Séance du
jeudi 21 septembre 2006 à
20h30
56e
législature -
1re
année -
11e
session -
53e
séance
M 1709
Débat
M. Christian Brunier (S). Dans les années quarante, l'Etat a construit un petit immeuble au 32, chemin des Maisonnettes à Lancy pour loger des jeunes en formation. Ensuite, l'Etat a mis cet immeuble en location; c'est l'Institut Florimont qui a loué cette petite maison pendant de nombreuses années. Elle contient vingt-cinq chambres pour loger des étudiants et quelques lieux communs, une cuisine et un salon. Aujourd'hui, Florimont est arrivé au terme de son bail. Depuis quelques mois, cette maison est totalement vide. On sait qu'aujourd'hui, à Genève, le besoin de logements est immense. Et le besoin de logements pour étudiants est important, puisqu'on estime le nombre de demandes non honorées à environ mille.
Nous demandons quelque chose de très simple: nous demandons au département d'agir le plus vite possible pour permettre à vingt-cinq étudiants de trouver un logement. C'est simple, c'est facile, et il n'y a pas beaucoup d'autres solutions. Il n'y a pas de projet d'aménagement dans le secteur, des échanges fonciers paraissent difficiles, puisque c'est une maison peu adaptée à d'autres types de logements: vingt-cinq chambres, une cuisine... Vous voyez les conséquences. Nous pensons donc qu'il y a urgence de redonner aux étudiants vingt-cinq chambres pour se loger.
Nous demandons donc au département, qui a visiblement de la peine à agir, de s'activer au plus vite et nous demandons le renvoi immédiat de cette motion au Conseil d'Etat.
M. Gilbert Catelain (UDC). Cette motion du groupe socialiste, à laquelle se sont ralliés pas mal de députés dans cette enceinte, part d'un constat qui est tout à fait juste. Effectivement, ce bâtiment était destiné au logement d'étudiants et il est actuellement vide. Il y a un potentiel de développement dans cet immeuble; la question est de savoir si on a la même philosophie de la notion de développement pour ce bien et si c'est le rôle de l'Etat d'endosser une tâche supplémentaire et de se transformer en bailleur pour des étudiants.
Le groupe UDC a une philosophie différente, plus libérale, qui vise à laisser à l'Etat les domaines dans lesquels il excelle, dans lesquels c'est son rôle d'agir, et de confier à d'autres acteurs ce type d'activité, à des gens parfaitement équipés pour le faire et qui le font professionnellement, pour rendre le même service sans que cela coûte forcément à l'Etat.
Donc, le groupe UDC va déposer une motion et invite ceux qui veulent se joindre à lui à la signer. Cette motion invite le Conseil d'Etat à initier dans les meilleurs délais la mise en valeur de cet immeuble, si elle est possible, à faire ensuite estimer sa valeur, à rechercher si un acquéreur est susceptible d'exploiter l'aménagement existant pour l'exercice même de son but statutaire. Il faudrait un investisseur à long terme davantage, intéressé par la capitalisation foncière que par le retour sur investissement à court terme. La motion invite également le Conseil d'Etat à imposer, dans le cadre de ce contrat de vente avec un investisseur à long terme, une condition contractuelle de destination de l'immeuble, pour qu'une population déterminée, en l'occurrence des étudiants, puisse occuper ce bâtiment. C'est donc une philosophie différente, selon laquelle l'Etat, finalement, aurait la possibilité de valoriser ce bien, puisqu'il en a actuellement grand besoin. Il a des biens, autant qu'il les valorise ! Cela permettra de loger des étudiants par le biais d'une clause contractuelle.
C'est pourquoi nous vous proposons de ne pas renvoyer directement la motion qui nous est proposée ce soir au Conseil d'Etat, mais de la renvoyer, au contraire, en commission, afin qu'elle puisse être traitée de manière conjointe avec la motion de l'UDC qui sera déposée d'ici au 26 septembre.
Le président. A quelle commission, Monsieur le député ?
M. Gilbert Catelain. La commission du logement.
Le président. Merci. Sont inscrits: M. Pierre Weiss, M. Hugues Hiltpold, M. Eric Stauffer, Mme Véronique Schmied, Mme Michèle Künzler et Mme Carole-Anne Kast. Autant dire que tous les groupes se seront exprimés. Par conséquent, la liste est close.
M. Pierre Weiss (L). Les considérants de cette motion sont apparemment pertinents. Tous, sauf un. Ils sont tous pertinents: le premier, le deuxième, le troisième, le quatrième, le cinquième. Malheureusement, je ne suis pas certain que l'on puisse déjà affirmer que l'Etat ne semble pas avoir de projet de densification et de construction sur cette parcelle. C'est précisément parce que l'on ne peut pas être certain de ce fait qu'il nous semble nécessaire de renvoyer cette proposition de motion en commission pour connaître la position du Conseil d'Etat. J'avoue, non pas être ému, mais avoir un certain attachement à ce bâtiment, puisque je l'ai connu du temps de ma jeunesse...
Des voix. Ah !
M. Pierre Weiss. ... et je souhaiterais effectivement que des étudiants puissent s'y trouver un jour. Mais ce n'est pas nécessairement par nostalgie que l'on doit prendre des décisions. Il y a peut-être des choix qui sont plus sages, et la commission sera certainement à même d'en décider. Le groupe libéral se prononcera en ce sens.
M. Hugues Hiltpold (R). Le groupe radical soutient le renvoi de cette motion à la commission du logement pour traiter non seulement de cette motion, mais aussi, d'une façon beaucoup plus générale, la problématique du logement pour étudiants.
Je voudrais vous rappeler à tous que notre Grand Conseil a voté il y a deux ans un projet de loi qui visait à doter de 10 millions une fondation de droit public pour la réalisation de logements pour étudiants. C'est la raison pour laquelle il est tout à fait opportun de renvoyer cette motion en commission du logement. D'une part, pour voir si cette fondation pourrait s'intéresser à cet immeuble particulier et, d'autre part, pour traiter de façon plus générale la problématique du logement et voir ce qui a été réalisé pendant ces dernières années.
M. Eric Stauffer (MCG). Le MCG va s'opposer au renvoi en commission et voter ce projet pour le renvoyer directement au Conseil d'Etat, puisque nous sommes très sensibles au nombre de logements pour les étudiants. Mais, à écouter les propos qui ont été tenus ici, nous constatons, Monsieur le président, que certains députés sont en contradiction avec leur groupe.
Le président. Ce sont des choses qui arrivent, Monsieur Stauffer.
Mme Véronique Schmied (PDC). Je crois que, le temps que tout le monde ait réfléchi sur ce qu'on veut faire de cette maison sur cette parcelle, on aura avantageusement, pour l'année qui vient, loué vingt-cinq chambres à vingt-cinq étudiants qui seront très contents ! C'est pourquoi le PDC va demander le renvoi au Conseil d'Etat de cette motion. (Applaudissements.)
Mme Michèle Künzler (Ve). Je pense exactement comme ma préopinante. Je ne vois pas pourquoi on perd du temps en débat. Ces jeunes ont déjà demandé cette maison; l'administration n'a pas répondu. Il y a des associations d'étudiants, notamment la Ciguë, qui peuvent très bien l'occuper pendant une année en s'engageant à partir après. Je ne vois pas pourquoi on réfléchit des heures avant de savoir ce que l'on va faire ! Louons ! C'est un scandale que cela reste inoccupé.
Nous sommes contre le renvoi en commission, parce que, franchement, pour une maison où il y a vingt chambres, on ne va pas faire une séance de commission qui nous coûte 1500 francs pour rien. Réfléchissons à des choses un peu plus concrètes !
Mme Carole-Anne Kast (S). Je crois qu'effectivement, il faut se rendre compte que cette motion demande une affectation directe de ces locaux vides. On a une maison qui est exploitable immédiatement, qui ne procure aucun rendement à l'Etat - je le rappelle pour ceux qui sont particulièrement soucieux de cette question - et qui, de plus, ne permet de loger personne... C'est une situation absurde ! C'est une situation ponctuelle, on en est bien conscients, mais c'est une situation absurde.
Alors, il y a une solution qui a été proposée par une association dont le but est de loger des personnes en formation... La solution ne va peut-être pas durer cinquante ans, mais en attendant, plutôt que de tergiverser, d'envoyer une motion en commission, d'en parler pendant trois semaines, qu'elle revienne à l'ordre du jour - elle ne passera probablement pas aux extraits parce que, pour des raisons dogmatiques, il n'y aura pas d'unanimité à ce propos - et qu'elle soit votée dans six mois, eh bien, pendant ce temps cette maison sera vide ! Moi je vais vous dire un truc: avec le débat qu'on a eu ce soir, j'espère bien que les squatteurs de la place se seront donné le mot. Parce que ce serait quand même difficile de ne pas profiter d'une telle aubaine !
Un bail, c'est résiliable, on ne le sait que trop bien. Pourquoi ne pas affecter ce soir cette maison au logement étudiant ? En faisant un bail de location avec la Ciguë ? La Ciguë, elle, établit des contrats de sous-location avec les étudiants. Et puis le Conseil d'Etat, en fonction de l'avancement de divers projets et de certaines choses qu'il pourrait avoir envie de faire avec cette parcelle, dialogue avec la Ciguë et voit comment on peut utiliser ces logements. Parce que ce n'est pas une solution qui est destinée à être définitive. Et pendant qu'on parle, des gens sont à la rue alors qu'il n'y a personne dans cette maison, et elle ne nous procure aucun rendement. C'est une situation aberrante.
C'est la raison pour laquelle on vous demande de voter cette motion, et de la voter ce soir, sans renvoi en commission.
M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat accepte la demande de renvoi en commission...
Une voix. Ah ! (Brouhaha.)
M. Mark Muller. ... pour la simple et bonne raison que le sort de cette maison n'est pas encore définitivement arrêté. Un certain nombre de pistes sont actuellement à l'étude. L'une d'elles est le relogement des personnes qui habitent actuellement les baraquements de Prébois, près de l'aéroport, lieu où devrait être construit un airpark à brève échéance. Les baux de ces baraquements à Prébois ont été résiliés et nous cherchons activement à reloger ces personnes. Cette maison pourrait être une solution de relogement, ce qui permettrait ensuite à cet airpark de se réaliser. Vous voyez bien l'intérêt qu'il y a, en termes économiques, en termes d'emploi notamment, à construire cet ouvrage.
Dans l'intervalle, on pourrait effectivement imaginer le logement temporaire et provisoire d'étudiants dans cette maison, mais il me paraît plus sage de renvoyer cette motion en commission, pour étudier la situation calmement et éviter de mettre le Conseil d'Etat sous pression avec cette motion.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1709 à la commission du logement est rejeté par 35 non contre 26 oui et 3 abstentions.
Mise aux voix, la motion 1709 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 41 oui contre 25 non.