Séance du
vendredi 19 décembre 2003 à
14h
55e
législature -
3e
année -
3e
session -
14e
séance
P 1407-A
Débat
M. Alain Etienne (S), rapporteur. Cette pétition a été déposée par le Groupe de liaison genevois des associations de jeunesse - le GLAJ. Il s'agit d'une fédération qui regroupe cinquante associations oeuvrant en faveur de la jeunesse. Le GLAJ cherche à défendre Vacances Nouvelles et le Centre protestant de vacances - le CPV. Ces deux associations se trouvent en effet confrontées depuis quelque temps à d'importantes difficultés financières.
Pour rappel, ces deux associations produisent 30% des camps de vacances du canton - ce qui, vous en conviendrez, n'est pas rien ! Il devient de plus en plus coûteux d'organiser des camps de vacances en raison d'exigences toujours plus grandes: ces camps accueillent chaque année davantage d'enfants pour des séjours d'une durée de plus en plus courte par rapport aux colonies de vacances d'alors. Ces deux associations sont actuellement subventionnées à la production. La pétition vise à faire reconnaître leurs besoins en infrastructure. Ces associations doivent en effet assumer d'importants frais généraux - notamment les coûts de formation des moniteurs. Elles doivent également faire face à des augmentations de loyers, à la hausse du coût de la vie ainsi qu'au recrutement de bénévoles. M. Heyer, que nous avons auditionné, nous a fait part de la répartition des subventions: ces deux associations reçoivent une subvention qui couvre une partie de leurs frais généraux.
Pour rappel également, le Grand Conseil a voté en juin 2002 une motion - la motion 1465 - demandant une étude quant à l'opportunité d'augmenter les moyens attribués aux organisateurs de camps de vacances ainsi que la libération du solde budgétaire. Ce solde, d'un montant de 50 000 F, a été libéré: 20 000 F ont été attribués à Vacances Nouvelles, 30 000 F au CPV. Ces montants concernaient cependant l'année 2002. Nous sommes maintenant en 2003, et les problèmes financiers persistent tant pour cette année que pour la suivante. Il manque, pour 2003, 120 000 F pour Vacances Nouvelles et 125 000 F pour le CPV. Sans une aide d'urgence, ces deux associations envisagent une remise en question de leurs activités à la fin de l'année. Ces associations étant subventionnées à la production, si l'offre des camps est réduite en raison d'un manque de moyens, la subvention de l'année suivante se trouvera réduite. On entre dans un cercle vicieux - un cercle infernal. Un système de subventions déplafonné a été mis en place en 2002, mais les associations n'ont pas touché beaucoup plus.
Il faut également signaler qu'avant de prendre une décision concernant une éventuelle augmentation des subventions, l'office de la jeunesse a décidé de lancer une étude afin d'évaluer les besoins réels en matière de camps de vacances - ce qui correspondait à la deuxième invite de la motion 1465. M. Pini, de l'Université de Genève, a été mandaté pour réaliser cette étude. Celle-ci comporte trois phases: la première phase consiste à évaluer les besoins par le biais d'une enquête téléphonique; la deuxième phase consiste à contacter les associations organisatrices de camps de vacances afin d'observer l'offre actuelle; enfin, la troisième phase réside dans l'évaluation de l'adéquation entre l'offre et la demande. Ce rapport était attendu pour l'été. Comme nous avons étudié cette pétition dans le courant du mois de mai, nous ne disposions pas encore des résultats de ladite étude - résultats que nous attendons toujours.
La commission a auditionné tant les pétitionnaires que M. Heyer, de l'office de la jeunesse. Après une discussion, elle a décidé à l'unanimité de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat afin de trouver une solution garantissant les activités de ces associations pour les années 2003 et 2004. Nous attendons également les résultats de l'étude de M. Pini. La commission avait par ailleurs demandé à ces deux associations de nous fournir leurs comptes 2002. Ces comptes ont été annexés à mon rapport.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Hier soir, il a été demandé de faire lecture d'un courrier du Centre Protestant de Vacances (C 1731). Je prie Mme la secrétaire du Bureau de bien vouloir y procéder.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Comme le souligne le rapport très exhaustif de M. Etienne, la question abordée par la pétition dépasse plus largement qu'on ne le pense une simple problématique de vacances: il s'agit d'une véritable problématique sociale. De nombreuses familles comptent en effet sur des groupements tant publics que privés pour organiser leurs vacances selon des modalités qui suivent l'évolution économique et sociale de notre société. Je pense notamment à la difficulté pour certains parents de prendre leurs vacances aux bonnes périodes ainsi qu'aux familles monoparentales.
La politique actuelle, organisée selon une offre à la fois publique et privée - mais à caractère associatif - met en évidence tant la dimension historique de l'organisation des camps de vacances que la difficulté à déployer un nouvel élan qui corresponde à la nouvelle problématique économique et sociale. Ce secteur se trouve donc en mutation - et, Monsieur Kunz, que l'on ne se trompe pas sur l'enjeu ! Derrière la problématique des camps de vacances, il convient de s'interroger sur l'alternative existante si, en raison de divers risques économiques, l'offre en la matière devenait soudain défaillante. Ce message me paraît très important à une époque où nombre de collectivités publiques se trouvent confrontées à la fois à la difficulté de trouver des débouchés pour des jeunes gens durant les périodes de vacances et à l'inactivité de nombreuses cités. Comme on le constate dans d'autres secteurs - comme le secteur de l'enseignement ou le secteur social au sens large - Genève ne me semble pas à l'abri de ces phénomènes qui surgissent dans certaines collectivités publiques ou dans certaines cités. Ces risques doivent être pris en considération - et la pétition met précisément le doigt sur cette question centrale.
Il convient de prendre en compte deux éléments: le court terme d'une part, le moyen et le long terme d'autre part. S'agissant du court terme, il apparaît indispensable d'aider les divers groupements proposant des camps de vacances. Nous avons, à cet égard, rencontré des délégués du GLAJ pour imaginer la suite à donner aux différentes demandes d'aide adressées au département. Nous avons principalement discuté de la situation du Centre protestant de vacances et de Vacances Nouvelles en nous efforçant d'articuler le court et le long terme. Je reviendrai tout à l'heure sur la question du long terme et du calendrier, mais je puis d'ores et déjà vous annoncer que les demandes d'aide d'urgence concernant ces deux associations seront suivies d'effets par le département. Il s'agit là d'un élément indispensable - et ceci également dans le cadre d'une politique sur le long terme. Je suis en mesure de vous annoncer que nous avons réussi à trouver les financements nécessaires. J'en ai eu la confirmation le 16 décembre, soit il y a trois jours. J'entendais réserver la primeur de cette nouvelle au Grand Conseil plutôt que d'en faire une annonce préalable.
Le deuxième point important concerne la politique à adopter sur le long terme. Comme vous l'avez souligné, nous nourrissons de grandes attentes quant à la réorganisation du secteur même. Il ne sera en effet pas possible de vivre d'aide d'urgence en aide d'urgence. Afin de se donner les moyens d'aller de l'avant, deux rapports ont été commandés à l'Université de Genève. Par la même note du 16 décembre confirmant le financement du Centre protestant de vacances et de Vacances Nouvelles, l'Office de la jeunesse m'a informé de la réception desdits rapports. Cette note datant du 16 décembre, je n'ai pas encore eu l'occasion de prendre connaissance de ces rapports. Une lecture interne très rapide sera cependant effectuée cette année encore au sein du département. Nous organiserons ensuite une séance à destination du public intéressé - soit les associations et groupements organisant les camps de vacances. Nous tiendrons également le Grand Conseil informé de l'évolution de ce dossier, car il y a, à mon sens, matière à suivi. Le parlement nous indiquera quel est l'organe compétent - même si le suivi de ce dossier relèvera selon moi, dans un second temps, de la commission de l'enseignement et de l'éducation. Ces rapports pourront donc être utilisés; ils contiennent d'ailleurs, d'après les premiers échos que j'en ai eu, une mine de renseignements.
Il nous faut entamer la mutation que j'appelais de mes voeux au début de mon intervention. Il nous faut, en même temps, prendre conscience du point suivant: si nous pouvons - et nous devons - moderniser le financement de l'offre de vacances, il nous faut également constater le désengagement croissant d'autres milieux vis-à-vis de ces différents mouvements. Je pense notamment au Centre protestant de vacances, qui fait face au retrait du Centre social protestant. Si ce dernier se désengage, ce n'est, comme vous l'aurez compris, évidemment pas pour réaliser des économies en vue de les réinvestir en Bourse, mais parce qu'il fait lui-même face à d'importantes difficultés financières. Je ne parle même pas de l'Eglise nationale protestante: nous avons tous réalisé à quel point l'emploi des pasteurs était menacé dans notre canton. Si je relève ces éléments, ce n'est pas pour mettre le doigt sur les difficultés financières des uns et des autres, mais c'est pour que l'on prenne conscience du fait que certains milieux associatifs et caritatifs jouent un véritable rôle social d'intérêt public. Or, les problèmes de financement que connaissent certains de ces mouvements exercent des retombées sur l'offre sociale à destination de la population - offre qui correspond actuellement à un service public. Il nous faut donc mener une réflexion en la matière pour trouver des solutions dans le respect du partenariat entre secteur public et secteur privé tout en évitant que ce domaine ne tombe indirectement sous le contrôle absolu de l'Etat.
Voilà les éléments que je tenais à vous communiquer. Je vous remercie de m'avoir offert, à l'occasion de ce rapport, la possibilité de vous fournir ces quelques lignes de réponse. Sachez que j'adresse aujourd'hui même un courrier aux différents mouvements pour les informer de l'ensemble de ces nouvelles ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Il vous est proposé de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.