Séance du
vendredi 22 mars 2002 à
14h
55e
législature -
1re
année -
6e
session -
27e
séance
PL 8415-B
Premier débat
Mme Françoise Schenk-Gottret (S), rapporteuse. Parlons tout d'abord de l'article 19, alinéa 2, lettre s, qui prévoit que le conseil d'administration des TPG procède aux adjudications pour un montant supérieur à 1 million de francs et aux attributions des contrats de sous-traitance de prestations des TPG. Cette proposition n'a soulevé aucune réaction négative, ni de la part du conseil d'administration des TPG, que nous avons auditionné, ni de la part des députés, qui ont voté cette modification de loi sur les TPG à l'unanimité.
En ce qui concerne l'article 1 alinéa 6, l'ambition du premier projet de loi déposé était dans l'esprit de ce que voulaient le Grand Conseil, le Conseil d'Etat et les partenaires sociaux lors des débats sur les accords bilatéraux, c'est-à-dire des mesures d'accompagnement qui exigent le respect des conventions collectives et des contrats-types pour réduire les risques de dumping salarial. Il est apparu, durant les travaux de la commission, qui se penchait sur ce projet de loi pour la seconde fois, que le texte initial devait être modifié afin qu'il soit conforme au droit fédéral, c'est-à-dire en accord avec les engagements de la Suisse; notamment les principes de non-discrimination entre les entreprises locales et étrangères dans la passation des marchés publics découlant des accords GATT-OMC, traduits pour les cantons par l'AIMP, que les accords bilatéraux Suisse-Union européenne.
Par une sorte d'artifice juridique, les employés des entreprises françaises qui travaillent en sous-traitance pour les TPG sont considérés comme des travailleurs détachés. Les activités de sous-traitance ne peuvent être attribuées qu'à des entreprises garantissant aux travailleurs au moins les conditions de travail et de salaire prescrites dans les lois fédérales, les ordonnances du Conseil fédéral, les conventions collectives de travail déclarées de force obligatoire, ou des contrats-types de travail. C'est une disposition que je qualifierais de molle, mais elle a trouvé l'unanimité de la commission.
Je vous recommande donc de voter ces deux dispositions qui ne posent aucun problème.
M. Jean Spielmann (AdG). Ce projet de loi a son importance dans la situation actuelle, mais surtout dans le futur avec l'introduction des bilatérales. Ce que l'on cherche à faire en mettant en place ce dispositif, c'est assurer la protection des entreprises qui travaillent à Genève, qui respectent les conventions collectives et à qui un certain nombre de charges sont imposées. L'objectif est que ces charges soient identiques pour des entreprises qui viennent de l'extérieur, de France ou d'ailleurs, puisque d'autres entreprises pourraient parfaitement postuler en raison de l'ouverture des marchés. En effet, cela a été expliqué clairement en commission, il est possible que des entreprises viennent soumissionner des offres ici. La réciprocité est donc nécessaire: actuellement, en raison du dispositif légal en place en France qui protège les entreprises françaises et qui oblige les entreprises à respecter les normes locales, une série d'obstacles ne permettent pas aux entreprises suisses de travailler normalement. Il s'agit donc de mettre en place des dispositifs dans notre législation qui protègent les entreprises et les travailleurs du domaine du transport en réalisant la réciprocité.
Le deuxième objectif de ce projet de loi est l'établissement d'une règle de base pour la soumission de ces marchés afin qu'il y ait un plancher au-dessous duquel on ne descend pas et qu'il y ait un contrôle minimum et un respect des conditions de travail. Il y a en effet des normes très spécifiques au domaine du transport, qu'il s'agisse de la durée du travail, des temps de pause, des exigences de qualité au niveau du transport. Ainsi ne peut-on pas faire rouler un bus transportant des passagers sans que les heures de sommeil des chauffeurs et leurs conditions de travail en général soient respectées.
Je pense qu'il est utile que nous mettions en place un tel dispositif. Au cours des travaux de commission, nous avons eu l'occasion de discuter avec des experts qui nous ont expliqué les démarches nécessaires dans le domaine de l'ouverture de ces marchés. A l'issue de ces travaux, nous sommes arrivés à la proposition dont il est question aujourd'hui et je vous recommande vivement de l'approuver.
M. Jean-Marc Odier (R). Ce projet de loi a pour objectif, effectivement, de s'occuper des conditions de travail dans le domaine des transports collectifs. J'aimerais attirer l'attention de ce parlement sur un point: en ce qui concerne les autres formes de transport, c'est-à-dire les transports collectifs en dehors de la sous-traitance des TPG, il restera un flou important, puisque nous sommes actuellement sous le régime des accords bilatéraux dont on ne connaît pas forcément toute l'étendue. Pour cette raison, nous sommes face à une ouverture qui met en concurrence des entreprises étrangères avec des charges nettement inférieures à celles des entreprises suisses. Je donnerai l'exemple très concret d'une entreprise genevoise de transport par autocar qui aurait des chauffeurs rémunérés à raison de 4500 à 5000 F par mois, alors qu'en France les mêmes chauffeurs touchent environ 10 000 francs français. Depuis quelques mois seulement, ces entreprises peuvent venir charger des passagers en Suisse, à Genève, à la place Neuve par exemple, et ce n'était pas le cas auparavant. Ainsi, les entreprises genevoises se voient concurrencées pour des mandats subventionnés par l'Etat de Genève, les courses d'école par exemple. La situation des entreprises genevoises est difficile et cela, j'imagine, pour encore un certain nombre d'années, jusqu'à ce que, selon le principe des vases communicants, les conditions d'exploitation françaises puissent s'équilibrer avec les nôtres.
Le projet de loi qui vous est présenté a pour but de protéger notamment les salaires par rapport à la concurrence étrangère. J'ai pu le dire en commission, mais puisque M. Spielmann prend la parole je me permets de le répéter: ce genre de conditions protège effectivement les salaires, mais ne protégera pas le travail des entreprises genevoises.
M. Jean Spielmann (AdG). Il est exact que ce projet de loi règle les problèmes relatifs aux TPG et à leurs sous-traitants. Il reste néanmoins un problème que nous devons régler et qui viendra sur le tapis très prochainement, c'est celui du cabotage, c'est-à-dire la prise en charge des voyageurs dans la zone frontière, aussi bien dans le domaine des taxis que dans celui des bus. Il est donc nécessaire ici aussi d'assurer la réciprocité et d'édicter des règles qui ne permettent pas, par exemple, à des taxis français de charger sur Genève alors que les taxis suisses ne peuvent pas charger à l'extérieur. Il y a là certainement un dispositif légal à mettre en place, mais pour l'heure il s'agit de régler le problème propre aux TPG, avec les conventions collectives et avec la mise en place de règles qui précisent comment doit se faire la sous-traitance. Cependant, en tant que parlement, nous devons aussi nous préoccuper de la question spécifique soulevée par M. Odier et nous viendrons avec des propositions concrètes, que ce soit pour les taxis ou pour les bus. En l'occurrence, nous procédons par étape. Cette première étape est importante et elle s'appuie sur les travaux du professeur Levrat qui a mis en place les mesures d'accompagnement pour les bilatérales. Il s'agit d'être particulièrement attentif à ce dossier-là et je vous invite à voter le projet qui nous occupe. Encore une fois, ce que vient de dire M. Odier est tout à fait exact et nous devrons prolonger cette discussion pour protéger l'ensemble des entreprises de transport et de taxis.
La loi 8415 est adoptée en trois débats, par article et dans son ensemble.