Séance du
jeudi 27 février 2003 à
17h
55e
législature -
2e
année -
5e
session -
21e
séance
IU 1367
M. Charles Beer (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés... (Brouhaha. Le député Dupraz parle hors micro.)...Monsieur John Dupraz... (Rires.)...mon interpellation urgente s'inscrit dans une stricte lucidité, celle d'avoir prévu l'interpellation urgente de M. Weiss. En effet, celle-ci s'inscrit désormais non plus dans l'urgence, mais dans la tradition, celle de connaître la vérité sur la gestion de l'Etat et les comptes de l'Etat. A cet égard, il a évoqué le chiffre de 50 millions de déficit pour la prévision du bouclement des comptes 2002, et Mme la présidente a d'ores et déjà répondu sur un certain nombre de points, montrant que le Conseil d'Etat était tout à fait lucide sur la situation financière. Il n'empêche qu'en fonction de deux informations qui semblent circuler - relèvent-elles de la rumeur ou de la réalité ? je vous demanderai de trancher - deux éléments sont avancés pour expliquer un résultat négatif. Le premier serait un dépassement des charges au département de l'action sociale et de la santé, extrêmement important puisqu'il avoisinerait les 40 à 90 millions. L'autre élément d'explication évoqué serait que les dernières personnes à être taxées - soit environ deux à trois cent millionnaires - ne l'auraient pas été pour l'année 2001, mais auraient été l'objet d'une évaluation, elle-même revue à la baisse en fonction de l'estimation économique.
Dès lors, en fonction de ce qui est régulièrement considéré - pas par le Conseil d'Etat, mais par certains députés - comme la gestion d'un héritage difficile de Mme Calmy-Rey, je demanderai au Conseil d'Etat de bien vouloir préciser ces deux éléments, qui ont évidemment une certaine importance par rapport aux résultats évoqués par M. Weiss à réitérées reprises.
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je vais répondre précisément à ces deux questions. S'agissant du département de l'action sociale, le dernier bouclement des comptes qui date d'aujourd'hui ne produit pas les chiffres que vous venez d'évoquer. Le dépassement sera inférieur à ces montants et, en ce qui concerne les derniers chiffres évoqués, de façon plus marquée. Cela n'empêche pas que le résultat des comptes ne sera pas un bon résultat, je l'ai dit tout à l'heure.
S'agissant de votre deuxième question, qui porte sur ce que vous avez appelé les millionnaires, j'aimerais dire une chose ici, très clairement. Je rappelle qu'il y a deux moyens de connaître les résultats: soit au moment de la notification du bordereau lorsqu'il arrive chez le contribuable, soit au moment de la taxation, avec une évaluation des montants qui ne sont pas taxés sur une base économétriquement démontrée. Dans le cas de ceux que vous appelez les millionnaires, nous n'avons pas procédé à une évaluation par rapport à la situation économique, ni opéré la soustraction. Au contraire, j'ai justement demandé que l'on opère la taxation pour ceux qui n'auraient pas reçu le bordereau, c'est-à-dire le contrôle exact de ce qu'ils devraient payer par rapport à la taxation qui devrait être la leur, et donc à la future notification. Et c'est sur cette base-là que les chiffres ont été établis, c'est-à-dire sur ce que devraient être les bordereaux de ces deux cent cinquante-six contribuables.
Pourquoi en est-il ainsi ? Il y a deux raisons à cela. La première, nous l'avons perçue les uns et les autres: sur ces personnes, on avait déjà fait le constat que les résultats économiques seraient probablement plus mauvais. Mais il y a aussi une deuxième raison, qu'on avait apparemment un peu oubliée, à savoir que dans ce dernier paquet qu'il restait à taxer de façon normale, comme chaque année, se trouvent ceux que l'on appelle les intercantonaux, ou plus précisément ceux qui ont des biens dans plusieurs cantons, voire sur le plan international. L'estimation ne peut donc être la même et, bien entendu, la taxation le montre. Ainsi, les estimations que l'on a pu faire antérieurement ne pouvaient pas correspondre à la totalité de ce qui pouvait être soumis à l'impôt, puisqu'il y avait des impôts dus dans d'autres endroits. Toute la question est de savoir quelle est la part qui est répartie à Genève, et quelle est la part répartie ailleurs. Je pense que les chiffres précédents ne tenaient probablement pas compte de cet élément-là, que la taxation a permis de constater. Pour être sûre que ces taxations nous donnaient une indication claire, j'ai demandé qu'on poursuive sur le reste. On a donc fait encore mille six cents taxations complémentaires, pour vérifier que les tendances qui étaient observées étaient réelles et non pas simplement dues au hasard. Or, non seulement la tendance est réelle, mais elle s'accentue. Nous avons pu en tirer une conclusion économétrique et précise.
Je tiens à vous dire une dernière chose, puisqu'on en est à ce chapitre. J'ai une formation d'économètre qui me permet de dire une chose: les comptes, les estimations, les hypothèses sont un travail d'ordre scientifique, sur des bases que l'on pose. Les analyses que l'on peut tirer dans ce type de cas doivent être autant que possible dénuées d'implication politique, jusqu'au moment où chacun en a pris connaissance. Pour moi, les comptes 2002 n'ont pas un prix politique. Lorsque j'ai décidé d'inscrire des chiffres et de les accepter, je l'ai fait avec quinze personnes autour de la table, c'est-à-dire tous les responsables, à un titre ou un autre. Ceux qui estiment, ceux qui taxent, ceux qui font l'évaluation et l'hypothèse, et ceux qui connaissent le terrain peuvent dire autour de cette table s'ils acceptent les hypothèses retenues pour les comptes, ou si l'un d'entre eux a un doute. S'il y a un doute, je n'accepte pas l'hypothèse et je ne la prends pas en compte. Je peux dire que, jusqu'ici, tout ce qui vous sera fourni a été accepté et validé. Ma responsabilité est ensuite d'accepter de le mettre dans les comptes. A partir de là, vous en débattrez le moment voulu.
Je tiens à dire que la réserve d'estimation est limitée à son strict minimum, et que la plus grande partie de ce qui devait être notifié l'a été. Le reste a été vérifié en terme de taxation pour les plus gros bordereaux. Pour terminer, Mesdames et Messieurs, beaucoup d'entre nous ont rencontré certains des taxés dont on parle aujourd'hui, qui vous répètent depuis des mois - pour ne pas dire plus - que le résultat probable serait inférieur à ces belles années. Eh bien, je crois que ce n'est pas très surprenant de retrouver finalement dans les comptes ce que les contribuables eux-mêmes ont constaté lorsqu'ils ont rempli leur déclaration.
Cette interpellation urgente est close.