Séance du
jeudi 29 août 2002 à
16h
55e
législature -
1re
année -
10e
session -
56e
séance
PL 8752-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
M. Jean Rémy Roulet (L), rapporteur. Monsieur le président, je ne sais pas si Mme Calmy-Rey assiste au débat...
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat participe à cette séance, Monsieur le député.
M. Jean Rémy Roulet. Bien, vous remplacerez avantageusement Mme Calmy-Rey en la circonstance, si j'ai bien compris, Monsieur Cramer...
En introduction à ce débat sur la LIPP, je dirai qu'une majorité de la commission fiscale a estimé qu'il n'y avait finalement pas eu d'erreur, techniquement parlant. En fait, l'administration fiscale a constaté une augmentation de 30% de ses recettes uniquement parce qu'il y avait eu 13% d'augmentation des revenus des ménages genevois. Ce constat a été fait sur un échantillon de 30 000 contribuables - ce sont à peu près les derniers chiffres que je mentionnerai dans cette intervention - ce qui représente en gros 15% de l'effectif cantonal total, en termes de déclarations fiscales. Que propose alors Mme Calmy-Rey ? Elle propose d'abord un correctif sur le barème B. Sans entrer dans la technique, le barème B est le barème appliqué aux couples mariés, précision de taille, avec ou sans enfants. Trois autres mesures vont suivre, en faveur des familles. Deux mesures concernent une augmentation du rabais d'impôt et une troisième concerne une augmentation des déductions liées aux charges de famille.
Faisons une rapide critique de l'exercice. Tout d'abord, les commissaires n'ont pas été convaincus d'un véritable lien entre les mesures proposées par le Conseil d'Etat, d'une part, et cette augmentation de 30% des recettes fiscales, d'autre part, qui réjouit la ministre des finances mais soulève un doute quant à son bien-fondé. Il n'y a pas de lien entre les mesures qui visent à alléger la fiscalité des familles et ce delta de 30%. Viser les familles relève d'une politique fiscale délibérée qu'on peut toujours discuter: on aurait aussi bien pu parler de politique fiscale en faveur des rentiers, des propriétaires de logements, des personnes qui doivent gérer une succession, des personnes morales, des PME, bref en faveur de toute une série de citoyens, personnes physiques ou morales. Et une partie de la commission, sans le reprocher viscéralement à Mme la présidente, estime que son projet de baisse d'impôt déposé durant ce premier semestre biaise le débat politique. En fait, pour certains d'entre nous, glisser une baisse fiscale en faveur des familles relevait plus d'un exercice de tactique politique que d'un exercice technique fondé sur un couac qui n'en était finalement pas un. Ainsi, nous avons dû interrompre nos travaux, alors que nous étions en pleine délibération sur l'imposition relative au droit successoral. Or, croyez-moi, le droit successoral touche quantité de Genevois, au sein des familles, dans des entreprises, parmi les personnes âgées. Bref, de notre point de vue, la commission fiscale était en train de plancher sur des diminutions d'impôt beaucoup plus larges que celles qui concernent les familles.
En outre, le projet de loi de Mme Calmy-Rey augmente le nombre d'exonérés. Il y a effectivement un certain pourcentage de la population genevoise qui ne paie pas d'impôts, et le fait de proposer des mesures touchant notamment au rabais d'impôt mais aussi à la déductibilité des frais de garde augmente le nombre de personnes exonérées. J'ouvre ici une parenthèse concernant le projet de loi libéral qui vise lui aussi à apporter une correction - à la baisse, bien entendu - mais en pourcent. En effet, si on applique un correctif en pourcent à une déclaration d'impôt, le citoyen qui payait, par exemple, 100 F d'impôt, continuera à payer encore un petit peu d'impôt. C'est là un des principaux défauts du barème d'impôt, mais aussi des déductions : par définition, ces dispositions augmentent le nombre des exonérés.
Un autre défaut que la commission a découvert au cours de ses travaux concerne l'illisibilité totale, pour le citoyen, du système fiscal. Je défie quiconque dans cette salle de calculer rapidement et sereinement les montants d'impôt qu'il doit payer à l'administration fiscale s'il n'est pas doté - à défaut d'un bac + 6 - d'un solide ordinateur et d'une bonne connection internet. Il y a donc une illisibilité qui est de la responsabilité de notre parlement, mais aussi de celle du gouvernement, et qui mériterait une réflexion approfondie. Je cite à titre d'exemple le canton de Bâle, où le citoyen lui-même calcule son impôt, charge à l'administration de le vérifier. Il y a là un lien de confiance qui est, dans le cas du rabais d'impôt et de la LIPP V, et de l'avis d'une majorité de la commission, tout à fait impossible.
Voilà pour les principales critiques que l'on peut apporter aux propositions du Conseil d'Etat. Je résumerai maintenant les propositions de la majorité de la commission...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur. Je vous laisse encore deux minutes.
M. Jean Rémy Roulet. Merci, je vous promets que je ne prendrai plus la parole ensuite, je laisserai à mes camarades le soin de le faire. Concernant les mesures en faveur du citoyen: il s'agit d'adoucir la bosse de dromadaire relative au barème B, ce qui touche les couples mariés avec ou sans enfants. Toujours au profit des familles, on unifie les montants déterminant les différentes charges de famille, définies dans le rabais d'impôt, tout ceci pour un montant évalué à environ 20 millions de francs. La dernière proposition de la majorité prévoit un effet rétroactif sur les déclarations 2001. En ce qui concerne le Conseil d'Etat, nous lui demandons de réévaluer le système du rabais d'impôt, de remettre sur le métier l'idée du chèque-emploi et surtout de reprendre les travaux de la commission fiscale tels qu'ils étaient avant d'être stoppés par ce couac qui n'en est pas un.
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). Au printemps dernier, Mme Calmy-Rey annonçait dans les médias, affolée, que la nouvelle LIPP avait des répercussions particulièrement pénalisantes pour certaines catégories de contribuables, notamment les familles et la classe moyenne. Suite à l'annonce de ce couac, que d'aucuns ont qualifié d'erreur fatale, le parlement a été saisi d'une avalanche de projets, à savoir deux motions qui ont été renvoyées directement au Conseil d'Etat et trois projets de lois qui ont été renvoyés à la commission fiscale. Lors de l'étude de ces trois projets de lois, nous avons commencé par vérifier la réalité de ce couac. On a notamment demandé au département des finances de comparer, à situations égales, le traitement fiscal sous l'ancienne version et sous la version LIPP, et là - ô surprise ! - qu'avons-nous constaté ? Il n'y avait pas de traitement particulièrement pénalisant, que ce soit pour les familles ou pour la classe moyenne. Ce constat a du reste été confirmé par l'audition des divers experts fiscaux qui nous ont dit que, lorsqu'ils remplissaient des déclarations, ils n'avaient absolument pas trouvé d'erreur dans le passage à la LIPP. Alors, s'agissait-il d'un couac ? Mme Calmy-Rey a-t-elle cédé à la panique ou l'information cachait-elle autre chose ? Pour l'heure, je n'en sais rien, et ce n'est peut-être pas le plus urgent, même si je pense qu'on devra répondre à cette question, notamment à travers les motions renvoyées au Conseil d'Etat et lors du bilan que nous demandons au terme du premier exercice fiscal sous la nouvelle LIPP. Dès lors, pour la commission, une question urgente se posait: était-il nécessaire de procéder à des mesures correctives alors même qu'il n'y avait pas de couac, donc rien à corriger ? C'était sans compter avec l'attente que Mme Calmy-Rey avait créée à travers son annonce et à travers le courrier qu'elle a adressé à 186 000 contribuables, leur annonçant une probable diminution d'impôt et des mesures en faveur de la famille. Je voudrais rappeler à Mme Calmy-Rey qu'en général, lorsqu'on vote ce genre de mesures, c'est le parlement qui vote, et que, par conséquent la décision en revient au Grand Conseil. Un petit rappel qui n'est pas sans importance.
Ainsi, Mme Calmy-Rey a fait un joli coup de pub en adressant ce courrier à 186 000 contribuables. La prochaine fois que vous souhaitez faire un coup de pub, Madame la présidente, évitez d'y joindre un bulletin de versement : il y a des contribuables qui ont assez peu goûté ce petit cadeau. Bref, c'est dans ce contexte-là que la commission fiscale et le Grand Conseil ont dû mener leurs travaux.
Si la nouvelle LIPP comporte pour nous - pour tout le monde, du reste - encore beaucoup d'incertitudes, quelques éléments peuvent tout de même être relevés. Tout d'abord, le passage de l'ancien système au nouveau système élargit considérablement, comme l'a dit le rapporteur, le nombre de personnes qui échappent à l'impôt. Dans l'ancien système, 17% des contribuables ne payaient pas d'impôts. Aujourd'hui, avec la nouvelle LIPP, il y en a 28%, et on passe à 30% avec les mesures que nous propose Mme Calmy-Rey. Pour le groupe démocrate-chrétien, cet élément est de nature à remettre l'équilibre et la solidarité fiscale en question, et cela a son importance.
Par ailleurs, nous avons également constaté que certains biais, hérités de l'ancien système, ont été transférés à la nouvelle LIPP. C'est notamment le cas de la bosse de dromadaire qui fait que la classe moyenne barème B (c'est-à-dire les personnes mariées) se trouve particulièrement pénalisée: à une petite augmentation de revenu correspond une grosse augmentation d'impôt, qui absorbe quasiment toute l'augmentation de revenu. Il convenait peut-être, effectivement, de corriger cet élément hérité du passé. Par ailleurs, vous savez le PDC particulièrement attaché à la famille - je vous rappelle que la famille figure dans la Constitution grâce à l'initiative du PDC, votée il y a maintenant quelques années. Mais, si le PDC est en faveur de la famille, il souhaite également y voir clair dans la nouvelle loi fiscale. Or, nous constatons encore beaucoup de brouillard, et nous refusons que la famille soit prise en otage pour pouvoir faire du bricolage. (Brouhaha.)Nous estimons également qu'il y a certaines inégalités de traitement qui doivent être corrigées, c'est le cas de la bosse de dromadaire dont j'ai parlé, mais également de l'inégalité de traitement qui apparaît dans les déductions pour le premier enfant et pour les enfants suivants.
Par conséquent, nous avons immédiatement soutenu les deux mesures qui nous paraissaient apporter des corrections utiles, à savoir la correction du barème B avec le lissage de la bosse de dromadaire ainsi que la déduction pour le premier enfant qui est mise à égalité avec les déductions pour les enfants suivants. En ce qui concerne les autres mesures en faveur de la famille, nous demandons qu'un bilan soit fait au terme du premier exercice fiscal, qui nous montre quelles sont les répercussions de la LIPP sur les différentes catégories de contribuables. Une fois que nous aurons ce bilan, le PDC prend l'engagement de déposer des mesures fiscales en faveur de la famille. Du reste, Mme von Arx-Vernon va s'exprimer, je pense, tout à l'heure sur le dépôt d'une motion concernant les frais de garde. Nous ne transigerons pas là-dessus, mais nous voulons savoir où nous allons et nous voulons y voir clair. Par conséquent, nous vous invitons à voter le projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission.
Mme Janine Hagmann (L). Donc, il n'y a pas eu de couac, on en prend acte. Cependant, chacun sait ici que vous, à gauche, vous aimez les impôts et qu'augmenter les impôts est pour vous un but en soi, surtout pour une catégorie de contribuables... (Brouhaha.)Or, que constatons-nous ? Un projet de loi qui émane de la cheffe du département des finances - socialiste à ce que je sais - propose apparemment une baisse d'impôts. En outre, chaque contribuable a été averti personnellement de cette intention louable - ou pas - démagogique - ou pas - corrective - ou pas. Mais, s'il ne s'agit pas d'une mesure corrective, pourquoi ce cadeau ? Ou alors, si correctif il y a, c'est bien qu'il y a eu une erreur. Personnellement, je parlerai donc tout de même d'un demi-couac... (Brouhaha. Rires.)Comme vous le savez, la Confédération a exigé des cantons qu'ils harmonisent leurs fiscalités. Comme à son habitude, Genève a joué à l'élève marginal et introduit le fameux rabais d'impôt qui n'existe nulle part ailleurs. Je reconnais, Madame la présidente, que sur le moment une certaine attractivité, une idée de modernité a permis de voter cette disposition à l'unanimité. Pourtant elle s'accompagnait de promesses de neutralité fiscale, un différentiel de 2% en plus ou en moins avait été assuré. La réalité est autre. Sur les 30 000 premières déclarations rentrées, le quart des contribuables subit une augmentation, tandis que les trois quarts sont au contraire bénéficiaires. Tant mieux, Madame, si le niveau des revenus a augmenté. Mais, personnellement, j'ai l'impression qu'à ce jour le département ne maîtrise pas vraiment la situation. Ce n'est jamais clair d'être noyé sous les papiers, de crouler sous des simulations qui se contredisent souvent... (Brouhaha.)
Une chose est sûre: à Genève, il est très difficile de calculer son impôt, alors que dans les autres cantons, c'est chose possible. Qui est capable de comprendre la fameuse formule de calcul, corrigée encore par le rabais d'impôt ? Une vérification du contribuable est chose difficile, il faut donc faire confiance au département. Là-dessus, le postnumerandoa été responsable de quelques surprises. Cela a été dit par mes deux préopinants : à Genève, près d'un contribuable sur trois ne paie pas d'impôts. Je ne peux vous certifier l'exactitude du chiffre; nous ne l'avons pas obtenu... (Brouhaha.)Mais c'est un phénomène qui mérite une analyse. Est-ce à dire que près d'un contribuable sur trois est en dessous d'un seuil acceptable de ressources vitales - donc trente personnes dans cette enceinte - ou est-ce à dire que la courbe est mal faite ? Lorsqu'on voyage en train, chacun doit prendre son billet. Là, près d'un contribuable sur trois ne participe pas au coût du transport. Cela signifie donc que les autres payent pour lui. Notre société serait-elle davantage faite pour les cigales que pour les fourmis ? (Protestations.)Un principe de juste contribution doit être respecté. Le parti libéral a agi selon ce principe lorsqu'il a proposé en son temps une baisse d'impôt de 12% qui avait été acceptée par le peuple.
C'est aussi en respectant ce principe que nous avons déposé un train de lois, à l'étude en ce moment à la commission fiscale. Une commission fiscale qui, je dois le dire, a bien travaillé cet été. Son président, M. Hiler, que je félicite, a su trier dans la montagne des documents reçus, pour aboutir à une loi suffisamment crédible pour être votée par la population. Deux modifications ont été retenues. Je ne vais pas y revenir - Mme Ruegsegger a très bien expliqué ces deux modifications - mais elles ont été décidées après avoir été étudiées sur la base de leurs répercussions. Car il n'est pas question pour le parti libéral d'augmenter le nombre de contribuables qui ne payent pas d'impôts. Est-on sûr du coût et des bénéficiaires de cette nouvelle loi ? Je vous renvoie à l'excellent rapport de mon collègue Jean Rémy Roulet qui a su vulgariser et rendre lisible ce sujet difficile. La proposition du parti libéral prévoyant une baisse générale de l'impôt a été refusée en commission, de sorte que la promesse que Mme Calmy-Rey a faite aux contribuables ne les concerne pas tous. Je vous rappelle que Genève doit rester attractive. Le projet de loi qui vous est soumis, tel qu'il est sorti des travaux de la commission, doit avoir notre accord. Il corrige le tir, mais surtout il demande une évaluation qui permettra, si nécessaire, de revoir encore une fois notre copie. Pourtant, quand je vois la somme d'amendements qui ont été déposés, cela me semble peu raisonnable : vous savez très bien que ce projet de loi doit être soumis à la population d'ici deux mois. Si nous voulons aboutir à quelque chose ce soir, essayons d'être un peu raisonnables afin de ne pas perdre notre crédibilité. (Applaudissements.)
M. David Hiler (Ve). Je tiens d'abord à remercier Mme Hagmann de son appréciation positive à l'égard de mon travail de président. Ceci dit, je ne suis pas fier du cirque qu'on a fait sur ces augmentations d'impôts. Le malaise a été réel pendant tous les travaux, je le vis encore aujourd'hui.
Erreur d'appréciation manifeste de la présidente du département, erreur de communication: c'est le premier épisode qui crée l'idée générale qu'il va falloir corriger quelque chose. Là-dessus, un parti au moins se précipite - le parti libéral - pour nous dire que, de graves erreurs ayant été commises, il convient de baisser de 2% le taux d'imposition. D'autres partis encore suivent cette voie. Résultat à ce jour: nous sommes effectivement en train de diminuer les ressources de l'Etat de quelques dizaines de millions, ceci parce qu'une erreur de communication a été commise et parce qu'elle a été utilisée politiquement. Je me demande si nous sommes toujours condamnés à être en retard lorsque nous faisons de la politique. Nous avons cherché des solutions miracles pour abaisser spectaculairement les dépenses et augmenter les recettes, alors qu'en réalité - c'était l'épisode du paquet ficelé - l'argent était là. Aujourd'hui, nous pensons qu'il est possible de faire telle ou telle baisse d'impôt. Je ne sais pas, Mesdames et Messieurs les députés, comment vous évaluez fiscalement l'année 2002, mais moi je ne l'évalue pas très positivement. Eu égard à la structure fiscale que nous avons et considérant une baisse assez sensible des revenus du capital et de l'impôt sur la fortune - baisse que la bourse laisse prévoir: moins 40%, en principe cela devrait avoir quelques incidences - je crois que nous aurons dorénavant des budgets difficiles. Quelques indices dans ce sens sont d'ailleurs déjà apparus dans les services qui préparent actuellement leur budget. Or cette année, et tandis que nous savons qu'une importante baisse de revenus se profile, nous décidons de baisser les impôts. L'année prochaine - je prends date - nous découvrirons qu'il nous manque tout, et nous chercherons à qui diminuer les prestations, à qui refuser l'indexation, etc. Et ne dites pas que vous ne le saviez pas, nous le savons tous : nous sommes en train de prendre le risque de diminuer l'impôt à un moment où nous ne sommes pas sûrs de l'équilibre budgétaire de ces prochaines années. Je défie d'ailleurs qui que ce soit de faire un pronostic fondé sur l'évolution de la conjoncture, boursière ou réelle.
Cela étant dit, le malaise est d'autant plus grand qu'en réalité on se demande si le barème B est pire que le barème A, si la bosse de dromadaire du barème B est pire que la bosse de dromadaire du barème lui-même, de la courbe elle-même. Je doute que, dans les cinq ou six séances consacrées à cet objet, quiconque se soit vraiment fait une opinion fondée. Je doute également que l'échantillon sur lequel nous avons travaillé soit suffisant. Je doute enfin, pour avoir entendu les déclarations successives de M. Lambelet, dans un sens et dans un autre, que les experts soient arrivés au bout de leur travail.
C'est la raison pour laquelle nous avons - comme d'autres - essayé de nous en tenir à ce qui nous paraissait être les corrections nécessaires. Il est vrai que la commission et l'ancien parlement ont fait une erreur en ne mettant pas la première charge de famille au niveau des suivantes. On peut toujours trouver des raisonnements intellectuels pour le justifier, mais cela ne tient pas. A vrai dire, cette correction ne coûte pas cher, elle est symboliquement importante et elle nous tient à coeur. Nous pensons également que faire perdre la demi-charge à partir d'une valeur aussi basse - 6 200 F pour le revenu d'un enfant - est contraire à toute une série de valeurs, et nous vous l'exposerons plus avant en deuxième débat. En revanche, nous restons opposés à la modification du barème B dans l'urgence et en l'état, et nous voterons contre lors du deuxième débat. En ce qui concerne les frais de garde, bien que le résumé soit un peu succinct, il est extrêmement important pour nous - nous nous en expliquerons aussi en deuxième débat - de reprendre l'ensemble de la problématique. C'est pourquoi nous vous proposerons de matérialiser ces bonnes intentions par un renvoi de l'article en question en commission - ce qui nous permettra de faire le tour de la question: la loi actuelle, pour les familles monoparentales, n'est pas satisfaisante au vu de la discussion que nous avons eue en commission.
Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, deux mesures simples d'équité et de justice fiscale: l'une n'est pas étudiée, il est beaucoup trop tôt pour se prononcer sur l'autre, vu son poids - c'est un psychodrame fiscal et médiatique qui n'ajoutera rien à la gloire de ce parlement. (Applaudissements.)
M. Pierre Froidevaux (R). Madame la présidente, qu'il est agréable pour vous de bénéficier d'un parlement qui accepte avec une si grande mansuétude votre projet de loi ! Effectivement, lorsque la gauche était au pouvoir, nous n'avons fait que critiquer ce qu'on appelait la gauche la plus bête d'Europe puisque, systématiquement, lorsqu'on parlait de fiscalité, il n'y avait aucune volonté d'adapter les barèmes fiscaux. Voici maintenant une nouvelle majorité, et d'emblée vous nous saisissez d'un projet de loi... (Brouhaha.)...et d'emblée nous l'examinons avec attention. Nous avons étudié vos arguments en commission. Vos arguments, Madame la présidente, étaient les principes d'équité et de justice fiscale, tels qu'ils avaient prévalu lors de l'examen du passage de la LCP à la LIPP. Nous avons étudié un grand nombre de cas et aucun d'entre eux ne montre la moindre injustice fiscale. Il a donc fallu, après le coup médiatique que vous avez fait, apporter une réponse. Cette réponse a été l'examen des mesures que vous prévoyiez, des mesures qui posaient évidemment un problème d'injustice fiscale. La première concerne la prise en compte des charges de famille : le premier enfant ayant une valeur de 4 500 F déductibles, il n'était pas normal que le deuxième enfant soit à 6 500 F. Nous avons donc décidé d'avoir la même valeur pour chaque enfant, ce qui ne fait l'objet d'aucune critique. La deuxième mesure est un peu plus difficile : elle concerne la fameuse bosse de dromadaire. Le splittingest très difficile à expliquer : globalement, il y a un phénomène d'accélération dans les barèmes fiscaux en raison de cette loi extrêmement compliquée qu'il a fallu voter.
Pour la petite histoire, à ma première session de député, le ministre des finances de l'époque, M. Vodoz, proposait le vote de cette fameuse équation incompréhensible. En voyant qu'il fallait voter une loi fiscale à laquelle je ne comprenais strictement rien, j'étais terrorisé d'être député. Certains de mes collègues, de gauche d'ailleurs, m'affirmaient que je finirais bien par comprendre... (Brouhaha.)A la législature suivante, je faisais partie de la commission fiscale: nous avons travaillé une année sur la LIPP, nous avons tout essayé pour avoir une fiscalité neutre et nous avons voté la loi. Rappelez-vous, juste avant la séance du Grand Conseil, nous avons dû réunir en urgence la commission parce que les experts avaient fait des erreurs sur cette fameuse équation. Nous avions alors, d'une manière quasi illégale voté, après le vote de commission, une modification de la loi pour corriger la formule. C'est dire qu'il y a un réel problème de lisibilité.
Mais revenons à la courbe. Elle pose le problème suivant : elle commence à zéro, elle monte de manière asymptotique pour ensuite relier une droite. Evidemment, cette asymptote a une accélération et une décélération. Cela veut dire que les citoyens situés dans la marge d'accélération ou de décélération subissent, en fonction de leur éventuel changement de revenu, une importante modification de leur impôt. Ce problème est d'ailleurs ressenti par la population. Et ce ne sont pas tellement les dispositions votées en urgence après un travail de commission estival extrêmement rapide qui résoudront ce problème : il s'agit vraiment d'un problème technique qu'il faudra un jour revoir.
Comment en est-on arrivé là ? Imaginez qu'il y a dix ou vingt ans, avoir un revenu de 80 000 F représentait un avantage social prépondérant. Aujourd'hui, la plupart des revenus sont compris entre 50 000 et 200 000 F, surtout les revenus familiaux, et se situent donc dans cette montée asymptotique de la courbe. Cela veut dire que le citoyen ressent cette augmentation d'impôt et que les mesures que l'on prévoit ici n'y changeront rien. Nous restons dans le même type d'erreur. Si on voulait que le citoyen perçoive moins cette progression, il faudrait que cette courbe soit adoucie. C'est cela que nous avons fait dans le projet du splittingque vous avez évoqué: nous avons aplati la courbe. Donc, si nous voulons maintenant que les citoyens ne soient pas découragés, il faut revoir cette courbe et la lisser.
Les multiples amendements déposés par nos collègues de gauche montrent qu'ils voient maintenant l'utilité des baisses d'impôt et la nécessité d'adapter la fiscalité, mois après mois, année après année. Je me réjouis de travailler l'ensemble de ces amendements en commission, car je constate qu'aucun d'eux ne présente d'exposé des motifs... (Brouhaha.)Vous n'expliquez pas le coût, vous n'expliquez pas ce que cela représente pour la population. Nous n'avons pas d'explications: j'ai tous les documents sur mon bureau et il n'y a rien. Je vous recommande donc, chers collègues, de clore les travaux du Grand Conseil en suivant les travaux de la commission et de reprendre ces amendements en commission. (Applaudissements.)
Mme Mariane Grobet-Wellner (S). «Couac ou pas couac?», c'est la question que toute la République s'est posée suite aux articles de presse relatant les propos de notre ministre des finances ce printemps. Y avait-il un doute ? Pouvait-il y avoir un doute ? Etait-il justifié d'avoir un doute ? Certainement. Le sujet de la fiscalité est ardu, même les spécialistes du département des finances et les députés de la commission fiscale ont souffert de maux de tête à maintes reprises lors des travaux entrepris pour adapter notre loi fiscale aux exigences fédérales. C'est sans doute la raison des projets de lois déposés par les députés de l'AdG et par les libéraux, projets refusés par la grande majorité de notre commission fiscale pour les raisons indiquées dans le rapport. Car, vérifications faites et refaites, force est de constater l'absence totale de couac.
Les projections faites par les spécialistes du département des finances étaient fiables et justes, et la base des travaux de la commission fiscale lors de la dernière législature était conforme. La loi sur l'harmonisation des impôts directs, dite LHID, a amené le canton à entreprendre un travail énorme lors de la dernière législature, afin de rendre nos lois fiscales LHID-compatibles. Tout en ayant des points de vue différents, les députés siégeant à la commission fiscale, une fois les professions de foi dites, se sont mis au travail dans un esprit constructif. Nous avons obtenu un résultat que nous pouvons qualifier d'excellent, en tenant compte des deux principes de base, à savoir, premièrement, l'observation de la neutralité au niveau de l'imposition globale, c'est-à-dire que les recettes fiscales ne devaient être ni plus importantes ni diminuées par les modifications de la loi; deuxièmement, l'observation de la neutralité entre les différentes catégories de contribuables, c'est-à-dire que le poids relatif assumé sous l'ancienne loi devait être inchangé. Ces deux principes de base ont pu être respectés grâce à un effort de la part des commissaires et des fonctionnaires du département des finances, pour produire, pour analyser des simulations chiffrées tout le long de nos travaux. Nous étions cependant conscients qu'il n'était pas possible de compenser totalement les différentiels de certaines catégories de la population, notamment les familles avec enfants et les retraités, compte tenu des impératifs de la LHID. L'introduction du rabais d'impôt a eu pour effet d'atténuer très sensiblement les conséquences négatives de la LHID pour les contribuables genevois, comme l'a permis également l'introduction - je le rappelle - d'un taux d'effort maximum en ce qui concerne notamment les retraités propriétaires de leur logement et à revenus modestes. Malgré cela, en voulant respecter la neutralité des rentrées fiscales, il n'a pas été possible à l'époque d'aller jusqu'au bout des aménagements pour les familles.
Le présent projet de loi du Conseil d'Etat - celui-ci ayant entre-temps constaté l'augmentation importante des rentrées fiscales concernant l'année 2001, due non pas au changement de la loi mais à l'embellie de la conjoncture - propose aujourd'hui de faire rapidement un pas de plus en faveur des familles et il propose de le faire dans le cadre, notamment, du rabais d'impôt. Cette notion de rabais d'impôt est fondamentalement différente du système de déductions que nous avons connu jusqu'ici. Je rappelle qu'il a pour conséquence qu'une déduction de x francs, quel que soit le montant auquel un contribuable a droit, donne droit exactement à la même réduction d'impôts, quel que soit son revenu et en francs. En d'autres mots, une déduction dans le cadre du rabais d'impôt assure une égalité de traitement entre tous les contribuables, sous forme d'une réduction pour un montant identique, ce qui n'était pas le cas dans l'ancien système.
Finalement, en ce qui concerne l'argument avancé par la majorité de la commission - représentée par les députés de la droite - selon lequel il n'est pas souhaitable de voir davantage de contribuables ne payant pas d'impôts, je serais tentée de répondre qu'il est plutôt scandaleux que, dans un pays aussi riche que le nôtre, tant de contribuables - notamment des familles monoparentales - n'aient toujours pas de revenu suffisant qui leur assure un minimum vital et qui leur permette de payer des impôts... (L'oratrice est interpellée.)Merci, Monsieur Froidevaux, on en reparlera.
En conclusion, le groupe socialiste soutient le projet de loi du Conseil d'Etat dans sa totalité et estime que, dans la mesure où il a été constaté par le département des finances que l'augmentation de recettes 2001 le permet, le refus de la droite d'alléger immédiatement l'imposition des familles, comme cela est proposé par ce projet de loi, est tout simplement incompréhensible, voire scandaleux. Je vous invite donc à voter les amendements que nous allons présenter, ceux-ci reprenant les propositions du Conseil d'Etat refusées par la majorité de la commission.
M. Christian Brunier (S). Lorsque la commission fiscale finissait ses travaux, je revenais de douze jours de vacances et donc, quand je suis rentré à Genève, je me suis précipité sur la presse pour savoir ce qui s'était passé en commission... (L'orateur est interpellé.)Je vous expliquerai tout à l'heure, Monsieur Froidevaux, pourquoi je dis cela...
J'ai lu que le projet de loi avait été voté mais que la droite s'opposait à deux dispositions : la déduction pour les enfants à charge et la déduction des frais de garde des enfants... (Brouhaha.)J'en ai été étonné parce que jusqu'ici la droite criait à chaque débat sur les lois fiscales : «Il faut baisser les impôts !» et «Priorité aux familles !» Voilà qui n'était pas conforme à ce que j'entendais par ailleurs, mais ce n'est pas la première fois que la droite n'honore pas ses promesses... Aussi, comme tout citoyen et lecteur moyen, j'ai décidé d'aller contrôler les programmes des partis - peut-être avaient-ils changé d'idée... Je me suis précipité sur les sites internet et j'ai visité le site du parti qui dit être le parti de la famille, c'est-à-dire le PDC. J'ai été immédiatement rassuré. En effet, si vous allez sur leur site, vous pouvez envoyer à tous vos amis, et même à vos ennemis, une carte postale virtuelle qui indique : «Familles, nous voulons alléger les charges incombant aux familles.» Le PDC allait donc soutenir nos amendements, la presse n'avait simplement pas compris ses intentions... A moins qu'il s'agisse simplement d'une carte postale virtuelle destinée à faire marrer les copines et les copains ! (Exclamations et rires.)
Le PDC étant acquis, je suis allé voir le site des libéraux. On sait qu'ils sont en faveur des déductions fiscales, ils le notent d'ailleurs d'emblée dans la rubrique «Notre profil, notre programme», où ils affirment qu'il faut réduire l'impôt sur les personnes physiques. On le savait déjà, mais cela ne signifiait pas encore que les libéraux allaient soutenir tous les amendements et les propositions du Conseil d'Etat, il me fallait donc chercher plus loin. Je suis ainsi allé lire le communiqué du parti qui faisait suite au soi-disant couac de Micheline Calmy-Rey. Et que disait le parti libéral le 17 mai 2002 ? «Il faut être capable d'induire une véritable baisse d'impôt pour les classes moyennes et les familles...» J'ai pensé alors qu'ils avaient peut-être été rappelés à l'ordre par leur parti national et je suis allé consulter le manifeste du parti libéral suisse. Et là, qu'est-ce que je découvre ? Je découvre que le parti libéral veut faire en sorte que «les femmes et les hommes aient la possibilité de choisir librement la façon dont ils souhaitent s'insérer et vivre dans la société, de choisir leur style de vie, leur activité professionnelle et leur éventuel rôle politique». Magnifique ! Mais comment le réaliser ? A la page suivante, on apprend que «les circonstances de la vie et les nécessités financières empêchent toutefois le libre choix». Et le remède des libéraux est alors le suivant : «Si l'Etat n'a pas à se substituer à la famille, il doit en revanche envisager les moyens de la soutenir. Il peut prendre des mesures, par exemple fiscales, pour aider les parents engagés dans la vie active à organiser les aides familiales.» (Exclamations.)J'en ai conclu que les libéraux, qui ont l'habitude de relire leur programme, s'étaient peut-être trompés en commission, mais que, d'ici septembre, ils ajusteraient le tir.
Ensuite, bien sûr, j'ai également visité le site du parti radical, preuve qu'à gauche on pense même aux groupuscules ! (Rires.)Ici, ça commence tout de suite de manière très ferme: «La cellule de base d'une société, c'est la famille.»
Une voix. C'est vrai!
M. Christian Brunier. C'est vrai, et puis ça fait plaisir à tout le monde ! Ensuite, on lit: «Fiscalité, structures d'accueil de la petite enfance: tout doit être fait pour aider les familles, qu'elles soient traditionnelles ou pas.» Là encore, on est tous d'accord et ça ne mange pas de pain. Ensuite, les radicaux deviennent plus concrets : selon eux, pour soutenir la famille, on peut aussi accorder des allégements fiscaux. Là, les radicaux commencent à être dans la ligne... Plus concrètement encore, j'ai découvert un document tout à fait intéressant - qui ne reflète pas du tout les positions que le parti tient ici - et que je vous invite à lire. Le document s'intitule : «Pour une politique familiale libérale porteuse de chance et favorisant la croissance» - un titre qui veut tout dire et rien dire, mais le contenu est plus riche... (Commentaires et rires.)On commence avec un sous-titre d'enfer : «Concilier vie de famille et vie professionnelle : le souhait de nombreuses femmes est d'harmoniser leur vie familiale avec leur vie professionnelle, et ceci se heurte encore à beaucoup d'obstacles.» Quels sont les remèdes, «les solutions postulées pour la famille radicale» ? «La politique de la famille est également touchée par la politique fiscale. Le parti radical soutient les réductions fiscales qui tiennent mieux compte des familles avec enfants.» (Brouhaha. Exclamations.)Et ils vont plus loin, ils vont plus loin ! Selon eux, «la charge fiscale des familles avec enfants doit pouvoir bénéficier d'une défalcation pour la garde des enfants: 7 000 F au maximum pour la garde des enfants de moins de 16 ans et une augmentation de la défalcation pour les enfants, etc., etc.»
Il ne restait plus que l'UDC, dont j'ai aussi visité le site. (Brouhaha.)Voici la première phrase de votre programme, Mesdames et Messieurs : «Le contexte social et familier est un facteur essentiel du bien-être commun.» Vous dites : «Les jeunes familles avec enfants ne disposent en règle général pas des moyens financiers suffisants. Il faut donc les privilégier sur le plan fiscal...» Et une de vos priorités - c'est le point 74, vous avez beaucoup de priorités : «L'UDC exige - ils ne demandent pas, ils exigent, c'est un peu la nature du parti - une amélioration de la situation fiscale des familles.» Magnifique ! Aujourd'hui nous sommes donc face à une situation paradoxale...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Christian Brunier. Je conclus, c'est ma conclusion. Soit il y a eu couac, pas du département, mais de la presse... (Brouhaha.)Soit il y a eu un délire en commission, ce qui arrive, et nous sommes prêts à entendre un changement de position de votre part. Soit M. Blanc, qui vient de partir discrètement, a raison : Monsieur Froidevaux, vous avez dit tout à l'heure que, durant la dernière législature, on a eu la gauche la plus bête d'Europe. A ce moment-là, M. Blanc a dit en aparté que, suite à ce débat, on aurait la droite la plus bête du monde ! (Rires et applaudissements.)Je vous laisse choisir la piste que vous souhaitez...
Le président. Je ne sais pas si vous souhaitez terminer ce débat ce soir, Mesdames et Messieurs, mais vu l'importance que vous lui donnez, il faudrait peut-être vous comporter un peu différemment !
M. Christian Brunier. Je finis ! Monsieur Annen, je lis les programmes des partis de droite, je n'interprète rien. Donc, Mesdames et Messieurs, j'espère qu'en conformité avec vos programmes et vos promesses électorales vous allez voter le projet de loi et les amendements. (Applaudissements.)
M. Claude Marcet (UDC). Au-delà de la polémique politico-politicienne selon laquelle la droite genevoise est la plus bête du monde, je rappellerai simplement que la droite a permis la richesse qui a permis la redistribution sociale. Ce n'est pas à la gauche qu'on doit cela... (Brouhaha.)
Mais j'aimerais rester au niveau d'un débat purement technique. Nous sommes allés en commission. Nous nous sommes aperçus qu'il n'y avait peut-être pas de couac, mais que la totalité des éléments mis à notre disposition provenait d'un échantillonnage qui n'était pas représentatif et qui ne nous permettait pas de déterminer s'il y avait d'importantes modifications à apporter à la loi. Cela étant, nous avons amendé le projet de loi. Vous oubliez tous, ici, qu'il y a eu une proposition du département : une fois la totalité des déclarations 2001 barème B enregistrées, nous reprendrons les mêmes déclarations sur la base de la LCP, c'est-à-dire de l'ancienne loi, et nous verrons alors s'il y a effectivement eu des dérapages lors de la modification de la loi. Nous aurons tout loisir à ce moment-là - cela a été promis par le département et par Mme la présidente - de revoir la loi. Il est donc totalement inutile, actuellement, de perdre du temps en débattant de modifications dont on ne sait pas si elles sont vraiment nécessaires.
Et si nous voulons soutenir la famille, comme vous le dites tous, Mesdames et Messieurs les députés - et nous sommes aussi intéressés que vous à aller dans le sens de la famille - on peut aller beaucoup plus loin. On peut penser à des déductions sur la fortune, on peut penser à un certain nombre d'éléments qu'il est inutile de traiter ici, mais que nous pourrons traiter plus tard, lorsque nous connaîtrons l'impact de la LIPP V sur la totalité des contribuables, en relation avec la nouvelle taxation sur la base de la LCP.
Etant donné que les modifications peuvent attendre, le groupe UDC propose d'alléger les débats et de voter le texte tel qu'il ressort des travaux de la commission, comme l'a proposé mon collègue M. Froidevaux. (Applaudissements.)
M. Pierre Vanek (AdG). Mon ami Christian Brunier a fait une démonstration remarquable, en citant les programmes des partis de droite - et je crois que cela faisait partie du débat, il est sérieux de se référer aux programmes, Monsieur le président...
Le président. Je n'ai rien dit, Monsieur !
M. Pierre Vanek. ...pour voir dans quelle mesure les promesses avancées pour se faire élire sont tenues ou non ensuite par les élus en question. Christian Brunier a évidemment démontré que toutes ces déclarations concernant la famille étaient de la mousse, de l'écume sur la marmite électorale. Ceci est particulièrement choquant, il est vrai, de la part du parti démocrate-chrétien, dont la famille est l'un des fonds de commerce essentiel. (Brouhaha.)Mais M. Brunier aurait pu aussi aller chercher du côté de ce qu'affirme l'Alliance de gauche sur son site internet, mais aussi dans sa littérature. Nous, nous avons un discours clair sur cette question, qui consiste à dire que «ces Messieurs en face» ont essentiellement un programme visant à assécher les recettes de la collectivité et à faire des cadeaux fiscaux non pas aux familles mais aux riches, et c'est cela qu'on a vu à l'oeuvre, de manière remarquable, dans le cadre des discussions autour de la LIPP V.
Quand il a été question de couac, de problèmes fiscaux, le parti libéral a dégainé instantanément et sans réfléchir une proposition de réduction des impôts formulée en pourcentage, qui avantageait évidemment, de manière écrasante, les plus gros revenus de cette République. Ensuite, M. Roulet vient défendre son rapport sur cette question au nom de la majorité de l'Entente appuyée par l'UDC. Il nous dit que la commission fiscale était de toute façon en train de travailler sur des propositions de réduction d'impôts. Et effectivement, concernant le droit de succession, l'impôt sur le revenu, l'impôt sur la fortune, vous avez «dans le tube» toute une série de projets de réductions d'impôts, matérialisés dans quatre ou cinq projets de lois, pour un montant total - M. Rodrik me le souffle - de l'ordre de 400 millions de recettes en moins pour notre collectivité, et tous ces projets sont à l'avantage des gros ou très gros contribuables et des gros revenus. Aujourd'hui, ce qui dérange les députés des bancs d'en face, c'est que le «ronron» de ces travaux a été interrompu par les débats sur la LIPP V, débats dont le résultat pourrait effectivement profiter aux familles. Pourtant, c'était sans doute une bonne chose, cela nous a permis d'examiner d'abord l'application de cette loi qui a été élaborée par la majorité précédente, avec un élément social original, intéressant : le rabais d'impôt. Ces débats nous ont permis de constater ensuite que cette loi fonctionne conformément aux intentions de ses auteurs, qu'elle répond à la fois au droit fédéral et à un certain nombre d'objectifs sociaux que s'étaient fixés les auteurs du projet.
Certes, il y avait effectivement - la perfection n'est pas de ce monde, ni du domaine fiscal - moyen de faire mieux, notamment pour les familles en matière de prise en charge élargie des frais de garde, et des frais de garde effectifs, en introduisant ces frais dans le rabais d'impôt. En outre, les seuils en matière de prise en compte des charges de famille n'avaient pas été adaptés depuis fort longtemps. Ces deux éléments sont indiscutables dans le projet de loi actuel du Conseil d'Etat : ils ont un certain coût, mais un coût modeste par rapport aux propositions sur lesquelles la majorité voulait travailler et qui sont, quant à elles, parfaitement antisociales, ainsi que je l'ai déjà souligné. Or, ce sont ces deux éléments-là que, tous en choeur - y compris le PDC - vous allez refuser aujourd'hui. M. Brunier s'est payé votre tête, tout à l'heure, et il l'a fait avec raison. Les citoyens apprécieront toutes ces déclarations que vous avez faites concernant la famille puisque, quand il s'agit - au pied du mur et concrètement - d'effectuer des modifications législatives sur des questions comme la prise en compte des charges de famille ou les frais de garde, vous refusez ces modifications et vous préférez retourner à vos cadeaux fiscaux pour les riches.
Il est intéressant de noter que ce débat intervient peu après un sondage grandeur nature de l'opinion des citoyennes et des citoyens, je veux parler du vote sur l'initiative fiscale de l'Alliance de gauche. Avec ce vote, le peuple s'est prononcé, à une majorité certes modeste, en faveur d'une taxation plus équitable et qui mette à contribution de manière plus sérieuse les gens les plus fortunés de cette République.
Le président. Je vous propose, Mesdames et Messieurs, de clore la liste des intervenants pour le débat d'entrée en matière, étant entendu qu'en deuxième débat tout le monde pourra réintervenir.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
M. David Hiler (Ve). J'ai écouté avec le plus grand plaisir la démonstration de M. Brunier, qui m'a paru pleine de pertinence. Mais j'ai tout de même une toute petite question à lui poser. Etes-vous totalement certain que voter dans l'urgence des dizaines de millions de baisse fiscale, alors que cela signifie à coup sûr des baisses de prestations dans les prochains budgets, soit totalement conforme au credo selon lequel il faut assurer les moyens d'un Etat fort ? Je vous pose la question.
Ce qui me fait souci aujourd'hui, je suis désolé de le dire, c'est l'inversion des discours. Les partisans de la famille traditionnelle - les natalistes en particulier - sont en train de refuser les baisses que les partisans d'un Etat laïc, fort et disposant de recettes sont en train de voter dans la précipitation, simplement parce que l'initiative est venue de la présidente du département. Le problème se pose particulièrement en ce qui concerne le barème B, à propos duquel les socialistes admettent en privé qu'ils voudraient bien savoir où on en est. Tout cela est-il vraiment très sain ? Cela me rappelle un débat sur le budget où M. Balestra avait entonné les chants du Cartel à un moment où notre majorité essayait d'avoir une politique d'austérité. Nous maintenons, pour notre part, que nous risquons de regretter d'ici peu ces dizaines de millions, quels que soient ceux qui les votent. Il y aura alors une réinversion du discours un tout petit peu complexe.
M. Pierre Froidevaux (R). Madame la présidente, je ne puis qu'appuyer la demande de M. Hiler. Il était déjà intervenu une première fois à ce sujet, mais il est vrai que le problème fondamental est celui des recettes de l'Etat. Et lorsque nous en avions parlé en commission, j'ai eu d'abord le sentiment que les premières évaluations que vous donniez ajoutaient 70 millions à l'augmentation déjà prévue de 5% des revenus. C'est-à-dire qu'en raison des règles fiscales, de cette fameuse équation, le simple fait de l'inflation, soit d'une augmentation des salaires mais pas de la capacité financière des citoyens, provoquerait automatiquement une augmentation des revenus de l'Etat, ce qui prétérite l'ensemble des citoyens et qui exige que nous votions des baisses d'impôt. Sur ce point, Madame la présidente, il est extrêmement important que vous nous donniez une ligne générale : les rentrées fiscales seront-elles, oui ou non, augmentées de 70 millions, ainsi que les prévisions le laissent croire, et pourquoi ?
Ma deuxième remarque s'adresse à notre collègue Brunier qui, de toute évidence, est féru de technologies nouvelles. Internet est sur son bureau aux Services industriels; on sait que ceux-ci proposent à l'ensemble des citoyens une voie particulièrement appréciée d'accès au réseau et on en voit le résultat. Monsieur le président, sachez que les documents cités par M. Brunier concernent le programme radical fédéral, et que, au niveau fédéral en effet, des allégements fiscaux sont proposés, notamment pour les familles. Il est délicat de les faire passer en raison des difficultés financières de la Confédération, mais le parti radical suisse essaie de trouver des solutions. Alors M. Brunier cite une baisse de la fiscalité des familles et un montant précis, 7 000 F, pour les enfants qui sont en garde, notamment dans les établissements spécialisés. Je vous rappelle que Genève favorise ces institutions à raison d'une subvention de 80% de leurs coûts de fonctionnement, tandis que la Confédération ne fait aucun effort similaire. De même, dans les autres cantons, c'est bel et bien la famille qui doit payer, raison pour laquelle le parti radical tient à réduire ce type de coûts au niveau national. C'est donc de la démagogie, Monsieur Brunier, de mélanger les genres dans ce débat : nous sommes cohérents et je vous répète que l'ensemble des amendements déposés - et que personne ne peut véritablement comprendre vu l'absence d'exposés des motifs - doivent être renvoyés en commission, sous la forme d'une motion - à l'image de ce qu'a fait M. Grobet ce matin. Nous proposons de les étudier en commission fiscale avec toute la bienveillance qui convient, afin de pouvoir appuyer encore des baisses d'impôt puisque, apparemment, l'Etat est trop riche et que ces baisses sont obligatoires, au vu de la charge fiscale que cela représente pour les citoyens.
Le président. J'accorde deux minutes à M. Brunier qui a été interpellé.
M. Christian Brunier (S). Monsieur le président, je ne pense pas avoir besoin de deux minutes. Premièrement, Monsieur Froidevaux, vous avez tort de dire que les amendements sont présentés sans que l'on puisse les comprendre. Il s'agit des articles qui ont été proposés par le Conseil d'Etat en commission. Vous les avez déjà étudiés, vous les avez refusés et cela est contraire à votre programme, au niveau national comme au niveau cantonal.
Deuxièmement, Monsieur Hiler, vous dites qu'accepter une déduction pour les frais de garde des enfants revient à priver l'Etat de recettes. Ce raisonnement est superficiel. Aujourd'hui, à Genève, les places dans les crèches sont notoirement insuffisantes et cela génère une quantité importante de travail au noir. Ainsi, lorsque vous voulez faire garder votre enfant, vous pouvez vous tourner vers des familles reconnues qui déclarent leurs revenus, mais il y a aussi tout un réseau de garde au noir qui existe. Pourquoi ? Parce qu'une garde reconnue officiellement pratique des tarifs de 4 F par enfant et par heure, nécessite une certification du service de protection de la jeunesse, une déclaration fiscale obligatoire, etc. Il y a donc des familles d'accueil qui veulent échapper au contrôle de l'Etat, à la fiscalité, qui veulent recevoir un nombre d'enfants illimité, pouvoir taxer plus de 4 F de l'heure, et qui ne déclarent pas leurs revenus. Or, c'est en permettant aux parents qui veulent faire garder leur enfant de déclarer et de justifier cette dépense qu'on pourra diminuer la garde au noir. Je crois que personne ici n'a envie d'encourager la fraude fiscale. (Brouhaha.)
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Le canton de Genève s'est beaucoup battu contre les effets de la loi fédérale, notamment sur les retraités et les plus démunis. Nous avons élaboré ensemble une bonne loi, la loi sur l'imposition des personnes physiques. Nous n'avons pas courbé l'échine. Nous avons déployé nos compétences, notre détermination et notre imagination pour donner à Genève la loi la plus juste possible, en refusant la fatalité de contraintes qui auraient lourdement pesé sur la vie de la quasi-totalité des citoyens et des citoyennes. Je suis heureuse de constater qu'au vu des déclarations d'impôt rentrées à ce jour nous avons tenu nos promesses de neutralité fiscale. Certes, le produit de l'impôt augmente, mais cela n'est pas dû au passage à la LIPP. Pour la très grande majorité des contribuables, cela est dû au postnumerandoainsi qu'à l'augmentation des revenus. Je vous le dis en toute franchise : le barème B corrige moins que le barème A, et nous le savions tous à l'époque. Cela n'est pas une raison pour ne pas lui conférer aujourd'hui un plus grand impact correcteur et modérateur de l'impôt. Nous pourrons ainsi mieux protéger les citoyens et les citoyennes de notre canton, notamment les familles confrontées à de lourdes charges et qui se débrouillent parfois très difficilement pour concilier vie professionnelle et vie familiale. Et la famille, c'est vrai, a aussi un coût : les enfants peuvent être source de pauvreté, en particulier dans les jeunes familles, les familles monoparentales, et celles qui ont plus de deux enfants. Cela n'est pas acceptable. La première priorité dans ce contexte est l'accueil, soit les crèches et les garderies. Le Conseil d'Etat prévoit d'aider les communes à ouvrir des lieux en faveur de la petite enfance. Sur le plan fiscal, le projet de loi du Conseil d'Etat prévoit l'augmentation de la première charge de famille. Cette mesure a été votée en commission, la première charge de famille passant ainsi de 4 500 à 6 500 F. Elle est désormais à hauteur des suivantes.
Le projet de loi du Conseil d'Etat prévoyait également d'augmenter les montants déterminants, justifiant les charges de famille, pour des enfants qui ont une activité lucrative - comme les apprentis ou les étudiants. Ces montants n'ont pas été rajustés depuis des années, ils sont trop bas et provoquent l'incompréhension de nombreux contribuables. Je dois vous avouer que la plus grande partie du courrier que je reçois a trait à ce phénomène : les gens ne comprennent pas comment un job d'été ou un petit travail peut faire «passer à la trappe» - passez-moi l'expression - leurs charges de famille. La troisième mesure proposée par le Conseil d'Etat permet de mieux tenir compte des frais de garde et d'introduire dans la loi genevoise, pour les conjoints qui ont tous deux une activité lucrative, la déductibilité de ces frais. La commission fiscale a examiné cette mesure et l'a rejetée.
Je dois avouer que j'ai beaucoup de peine à accepter le refus en commission des deux mesures que je viens d'évoquer. L'argument selon lequel trop de personnes échapperaient à l'impôt ne tient pas. L'augmentation des montants déterminants figurant dans le rabais d'impôt ne parvient pas non plus à expliquer pourquoi tant de gens sortent de l'impôt. Il est indifférent que la déductibilité soit dans le rabais d'impôt, ou figure sous forme de déduction sur le revenu brut: autant de gens sortent de l'impôt dans l'un et l'autre cas. Cela n'est pas dû à la méthode et le rabais d'impôt n'est donc pas en cause. Mesdames et Messieurs, cela est dû à la faiblesse des revenus et c'est à ce propos que nous devrions nous faire du souci. Le simple fait que des frais de garde à hauteur de 2 500 F ou 3 500 F fassent sortir des gens de l'impôt devrait vraiment nous préoccuper quant à leurs capacités financières.
Enfin, Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat propose de corriger le barème B de l'effet dit «bosse de dromadaire». L'existence de cette bosse n'est pas fortuite. Il faut remonter à 1994 pour en connaître les causes. Jusque-là, le barème était en escalier, c'est-à-dire que le taux marginal - l'impôt dû pour chaque franc supplémentaire de revenu - était fixe pour une tranche de revenu puis sautait brutalement à un niveau supérieur pour la tranche suivante. On a décidé en 1994 de remplacer le système en escalier par un système lisse - ce qui explique la formule mathématique - et on a vu depuis que les choix en matière de fiscalité des couples provoquaient une courbe qui présentait une bosse dite «de dromadaire». Le choix, à l'époque, était d'imposer les revenus jusqu'à 45 000 F à un taux correspondant à la moitié du revenu, et de passer progressivement à un taux d'impôt correspondant à la totalité du revenu jusqu'à 60 000 F, seuil après lequel on imposait la totalité du revenu. La bosse n'est que la traduction de ces choix. Le nouvel article de loi propose le lissage de la bosse. L'idée de départ n'est pas abandonnée, mais le passage intervient nettement moins brutalement, puisqu'on passe progressivement non pas de 45 000 F à 60 000 F, mais de 45 000 à 140 000 F. Par conséquent, pour le contribuable l'effet est bénéfique, en ce sens que l'accélération de son taux marginal sera beaucoup moins violente et son impôt final baissera. Je précise que seuls ceux dont le revenu dépasse 45 000 F bénéficieront de cette diminution. La commission fiscale a accepté cette proposition et je l'en remercie.
En conclusion, Mesdames et Messieurs, vous me permettrez de répéter un certain nombre de points. Premièrement, le splittingversion genevoise favorise aussi les hauts revenus. A 2 millions de revenus, l'économie d'impôt est encore de 600 F.
Deuxièmement, le nombre de personnes qui ne payent pas d'impôt n'est pas lié au système du rabais d'impôt. Il est lié à la générosité dont nous voulons faire preuve. Au cours du passage à la LIPP, il y a eu un effet de seuil quant au nombre de contribuables qui ne payent pas d'impôt, ceci du fait que la nouvelle loi sur l'imposition des personnes physiques est plus généreuse que l'ancienne loi sur les contributions publiques. Nous avons donc un effet de sortie de l'impôt pour des personnes qui étaient à la limite.
Troisièmement, une critique unanime est faite à la formule du barème genevois, opaque, peu transparent... Je la partage. Cela ne fait pas partie des propositions que nous avons faites, mais je partage cette critique. Je considère qu'il nous appartient d'apporter au contribuable plus de transparence, de lisibilité, en particulier dans un système postnumerando. Nous avons déjà commencé ce travail, puisqu'avec le CD-rom GEtax, nous avons intégré une calculette d'impôt et vous avez ainsi la possibilité de connaître votre imposition - sous réserve de la vérification des éléments de la déclaration par l'administration fiscale.
Quatrièmement, Mesdames et Messieurs, je répète qu'il n'y a pas d'arguments pour refuser les mesures sur les frais de garde et sur les montants déterminants. Dès lors qu'on souhaite que les femmes soient plus présentes dans la vie professionnelle et dès lors que l'on considère le fait d'avoir des enfants comme posant ou pouvant poser un problème financier, j'estime qu'il n'y a pas d'arguments pour refuser ces deux mesures. Quant à la possibilité, Monsieur Hiler, qu'a le canton de financer ces baisses d'impôt, la totalité des mesures proposées par le Conseil d'Etat s'élève environ à 70 millions. Les deux mesures proposées ce soir et acceptées par la commission fiscale coûteront - y compris l'impôt à la source - un total de 50 millions. Je peux vous donner les renseignements suivants : au vu des déclarations fiscales qui sont actuellement rentrées, et dont l'impôt est calculé, les augmentations de revenus sont de l'ordre de 15% pour le barème A et les augmentations d'impôt de l'ordre de 27%. Je m'empresse d'ajouter que cela n'est pas représentatif. Il s'agit de déclarations qui touchent des moyens et petits revenus. Or, en période de récession, nous savons tous que le problème se situe du côté des hauts revenus. Par conséquent, je ne voudrais pas que ces chiffres, cités dans le rapport de M. Roulet, soient utilisés comme argument. Il est vrai que Genève connaît une situation économique plus difficile, en particulier sa place financière. Je pense que nous pouvons supporter 50 millions - le budget de 2003 prendra en compte cette diminution de 50 millions - mais je ne peux rien vous dire de plus pour le moment.
Mesdames et Messieurs, je voudrais remercier la commission fiscale et les députés qui ont travaillé jusqu'à mi-juillet. Merci pour votre travail. Je vous demande vraiment de faire ce geste supplémentaire pour les familles et je vous demande aussi de le faire aujourd'hui, afin que l'effet rétroactif puisse s'appliquer aux mesures que vous voterez.
Mis aux voix, le projet de loi 8756 est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, c'est ici que les problèmes commencent... (Rires.)Nous examinons maintenant un amendement qui vise à réintroduire une modification de l'article 7, alinéas 1 et 2 de la LIPP V. Cet article 7 ne figure pas dans le projet de loi, puisque sa modification a été refusée par la commission. Le texte de l'amendement vous a été distribué. Il se formule ainsi:
«Les contribuables exerçant une activité lucrative qui tiennent ménage commun avec leur(s) enfant(s) mineur(s) dont ils ont la garde peuvent déduire, pour chaque enfant jusqu'à l'âge de 12 ans, les frais de garde effectifs et justifiés jusqu'à concurrence de 3500 F par année, respectivement 5000 F par année, si le revenu brut total ne dépasse pas 50 000 F.
»Pour l'année fiscale 2001, les contribuables exerçant une activité lucrative qui tiennent ménage commun avec leur(s) enfant(s) mineur(s), jusqu'à l'âge de 12 ans, dont ils ont la garde peuvent déduire 1750 F par personne, respectivement 2500 F par personne si le revenu brut total ne dépasse pas 50 000 F. Cette déduction est doublée pour les contribuables célibataires, veufs, divorcés, séparés de corps ou de fait qui tiennent ménage avec leur(s) enfant(s) mineur(s) jusqu'à l'âge de 12 ans. Les contribuables célibataires, veufs, divorcés, séparés de corps ou de fait qui tiennent ménage indépendant avec leur(s) enfant(s) mineur(s) dont ils ont la garde peuvent déduire de produit de leur activité lucrative, en sus de ce montant, pour chaque enfant jusqu'à l'âge de 12 ans, les frais de garde effectifs et justifiés jusqu'à concurrence de 3500 F par année, respectivement 5000 F par année si le revenu brut total ne dépasse pas 50 000 F.
M. Dominique Hausser (S). Les précédents intervenants ont déjà longuement insisté sur l'importance de cette mesure. Elle doit permettre de promouvoir le travail des femmes et de soutenir des familles qui essayent, par leur travail, d'avoir un revenu suffisant pour vivre.
J'ajouterai un élément qui me semble important : il y a deux ans environ, 4000 personnes étaient à l'assistance au sens strict de cette expression; aujourd'hui, ce sont 6000 personnes qui sont dans cette situation. Ainsi, malgré la reprise, toute une partie de la population a de plus en plus de peine à faire face à ses obligations financières quotidiennes. Alors, Monsieur Hiler, vous avez raison de commenter la mesure que nous proposons en disant que les indicateurs économiques ne portent pas à des projections particulièrement optimistes. Je pense cependant que ce type de déduction est susceptible de contribuer à sortir certaines personnes de leur situation précaire en leur permettant de travailler, évitant ainsi qu'elles soient à l'assistance. Accepter cet amendement, c'est permettre à des personnes qui travaillent de pouvoir déduire leurs frais de garde et d'assurer une vie décente à leur famille.
Je vous recommande donc, Mesdames et Messieurs les députés, de voter cette modification. A l'intention du président, je précise que notre amendement modifie les alinéas 1 et 2 de l'article 7 et que si cet amendement est voté, il est nécessaire d'abroger l'article 14, alinéa 4 pour assurer la cohérence de la loi.
M. David Hiler (Ve). Tant M. Brunier que M. Hausser feignent - parce que je ne crois pas qu'ils l'aient mal compris - de croire que mon interrogation portait sur les frais de garde. Ce n'est pas le cas, c'est sur le barème B que je vous ai interrogés, Messieurs... (L'orateur est interpellé.)Si vous êtes d'accord, Monsieur Hausser, je vous propose d'essayer de cesser les «politicailleries» parce que la question est d'importance : elle n'est pas facile, elle est complexe.
Je vous ai demandé tout à l'heure si vous étiez certains que la correction du barème B est aussi nécessaire que vous l'affirmez, parce que si nous avons moins corrigé le barème B que le barème A, c'est précisément que dans l'ancien système fiscal les familles monoparentales étaient pénalisées. Mon interrogation à votre endroit porte sur le barème B et non pas sur les frais de garde.
Le rapport - M. Roulet n'y est pour rien, il était absent durant une partie des travaux - ne mentionne pas l'ensemble de notre argumentation sur les frais de garde. C'est la raison pour laquelle les Verts feront une proposition un peu différente de la vôtre. Lors des travaux en commission, nous avons émis des doutes quant au recours à des déductions justifiées par des factures. Cela signifie que nous pourrions admettre une déduction forfaitaire. La discussion, en commission, n'est même pas allée jusqu'à ce point puisqu'il n'y a pas eu d'entrée en matière sur cet article et nous n'avons donc pas discuté du choix entre déduction justifiée et rabais forfaitaire.
Pourquoi cette question du forfait nous tient-elle à coeur ? Pour deux raisons que je souhaite expliquer complètement ici. La première, c'est qu'il n'y a pas assez de place dans les crèches et qu'il n'y a pas assez de familles reconnues officiellement pour garder des enfants. C'est pourquoi un certain nombre de familles, dans notre République, que ça leur plaise ou non, ont recours, pour garder leurs enfants, à des personnes qui n'ont pas de statut, mais qui sont bel et bien là. Essayez d'obtenir des factures de ces personnes... Elles ont peur bien sûr puisqu'elles n'ont pas à être là. On peut regretter que la politique migratoire soit ce qu'elle est, on peut regretter beaucoup de choses, mais c'est ainsi. Or, ce sont précisément des gens de condition modeste qui ont recours à ce genre de services. Par conséquent, nous estimons que si nous recourons uniquement à la déduction sur présentation des pièces justificatives, une partie de la population et pas forcément la plus aisée ne profitera pas de ce cadeau.
Vous êtes peut-être moins sensibles, Mesdames et Messieurs les députés, à la deuxième raison pour laquelle nous vous proposions une démarche une peu plus pensée. Imaginons deux parents qui décident de réduire leur temps de travail à 50% chacun, notamment durant les deux premières années de vie de leur enfant, pour avoir le temps de s'en occuper. Cette situation est-elle moins souhaitable que le placement en crèche ? Ce n'est ni mieux ni moins bien, c'est un choix que les gens ont le droit de faire. Cela ne nous gêne pas qu'une déduction forfaitaire pour frais de garde soit accordée aussi dans ce cas. De fait, les gens n'ont pas de frais de garde, mais ils renoncent à une partie de leur revenu pour prendre en charge leur enfant.
C'est pour ces deux raisons qu'il convient de traiter ce problème avec délicatesse. On pourrait en donner d'autres, par exemple le système des allocations familiales et des pensions qui est fondé sur le fait que la somme accordée augmente avec l'âge de l'enfant. L'amendement proposé par le parti socialiste met notamment en place un système qui accorde une forte déduction jusqu'à 12 ans - pourquoi 12 d'ailleurs - et qui diminue ensuite. Au niveau de la cohérence de la politique familiale, je ne pense pas que cette situation soit satisfaisante.
La proposition que nous faisons, Monsieur le président, conformément à une tradition de ce parlement, c'est de ne pas voter cet article, qui a été refusé par la commission, mais de le renvoyer en commission pour une étude attentive et spécifique de l'ensemble de la problématique des frais de garde. De cette façon, nous ne devrions pas avoir, dans six, huit ou neuf mois, à faire la correction de la correction. Ce n'est donc pas que nous jugeons cette déduction injustifiée, mais nous voulons en faire profiter au premier chef ceux qui pourraient en avoir besoin. Je fais donc une proposition formelle : renvoyer cet article du projet de loi du Conseil d'Etat à la commission fiscale.
Le président. Monsieur le député, j'ai eu un certain comportement ce matin dans un cas similaire, j'agirai de même dans ce débat. Vous pouvez refuser cet amendement. La commission peut rediscuter de la question des frais de garde si elle le souhaite ou si le Conseil d'Etat la sollicite en ce sens. Vous pouvez déposer un projet de loi en tout temps. En revanche, il n'est pas possible d'envoyer un amendement en commission, il doit être attaché à un objet.
M. Pierre Weiss (L). J'aimerais intervenir à trois niveaux au sujet de l'amendement du groupe socialiste : sur le fond, sur les faits et sur l'opportunité.
Sur le fond, le parti libéral est défavorable à cet amendement parce qu'il a pour conséquence d'augmenter le nombre de ce que d'aucuns outre-Sarine appellent les Gratisbürger. Je me réfère ici à la situation de «fracture fiscale» dont certains ont pu parler. Bref, certains citoyens sont membres de la collectivité, mais ne contribuent pas à la marche de celle-ci, ne serait-ce que sous une forme symbolique.
Sur les faits, le parti libéral est opposé à cet amendement. Il suffit, pour comprendre la raison de notre opposition, de se référer au document produit par l'administration fiscale. Cette documentation nous apprend que lorsque la LCP a été remplacée par la LIPP... (Brouhaha.)Je vois que le parti socialiste porte assez peu d'intérêt à son propre amendement et aux raisons pour lesquelles il faut le rejeter. Je m'en félicite.
Je disais que, lorsqu'il y a eu passage de la LCP à la LIPP, la part de familles monoparentales exonérées d'impôt est passée de 15 à 40%. Voilà, me semble-t-il, une traduction dans les faits de ce que la présidente du département appelait tout à l'heure la générosité des nouvelles dispositions. Faut-il en ajouter davantage ?
J'en arrive à mon troisième point qui touche à l'opportunité de cette mesure. Le parti libéral pense qu'il n'est pas opportun de se prononcer sur cette demande d'amendement dans le cadre de cette présente révision, parce que le projet de loi tel que déposé prévoit - sur une initiative démocrate-chrétienne - une évaluation. A l'issue de cette évaluation, nous pourrons déterminer s'il convient d'introduire ou non des dispositions supplémentaires pour les frais de garde.
Enfin, comme le PDC, comme l'UDC, au moins autant qu'eux, le parti libéral est favorable à la famille, à toute forme de famille, qu'elle soit traditionnelle ou non.
M. Claude Marcet (UDC). Je suis tout à fait d'accord avec notre collègue David Hiler. En effet, nous avons pris un certain nombre de décisions un peu à la hussarde durant les travaux de la commission. Il fallait absolument faire quelque chose et finalement cela ne rime plus à rien.
L'UDC souhaite une évaluation de la LIPP par rapport à la LCP et estime qu'après cette évaluation la discussion sur les questions familiales pourra reprendre. Cette thématique touche également à notre coeur, à l'instar des radicaux, des libéraux et des démocrates-chrétiens.
J'ajouterai un exemple à ceux qu'à donnés M. Hiler. Vous avez parlé, Monsieur le député, d'un couple qui choisirait de travailler à 50%. On pourrait aller plus loin en disant qu'une famille qui décide que l'épouse ou le mari reste à la maison est susceptible de bénéficier d'une déduction pour frais de garde.
Par ailleurs, la limite de fortune permettant de bénéficier de la déduction pour charge de famille est fixée, par l'amendement socialiste, à 25 000 F net. Pourquoi ne pas prendre en compte 25 000 F brut ? Je vous rappelle que certains parents mettent de l'argent de côté pour constituer un capital destiné à leurs enfants et qu'une épargne de 70 F par mois depuis la naissance jusqu'à 20 ans fait déjà un montant supérieur à 20 000 F. Or, vous perdez la charge dès que vous arrivez à 25 000 F. On peut aller encore plus loin en examinant le cas d'une famille qui souhaite constituer un capital beaucoup plus important parce que son enfant est handicapé et qu'il est utile de laisser un capital pour le tuteur ou le curateur. Ce comportement, qui est dicté simplement par la prévoyance, fait perdre à cette famille la charge de son enfant. Est-ce une situation normale ?
Bref, il y a beaucoup d'éléments dont on peut discuter en matière de fiscalité de la famille. Mais, de grâce, ne travaillons pas dans l'urgence car comme l'a dit notre collègue Hiler : faire maintenant, c'est peut-être défaire demain.
M. Dominique Hausser (S). Monsieur Hiler, il y a effectivement des points importants qui méritent d'être examinés en ce qui concerne le barème B. La correction qui est apportée au barème B par le projet de loi du Conseil d'Etat est remarquable si on compare le graphique de la page 28 et celui de la page 14 du rapport...
Le président. Monsieur le député, je souhaiterais que vous reveniez à l'amendement dont il est question en ce moment.
M. Dominique Hausser. Je suis exactement dans le sujet, Monsieur le président.
Le président. Les gens ne comprennent plus rien, Monsieur Hausser...
M. Dominique Hausser. J'ai à poser des questions qui sont liées à cet amendement. Vous laissez parler les autres, Monsieur le président, et parce que je vous énerve, semble-t-il, vous m'interrompez tout de suite. Ce n'est pas tout à fait correct de votre part et votre manière de mener les débats n'est pas neutre.
Le point que vous avez soulevé tout à l'heure, Monsieur Hiler, à propos d'un rabais ou d'une déduction qui serait consentie aux familles dont les parents décideraient de travailler à temps partiel, est sans doute une question théorique importante, mais dans les faits, ceux qui peuvent se permettre de diminuer leur temps de travail ont sans doute certains moyens financiers qui leur permettent d'assurer les revenus de leur famille. En revanche, les personnes qui travaillent à plein temps, même s'ils ont envie de s'occuper de leurs enfants, n'ont pas les moyens financiers de diminuer leur temps de travail. Ceci dit, je n'exclus pas a priorila discussion sur ces questions.
Alors, pour ne pas nous comporter comme les députés des bancs d'en face l'ont fait ce matin et, en quelque sorte, pour la paix des ménages, le parti socialiste transforme son amendement et vous propose de le déposer immédiatement sous la forme d'un projet de loi qui soit renvoyé sans délai à la commission fiscale pour un examen détaillé. Aussi, Monsieur le président, je vous demande de transformer cet amendement en projet de loi et de le renvoyer à la commission fiscale.
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. J'accepte la proposition de renvoyer la question des frais de garde en commission fiscale. Effectivement, sur le fond, deux philosophies peuvent s'affronter à ce sujet, et elles se sont déjà affrontées en commission. La proposition du Conseil d'Etat était de faire une déduction sur le revenu brut, conforme à la loi d'harmonisation fédérale. En effet, entre l'adoption par le Grand Conseil de la LIPP et ce jour, le Parlement fédéral a voté une modification de la LHID qui autorise une déduction pour frais de garde sur les revenus bruts. Ce qui pose problème, c'est que cette déduction dépend de deux conditions : premièrement que les deux conjoints aient une activité lucrative et deuxièmement que les frais en question soient effectifs et justifiés. C'est la raison pour laquelle la commission fiscale a demandé au département des finances d'étudier une variante qui serait simplement l'augmentation du montant qui est déjà introduit à l'heure actuelle dans le rabais d'impôt. Finalement, aucune des propositions n'a été votée par la commission fiscale. La solution du rabais d'impôt aurait permis d'accorder des frais de garde à tout le monde, sans que l'activité lucrative soit une condition. Je pense qu'il s'agit là d'un problème de philosophie et pour ce qui me concerne, je pense qu'il faut effectivement en discuter en commission. Je suis très heureuse que cette question des frais de garde ne soit pas enterrée. Je vous remercie donc, lorsque le projet de loi sera vraiment déposé, de le renvoyer en commission fiscale.
Le président. Nous attendrons donc que ce projet de loi soit déposé.
M. Pierre Vanek (AdG). Je crois, Monsieur le président, que ce projet doit être renvoyé en commission fiscale - c'était la demande de M. Hausser - hic et nunc, sous la forme d'un projet de loi. Il ne s'agit pas d'attendre que des députés déposent un projet, qu'il soit inscrit à l'ordre du jour, qu'il fasse l'objet d'un tour de préconsultation dans six mois, etc. Cette question relève un peu du débat philosophique que nous avions ce matin : ce projet concerne ce point de l'ordre du jour, le renvoi en commission est une manière de traiter l'amendement socialiste. J'aimerais que ce projet soit renvoyé en commission par cette séance du parlement. Le texte est là, il a des auteurs - on peut en ajouter si nécessaire - il est donc parfaitement possible de le renvoyer sans attendre. Or, Monsieur le président, j'ai l'impression que vous venez de dire que vous attendiez le dépôt d'un texte; ce n'est pas la demande qui a été faite.
Sur le fond maintenant, mais nous pourrons en discuter en commission, je pense que nous préférerons à l'amendement socialiste, qui correspond à la version originale du projet de loi du Conseil d'Etat, la version issue des travaux de la commission fiscale même s'ils n'ont pas abouti, pour des raisons - je ne veux pas rouvrir la polémique - pour certaines raisons... Bref, des éléments intéressants ont été mentionnés lors des travaux de la commission fiscale, par exemple la proposition de ne pas retenir l'article 7 tel que rédigé par le Conseil d'Etat pour préférer l'introduction de la déduction pour frais de garde dans le rabais d'impôt. Nous nous rallions à cette proposition, les arguments avancés par David Hiler sur cette question sont pertinents et je rappelle que le parti socialiste lui aussi soutenait cette position durant les travaux de la commission. J'ajoute que si le Conseil d'Etat avait pris la peine de formuler cette possibilité d'introduire la déduction dans le rabais d'impôt, c'était à la demande expresse de la commission et, si mon souvenir est bon, d'un cercle assez large de députés, au-delà même de l'Alternative. C'est qu'à ce moment-là nous travaillions dans un esprit plus constructif s'agissant des charges des familles.
J'insiste donc, en ce qui concerne la procédure, sur la demande formulée par Dominique Hausser et qu'a acceptée la présidente du département, à savoir que le texte de l'amendement soit renvoyé sans attendre en commission fiscale, sous la forme d'un projet de loi.
Le président. Je crois que nous ne sommes pas du tout dans la même situation que ce matin. En effet, ce matin, le PDC maintenait son amendement tandis que le parti socialiste retire le sien. La démarche est donc totalement différente. Cependant, si le parlement accepte la proposition que vous formulez, Monsieur Vanek, c'est très volontiers que le Bureau suivra le désir de ce Grand Conseil. Il sera attribué un numéro à ce projet de loi et je demande au parti socialiste de rédiger un exposé des motifs.
Pour ceux qui seraient plus formalistes qu'on me reproche de l'être, j'indique que cette procédure revient exactement au même que si le projet de loi était déposé la semaine prochaine, traité en commission avant de passer devant le Grand Conseil une première fois, et enfin soumis à ce Conseil en urgence.
Je mets donc aux voix la proposition de renvoyer immédiatement le texte de l'amendement socialiste à la commission fiscale, sous la forme d'un projet de loi.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée. Le projet de loi 8802 est renvoyé à la commission fiscale.
M. Jean Rémy Roulet (L), rapporteur. Mesdames et Messieurs, pour la clarté des débats, je voudrais préciser que l'amendement socialiste est retiré, qu'il est transformé en projet de loi et qu'il est renvoyé en commission. Dans ce contexte, la droite - et nous vous l'avons démontré au cours des séances de commission de juin et juillet - sera ouverte à ce type de discussions. Je vous rappelle qu'il y avait une négociation interdépartementale à mener concernant le chèque emploi; donc la déductibilité des frais de garde n'est pas le seul point qui peut être étudié en commission concernant les familles. Je souhaiterais que ces éléments soient examinés durant les travaux sur ce projet de loi.
J'aimerais cependant insister sur un point, Madame la présidente - et je m'adresse aussi à David Hiler, président de la commission fiscale - à savoir que les travaux sur les projets de lois fiscales laissés pendants à cause du couac se poursuivent jusqu'à leur terme.
M. Albert Rodrik (S). Je résume encore pour que ce soit bien clair : l'amendement est retiré en tant que tel, il devient un projet de loi et, s'il faut un surcroît d'exposé des motifs, nous considérons volontiers les interventions de Mme la présidente et de M. Hiler comme étant un exposé des motifs complémentaire.
Mme Anne-Marie Von Arx-Vernon (PDC). Le parti démocrate-chrétien est d'accord de réétudier en commission l'article 7. Bien entendu il s'agira, avant cette étude, d'attendre l'évaluation prévue après une année d'exercice fiscal. (Brouhaha.)Pour notre part, nous allons également déposer une proposition de motion pour une déduction appropriée des frais de garde. Si nous prenons la liberté de déposer cette motion, c'est pour réaffirmer notre plus grande volonté, notre plus grande disponibilité, notre attention à répondre aux besoins des familles. Nous ne nous laisserons pas accuser de négliger les familles et les enfants. C'est la moindre des tolérances que de nous accorder cette priorité. Comme l'a indiqué Mme Ruegsegger, le PDC attendra le résultat de l'évaluation rigoureuse du Conseil d'Etat en matière de déduction des frais de garde demandée par cette motion pour faire des propositions concrètes en faveur des familles, et des propositions concrètes qui pourront éventuellement être plus généreuses que ce qui a été proposé jusqu'à maintenant.
M. Pierre Vanek (AdG). Je voudrais intervenir sur les propos de Mme von Arx à l'instant. Nous venons, dans le cadre de ce débat, de déposer en cours de séance un projet de loi qui devra nous permettre d'empoigner cette question des frais de garde. Tant M. Hiler que Mme la présidente ont fait à ce sujet des remarques pertinentes. On a offert une sorte de rattrapage à certains, qui avaient pris des positions assez surprenantes, en leur donnant l'occasion de manifester concrètement leur attachement déclaré à la famille en résolvant un problème réel de frais de garde. Mais curieusement, immédiatement après que la majorité de ce Conseil eut choisi de renvoyer ce texte en commission, M. Roulet - qui nous avait promis de ne pas réintervenir après sa déclaration initiale, mais qui n'a pas pu résister et tenir parole - nous dit qu'avant de traiter ce projet il faut épuiser tous les projets de lois de déductions fiscales en faveur des riches déposés par les libéraux. Non, Mesdames et Messieurs ! Le sujet est chaud, nous en avons déjà discuté en commission; il s'agit d'un élément qui figurait dans le projet de loi du Conseil d'Etat. La commission fiscale devra bien examiner cette question sans attendre la Saint-Glinglin comme nous le propose maintenant M. Roulet.
Et puis, après M. Roulet, c'est Mme von Arx qui nous dit qu'il est urgent d'attendre l'évaluation de la LIPP V et qui nous propose une motion censée démontrer l'attachement du PDC aux familles. Soyons sérieux ! Nous avions une proposition de prise en compte accrue des frais de garde, une proposition très concrète et qui aurait pu être acceptée durant cette séance et prendre effet immédiatement. Cette proposition a été rejetée par une majorité de droite de la commission fiscale dans laquelle se trouvait le PDC. On vous offre un moyen de rattraper cette erreur, elle est acceptée et soudain vous nous dites, Mesdames et Messieurs les députés des bancs d'en face, combien il est important pour vous que ce projet attende au fond d'un tiroir.
Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas ainsi que l'Alliance de gauche conçoit cette question et nous proposerons en commission que cet objet soit traité de manière prioritaire, car ce problème n'est pas très compliqué, il ne pose pas toutes les questions qu'évoquait M. Hiler, notamment à propos des barèmes ou du splitting. Il faut être sérieux et conséquent.
M. Pierre Weiss (L). Je croyais que Mme von Arx avait été suffisamment claire dans ses déclarations. Je me rends compte en entendant les accents enflammés de notre collègue Vanek que ce n'est pas le cas. Je vais donc répéter que le principe d'une disposition concernant les déductions pour frais de garde a été refusé en commission. Ce Conseil a rejeté aujourd'hui même un amendement concernant ces mêmes déductions; le refus était tellement large que l'amendement a été retiré par ses auteurs. Si cet amendement est transformé en projet de loi, celui-ci sera intégré aux travaux de la commission plutôt à la fin de la liste des objets en suspens qu'au début de celle-ci. En effet, à ma connaissance, il y a déjà un certain nombre d'objets prioritaires déposés par l'Entente à propos de modifications de la fiscalité genevoise. Nous examinerons donc le projet déposé aujourd'hui en temps utile, et après l'évaluation de la LIPP. C'est évidemment la condition de notre soutien à cette transformation d'un amendement en projet de loi. Autrement, on pourrait tout aussi bien imaginer de refuser le renvoi de ce projet de loi en commission.
Le président. Il est inutile, Mesdames et Messieurs, d'élaborer ici le plan de travail d'une commission.
M. Albert Rodrik (S). Je voudrais dire à M. Weiss que la commission saura organiser son travail. S'il veut nous rejoindre, c'est avec plaisir.
Mesdames et Messieurs, l'inspiration de la motion démocrate-chrétienne est louable, nous l'accueillons en tant qu'inspiration louable, genre chemin de Damas, et nous savons qu'il y a plus de place à la droite du Seigneur pour les convertis de la onzième heure, etc., etc. (Rires.)
Cela dit, Mesdames et Messieurs, ne confondons pas : ce pourquoi nous devons attendre la fin de l'exercice de taxation 2001-2002, c'est l'évaluation générale de la nouvelle LIPP par rapport à l'ancienne LCP. En revanche, en ce qui concerne les frais de garde, il s'agit d'ajuster les diverses conceptions, comme M. Hiler et Mme la présidente les ont présentées, conceptions qui ont leurs mérites et entre lesquelles il faudra trouver une pondération et un équilibre. Cette affaire-là ne doit pas attendre la fin de l'exercice de taxation 2001-2002, elle n'a pas à attendre les sollicitudes de M. Weiss sur l'ordre du jour de notre commission. Nous examinerons ce projet comme une séquelle du travail effectué jusqu'en juillet. C'est de cela qu'il s'agit et tout le reste consiste à promettre, sans respecter sa parole. Mesdames et Messieurs, je crois qu'il faut que nous soyons clairs: nous continuerons en commission fiscale les travaux relatifs au projet de loi du Conseil d'Etat dont nous débattons maintenant, et ceci dès que le président de la commission voudra bien les mettre à l'ordre du jour. Le reste n'est que vanité.
M. Claude Marcet (UDC). Je souhaite seulement rappeler que toutes les modifications de loi que nous votons maintenant ou plus tard ont pour base le couac annoncé par Mme la présidente... (L'orateur est interpellé par Mme Micheline Calmy-Rey.)Enfin, vous nous avez annoncé une bosse de dromadaire qui affectait les impôts d'un certain nombre de familles qui étaient précisément dans la catégorie pour laquelle on envisage ces modifications. Ce que dit le parti démocrate-chrétien est correct au fond, puisque ce n'est que dans l'hypothèse où l'évaluation du passage LCP - LIPP nous confirmerait la persistance de la bosse de dromadaire que nous pourrions envisager les mesures dont il est question actuellement.
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Je suis désolée de vous contredire, Monsieur Marcet, mais la bosse de dromadaire n'a rien à voir avec le passage à la LIPP. Elle existe depuis 1994. Ce choix a été fait au préalable, j'ai toujours dit que ce n'était pas juste et que je voulais corriger cette situation. Cela n'a strictement rien à voir avec la LIPP et l'évaluation de cette loi. En outre, vous avez accepté en commission de corriger cette bosse de dromadaire, elle n'existera donc plus.
M. Albert Rodrik (S). Je suis arrivé à Genève il y a quarante-cinq ans et alors déjà on parlait de la fameuse bosse de dromadaire et du fait qu'on taxait trop fortement les classes moyennes. Cette affaire-là, il ne faut pas la ramener comme si c'était une nouveauté. Entendons-nous bien, le mardi 9 juillet à 19 h 35, alors que le président de la commission proposait fort sagement depuis deux heures et demie de dissocier les mesures ponctuelles en faveur de la famille d'une part et le fait de supprimer une courbe qui n'avait même pas deux années d'existence d'autre part, à 19 h 35 donc, M. Froidevaux enthousiaste nous proposait de bazarder ce que nous avions voté il y a moins de deux ans.
Alors, maintenant, ne venez pas mélanger la bosse de dromadaire et la conception du mode de déduction des frais de garde : ce n'est pas la même chose.
Mis aux voix, l'article 14, alinéa 3 est adopté.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à l'alinéa 5 de l'article 14. Cet amendement vise à réintroduire les modifications proposées par le Conseil d'Etat aux lettres a et b et à modifier également la lettre c, «Proches incapables de subvenir entièrement à leur besoins». Cet amendement se formule ainsi :
«Constituent des charges de famille:
»a) chaque enfant mineur sans activité lucrative ou dont le gain annuel ne dépasse pas 6800 F (charge entière) ou 10 200 F (demi-charge), pour celui des parents qui en a la garde; dès l'année fiscale 2002, chaque enfant mineur sans activité lucrative ou dont le gain annuel ne dépasse pas 13 600 F (charge entière) ou 20 400 F (demi-charge), pour celui des parents qui en a la garde;
»b) chaque enfant majeur, jusqu'à l'âge de 25 ans révolus, qui est apprenti au bénéfice d'un contrat d'apprentissage ou étudiant régulièrement inscrit dans un établissement d'enseignement secondaire ou supérieur, et dont la fortune ne dépasse pas 25 000 F, lorsqu'il n'a pas un revenu supérieur à 6800 F (charge entière) ou 10 200 F (demi-charge), pour celui des parents qui pourvoit à son entretien; dès l'année fiscale 2002, chaque enfant majeur, jusqu'à l'âge de 25 ans révolus, qui est apprenti au bénéfice d'un contrat d'apprentissage ou étudiant régulièrement inscrit dans un établissement d'enseignement secondaire ou supérieur, et dont la fortune ne dépasse pas 25 000 F, lorsqu'il n'a pas un revenu supérieur à 13 600 F (charge entière) ou 20 400 F (demi-charge), pour celui des parents qui pourvoit à son entretien;
»c) Les ascendants et descendants (dans les autres cas que ceux visés aux lettres a à b du présent alinéa), frères, soeurs, oncles, tantes, neveux et nièces, incapables de subvenir entièrement à leurs besoins, qui n'ont pas une fortune supérieure à 10 000 F ni un revenu annuel supérieur à 6800 F (charge entière) ou qui n'ont pas une fortune supérieure à 20 000 F ni un revenu supérieur à 10 200 F (demi-charge), pour celui de leur proche qui pourvoit à leur entretien; dès l'année fiscale 2002, chaque personne incapable de subvenir à ses besoins, et dont la fortune ne dépasse pas 25 000 F ni un revenu annuel supérieur à 10 200 F (charge entière) ou qui n'ont pas un revenu supérieur à 20 400 F (demi-charge), pour celui de leur proche qui pourvoit à leur entretien.»
Mme Maria Roth-Bernasconi (S). L'amendement que nous vous proposons vise à réintroduire la mise à niveau des montants déterminants pour la prise en considération de la charge d'un enfant dans le rabais d'impôt. Cette proposition s'inscrit en fait dans un train de mesures en faveur de la famille. En l'occurrence, il s'agit notamment de familles à revenus modestes. Comme l'a montré tout à l'heure M. Brunier, tous les partis politiques affirment vouloir soutenir la famille. Il nous semble donc que cet amendement ne devrait pas poser de problème.
De quoi s'agit-il exactement ? Pour pouvoir prendre en compte un enfant comme charge de famille dans le cadre du rabais d'impôt, il faut que celui-ci soit apprenti ou étudiant et que son revenu ne dépasse pas un certain montant. Le parti socialiste estime que ce montant devrait être revu à la hausse. Avec cet amendement, nous doublons le montant qui correspondrait à peu près à un salaire d'apprenti en troisième année. En outre, ces montants n'ont pas été adaptés depuis de nombreuses années. Je pense donc que cette modification correspondrait tout à fait à l'esprit de la loi actuelle. Si cette mesure n'est peut-être pas fondamentale, elle est néanmoins symbolique. En effet, elle touche les familles dont les enfants sont en apprentissage et il n'est pas juste que ces familles soient pénalisées parce que leur enfant dispose d'un petit revenu. Il en va de même pour les étudiants et les étudiantes qui travaillent à côté de leurs études. Ce ne sont donc pas forcément les familles les plus aisées qui sont concernées et cette mesure peut soulager celles qui tirent parfois le diable par la queue pour arriver à boucler les fins de mois. On pourrait même imaginer que cette mesure pourrait s'inscrire dans les mesures de promotion de l'apprentissage. Dire aux familles, par cette disposition nouvelle, que leur effort pour la formation professionnelle de leurs enfants est apprécié, voilà un programme qui devrait plaire à plusieurs d'entre nous. Je pense notamment à M. Barrillier avec qui, en raison de nos attributions professionnelles respectives, je travaille beaucoup sur cette question de la promotion de l'apprentissage. Mais je vois que vous ne m'écoutez pas, Monsieur le député...
S'il est possible que cette disposition augmente le nombre de personnes qui ne paient pas d'impôts, je répéterai encore une fois qu'il n'est pas scandaleux qu'autant de familles ne paient pas d'impôts; ce qui est scandaleux, c'est qu'il y a dans notre canton riche encore des personnes qui ne paient pas d'impôt parce qu'elles ont des salaires indécents. Nous vous invitons donc à ne pas faire de la politique politicienne, à oublier toutes ces histoires de couac, à enterrer les rancunes et à voter cet amendement en faveur des familles, en faveur des apprentis et des étudiants.
Mme Michèle Künzler (Ve). La question au fond est fort simple. Jusqu'à quand un enfant ou un jeune est-il encore une charge pour sa famille ? Un enfant qui gagne 600 F par mois n'est-il réellement qu'une demi-charge pour sa famille ? Clairement la réponse est non. En réalité, il est rare que les enfants versent à leurs parents les 600 F qu'ils ont gagnés par mois. Les jeunes qui gagnent 1000 F par mois ne coûtent-ils plus rien à leur famille ? Soyons sérieux, la réalité a changé en vingt ans. Il est logique de doubler les montants figurants à l'article 14, alinéa 5, afin qu'un enfant soit encore considéré comme une charge s'il gagne 1000 F par mois, et qu'il ne soit plus considéré comme une charge dès lors qu'il gagne plus de 20 000 F par an. Accepter cet amendement relève simplement de la logique. Personne ne peut dire qu'un jeune de 16 ans qui gagne 600 F par mois n'est plus une charge pour sa famille. Il est logique que celle-ci puisse compter cet enfant comme une charge, ce d'autant que si elle habite un logement subventionné elle se voit souvent surtaxée ou exclue du logement social en raison du salaire de l'enfant.
Je le répète, il y a vingt ans que ces montants n'ont pas été révisés et il faut s'adapter à la réalité actuelle. Je vous le dis honnêtement, ce n'est plus possible de continuer comme cela.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 19, alinéas 1 et 2. Il est proposé par M. Catelain et se formule ainsi : «Les barèmes fiscaux et les montants prévus à l'article 14, alinéa 1sont adaptés (...)». En outre, la mention de l'article 14 est supprimée dans l'alinéa 2 de l'article 19.
M. Gilbert Catelain (UDC). Comme vous le savez, la conséquence majeure du passage de la LCP à la LIPP consiste en l'introduction du rabais d'impôt. Celui-ci peut représenter, pour une grande majorité de citoyens de ce canton, une proportion importante du revenu brut : environ 40 000 F pour une famille de quatre personnes. Le groupe UDC, dans un souci de neutralité et d'équité fiscale, souhaite non seulement que les barèmes fiscaux, comme c'est déjà le cas, mais également les montants du rabais d'impôt indiqués à l'article 14, alinéa 1 soient indexés annuellement au renchérissement. Nous jugeons insatisfaisante la procédure actuelle qui indexe les montants du rabais d'impôt tous les quatre ans. En effet, le refus d'adapter annuellement ce montant revient à une augmentation d'impôt déguisée trois années sur quatre. L'amendement proposé est neutre sur le plan fiscal et il a le mérite de ne pas amplifier les effets pervers liés à l'accroissement rapide du taux marginal du barème d'impôt. La mesure introduite par cet amendement bénéficie à l'ensemble des contribuables, y compris les familles. Je vous invite donc à soutenir cet amendement.
Le président. Je crois que nous avons bien compris le sens de cet amendement.
M. Pierre Vanek (AdG). Vous affirmez, Monsieur le président, que nous avons bien compris de quoi il retourne avec cet amendement. J'avoue que je viens de prendre connaissance du texte de l'amendement de M. Catelain. Je vois une mention qui indique que l'article 14 devrait être supprimé, alors que l'alinéa 1 de l'article 19 se réfère précisément à l'alinéa 1 de l'article 14...
M. Albert Rodrik. C'est la mention de l'article 14 qui est supprimée à l'alinéa 2 de l'article 19.
M. Pierre Vanek. Merci, j'en prends note, mais je pense que cet amendement mérite d'être un peu mieux explicité avant que nous nous prononcions à son sujet.
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, M. Catelain prévoit d'indexer annuellement uniquement le rabais d'impôt et pas les autres montants prévus à l'alinéa 2 de l'article 19. Moi, je vous propose de renvoyer cette question en commission et de la traiter à part, ainsi que vous l'avez fait tout à l'heure pour les frais de garde. Cela me laissera le temps de chiffrer le coût d'une telle opération, ce que je n'ai pas pu faire puisque je découvre cet amendement maintenant. Vous débattez, Mesdames et Messieurs, d'allégements fiscaux pour les familles et la proposition de M. Catelain n'a rien à voir avec l'imposition des familles. Il est donc tout à fait souhaitable de la renvoyer en commission pour un traitement ultérieur.
M. Gilbert Catelain (UDC). Pour clarifier l'objectif de cette proposition, je dirai qu'il s'agit de faire en sorte que le rabais d'impôt, qui représente en moyenne 40 000 F pour une famille de quatre personnes, soit indexé chaque année. C'est quelque chose de tout à fait naturel et l'opération est neutre fiscalement. Cela ne devrait donc avoir aucune incidence sur les recettes de l'Etat. Simplement, pour le contribuable, une indexation tous les quatre ans est une forme déguisée d'augmentation d'impôt.
En ce qui concerne la proposition de Mme Calmy-Rey, il me semble que la solution consistant à adopter cet amendement est nettement plus simple que celle consistant à renvoyer un projet de loi en commission. Maintenant, si ce Grand Conseil refuse mon amendement, je le présenterai sous la forme d'un projet de loi.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement de M. Pierre Weiss à l'article 20 (nouveau). Cet amendement se formule ainsi : «Les effets du passage de la LCP à la LIPP, notamment les effets de l'introduction du rabais d'impôt, feront l'objet d'une évaluation externeaprès les travaux de taxation de la période fiscale 2001. (...)»
M. Pierre Weiss (L). Je propose une manière de sous-amendement à l'amendement introduit en commission par le PDC et qui visait à imposer une évaluation du passage de la LCP à la LIPP. Certaines choses allant sans les dire, mais d'autres allant mieux encore en les disant, il me semble plus prudent de préciser que cette évaluation doit être une évaluation externe. Autrement dit, il s'agit que l'évaluation ne soit pas confiée à celui qui serait juge et partie, à savoir le département des finances, mais par exemple à la Commission externe d'évaluation des politiques publiques, à la future cour des comptes, par exemple à l'administration fiscale fédérale, à des fiscalistes privés, ou encore à plusieurs de ces instances en même temps. En tout état de cause, cette évaluation doit être externe et non interne.
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Je vous remercie de votre proposition. Le département des finances n'a aucun intérêt à ce que le rapport qui sera présenté au Grand Conseil puisse être remis en cause pour les raisons que vous venez d'évoquer. Je suis donc tout à fait favorable à ce que l'évaluation soit externe. Vous me laisserez le soin de l'interpréter, pour savoir à qui nous nous adresserons. Les solutions sont en effet multiples. J'accepte donc volontiers cet amendement.
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 20 ainsi amendé est adopté, de même que l'annexe B (article 12, al. 3) (nouvelle teneur) et l'annexe B (article 12, al. 4) (modification du graphique).
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté.
Le président. A l'article 2 souligné, nous sommes saisis d'un amendement du Conseil d'Etat, visant à introduire un alinéa 2:
«Le Conseil d'Etat édicte par voie réglementaire les dispositions de procédure adéquates en vue d'assurer la reconsidération de l'imposition qui, pour les années fiscales 2001 et 2002, a été faite à la source en application de la loi sur l'imposition à la source des personnes physiques et morales, du 23 septembre 1994, dans la mesure où la présente loi implique la modification de l'impôt dû par les personnes assujetties à l'imposition à la source.»
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Je propose deux amendements aux dispositions finales. Tout d'abord un amendement aux dispositions transitoires qui est une sorte de délégation de compétences au Conseil d'Etat pour ce qui concerne l'application des mesures rétroactives pour l'impôt à la source. Il faut savoir que l'impôt des personnes imposées à la source a déjà été perçu pour 2001 et pratiquement pour 2002. Par conséquent, si vous voulez leur octroyer les mêmes avantages qu'au reste des contribuables - ce qui est parfaitement normal, c'est une question d'égalité de traitement - il faut nous laisser une petite marge pour voir comment traiter cette question. Cela se fera en collaboration notamment avec les associations patronales pour ce qui concerne la perception 2002. Je vous remercie de bien vouloir accepter cet amendement qui devrait nous permettre d'évaluer la situation. Pour ce qui est du second amendement, j'y reviendrai par la suite.
M. Claude Marcet (UDC). Je suis tout à fait d'accord avec le contenu de l'amendement de Mme la présidente. Je souhaiterais simplement préciser qu'il conviendrait d'éviter un effet rétroactif sur l'impôt à la source. Une telle disposition avait déjà été employée par le passé et cela s'était avéré particulièrement compliqué. Je rappelle qu'il est extrêmement difficile de rectifier les impositions à la source d'employés qui parfois ont quitté l'entreprise. Bref, il faudra faire en sorte que les dispositions que vous prendrez, Madame la présidente, ne posent pas de problèmes aux entreprises.
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Monsieur Marcet, on ne peut pas décider d'introduire un effet rétroactif pour l'ensemble des personnes physiques, sauf pour les personnes imposées à la source. Il s'agirait d'une inégalité de traitement; par conséquent il faudra bien que nous traitions ce problème-là et nous envisagerons pour 2002 une solution avec les associations patronales. C'est pour cela que je vous demande d'introduire une disposition transitoire qui nous permette d'essayer de trouver ensemble des solutions pour les personnes imposées à la source. Si vous acceptez, Mesdames et Messieurs les députés, les modifications rétroactives de la LIPP V, vous ne pouvez pas vous contenter de me laisser me débrouiller avec l'imposition à la source.
M. Claude Marcet (UDC). Madame la présidente, si vous introduisez un effet rétroactif, il faudra prendre en considération les surcoûts que cela engendrera pour les entreprises, car c'est loin d'être une opération anodine. Cela crée, pour certaines entreprises, des coûts très importants... (L'orateur est interpellé par M. Rémy Pagani.)Je peux vous citer une certain nombre d'entreprises pour lesquelles cela créera des difficultés. Vous viendrez avec moi constater les coûts supplémentaires qu'engendre l'application de mesures rétroactives. Vous m'expliquerez, Monsieur Pagani, votre méthode pour revenir en arrière sur des dossiers d'employés qui ont quitté la Suisse. C'est toujours facile pour les syndicats de prétendre que les choses sont simples, mais lorsqu'il faut les faire, c'est beaucoup plus difficile.
Le président. Je mets aux voix l'amendement du Conseil d'Etat à l'article 2, alinéa 2 : «Le Conseil d'Etat édicte par voie réglementaire les dispositions de procédure adéquates en vue d'assurer la reconsidération de l'imposition qui, pour les années fiscales 2001 et 2002, a été faite à la source en application de la loi sur l'imposition à la source des personnes physiques et morales, du 23 septembre 1994, dans la mesure ou la présente loi implique la modification de l'impôt dû par les personnes assujetties à l'imposition à la source.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 2 (souligné) ainsi amendé est adopté, de même que l'article 3 (souligné).
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le deuxième amendement, qui introduit un article 4 souligné - Vote populaire - permettra d'améliorer la concrétisation des mesures votées. Vous le savez, normalement un délai de quatorze semaines doit s'écouler entre l'annonce du vote et le déroulement du scrutin. Respecter ce délai porterait le jour du scrutin au 24 novembre. A partir de ce jour, il faudra envoyer les bordereaux à toutes les personnes mariées pour qu'elles puissent payer leur impôt d'ici au 31 décembre 2002. Cela signifierait que le délai de 30 jours accordé pour payer le montant dû déborderait sur 2003 avec à la clé quelques problèmes de liquidités pour l'Etat de Genève, voire une augmentation de la dette. C'est pour cette raison que nous avons examiné, avec la Chancellerie, s'il était possible d'abréger le délai de quatorze semaines. Il s'avère que c'est possible à condition que nous fixions dans la loi que vous voterez aujourd'hui la date de la votation populaire en dérogation à la loi sur l'exercice des droits politiques. Pour que cette dérogation soit valable - car il s'agit d'une dérogation à une loi en vigueur - il faut que la disposition de dérogation que je vous propose d'introduire soit elle-même en vigueur. C'est pourquoi il convient en outre de déclarer l'urgence pour cet article 4 souligné.
Pour les partis politiques, nous avons également examiné la situation avec la Chancellerie. Celle-ci accordera des délais pour les prises de position. Le scrutin pourra ainsi avoir lieu fin octobre. Je souhaite vivement que vous acceptiez cet amendement.
M. Mark Muller (L). Le groupe libéral est perplexe par rapport à cet amendement. Pour quelle raison, au fond, le peuple doit-il voter ? Parce que le Conseil d'Etat avait souhaité opposer un contre-projet à l'IN 112, contre-projet qui disposait que nous voterions également sur les baisses d'impôt et non pas seulement sur les hausses. Nous voterons aussi parce que Mme Calmy-Rey a, maladroitement ou pas, je ne veux pas rouvrir ce débat, annoncé qu'il y avait des corrections à apporter à la LIPP V, en sachant pertinemment que le peuple devrait se prononcer en cas d'adoption d'un projet de loi.
Alors, on voudrait abréger de moitié la durée de la campagne pour la votation. Cela ne nous paraît pas très correct. Mme la présidente nous dit que des délais supplémentaires seront accordés mais, même avec des aménagements, je ne vois pas très bien comment les partis politiques et les associations pourront prendre position dans leurs assemblées respectives, puis, le cas échéant, remplir des listes de signatures pour les prises de position et les déposer dans les délais. Pour ces raisons pratiques, nous refuserons cette proposition d'amendement, à moins que des aménagements précis nous soient proposés qui permettent de prendre part à la campagne dans des conditions normales. Le cas échéant, je souhaiterais que vous nous disiez, Madame la présidente, quels sont les aménagements que vous envisagez, par exemple quant au nombre de signatures requises pour les prises de position.
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). Le groupe démocrate-chrétien comprend tout à fait les problèmes pratiques qui peuvent se poser, notamment à l'administration fiscale, si le scrutin intervenait au mois de novembre. Nous pouvons donc envisager de revoir la date de cette votation. Cependant, nous ne sommes pas très à l'aise avec l'emploi de la clause d'urgence et le raccourcissement du délai, non pas tellement pour les partis politiques qui n'ont besoin que de deux signatures pour déposer une prise de position, mais plutôt pour les groupes de citoyens qui souhaiteraient déposer des prises de position. J'imagine que les citoyens qui s'opposeront à cette baisse d'impôt ne seront pas nombreux. Pourtant, le groupe PDC demande au Conseil d'Etat d'être attentif au respect des droits démocratiques, afin que d'éventuels groupes de citoyens disposent de suffisamment de temps pour trouver les signatures nécessaires.
M. Albert Rodrik (S). Je ne peux que partager le souhait que les droits démocratiques soient respectés, mais je vous signale qu'il y a des contribuables personnes physiques et des contribuables personnes morales, des entreprises qui voudraient peut-être savoir un peu plus tôt que le 24 novembre de quoi sera faite leur année fiscale 2002. Le moindre des égards pour ces gens, c'est d'essayer d'aller devant le peuple le plus vite possible. Nous ne sommes pas acquis à cet amendement de gaieté de coeur parce qu'il peut créer un précédent susceptible d'être utilisé contre les droits démocratiques. Nous voulons croire qu'il n'en sera rien et que personne ne sera tenté de se référer à cette disposition dans un autre contexte. En l'occurrence, je pense que prévoir le scrutin aussi vite que possible est indispensable.
M. David Hiler (Ve). Le groupe des Verts refusera cet amendement. Il vient d'être dit que les contribuables souhaitaient être fixés : lorsque nous avons voté l'assurance-maternité cantonale, nous aurions pu aussi demander le vote en urgence parce qu'un certain nombre de femme auraient souhaité pouvoir faire des plans... (Rires.)On trouve toujours quelqu'un qui attend l'entrée en vigueur d'une loi avec impatience et quelqu'un d'autre qui se réjouit de la refuser. Je crois que le formalisme en matière de droit démocratique est fondamental. Il y a des règles du jeu qui ne doivent pas être modifiées pour servir des opérations de relations publiques. Je vous rappelle en outre que cette disposition serait la deuxième clause d'urgence à caractère formel en moins de neuf mois, cela nous paraît un peu excessif. Nous vous suggérons donc d'en rester au délai habituel et l'administration peut parfaitement se préparer à l'hypothèse la plus probable.
Par ailleurs, s'il est exact que l'organisation des scrutins ne doit pas dépendre du seul confort des partis, il est clair que ceux-ci auront du mal à prendre une décision démocratique en leur sein dans le délai fixé par cette disposition. Quant à des comités de citoyens, je ne vois vraiment pas comment ils procéderaient. Vraiment, je répète qu'il ne faut pas déroger à ces règles pour des motifs assez mineurs, je suis désolé de le dire. L'administration peut sans doute s'adapter, surtout que les chances que cette loi soit acceptée par le peuple sont d'environ 99 sur 100.
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs, l'administration ne peut pas s'adapter. Nous ne pouvons pas envoyer de bordereau aux contribuables imposés au barème B avant la date de la votation. Après la votation, il faut quinze jours à la Poste pour absorber quelque chose comme plus de 100 000 bordereaux...
Une voix. Ce n'est pas grave !
Mme Micheline Calmy-Rey. Non, ce n'est pas grave, sauf pour les liquidités de l'Etat. Moi, ça m'est égal, mais si vous refusez cet amendement, je peux vous annoncer d'ores et déjà que la dette de l'Etat augmentera. (L'oratrice est interpellée.)Vous pouvez le prendre à la rigolade, Monsieur Hiler, moi je ne le fais pas.
Par ailleurs, cette disposition n'atteint pas les droits démocratiques puisque nous inscrivons dans la loi la date de la votation. Ensuite, en ce qui concerne les groupements de citoyens, il s'agit d'un problème d'information. Pour que des comités puissent se constituer et se déterminer, il faudra informer la population par voie de presse qu'une votation sera organisée et préciser les délais dans lesquels les prises de position doivent être rendues. Cela est parfaitement possible. Il reste sept semaines pour s'organiser en vue du scrutin.
Enfin, Monsieur Muller, je regrette aujourd'hui d'avoir été trop enthousiaste lorsque j'ai proposé de soumettre toute modification des lois fiscales, à la hausse comme à la baisse, à l'approbation du peuple. On l'a vu avec les frais de maladie, on le voit aujourd'hui : on a du mal à imaginer qui refusera cette loi. C'est la raison pour laquelle ça me fait mal au coeur de ne pas pouvoir sécuriser les contribuables tout en maintenant l'exigence d'un vote populaire. Je souhaite donc vivement que vous acceptiez cet amendement.
Le président. Je mets donc aux voix l'amendement du Conseil d'Etat qui consiste à ajouter un article 4 (souligné) Vote populaire:
«Le vote populaire prévu par l'article 53A de la Constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est fixé au 27 octobre 2002 en dérogation à l'article 19, alinéa 1 de la loi sur l'exercice des droits politiques, du 15 octobre 1982.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Le président. Nous votons l'amendement du Conseil d'Etat qui va de pair avec le précédent et qui consiste à ajouter un article 5 (souligné) Clause d'urgence :
«L'urgence est déclarée pour l'article 4 souligné.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Troisième débat
Mis aux voix, l'article 14, alinéa 3 est adopté.
Le président. Nous sommes saisis en troisième débat d'un amendement à l'article 14, alinéa 5. En fait il s'agit du texte qui avait déjà été proposé au même article en deuxième débat. Il se formule ainsi : «Constituent des charges de famille :
»a) chaque enfant mineur sans activité lucrative ou dont le gain annuel ne dépasse pas 6800 F (charge entière) ou 10 200 F (demi-charge), pour celui des parents qui en a la garde; dès l'année fiscale 2002, chaque enfant mineur sans activité lucrative ou dont le gain annuel ne dépasse pas 13 600 F (charge entière) ou 20 400 F (demi-charge), pour celui des parents qui en a la garde;
»b) chaque enfant majeur, jusqu'à l'âge de 25 ans révolus, qui est apprenti au bénéfice d'un contrat d'apprentissage ou étudiant régulièrement inscrit dans un établissement d'enseignement secondaire ou supérieur, et dont la fortune ne dépasse pas 25 000 F, lorsqu'il n'a pas un revenu supérieur à 6800 F (charge entière) ou 10 200 F (demi-charge), pour celui des parents qui pourvoit à son entretien; dès l'année fiscale 2002, chaque enfant majeur, jusqu'à l'âge de 25 ans révolus, qui est apprenti au bénéfice d'un contrat d'apprentissage ou étudiant régulièrement inscrit dans un établissement d'enseignement secondaire ou supérieur, et dont la fortune ne dépasse pas 25 000 F, lorsqu'il n'a pas un revenu supérieur à 13 600 F (charge entière) ou 20 400 F (demi-charge), pour celui des parents qui pourvoit à son entretien;
»c) Les ascendants et descendants (dans les autres cas que ceux visés aux lettres a à b du présent alinéa), frères, soeurs, oncles, tantes, neveux et nièces, incapables de subvenir entièrement à leurs besoins, qui n'ont pas une fortune supérieure à 10 000 F ni un revenu annuel supérieur à 6800 F (charge entière) ou qui n'ont pas une fortune supérieure à 20 000 F ni un revenu supérieur à 10 200 F (demi-charge), pour celui de leur proche qui pourvoit à leur entretien; dès l'année fiscale 2002, chaque personne incapable de subvenir à ses besoins, et dont la fortune ne dépasse pas 25 000 F ni un revenu annuel supérieur à 10 200 F (charge entière) ou qui n'ont pas un revenu supérieur à 20 400 F (demi-charge), pour celui de leur proche qui pourvoit à leur entretien.»
M. David Hiler (Ve). C'est peut-être une tâche impossible, mais je voudrais tout de même essayer de convaincre ce parlement de revenir sur son vote. Le problème avec cet article, c'est qu'en l'état nous maintenons un montant qui n'a pas été réévalué lorsque nous avons voté la loi. Ce faisant, nous donnons un message, à des jeunes en formation, que je trouve pour le moins discutable. Imaginez simplement un étudiant dans une HES ou à l'université. Il a des envies, il a envie de s'acheter un ordinateur, d'avoir des vacances un peu plus chères que celles que ses parents peuvent lui payer et il ne souhaite pas grever le budget familial un peu juste avec du superflu. Alors il travaille. Par exemple il fait quelques heures par semaine comme Securitas. A la fin de l'année, il s'est effectivement offert ce qu'il souhaitait et il a fait perdre la demi-charge à ses parents. Est-ce que vous ne pensez pas que, de la part d'un jeune, il y a quelque chose de fondamentalement sain à essayer de se payer lui-même, dès qu'il le peut, ce qui n'est pas absolument indispensable ? Personnellement, au risque de paraître ringard, quand mon fils a décidé de travailler dès qu'il a été en formation secondaire, j'ai été fier de lui, j'ai trouvé que c'était bien. Il aurait aussi bien pu glander. Alors, Mesdames et Messieurs des bancs d'en face, vous donnez comme message qu'un jeune ne doit pas gagner plus de 600 F par mois, faute de quoi le fait qu'il travaille est défavorable à ses parents. Je trouve cela complètement absurde; il faut corriger cette erreur sans s'accrocher à un vote qui a été fait dans la précipitation en commission et admettre que pour des raisons morales - je suis désolé de le dire - cet amendement mérite d'être accepté. (Applaudissements.)
M. Pierre Vanek (AdG). David Hiler a dit l'essentiel et j'entendais intervenir dans le même sens, je m'abstiendrai donc d'ajouter quoi que ce soit. Je souhaite cependant demander l'appel nominal sur cet amendement.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 39 oui contre 33 non et 3 abstentions.
M. Pierre Weiss (L). Je dépose formellement un autre amendement concernant cet article... (Protestations.)Comme la majorité de ce parlement, je peux comprendre les arguments développés par M. Hiler. Encore faut-il, puisqu'il s'est référé à des valeurs éthiques, ne pas promouvoir un traitement inéquitable d'une partie des contribuables : nous avons augmenté le revenu, nous n'avons pas touché à la fortune. Pour quelle raison augmente-t-on seulement cette première rubrique ? Nous avons augmenté le revenu en question de 6800 F à 13 600 F pour les excellentes raisons que vous avez dites; je demande que nous passions aussi de 25 000 à 50 000 F pour la fortune des étudiants ou des apprentis entre 18 et 25 ans, faute de quoi nous serions coupables de traiter inégalement les jeunes disposant d'une fortune par rapport à ceux disposant d'un revenu. C'est pour cette raison, Monsieur le président, que je dépose cet amendement.
Mme Michèle Künzler (Ve). Je rappelle tout de même que la fortune a déjà été doublée. Nous étions précédemment à 10 000 F, nous sommes maintenant à 25 000 F. Si vous voulez quadrupler la somme, eh bien allez-y !
M. Dominique Hausser (S). Pour compléter l'intervention de Mme Künzler, je voudrais poser une question : Monsieur Weiss, voulez-vous modifier la première ou la seconde mention de la somme de 25 000 F ? Cela ne me semble pas très clair.
Le président. M. Weiss au contraire a été très clair. Tous les montants de 25 000 F se transforment en 50 000 F.
M. Pierre Weiss (L). J'ai précisé à la fin de mon intervention que mon amendement porte sur la partie du texte qui suit la mention «dès l'année fiscale 2002». Je vais néanmoins vous donner la formulation complète de mon amendement à l'article 14, alinéa 5, lettre b : «(...) dès l'année fiscale 2002, chaque enfant majeur, jusqu'à l'âge de 25 ans révolus, qui est apprenti au bénéfice d'un contrat d'apprentissage ou étudiant régulièrement inscrit dans un établissement d'enseignement secondaire ou supérieur, et dont la fortune ne dépasse pas 50 000 F, lorsqu'il n'a pas un revenu supérieur à 13 600 F (charge entière)...» Voilà ma proposition, Monsieur le député.
M. Claude Marcet (UDC). Le groupe UDC acceptera l'amendement de M. Weiss. Je tiens à souligner à ce sujet qu'une fortune de 25 000 F est très vite acquise aujourd'hui. Par conséquent, aller dans le sens de la proposition libérale, c'est aller dans le sens de l'équité.
Le président. Je relis l'amendement de M. Weiss à l'article 14, alinéa 5, lettre b : «(...) dès l'année fiscale 2002, chaque enfant majeur, jusqu'à l'âge de 25 ans révolus, qui est apprenti au bénéfice d'un contrat d'apprentissage ou étudiant régulièrement inscrit dans un établissement d'enseignement secondaire ou supérieur, et dont la fortune ne dépasse pas 50 000 F, lorsqu'il n'a pas un revenu supérieur à 13 600 F (charge entière)...»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Le président. La fortune maximale doit-elle aussi être corrigée à la lettre c, Monsieur Weiss? Est-ce que votre amendement portait aussi sur la lettre c ?
Une voix. C'est évident !
Le président. D'accord, mais formellement je suis obligé de le faire voter comme un amendement supplémentaire.
M. Pierre Weiss (L). C'est seulement en apparence que mon amendement était improvisé, et c'est à dessein que je n'ai pas souhaité modifier le texte de la lettre c qui me semble elle-même avoir été rédigée dans une relative improvisation. En d'autres termes, je m'abstiendrai en ce qui concerne la lettre c.
Mme Michèle Künzler (Ve). Je demande formellement que la lettre c soit aussi amendée dans le sens indiqué tout à l'heure par M. Weiss. Cette lettre ne ressort absolument pas d'une improvisation; il s'agit de la loi actuelle. Je pense qu'il est juste qu'une personne handicapée ou une personne qui ne peut pas subvenir à ses besoins soit traitée de la même façon que les étudiants ou les apprentis. Cela me semble d'autant plus important que souvent les personnes handicapées reçoivent un petit capital que leurs parents constituent dans un esprit de prévoyance ou qui leur est versé par une assurance après un accident. Il est totalement injustifié de pénaliser les personnes qui accueilleraient chez elles un frère, une soeur, une tante, que sais-je, souffrant d'un handicap, au prétexte que cette personne dispose d'une fortune.
M. Claude Marcet (UDC). Je suis parfaitement d'accord avec ce qui vient d'être dit par Mme Künzler. Je trouve tout à fait normal que l'on mette à niveau l'ensemble des contribuables, particulièrement ceux qui sont handicapés. Je connais certains cas dans lesquels des parents ont mis un capital important de côté pour permettre au tuteur ou au curateur de prendre soin de leurs enfants après leur disparition. Actuellement, ces enfants ne sont plus considérés comme des charges de famille, simplement parce qu'ils disposent d'une fortune qui, somme toute, n'est pas exorbitante. Je vais donc tout à fait dans le sens de ce que proposent les Verts.
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Je suis un peu sceptique face à la proposition de Mme Künzler parce qu'il ne s'agit pas d'une même catégorie de personnes. En effet, dans les lettres a et b, il est question d'enfants dont la fortune n'est pas supérieure à 50 000 F. Cette somme est relativement modeste. En revanche, la lettre c vise les ascendants comme les descendants, c'est-à-dire qu'il peut s'agir de tantes, de neveux, de frères ou de soeurs, etc. Ces personnes sont à charge, j'en conviens...
Une voix. Elles sont à charge !
Mme Micheline Calmy-Rey. ...mais je ne suis pas sûre qu'il soit légitime de les traiter de la même façon que les personnes visées par les lettres a ou b de cet alinéa 5.
Le président. Mme Künzler a formulé un amendement à la lettre c, alinéa 5 de l'article 14; il se lit ainsi :«(...) dès l'année fiscale 2002, chaque personne incapable de subvenir à ses besoins, et dont la fortune ne dépasse pas 50 000 F...»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 14, alinéa 5 est adopté, de même que l'article 20, l'annexe B et les articles 1, 2, 3, 4, 5 (soulignés).
Le président. Nous passons au vote d'ensemble... Ah, Monsieur Gros, vous avez la parole.
M. Jean-Michel Gros (L). Les libéraux sont favorables à une diminution de la pression fiscale. Ils l'ont prouvé à maintes reprises. L'initiative 111 est sans doute encore dans les mémoires des contribuables. (Brouhaha.)
Le projet issu des travaux de la commission fiscale, avec deux des quatre mesures proposées par le Conseil d'Etat, a eu notre appui. Hélas, au cours de ce débat, des amendements visant à réintroduire le doublement des gains accessoires des enfants ainsi que l'adjonction des personnes ascendantes ou descendantes incapables de subvenir à leurs besoins ont été acceptés. Certes, nous devrions applaudir ces mesures qui accentuent la diminution d'impôt. Nous ne pouvons cependant pas nous rallier à cette vision des choses. Je tiens à le répéter avant le vote final : notre crainte réside dans le fait que ces mesures sont à ce point ciblées sur une ou deux catégories de la population qu'elles augmentent le nombre de contribuables qui ne payent pas d'impôt. (Brouhaha.)Certains Suisses-alémaniques ont parlé à ce sujet du phénomène des Gratisbürger... (Brouhaha.)Ces contribuables sont déjà 29% à Genève et, avec les mesures votées, cette portion augmenterait encore. Cela devient malsain, Mesdames et Messieurs les députés. Certes, en France par exemple, cette proportion est encore plus élevée. Mais les effets négatifs se font sentir : charge fiscale grandissante sur une part toujours plus maigre des contribuables, tentation toujours plus grande de recourir à l'évasion fiscale. Les libéraux ne veulent pas d'une fracture fiscale, c'est-à-dire, d'une part, un nombre toujours plus grand d'habitants de Genève bénéficiant, voire réclamant, davantage de prestations sans participer à leur financement, et d'autre part une portion toujours plus congrue de contribuables qui règlent la note. Il y a un danger certain à concentrer l'impôt sur moins de contribuables. A terme, on fragilise la stabilité des rentrées fiscales. Pour ce principal motif, le groupe libéral s'abstiendra lors du vote d'ensemble, mais ne refusera pas la loi, craignant de retarder le vote référendaire obligatoire et ne souhaitant pas priver les Genevois de l'effet rétroactif sur l'année 2001.
M. Claude Blanc (PDC). Avant la clôture du débat, je voudrais demander au Bureau du Grand Conseil, compte tenu de l'avancement de la date de votation, que les députés puissent recevoir très rapidement le script de la séance d'aujourd'hui - même non vérifié - de façon à ce que, aux assemblées de délégués, nous disposions des éléments nécessaires pour défendre la loi que nous allons maintenant voter en troisième débat.
Le président. Monsieur Blanc, votre chef de groupe nous a déjà présenté cette demande, nous y avons accédé. Par conséquent, nous donnons une réponse positive à votre interpellation.
M. David Hiler (Ve). Puisque nous en sommes à expliquer nos votes, notre groupe s'est abstenu - comme d'autres - lors du débat final en commission. La raison en était simple. L'une des mesures nous paraissait nécessaire, elle concernait la première charge de famille. Mais nous avions et nous avons toujours de grands doutes relativement à l'opportunité de décider dans l'urgence la question du barème. A vrai dire, sur ce point, nous ne sommes pas certains d'avoir fait la correction la plus urgente, ni la plus nécessaire. Ce soir, un élément qui nous tenait beaucoup à coeur est apparu : permettre aux jeunes d'avoir une activité lucrative sans porter un préjudice fiscal à leurs parents. Pour cette raison, et contrairement à ce que nous avions décidé en commission, nous voterons l'ensemble de la loi. Nous regrettons néanmoins la façon dont ce débat a commencé, et nous regrettons la confusion relative au barème B, mais nous constatons que les dispositions introduites ce soir seront appréciées, et qu'elles sont justes et équitables.
M. Pierre Vanek (AdG). Très brièvement, j'entends indiquer ici que l'Alliance de gauche va approuver ce projet de loi même si certaines mesures que nous aurions souhaité voir introduites n'y figurent pas.
Par ailleurs, puisqu'il s'agit d'un débat sur l'ensemble des projets qui avaient été déposés, nous nous félicitons d'avoir nous-mêmes été les auteurs d'un projet de loi. Ce projet n'avait d'autre but que d'exiger du Conseil d'Etat qu'il empoigne les questions soulevées par la présidente du département des finances et qu'il dépose avant l'été - ce qu'il a fait - un projet de loi qui puisse se traduire par des mesures à effet rétroactif.
Nous nous félicitons également que la question des revenus des enfants mineurs, majeurs et des proches incapables de subvenir à leurs besoins, ait été résolue au troisième débat. Un minimum de bon sens a ainsi prévalu au dernier moment contre le dogmatisme idéologique du parti libéral et de ceux qui l'ont suivi dans cette galère. Concernant la déclaration de M. Gros, indiquant que son parti n'appuierait pas ce projet de loi puisqu'un certain nombre de citoyens se verraient exonérés d'impôt, je pense que les citoyens sauront l'apprécier à sa juste valeur, car si les gens ne paient pas d'impôt, c'est bien parce que leurs revenus sont trop bas. A l'évidence, cette déclaration est de nature à éclairer les positions du parti libéral genevois sur la fiscalité. Quand il s'agit d'allégements d'impôt, voire de suppression d'impôt, concernant des gens à bas ou modeste revenu, le parti libéral estime que la pression fiscale doit être maintenue. A contrario, quand il s'agit de lever la pression fiscale qui «pèse» sur les très gros revenus et les multi-millionnaires, il n'y a plus aucun problème. Toute cette affaire - y compris le projet de loi libéral sur lequel nous sommes censés nous prononcer aussi ce soir - a été extrêmement instructive pour les citoyen-ne-s de cette République, et je m'en réjouis.
M. Claude Marcet (UDC). Au nom du groupe UDC, nous estimons qu'il faut désormais aller de l'avant. Nous voterons donc ce projet de loi, mais nous estimons que la comparaison promise par le département, entre LIPP et LCP, doit intervenir rapidement, de manière à pouvoir revenir sur le sujet et prendre les mesures qui s'imposent, comme l'a dit très justement M. Hiler.
M. Albert Rodrik (S). Les commissaires socialistes, comme les Verts et ceux de l'AdG, s'étaient abstenus à la fin d'une séance un peu lunaire, le 9 juillet dernier. Dès le début de cette séance, le président de la commission nous avait fait une proposition de bon sens que nous avions soutenue. Selon lui, une partie du projet de loi du Conseil d'Etat consistait en des mesures ponctuelles et précises en faveur des familles. A tort ou à raison, on sentait une attente de la population sur ce sujet, et il fallait y donner suite.
D'un autre côté, on nous demande, moins de deux ans après un vote unanime du parlement, de bazarder un barème destiné originellement à être durable, pour le remplacer par un autre. La sagesse de M. Hiler n'a pas prévalu, puisqu'on n'a pas voulu entrer en matière sur la plupart des mesures en faveur des familles. Mais, à une demi-heure de la fin de la séance un nouveau barème, dont toutes les incidences n'ont pas été mesurées, a été livré comme la tête de saint Jean-Baptiste, sur un plateau. Il s'agit d'un comportement acéphale et je n'agirais ainsi avec aucun gouvernement, même si ma soeur y siégeait... Mais à quelque chose malheur est bon: en fin de compte, l'adjonction défendue par le remarquable plaidoyer de M. Hiler a été introduite dans la liste des mesures en faveur des familles.
Le groupe socialiste, tout en gardant ses préventions concernant la manière dont les travaux se sont déroulés en quatre séances estivales, votera ce projet de loi, en espérant bien que cette affaire n'aura pas d'autres incidences sur la capacité de faire des budgets, de rembourser la dette et de prendre en charge les besoins réels de la population de Genève. Je vous remercie de votre attention.
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). Au final, le groupe démocrate-chrétien votera cette loi, même s'il ne s'agit pas de la loi telle que les commissaires et le groupe l'avait acceptée à l'issue des travaux de la commission. Je veux dire que je regrette personnellement les cafouillages qui ont eu lieu aujourd'hui. Le débat avait bien commencé - et je ne dis pas cela parce que j'ai ouvert les feux - et pourtant la fin a été confuse, on ne savait plus ce qu'on votait et je le regrette. Il est un peu malvenu que M. Rodrik nous fasse la leçon sur les travaux de la commission alors que nous avons siégé en heures supplémentaires. Nous avons tout fait pour adopter le plus rapidement possible cette loi fiscale.
Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais encore attirer votre attention sur un point : le groupe démocrate-chrétien est particulièrement sensible à la pression fiscale exercée sur les familles et la classe moyenne. On en a beaucoup parlé aujourd'hui. Or, en élargissant le cercle des personnes qui échappent à l'impôt, c'est finalement sur la classe moyenne que l'on reporte la charge fiscale. Je vous invite donc à réfléchir là-dessus. Nous ne sommes pas d'accord de poursuivre dans cette direction.
M. Pierre Froidevaux (R). Le commissaire radical de la commission fiscale regrette effectivement le résultat des débats du Grand Conseil. J'ai défendu en commission la notion d'une responsabilité d'Etat en étant attentif à ce que toutes les mesures votées soient aussi bien codifiées que possible et que leurs effets soient pesés de façon responsable. Or, je constate que les dernières mesures prises ne sont pas chiffrables : nous décidons sur des coups de tête, et peut-être sur des coups de coeur.
Il y a un problème général. Lorsqu'on décide d'introduire une diminution d'impôt, il faut établir des priorités, il faut réfléchir sur ce qui est essentiel, et il faut s'entendre pour savoir qui doit être favorisé ou moins favorisé par les mesures fiscales. Or, ce débat se termine sur un texte qui me surprend moi-même. Ainsi, le député radical que je suis livre à ce Grand Conseil le message suivant : le groupe radical entend voter cette diminution fiscale sous réserve que le projet de loi prévoie une analyse en termes d'effets, analyse qui devra être effectuée le plus rapidement possible par le département, afin de pouvoir comprendre, évaluer et juger quelles personnes auront été véritablement prétéritées par ce changement fiscal, et afin d'apporter le cas échéant les correctifs qui s'imposent.
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. A l'issue de ce débat, il me reste à vous demander de m'excuser d'avoir provoqué une agitation fiscale médiatique, parlementaire et populaire. Mais, finalement, je ne regrette rien au vu du résultat de ce soir : trois des quatre mesures proposées ont été adoptées par ce parlement, et même améliorées, tandis que la dernière proposition - à savoir les frais de garde - sera étudiée en commission. Je voudrais donc remercier les uns et les autres d'être sortis des sentiers idéologiques et d'avoir considéré la possibilité de ces baisses d'impôt qui en réalité sont des prestations sociales. Il s'agit en l'occurrence de mesures d'allègement en faveur des familles. Encore une fois, je vous remercie infiniment pour le vote de ce soir, et pour les travaux que vous avez conduits en commission. (Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs, je vous rappelle que nous devons aussi traiter les deux projets de lois 8752-A et 8753-A... (Brouhaha. Protestations.)
M. Pierre Vanek (AdG). Permettez-moi de faire au nom de mon groupe une petite déclaration que j'aurais dû faire tout à l'heure. Nous retirons... (Brouhaha.)
Le président. C'est juste, il doit le faire !
M. Pierre Vanek. Le président m'a compris: nous retirons le projet de loi de l'Alliance de gauche. Il a entraîné les effets que nous escomptions et n'a pas besoin, par conséquent, d'être soumis au vote de cette assemblée ce soir. (Applaudissements.)
La loi 8756 est adoptée en troisième débat dans son ensemble.
Le Grand Conseil prend acte du retrait du projet de loi 8752.
Mis aux voix, le projet de loi 8753 est rejeté en premier débat.