Séance du
jeudi 28 novembre 2002 à
20h35
55e
législature -
2e
année -
2e
session -
7e
séance
M 1481
Débat
M. Sami Kanaan (S). Si j'en juge par le nombre de réactions médiatiques, sous forme de lettres de lecteurs ou de courriers électroniques, que nous avons reçu suite au dépôt de cette motion - nombre nettement supérieur à tout autre dépôt récent - et si nous devions considérer cela comme critère pour estimer l'importance des textes que nous déposons, ce serait certainement un texte fondamental. Tel n'est pas le cas.
Afin d'éviter les malentendus, nous aimerions d'abord préciser ce dont on ne parle pas, avant de préciser ce dont on parle. Il n'est pas question ici de parler de véhicules dont on a besoin ou pas dans un usage de type sportif ou en plein air. Nous ne parlons pas non plus d'usage professionnel de certaines catégories de véhicules, ni même, comme certains courriers de lecteurs l'ont laissé entendre, de l'expérience qu'on a pu avoir dans le domaine militaire ou sportif. On ne parle pas non plus des compétences spécifiques des conducteurs, qui peuvent varier d'un cas à l'autre. Et même, je le reconnais, la dénomination 4X4 est trompeuse et imprécise, car le fait d'avoir quatre roues motrices est sans rapport avec la taille du véhicule ou sa motorisation, puisqu'il existe même une Fiat Panda vendue en version 4X4.
Ce dont nous parlons ici, c'est d'une certaine catégorie de véhicules, qui accumule quelques critères bien précis: ce sont des véhicules de grande masse, de grand volume, élevés sur roues, plus hauts que la moyenne des véhicules, de grosses cylindrées, avec d'autres facteurs favorisant leur puissance. Ce dont nous parlons ce soir, c'est d'un problème de sécurité routière et de nuisances en matière de bruit, de pollution de l'air et d'occupation d'espace.
Nous ne demandons pas non plus, comme cela a pu être écrit ici et là, des interdictions quelconques. Nous demandons simplement une analyse de la question, et si l'étude montre que nous nous sommes trompés sur nos hypothèses, nous serons les premiers à le reconnaître.
Certains éléments nous laissent songeurs: ce sujet n'est apparemment pas encore courant en Suisse, mais dans le monde anglo-saxon - et ce n'est pas fréquemment que je cite les débats en cours aux Etats-Unis - c'est un thème extrêmement courant. Si vous surfez un peu sur Internet et lisez la presse anglo-saxonne, vous le constaterez vous-mêmes. Ils ont là-bas une dénomination que nous n'avons pas: ces véhicules ont un nom bien précis dans le débat anglo-saxon, il s'agit des SUV, les Sport Utility Vehicles. Le nom l'indique déjà, ce sont des véhicules à but initialement sportif. Les études diverses - elles sont récentes - faites en Australie et aux Etats-Unis montrent qu'en cas d'accident, ces véhicules génèrent cinq à vingt-six fois plus de risques de décès que des véhicules normaux. De plus, ce qui est particulièrement intéressant pour tous les clients de ces véhicules - des clients forcément assez aisés, vu le prix élevé de ces voitures à l'achat comme à l'entretien et à la consommation - c'est que ces véhicules sont dangereux même pour leurs occupants ! Dans un contexte urbain - car c'est de cela dont on parle - ils sont dangereux, car étant construits initialement pour un usage hors-route et sur des terrains difficiles, ils sont rigides. Contrairement aux véhicules modernes qui, dans la mesure du possible, absorbent les chocs hors de l'habitacle, ceux-ci les répercutent intégralement à l'intérieur de l'habitacle, de par leur rigidité. Ces véhicules sont donc dangereux même pour leurs occupants, et cela se doit d'être relevé puisque les gens qui achètent ces véhicules sont généralement convaincus d'être en sécurité.
C'est pourquoi nous estimons, vu l'étroitesse du réseau routier dans l'agglomération urbaine genevoise, vu la densité du trafic que nous connaissons bien et quelle que soit l'idée qu'on peut en avoir, que ce problème mérite qu'on l'examine et qu'on s'y attarde. Et si on a la confirmation qu'il y a un problème de sécurité - ce n'est peut-être pas le cas ! - il faudra qu'on étudie les mesures à prendre.
J'ajouterai là-dessus que ces véhicules consomment en moyenne beaucoup plus qu'un véhicule de petite taille - qu'on ne vienne pas me donner des exemples de vieux véhicules, car c'est un cas particulier - et qu'ils génèrent plus de bruit. D'ailleurs, l'office général de l'environnement a dit que les tendances à la baisse du bruit dans le trafic routier étaient en train d'être inversées par la multiplication de ces véhicules. Par conséquent, ceci mérite examen, et j'aimerais d'ailleurs citer une des lettres de lecteurs parues dans «La Tribune de Genève» suite au dépôt de cette motion, d'une dame qui expliquait pourquoi elle avait ce véhicule. Elle habite apparemment dans une zone rurale avec des routes d'accès non goudronnées et difficiles, ce qui constitue une raison légitime d'avoir un tel véhicule, et disait dans sa lettre qu'après avoir appris à le conduire, elle admettait volontiers qu'il était complexe à conduire et nécessiterait probablement un permis particulier. Je ne sais pas si c'est une mesure intelligente, on le verra bien.
Quoi qu'il en soit, nous vous demandons aujourd'hui de renvoyer cette motion en commission des transports, au vu de la responsabilité que nous avons envers la sécurité de nos concitoyens.
Mme Anne Mahrer (Ve). Notre canton est un territoire d'aventures tout à fait exceptionnelles pour les propriétaires de véhicules tout terrain. Ils parcourent nos routes de campagne, devenues peu sûres, traversées qu'elles sont à la nuit tombée par des sangliers imprudents et pressés... (Exclamations.)Le choc est terrible, mais les dégâts limités. Le pare-buffles a eu raison de ce maudit animal ! Ils partent, avec leurs engins, en expédition au centre commercial, pour s'enterrer dans les parkings aux pentes vertigineuses. Ils ont la liberté de contempler de haut les embouteillages quotidiens dans lesquels ils s'engouffrent avec résignation.
Très sérieusement, Mesdames et Messieurs les députés, ce type de véhicule occupe un espace considérable. Il est dangereux en cas de choc et totalement inadapté à des déplacements urbains. Dans une ville saturée par le trafic motorisé, c'est une diminution drastique du nombre de véhicules, tous modèles confondus, qu'il s'agit d'encourager. Il faut, toujours et encore, favoriser les transports publics et les déplacements à pied et à vélo.
C'est pour ces excellentes raisons, Mesdames et Messieurs les députés, que le groupe des Verts vous invite à soutenir cette motion, à la renvoyer à la commission des transports pour trouver ensemble des solutions à ces problèmes endémiques.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons encore six orateurs inscrits pour cette motion qu'on propose de renvoyer en commission. Ce sont Mme et MM. Odier, Ruegsegger, Desplanches, Desbaillets, Catelain et Sommaruga. Je vous propose de clore là le débat. (Protestations.)Bien, nous continuerons donc le débat, jusqu'à ce que vous sortiez de route... Monsieur Jean-Marc Odier, vous avez la parole, mais ce n'est pas raisonnable. Quand on pense que les chefs de groupe ont demandé une accélération des débats, ce n'est en tout cas pas en 4X4 que nous roulons !
M. Jean-Marc Odier (R). Il y a effectivement beaucoup de choses fausses dans cette motion. D'abord, on constate qu'on critique les 4X4 de grande taille. Le fait qu'il s'agisse d'un 4X4 n'a rien à voir, je pense qu'un autre véhicule peut être tout aussi dangereux. Dans la catégorie des grands véhicules, vous avez les monospace, très utiles pour les familles, et je ne crois pas qu'il y ait de différence par rapport à un 4X4.
En ce qui concerne la dangerosité pour les autres, quelle différence y a-t-il vraiment avec un véhicule de plus grande taille ? Je pense qu'il faut se soucier d'abord de la vitesse des véhicules. D'autres véhicules beaucoup plus petits peuvent créer des dangers et être néfastes pour la sécurité des cyclistes, puisque vous semblez vouloir parler de leur sécurité. En ce qui concerne la dangerosité pour les occupants, vous avez peut-être raison de dire que la rigidité de ces véhicules par leur châssis fait qu'ils absorbent les chocs. Cependant, les 4X4 sont de plus en plus souvent en carrosserie auto-portante et de nature déformable. Cet argument-là tombe donc aussi.
En ce qui concerne le bruit - et il y en a d'ailleurs passablement dans cette salle, Monsieur Gautier (Le président agite la cloche.)- je m'inscris en faux contre cette affirmation. Je ne pense pas qu'un 4X4 fasse plus de bruit que d'autres petits véhicules. Encore une fois, cela dépend de l'utilisation qui en est faite. Vous avez des véhicules de petite cylindrée qui, mal utilisés, font beaucoup plus de bruit !
C'est vrai qu'au niveau de la consommation, ces véhicules sont probablement plus puissants et consomment plus. Mais en ce qui concerne la conduite agressive, là aussi, cela est totalement faux ! Avoir un véhicule légèrement plus gros ne va pas permettre d'avoir une conduite plus agressive qu'avec des petits véhicules du genre voiture de sport, GTI, etc. L'utilisation de voitures tout terrain est au contraire une raison de plus pour avoir une conduite totalement souple. Là aussi vous avez tort.
Ce qui est recherché dans cette motion, c'est d'exclure les avantages du 4X4 qui ne correspondent pas à son utilité première. Mais si les 4X4 sont à ce point appréciés, c'est parce qu'ils sont totalement polyvalents !
Mesdames et Messieurs les membres du parti socialiste, si vous voulez vous opposer à ce genre de véhicules, je pense qu'il faudra encore vous opposer à d'autres véhicules qui, par leur côté pratique, ont beaucoup d'aspects favorables. Vous parlez dans votre motion d'un effet de mode. Si votre action politique consiste à combattre les effets de mode, libre à vous, mais c'est faire preuve de bien peu de tolérance. (Brouhaha.)Plus que des véhicules, vous devriez bien plus vous inquiéter de la manière dont ils sont utilisés. Là-dessus, on pourra vous suivre, mais en tout cas pas sur ce genre de motion qui veut retirer de la circulation une seule catégorie de véhicules. Après les 4X4, qu'est-ce que ce sera ? Les camionnettes ? Les camions ? Le groupe radical s'opposera à cette motion.
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous passons à petite vitesse à Mme Stéphanie Ruegsegger.
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). Je ne vous permets pas, Monsieur le président ! Je ne reviendrai pas sur les arguments techniques que vient de nous livrer notre collègue Odier. Je constaterai simplement que nous avons quatre-vingt-sept points à l'ordre du jour, de nombreux projets de loi qui sont en attente depuis des mois, qui sont importants et concernent notamment le logement à Genève qui, me semble-t-il, est un problème qui devrait effectivement nous préoccuper. Or onze intervenants sont inscrits à ce moment pour débattre d'une motion concernant les 4X4, qui ne repose que sur de vagues hypothèses et des a priori. Je dois dire que notre travail n'est tout simplement pas sérieux ! (Applaudissements fournis.)
Je ne reviendrai donc pas sur les arguments techniques, mais constaterai simplement que ces véhicules ont tous passé les tests concernant les normes de pollution et correspondent donc aux normes en vigueur en Suisse. Puisqu'on nous dit qu'il faudrait un permis spécial, j'ajouterai que tous les conducteurs à Genève pourvus d'un permis délivré par le SAN sont censés pouvoir conduire ces véhicules. Je ne vois donc pas pourquoi il faudrait stigmatiser plus particulièrement les conducteurs de ce style de véhicules.
Vous nous parlez également de la hauteur de ces véhicules. Soyez conséquents, Mesdames et Messieurs les motionnaires ! Parlez également des monospace, car je vous ferai simplement remarquer que les monospace sont également d'une certaine hauteur. Mais ce n'est peut-être pas politiquement correct d'attaquer les propriétaires de ces voitures-là, car ce ne sont peut-être pas les gens que vous voulez toucher avec votre motion, qui repose une fois de plus uniquement sur des a priori.
Pour ce qui est des invites, Mesdames et Messieurs les socialistes, je vous invite quant à moi à regarder un peu l'évolution de la société en général, et l'évolution des véhicules en particulier ! Vous nous dites qu'il faudrait rendre à ces véhicules leur vocation première. Avez-vous constaté que les 4X4 ont évolué et qu'ils sont devenus des 4X4 urbains ? Ce ne sont plus simplement des véhicules faits pour les champs et la campagne. Aurait-on idée d'exiger que les petites voitures sportives ne roulent que sur des circuits ? Je crois qu'en ce qui concerne les 4X4, qui sont à nouveau des 4X4 urbains, on peut les laisser rouler sur les routes.
A mon avis - et je pense que le groupe démocrate-chrétien le partage - cette motion est une immixtion totalement scandaleuse dans la sphère privée des gens. Elle ne repose que sur des a priori qui sont démentis par toutes les études qui ont été menées jusqu'à présent. C'est une motion - excusez-moi du terme - «délit de sale gueule», c'est à dire que les gens que vous considérez comme des bourgeois ne vous plaisent pas, et vous voulez les stigmatiser. Nous refuserons donc cette motion. (Applaudissements.)
M. Gilles Desplanches (L). Le groupe libéral ne va pas soutenir cette motion qui est avant tout moralisatrice et s'attaque directement au droit démocratique de chaque citoyen qu'est la liberté. C'est réellement une motion dépourvue d'intérêt, qui est non seulement dogmatique, mais qui fait aussi un amalgame relativement dangereux, puisqu'elle insinue que les utilisateurs de 4X4 auraient un comportement routier malsain. Cela, Messieurs les motionnaires, il faudra le prouver !
De plus, je rappellerai - mais cela a déjà été dit précédemment - que nous sommes un parlement de milice cantonale, avec des compétences cantonales qui ne concernent pas l'homologation des véhicules, car celle-ci est de compétence fédérale. Je crois qu'aujourd'hui nous avons largement assez à faire pour ne pas encombrer notre ordre du jour avec des motions hors de nos compétences. Le groupe libéral souhaite refuser cette motion.
Le président. Nous continuons à rouler avec M. René Desbaillets.
M. René Desbaillets (L). J'ai le bon micro cette fois ? (Grésillements.)
Une voix. Viens chez moi !
M. René Desbaillets. On me déplace à droite, cette fois, c'est bon. Cette motion du parti socialiste - puisque ce sont des socialistes qui ont signé - est emprunte selon moi de rancune et de jalousie. (Huées.)Les socialistes ne veulent pas admettre que le peuple ait voté pour la liberté du choix de transports. Chacun est libre de choisir son véhicule comme il l'entend; si des gens préfèrent avoir un véhicule où mettre leurs commissions sans avoir besoin de se casser le dos, ils en ont le droit.
Concernant la sécurité des piétons et des cyclistes: les véhicules sont homologués, les pare-buffles le sont aussi. Les cyclistes qui ne respectent ni les stops, ni les feux rouges, et les piétons qui ne traversent pas sur les passages cloutés ont ma foi plus de chance de passer sous le véhicule s'il s'agit d'un 4X4 que si c'est une Ferrari, contre laquelle ils vont percuter. Par ailleurs, je peux vous dire que si un 4X4 n'est pas très sécurisant lorsqu'on est à plus de 100 km/h sur l'autoroute ou sur la neige en montagne, ce n'est en tout cas pas à 40 km/h que les gens au volant d'un 4X4 se sentent en danger !
Pourquoi y a-t-il de plus en plus de 4X4 ? C'est parce qu'il y a des gens qui savent compter, et vu le vote de juin 2001 - je n'étais pas encore député - sur le changement des impôts automobiles, la personne qui avait un véhicule de 150 à 200 chevaux et se voyait taxer de plus de 500 F d'impôts s'achète naturellement un gros 4X4 de 130 chevaux et paie moins d'impôts qu'avant ! C'est un réflexe de libéral, me direz-vous peut-être, mais non: c'est une question d'économie.
De plus, lorsque vous passez la Luzerna avec cinq cartons de bouteilles dans le coffre de votre véhicule normal, vous laissez votre pot d'échappement sur le gendarme couché. Vous êtes donc obligés d'acheter un 4X4 pour éviter de vous casser la figure sur un gendarme couché. Voilà.
Ce qui reste le plus néfaste, ce n'est pas la question des quatre, six ou huit roues motrices sur un véhicule, mais c'est l'encombrement. Malheureusement, il y a des conducteurs qui ont de gros véhicules qu'ils ne maîtrisent pas et utilisent deux places de parcs lorsqu'ils stationnent. Dans ce cas-là, il faut revoir le système du permis de conduire. En tant que membre du comité genevois de l'Automobile Club de Suisse, je peux vous dire que nous sommes en train de réfléchir à la question d'éventuellement changer le mode du permis de conduire, car c'est évident que tout le monde n'est pas capable de conduire n'importe quoi. Mais cela n'a rien à voir avec la suppression de 4X4 !
Le président. Merci, Monsieur le député. J'aimerais qu'il y ait un peu moins de brouhaha dans cette assemblée, même si visiblement le sujet roule et intéresse beaucoup de monde. La parole est à M. le député Catelain.
M. Gilbert Catelain (UDC). D'après le titre, cette motion concerne essentiellement la sécurité. Je suis sensible à cet argument de la sécurité mais, du point de vue du droit, il faut tout de même reconnaître que ces véhicules sont homologués et que chaque citoyen est libre d'acheter le véhicule qu'il veut. Cependant, pour reprendre cet argument de la sécurité, nous devons reconnaître un avantage à ce type de véhicule, c'est celui de la tenue de route, ainsi qu'un autre qui n'est pas repris dans la motion, c'est la qualité du freinage. Les quatre roues motrices diminuent la distance de freinage.
Malheureusement, cette motion n'est pas étayée par une analyse systémique, et le seul point valable que nous sommes prêts à soutenir est la dernière invite, qui prie le Conseil d'Etat de faire respecter la loi. J'ose espérer cependant que le Conseil d'Etat saura le faire sans qu'une motion de ce parlement ait à le lui rappeler.
En conséquence, par esprit de tolérance vis-à-vis de l'ensemble des conducteurs de ce canton, sachant aussi que de nombreux constructeurs sont en train d'investir d'importantes sommes pour trouver de nouveaux types de carrosseries qui permettent d'absorber les chocs, le groupe UDC ne soutiendra pas cette motion.
Le président. Il reste encore quatre intervenants, j'espère que vous serez raisonnables. Moi, je ne fais pas clore la liste des orateurs, puisque vous l'avez refusé une fois. J'attends votre motion d'ordre. Monsieur Carlo Sommaruga, vous avez la parole.
M. Carlo Sommaruga (S). Il y a en tout cas un point pour lequel je partage l'avis de Mme Stéphanie Ruegsegger, c'est qu'il y a en effet des sujets importants, comme le logement ou autres, qui méritent également notre attention. Ceci dit, je constate que le simple fait de déposer une motion touchant à la voiture - motion qui ne propose pas de mesure contraignante mais une évaluation et une étude d'un certain nombre d'éléments - suscite des débats idéologiques et philosophiques incroyables. Les arguments avancés par les tenants de la voiture - je tiens à le préciser - sont les droits démocratiques, la sphère privée. Je prends bonne note que certains orateurs mettent les droits démocratiques à la hauteur des pneus... C'est dire comment ils abordent certains problèmes et où ils voient la liberté et la sphère privée.
Je trouve inadmissible qu'on vienne dire que cette motion relève du «délit de sale gueule», alors qu'on sait qu'il y a aujourd'hui à Genève des dérapages au niveau de la police et que c'est là qu'il y a des «délits de sale gueule» ! Il faudrait donc remettre le débat là où il se situe. Cette motion, je le rappelle, n'a aucun autre objectif que d'aborder le problème de la sécurité routière - ce problème-ci uniquement ! - et d'inviter à une réflexion sur un des véhicules utilisés par un certain nombre d'usagers, pour limiter le nombre d'accidents et donc augmenter la sécurité. Il ne s'agit que d'ouvrir une réflexion au sein des services de l'Etat. Il est regrettable de voir qu'une simple réflexion de ce genre-là suscite autant d'émoi sur les bancs d'en face.
M. Olivier Vaucher (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, juste quelques réflexions complémentaires: tout d'abord cette motion est parfaitement ridicule car elle parle de 4X4 en général. J'aimerais juste vous rappeler, Mesdames et Messieurs les motionnaires, que les trams n'ont que des roues motrices ! Il serait donc bien de préciser si vous incluez aussi les trams dans votre motion... Votre parfaite méconnaissance de l'automobile et de la mécanique montre bien que votre motion n'a de but que de partir à la poubelle. Je vous signale aussi qu'il y a des camions qui doivent être pourvus de 4X4 pour pouvoir travailler. J'ai moi-même une toute petite voiture, une Panda 4X4; or, si avec une Panda 4X4 je risque de faire des dégâts à un certain niveau du corps, vous me le direz, Mesdames et Messieurs les députés ! J'aimerais donc juste vous rappeler qu'un véhicule 4X4 n'est pas seulement un véhicule tout terrain, comme vous le laissez croire, mais ce sont aussi des véhicules qui offrent une meilleure sécurité, en particulier sur des routes mouillées, sans parler des routes enneigées.
Cette motion repose donc sur une totale méconnaissance de l'automobile, elle est tout juste bonne à être mise à la poubelle et je vous prie de la shooter, car elle est totalement erronée. (Huées.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous commençons à faire usage de l'ABS... Monsieur Christian Luscher a la parole.
M. Christian Luscher (L). Visiblement, dans ce parlement, certaines personnes confondent le Grand Conseil avec Star Academy. On lance une vague idée, d'ailleurs fondée plus sur un électoralisme de supermarché que sur des données sérieuses, et on convoque la presse. Ce qui est fantastique, c'est qu'ensuite, en plénière, on peut citer la tribune des lecteurs... Ah, c'est là un grand moment lorsqu'on peut citer la tribune des lecteurs !
Et lorsqu'on lit l'exposé des motifs, on se rend compte qu'une seule donnée est avancée - c'est le nombre de 4X4 en Suisse - et que selon les motionnaires, ce chiffre doit être revu à la hausse, mais que cela reste à vérifier. Messieurs, la prochaine fois que vous désirerez lancer une motion, vérifiez, avant de lancer une loco-motion ! Je propose de rejeter assez sèchement ce texte qui n'a ni queue ni tête, bref, qui est un vrai tête-à-queue. (Applaudissements.)
M. Sami Kanaan (S). Si je compte le nombre d'intervenants sur les bancs d'en face qui ont cru nécessaire de préciser que cette motion était nulle et non avenue et devait aller à la poubelle, c'est que visiblement, elle les perturbe tout de même un peu. Comme l'essentiel a été dit et qu'on ne fera pas changer d'avis les gens ce soir, je répéterai juste - et, même en face, certains d'entre vous l'ont admis - que, sur certains aspects, ces véhicules peuvent poser des problèmes en milieu urbain - j'insiste là-dessus.
Vous pouvez trouver des défauts ou des faiblesses à tout type de véhicules, évidemment, de même qu'à tout type de conducteurs. Simplement, ceux dont on parle cumulent les défauts: la masse, le volume, la consommation de carburant et même le bruit. Je parle bien d'un contexte urbain, de la ville; je ne parle ni de montagne, ni de zone rurale, ni de sport ou je ne sais quoi.
Pour résumer, j'aimerais quand même dire que cette motion est quand même basée sur des études faites par des organismes sérieux de prévention routière aux Etats-Unis, en Australie et dans d'autres pays anglo-saxons. Certains ici ont décidé que c'était nul et non avenu - c'est leur droit - mais il ne s'agit en tout cas pas d'organismes fantaisistes. De même, le bureau de prévention des accidents à l'échelon fédéral a également pris position, mais apparemment, vous le considérez également comme fantaisiste.
M. Desbaillets a dit que l'ACS s'en préoccupait; si même l'Automobile Club de Suisse s'en préoccupe, c'est un signe que ça vaut la peine d'examiner la question. Je le répète, notre demande est d'envoyer cette motion en commission afin de voir plus précisément et plus sereinement s'il y a matière à mesures ou pas. Je l'ai dit, nous serons les premiers à reconnaître que nous nous sommes trompés, le cas échéant.
Pour voir si le Grand Conseil prend ses responsabilités en matière de sécurité routière en milieu urbain, je demande le vote nominatif. (Appuyé.)
Le président. Je crois que d'autres voulaient également le demander. En conséquence, nous voterons à l'appel nominal sur les deux sujets, d'abord sur le renvoi en commission des transports, puis sur la prise en considération et le renvoi au Conseil d'Etat. Je vous donne quelques secondes. J'ai appuyé sur la sonnette pour que tous les députés puissent rentrer et voter. Je vois que les derniers députés franchissent la porte de la buvette. Tout le monde se rend à sa place, s'il vous plaît. Messieurs Odier et Blanc, vous venez de la buvette mais le vote nominal a été demandé, vous devez donc voter depuis votre place. Merci.
Mis aux voix à l'appel nominal, le renvoi en commission est rejeté par 53 non contre 21 oui et 2 abstentions.
Mise aux voix à l'appel nominal, cette proposition de motion est rejetée par 53 non contre 25 oui.