Séance du
jeudi 19 mai 2005 à
17h
55e
législature -
4e
année -
8e
session -
43e
séance
PL 7987-A
Premier débat
La présidente. Madame la rapporteure, avez-vous quelque chose à ajouter à votre rapport ?
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC), rapporteuse. Je n'ai rien à ajouter, mais j'aimerais juste rappeler le contexte de ce projet de loi: il a été déposé à l'issue de la table ronde de 1998; il faisait en fait partie d'un package de deux projets de lois dont l'esprit rejoignait celui de l'initiative 113 déposée par la gauche, initiative qui avait été acceptée dans un premier temps par une petite majorité du peuple - en 2002 - et dont la concrétisation avait ensuite été refusée beaucoup plus largement - en mai 2003. Aujourd'hui, le projet de loi que nous examinons concerne le volet «Imposition des personnes morales». Et l'autre projet de loi, qui a déjà été refusé par ce Grand Conseil, concernait le volet «Imposition sur la fortune».
Le projet de loi qui nous occupe ce soir est également lié à un projet de loi - que nous avions voté, je crois, en 1998 ou 1999 et qui avait été déposé par Christine Sayegh et Micheline Calmy-Rey, alors députées - dont l'objectif était d'instaurer un taux unique dans l'imposition du bénéfice des personnes morales. Le projet de loi qui nous est soumis ce soir revient donc sur cet ancien projet, déposé également par un parti de gauche à l'époque. La commission fiscale a décidé, dans l'attente de la décision du peuple quant à l'initiative 113, de ne pas traiter ce projet de loi. Et suite au verdict clair des urnes par rapport à cette dernière, la commission a choisi de ne pas entrer en matière sur ce projet de loi, à l'unanimité moins quelques abstentions.
Je vous propose de faire de même ce soir.
M. Robert Iselin (UDC). Je serai bref. Je trouve que la gauche ne propose qu'une et sempiternelle solution à tous les problèmes: augmenter les impôts ! Je peux vous dire que le canton de Genève connaît les impôts les plus élevés de Suisse ! (L'orateur est interpellé.)De très loin, de très loin !
Nous soutiendrons donc la proposition de la rapporteuse de majorité.
M. Souhail Mouhanna (AdG). Monsieur Iselin, vous venez de dire que la gauche n'a qu'une idée, celle d'augmenter les impôts... Eh bien, non, Monsieur Iselin, la seule préoccupation de la gauche, c'est de faire en sorte que les besoins fondamentaux, vitaux, de la population soient assurés par le biais d'un Etat social fort. Pour ce faire, les moyens financiers nécessaires doivent être trouvés là où ils sont, c'est-à-dire là où il y a de l'argent !
Vous avez soutenu le rapport de majorité sans aucune argumentation... (L'orateur est interpellé.)De toute façon, on sait bien comment les choses se passent: la majorité automatique, dite «anti-impôts» - n'est-ce pas? - n'a qu'une idée en tête... (L'orateur est interpellé. La présidente agite la cloche.)Faire le plus de cadeaux possibles à ceux qui en ont le moins besoin... (Exclamations.)... et s'attaquer au rôle social de l'Etat ! (L'orateur est interpellé.)Ne vous fatiguez pas: vous pouvez dire ce que vous voulez, j'utiliserai mon temps de parole ! J'ai un certain nombre de choses à dire, et je les dirai !
Je reprends. De quoi s'agit-il dans ce projet de loi ? Il s'agit tout d'abord de faire en sorte que les entreprises - dont on nous vante les grands mérites, au niveau de la création d'emplois - contribuent, précisément, au bon fonctionnement de l'Etat lorsqu'elles réalisent des bénéfices importants. Et on a vu comment certaines entreprises utilisent ces bénéfices importants... Par exemple, on a assisté dernièrement à la publication de résultats d'entreprises, notamment de grandes banques, qui réalisent des milliards de bénéfices et qui, dans le même temps, suppriment des milliers d'emplois. Elles transfèrent, de ce fait, le coût social de ces suppressions d'emplois sur les collectivités publiques, auxquelles on demande en même temps de réduire leurs dépenses... Cette logique est évidemment une logique de droite, et c'est la logique que vous, les députés d'en face, défendez ! Ce n'est pas la nôtre du tout !
Dans le projet qui nous occupe, nous parlons de bénéfices nets, d'une augmentation du taux d'imposition véritablement modeste, mais qui permettrait de contribuer à l'assainissement des finances publiques que vous feignez - je parle de la droite - d'appeler de vos voeux. Vous prétendez vouloir renflouer les caisses de l'Etat, alors qu'en réalité toutes vos décisions vont dans le sens inverse.
Vous avez parlé, Madame la rapporteure, de l'initiative fiscale qui avait été lancée par l'Alliance de gauche: vous savez bien que le peuple l'a acceptée. Ce qui a été refusé, Madame, c'est la loi concrétisant cette initiative. Celle-ci est donc toujours valable ! C'est la loi qui a été rejetée et non l'initiative. L'initiative est l'expression de la volonté populaire. Le peuple ayant voté oui, nous sommes légitimement fondés à aller de l'avant à chaque fois que nous le pouvons et que nous le voulons. D'ailleurs, nous l'avons fait en déposant un projet de loi sur l'imposition des hauts revenus et un projet de loi sur l'imposition des grandes fortunes, provisoirement lié, en ce qui concerne le deuxième projet, au taux de chômage. Deux projets de lois ont donc été déposés. Deux initiatives sont lancées. Nous repartons ainsi à l'assaut de ce que j'appellerai ces «nids de capitaux», qui ne cessent de s'accumuler au détriment des travailleurs, au détriment de la population.
Vous dites que le peuple a rejeté cette augmentation d'impôts... J'affirme que c'est faux ! L'initiative a été acceptée et il faudra, précisément, rééquilibrer le partage du fruit du travail un jour ou l'autre, c'est-à-dire moins pour le capital et plus pour les travailleurs et la population. Et c'est justement par ce biais que nous arriverons à renflouer les finances publiques.
C'est la raison pour laquelle nous considérons que ce projet de loi doit être accepté par notre Grand Conseil, s'il veut véritablement renflouer les finances publiques. Et, je le répète, ce qui est demandé ici est tout à fait modeste... On nous sert de temps en temps - voire très souvent, quand il s'agit de fiscalité - l'argument selon lequel une augmentation des impôts ferait partir les entreprises... Je vous dirai qu'elles partent de moins en moins. Elles n'ont plus besoin de partir: elles importent - c'est de plus en plus le cas - de la main-d'oeuvre à bon marché et font du dumping salarial ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)Elles font ainsi, une fois de plus, pression sur les salariés, les travailleurs, elles génèrent du chômage et accumulent des profits de plus en plus importants.
Votre vote va donc montrer le véritable visage de la majorité de droite, qui n'a qu'une idée en tête: faire davantage de cadeaux aux riches, ce qui provoque plus de peine et plus de problèmes pour les travailleurs et la population.
La présidente. Merci, Monsieur Mouhanna. Mesdames et Messieurs les députés, le Bureau propose de clore la liste des intervenants. Sont inscrits: M. Christian Brunier, M. Jean Rémy Roulet, M. Pierre Froidevaux, Mme Mariane Grobet-Wellner, M. Robert Iselin et Mme Stéphanie Ruegsegger.
M. Christian Brunier (S). Je pense que nous sommes d'accord sur deux points. Tout d'abord, l'Etat doit tenter de répondre aux besoins de la population. Personne ici ne dira le contraire ! Reste à définir quels sont ces besoins. Ensuite - et c'est une chose sur laquelle, me semble-t-il, nous sommes tous d'accord aussi - les finances publiques ne sont pas fameuses...
A partir de là, il y a deux leviers possibles pour améliorer les finances publiques. Le premier consiste à optimiser les coûts. Des députés ont quelques idées à ce sujet, notamment en améliorant les processus de l'Etat. Le deuxième consiste à assurer un financement équitable de l'Etat. Il y a plusieurs moyens d'y arriver, et aujourd'hui l'Alliance de gauche nous propose l'un d'entre eux, c'est-à-dire l'augmentation de la fiscalité des entreprises.
Il est certain qu'aujourd'hui, par rapport à la crise que connaît le canton, certaines grandes entreprises réalisent des bénéfices très importants. Est-il sage ou non de leur demander un effort de solidarité, et cet effort de solidarité - par le biais d'une augmentation provisoire et très mesurée de la fiscalité - peut-il mettre en danger l'économie ? C'est la question qu'il faut se poser aujourd'hui.
L'UDC a déjà répondu en disant qu'il ne fallait rien demander de plus aux entreprises, qui seraient déjà trop imposées à ses yeux... Eh bien, non, Mesdames et Messieurs les députés - et je m'adresse spécialement à l'UDC - la fiscalité des entreprises n'est pas trop élevée ! Je vous livre deux messages pour illustrer mes propos. Et ces messages ne viennent pas de la gauche, mais de vos rangs... (Commentaires.)Le premier vient du Conseil fédéral, à propos de l'attractivité des entreprises en Suisse. Selon lui, nous avons les impôts sur les bénéfices les plus bas des pays européens et des pays de l'OCDE et la fiscalité est aujourd'hui spécialement attractive dans l'ensemble des cantons suisses pour les entreprises.
Le deuxième message vient de Pierre Muller, conseiller administratif de la Ville de Genève, libéral, qui dit la même chose dans un article sur Internet, intitulé «Autorités et fiscalité favorables aux entreprises». Il y insiste pour montrer que la fiscalité est très attractive à Genève et que les entreprises peuvent s'installer dans notre canton en toute sérénité. Les libéraux disent donc - en tout cas en dehors de ce parlement - que la fiscalité est attractive et que certaines grandes entreprises font des bénéfices importants.
Ainsi, nous pouvons entrer en matière sur ce projet de loi, puisqu'il ne fait que demander le retour au taux d'imposition qui était appliqué il y a quelques années, lorsque l'économie était florissante. A l'époque, cela ne posait pas de problème !
D'autre part, je vous rappelle que ce projet de loi lie l'augmentation d'impôt au taux de chômage. Cela veut dire que, si le taux de chômage baisse, cette disposition provisoire disparaîtra. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)
Et puis, je vous rappelle que la plus grande partie de l'impôt récolté servira à promouvoir l'emploi.
Finalement, cette augmentation d'impôt toucherait très peu d'entreprises, uniquement celles qui réalisent de très gros bénéfices. Je vous rappelle à cet égard que la plupart des entreprises genevoises qui composent le tissu économique genevois - les PME, PMI - ne payent pas d'impôt sur les bénéfices. Cette mesure n'aurait donc pas d'incidence négative sur le tissu économique genevois, elle ne concernerait, je le répète, que quelques grandes entreprises qui réalisent de gros bénéfices. Cette mesure permettra de renflouer les caisses de l'Etat momentanément tout en maintenant une attractivité très importante pour les entreprises.
Je ne vois donc aucune raison pragmatique de nous opposer à ce projet de loi !
La présidente. Merci, Monsieur Brunier ! Mesdames et Messieurs les députés, je rappelle que la liste a été close, y compris avec M. David Hiler. Monsieur Roulet, je vous donne la parole.
M. Jean Rémy Roulet (L). Je vous rappelle tout d'abord le cadeau libéral en matière de fiscalité, d'une logique implacable: il s'agit d'accroître l'assiette fiscale de ce canton, donc d'accroître les recettes en favorisant l'implantation d'entreprises - c'est le sujet qui nous préoccupe aujourd'hui - et, bien sûr, d'alléger la fiscalité des personnes physiques pour que de plus en plus de personnes viennent s'installer dans notre canton.
Justement, en matière d'imposition des personnes physiques, je vous dirai que nous avons atteint une partie de nos objectifs, puisque la population a voté une baisse d'impôt de 12% et plébiscité la suppression des droits de succession, et qu'il y a encore du travail à faire, Mesdames et Messieurs les députés, notamment lors de la prochaine législature, à savoir la refonte totale du barème d'impôt de notre loi cantonale.
En matière de personnes morales, par contre, les chantiers sont encore ouverts. Et contrairement à ce qui vient d'être dit, la fiscalité de ces personnes morales nécessite une attention particulière, notamment sur deux points: Genève est encore un des rares cantons à percevoir un impôt sur le capital, à savoir qu'à peine après avoir mis sur pied, bâti, construit une entreprise, et avant que celle-ci ne dégage le moindre bénéfice, l'impôt est prélevé. C'est tout à fait inacceptable ! Il faudra, dans les années à venir, corriger ce surplus d'impôt.
Il y a également la taxe professionnelle qui pénalise les entreprises, dans ce sens que, plus elles embauchent, plus l'impôt est lourd. Et sur ce point aussi le parlement aura matière à réfléchir sur la pertinence de cette taxe. Maintenant, venons-en, si vous le voulez bien, à ce projet de loi. Il s'agit pour les libéraux, de répéter ce qu'ils ont dit il y a quelques années de cela. A savoir que ce projet de loi est à la fois - j'avais utilisé le mot «hold-up» il y a quelques mois, je dirai maintenant un «racket», et je donne la définition précise du «racket» à celles et ceux que cela intéresse: le racket est un prélèvement effectué par la force, par la contrainte, de l'argent qui n'appartient pas à celui qui commet ce forfait.
Mais c'est également une tromperie. Pour quelle raison ? Parce que ce projet de loi prévoit que ces taux d'imposition, je cite: «... sont maintenus tant que le taux de chômage dans le canton dépassera 2%...». Dites-moi, Mesdames et Messieurs les députés, depuis quand avons-nous connu un taux de chômage de moins de 2% ? (L'orateur est interpellé.)Je pense que je n'étais pas encore né !
Pour toutes ces raisons - plus celle-ci, à savoir que vous allez prélever, si ce projet de loi est voté, de l'argent sur les 200 plus grandes entreprises du canton qui marchent bien, celles qui procurent encore et toujours du travail à Genève - Mesdames et Messieurs des bancs d'en face, je vous en prie, gardez raison et suivez la majorité de la commission, qui vous propose de refuser ce projet de loi !
M. Pierre Froidevaux (R). Je trouve M. Roulet bien gentil de dire que ce projet de loi est une tromperie... C'est une véritable tartufferie !
Chers collègues, ce projet de loi a été déposé par des députés de l'Alliance de gauche, à une période où la gauche avait la majorité au parlement. Et j'apprends tout à coup que les socialistes vont aussi le voter ?! Laissez-moi vous faire part de ma surprise !
Ce projet propose d'imposer davantage les personnes morales... Vous aviez une législature entière - quatre ans - pour le concrétiser, mais vous n'avez jamais rien proposé en commission pour aller de l'avant et trouver une solution. Et puis, après que notre majorité a réglé ce problème, très clairement, et alors qu'aucun d'entre vous ne s'y est opposé en commission, vous venez nous dire en plénière que nous ne serions pas solidaires, que nous ne soutenons pas les prestations de l'Etat, que nous avons tous les défauts du monde... Alors que - je le répète - vous n'avez jamais proposé la moindre solution en commission !
Je suis extrêmement choqué par cette loufoquerie, et par vos propos, Monsieur Mouhanna, qui laissent sous-entendre que nous voudrions vider les caisses de l'Etat car nous refusons toute augmentation d'impôt... Monsieur Mouhanna, je vous rappelle que la gauche n'ose même pas voter ce projet de loi ! Si jamais, après avoir voté une loi fiscale sur les personnes morales, avec un taux fixe à 10%, nous modifiions rapidement la loi fiscale, ce serait le pire signe que nous pourrions donner aux entreprises, car cela modifierait leur assiette fiscale ! Ce serait la destruction des emplois ! (Commentaires.)Vous râlez, vous êtes fâchés, mais sachez que cet argument a convaincu tous les commissaires de gauche et la conseillère d'Etat devenue conseillère fédérale entre-temps...
Je vous en prie, il faut savoir garder raison dans un tel projet de loi: si, véritablement, vous voulez maintenir un état social, ne déstabilisez pas les entreprises qui viennent s'implanter à Genève et n'entrez pas en matière - comme les députés raisonnables de votre bord l'ont fait en commission - sur ce projet de loi ! Refusez ce projet de loi ! (Applaudissements.)
Mme Mariane Grobet-Wellner (S). Tout d'abord, depuis fin 2003, la situation économique du canton n'a cessé de s'aggraver, et nous mesurons aujourd'hui pleinement les conséquences de la baisse d'impôt cantonal de 12%: l'Etat se voit privé chaque année - je le rappelle - de quelque 400 millions de recettes fiscales. A ce jour, la perte cumulative se monte à près de 1,5 milliard, ce qui a eu pour résultat d'augmenter la dette d'autant.
Lors de la votation de 2002, l'initiative 113 non formulée avait été acceptée par la population. Deux ans après, c'est de justesse que la population a refusé la loi concrétisant l'initiative, et non pas l'initiative. Je tiens à rappeler à cet égard que la droite avait fait une campagne vigoureuse contre la loi, brandissant la menace d'une fuite massive des gros contribuables si l'on augmentait les impôts, même de façon minime... Eh bien, cela est rigoureusement faux !
Une comparaison internationale récente, qui date de janvier 2003, effectuée par KPMG Fides et IMD - Institute for Management Development - montre que la Suisse est très bien placée, puisqu'elle se situe juste derrière l'Irlande en ce qui concerne les taux maximaux et moyens d'imposition sur le revenu.
Au niveau de la Suisse, le système en vigueur à Genève, d'un taux fixe de 10% - on peut appeler cela un flat tax -a évidemment pour effet de pénaliser, comparativement, les entreprises à faible rendement. En revanche, pour les entreprises dont les rendements sont meilleurs, Genève s'approche de Zurich, Soleure, et de Bâle-Ville et Bâle-Campagne. Cette comparaison intercantonale annuelle a été réalisée par le Département fédéral des finances.
Les décisions de localisation des entreprises se fondent bien davantage sur des critères de poids comme la qualité des infrastructures, le logement, les écoles et la disposition d'une main-d'oeuvre qualifiée sur place. A force de priver l'Etat des ressources indispensables pour pouvoir fournir des prestations de qualité à la population, on dégrade la cohésion sociale: la qualité de l'enseignement, notamment, et la situation en matière de logement - qui empire, puisqu'il est de plus en plus difficile de trouver un logement. C'est sur ces critères que les entreprises décident de s'implanter ou de fuir vers d'autres destinations ! Et non pas en raison d'une légère augmentation de la fiscalité, augmentation qui doit permettre à l'Etat de garantir la qualité de ses prestations à la population !
Pour les socialistes, il est urgent de rétablir la situation et d'examiner sérieusement toute piste pour y arriver. Cette proposition en est une, et c'est la raison pour laquelle les socialistes, dans le contexte actuel, soutiennent ce projet de loi et vous demandent de le renvoyer à la commission fiscale, afin, cette fois-ci, de l'étudier de manière sérieuse. (Applaudissements.)
La présidente. Vous demandez donc, Madame, le renvoi en commission de ce projet de loi. Monsieur Iselin, je vous donne la parole, mais je vous prie de ne vous exprimer que sur le renvoi en commission.
M. Robert Iselin (UDC). Madame la présidente, je n'avais pas l'intention de m'exprimer sur le renvoi en commission... Je pense que ce dernier est tout à fait inutile, dans la mesure où les arguments dans ce sens ont été avancés suffisamment clairement par mes collègues du parti libéral et du parti radical.
Je ferai une simple observation: la suggestion d'aller prendre l'argent «là où il est» n'est ni très originale ni très futée... Et la gauche pourrait, une fois, nous étonner en nous expliquant comment prendre l'argent là où il n'est pas !
La présidente. Je donne la parole à M. David Hiler en le priant également de se prononcer sur le renvoi de ce projet à la commission fiscale.
M. David Hiler (Ve). Ça tombe bien: c'est justement ce que nous souhaitions demander ! Et je vais vous exposer très exactement pour quelle raison.
Au préalable, il faut tout de même remettre dans son contexte ce qui s'est passé. Il y a quelques années, on a changé la manière d'imposer les entreprises: le système précédent était extraordinairement favorable aux entreprises très fortement capitalisées, on en est donc arrivé au taux unique, avec une mesure d'accompagnement - tout de même - consistant en une baisse de la taxation du capital des entreprises. La question qui se posait et qui se pose toujours - et c'est pour cela qu'il faut, me semble-t-il, renvoyer ce projet de loi en commission - n'est pas inintéressante, elle est la suivante: faut-il, comme certains cantons suisses, passer à un taux progressif ? C'est une possibilité qui avait été envisagée, mais, si le débat n'a pas eu lieu à ce sujet, c'est précisément parce qu'il fallait voter la concrétisation de l'initiative. Or cette concrétisation reprenait certains éléments de ce projet de loi, modifiés, tout simplement parce que celui-ci, sous sa forme actuelle, n'est pas très bon, il faut quand même le dire... Et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous nous abstiendrons si nous n'obtenons pas son renvoi en commission.
Pourquoi ce projet de loi n'est-il pas très bon ? D'abord - cela a été dit - parce que le taux fixé à 2% n'a pas de sens dans la situation actuelle. Il faudrait tout de même fixer la barre un peu plus haut. Ensuite, je ne suis pas sûr que ce soit une bonne chose d'associer une mesure fiscale à un taux de chômage... Intellectuellement, c'est très séduisant; informatiquement, c'est quelque peu difficile à réaliser et c'est assez insecure, au niveau des entreprises, qui aiment bien savoir ce qu'elles vont devoir payer.
Si nous voulons travailler sur ce projet en commission, c'est sur les bases suivantes. Premièrement: introduction - comme certains cantons suisses le font déjà, je le répète - d'une notion de progressivité, mais dans les deux sens, de l'impôt sur le bénéfice. Deuxièmement, et cela me semble important: si nous décidions de prendre cette mesure, il faudrait abolir la taxation sur le capital des entreprises, qui est une mesure stupide. En effet, une entreprise qui perd de l'argent - ce qui arrive périodiquement à certaines - est imposée, par le biais de l'imposition sur le capital, même quand elle subit des pertes... Elle est imposée sur ce qu'elle possède, sur son outil de production ! Ce deuxième aspect mérite à lui seul de corriger la loi. Troisièmement, et je suis désolé d'avoir à vous le dire, Monsieur Mouhanna: imposer le bénéfice net ne suffit pas à résoudre les problèmes ! Quand on impose le bénéfice, on impose ce qui est redistribué... Je vous assure que je n'ai aucun problème à imposer un peu plus ce qui est redistribué que ça ne l'est actuellement ! Par contre, je ne suis pas d'accord pour ce qui est d'imposer davantage la capacité d'auto-investissement de l'entreprise, ce qui serait le cas dans cette loi ! Et je ne suis pas sûr du tout que cela soit judicieux.
En outre, je vous dirai, Monsieur Mouhanna, que certaines entreprises qui comptent parmi les gros contribuables - je ne peux pas les citer, mais nous les connaissons tous, cela a un rapport avec l'horlogerie - offrent beaucoup d'emplois à Genève. Il ne s'agit pas d'entreprises qui délocalisent; elles viennent au contraire s'implanter durablement, avec des bâtiments dont vous avez pu voir qu'ils ne sont pas modestes... Contrairement à d'autres entreprises dans d'autres secteurs, elles ont énormément investi sur place et offrent un énorme nombre d'emplois. Ce sont du reste les seules très grosses entreprises que nous ayons à Genève et, par conséquent, ce sont les seules à payer des impôts sur le bénéfice, puisque la plupart des petites entreprises n'en payent que très peu.
Dans ces conditions, je pense qu'on peut tous être d'accord - en tout cas sur les bancs de l'Alternative nous le sommes, avec tous ceux qui admettent qu'il faut réfléchir aux systèmes fiscaux - sur le fait qu'il y a des questions qu'on peut se poser sur la fiscalité des entreprises, que la réforme précédente a été digérée et qu'on a donc le droit de parler de choses nouvelles, que - malheureusement, ce que vous avez dit est faux, Monsieur Mouhanna - l'initiative a abouti, elle a été acceptée par le peuple; c'est sa concrétisation qui a été refusée ! C'est comme pour la traversée de la Rade, ça s'arrête - heureusement - mais on a le droit de faire des propositions nouvelles !
Mesdames et Messieurs, je crois que c'est vraiment l'occasion de réfléchir à la fiscalité des entreprises, et je dirai à ceux qui ne veulent pas l'augmenter que je suis persuadé qu'un système progressif sur le montant des bénéfices, mais sans imposer le capital, serait bien meilleur sur le plan économique ! Et si, par la même occasion, on récoltait 30 ou 40 millions de plus, je ne pense pas que ça léserait qui que ce soit...
Mais c'est vous qui avez la majorité, Mesdames et Messieurs les députés ! Et il ne serait pas très intelligent de refuser de discuter de ce sujet important. Je soutiens donc de toutes mes forces, avec mon groupe, la proposition faite par Mme Grobet, de renvoyer ce projet de loi en commission.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Kunz, je vous donne la parole, sur le renvoi en commission uniquement.
M. Pierre Kunz (R). Oui, Madame la présidente ! Mesdames et Messieurs les députés, les explications de M. Hiler sont extrêmement intéressantes, voire pertinentes, et il faudra nous en souvenir lorsque le moment sera venu de traiter le problème de la fiscalité des entreprises. Mais la décision de renvoyer ou non ce projet de loi en commission n'a rien à voir avec son exposé très intéressant !
Il s'agit simplement de savoir ce que nous voulons faire de ce projet de loi, dont le seul objectif, avoué, repris dans les arguments de l'Alliance de gauche et du parti socialiste pour lancer leur campagne électorale, c'est: «faire payer les riches» ! Eh bien non, ce n'est pas du tout ce que nous voulons ! (Rires et exclamations.)Non, ce n'est pas du tout ce que nous voulons ! Nous voulons parler sérieusement de la fiscalité ! Or, ce projet de loi est totalement inadéquat, anachronique - stupide, excusez-moi de le dire ! - et c'est pour cela qu'il ne faut pas le renvoyer en commission mais le rejeter !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je vous donne la parole, Monsieur Mouhanna, toujours uniquement sur le renvoi en commission...
M. Souhail Mouhanna (AdG). Merci, Madame la présidente. Tout à l'heure, M. Hiler devait uniquement s'exprimer sur le renvoi en commission, pourtant j'ai entendu un long plaidoyer... Je serai beaucoup plus bref que lui et me prononcerai sur le renvoi en commission, bien sûr !
Tout d'abord, je viens d'entendre M. Kunz dire qu'il voudrait enrichir les riches... Et, pour enrichir les riches, il faut évidemment que les pauvres soient plus nombreux ! On voit bien que c'est l'objectif qu'il poursuit depuis très longtemps ! (Exclamations.)
Monsieur Hiler, permettez-moi de dire que j'ai noté quelques contradictions dans votre intervention. D'un côté, vous nous vantez les entreprises installées à Genève qui offrent beaucoup d'emplois, en expliquant qu'il ne faut pas les imposer, car cela hypothéquerait, précisément, l'offre d'emplois dans ces entreprises. Dans le même temps, vous soutenez le renvoi en commission de ce projet de loi en disant que vous êtes favorable à une imposition progressive. Vous n'êtes donc pas du tout opposé à l'imposition des bénéfices, puisque vous pouvez concevoir une imposition progressive sur les bénéfices ! Il y a donc quelque chose que je ne comprends pas dans votre raisonnement.
Vous dites que vous voulez réduire l'impôt sur le capital... Vous savez très bien, Monsieur Hiler, qu'à Genève il y a des entreprises très fortement capitalisées qui n'ont quasiment pas d'employés... Et abolir l'impôt sur le capital serait leur faire un énorme cadeau, alors qu'elles ne créent aucun emploi et qu'elles font, précisément, des affaires purement financières, avec certaines personnes sur place. Au niveau de l'emploi, ce n'est pas quelque chose de rentable pour le canton.
Vous parlez d'imposer les bénéfices et, dans le même temps, vous nous reprochez de vouloir prendre l'argent où il est... Je vous rappelle qu'il s'agit d'imposer les bénéfices nets, la part qui dépasse les provisions et les réserves faites par les entreprises... (L'orateur est interpellé.)Vous dites que c'est faux, alors examinons cela en commission ! Nous sommes d'accord de renvoyer ce projet de loi en commission, et, comme on y examinera tous ces éléments-là, eh bien, nous verrons si, véritablement, les uns et les autres, vous voulez imposer les bénéfices réalisés par les entreprises, pour que les sommes ainsi récoltées soient redistribuées aux collectivités publiques ! Je vous rappelle quelque chose de très important: si ce projet de loi était adopté tel quel - sans parler de ce qu'il résulterait des travaux de la commission - il ne toucherait qu'une infime minorité des entreprises.
Je vous rappelle également que l'Etat consent des allègements fiscaux énormes - plusieurs centaines de millions - aux entreprises qui viennent s'installer à Genève. Vous ne pouvez donc pas dire qu'en imposant les entreprises on les ferait fuir ! Les allègements fiscaux ont attiré de nombreuses entreprises, mais, de cela, vous ne parlez pas ! Vous n'avez qu'à regarder les comptes de l'Etat et le rapport de gestion: vous constaterez que ces allègements représentent des centaines de millions ! D'ailleurs, certaines entreprises partent quand elles ne peuvent plus profiter de ces allègements. Je ne dis pas que c'est le cas pour toutes les entreprises, mais cela existe. Mais, puisque...
La présidente. Monsieur le député, ayez la gentillesse de vous exprimer sur le renvoi en commission !
M. Souhail Mouhanna. Encore trente secondes, Madame la présidente ! Mesdames et Messieurs, vous ne parlez jamais de solidarité entre les entreprises... Il y a des entreprises qui font faillite, des entreprises qui ne sont jamais aidées par les banques alors qu'elles le mériteraient - des petites et moyennes entreprises, notamment. Eh bien, ce serait peut-être l'occasion de faire en sorte que l'Etat impose les gros bénéfices ! Pour pouvoir consentir des allègements fiscaux, précisément aux entreprises en difficulté. C'est cela, la solidarité entre les entreprises, mais vous n'en voulez pas ! M. Kunz dit qu'il ne veut surtout pas prendre de l'argent aux riches, que ce n'est pas son but... On sait bien quel est son but !
Nous sommes donc d'accord de renvoyer ce projet de loi en commission.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Madame la rapporteure, vous avez la parole.
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC), rapporteuse. Je m'exprimerai après le vote sur le renvoi en commission, Madame la présidente.
Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais m'exprimer sur le renvoi en commission.
Quelles que soient les réflexions de M. Hiler, renvoyer en commission ce projet de loi n'apportera rien dans une discussion de ce type à l'heure actuelle, même si l'imposition du capital et l'aménagement de l'imposition des entreprises est un sujet important - qui avait d'ailleurs été abordé par d'autres biais par la commission fiscale. Cela n'apportera rien, d'autant moins - je dois vous le dire et si ma mémoire est bonne - qu'un projet de loi traitant de cette problématique est toujours en commission.
Pourquoi, en tant que représentante de l'Etat, est-ce que je ne souhaite pas que ce projet de loi soit renvoyé en commission ? Comme certains l'ont dit tout à l'heure, il est mauvais pour les entreprises de vivre dans l'incertitude. Et ce projet touche les 120 entreprises qui assurent 75% des ressources de l'impôt sur les personnes morales ! C'est donc un très petit nombre d'entreprises qui assure les trois quarts des ressources constituant l'impôt sur le bénéfice et sur le capital, soit à peu près 700 millions par an.
Il serait grave de prendre des dispositions, même provisoires, pour augmenter les impôts: ce serait donner un signal négatif à ces entreprises qui forment véritablement le socle de l'économie genevoise. Et le renvoi en commission de ce projet de loi, avec les arguments qui ont été développés, laisserait planer un doute sur l'issue des travaux, alors que les entreprises, comme cela a été dit tout à l'heure, ont besoin de stabilité dans le domaine fiscal. Que vous entamiez un débat de fond, je le dis... (Commentaires.)J'ai la courtoisie de ne pas vous interrompre lorsque vous parlez - j'essaie, en tout cas la plupart du temps, Monsieur Pagani... Je sollicite la même bienveillance de votre part et vous en remercie.
Je termine en disant simplement que le débat sur la fiscalité des entreprises peut avoir lieu, mais ce projet n'est pas l'occasion de le faire. En effet, son concept est de nature différente: il ne vise pas du tout à modifier le droit fiscal en profondeur, il vise à apporter une solution immédiate à une situation conjoncturelle difficile en proposant un très mauvais moyen, puisqu'il pèserait sur les entreprises qui fournissant l'essentiel de la richesse fiscale, aujourd'hui en augmentation. En augmentation probablement parce que la politique fiscale permet à ces entreprises de trouver leur compte à Genève tout en payant leurs impôts ! (Applaudissements.)
Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 7987 à la commission fiscale est rejeté par 49 non contre 35 oui.
La présidente. Madame la rapporteure, vous vouliez ajouter quelque chose, je vous donne la parole.
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC), rapporteuse. Tout d'abord, je vous prie de m'excuser d'intervenir après vous, Madame la présidente du Conseil d'Etat. Je me rends compte maintenant que le fait d'avoir voulu prendre la parole après le vote sur le renvoi en commission m'y a amenée, j'en suis désolée, c'est peu courtois de ma part.
Je voulais juste relever quelques faits. Tout d'abord, déplorer l'absence des députés de l'Alliance de gauche en commission... Vous aurez en effet pu constater qu'ils n'ont pas jugé leur projet de loi suffisamment intéressant pour participer aux travaux de la commission fiscale qui a traité de ce projet de loi ! (Protestations.)Bien sûr, il n'y a ni la presse ni Léman Bleu à la commission fiscale, mais nous aurions tout de même été heureux de les entendre à cette occasion... (Rires et applaudissements.)
Pour ce qui est de l'étude de ce projet de loi, je dois dire que l'Alliance de gauche nous permet également d'approfondir le sujet, puisque ce projet est le troisième déposé sur le même modèle en très peu de temps et qu'il y en a encore un autre en commission... (L'oratrice est interpellée.)Exactement, ils font des photocopies ! Et lorsqu'on nous dit que ce projet de loi mérite d'être réexaminé en commission, étant donné que la situation a changé... Eh bien, apparemment, elle n'avait pas suffisamment changé à leurs yeux, pour qu'ils ne modifient qu'une seule virgule entre deux projets de lois déposés !
J'aimerais aussi revenir sur un élément évoqué par Jean Rémy Roulet, à savoir le seuil de 2% de chômage - M. Hiler s'y est également référé. Nous sommes tous conscients qu'il y a très peu de chance - malheureusement - pour que nous arrivions, ces prochains temps, à descendre au-dessous de ce seuil. Eh bien, le projet de loi de l'Alliance de gauche contribuerait encore moins à descendre au dessous de ce seuil, puisqu'il touche pratiquement 90% des 200 plus grosses entreprises que l'on va taxer davantage. Et certaines d'entre elles n'auront effectivement que le choix de s'expatrier dans d'autres cantons, ce qui aura un effet sur l'emploi. Mais un effet négatif ! Donc, Mesdames et Messieurs les députés de l'Alliance de gauche, votre projet de loi ne ferait qu'augmenter le taux de chômage !
Enfin, j'en viens à la position socialiste. Je vous citerai - sans le nommer, sinon il demanderait le droit de répondre - les propos d'un député. Il disait, il y a une année, à propos de ce projet de loi - soit le volet «Personnes morales», alors que nous traitions à l'époque de l'autre projet de loi, le volet «Imposition sur la fortune»: «Les différentes votations qui ont eu lieu entre le dépôt de ce projet de loi et son traitement en commission l'ont cependant rendu obsolète. Les socialistes s'abstiendront donc sur ce projet de loi, comme ils l'ont fait en commission.» Une année s'est écoulée depuis lors, et nous nous rapprochons de la période électorale... Des listes apparentées vont bientôt être constituées... Dans un bel élan de fraternité, les partis de gauche ont lancé des initiatives en commun... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)Sans doute, la position des socialistes, aujourd'hui, est-elle motivée par le fait que ces initiatives pétouillent un petit peu... (Rires.)... ce qui explique leur soutien à ce projet de loi.
Je remarque également avec tristesse que le parti socialiste, qui a une championne en la personne de Mme Calmy-Rey, remet en cause aujourd'hui deux des actions - l'une avérée, l'autre supposée - de Mme Calmy-Rey: avérée dans le cadre du taux unique, puisque c'est elle, avec Mme Sayegh, qui a proposé l'introduction du taux unique à Genève, et supposée, puisque Mme Calmy-Rey s'est également arrogé la «maternité» de l'initiative libérale sur les 12% en nous annonçant à grand renfort de courriers que, grâce à sa somptueuse gestion des finances, cette initiative pourrait rapidement être concrétisée. Je suis donc très triste de voir que le parti socialiste ne soutient pas sa conseillère fédérale.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à refuser ce projet de loi. (Vifs applaudissements. Brouhaha.)
La présidente. Madame Fehlmann Rielle, la liste des intervenants est close depuis un long moment, nous... (Protestations.)Mme Fehlmann n'a pas été attaquée ! (Exclamations.)Personne n'a été interpellé nommément ! (Exclamations.)Alors, je vous accorde la parole pendant une seconde, Madame la députée ! Seulement une seconde. (Un instant s'écoule.)
Soit ! Nous passons au vote d'entrée en matière... (Remarques.)Il n'a pas été mis en cause ! (Exclamations.)Non ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)Madame Fehlmann Rielle, pour le parti socialiste, vous avez le droit de dire un mot. Un mot seulement ! (Remarque.)Si ! Par contre, M. Mouhanna n'a pas été mis en cause. (Exclamations.)
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Rassurez-vous, je n'ai pas l'habitude de faire des discours-fleuves !
En l'occurrence, j'estime que Mme Ruegsegger a mis en cause le parti socialiste qui a tout à fait le droit de changer de position au moment de la discussion. Nous avons en effet déploré que l'Alliance de gauche n'ait pas défendu ou pu défendre son projet en commission. Mais, comme nous l'avons dit, la situation a changé depuis lors. Nous vous le répétons, et vous le savez mieux que nous: le taux de chômage est de 7% à Genève et cela justifie les sacrifices de toutes parts, soit, en particulier, les entreprises ou les gros contribuables qui peuvent, précisément, contribuer à l'amélioration de la cohésion sociale !
Quand vous dites que les entreprises ne pourront que plier bagage si la fiscalité est augmentée... Vous savez que c'est faux ! Et M. Stéphane Garelli - un économiste qui est loin d'être gauchiste - a rappelé, il y a peu de temps, que le moteur de la croissance n'était pas l'attractivité fiscale, mais bien d'autres sujets, notamment la qualité du management, l'expérience, l'éducation, la technologie et, aussi, la stabilité d'un canton ou d'un pays ! (Commentaires.)Et cette stabilité, vous la menacez ! Vous la menacez par votre politique antisociale ! (Exclamations.)Alors maintenant, arrêtez d'affirmer des contrevérités ! Nous demandons effectivement...
La présidente. Madame la députée, vous deviez vous exprimer une minute seulement, à propos de votre revirement !
Mme Laurence Fehlmann Rielle. Cela ne vous plaît peut-être pas d'entendre la vérité, Messieurs - et Mesdames... - mais c'est ainsi ! J'aurais dû dire seulement «Messieurs», parce que ce sont plutôt les messieurs qui mènent cette politique antisociale ! (Vifs applaudissements. La présidente agite la cloche.)
Mis aux voix, ce projet est rejeté en premier débat par 50 non contre 26 oui et 9 abstentions.