mois de l'année, il a été perçu 20% de plus au titre de l'impôt à la source - 20% de plus ! Et c'est précisément cela qui va faire grimper notre indice de capacité financière par habitant à des sommets assez rares, puisque, je vous le rappelle, dans le système fédéral, 44 000 frontaliers représentent une personne, mathématiquement parlant. C'est une chose que vous devez savoir, c'est important.

D'autre part, certains éléments vont être conséquents. Le Conseil d'Etat aurait certes pu en imaginer l'ampleur, mais il le voit maintenant avec précision, grâce au travail de planification qui a été fait. Le vieillissement de la population, dont on parlait longuement lorsque je suivais des cours de démographie à l'université - tiens, tiens ! - est devenu réalité. Et ce phénomène a des coûts, qui sont importants et ne peuvent pas être compensés uniquement par de meilleurs deuxièmes piliers. Car, Mesdames et Messieurs, entrer dans un EMS coûte 9000 F par mois ! Même les meilleurs des deuxièmes piliers ne pourront pas couvrir cette somme. Il faudra bien que les EMS offrent suffisamment de places - qui ont un coût, je le répète - pour toute une série de personnes très âgées et malades. Nous allons donc subir la pression, à l'évidence, des dépenses liées au vieillissement de la population. Et si l'on peut discuter à l'infini des normes d'encadrement, il est certain que l'on ne pourra pas discuter du nombre de lits. Il faut le savoir, et vous le verrez apparaître de façon significative dans le budget 2009 déjà.

De la même manière, les déséquilibres qui sont des caractéristiques de notre société, avec une croissance extrêmement élevée, mais, aussi, avec des personnes totalement exclues de cette croissance, montrent, dans une économie en pleine croissance, une diminution du chômage - encore 0,2% pour le mois dernier, ce qui est une bonne nouvelle - mais aussi une augmentation des dépenses d'assistance - et je ne parle là que de l'argent distribué, il ne s'agit pas de frais de fonctionnement - de 20% par année ! Ces pressions sont extrêmement fortes et, comme vous pouvez l'imaginer en entendant les montants évoqués, il faut beaucoup de gains d'efficience pour financer de telles dépenses. Ces dernières sont strictement liées à des subsides distribués à des personnes physiques. Elles ne sont pas dues à un mauvais fonctionnement ou à des salaires trop élevés: c'est tout simplement de l'argent qui est distribué à des personnes en chair et en os.

Le Conseil d'Etat, dans les prochains mois, va donc vous répondre sur les perspectives qu'il imagine, non seulement pour la législature en cours mais pour la suivante. Arriverons-nous, profitant de la croissance économique, à stabiliser le retour à l'équilibre que nous enregistrons ? Pour 2007, nous en sommes à peu près persuadés. Pour 2008, nous sommes plutôt enclins à penser le contraire. Et, ce qui compte, c'est surtout 2009, 2010, 2011...

La question suivante a été, à juste titre, posée par M. Velasco et, également, par la rapporteure de minorité: en période de moyenne croissance, pouvons-nous absorber les tâches nouvelles sachant que la dette qui est la nôtre nous interdit d'avoir recours à l'emprunt ? En fait, nous avons mangé la possibilité de nous endetter sur le fonctionnement. A ce sujet, je dois vous dire tout d'abord que, contrairement aux recettes fiscales, des recettes non fiscales stagnent maintenant à l'Etat de Genève. Il ne faut donc pas compter dessus - et cela a son importance - et il faudra bien, ma foi, que nous revenions à la normale. Si je prends mon département dont la tâche essentielle, vous le savez, est de récolter des impôts, 5% de décrue des effectifs - selon une planification que chacun connaît et qui ne peut pas être contestée - et 5% d'augmentation du nombre de contribuables représentent un gain de productivité de 10%. Eh bien, Mesdames et Messieurs, avec la meilleure volonté du monde, le Conseil d'Etat, dans aucun secteur, ne prend l'engagement d'arriver, pour la prochaine législature, à augmenter à nouveau de 10% la productivité ! Là, il s'agissait de soigner un mal ! Voilà, la situation !

Le Conseil d'Etat, pour l'heure, avance dans la voie qu'il s'est tracée. Il fera un bilan au fur et à mesure au cours de la législature, non pas comme le proposent les initiants, mais comme le peuple l'a voulu - et vous savez que c'est contre mon avis. Le Conseil d'Etat sait qu'un jour il devra dire si la méthode est suffisante - parce que notre ville est extraordinairement riche et qu'il a suffi de serrer un peu les boulons - ou si elle ne l'est pas. Dans le deuxième cas, il devra poser la question frontalement à la population, comme le peuple l'a voulu dans une votation qui a eu lieu en 2006 - ce n'est pas si vieux... Elle sera la suivante: Voulez-vous une baisse de prestations dans certains domaines ou voulez-vous telle ou telle augmentation d'impôt ? C'est le chemin à suivre. Nous le respectons.

Pour le moment, l'objectif du Conseil d'Etat est d'aller au bout de sa démarche, de faire la preuve que l'Etat fonctionne mieux et, même, fonctionne bien. C'est en fonction du résultat, en fonction des gains de productivité, que nous saurons s'il faut passer à une deuxième étape ou non. C'est vraisemblablement cette question qui vous occupera tout au long de l'année 2008, au fur et à mesure que nous pourrons anticiper les choses pour 2009, voire jusqu'à 2011, par rapport aux tendances actuelles.

C'est dans cet esprit, comme il l'a indiqué dans son discours de Saint-Pierre, dans son plan financier contenu dans la brochure du plan de mesures, et encore lors du premier débat sur cette initiative, que le Conseil d'Etat ne soutiendra pas cette initiative.

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets la prise en considération de l'initiative 130.

Mise aux voix, la prise en considération de l'initiative 130 est rejetée par 52 non contre 29 oui et 1 abstention.

L'initiative populaire 130 est donc refusée.

Mis aux voix, le principe d'un contreprojet est refusé par 76 non contre 3 oui et 2 abstentions.

Le Grand Conseil prend acte du rapport de commission IN 130-C.

IN 131
Initiative populaire 131 "Contribution temporaire de solidarité des grandes fortunes pour le rétablissement social des finances cantonales !"
IN 131-C
Rapport de la Commission fiscale chargée d'étudier l'initiative populaire 131 « Contribution temporaire de solidarité des grandes fortunes pour le rétablissement social des finances cantonales ! »
Rapport de majorité de M. Olivier Jornot (L)
Rapport de minorité de M. Alberto Velasco (S)

Débat

M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. Vous savez qu'il n'y a plus en Europe aujourd'hui, à part la Suisse, que quatre pays qui prélèvent un impôt sur la fortune. Le canton de Genève, lui, fait très fort, puisqu'il a deux impôts sur la fortune: un impôt ordinaire et un impôt supplémentaire !

L'initiative 131 dont nous débattons maintenant propose d'augmenter l'impôt supplémentaire sur la fortune de plus de 300%... On ne parle plus d'une augmentation de 12% comme tout à l'heure, mais de plus de 300% ! Et si l'on fait le cumul de l'impôt ordinaire et de l'impôt supplémentaire sur la fortune, on s'aperçoit que, pour les catégories de contribuables les plus fortunés, cette initiative aurait pour effet, ni plus ni moins, que de doubler - je dis bien «doubler» ! - l'impôt sur la fortune.

Cette initiative vous rappellera peut-être quelque chose... En effet, il y a deux ans - en 2005 - le peuple a rejeté la concrétisation de l'initiative 113 qui proposait, sur la question de l'imposition de la fortune, exactement la même mesure, avec les mêmes taux, les mêmes montants, les mêmes mots que ceux utilisés dans le texte de l'initiative. Et, une année plus tard, les initiants - la gauche - qui avaient, semble-t-il, oublié que le peuple s'était prononcé à ce sujet, ont «remis le couvert» et proposé exactement la même chose !

On nous dit que la hausse d'impôt en question serait temporaire... Mesdames et Messieurs les députés, il faut être réalistes ! La condition qui est fixée pour que cet impôt supplémentaire soit supprimé est non seulement que les comptes de l'Etat soient positifs - ce qui est arrivé en 2006 - mais aussi que la dette ne dépasse pas les recettes de l'Etat ! Cela implique, avec les chiffres actuels, que l'Etat devrait diminuer sa dette de quelque 6 milliards !

Mesdames et Messieurs, si l'on prend le boni de l'année 2006, c'est-à-dire environ 200 millions - boni dont le conseiller d'Etat en charge des finances a bien expliqué qu'il était tout à fait exceptionnel - il nous faudrait trente ans - je dis bien «trente ans» - de bonis identiques pour parvenir à faire diminuer la dette à un seuil suffisant pour que cet impôt soit supprimé. Et ces trente ans, Mesdames et Messieurs, ne démarrent pas aujourd'hui, mais seulement à partir du moment où l'Etat aura fini de décaisser des sommes pour combler les pertes de la Fondation de valorisation, parce que, chaque fois que des sommes sont décaissées, la dette augmente.

Le Conseil d'Etat, dont la prise de position est de rejeter cette initiative, a souligné que les recettes de l'Etat avaient en moyenne augmenté de plus de 3% ces dix dernières années et il en a conclu, de la même manière que M. David Hiler tout à l'heure à propos de l'initiative 130, qu'il ne fallait pas augmenter les impôts, mais rationaliser le fonctionnement de l'Etat.

Ce n'est pas le discours des initiants qui, eux, nous parlent de corriger les effets d'un certain nombre de baisses d'impôt: la baisse d'impôt de 12%, la baisse d'impôt en faveur des familles proposée par Mme Micheline Calmy-Rey en son temps et la suppression des droits de succession. Vous aurez remarqué que, dans les trois cas, il s'agit d'une baisse d'impôt qui n'a strictement rien à voir avec l'imposition sur la fortune et, en outre - évidemment - ces trois baisses d'impôt ont été approuvées par le peuple.

Ceux qui s'opposent à cette initiative soulignent son caractère extrêmement dangereux, parce qu'elle s'attaque de manière frontale à quelques centaines de contribuables, alors que ce sont eux, Mesdames et Messieurs, qui font vivre l'Etat social. Ce sont eux qui contribuent, dans une proportion majeure, aux recettes de l'Etat. Ce sont eux qui permettent à l'Etat de fournir des prestations sociales.

Et ce sont eux aussi qui sont les plus volatiles... Imaginez l'effet psychologique qu'aurait sur les contribuables résidents, mais, également, sur ceux qui envisagent de s'établir à Genève une initiative qui propose, comme je l'ai dit tout à l'heure, de doubler l'impôt sur la fortune !

Pour cette raison extrêmement importante et tout à fait déterminante pour l'avenir de l'Etat, il y a lieu de refuser cette initiative et le principe de lui opposer un contreprojet.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Face au grand problème que représente la dette de notre canton, chacun s'efforce d'apporter des solutions... Et c'est vous - la droite - qui nous répétez, année après année, séance après séance, que cette dette est très importante. Lorsque des associations genevoises demandent une aide pour des sommes relativement modestes - même 30 000 F - vous répondez que l'Etat n'est pas en mesure d'octroyer ces aides en raison de l'importance de la dette.

Voyez-vous, nous, nous pensons que les faibles de ce canton, financièrement parlant, ont déjà contribué à l'effort nécessaire. Nous pensons que la fonction publique - comme je l'ai déjà dit tout à l'heure - a déjà passablement contribué à cet effort - 1,5 à 2 milliards - pour diminuer la dette. Et je crois qu'il est temps également que contribuent à cet effort les personnes qui en ont les moyens !

De quoi s'agit-il, au juste ? Cette mesure touche les personnes qui possèdent 1,5 million et plus. Elle propose de les taxer à raison de cinq pour mille jusqu'à 3 millions et à hauteur de cinq et demi pour mille jusqu'à 5 millions. Et les contribuables dotés d'une fortune de 5 millions devraient verser un supplément d'impôt de 14 000 F au titre de cette taxe - 14 000 F ! Je pense que les personnes qui ont une fortune de 5 millions peuvent se défaire facilement de 14 000 F ! Ce n'est pas une affaire pour elles et ce n'est pas cela qui va les inciter à partir de Genève. Et je doute beaucoup qu'elles partent en Irak, au Congo... (Exclamations.) ...je ne sais où, à cause de cette taxe ! Si ces personnes résident à Genève, c'est qu'elles y trouvent leur compte ! Elles bénéficient du cadre de Genève, et cela a un coût. Et puis cela a aussi un coût de maintenir les infrastructures que nous avons à Genève, de maintenir la qualité de vie, de maintenir la qualité des soins: habiter à Genève a un coût et chacun doit contribuer proportionnellement, en fonction de ses moyens ! Nous considérons qu'aujourd'hui certaines catégories de la population doivent davantage contribuer à l'effort entrepris pour diminuer la dette, mais de manière temporaire.

Vous êtes convaincus que votre initiative concernant la baisse de 12% devrait générer un supplément de recettes... Mais, voyez-vous, Monsieur Jornot, avec ce supplément de recettes la dette va fondre beaucoup plus vite que prévu. Nous arriverions donc à l'objectif fixé - 8 milliards de dette - beaucoup plus vite, grâce à votre initiative précisément ! Avec votre initiative et avec l'aide de celle-ci, tout va s'arranger: il ne sera pas nécessaire d'attendre trente ans, comme cela a été évoqué !

Quoi qu'il en soit, je tiens à dire ici que le coût de la Banque cantonale de Genève n'est pas le fait de ceux qui payent aujourd'hui. Et, si l'on y ajoute le coût de votre initiative de baisse d'impôt de 12%, on arrive à plus de 5 milliards ! Avec ces 5 milliards, la dette de 13 milliards serait ramenée à 8 milliards, et nous n'aurions même plus besoin de cette initiative 130 ! Eh bien, nous ne sommes pas responsables de cette situation: elle est le résultat de votre politique ! Nous n'avons pas de responsabilité dans la gestion désastreuse de la Banque cantonale de Genève et nous n'avons pas, non plus, de responsabilité dans la baisse d'impôt de l'époque, qui font que les finances de l'Etat se trouvent dans cet état !

Le Conseil d'Etat se serait soi-disant engagé à l'époque dans une politique de ninisme... OK, nous verrons bien ! Mais, à un moment donné, la politique du «ni ni» doit cesser. Comme l'a dit M. Hiler, à un moment donné, lorsque la preuve sera faite que l'on ne pourra plus demander aux fonctionnaires de se serrer la ceinture, que l'on aura été à la limite de ce que l'Hospice général doit donner et que l'on aura diminué le nombre de lits à l'Hôpital à la limite du supportable, il faudra bien se demander s'il faut réduire les prestations de ce canton au point que la situation sociale devienne difficile ou s'il faut augmenter les impôts ! Je pense que tôt ou tard, il faudra effectivement appliquer le projet de loi qui a été voté en 2006. Il s'agira de savoir s'il faut diminuer les prestations ou s'il faut augmenter les impôts: il faudra bien répondre à cette question.

Mais on pourrait éviter d'en arriver là, Monsieur Jornot, en votant cette initiative 131, qui appelle à une contribution temporaire de solidarité des grandes fortunes.

M. Jean-Michel Gros (L). Vous me l'accorderez, il y a beaucoup de points communs entre cette initiative et celle dont nous venons de parler tout à l'heure. Le principal point commun étant qu'il s'agit d'une hausse d'impôt. Mais, si la précédente initiative - et M. Jornot l'a souligné à juste titre - proposait une augmentation pouvant aller jusqu'à 12% en fonction du revenu, celle-ci préconise une augmentation pouvant aller jusqu'à 344% !

M. Alberto Velasco. Pour mille !

M. Jean-Michel Gros. Pour cent, Monsieur Velasco ! (Rires.) Lors de certaines votations fiscales, il était de mise de transformer l'augmentation d'impôt en nombre d'expressos. Et l'on nous disait, par exemple, que telle ou telle hausse ne représentait qu'un expresso par jour... Force est de constater ici que le nombre d'expressos que représenterait cette hausse rendrait plus d'un contribuable complètement cardiaque ! (Rires.) Contrairement à l'autre initiative, celle-ci ne vise pas à corriger une baisse d'impôt. L'impôt sur la fortune n'a pas été modifié depuis des lustres ! L'exposé des motifs des initiants est donc mensonger ! Il s'agit ici d'une hausse massive d'impôt: un point, c'est tout !

Alors, bien sûr, selon l'Alternative, il faut prendre l'argent où il est... C'est là que l'on réalise que le parti socialiste genevois et, même, les Verts, dont l'attitude en commission fiscale m'a déçu... (Exclamations.) Eh bien oui, cela m'arrive des fois ! ...sont plus proches d'Hugo Chavez ou de Fidel Castro que de Tony Blair ou de Zapatero, premier ministre d'Espagne.

Mesdames et Messieurs les députés, si cette initiative devait être acceptée, les conséquences pourraient être encore plus catastrophiques que pour la précédente. Augmenter de 344% l'impôt sur la fortune dès 1,5 million de francs de fortune ne tient évidemment pas compte des réévaluations régulières des biens immobiliers. On retrouvera ainsi, dans les «victimes» de cette initiative, une frange de la population propriétaire d'un logement, voire d'une villa, mais ne bénéficiant que de petits revenus ! Même les Verts l'ont admis en commission, eux qui souhaitaient fixer le plancher à 5 millions ! Voilà donc la politique sociale du parti socialiste genevois, attaché, je dirais même plus, «rivé» aux basques de l'ex-Alliance de gauche pour des motifs purement électoralistes !

Une voix. Bravo ! (Brouhaha.)

M. Jean-Michel Gros. Mais alors, ce qui devient surréaliste, c'est que les contribuables jouissant d'une fortune confortable - qualifiés de «volatiles» même par l'Alternative - ne seront en tout cas pas encouragés à rester ou à s'établir à Genève. Si la suppression partielle des droits de succession et de donation a eu comme effet le retour de certains gros contribuables à Genève, l'initiative 131 ne peut que les pousser à repartir !

Mesdames et Messieurs les députés, quand 3% des contribuables - et je change mes statistiques par rapport à l'initiative précédente - assurent 85% des recettes de l'impôt sur la fortune, je vous laisse imaginer les conséquences du départ d'un seul de ces contribuables !

Ainsi, le groupe libéral vous demande instamment de suivre les conclusions de la majorité de la commission, comme - une fois de plus - celles du Conseil d'Etat - au terme d'une réflexion collégiale, je peux le supposer - et de refuser l'initiative 131. (Applaudissements.)

La présidente. Je salue la présence à la tribune de M. Patrick Schmied, notre ancien collègue. (Applaudissements.) Le Bureau a décidé de clore la liste des intervenants. Sont inscrits: M. Georges Letellier, Mme Michèle Ducret, Mme Loly Bolay, Mme Michèle Künzler, M. Eric Stauffer, M. Michel Forni, M. Daniel Zaugg et M. le conseiller d'Etat David Hiler.

M. Georges Letellier (Ind.). Augmenter l'impôt sur la fortune de 5% des contribuables qui payent déjà 50 à 60% des impôts de cette République serait une injustice sociale... (Brouhaha.) ... qui inciterait un certain nombre de ces contribuables quitter le navire, même si cet impôt ne devrait être - pour les naïfs - que temporaire.

Il ne faut pas perdre de vue que cette ponction supplémentaire est initiée par les 50% de citoyens qui ne payent pas d'impôt ou presque. C'est si facile ! Même la Suède, une référence socialiste, a supprimé cet impôt après avoir vu fuir certains de ses contribuables !

En revanche, au lieu de vous en prendre à ceux qui alimentent nos caisses, vous feriez mieux de vous en prendre à ceux qui les vident, c'est-à-dire à votre électorat, aux subventionnés de tout poil, aux travailleurs au noir, et j'en passe, qui vivent confortablement aux crochets de la société en abusant des acquis sociaux et des droits que le système leur a taillés sur mesure ! Faites ce qu'il faut pour prendre l'argent dans les poches des profiteurs plutôt que dans celles de ceux qui vous les remplissent !

Pour une justice sociale ni de droite ni de gauche, refusons cette initiative !

Mme Michèle Ducret (R). Le rapporteur de majorité a bien fait de rappeler tout à l'heure l'initiative 113, que j'avais du reste signalée en son absence... Il s'est juste trompé de date, puisque c'est en mai 2003 que le peuple a refusé cette initiative. Et je l'informe que c'est à 60% des votants que le peuple genevois a refusé cette initiative.

Cela dit, l'initiative 113, l'initiative 131, comme l'initiative 130, ont la même origine et à peu près les mêmes buts. L'ennui, c'est que l'initiative 131 est un peu plus pernicieuse, dans la mesure où on annonce qu'elle sera «temporaire» alors qu'elle durera probablement éternellement. Ce sera un «temporaire éternel», si je peux utiliser cette expression contradictoire. Malheureusement, ce genre de mesure temporaire entraîne des incertitudes. Mais les gros contribuables que les initiants aimeraient garder à Genève détestent les incertitudes.

Par conséquent, nous refuserons évidemment aussi l'initiative 131.

Nous avons entendu avec étonnement certains intervenants nous parler de la dette et de leur inquiétude à ce sujet... Je rappelle que le groupe radical avait présenté une motion sur le sort réservé à l'or de la BNS en proposant de l'affecter à la diminution de la dette, ce qui a été fait. Mais la gauche n'a pas soutenu la motion radicale ! Nous sommes donc ravis de constater que la gauche a changé d'avis à propos de la dette !

Je le répète, le groupe radical refusera l'initiative 131 ainsi que le principe d'un contreprojet.

Mme Loly Bolay (S). J'ai entendu Jean-Michel Gros traiter les riches de «victimes»... Je trouve cela indécent ! On peint le diable sur la muraille en prétendant que ces «pauvres riches» vont quitter le canton de Genève, tout cela parce qu'on va leur demander deux ou trois sous supplémentaires... Je le répète: je trouve cela indécent !

C'est indécent, Mesdames et Messieurs les députés, parce que dans notre pays, dans notre canton, 20% de la population se trouvent au seuil de la pauvreté ! Alors, il faut tout de même avoir des propos qui tiennent la route !

Mesdames et Messieurs les députés, nous avons entendu tout à l'heure notre ministre des finances nous expliquer qu'il fallait trouver de nouvelles recettes, car il faudrait davantage d'argent pour les EMS, pour les hôpitaux... Je vous le rappelle: aujourd'hui Genève ne souffre pas d'une crise des dépenses, mais bien d'une crise des recettes ! Il faut en trouver de nouvelles ! Chercher des économies dans le fonctionnement de l'Etat, c'est une démarche qui est en train d'être effectuée par le Conseil d'Etat, mais cela ne suffira pas. Vous le savez - et le Conseil d'Etat nous l'a également indiqué tout à l'heure - 2008 sera l'année des grands dangers. Nous en parlerons tout à l'heure avec la RPT, qui va nous coûter, au bas mot, 80 millions de francs.

Il faut trouver cet argent, mais où ? Bien entendu, les libéraux pensent qu'il faut encore faire des coupes dans les subventions, faire des coupes dans le social... Du reste, nous avons dû nous battre, il n'y a pas si longtemps, pour les handicapés, à qui l'on voulait encore enlever 60 F par mois ! Et après cela, Mesdames et Messieurs les députés, on vient nous dire que les «pauvres riches» qui ont 1,5 million et qui vont payer 5842 F de plus - et à qui, il faut le préciser, l'on retire la dette hypothécaire - sont des victimes ! Mais que devrions-nous dire des victimes du social qui n'arrivent plus à joindre les deux bouts !

A ce propos, j'aimerais quand même rappeler ici l'article 27 de notre Constitution fédérale. Il stipule que, lors de l'imposition, il y a lieu de respecter le principe de la capacité économique de chacun. Aujourd'hui, on le sait, ce sont les personnes les plus modestes et les personnes des classes moyennes qui payent le plus d'impôts. On est en train de paupériser une très grande frange de la population.

De plus, les déficits publics obligent les pouvoirs publics à contracter de nombreux emprunts. Ils permettent aux établissements bancaires - bien sûr, les amis des libéraux - de prélever de substantielles commissions, en tant qu'intermédiaires, sur le placement de valeurs étatiques. Eh oui ! Alors, Mesdames et Messieurs les députés, que demande en réalité l'initiative 131 ? Elle propose de taxer un peu plus fortement les grosses fortunes à partir d'un montant de 1,5 million de francs. Par exemple, pour un montant de 3 millions, le supplément d'impôt en vertu de cette initiative s'élèverait à 5812 F et, pour un montant de 5 millions, il serait de 14 112 F.

Mesdames et Messieurs les députés, le parti socialiste persiste et signe toujours et encore pour une plus grande justice fiscale. C'est la raison pour laquelle je vous demande de voter cette initiative. (Applaudissements.)

Mme Michèle Künzler (Ve). C'est vrai, cette question a été posée récemment au peuple et, soyons francs avec vous, c'est pour cela que avions demandé qu'il y ait deux initiatives pour pouvoir séparer cette question en deux. Pour que la question qui avait déjà été tranchée ne soit pas posée en même temps que l'autre qui peut être traitée différemment.

Quoi qu'il en soit, nous soutenons cette augmentation d'impôt, même si elle représente 344%, car elle passe de 0,002 à 0,06%, ce qui n'est franchement pas énorme. Et les chiffres qui ont été énoncés à l'instant vous montrent que l'incidence est faible.

Nous devons diminuer la dette. Je lis dans le rapport de majorité que: «... une diminution de la dette de quelque 6 milliards relève, à vues humaines, du fantasme...». Autant dire que ce n'est pas réaliste et que nous n'y arriverons jamais ! Moi, je trouve inquiétant de tenir de tels propos, parce que, en fait, cela veut dire que vous ne croyez absolument pas qu'il est possible de réduire la dette et que tout ce qui vous importe c'est que l'on continue à s'endetter, à diminuer les impôts comme vous le proposerez encore tout à l'heure ! (Brouhaha.)

En l'occurrence, à part dans vos discours électoralistes, vous ne voulez pas vraiment diminuer la dette: vous n'y croyez pas, vous n'y croyez plus ! Pour nous, il est important de ne plus vivre à crédit. Vous devriez imaginer qu'il vaut mieux accélérer le paiement pour pouvoir payer moins ensuite, plutôt que de payer deux fois la même chose, comme nous le faisons actuellement. Moi j'y crois: la dette va diminuer et nous pourrons supprimer cet impôt complémentaire.

Je vous invite à voter oui à cette initiative, parce qu'il faut agir rapidement: c'est urgent !

M. Eric Stauffer (MCG). Je crois qu'il faut relativiser quelque peu les choses. Il a été dit que 3% des contribuables payaient 85% des impôts... Et puis, nous avons entendu tout et son contraire. Bref, il faut faire une synthèse de tout cela !

Le groupe MCG va refuser l'entrée en matière de cette initiative, pour une simple et bonne raison: en tant que politiciens avérés, je pense que vous avez tous regardé hier soir un fameux débat de nos voisins français qui a très bien illustré ce que vous êtes en train de proposer ici. De quoi veut-on parler ? C'est-à-dire qu'à force d'augmenter les impôts, on tue l'impôt, et, en outre, on tue le commerce. D'après les propos qui ont été tenus hier soir, les entreprises payent les salaires les plus faibles possibles, le minimum légal ! Ici, malheureusement, nous n'avons pas de conventions collectives: il y a donc des abus, ce qui engendre ce que j'appellerai cette «nouvelle pauvreté».

Réfléchissez, il y a vingt ans - ce n'est pas si loin que cela - seul un des deux conjoints travaillait pour assurer le revenu familial. Aujourd'hui, si les deux conjoints ne travaillent pas, ils ne s'en sortent pas. Donc, d'un côté les salaires sont bas et, de l'autre, les impôts augmentent. Et les entreprises qui viennent ici pour créer des emplois et des richesses iront ailleurs si les impôts augmentent ! Regardez ce qui se passe: combien d'entreprises délocalisent ? Pour quelles raisons le font-elles ? Pour trouver une main-d'oeuvre à meilleur marché et une fiscalité réduite. Même des députés entrepreneurs dans cet hémicycle sont en train de délocaliser leur entreprise...

Une voix. Des noms !

M. Eric Stauffer. ...en Chine, notamment ! Alors, Mesdames et Messieurs, il faut bien réfléchir: il faut dire oui à la défense et à la protection sociale, mais il faut aussi tout faire pour attirer les personnes qui ont une capacité d'investissement pour créer des richesses et créer de l'emploi ! En effet et malheureusement, ce ne sont pas les couples où les deux travaillent et gagnent 6500 ou 7000 F qui vont permettre de relancer l'économie, car leur pouvoir d'achat est réduit. Ce ne sont pas eux qui font tourner l'économie ou qui créent des emplois à forte valeur ajoutée. Il faut faire en sorte que les personnes qui le peuvent créent des richesses, pour créer de l'emploi, et c'est exactement ce qu'un candidat à l'élection présidentielle française expliquait hier soir à la télévision. C'est comme cela que l'on pourra relancer l'économie et que l'on arrivera à réduire la dette. Il faut appliquer une fiscalité raisonnable ! A écouter les députés de certains partis, il faudrait taxer les opérations boursières, il faudrait taxer par-ci, il faudrait taxer par-là... Très bien ! Mais que veut-on: vider Genève de sa substance ?

Réfléchissez un peu ! Prenons une région du centre de la France, qui serait équivalente à l'Ain et la Haute-Savoie... Eh bien, ce serait une région pauvre ! Mais l'Ain et la Haute-Savoie sont deux départements très riches, parce qu'ils ont bénéficié d'un leader ! En effet, la ville, le canton de Genève, a drainé cette économie et fait la richesse de ses voisins. La preuve, c'est que le taux de chômage de ces deux départements est le plus bas de France. Cherchez l'erreur ! A contrario, Genève a le taux de chômage le plus haut de Suisse. Mais ce n'est pas l'objet du débat de ce soir...

Ce que je veux vous faire comprendre, c'est que trop d'impôt tue l'impôt !

Nous refuserons donc l'entrée en matière de cette initiative.

M. Michel Forni (PDC). Utiliser la fracture sociale pour imposer un impôt de solidarité sur la fortune est toujours le reflet d'un modèle de société où il y a de l'injustice sociale. Mais, derrière les polémiques sur l'impôt, sur les revenus, sur la question de la légitimité de la richesse, la question qui se pose est le moyen de la faire contribuer au bien commun. Cette question reste posée, mais elle ne doit jamais l'être sous forme d'une contrainte supplémentaire, car le paysage politique se recompose éternellement à Genève, comme ailleurs. La richesse reste considérée comme légitime et méritée, profitant finalement à tous. Il est donc néfaste, pour la prospérité générale, de freiner encore ce moteur de l'activité sociale et économique, représenté par une minorité de citoyens.

Pour le PDC, qui refuse aussi d'ériger l'argent en dieu, il n'en demeure pas moins que la contribution de la richesse au bien commun ne doit pas inciter à faire fuir les fortunes. Il faut cesser de polémiquer et de rester hanté par le spectre de la spéculation, associé au mépris ressenti envers ceux qui favorisent l'économie.

Genève n'est pas un paradis fiscal. C'est la raison pour laquelle nous, PDC, ne voulons pas entrer plus profondément dans ce débat. Nous refusons cette initiative et vous proposons d'en faire de même.

M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. Tout à l'heure, M. le rapporteur de minorité disait que la politique du «ni ni» doit cesser à un moment donné... Il y a une chose qui devrait s'arrêter, c'est le discours dogmatique, idéologique, des socialistes et - hélas, je dois le dire aussi - des Verts en matière fiscale ! Par exemple, le dogme sur la crise des recettes que vous ressassez à longueur de débats ! J'ai envie de dire à Mme Loly Bolay qu'elle devrait simplement lire les documents qui portent sur les comptes 2006... Elle constaterait qu'entre 2005 et 2006 les recettes fiscales ont augmenté de 591 millions de francs, dont 331 millions uniquement pour les impôts sur les personnes physiques ! Il n'y a pas de crise des recettes dans ce canton !

A M. le rapporteur de minorité, qui nous dit que le taux appliqué ne serait que de cinq pour mille, j'ai envie de répondre - je répondrais ainsi peut-être à la question que M. le conseiller d'Etat Hiler semble s'être posée in petto - que, lorsque vous devez payer des impôts qui correspondent à plusieurs milliers ou dizaines de milliers d'expressos par jour - ou d'expressi - parce que vous additionnez l'impôt sur la fortune, l'impôt supplémentaire, la contribution de solidarité et tous les autres impôts que vous oubliez de mentionner dans ce débat, eh bien, vous arrivez en effet à avoir une indigestion de café ! Et vous préférez «mettre les voiles» et aller voir ailleurs si, par hasard, on se comporte mieux avec les contribuables !

Vous avez indiqué tout à l'heure, Monsieur Velasco, avec beaucoup de verve et beaucoup d'ironie, que cette initiative pemettrait avec d'autres moyens conjugués de rembourser rapidement la dette... J'aimerais quand même vous rappeler que, aussitôt que le boni de 200 millions de l'année 2006 a été connu, vos partis se sont jetés sur les médias pour dire qu'il fallait absolument mettre fin à la politique d'austérité ! Et lorsqu'il s'est agi - cela a été dit tout à l'heure - d'utiliser l'or de la Banque nationale, qu'avez-vous fait ? Vous avez lancé une initiative populaire pour faire en sorte que cet or soit utilisé à d'autres fins qu'au remboursement de la dette !

Alors, Mesdames et Messieurs qui soutenez cette initiative, imaginez un instant que, par impossible, cette initiative soit acceptée ! Imaginez le risque pris ! Imaginez que vingt à trente contribuables - rien que vingt à trente - prennent la décision de quitter le canton... Alors oui, Mesdames et Messieurs, oui, Monsieur Velasco, ce serait la fin du ninisme. Et les bénéficiaires des prestations de l'Etat seraient, à ce moment-là, les premières victimes d'une telle situation !

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Tout d'abord, Monsieur Letellier, vous prétendez que 50% de la population ne payent pas d'impôt... C'est faux ! (L'orateur est interpellé.) Je vais vous dire pourquoi, Monsieur Letellier ! Même ceux qui ne payent pas d'impôt, payent des taxes, en payant la TVA sur les produits de consommation ! Donc, tout le monde paye des impôts, Monsieur ! (Exclamations.) Justement, Messieurs, les impôts indirects sont parfois bien supérieurs aux impôts directs ! Vous pouvez faire le calcul si vous voulez en avoir la preuve ! Par conséquent, tout le monde paye des impôts, Monsieur Letellier, et, proportionnellement, parfois bien plus que les personnes aisées !

Vous dites que le débat est idéologique... Mais c'est vrai, Monsieur le rapporteur de majorité ! Quand les personnes qui ont une fortune de 5 millions prétendent qu'elles ne sont pas en mesure de payer 14 000 F de plus, le débat devient forcément idéologique ! C'est vrai ! Je considère que les personnes qui ont une fortune de 5 millions peuvent bien payer 14 000 F de plus. Et si elles prétendent qu'elles ne le peuvent pas, c'est parce qu'elles veulent défendre une idéologie que l'on connaît bien et qui consiste à limiter au maximum possible les recettes de l'Etat pour le restructurer. C'est sur ce point que porte le débat, Monsieur Jornot ! Soyons clairs: c'est le fond du débat, et vous le savez très bien !

Vous dites par ailleurs qu'il y a un danger... Peut-être que l'on court le risque que des personnes fortunées partent... Quoi qu'il en soit, je vous dirai, Monsieur Jornot, que les riches délocalisent leur entreprise pour des questions de coût: c'est évident ! Par contre, je doute beaucoup que les riches délocalisent leur lieu de résidence s'ils habitent un pays aussi agréable à vivre que la Suisse ! (Exclamations.) Il ne faut pas prendre les gens pour des imbéciles, Messieurs ! Il y a encore de la marge, s'agissant d'augmentation fiscale, avant qu'ils ne partent ! Pour le moment, les personnes fortunées viennent s'installer chez nous, et nous savons très bien qu'un certain nombre d'entre elles sont prêtes à revenir !

Messieurs, chaque année, le nombre de riches augmente - ce n'est pas moi qui le dis, ce sont les statistiques. Chaque année, le nombre de personnes fortunées augmente dans ce pays, et vous venez nous dire que, si l'on ponctionne 14 000 F aux personnes qui ont une fortune de 5 millions, ce serait la catastrophe... Pour ma part, je trouve ce discours insolent et insupportable ! Voyez-vous, 140 millions de recettes supplémentaires seraient une manne bonne à prendre pour l'Etat. Et je suis certain, Monsieur Jornot, que cette mesure ne ferait partir aucun des contribuables auxquels vous faites allusion. Par contre, cette somme contribuerait grandement à diminuer la dette. Et M. Hiler le sait bien, puisque, dans le cas des transferts d'actifs, il nous a expliqué qu'il était nécessaire de baisser le budget de fonctionnement des fameux 20 millions, conséquents de ces fameux transferts ! Imaginez qu'en plus de ces 20 millions vous lui permettiez de compter sur ces 140 000 millions ponctionnés sur des personnes qui en ont les moyens: ce serait un cadeau extraordinaire !

Mesdames et Messieurs les députés, soyez solidaires ! Je fais appel aux «pauvres riches», comme... (Rires.) ...le disait mon collègue tout à l'heure, pour qu'ils se solidarisent avec les «pauvres qui ne sont pas riches» !

Pour une question de solidarité républicaine, je vous demande de bien vouloir accepter cette initiative.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Je voudrais apporter un correctif par rapport à l'intervention de M. Jornot... Avec le boni de cette année, il ne faudrait pas trente ans, mais quelques siècles pour rembourser la dette, puisque ces 200 millions doivent d'abord couvrir la partie des investissements qui n'est pas financée par les amortissements contenus dans notre budget. Ainsi, avec ces fameux 205 millions, l'autofinancement positif se montait à 12 millions pour cette année. En réalité, il aurait fallu obtenir 400 millions de boni pour pouvoir rembourser la dette en trente ans ! Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas le faire, mais cela ne veut pas dire non plus que le seul moyen de diminuer la dette soit de passer par des opérations au compte de fonctionnement. La question est de déterminer ce que l'Etat doit conserver dans son patrimoine: ce qui est utile à la délivrance des prestations publiques et ce qui est un stockage ou une exploitation de locaux - on met en location des loyers généralement bas - ce que l'on peut, en fait, remettre sur le marché, puisque cela ne nous sert strictement à rien pour les tâches publiques.

Il y a des pistes, et je crois qu'il serait faux de nier l'objectif. Oui, si nous voulons que notre Etat vive dans une certaine stabilité financière, nous devons nous fixer un objectif à moyen terme, et même à long terme pour diminuer graduellement, par tous les moyens possibles, la dette de moitié.

J'aimerais dire également que le Conseil d'Etat n'exclut pas, en ce qui concerne l'objet précédent, de faire un jour une proposition disant que nous ne pourrons pas assurer telle ou telle prestation si un impôt n'est pas voté en contrepartie et de soutenir une proposition du type de celle que nous venons d'entendre, après avoir fait la preuve que le processus de rationalisation a été fait.

Par contre, le Conseil d'Etat ne soutiendra jamais cette deuxième initiative, pour une raison toute simple, qui n'est pas idéologique... En effet - et je suis désolé de vous le dire, Monsieur Velasco - sur ce point précis, la question n'est pas de savoir si les riches peuvent payer cet impôt ou non... Bien sûr, ils le peuvent ! La question est de savoir s'ils le veulent ! Et c'est là que la situation est délicate par rapport à une initiative de ce type.

L'impôt sur la fortune n'est pas le principal impôt à Genève. L'impôt principal est l'impôt sur le revenu ! De sorte que, pour un montant en fin de compte minime - en effet, l'initiative ne promet pas monts et merveilles en termes de recettes - si une poignée de très gros contribuables, qui se compte en dizaines - pas en centaines, pas en milliers - décidait de se délocaliser à Commugny - c'est joli Commugny... - eh bien, vous perdriez avec ceux-là, à cause de l'impôt sur le revenu, tout ce que vous auriez gagné sur tous les autres par l'impôt sur la fortune ! Et là, je dois tout de même vous dire que l'on sort du cadre de l'idéologie.

Le Conseil d'Etat est obligé de vous signaler que le moyen que vous prônez pour augmenter les recettes de l'Etat en mettant à contribution des contribuables aisés est vraisemblablement particulièrement mal choisi, parce que, vraisemblablement aussi, il pourrait conduire non pas à une augmentation des recettes, mais à une légère baisse. Certes, tous ne vont pas s'en aller, mais il suffit que quelques-uns s'en aillent pour que cela ait une incidence significative sur les recettes. Par conséquent, l'endroit où vous avez choisi de frapper n'est pas le bon.

Maintenant, je comprends - et je dirai que le Conseil d'Etat comprend - l'inquiétude de bon nombre de nos concitoyens, de ce parlement - une bonne partie de ce dernier, j'espère - par rapport à une répartition de plus en plus inégale des revenus. Mais j'aimerais aussi vous rappeler que la plupart des autres cantons suisses connaissent non seulement l'équilibre, mais n'ont pas de dette ! De sorte que la grande question qui se pose à eux aujourd'hui, c'est de savoir de combien ils vont baisser les impôts. Et nous devons tout de même tenir compte de cet état de chose au-delà de ce que nous aimerions. Si le but - cela concerne, je le répète, cette deuxième initiative et pas la première - est d'augmenter les recettes, vous avez une chance sur deux de ne pas l'atteindre, voire de perdre des recettes, parce que vous touchez un point sensible. Et il suffit que très peu de contribuables s'en aillent pour arriver au but inverse de celui qui est recherché. Certes, le taux est très bas, 0,06%, mais, sur les revenus IFD, impôt communal et impôt cantonal, le taux peut osciller entre 30 et 40% pour de très gros revenus. Alors, vous comprenez bien que lorsque vous aurez perdu 30 ou 40% d'impôt sur le revenu, hiiiii... (Rires.) ...cela sera très difficile à rattraper, même si la fortune est assez conséquente !

Donc, je pense sincèrement, même si j'adhère à l'objectif, que le moyen proposé dans cette initiative est assez clairement mal choisi. Et le Conseil d'Etat, sans un brin d'hésitation et avec une très grande unanimité, vous invite à rejeter ce texte. (Applaudissements.)

Mise aux voix, la prise en considération de l'initiative 131 est rejetée par 52 non contre 29 oui.

L'initiative populaire 131 est donc refusée.

Mis aux voix, le principe d'un contreprojet est refusé par 81 non (unanimité des votants).

Le Grand Conseil prend acte du rapport de commission IN 131-C.

PL 10023
Projet de loi du Conseil d'Etat approuvant le compte administratif de l'Etat de Genève et la gestion du Conseil d'Etat pour l'année 2006

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des finances.

PL 10024
Projet de loi du Conseil d'Etat concernant le bouclement de diverses lois d'investissements

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des finances.

PL 10029
Projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant au Conseil d'Etat divers crédits supplémentaires et complémentaires pour l'exercice 2006

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des finances.

PL 10016
Projet de loi de Mmes et MM. Michel Forni, Guy Mettan, Anne-Marie von Arx-Vernon, Gabriel Barrillier, Luc Barthassat, Mario Cavaleri, Catherine Baud, Jean Rossiaud, Pascal Pétroz, Marie-Françoise de Tassigny, Virginie Keller Lopez, Béatrice Hirsch-Aellen, Christian Brunier modifiant la loi sur l'Université (C 1 30) (Pour réévaluer le statut des maîtres d'enseignement et de recherche ainsi que des professeurs titulaires de l'Université de Genève, et redéfinir une procédure d'acquisition du titre de professeur adjoint dans le cadre d'une disposition transitoire exceptionnelle)

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de l'enseignement supérieur.

PL 10027
Projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit de 6'046'000F destiné à financer un système d'imagerie vidéo de la police

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des finances.

PL 10014
Projet de loi du Conseil d'Etat d'application des dispositions fédérales en matière de protection de la population

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission judiciaire et de la police.

PL 10015
Projet de loi de Mmes et MM. Jacques Jeannerat, Pierre Weiss, Christophe Aumeunier, Alain Meylan, Ivan Slatkine, Marie-Françoise de Tassigny, Guy Mettan, Michel Ducret, Gabriel Barrillier, Jacques Baudit, Pierre Kunz, Frédéric Hohl, Jean-Marc Odier, Patricia Läser, Louis Serex ouvrant un crédit d'étude de 3'500'000F pour la réalisation d'une traversée urbaine sous-lacustre de Genève

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des travaux.

PL 10025
Projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit d'investissement de 9'962'781F pour les travaux de rénovation des façades et toitures du bâtiment sud du Collège Calvin à la rue Théodore-de-Bèze

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des travaux.

PL 10026
Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites (L 4 05)

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission d'aménagement du canton.

PL 10017
Projet de loi de Mmes et MM. Antonio Hodgers, Esther Alder, Sylvia Leuenberger, Catherine Baud, Anne Mahrer, Mathilde Captyn, Jean Rossiaud, Emilie Flamand, Brigitte Schneider-Bidaux, Morgane Gauthier, Damien Sidler, Ariane Wisard-Blum, Michèle Künzler, Hugo Zbinden renforçant l'attractivité des transports publics

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des transports.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous retrouvons à 20h30. Je vous souhaite un très bon appétit !

La séance est levée à 19h.