Séance du
vendredi 18 mars 2005 à
17h
55e
législature -
4e
année -
6e
session -
32e
séance
PL 9395-A
Premier débat
La présidente. Je vous passe la parole, Monsieur le rapporteur de majorité.
M. Jean Rémy Roulet (L), rapporteur de majorité. Je n'ai rien à ajouter, Madame la présidente.
La présidente. Je passe donc la parole à Mme Künzler.
Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse de minorité. J'interviens très brièvement sur cet objet pour vous rappeler qu'il s'agit d'un bâtiment qui pourrait tout à fait faire partie des immeubles pour les fondations HBM. Cet immeuble occasionne une perte de près de 3 millions. Que dire de plus ? A nouveau, c'est un objet qui rapporte plus de 5%; il pourrait s'agir d'un objet valable. On ne comprend dès lors pas pourquoi il n'y a toujours pas d'acquisition.
M. Souhail Mouhanna (AdG). Juste un mot. Le rapport de majorité de M. Muller sur l'objet précédent prétend que la minorité voudrait brader les objets en question. Je constate que, même lorsqu'il y a des objets rentables comme ceux-là, dont les destinations pourraient être très utiles car répondant à certains besoins, la majorité veut s'en débarrasser. Je vous retourne donc le compliment: c'est bien la majorité qui veut brader ce patrimoine !
M. Jean Rémy Roulet (L), rapporteur de majorité. Si l'on regarde de façon un peu plus attentive la fiche technique que la Fondation nous a fournie sur cet objet, on constate que le rendement actuel de cet objet est négatif; il est nécessaire de faire des travaux à hauteur de 600 000 F, ou à peine moins. Je ne comprends pas que la minorité souhaite que la Fondation acquière un objet vétuste et mal entretenu. De plus, si l'on parcourt la liste de la CGAS - dont je croyais que l'objet premier était de défendre les travailleurs et les travailleuses plutôt que de faire de la politique sociale via le logement - on constate que la plupart des objets qu'elle demande à l'Etat d'acheter sont vétustes. Quelque chose m'échappe. Certains objets datent de 1900, comme à la rue de Monthoux ou à la rue du Comte-Géraud, à Onex - et, des exemples comme ceux-là, il y en a une dizaine, le tout pour une valeur estimée par la CGAS de plus de 100 millions.
En tant que député, je préfère nettement que l'Etat concentre son énergie et ses ressources financières sur d'autres acquisitions, et non sur des biens dont la valeur intrinsèque est souvent remise en question.
De plus, comme je l'ai déjà dit lors de ma précédente intervention concernant les EMS, il existe de formidables leviers financiers dans la République. Je pense, par exemple, aux caisses de prévoyance publiques. Ce sont plutôt ces institutions qui doivent mener une véritable politique d'acquisition des logements sociaux. Si l'on veut être cohérent, mieux vaut construire davantage de logements sociaux - par le biais de ces institutions - plutôt que d'acquérir des logements dans lesquels vivent déjà souvent des habitants. Ce paradoxe m'échappe: je ne comprends pas pourquoi les syndicats et la minorité de ce parlement veulent conférer à la Fondation un rôle social qui ne lui était pas destiné.
M. Pierre Kunz (R). Chaque fois que certains accuseront la majorité actuelle de «brader» - comme ils disent - des immeubles, je répéterai qu'en réalité c'est la majorité qui prévalait dans ce Grand Conseil le 19 mai 2000 qui a voté le bradage, pour 2,3 milliards, de créances qui étaient fixées à 5 milliards dans les livres de la BCGe. Monsieur Mouhanna, à l'époque, c'est vous et vos collègues qui avez décidé de brader 5 milliards d'actifs pour 2,3 milliards ! Chaque fois que vous prétendrez que nous bradons des immeubles A, B ou C, je vous répéterai cela, parce que c'est la vérité !
M. Souhail Mouhanna (AdG). En réponse à M. Kunz. Premièrement, je n'étais pas là. Deuxièmement, ce n'est pas 2,3 mais 2,7 milliards, Monsieur Kunz. Vous ne connaissez même pas les chiffres ! Troisièmement, cette perte de 2,7 milliards vient de quelque part - et qui l'a occasionnée, Monsieur Kunz ?!
M. Pierre Kunz. C'est égal !
M. Souhail Mouhanna. Non, ce n'est pas égal ! Vous savez très bien qui a occasionné cette perte: ce sont les milieux les plus proches de vous, de cette majorité de l'Entente - enfin, elle n'est pas encore majoritaire, mais le soutien de l'UDC lui donne cette majorité. Ce sont vos amis - vos amis - qui ont occasionné ces 2,7 milliards de perte ! Des gens sont aujourd'hui derrière les barreaux pour de petites choses, mais, pour ces milliards, personne ne se trouve derrière les barreaux ! Alors, ne venez pas faire la leçon à ceux qui ont essayé de faire en sorte que l'Etat ne perde pas la totalité des engagements de la Banque ! Si cette dernière avait fait faillite, cela aurait engendré des milliers de chômeurs supplémentaires. La majorité de l'époque a voté cette espèce de sauvetage de la Banque cantonale pour réparer les dégâts de ceux qui ont trafiqué les comptes de la Banque cantonale, qui ont trompé la population et qui, comme vous le savez, ont tout fait pour éviter que la gauche ait un droit de regard sur ce qui se passait dans cette banque ! Alors, n'inversez pas les rôles, Monsieur Kunz ! Vous voulez continuer l'oeuvre des différentes «composantes» de la Banque cantonale qui ont occasionné ces pertes considérables en prétendant que la Fondation n'a pas à faire de la politique sociale. Mais nous ne sommes pas en train de demander à la Fondation de faire de la politique sociale, c'est au Conseil d'Etat qu'on demande d'en faire ! A chaque fois, vous faites diversion ! C'est le Conseil d'Etat qui n'assume pas notre demande, alors qu'il en va de sa responsabilité. Ne faites pas de procès à ceux qui sont les victimes de votre politique !
Chaque fois que vous braderez le patrimoine de cette collectivité, nous le dénoncerons. Vous faites systématiquement passer les contribuables à la caisse, vous votez des baisses d'impôts au profit des plus riches et les petits trinquent alors qu'ils sont une très grande majorité. C'est toujours la même chose ! Que ce soit au niveau de la Fondation, du budget de l'Etat, des prestations ou de la politique sociale, vous adoptez toujours la même attitude ! Toujours moins de prestations, moins d'Etat social et plus de profit pour les spéculateurs !
La présidente. Nous allons clore la liste des intervenants. Sont encore inscrits Mme et MM. Spielmann, Broennimann, Kunz et Künzler. Monsieur Spielmann, je vous passe la parole.
M. Jean Spielmann (AdG). Chaque fois que M. Kunz en a l'occasion, il se lève pour dire que nous sommes responsables du découvert. Permettez-moi de vous rappeler encore une fois que, pendant des années, nous sommes intervenus dans ce parlement pour dénoncer les spéculateurs qui conduisaient la Banque cantonale dans la situation que nous connaissons. Et à chaque fois, dans vos bancs, on a essayé de nous faire taire: motions d'ordre, silences, menaces, procès, etc. Il est clair, Monsieur Kunz, que vous ne pouvez pas nous reprocher cette situation financière et cette spéculation, car nous les avons dénoncées, nous avons demandé des comptes - et, chaque fois, vous nous avez fait taire. Aujourd'hui, la réalité vous a dépassé !
Mais, Monsieur Kunz, membre du parti radical qui vient donner des leçons sur le découvert du déficit, regardez un peu ce qui se passe dans vos milieux ! Regardez ce qui se passe quand on vous fait confiance et que l'on vous donne à gérer une compagnie d'aviation, par exemple ! Des radicaux étaient à la tête de Swissair, et l'on voit où ils ont conduit notre compagnie nationale ! Et ce qu'ils ont mis en place au niveau des banques ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)Ils ont conduit des scandales extraordinaires alors qu'ils étaient les responsables politiques ! Ils ont même écrit le grand «Livre Blanc» pour donner des leçons d'économie à tous les autres ! Combien vaut aujourd'hui l'action mise en place par vos prédécesseurs qui expliquaient à tout le monde comment gérer l'économie ?! Et vous, vous venez nous donner des leçons alors que nous avons constamment dénoncé cette politique de fuite en avant, cette spéculation ?! Dans ce parlement, je suis l'un des seuls qui refuse de payer les déficits pour chacun des projets de lois de la Fondation et chaque fois que nous perdons de l'argent. Regardez ce que nous avons dépensé ! 76% de déficit dans certains cas ! Qui a pris cet argent ? A qui l'a-t-on prêté ? Qui est incapable de le rendre ? Qui a mis en faillite ses sociétés et vit aujourd'hui à l'aise alors que les contribuables paient 20% de leurs impôts pour rembourser les malversations dont vos milieux sont responsables et dont vous êtes responsables politiquement ? Et vous venez nous donner la leçon ! Monsieur Kunz, il y a des moments où vous feriez mieux de vous taire !
M. Martin-Paul Broennimann (S). Je suis particulièrement sensible à la proposition de Mme Künzler de repêcher, au sein de la Fondation de valorisation, des objets pouvant être utiles pour le logement social. Depuis longtemps, au sein des fondations immobilières, nous avons cherché à récupérer des immeubles existants en ville, à les rénover et à les exploiter. Il y a plusieurs raisons à cela.
La première, c'est qu'il faut beaucoup de temps pour trouver un terrain, pour le développer, l'exploiter, le mettre en valeur ! Or, il s'agit ici d'objets immédiatement utilisables; c'est donc un avantage important. Souvent, ces immeubles sont bien mieux adaptés à des locataires ayant de modestes revenus. Pourquoi ? Parce qu'ils sont proches des équipements et des transports publics. Il n'y a pas besoin d'avoir une voiture, on ne se planque pas dans un ghetto à l'extérieur de la ville, mais on vit au centre, où l'on trouve un mélange, une mixité et où existent déjà des structures, notamment au niveau associatif.
Il y a un point que je ne comprends toujours pas depuis le début. Depuis que les fondations immobilières savent que la Banque cantonale a des objets «en difficulté», nous avons cherché à en acquérir. A l'époque, nous avions rencontré, au sein de la direction de la Banque cantonale, le directeur des affaires spéciales. On a eu des séances ensemble, on a regardé des listes, mais il n'est jamais arrivé à nous dire: «Voilà des objets pour vous, prenez-les, voilà le prix, etc.». Il est vrai que, comme n'importe quel autre acquéreur, nous avons pu acquérir quelques objets par les enchères. Pourquoi pas ? Il est rassurant de savoir qu'une liste est maintenant examinée par le Conseil d'Etat; l'avenir est assuré. Mais on voit passer devant nous des objets, et je le regrette... Comment cela se fait-il que l'Etat fasse, avec la main droite, une chose que la main gauche ignore ? Pourquoi ne pas faire deux choses intelligentes en même temps et saisir les opportunités quand elles se présentent ?
Il n'y a plus que trois objets avant l'examen soigneux que nous attendons, mais regardons ces trois objets ! Pourquoi les bazarder, les laisser partir dans le privé alors que nous en avons besoin ? Je soutiens la demande de Mme Künzler et vous demande de ne pas mettre en vente ces immeubles - particulièrement celui qui pourrait tout de suite être mis en location à titre de logement social.
M. Pierre Kunz (R). Pour commencer, je suggère à M. Broennimann de participer aux travaux de la commission de contrôle de la Fondation de valorisation. Ainsi, il serait immédiatement au fait des immeubles à vendre. Je vous promets que l'on ne vous accusera même pas de délit d'initié si vous les achetez dans vos fondations.
Deuxième point. Monsieur Mouhanna, je répète que c'est bien le 19 mai 2000 que vous avez décidé qu'il fallait passer une provision de 2,7 milliards et que vous avez, par conséquent, admis que l'on allait brader pour 2,3 milliards.
Troisième point. Vous et vos collègues, vous pouvez toujours réclamer plus de social, plus de social, plus de social ! C'est votre droit, jouez votre rôle, d'accord. On n'a pas les sous, mais cela ne vous paraît pas si important...
Dernier point pour répondre à M. Spielmann, qui prétend que les radicaux ne sont pas de bons gestionnaires. Qu'il regarde à l'Est et qu'il nous explique comment il se fait que les méthodes de gestion qu'il nous propose à longueur d'années aient donné de si piètres résultats à Moscou, à Bucarest, à Varsovie et j'en passe !
Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse de minorité. J'aimerais d'abord dire qu'en aucune manière nous ne voulons que la Fondation de valorisation fasse de la politique de logement social. Ce n'est pas son rôle, les personnes qui s'y trouvent n'ont pas été choisies pour cela et ce n'est pas du tout notre objectif.
Notre objectif est que le Conseil d'Etat examine ces objets et passe enfin à l'acte. Je vous rappelle, Madame la présidente, que ces deux objets se trouvent sur la liste des syndicats. Ils ont été étudiés deux fois déjà. On reviendra sur l'objet suivant, mais, en l'occurrence, M. Roulet nous dit qu'il s'agit d'un rendement négatif. Si l'on réduit le retard d'impôts, c'est normal; il s'agit, en réalité, d'un objet qui rapporte plus de 5%. C'est tout à fait acceptable. Et si nous voulons des logements en ville, c'est, comme l'a dit M. Broennimann, qu'ils ne sont pas marqués socialement.
Si ces objets ne créent peut-être pas de logements supplémentaires, ce qu'il ne faut pas oublier, c'est qu'ils bénéficient d'un taux d'occupation nettement supérieur à la moyenne. Voilà ce que l'on oublie dans la question du logement: le taux d'occupation ! Car, quand il s'agit d'un logement social, le taux d'occupation donné par la loi est bien plus élevé que l'usage. Genève ne compte même pas deux personnes par logement: plus de la moitié des logements sont occupés par une seule personne. Il y a donc là un réel problème. Nous vous engageons à refuser cette vente, d'autant plus que cet objet - comme le suivant - fait partie de la liste des syndicats.
Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 44 oui contre 31 non.
La loi 9395 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9395 (nouvel intitulé) est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 40 oui contre 31 non.