Séance du
jeudi 30 mars 2006 à
17h
56e
législature -
1re
année -
6e
session -
29e
séance
Séance extraordinaire
La séance extraordinaire est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Michel Halpérin, président.
Assistent à la séance: MM. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat, Charles Beer, Laurent Moutinot, Robert Cramer, David Hiler, François Longchamp et Mark Muller, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Maurice Clairet, Roger Deneys, René Desbaillets, Sophie Fischer, Frédéric Hohl, Olivier Jornot, Georges Letellier, Eric Leyvraz, Jean Rossiaud, Françoise Schenk-Gottret et Pierre Schifferli, députés.
Communications de la présidence
Le président. Je vous informe, mais vous vous en êtes déjà aperçus, que les médias, notamment, les caméras et les appareils de photo, sont aujourd'hui un peu plus nombreux qu'à l'accoutumée et qu'ils sont autorisés à opérer dans cette salle, dans le respect de vos sphères de travail respectives, naturellement. Cette séance est retransmise en direct sur Léman Bleu, elle sera rediffusée ce soir à 20h30. Il y aura des enregistrements d'émissions radio et télévision dans la salle des Pas-Perdus.
Je voudrais saluer la présence aujourd'hui à la tribune d'un hôte d'honneur de Genève, M. Jean-Jack Queyranne, président du conseil régional Rhône-Alpes. (Applaudissements fournis.) Je salue également la présence de l'ancien président du Grand Conseil, M. Hervé Burdet, et celle de trois de nos anciens collègues: M. Albert Rodrik, M. Nicolas Brunschwig et M. Philippe Glatz.
Débat
M. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, l'occasion qui nous rassemble aujourd'hui est une occasion rare et porteuse de symboles. Le Conseil d'Etat fait usage de l'article 86 de notre constitution pour vous réunir en session extraordinaire. Aujourd'hui, nous entendons ancrer concrètement les engagements pris devant vous à l'occasion du discours de Saint-Pierre. Notre conseil a marqué sa volonté de restaurer la confiance et l'autorité, de retrouver la liberté pour innover et de gouverner autrement. Le gouvernement a souligné qu'il ne proposerait pas de hausses d'impôts tant qu'il n'aurait pas collectivement démontré sa capacité d'accélérer et de faire aboutir la réorganisation de l'Etat et qu'il présenterait un plan de mesures et un calendrier alliant efficience de l'action publique et rigueur de gestion.
Fidèle à son engagement du 5 décembre 2005, le Conseil d'Etat vous présente aujourd'hui son premier plan de mesures. Depuis trois mois, le gouvernement a travaillé, écouté, informé, négocié, il a tenu compte des avis exprimés par la population, les partis politiques, les partenaires sociaux et les collaborateurs de la fonction publique. Résultat: 73 mesures présentées ce soir dans un premier catalogue. Le premier chiffrage de ces mesures fait apparaître une économie annuelle supérieure à 100 millions de francs dès 2009. Elle sera atteinte par paliers dès 2006.
Ce plan de mesures traduit notre volonté commune de dégager des économies à travers de profonds changements dans l'organisation et dans la manière de travailler au sein de l'Etat et de son administration. Ces mesures couvrent de larges pans de l'action publique. Elles sont ciblées - elles ne seront cependant pas indolores. Leur mise en oeuvre nécessitera un effort important des collaboratrices et collaborateurs de l'Etat, avec lesquels notre Conseil a renoué le dialogue. Ce plan constitue la première étape vers le retour de l'équilibre financier fixé pour 2009. Il se compose de mesures d'économie, de mesures de rationalisation et de mesures d'efficience, il ne prévoit ni augmentation d'impôts, ni diminution des prestations.
Mesdames et Messieurs les députés, dans les circonstances difficiles que nous traversons, le Conseil d'Etat a travaillé sans tabou, en étudiant plus de 250 mesures. Chacune d'entre elles a été évaluée en fonction de son délai de mise en oeuvre possible, de son acceptabilité, des obstacles qu'elle aurait à affronter et, enfin, des économies qu'elle pourrait engendrer. Un certain nombre de ces mesures ont été écartées; d'autres doivent faire l'objet d'études complémentaires. C'est la raison pour laquelle nous déposerons un deuxième plan de mesures en septembre, conjointement au dépôt du projet de budget 2007. Et nous ferons de même en 2008.
Ce premier plan de mesures, qui fait l'objet de notre rencontre de ce jour, comprend des actions de niveaux très différents. Harmoniser les organigrammes et arrêter de confondre le rôle de cadre avec celui d'expert-métier nécessite de repenser l'organisation de l'administration. Réduire les normes de construction des ouvrages publics et éditer un cahier des charges pour le recours aux prestations par des tiers impose la rédaction de directives. Regrouper les services de l'administration comme le service des autorisations et patentes avec l'office cantonal de l'inspection du commerce, ou l'office de la main-d'oeuvre étrangère avec l'OCIRT, et mettre fin aux placards dorés implique des modifications réglementaires. Fusionner les caisses de retraite CEH et CIA et créer une fondation des immeubles administratifs de l'Etat nécessitera des modifications législatives. Réaliser les nécessaires transferts d'actifs aux entités contrôlées par l'Etat imposera une modification constitutionnelle.
Mesdames et Messieurs les députés, ce premier plan de mesures accompagne le projet de budget 2006 amendé sur lequel il déploie déjà des conséquences. Ce projet de budget amendé permet d'atteindre le petit équilibre défini dans la loi sur le frein à l'endettement. Ce résultat est obtenu en évitant le recours à l'augmentation d'impôts prévue dans le précédent budget, soit une ressource de 113 millions de francs. Il est également obtenu en renonçant à une diminution des prestations en matière de chômage et d'invalidité. Il confirme par ailleurs la détermination du Conseil d'Etat qui se traduit notamment par un effort accru pour contrôler les dépenses. Il présente ainsi les caractéristiques suivantes: pour la première fois depuis longtemps, les dépenses générales n'augmentent pas. Pour la première fois depuis longtemps, la masse salariale globale reste stable. Pour la première fois depuis longtemps, il fait suite à un accord passé avec la fonction publique dont les effets financiers sont intégrés dans le projet tel qu'il vous est soumis. Pour la première fois depuis longtemps, ce budget n'intègre pas de mesures aléatoires quant à leur réalisation. Enfin, ce budget présente une estimation prudente des recettes fiscales, établie sur la base des comptes 2005 tels qu'ils vous seront présentés le jeudi 6 avril prochain.
C'est dans cette perspective que nous vous demandons d'étudier ce premier plan de mesures et le projet de budget 2006 qui marque la volonté de l'Etat de se moderniser afin de sortir durablement notre canton de la spirale des déficits. Grâce à ses différentes sensibilités politiques, notre Conseil est animé par la détermination de se projeter vers l'avenir sans dogme ni tabou.
Nous rappellerons que les mesures annoncées et celles qui suivront, au-delà de leurs effets financiers mesurables, imposent d'ores et déjà à l'Etat de profondes réformes, de profondes réorganisations qui touchent à sa manière de travailler et qui bousculent les habitudes. Nous rappellerons aussi que l'on ne touche pas aux prestations publiques et que le dialogue entre l'Etat employeur et la fonction publique est renoué. L'accord que nous avons signé avec la fonction publique le 20 mars constitue d'ailleurs un pilier essentiel pour la réussite de notre action, tant il est essentiel que nous puissions nous appuyer sur l'action et sur la motivation de nos collaboratrices et collaborateurs, auxquels nous rendons hommage.
Réformer l'Etat sans augmenter les impôts ni restreindre les prestations directes à la population est un objectif ambitieux. Pour l'atteindre, la détermination du Conseil d'Etat elle seule ne suffit pas. Nous avons besoin de la vôtre. Vive la République, et vive Genève !
M. Pierre Weiss (L). A nous et aux citoyens, vous venez de dire, Monsieur le président, que vous vouliez restaurer la confiance. Or, vos créanciers, nos créanciers, nous écoutent et ne peuvent qu'être inquiets au vu de ce qui leur est présenté. Standard & Poor's, leur interprète, vous fera connaître bientôt son verdict. Entre-temps, les taux d'intérêts augmentent, votre marge de manoeuvre diminue, la stabilisation de la dette devient problématique. Les créanciers ne peuvent attendre 2009 et votre plan financier quadriennal, car vous avez abandonné un premier plan financier quadriennal: celui qui allait jusqu'à 2007. En le remplaçant par un autre, vous retardez le retour à l'équilibre.
Vous avez abandonné la rigueur, la rigueur dans la politique du personnel, en réintroduisant des automatismes salariaux dès juillet 2007. Au moins 17 millions ont été accordés contre des paroles. Vous prétendiez la paix sociale menacée. Qu'avez-vous obtenu ? En cas d'échec de votre politique, vous allez abandonner votre propre plan financier quadriennal et le «ninisme» qui l'inspire, en vous faisant les apôtres du «et-et»: et augmentation d'impôt et diminution des charges. Vous vous opposerez à la majorité de ce Grand Conseil, qui elle, veut le «ou-ou»: ou augmentation d'impôt, ou diminution des charges.
Le parti libéral genevois vous combattra ce 21 mai. Vous vous taisez encore sur des mesures essentielles telles la révision de la loi sur le chômage. Aujourd'hui, Berne vous écoute et n'entend rien. Vous êtes en retrait, en retrait sur la réforme du statut de la fonction publique, or, les citoyens vous écoutent. Votre silence est assourdissant ! Les libéraux vous écoutent, et ils sont déçus. Qui allez-vous entendre, qui allez-vous suivre ?
Au terme de ce premier acte d'un drame médiatiquement orchestré, vous décevez. Vous décevez par la modestie de vos propositions. Quand on compare les comptes 2005 avec les charges prévues au budget 2006 amendé, la différence n'est que de 41 millions: 0,6%. Voilà le résultat de trois mois d'effort. Certes, vos intentions sont justes et votre intelligence de la situation est grande. Votre volonté, toutefois, est faible et votre rhétorique, vague. «Gouverner autrement», ce n'est pas encore gouverner. Vos instruments sont partiellement adéquats: le contrôle interne, les normes IPSAS, GE-Pilote, mais ils sont nettement insuffisants.
Et puis, votre catalogue est un catalogue d'aveux. Aveux sur l'imposition, la réimposition de la rigueur pour le PLEND, aveux sur l'absence de rigueur sur l'absentéisme. Aveux sur les placards dorés, aveux sur les achats inutiles en fin d'année, aveux sur les journées inappropriées à l'hôpital.
Parti institutionnel attaché à la stabilité de l'Etat, le PLG ne vous fera pas trébucher dans votre plan quadriennal; il vous laissera trébucher seuls. Il sera donc critique sur le budget 2006 amendé, qu'il ne refuse pas d'emblée, il sera hyper-critique sur le budget 2007 et le deuxième plan de mesures, car notre but à nous aussi est de réussir ensemble, pour le bien de Genève, le retour à l'équilibre des finances, et surtout, la réduction de la dette, que vous n'envisagez pas.
M. Roger Golay (MCG). Le groupe parlementaire du Mouvement citoyen genevois a pris acte du premier plan de mesures du Conseil d'Etat visant à améliorer le fonctionnement de l'Etat, à maîtriser les dépenses publiques et à réduire la dette monétaire du canton de Genève. La volonté et le courage du Conseil d'Etat de vouloir réformer le fonctionnement des institutions sans diminuer les prestations essentielles au public sont à relever.
L'objectif de retrouver un équilibre budgétaire en 2009 nous paraît raisonnable et réalisable, dans la mesure où le Conseil d'Etat peut s'appuyer sur un partenariat solide avec tous les acteurs sociaux et économiques du canton. Le dialogue avec les associations du personnel de l'Etat doit absolument être privilégié afin de parvenir à la réalisation du projet formulé. En effet, la fonction publique a déjà fourni un effort financier considérable ces quinze dernières années, notamment suite aux nombreux blocages des mécanismes salariaux, pour répondre à divers plans quadriennaux. Il est donc impératif de redonner confiance aux collaboratrices et collaborateurs de l'administration, confiance nécessaire et primordiale pour accroître l'efficience de l'Etat et réussir d'une manière dynamique la réalisation de cette réforme.
Nous prenons également acte de la décision du gouvernement de transférer des actifs à des entités contrôlées par l'Etat pour obtenir une dette inférieure à treize milliards de francs en 2009. A ce propos, nous restons dans le flou, faute de renseignements plus précis sur les intentions du Conseil d'Etat.
Par ailleurs, nous regrettons qu'aucun plan plus déterminé de relance économique du secteur privé ne soit proposé ce soir. Nous attendons du Conseil d'Etat des mesures urgentes pour améliorer la construction de logements et la création d'emplois, source indispensable de nouveaux revenus pour les finances publiques. Ce soir, nous n'allons pas nous prononcer sur le détail des 73 mesures annoncées par le Conseil d'Etat. Celles-là feront l'objet d'une étude plus approfondie par notre groupe.
Pour conclure, nous saluons les excellentes dispositions du Conseil d'Etat dans l'établissement de son premier plan de travail et l'en remercions.
M. Gabriel Barrillier (R). Lors des dernières élections au Grand Conseil et au Conseil d'Etat, les radicaux se sont clairement exprimés en faveur de la restauration du rôle et de l'autorité de l'Etat, pour freiner aussi bien les déviations individualistes que l'activisme de blocage de certaines catégories; pour le rétablissement de la confiance dans le fonctionnement et l'efficacité des institutions; pour la capacité du gouvernement à réorganiser l'administration et à en diminuer le coût; pour rétablir finalement des finances saines et, à terme, réduire la dette.
En décembre, le nouveau gouvernement de centre-gauche s'est engagé à présenter un nouveau budget 2006 accompagné d'une méthode pour rééquilibrer les finances d'ici 2009. Bons princes et confiants, nous lui avions donné sa chance. Sur la forme, il a tenu les délais et c'est un élément très positif: ce gouvernement tient parole. Il est de bonne foi. Sur la méthode, le Conseil d'Etat a d'emblée limité sa liberté d'action en choisissant de ne toucher ni aux recettes ni aux prestations, mais en tablant sur une hausse substantielle des recettes durant quatre ans et, surtout, sur un gain de productivité de 5%, soit à peu près, Monsieur le ministre des finances, 325 millions en quatre ans.
Sa méthode repose sur la négociation et non sur la coercition. C'est un pari courageux. Au patient malade, il a prescrit l'homéopathie durant quatre ans, plutôt qu'une bonne saignée... (Rires.) ...nous pourrions faire crédit à cette posologie, Monsieur le docteur Unger, mais il est vrai que nous sommes un peu échaudés par deux récentes mesures que vous avez prises, c'est-à-dire le rétablissement des mécanismes salariaux, qui ne permettra sans doute pas de juguler la masse salariale qui plombe le ménage de l'Etat et, deuxième mesure, vous avez refusé de soutenir le projet de loi constitutionnel sur le frein aux dépenses. Ces deux rebuffades nous fâchent, il est vrai, et nous rendent quelque peu méfiants. A considérer maintenant les 73 mesures et le projet de budget 2006 que nous avons examiné rapidement, puisque nous avons reçu les documents, comme tous nos collègues, il y a quelques minutes, nous sommes disposés à vous faire crédit. (Rires.)
Une voix. C'est bien ! (Rires.)
Une autre voix. Tu prends des risques ! (Rires.)
M. Gabriel Barrillier. Le budget, certes déficitaire à raison de 317 millions, est dans la cible du frein au déficit. C'est - et cela me paraît important - un budget-vérité, qui ne laisse, semble-t-il, rien dans les tiroirs, notamment du côté de l'Hospice général, de l'assurance-maladie ou de l'OCPA.
Quant aux 73 mesures, à première vue, après une première lecture rapide, je ne vous cacherai pas qu'elles nous ont déçus. Et puis, en les étudiant, dans un laps de temps très restreint, nous nous sommes aperçus qu'elles avaient un grand potentiel d'économies: vous annoncez 100 millions pour ce premier train, d'ici 2009. Malheureusement, vous n'avez pas de calendrier. Surtout, notre groupe attend l'arme au pied le deuxième train de mesures que vous allez proposer avec le budget 2007 et ce deuxième train de mesures, Messieurs du gouvernement, démontrera le sérieux et la consistance de votre méthode.
Mesdames et Messieurs les députés, les citoyennes et les citoyens de ce canton, singulièrement, les acteurs économiques, les chefs d'entreprises, les artisans et sans doute aussi les acteurs de la place financière - je laisserai M. Cuendet s'exprimer à ce sujet - ont un urgent besoin de stabilité et d'apaisement politique pour pouvoir exercer leurs activités et leurs responsabilités dans les meilleures conditions possibles. Ils veulent que notre Conseil assainisse les finances, réduise le coût de l'Etat, et donne plus d'efficacité à l'administration. Aussi, le groupe radical est prêt à collaborer à cet effort de restauration, dans un esprit tout à fait critique et constructif. (Applaudissements.)
Le président. J'ai salué tout à l'heure la présence du président de la région Rhône-Alpes, mais il n'était pas encore arrivé ! Maintenant, il est arrivé, et je le salue donc à nouveau. (Applaudissements nourris.)
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Contrairement à certains, notamment aux libéraux, les socialistes saluent la démarche entreprise par le Conseil d'Etat de ne pas agir dans la précipitation pour rétablir les finances publiques. Les socialistes l'ont toujours dit: les déficits publics posent problème, mais ce n'est pas en les rétablissant à la hussarde que l'on arrivera à quelque chose. De plus, ce sera toujours les plus démunis qui feront les frais des mesures hâtives.
Nous sommes donc pour une gestion durable des finances publiques et je crois que c'est le chemin qu'a voulu prendre le Conseil d'Etat. Nous avons pris acte de sa volonté de ne proposer ni hausses d'impôts ni baisses de prestations tant qu'il ne sera pas prouvé qu'on ne peut pas faire d'économies en améliorant le fonctionnement de l'Etat. Cela, nous pouvons y souscrire, mais notre position dépendra aussi de l'analyse des différentes mesures d'économies qui sont proposées. Nous tenons à dire que cette appréciation plutôt favorable n'est toutefois pas un blanc-seing donné au Conseil d'Etat.
Il faut être conscients que les mesures qui sont préconisées ne pourront pas déployer des effets dans l'immédiat et c'est pour cela qu'il faut se donner le temps de les examiner. Forcément, elles seront échelonnées dans le temps. Dans une année ou deux ans, il faudra voir quelles mesures sont efficaces, en concertation avec la fonction publique. Je crois qu'à ce niveau le Conseil d'Etat a pu conclure un accord qui va dans le bon sens. Je souhaite quand même mentionner que les finances de l'Etat sont aujourd'hui principalement confrontées à une crise des recettes. Je le rappellerai une fois de plus, l'entrée en vigueur de l'initiative des libéraux réduisant les impôts plombe le budget de l'Etat d'environ 300 millions chaque année. Il faut maintenant arrêter de faire des déclarations démagogiques, arrêter de promettre à la population une amélioration de la situation grâce à des baisses d'impôt, même si c'est actuellement à la mode. Il faut vraiment cesser avec ce discours complètement irresponsable.
Les mesures qui nous sont proposées aujourd'hui ne sont pas chiffrées, c'est pourquoi il est difficile d'en livrer une analyse détaillée, mais, pour nous, certaines d'entre elles sont extrêmement intéressantes et prometteuses. Pourtant, nous ne pourrons pas souscrire à toutes. Par exemple, nous sommes bien sûr favorables aux mesures qui concernent l'amélioration de la productivité de l'administration fiscale et notamment, à la volonté de rompre avec les retards de taxation - puisque faire rentrer correctement l'impôt est une des premières obligations de l'Etat - afin que l'Etat puisse disposer de recettes en suffisance. Dans le domaine de la santé, les mesures qui proposent par exemple de trouver 5% d'aidants naturels, nous paraissent à la fois irréalistes et dangereuses. En effet, ces mesures impliquent de tabler sur le bénévolat. Cela sera très difficilement évaluable, et je pense que vouloir substituer la famille ou les proches aux professionnels est quelque chose d'éminemment dangereux. Ce type de mesures, nous ne pourrons pas y souscrire. De même, vouloir diminuer le nombre de journées d'hospitalisation est tout à fait louable, mais où allons-nous fixer la limite ? Je crois qu'actuellement des mesures de ce type ont déjà été prises. Il ne faudra pas abuser avec ce genre de choses. Enfin, nous pouvons aussi souscrire à des principes de limitation drastique de l'appel à des intervenants extérieurs, notamment, à des consultants externes, qui, nous l'avons dit à plusieurs reprises, coûtent extrêmement cher. Par contre, nous sommes par exemple tout à fait opposés à ce que l'on transfère à des privés la maintenance ou l'entretien de bâtiments administratifs sous prétexte d'économies, qui ne sont pas du tout prouvées et qui peuvent entrer en contradiction avec la lutte contre le travail au noir, qui était je crois un des objectifs du Conseil d'Etat.
Vous l'avez vu, il y a un peu de tout, mais je crois que la volonté du Conseil d'Etat de faire un budget-vérité et non un budget-cosmétique, comme ceux auxquels nous avons été habitués auparavant, est déjà quelque chose qu'il faut absolument saluer. Nous examinerons bien sûr toutes les mesures proposées avec beaucoup d'attention et nous veillerons à ce que certaines mesures d'économies n'aboutissent pas à des baisses des prestations fournies à la population. Pour le reste, mon collègue Alain Etienne commentera encore certaines mesures dans son intervention. (Applaudissements.)
Mme Michèle Künzler (Ve). Il nous incombe aujourd'hui de prendre acte de l'engagement du Conseil d'Etat. Il s'engage dans la durée à rétablir les finances et à s'attaquer ensuite au problème de la dette. Notre responsabilité à tous est ici engagée: il y a l'engagement pris par le Conseil d'Etat, et nous sommes reconnaissants qu'il se soit tenu au délai fixé et qu'il ait proposé ces mesures, qui restent à examiner concrètement. Notre responsabilité à nous est de lui rappeler l'engagement qu'il a pris, puisqu'au fil du temps on oublie parfois ce que l'on a promis. Mais nous sommes là pour veiller à ce que les engagements soient respectés et pour veiller à ce que les mesures ne causent aucun dommage à la population. C'est cela qui est important, c'est pour elle que nous travaillons.
C'est vrai que ces mesures ne sont pas très spectaculaires; je crois que beaucoup de gens ici étaient déçus, je pense que certains voulaient du sang et des larmes, certains attendaient le grand frisson politique. C'est vrai qu'il n'y a rien de très affriolant à s'entendre annoncer 1% de moins, mais j'aime mieux qu'on nous annonce 1% de moins chaque année et qu'on s'y tienne. C'est cela qui est important pour nous: de revenir enfin à un principe de réalité et d'arrêter de courir après des mesures complètement absurdes. Revenons à ce principe de réalité et rétablissons la confiance. Commençons ici et maintenant un nouveau contrat de confiance ! (Applaudissements.)
M. Yves Nidegger (UDC). Le groupe UDC a parcouru avec intérêt les 73 mesures et mesurettes contenues dans le premier plan qui nous a été livré aujourd'hui. Il les a même lues avec une certaine satisfaction, croyant au passage y détecter comme source, pour une partie d'entre elles, son propre plan de législature édité pour les années 2005-2009.
Les mesures, pour une partie, ne sont donc pas mauvaises, même si, et c'est un bémol important, elles s'inscrivent peut-être dans une démarche absurde, qui à terme, pourrait les rendre tout à fait vaines. Car, à vouloir satisfaire tout le monde, le Conseil d'Etat accouche d'un plan de sauvetage qui est peut-être mort-né, puisque l'ambition et le timing ne sont pas du tout adéquats par rapport à ce dont il s'agit, c'est-à-dire: sauver Genève d'une faillite annoncée depuis des années. On savait que le modèle bernois inspirait le Conseil d'Etat. On n'imaginait pas que c'étaient les lenteurs génétiquement contenues dans ce modèle qui allaient être les plus visibles dans les premières mesures proposées. (Commentaires.) J'ai moi-même des origines bernoises, j'assume la chose. Les quatre sur sept des conseillers d'Etat qui proposent ce plan étaient présents au cours de la magistrature précédente et, comme l'a relevé le parti libéral, un certain nombre de ces mesures sont au fond des aveux, et on peut s'en réjouir: la vérité est toujours le début du changement. Il ne faut pas néanmoins réinventer l'eau chaude, ou mettre trop d'espoir dans des mesures qui sont frappées au coin du bon sens, mais qui ne suffisent pas en elles-mêmes.
J'aimerais rappeler que le budget 2005 prévoyait 290 millions de déficit et que, si les comptes sont justes, à ce qu'on nous en présente, on parle de 434 millions de déficit pour 2005, c'est-à-dire un dérapage de 144 millions par rapport au budget, un dérapage de 50% du déficit. De plus, on peut craindre que l'or de la BNS, dont on ne parle pas encore, ait pu servir éventuellement à camoufler un déficit plus ample encore, alors qu'il avait été demandé qu'il soit affecté - je crois que le Conseil d'Etat s'y était engagé - à la réduction nominale de la dette cantonale. Même si le Conseil d'Etat bénéficie d'un état de grâce tout à fait remarquable dont il nous demande la prolongation pour trois ans de plus, cela ne lui suffira pas à assurer des réformes et cela ne suffira pas à garantir que ces 317 millions de déficit pour 2006 ne seront pas dépassés dans la même ampleur que l'ont été les déficits des années précédentes. Quand bien même ces 317 millions de déficit étaient maintenus, comme rien n'est fait pour juguler la dette, qu'on laisse filer, on peut craindre que tous ces efforts, par ailleurs méritoires, n'aboutissent à rien. Parce qu'en plus de 317 millions qu'il faudra financer en augmentant la dette, il y a 300 millions d'investissements qui ne pourront être financés que de la même manière. Il y a probablement 200 millions à décaisser pour les pertes de la fondation de valorisation. Au bas mot: 800 millions de francs vont devoir être empruntés chaque année, ce qui nous laisse augurer, au jour du petit équilibre visé pour 2009, d'une dette monétaire de 18 milliards. Ce ne sont pas les 450 millions d'actifs qu'on pourrait vendre aux SIG qui vont changer fondamentalement la donne. Or, avec 18 milliards de dette monétaire, chaque augmentation de 1% du taux d'intérêt signifie 180 millions de déficit supplémentaire, et cela suffit à ruiner les espoirs d'assainissement les plus fondés.
L'UDC regrette que l'on n'inscrive pas la réforme de l'Etat, dont on admet enfin qu'il est quelque peu surdimensionné et que son efficience peut être grandement augmentée, que l'on n'inscrive pas cette réforme dans un cadre plus net et surtout plus chiffrable. La proposition d'avoir comme objectif de réduire la fonction publique du grand Etat de 5000 postes sur quatre ans en utilisant les départs naturels aurait permis de chiffrer et d'inscrire les mesures qui sont proposées et dont beaucoup sont bonnes, dans un cadre qui aurait pu permettre d'espérer des réalisations beaucoup plus efficientes. Il faudra le dire un jour: l'Etat doit être réduit de manière beaucoup plus drastique que cela est proposé. L'ensemble des subventions doit également être cadré. Une baisse de 10% serait une bonne entrée en matière. (L'orateur est interpellé.) Et puis, de grands chantiers constitutionnels doivent être ouverts, notamment celui de l'absorption de la structure administrative de la Ville de Genève dans la structure cantonale, cadre qui permettrait certainement beaucoup plus de fonder des espoirs de gain d'efficience par la structure de la fonction publique que les mesurettes annoncées par le Conseil d'Etat.
Pour faire court et simple, si on devait voter un budget déficitaire de 317 millions et qu'effectivement l'or de la BNS avait déjà été englouti dans l'exercice précédent, alors le groupe UDC ne voterait pas un tel budget.
M. Guy Mettan (PDC). Je vais peut-être vous surprendre, mais j'ai un mot pour qualifier ce qu'on vient d'apprendre, c'est «content». (L'orateur est interpellé.) Le PDC est en effet content d'apprendre le contenu de ce budget. Je sais que cela peut surprendre dans cette enceinte, parce qu'il y a quelques mois, certains espéraient, d'autres craignaient que le déficit budgétaire ne tourne aux environs de 500 millions de francs. Eh bien non, le déficit qu'on nous présente aujourd'hui correspond exactement à ce que j'ai dit ici au mois de décembre...
Des voix. Aaaah ! (Brouhaha.)
M. Guy Mettan. Merci de le reconnaître ! J'avais dit que nous voterions un budget qui serait équivalent à celui qu'on nous avait présenté en octobre, à savoir, autour des 300 millions de francs. C'est le cas ce soir et je tiens à le souligner.
Deuxième motif de satisfaction: la vision de l'Etat qui nous est présentée ce soir correspond celle à laquelle le PDC est attaché. Je vais vous expliquer pourquoi. Dans le système politique suisse, nous avons grosso modo quatre conceptions de l'Etat: celle de la droite plus extrême, disons, l'UDC, pour ne pas les citer, qui consiste à tenir un discours nationaliste, à dire, la Suisse d'abord, pour mieux masquer le fait qu'on veut détruire l'Etat, qu'on veut s'y attaquer de toutes les manières possibles. Nous avons la conception de l'Etat de la gauche, qui consiste à dire: vive l'Etat, vive l'Etat patron, vive l'Etat employeur qui se mêle de fournir des services que les entreprises privées peuvent très bien assurer. Ce n'est pas la vision du PDC. Nous avons aussi une vision, du côté du parti radical suisse - pas du parti radical genevois, dont je salue ce soir le pragmatisme - mais disons du côté radical-libéral au niveau suisse, une conception de l'Etat qui consiste à le dénigrer systématiquement, à dire: l'Etat cela ne va pas, il faut moins d'Etat, nous n'en voulons plus... Bref, c'est la conception de gens qui revendiquent le pouvoir tout en le critiquant sans cesse. Je ne m'étonne donc pas si, au niveau national, le parti radical et le parti libéral ont des problèmes d'élection: à quoi bon élire des gens qui dénigrent le pouvoir auquel ils aspirent ? (Chahut. Rires.) Et nous avons une quatrième conception de l'Etat, qui est celle du PDC... (Rires.) ...qui consiste à dire, comme l'a rappelé notre estimé président, M. Pierre-François Unger, qu'un bon Etat, c'est un Etat qui doit s'adapter, qu'on doit réformer et à qui on ne doit pas confier des tâches que les entreprises privées peuvent très bien effectuer. C'est celle qu'on est en train de nous présenter à travers le plan de mesures qui nous a été exposé ce soir.
Autre motif de satisfaction, le troisième: c'est de voir qu'enfin la République de Genève semble être gouvernée, et que cet effet de bonne gouvernance, on le doit à son président, M. Pierre-François Unger, (Chahut, applaudissements, rires.) On a enfin le sentiment qu'il y a un pilote dans l'avion, assisté d'un excellent co-pilote, M. David Hiler...
Des voix. Ah ! (Applaudissements.)
M. Guy Mettan. ...et de cinq ingénieurs de vol qui remplissent leur mission avec compétence. (Chahut.)
Une voix. Swissair ! (Rires.)
M. Guy Mettan. Toute allusion à une compagnie nationale...
Le président. Monsieur le député, veuillez poursuivre votre atterrissage, je vous prie !
M. Guy Mettan. Je remercie mes collègues de m'applaudir avec bruit et enthousiasme. J'aimerais maintenant revenir sur le fond, sur les mesures qui nous sont proposées. Première chose: pour la première fois, en tous cas depuis que je siège dans ce Grand Conseil, on est en train de sortir des stratégies à court terme. Les quatre dernières années, à quoi avait-on assisté ? A un bricolage budgétaire, auquel j'avais participé, je le reconnais, un bricolage qui nous amenait à grignoter dix millions par-ci, 20 millions par-là, 15 millions par-ci, qui était ensuite combattu en référendum, et qui a, chaque fois, mené à des échecs. Cette stratégie suicidaire, nous n'en voulons plus, et, on peut le voir dans les propositions du Conseil d'Etat, c'est pour cela qu'elles nous paraissent bonnes dans la forme. Je ne discute pas de la qualité de chaque mesure, c'est une tâche que nous accomplirons dans les mois qui vont suivre.
Deuxième chose, concernant la fonction publique: le Conseil d'Etat a mené des discussions, c'est effectivement son droit, c'est même son devoir en tant qu'employeur, avec les collaborateurs de la fonction publique. Très bien. Mais cet accord n'est pas tout à fait satisfaisant de notre point de vue, parce qu'il amène des concessions, notamment salariales, avec lesquelles nous ne sommes pas forcément d'accord. Mais c'est un pas provisoire et on peut entrer en matière, sachant que nous, démocrates chrétiens, nous appuierons le projet de loi sur la révision du statut de la fonction publique. D'après nos estimations, puisqu'il y aura probablement un référendum, la nouvelle loi entrera en vigueur en 2008. Dans notre esprit, l'accord que le Conseil d'Etat a pris avec la fonction publique ne peut être que temporaire, c'est-à-dire, viser l'année 2006-2007, puisque cette loi est impérative pour l'avenir de Genève et qu'elle doit entrer en vigueur le plus rapidement possible.
Enfin, nous allons évidemment étudier avec soin le catalogue des mesures envisagées, mais nous attendons qu'elles soient appliquées jusqu'à la fin de la législature, parce que nous ne voudrions pas que le Conseil d'Etat, c'est humain, cherche au fond à gagner du temps, et attende que la reprise économique amène des recettes fiscales qui permettraient d'abandonner ces mesures en cours de route. Nous aimerions que ce train de mesures soit fixé dans une loi contraignante, qui soit valable jusqu'à la fin de la législature, pour ne pas qu'on l'abandonne en cours de route sous prétexte que les affaires vont mieux.
En effet, le problème, c'est la dette, et cela reste une priorité, notre priorité principale. C'est pourquoi nous souhaitons qu'au mois de septembre il y ait non seulement un deuxième train de mesures, mais que, conformément à la loi sur le frein au déficit, dont la première partie est entrée en vigueur au mois de janvier de cette année, le Conseil d'Etat nous présente son plan financier de redressement tel qu'il est exigé dans cette loi. Nous espérons aussi que le peuple genevois, si possible avec au moins la forte minorité du Conseil d'Etat, appuie la mise en vigueur du deuxième volet du frein au déficit sur lequel il devra se prononcer le 21 mai prochain. (Applaudissements.)
M. Alain Etienne (S). Les socialistes saluent le travail d'explication à grande échelle sur les finances publiques que le Conseil d'Etat est en train d'effectuer. Il s'agit d'une approche basée sur la concertation et sur la transparence, notamment en matière de réforme de l'Etat. C'est une question de méthode. Contrairement à l'Entente, avec son projet de loi sur l'abrogation du statut du personnel de l'Etat, le Conseil d'Etat a décidé d'aller de l'avant dans la voie de la concertation.
Autre élément très important: le Conseil d'Etat n'a pas touché aux prestations sociales destinées aux personnes les plus fragilisées de la population, notamment les chômeurs, ce que nous saluons également.
Quelques remarques encore sur les mesures présentées. Il est question de réduire l'absentéisme, d'accroître la productivité du personnel de l'Etat... Il faut analyser les raisons de cet absentéisme à l'Etat et, donc, garantir de bonnes conditions de travail. Si on augmente la productivité, il ne faut pas que ce soit au détriment du personnel de l'Etat.
Annualiser le temps de travail là où c'est possible... Cela doit également se faire en concertation avec le personnel, sur une base volontaire.
Au sujet des achats, nous avons noté que vous proposez de passer par une centrale d'achat. Au premier abord, cela peut effectivement sembler une bonne idée, mais il faut prendre garde de ne pas passer les contrats avec des grandes entreprises commerciales. Ceci pour préserver l'économie de proximité. Par rapport au développement durable, il faut également passer par les petites et moyennes entreprises que compte notre canton.
Concernant l'organisation de l'administration, vous proposez de diminuer les commissions officielles de 25%. Certes, elles sont un peu trop nombreuses, mais il ne faut pas oublier qu'elles servent également de relais avec la société civile, en permettant le débat. Et il ne faudrait pas perdre ce relais.
Au chapitre de l'enseignement et formation, le parti socialiste tient à saluer les mesures visant à renforcer la formation continue du personnel de l'Etat. Sur ce point également, nous vous soutiendrons.
Dans le domaine de la construction, le parti socialiste souhaiterait avoir des explications, car vous parlez de responsabiliser les mandataires dans les procédures d'autorisations de construire. Vous proposez également de simplifier et d'accélérer ces procédures, c'est un sujet récurrent... (Exclamations.) ...mais, sur ce point aussi, le parti socialiste voudrait avoir des explications.
Dans les annexes, figure l'augmentation du fonds d'équipement communal. Nous nous en réjouissons, mais il faut également voir comment il serait possible de renforcer la péréquation financière, afin que les communes très riches de notre canton contribuent à l'effort commun.
En conclusion, les socialistes estiment qu'il faut se placer dans une optique de gestion durable des finances publiques, afin de préserver l'intérêt général et de maintenir les prestations de service public à la population. (Applaudissements.)
M. Pierre Losio (Ve). Notre groupe prend acte avec satisfaction des mesures proposées par le Conseil d'Etat pour des raisons de crédibilité. Déjà dans le discours de Saint-Pierre, il parlait de restaurer la crédibilité et l'autorité de l'Etat. Jusqu'à aujourd'hui, le Conseil d'Etat a fait un parcours que nous devons saluer, car nous sentons bien, derrière les discours, dans la posture des conseillers d'Etat lorsqu'il nous arrive de discuter avec eux dans les commissions, qu'ils adhèrent véritablement à la politique qu'ils défendent. Je crois que notre canton avait bien besoin d'une telle crédibilité, particulièrement le parlement, pour pouvoir travailler de manière positive avec un exécutif à qui il reconnaît cette qualité.
Pour nous, cette crédibilité est également étoffée par les propositions du Conseil d'Etat, pas seulement par leur contenu, mais parce qu'il a défini des objectifs extrêmement clairs: le déficit structurel doit être résorbé en quatre ans et, ensuite, la diminution de la dette. Par rapport à ces objectifs, il propose des trains de mesures, fixées dans le temps avec un calendrier et en suivant une méthode rigoureuse. De plus, nous allons bientôt pouvoir disposer de certains outils comme le contrôle interne, les normes IPSAS et GE-Pilote, qui seront des indicateurs positifs et utiles au gouvernement.
Mais il y a plus... Je trouve que toutes les mesures proposées par le gouvernement montrent une très grande humilité. Ma collègue Michèle Künzler et moi-même n'avons pas eu la vivacité de notre collègue Barrillier, qui a pu lire deux fois les 73 mesures proposées... Quoi qu'il en soit, celles que nous avons lues nous semblent pleines de bon sens. On parle de ces mesures depuis très longtemps, mais il nous paraît qu'aujourd'hui le Conseil d'Etat a une réelle volonté de les appliquer.
Bien entendu, limiter les coûts de communication, limiter le renouvellement du parc informatique, concentrer les achats par le biais de cette fameuse centrale, limiter le recours à des experts externes, ne constituent pas des mesures spectaculaires, et certains se sont peut-être trompés de rendez-vous ce soir s'ils attendaient - comme me le disait ma collègue Künzler - du sang et des larmes... Eh bien, il n'y a rien d'extraordinaire dans tout cela ! Que ce que le Conseil d'Etat avait indiqué au début du mois de mars, à savoir qu'il présenterait un train de mesures à la fin du mois de mars concernant la réforme de l'Etat !
C'est probablement l'élément important de ce soir: c'est de voir que la réforme de l'Etat est en train... J'allais dire que le bateau est sur les rails, comme le disait un de mes excellents collègues de la commission des finances ! (Rires.) En tous cas, on sent que le Conseil d'Etat a une véritable volonté d'appliquer son programme. Nous ne pouvons que nous réjouir - cela figure même dans le programme de notre parti - de constater que l'on va harmoniser et réduire les échelons hiérarchiques, alléger les états-majors... Ce sont des mesures de bon sens que nous défendons depuis fort longtemps. Nous sommes effectivement satisfaits de ce que vient de nous proposer le Conseil d'Etat, mais nous n'en sommes pas surpris ! Nous nous alignons avec lucidité sur ce train de mesures et la volonté politique qui a cette grande qualité qu'elle ne se limite pas à des mesures «aspirine», comme il y en a eu par le passé. On pensait qu'il suffisait de «bricoler» des mesures pendant une année pour résoudre les problèmes, mais, quand ils sont structurels, ils persistent. Jusqu'à maintenant le Conseil d'Etat fait preuve de beaucoup d'humilité et de bon sens; il prend des mesures à court terme, à moyen terme et à long terme, ce qui ne peut que nous réjouir.
Pour autant, je n'ai pas oublié les derniers mots prononcés par le président du Conseil d'Etat tout à l'heure disant qu'il avait besoin de nous. Le Conseil d'Etat a besoin du Grand Conseil pour mener à bien cette tâche. En tous cas, nous - les Verts - nous sommes prêts à le soutenir, tout en restant très attentifs et en rappelant le gouvernement à ses responsabilités s'il le faut.
Nous avons observé quelles étaient les postures des différents groupes politiques jusqu'à maintenant. Il faut dire que la conjoncture politique n'a été choisie par personne: le peuple a voté un parlement nettement à droite et un gouvernement modéré - centre gauche, diraient certains...
Quelle majorité pourrait soutenir ce gouvernement ? Elle s'est exprimée de manière un peu informelle: certains ont exprimé leur disponibilité, d'autres leur satisfaction, nos collègues radicaux apportent un soutien critique, l'arme au pied, et, enfin, l'UDC s'y oppose - ce qui ne nous surprend pas - en disant qu'il faudrait prendre des mesures beaucoup plus drastiques, entraînant des dommages dans la population, comme une diminution linéaire de 10% des subventions. Effectivement, une telle mesure évite de réfléchir et tout un tas de réunions ! Cela simplifie beaucoup les choses.
Et puis, le parti libéral a déclaré très clairement qu'il combattrait le Conseil d'Etat - c'est ce que j'ai cru comprendre dans les propos alarmistes et enflammés du député Weiss. (Commentaires.) Nous en prenons acte !
Nous ne savons pas combien de temps cette majorité durera, mais, en tous cas, tant que le Conseil d'Etat restera cohérent avec ce qu'il dit, il se trouvera probablement, dans ce Grand Conseil, des députées et des députés pour le soutenir.
Avant de terminer, je tiens encore à souligner que nous constatons avec satisfaction que ces mesures ne touchent pas les missions essentielles de l'Etat: l'Etat continue à assumer ses missions fondamentales, le Conseil d'Etat réaffirme que la précarité d'une grande partie de la population n'augmentera pas.
En conclusion - je ne pouvais pas deviner ce qui allait être dit par certains - j'ai presque envie de faire cette citation: «Je ne crois pas que les chances de succès des réformes soient plus ou moins élevées en fonction de la configuration politique des pouvoirs. Le facteur essentiel est la volonté partagée par tous les partis de changer un certain nombre de choses.» Je constate que cette volonté n'est pas partagée. En tous cas et pour notre part, nous faisons confiance au Conseil d'Etat. La citation est de Mark Muller, conseiller d'Etat libéral... (Rires et applaudissements.)
M. Renaud Gautier (L). Un adage populaire dit: «Balai neuf, balaie mieux !»... (Exclamations.)Vous me permettrez quand même, moi qui ne sais pas lire dans les boules de cristal - alors que la plupart des députés dans cette salle arrivent à tirer des conjectures sur l'avenir... (L'orateur est interpellé par M. Barrillier.) Oui, mais ça on le sait, Gabriel, on le sait ! (Rires.) Vous me permettrez donc quand même de dire que le point d'orgue de ce soir - qui fait suite à ce conclave, à cette pièce qui s'est jouée il y a maintenant trois mois et dont la dramaturgie est parfaite: la communication a été contrôlée au millimètre près, pour savoir qui devait recevoir quoi et quand - est d'avoir pu, trois minutes avant que le président du Conseil d'Etat ne prenne la parole, prendre connaissance de ces mesures.
Deux mots sur ces mesures... Elles ont un mérite absolument évident: celui d'exister ! Bien ! (Rires.) Mais - et je m'adresse plus particulièrement aux trois nouveaux balais, plutôt qu'aux quatre anciens - je dois avouer que je ne peux m'empêcher d'être inquiet de ce lever de rideau consistant à dire: «Nous allons maintenant reconstruire la confiance; nous allons reconstruire les libertés; nous allons reconstruire la manière de gérer l'Etat !»... Bien ! Que je sache, Paris ne s'est pas fait en un jour ! Genève non plus, et j'ai peine à croire que, demain matin, le monde genevois sera totalement différent de ce qu'il est aujourd'hui, de ce qu'il était hier, voire, encore, de ce qu'il était il y a trois mois...
Que le Conseil d'Etat demande la confiance du parlement est tout à fait logique ! Ce n'est pas la première fois; cela semble même ritualisé: tous les quatre ans, le Conseil d'Etat vient demander la confiance du parlement. Ce dernier, à tort ou à raison, a de temps à autre le sentiment qu'il s'est fait légèrement «étourdir» ou «avoir» - pour parler à peu près poliment - et donc la réminiscence de: «Ce coup-ci est le bon» ou, autrement dit: «Demain, on rase gratis» peut en effet le laisser sceptique !
Nous n'allons pas discuter de la qualité de ces mesures... Moi, je n'ai pas la science infuse comme M. Mettan, qui sait déjà qui va voter quoi dans un budget dont on doit quand même rappeler ici que nous avons les grandes lignes... mais pas le budget ! Je vais donc m'atteler à ce travail que l'on demande aux députés, c'est-à-dire étudier cette scène qui nous est servie ce soir... Mais, gardez-vous, Messieurs - je vous en prie - de partir du principe que l'on peut, d'un coup d'un seul, tirer un double trait comptable et que tout va se remettre en place !
Je ne voudrais pas, Monsieur le président du département des finances, que vous soyez celui dont on dira qu'il a créé un nouveau concept: le développement durable de la dette ! Je sais que ce problème préoccupe votre parti, et je ne voudrais pas qu'il vous colle aux basques !
De même, il m'apparaît logique et cohérent - par rapport à ceux qui, tous partis confondus, ont essayé avant, avec plus ou moins de bonheur, de redresser cette situation - que l'on ne vienne pas nous dire ce soir que tout cela était vil et vain et que maintenant les choses vont aller mieux !
La confiance, comme aime à le dire notre camarade Antonio Hodgers, c'est comme le tango: ça se danse à deux ! Cela signifie que la confiance que vous nous demandez ce soir, en fin de compte, sera celle que nous allons vous accorder. Et vous admettrez, puisque vous avez tous siégé de l'autre côté du miroir - sauf un - que la confiance est quelque chose de très délicat: elle demande à être cultivée et entretenue. Elle ne saurait simplement être invoquée le dernier jour du mois de mars ! (Applaudissements.)
M. Claude Jeanneret (MCG). Le groupe MCG est encore nouveau, c'est la raison pour laquelle il accorde peut-être facilement sa confiance. Il n'a pas connu les dernières législatures. Le groupe MCG apprécie effectivement l'attitude du gouvernement, qui, en respectant les délais promis - il faut quand même le souligner - nous propose de mettre en oeuvre un train de mesures qui doivent concourir... (Bruits émis par un portable. Commentaires.) Tiens, prends mon téléphone ! (Rires.) ...à la bonne gestion de l'Etat, partenaire phare de notre édifice social, phare par le nombre de services rendus en prestations publiques, mais, aussi, par l'exemple qu'il donne et doit donner d'une gestion saine, équilibrée et dynamique.
L'équilibre des comptes doit, bien sûr, demeurer un objectif prioritaire. Mais les mesures d'économies, seules, ne suffiront pas. Elles sont indispensables, mais pas suffisantes. Elles doivent impérativement être accompagnées d'une augmentation des recettes, et, pour cela, il faut chercher de nouveaux contribuables que nous pourrons accueillir en offrant des logements pour tous en nombre et en qualité. Il faut aussi intégrer nos demandeurs d'emploi dans l'activité économique genevoise, renégocier à Berne la péréquation intercantonale - qui me semble actuellement prétériter notre canton - et, enfin, négocier avec nos partenaires économiques la répartition des revenus dégagés par le développement de notre économie, car je rappelle tout de même que nous exportons plus de 6 milliards de revenu par année, ce qui représente pas loin d'un quart de notre PIB.
Nous espérons que le deuxième train de mesures confortera notre confiance dans l'action du Conseil d'Etat, avec lequel nous nous réjouissons de collaborer sans affaiblir pour autant notre sens critique pour garantir que le cap d'assainissement sera maintenu jusqu'à sa complète réalisation pour le bien de nos concitoyens.
M. Claude Marcet (UDC). Je prends acte du plan de mesures du Conseil d'Etat... Sans plus ! Mon groupe entend cependant, pour analyser les conséquences de ces mesures, que les comptes de l'Etat soient désormais - je le dis avec insistance - complètement transparents, pour que nous puissions nous rendre compte de ce qui va se passer réellement. Désormais, il faudra appeler un chat, un chat !
Si je dis cela, c'est parce que je suis quelque peu inquiet. En effet, depuis quatre ans et demi que je siège dans cette enceinte, j'ai pu constater certains faits comptables et financiers pas très nets. Si j'en avais été l'auteur dans le privé, j'aurais été licencié avec effet immédiat, au mieux, et j'aurais pu avoir quelques soucis avec la justice, au pire ! C'est la raison pour laquelle mon groupe entend dorénavant que l'on sache tout, absolument tout, même si cela fait très mal !
Je donne l'exemple des caisses de retraite. Ce matin, juste pour une corporation de droit public dont le taux de conversion a été rectifié, il va falloir passer une provision de quelque 20 millions ! Et cela concerne mille cinq cents personnes seulement ! Cela veut dire que l'Etat, garant de nombreuses entités - ordre de grandeur: trente à trente-cinq mille personnes - devrait passer une somme approchant 300 millions ! Monsieur Mettan, de 300 millions et des poussières, on arrive vite, si on respecte les normes, à 600 millions, ce qui est très loin de vos prévisions !
Messieurs du Conseil d'Etat, les résultats de la situation financière de l'Etat sont la conséquence des travaux de vos prédécesseurs, qui ont souvent promis - souvent fermement promis - mais rarement tenu ! Lorsqu'on veut mettre en oeuvre un plan d'assainissement, Messieurs du Conseil d'Etat, on prend les mesures adéquates et on s'y tient. Je ne souhaiterais pas - je le pense pas, parce que je vous connais - que vous soyez des girouettes changeant de direction au gré des vents et des opportunités personnelles ou politiques... J'entends que vous soyez de véritables patrons qui prennent des décisions, même si, je le répète, cela fait mal !
J'ai entendu que les recettes ne seraient pas augmentées et que les charges et les prestations ne seraient pas diminuées... En ce qui me concerne j'ai procédé à un certain nombre d'assainissements dans ma vie, et je pense que vous êtes en train de passer le ruisseau en vous arrêtant au milieu ! Quand on veut procéder à un assainissement, il faut prendre des mesures drastiques, traverser le ruisseau, car les demi-mesures ne servent à rien !
Je vais terminer. Je ne veux pas entrer davantage dans les détails, mais je voudrais tout de même que l'on se rende compte du problème qui est le nôtre. On se gausse de nos amis français dont le taux d'endettement par rapport à leur PIB est de 65% - cet endettement tient compte, je le précise, du déficit actuariel des caisses publiques françaises qui ont été révisées il y a quelques années, à hauteur de quelque 2000 milliards de francs français. Or, si nous tenions compte de notre endettement total réel, tenant compte de notre PIB - je me réfère à un article du «Temps» où il est dit que notre PIB à 25% se situe à 5 milliards - nous serions actuellement à 100% d'endettement par rapport à notre PIB !
Sachant que l'Etat français a d'autres moyens que les nôtres pour agir sur l'économie, pour agir sur la finance - peut-être un peu moins, maintenant, sur la monnaie - je pense, Messieurs du Conseil d'Etat que vous avez un sacré travail à effectuer, surtout dans un territoire aussi exigu, qui compte peu d'habitants - quatre cent mille personnes - et avec peu de possibilités pour jouer sur l'économie ! Il est vrai qu'il est toujours facile de dire ce que l'on veut faire, et de voir ensuite, plus tard, éventuellement - lorsqu'on n'est plus là... - les conséquences de ses décisions !
Je souhaiterais, Messieurs du Conseil d'Etat, que les décisions que vous allez prendre permettront à notre canton de s'en sortir, peut-être... Je dis «peut-être», car ce plan de mesures - comme certains l'ont dit - va globalement dans le bon sens, mais je ne sais pas si vous ne serez pas obligés d'en prendre d'autres. Et pas celles d'augmenter les impôts, Messieurs de la gauche, notre canton a les taux de fiscalité les plus élevés ! Si vous voulez que certains délocalisent - je le dis au sens large - continuez comme cela !
M. David Hiler, conseiller d'Etat. D'abord, je voudrais vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que le Conseil d'Etat apprécie la confiance qu'un certain nombre d'entre vous lui ont donnée.
A vrai dire, il ne partage pas la lecture très directe, faite par un député Vert, des propos tenus par un député du parti libéral. Nous avons entendu deux choses: le parti libéral va être extrêmement critique, il ne partage pas tous nos choix politiques - et tant mieux - mais il a également indiqué qu'il ne souhaitait pas faire trébucher le gouvernement et qu'il avait compris la nécessité, pour le canton, d'essayer de faire les choses rationnellement et dans un certain calme, ce qui fait aussi partie des conditions-cadre de l'économie.
La confiance que nous entendons restaurer, Mesdames et Messieurs les députés, c'est celle des citoyennes et des citoyens de ce canton en l'Etat et l'Etat, c'est un peu le Conseil d'Etat, c'est le parlement, dont chaque prestation devant les caméras est également un élément de la confiance des citoyens en l'Etat, et c'est enfin la qualité du travail de l'administration. Ce sont les trois chantiers importants.
Quelques doutes ont été exprimés, et je souhaite y répondre tout de suite s'agissant des faits. Monsieur Nidegger, en ce qui concerne les comptes 2005, les recettes extraordinaires, qu'il s'agisse d'argent encaissé, comme dans le cas de l'or de la BNS, ou qu'il s'agisse de dissolution de provisions, ont intégralement été consacrées à des amortissements et à des constitutions de provisions. Vous le verrez dans le détail la semaine prochaine, de sorte que les 434 millions indiqués ici - et c'est le seul chiffre donné - représentent bel et bien le déficit courant, qui s'explique très aisément - en tous cas, pour ceux qui étaient déjà au parlement - par le fait qu'entre la volonté exprimée par l'ancien Conseil d'Etat, la majorité de ce parlement et la réalité du vote populaire, il y a un trou que nous retrouvons aujourd'hui, au niveau du déficit. Mais, pour le reste, le Conseil d'Etat a bel et bien tenu les charges, comme il l'avait annoncé, pendant toute l'année 2005.
En ce qui concerne la dette, nous avons fixé un objectif - et ce n'est pas le développement durable de la dette, ni de dépasser les 13 milliards... Nous avons aussi expliqué le moyen envisagé. Renonçons à cette terminologie quelque peu barbare de «transferts des actifs», dont j'ai cru comprendre à la lecture de la presse que certains l'interprétaient comme des transferts de fonctionnaires... (Rires.) Non, les transferts d'actifs, ce sont bien des transferts d'équipement et de biens immobiliers ! Cela concerne, par exemple, deux fours qui servent à incinérer les déchets. En termes comptables, ils constituent des actifs.
De quoi s'agit-il ? Aujourd'hui, le petit Etat porte la dette non seulement des institutions subventionnées, mais aussi, d'institutions qui, par ailleurs, sont bénéficiaires, comme les SIG, comme l'Aéroport international de Genève, qui font partie de l'Etat de Genève et feront partie du consolidé IPSAS. Inversement - inversement - une partie de la dette de l'Etat de Genève se situe aujourd'hui sur un autre compte, celui de la Fondation de valorisation.
Vous demandez la transparence ? Eh bien, la transparence, c'est que chaque entité possède les équipements et les biens immobiliers qu'elle utilise et la part de dette qui leur est attachée. Voilà ce que sont les transferts d'actifs. Cela va - je pense - dans le sens d'une plus grande clarté, et l'objectif est effectivement d'en rester à 13 milliards, tel que cela figure dans nos livres, mais aussi de pouvoir disposer de la dette de l'Etat dans le compte consolidé. Celle-ci sera certes plus grande, mais elle devra être comparée à une fortune d'une autre ampleur: avec l'entier - pardonnez-moi l'expression - du chiffre d'affaires de l'Etat de Genève ! C'est seulement à ce moment-là, Mesdames et Messieurs, que nous pourrons véritablement déterminer quel est le niveau d'endettement admissible pour l'Etat de Genève.
Pour ce qui est des intérêts, j'ai regretté, Monsieur Weiss, qu'en nous annonçant une hausse imminente des taux d'intérêts susceptibles de mettre notre budget en difficulté, vous n'ayez pas pris en compte tous les efforts effectués par Mme Brunschwig Graf pour nous protéger en contractant des emprunts à dix, à quinze et à vingt ans, ce qui permet le paradoxe suivant. Aujourd'hui, alors que les taux montent à court terme, nous sommes redescendus, au dernier relevé mensuel, à 2,56%, ce qui est un taux moyen excellent ! A long terme, vous avez raison, mais nous sommes sécurisés pour les années qui viennent.
S'agissant des mécanismes salariaux, la détermination du Conseil d'Etat est entière. Au fur et à mesure que nous nous rapprocherons de l'équilibre, pas à pas, année après année, nous essayerons non seulement de réintroduire l'entier des mécanismes salariaux - ce qui n'est pas encore fait avec l'accord qui porte sur 2006-2007 - mais également, de protéger le pouvoir d'achat de nos collaborateurs, c'est-à-dire d'indexer les salaires. Nous le ferons étape par étape. Nous avons, pour cet exercice, c'est l'intention du budget 2006, réduit le déficit d'un peu plus d'un quart. Et il nous paraît normal d'associer, à chaque étape, le personnel, qui, dans certains secteurs, va effectivement devoir faire preuve de pas mal d'esprit d'adaptation à des situations nouvelles. Il va falloir travailler différemment, et nous savons tous qu'il n'y a rien de plus difficile que de changer de manière de travailler ou de s'exprimer autrement qu'on l'a toujours fait - n'est-ce pas, Monsieur Weiss ? Nous demandons donc à chacun de fournir des efforts, et c'est ce qui, Mesdames et Messieurs les députés, est important dans ce plan de mesures.
Oui, j'aurais pu - et les services du département des finances aussi - inscrire aujourd'hui le chiffrage exact à côté de chaque mesure. Le classeur existe, le Conseil d'Etat en dispose, mais cela n'est pas satisfaisant. Car autant il est simple de chiffrer des mesures lorsqu'elles s'appliquent à un seul département, autant il faut du temps lorsqu'elles s'appliquent à tous et qu'il faut répartir l'effort entre sept départements, la Chancellerie, le service du Grand Conseil et le Palais de justice. Sans compter l'effort que nous allons demander, dans le même sens, aux entités subventionnées. Et les directions devront s'engager à respecter ces chiffres.
Je me suis toujours méfié des chiffres notés sur le papier... Et, dans le processus des mesures, il s'agit d'une négociation continue et permanente entre un objectif réaliste, posé par l'intitulé même de la mesure, et sa capacité à être mis en musique avec un calendrier précis. Ce processus va continuer pendant les travaux de la commission des finances, même si le premier chiffrage, mesure par mesure, vous sera livré en toute transparence avec l'appréciation du Conseil d'Etat sur ce qu'il reste à faire.
Ainsi, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat n'a pas dit son dernier mot en ce qui concerne les 100 millions en question, mais, en principe, ces 73 mesures devraient être susceptibles de dégager un peu plus que la somme actuelle.
Maintenant - et j'en terminerai par là, parce que, pour le reste, mesure par mesure, nous avons les uns et les autres du pain sur la planche - nous allons devoir travailler ensemble ! Et j'aimerais vous donner un élément, relevé par plusieurs orateurs, par rapport à la situation économique de notre canton. Nous savons tous que les grandes entreprises exportatrices - pour utiliser une expression business à la mode - «performent». Par contre, toute une partie de l'économie est atone. Je veux parler de l'économie locale, qui ne se porte pas aussi bien qu'elle le pourrait.
Il va de soi, Mesdames et Messieurs les députés, que les deux autres chantiers principaux désignés par le Conseil d'Etat sont liés à la santé financière de notre canton. En particulier, la construction de logements pour tous ceux qui en ont besoin rapidement et qui souhaitent vivre dans notre canton. A moyen terme, cet élément est hélas déterminant pour la santé financière de notre canton. Mais ces mesures seront présentées, par ceux qui doivent le faire, pour elles-mêmes.
De la même façon, Mesdames et Messieurs les députés, dans le domaine du chômage et, derrière lui, le domaine de l'assistance, il ne s'agit pas aujourd'hui de se demander s'il faut diminuer les prestations, mais de savoir si les sommes considérables que nous versons à ce titre pourraient être utilisées plus efficacement. A savoir, pour qu'elles permettent la réinsertion dans le marché du travail de beaucoup plus de personnes qu'aujourd'hui et pour qu'elles permettent bel et bien aux personnes qui se trouvent aujourd'hui dans la cage de l'assistance, parce que c'est une véritable cage, d'en sortir ! Mais cela signifie qu'il faut mettre en place d'autres politiques, et - excusez-moi de vous le dire - cela n'a rien à faire dans un plan de mesure financier ! Le Conseil d'Etat fera en son temps des propositions d'amélioration de ces dispositifs.
Mesdames et Messieurs les députés, avec une baisse du taux de chômage au niveau suisse, le chargé du département des finances pourrait partir trois mois en vacances par année, sans aucun problème ! Ce sont les résultats structurels que nous devons obtenir ! Mais, dans l'immédiat - je rappelle les chiffres: 2002, 100 millions pour l'assistance; cette année, 220; plus les emplois temporaires, plus les non-values fiscales. Ce sont ces gangrènes, qui dévorent toute l'Europe et pas seulement Genève, que nous devrons affronter avec courage ! Toutefois, elles doivent être traitées séparément des mesures de rationalisation de l'Etat, qui sont une autre affaire et qui doivent être étudiées en tant que telles.
J'ai hâte, Mesdames et Messieurs les députés - je m'adresse particulièrement à ceux qui font partie de la commission des finances, de la commission de contrôle de gestion et de la commission fiscale - d'étudier ces mesures avec vous et de vous informer le plus exactement possible de la situation. Et j'ai le plaisir de vous annoncer que, pour l'année en cours, le Conseil d'Etat procédera pour la première fois à un bouclage des comptes semestriels dont vous connaîtrez les résultats en septembre, ce qui permettra aux uns et aux autres, à l'administration comme au Conseil d'Etat, au Conseil d'Etat comme aux députés de ce Grand Conseil, de suivre pas à pas l'effet des mesures et la tenue des budgets.
Je vous remercie, au nom du Conseil d'Etat, pour votre attention. C'est un long processus qui va s'engager. Il sera difficile. Les critiques seront nombreuses, mais je suis persuadé que l'intérêt public finira par l'emporter dans cette enceinte. (Vifs applaudissements.)
Le rapport divers 631 est clos.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, ainsi s'achève cette séance extraordinaire ! Je vous donne rendez-vous au jeudi 6 avril à 17h pour une séance ordinaire. Je lève la séance.
La séance extraordinaire est levée à 18h30.