Séance du
vendredi 15 juin 2001 à
17h
54e
législature -
4e
année -
9e
session -
31e
séance
PL 8529
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La loi générale sur les zones de développement, du 29 juin 1957, est modifiée comme suit :
Art. 6B Procédure accélérée (nouveau)
1 Lorsque, par la voie législative, le Grand Conseil a décrété l'urgence de construire dans un périmètre, la procédure d'adoption d'un plan localisé de quartier à cet endroit est simplifiée.
2 Dès la publication de la loi votée par le Grand Conseil, le département, conjointement avec la commune et les propriétaires concernés, élabore le plan localisé de quartier dans un délai maximal de 6 mois. Ce dernier est ensuite soumis à enquête publique cantonale de 30 jours, à l'issue de laquelle le Conseil municipal, lors de sa prochaine séance, émet un préavis sous forme de délibération. Les alinéas 1, 2 et 6 de l'article 6 de la présente loi sont applicables par analogie.
3 Passé le délai référendaire, le Conseil d'Etat, statue sur les oppositions et adopte le plan localisé dans un délai maximal de 60 jours. L'article 6, alinéa 9 de la présente loi est applicable par analogie.
Article 2 Modification à une autre loi (L 1 40)
Loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers ou localités, du 9 mars 1929, est modifiée comme suit :
Art. 7A (nouveau)
1 Lorsque, par la voie législative, le Grand Conseil a décrété l'urgence de construire dans un périmètre, la procédure d'adoption d'un plan localisé de quartier à cet endroit est simplifiée.
2 Dès la publication de la loi votée par le Grand Conseil, le département, conjointement avec la commune et les propriétaires concernés, élabore le plan localisé de quartier dans un délai maximal de 6 mois. Ce dernier est ensuite soumis à enquête publique cantonale de 30 jours, à l'issue de laquelle le Conseil municipal, lors de sa prochaine séance, émet un préavis sous forme de délibération. Les alinéas 1, 2 et 6 de l'article 5 de la présente loi sont applicables par analogie.
3 Passé le délai référendaire, le Conseil d'Etat, statue sur les oppositions et adopte le plan localisé dans un délai maximal de 60 jours. L'article 5, alinéa 9 de la présente loi est applicable par analogie.
Le canton de Genève a retrouvé une situation de pénurie de logements, qui est due à la conjonction de plusieurs facteurs.
En premier lieu, depuis 2 ans, la population du canton augmente au rythme de quelque 5000 personnes chaque année. Si une partie de cette croissance découle d'un rapport naissances/décès positif, elle est principalement due à l'arrivée de nouvelles entreprises et de leurs employés, attirées par la qualité de vie de notre région.
Par ailleurs, et c'est moins connu, un cruel manque de surfaces commerciales commence aussi à se faire sentir. Pour la première fois en 2000, le taux de vacance dans cette catégorie d'immeuble a été calculé par l'Office cantonal de la statistique. Il indique un taux de vacance inférieur à 2 %. Or, dans la législation cantonale relative à la pénurie de logements, il est inscrit que l'on se trouve en période de pénurie dès lors que le taux de vacance est inférieur à 2 %.
Dans une telle période, il est indispensable d'alléger un certain nombre de procédures, à défaut d'avoir pu adopter le projet de loi 7692 sur l'aménagement et les constructions, retiré par le Conseil d'Etat.
Le présent projet de loi ne prétend pas résoudre tous les problèmes procéduraux se posant actuellement en zone de développement. Néanmoins, ce n'est un secret pour personne, les blocages sont multiples dans notre canton, car les actes précédant une construction sont particulièrement nombreux et ouvrent la porte à des oppositions, référendums et recours.
Le projet qui vous est proposé repose sur un principe simple selon lequel, lorsque le Grand Conseil, par la voie de l'adoption d'une loi, décrète l'urgence de la construction de logements ou de locaux d'activités dans un périmètre donné, ceci doit impérativement impliquer une procédure accélérée d'adoption du plan localisé de quartier dans ce périmètre.
L'urgence est une notion politique. Il appartiendra au Grand Conseil de décider, en opportunité, s'il y a urgence à la construction dans un périmètre considéré. Il pourra s'agir de logements, bien sûr, mais aussi d'immeubles destinés à accueillir des activités économiques (bureaux, ateliers, commerces).
Concrètement, lorsque le Grand Conseil adoptera une telle loi, la procédure sera allégée en ce sens que les délais sont raccourcis et le nombre d'enquêtes publiques limité à un.
Au bénéfice des explications qui précèdent, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que vous lui réserverez un bon accueil.
Préconsultation
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Voici un projet de loi qui me semble plus empreint d'un effet d'annonce que porteur d'avenir pour l'aménagement de notre canton. Pour justifier une procédure simplifiée d'élaboration des PLQ, l'exposé des motifs fait référence aux nombreux blocages qui paralysent les projets de construction.
Il convient ici de rappeler qu'actuellement la commission d'aménagement est en train de travailler sur le plan directeur, qui tente de fixer les lignes directrices pour un développement durable du canton, tout en tenant compte des besoins en nouveaux logements. A cet égard, le plan directeur prévoit de développer la couronne suburbaine où se trouve 35% du potentiel à bâtir, ainsi que la densification de la zone villas, qui représente 45% des réserves en terrains à bâtir et qui pourrait être déclassée en zone de développement, selon certains critères d'aménagement. Des initiatives ont donc déjà été prises en ce sens par M. le conseiller d'Etat Moutinot. Cependant, les mêmes milieux qui réclament à cor et à cri des logements ont déjà, abondamment et publiquement, fait savoir leur opposition à différents projets de densification de la zone villas. De plus, si la pénurie de logements est un fait reconnu, nous n'avons pas la même analyse des besoins selon les différentes catégories d'habitation que les auteurs du projet de loi.
Dans ce contexte, je doute que la clause d'urgence soit un instrument réellement efficace, puisqu'il s'agira de toute façon, en amont, de définir les conditions de l'urgence. La véritable urgence, à notre sens, c'est de faire aboutir au plus vite les travaux sur le plan directeur, afin de doter le canton d'un outil d'aménagement opérationnel qui puisse viser le plus long terme. Pourtant, nous ne sommes pas, par principe, opposés à toute forme d'allégement de la procédure si la nécessité s'en fait sentir. C'est pourquoi nous examinerons quand même ce projet de loi en commission d'aménagement. (Applaudissements.)
M. Michel Parrat (PDC). Ce quatrième et dernier projet de loi fait partie d'un ensemble de mesures destinées, comme je l'ai déjà dit, à créer un climat plus favorable dans l'immobilier genevois. Nous espérons que ceci sera à même de restaurer l'image, fortement ternie, de Genève dans ce domaine, une situation qui conduit à ne trouver, sur le marché immobilier, plus que les investisseurs genevois - contrairement à ce que dit M. Grobet - dont les possibilités économiques ne sont pas indéfinies. Il convient donc de restaurer un climat favorable, ce qui permettra un retour des investisseurs à Genève, particulièrement des investisseurs suisses. Car sans eux rien ne se fera, ou pas assez, et tous les efforts de promotion de la place immobilière genevoise - comme ceux qu'on a faits à Nice - resteront vains.
En ce qui concerne le projet de loi 8529, je me contenterai de souligner que celui-ci permettrait à notre Conseil de décréter l'urgence de construire dans un périmètre, de manière à faciliter l'adoption d'un plan localisé de quartier. Le PDC soutient le renvoi en commission de ce projet, car il est convaincu que la crise du logement, vu la situation actuelle, va s'accentuer grandement et que des instruments tels que celui permettant de décréter l'urgence de construire dans un périmètre, doivent être étudiés.
M. René Koechlin (L). Ce projet de loi s'inscrit dans la même logique que les précédents. En termes succincts, il vise notamment à construire plus rapidement lorsque le besoin est pressant - j'insiste sur le mot pressant - en période de crise du logement. Or, Madame Fehlmann Rielle, nous traversons une période de crise du logement. Vous parlez du long terme, mais les personnes qui cherchent un logement assidûment se moquent du long terme, du plan directeur et des annonces de déclassement, car ce n'est pas en déclassant la zone villas, ou n'importe quelle autre zone, que l'on résoudra la crise du logement aujourd'hui ou demain!
Des enquêtes qui ont eu lieu il y a dix ans et qui ont été confirmées tout récemment, portant sur 3 600 logements et menées par les milieux de la construction - Fédération des métiers du bâtiment et j'en passe - montrent qu'entre le moment où l'on manifeste l'intention de déclasser un périmètre et l'instant où les habitants y prennent possession de leur logement, il s'écoule, dans ce canton, entre dix et seize ans! Aussi, ce n'est pas avec ce genre de solution que l'on résoudra la crise que nous traversons aujourd'hui. On peut déclasser pour anticiper les problèmes qui surgiront dans dix ou seize ans, mais aujourd'hui, maintenant, il faut d'autres solutions et c'est ce que nous visons avec ce projet de loi.
En l'occurrence, nous proposons d'abréger la procédure d'adoption des plans localisés de quartier, dont je crois, Mesdames et Messieurs, que beaucoup d'entre vous ne réalisent pas ce qu'elle est. Dans les faits, on commence par déposer au DAEL une demande de renseignements, qui est traitée en un ou deux ans, selon les cas. Puis, le bébé est envoyé à la commune, qui est chargée d'élaborer un plan localisé de quartier qu'elle soumet à son Conseil municipal, lequel prend une décision sous forme de résolution... (L'orateur est interpellé par M. Grobet.) C'est dans la loi, Monsieur Grobet! Le Conseil municipal charge son exécutif de déposer la résolution au département qui, alors, est chargé d'élaborer le plan localisé de quartier...
M. Christian Grobet. C'est faux!
M. René Koechlin. Oui, c'est dans la loi! Mais évidemment, quand vous étiez au département des travaux publics, Monsieur, cette procédure n'existait pas! (Huées) Elle a été votée par ce Grand Conseil en 1993, elle est inscrite dans la loi sur l'aménagement du territoire...
La présidente. Monsieur Koechlin, nous sommes en débat de préconsultation : il vous reste une minute!
M. René Koechlin. Alors, en une minute : le département élabore ensuite le PLQ et le soumet à une première enquête publique. Puis, le projet revient au niveau de la commune, où le Conseil municipal se prononce sous forme de délibération soumise à référendum, d'où délai référendaire. Ensuite, il y a une deuxième enquête publique, qui dure trente jours. Enfin, le Conseil d'Etat prend sa décision, soumise elle aussi à un délai de recours de trente jours. Le tout, Mesdames et Messieurs, dure entre deux et six ans, uniquement pour le plan localisé de quartier!
Avec ce projet de loi, nous proposons de réduire au moins de deux ans cette procédure. C'est appréciable et j'espère que vous saurez tirer parti de cette proposition en commission!
La présidente. Monsieur le député Grobet! (Exclamations et applaudissements.)
M. Christian Grobet (AdG). Je commence à comprendre, Monsieur Koechlin, comment certains architectes peuvent passer un ou deux ans à faire instruire leur requête en autorisation de construire. En effet, s'ils connaissent aussi mal la loi que vous, alors je peux effectivement comprendre qu'il y ait des délais pareils...
M. René Koechlin. C'est vous qui ne connaissez pas la loi!
M. Christian Grobet. Monsieur, vous me stupéfiez chaque fois que vous intervenez, mais là je dois dire que cela dépasse tout! (Invectives. Chahut.)
La présidente. S'il vous plaît, Monsieur Koechlin, laissez parler M. Grobet, qui vous a laissé parler...
M. Christian Grobet. Le seul conseil que j'ose, en tant qu'ancien responsable du département des travaux publics, c'est de suggérer à M. Moutinot de ne pas donner de mandat à M. Koechlin!
Monsieur Koechlin, l'autorité qui prépare le plan localisé de quartier, c'est le DAEL : la commune ne prépare un plan localisé de quartier que si elle use de son droit d'initiative! Or, la commune, bien entendu, n'utilise pas son droit d'initiative si le département est saisi d'une requête en autorisation de construire. Je crains, Monsieur Koechlin, qu'à partir d'une certaine heure de la soirée, vous ne soyez plus capable de connaître les rudiments de la loi... (Huées. Chahut.) C'est effectivement honteux de la part d'un architecte!
Cela étant dit, si on a affaire à un architecte compétent, je peux dire qu'en général, entre le moment où la demande de renseignements est déposée et celui où l'autorisation de construire est délivrée, avec l'adoption d'un plan localisé de quartier, il s'écoule un à deux ans au maximum! Par conséquent, Monsieur Koechlin, s'il vous faut six ans, c'est bien parce que vous ne connaissez pas les rudiments de la loi! (Applaudissements et huées.)
M. Laurent Moutinot. Mesdames et Messieurs les députés, compte tenu du climat passionnel de ce débat, le département fera part de sa position sur ce projet de loi en commission! (Applaudissements.)
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.