Séance du jeudi 30 janvier 2003 à 17h
55e législature - 2e année - 4e session - 16e séance

IU 1339
(Réponse du Conseil d'Etat)Interpellation urgente de M. Robert Iselin : Situation financière de l'Etat et dette publique (Réponse du Conseil d'Etat)
IU 1343
(Réponse du Conseil d'Etat)Interpellation urgente de M. Pierre Kunz : Accroissement de la dette publique. Impact sur les comptes 2002 (Réponse du Conseil d'Etat)
IU 1351
(Réponse du Conseil d'Etat)Interpellation urgente de M. Pierre Weiss : LIPP V et notifications de taxation (Réponse du Conseil d'Etat)

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je ne sais si j'utiliserai les neuf minutes à ma disposition, mais je tiens toutefois à prendre quelques minutes pour préciser un certain nombre d'éléments, des éléments que nous fournissons d'ordinaire à titre d'information au moment de la présentation des comptes, mais que le débat qui vient de s'ouvrir contraint - peut-être est-ce une bonne chose - à aborder immédiatement.

J'aimerais d'abord rappeler quelques faits. Le premier de ces faits est le suivant: les notifications de bordereaux par l'administration fiscale se font ordinairement du mois de juin au mois de décembre. Comme vous avez décidé de passer au système postnumerando, la notification des bordereaux concernant l'année 2001 devait donc se faire en 2002; elle aurait dû commencer au mois de juin et se dérouler jusqu'au mois de décembre. Il s'est trouvé que les députés et le Conseil d'Etat ont déposé des projets de lois au mois de juin pour modifier la LIPP, estimant que la première version de cette loi posait quelques problèmes et qu'il s'agissait de procéder à des allégements. Vous avez décidé d'octroyer des allégements aux familles pour un montant de 50 millions. Ce faisant, et en votant le projet de loi final le 29 août dernier, vous avez - nous n'étions pas tous présents ici, mais j'en ai pris connaissance dans le Mémorial - décidé que la votation aurait lieu le 27 octobre et que, de ce fait, les notifications devraient intervenir par la suite.

Je ne pense pas qu'il soit raisonnable d'imaginer sérieusement que les notifications puissent intervenir dans le délai usuel, alors que nous utilisons un nouveau système informatique - un système qui n'est pas en cause, puisqu'il fonctionne, mais qui fonctionne pour la première fois - et que le 27 octobre des modifications ont été apportées à la loi qu'il faut encore intégrer système, une préparation qui demande au minimum quinze jours. On ne peut pas attendre de l'administration fiscale et de l'informatique qu'elles fassent sérieusement, en un mois et demi, ce que, usuellement et sans rien changer, l'on réalise en six mois. Lorsque nous aurons pratiquement terminé cette opération, le 15 février prochain, nous aurons, en trois mois et demi, dans des circonstances plus complexes, fait ce que l'administration est censée faire en six mois.

Je regrette infiniment que l'on ait fait cette promesse, parce que cette promesse ne pouvait pas être tenue, ni par les uns, ni par les autres: ni par le service informatique qui souhaitait de tout son coeur respecter les délais, ni par l'administration fiscale. Que fait aujourd'hui l'administration, Mesdames et Messieurs les députés ? Elle produit à la fois ces bordereaux, les mensualisations qui vont partir, c'est-à-dire à nouveau pour 242 000 contribuables, les bulletins pour les dix prochains mois, prépare dans le même temps les déclarations fiscales 2003, boucle les comptes et fait tourner les systèmes informatiques avec des gens qui travaillent depuis le mois de janvier, le jour et la nuit, week-ends compris. Ce qui n'est pas raisonnable. Ce que j'aurais pour ma part finalement souhaité, rétrospectivement, mais ce que vous n'avez - il faut bien le dire - pas souhaité non plus, aurait été de notifier les bordereaux en 2001, de les rectifier par la suite, puis de poursuivre les opérations en 2003, plus tranquillement.

Aussi, je ne parlerai pas de dysfonctionnement informatique. Ce n'est pas vrai. Mais en revanche, je pense qu'il n'était véritablement et raisonnablement pas possible de tenir des délais à fin 2002.

Ceci a bien sûr des conséquences, mais qui ne sont pas de l'ampleur que vous évoquez, à savoir de 700 à 800 millions, pour une raison simple. Lorsque vous notifiez, vous donnez le résultat final d'une facture dont les gens se sont acquittés, mois par mois, durant l'année précédente. Ce qui signifie, notamment pour les gros bordereaux, que certains d'entre eux pourraient très bien se voir rembourser certains montants. Ceci explique pourquoi, en définitive, il n'y a pas un manco équivalent aux notifications qui restaient à faire. Le manco de la trésorerie est la différence entre ce que les citoyens ont déjà payé en 2002 et ce que la facturation leur demandera de payer en complément. Ceci sera donc connu lorsque nous aurons terminé les notifications.

Deuxième problème: l'explication de la dette et ses conséquences. Là aussi, Mesdames et Messieurs les députés, prédire est parfois dangereux. En 2001, on s'est réjoui de la diminution de la dette à 9,2 milliards. A l'époque, cette dette s'élevait à 9,2 milliards. Mais comment diminue-t-on la dette ? On diminue la dette par plusieurs éléments. Le premier élément a trait à la trésorerie. Vous pouvez enregistrer de mauvais résultats, mais avoir une rentrée de trésorerie importante à certains moments, pouvoir vous passer d'emprunter et par la même occasion rembourser des emprunts antérieurs. Vous pouvez enregistrer de bons résultats, provisoirement, et ne pas avoir suffisamment de trésorerie et ne pas pouvoir rembourser.

Je tiens à souligner ici une chose très claire, que j'aurais de toute façon dite le 20 mars. Le plancher à 9,2 milliards n'aurait pu être tenu. Cela n'était pas possible, parce qu'il ne représente pas le véritable plancher d'une dette qui, pour une stabilisation, doit pouvoir être comparée à ce que les rentrées régulières doivent être. Cela signifie plusieurs choses, notamment que l'écart probable est certes dû à un manco de trésorerie lié en partie aux raisons que j'ai évoquées tout à l'heure, à savoir aux montants qu'il reste à encaisser. Mais cela est dû sans doute aussi à des décaissements qui font l'objet de provisions et de provisions hors bilan, pour lesquels lesdites provisions ne constituent pas de l'argent cash. Lorsque vous dissolvez une provision, ce que l'on oublie, c'est qu'il faut la dégager de la trésorerie pour pouvoir honorer les engagements de la dissolution de cette provision. Si l'on ne prend pas cela en compte, on n'a pas tout à fait compris ce qui se passe.

Le troisième élément qui nous manque et explique que nous ne puissions pas encore vous répondre - mais le groupe de travail étudie la question, et cela pourra être dit avec la clôture des comptes - est de savoir s'il y a, en matière d'investissements, des décaissements particulièrement importants.

Le quatrième élément, c'est celui que j'évoquais tout à l'heure: à quel niveau la dette a-t-elle pu être raisonnablement et réellement baissée ? Probablement à un niveau qui tient compte du fait que l'administration fiscale a produit son gain de productivité et que la conjoncture a produit le sien. Toute diminution ultérieure à ces événements ne peut pas produire des effets à long terme, parce que le différentiel entre les revenus et les dépenses ne peut à l'évidence pas dégager durablement une trésorerie supplémentaire. Et ce ne sont pas, Mesdames et Messieurs, des bonis de 10 ou 30 millions qui permettent de réduire la dette de 100 ou de 500 millions.

Dernièrement, je ne pense honnêtement pas qu'il ressortira un confortable boni des comptes 2002, pour la raison suivante. Les recettes que nous inscrivons maintenant dans nos comptes, en postnumerando, sont faites d'une part estimée, mais aussi de parts réalisées entre deux sur des recettes antérieures. C'est le cas pour les personnes morales. Dans ce domaine, nous devrons réajuster et nous le ferons. S'agissant des personnes physiques, nous ne pourrons pas répondre à cette question avant d'avoir terminé la très grande part des notifications. Le reste devra être estimé. Mais ceci est normal et cela répond à la question de M. Kunz. Nous devons de toute façon inscrire dans les comptes une part estimée. C'est le même processus qui est pratiqué avec le système postnumerando s'agissant des personnes morales. Ceci est légal, mais nous oblige à de grandes précautions.

Je le dis clairement: Il n'est pas possible d'imaginer que nous enregistrions un confortable boni qui vienne engendrer des réserves. Nous aurons à examiner des comptes 2002 dont je souhaite pour l'instant qu'ils soient équilibrés.

Pour l'essentiel, je vous ai répondu dans l'instant. Je ne peux pas encore vous dire ce que tout ceci peut avoir comme influence sur le budget 2003. Je vous propose d'y revenir au moment des comptes. Cela nous permettra d'évaluer la situation, y compris en prenant connaissance d'autres informations de la part de la Confédération, mais aussi en connaissant mieux le bouclement de nos comptes et des recettes qui en découlent.

Je pense, Mesdames et Messieurs les députés, que nous n'en avons pas fini avec les travaux d'Hercule. Nous n'en avons pas fini, parce que nous devrons nous poser la question de l'évolution des dépenses. Il est parfaitement clair qu'un rythme de dépenses qui augmentent de 3%, 4% ou 5% au titre de dépenses de personnels, si vous les mettez en regard d'une évolution des recettes allant de 0 à 2% au rythme des recettes fiscales, il est parfaitement clair que ce rythme-là ne peut être tenu longtemps. Ceci fera certainement l'objet de débats dans ce conseil. (Applaudissements.)

Ces interpellations urgentes sont closes.

Le président. Nous en avons donc terminé avec les vingt-deux interpellations de ce soir. Il y sera répondu demain à 17h. Nous poursuivons notre ordre du jour avec le rapport de la commission des visiteurs officiels du Grand Conseil, par Mme Anita Cuénod. Madame la rapporteuse, vous avez quelque chose à ajouter à votre rapport ? (Brouhaha.)Vous avez la parole.