Séance du
jeudi 14 juin 2001 à
17h
54e
législature -
4e
année -
9e
session -
29e
séance
PL 8525
M. Jacques-Eric Richard (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai le plaisir de vous présenter ce projet de loi, en rappelant que deux ou trois expériences ponctuelles de médiation se déroulent déjà dans les communes, ainsi qu'en Ville de Genève. Le mandat des médiatrices et médiateurs est de lutter contre l'exclusion et la marginalisation. Actuellement, nous avons besoin d'une base légale dans ce domaine et c'est pourquoi nous vous proposons de renvoyer ce projet de loi à la commission des affaires sociales.
Mme Geneviève Mottet-Durand (L). Les éléments contenus dans ce projet de loi sont en adéquation avec la pratique qui existe au niveau de la FASe, puisque cette dernière s'adapte à l'évolution des situations. Un cahier des charges circonstancié des travailleurs sociaux hors murs a été établi et prévoit entre autres l'obligation de collaborer étroitement avec les maisons de quartier, qui développent une action de proximité en lien avec le quartier et la commune d'implantation. L'intervention hors murs doit donc être considérée comme complémentaire et en synergie avec celle des centres, l'objectif étant que les centres eux-mêmes participent également à l'action hors murs. Et comme le dit si bien un travailleur social hors murs, il n'y a pas de hors murs sans les murs!
Consciente que certaines situations échappent aux centres, la FASe, à la demande de certaines communes, a engagé d'autres actions, comme celle du BUPP, Bus prévention parcs, développée à Lancy, Onex, Bernex et Confignon, comme le mentionne d'ailleurs l'exposé des motifs du présent projet. Cette action, confiée à des animateurs de la FASe, constitue un outil servant à établir la relation avec des jeunes confrontés à certaines difficultés. Cette expérience, qui en a généré d'autres se déroulant pendant tout l'été dans d'autres régions du canton, a aussi une limite, dès le moment où elle doit pouvoir être relayée par l'action d'autres intervenants, comme les services de l'office de la jeunesse, les centres sociaux de quartier, les conseillers des cycles, les îlotiers de gendarmerie, etc. Elle est à mettre en parallèle avec le travail effectué par dix autres travailleurs sociaux hors murs de la FASe dans six autres programmes, recouvrant dix-huit communes.
Il est indispensable que l'attribution des moyens nécessaires, comme le propose le projet de loi, pour faire face à des difficultés recensées, soit précédée d'une phase d'évaluation sur les moyens à donner. En ce sens, les réseaux regroupant les professionnels des institutions sociales, les communes, la police ainsi que les représentants d'associations telles que parents d'élèves ou enseignants, doivent être mis à contribution et consultés. C'est pourquoi nous estimons que cette consultation devra être très clairement mentionnée dans la loi ou dans son règlement d'application. Par ailleurs, nous ne pensons pas que les propositions prévues dans le projet de loi 8525 doivent faire l'objet d'une nouvelle loi : certaines dispositions peuvent tout simplement s'intégrer à la loi sur la FASe, qui est la loi J 6 11, complétant ainsi sa mission dans le domaine socio-éducatif.
Pour ma part, je vous proposerai, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'enseignement. La FASe dépend entièrement de l'instruction publique, les travailleurs sociaux ont des contacts réguliers avec les conseillers sociaux des cycles d'orientation. Je ne vois pas pourquoi on renverrait ce projet aux affaires sociales, l'action de la FASe se déroulant complètement en dehors du DASS.
M. Roger Beer (R). En examinant votre projet, Mesdames et Messieurs, j'ai eu l'impression que c'était M. Manuel Tornare, aujourd'hui maire de la Ville, qui vous avait dicté ce projet de loi! M. Tornare vient de nommer une délégation à la jeunesse, il vient d'engager plein de gens, notamment des médiateurs de rue justement, pour intervenir dans les quartiers chauds, les endroits où il y a des difficultés, et cela a l'air de marcher. Or, ce qui m'étonne, c'est qu'il n'a pas eu besoin de votre projet de loi... Cela dit, je ne vais pas polémiquer. C'est une idée socialo-socialiste : visiblement certains la mettent en oeuvre tout de suite, d'autres veulent en discuter en commission. Pour sa part, le groupe radical suivra la proposition qui vient d'être faite de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'enseignement.
Mme Esther Alder (Ve). Les Verts ne sont pas très favorables à ce projet de loi. En effet, dès lors que l'on souhaite supprimer les doublons entre les communes et le canton, à partir du moment où, dans la répartition des tâches, l'on considère que le travail de proximité - que, par ailleurs, les Verts soutiennent - est de la compétence des communes, nous pensons que les signataires de ce projet de loi se trompent d'instance. Cela dit, nous ne sommes pas contre un renvoi en commission, de sorte que les communes puissent être entendues sur leur politique en la matière, et notamment la Ville de Genève qui, rappelons-le, a récemment développé tout un concept à cet égard.
Mme Nelly Guichard (PDC). Nul ne saurait nier le fait que les médiateurs de rue ont un rôle important à jouer. Aujourd'hui, il faut aller à la rencontre des jeunes qui, pour diverses raisons, sont en rupture avec leur famille, avec le réseau social habituel de manière plus générale, et qui ne fréquentent donc plus les centres de loisirs ou les maisons de quartier.
Dans ce sens, le Bus prévention est une solution pour entrer en contact avec ces jeunes, où qu'ils se trouvent et selon des horaires adaptés à la situation, donc souples. Cette nouvelle approche s'est faite dans le cadre de la Fondation pour l'animation socio-culturelle, comme Mme Mottet-Durand l'a rappelé tout à l'heure, et il est probablement temps de reconnaître l'importance de ce travail hors murs et de lui donner un ancrage législatif. Mais le Bus prévention a aussi montré que ces animateurs socio-culturels, ces médiateurs ne peuvent pas fonctionner comme des électrons libres. Pour ancrer dans la durée l'action entreprise, pour lui donner une réelle valeur, il faut une coordination avec les lieux fixes que sont les centres de loisirs, jardins Robinson, maisons de quartier ou, le cas échéant, les services sociaux des communes, selon les configurations locales.
Il y a lieu aussi d'examiner - et, là, je rejoins la problématique des doublons - si le travail d'une partie, même petite, du personnel qui travaille dans les centres ne pourrait pas être réorientée vers cette fonction de médiateur hors murs, ou en tout cas si des postes ne pourraient pas être transférés, puisque la situation évolue. Tant pour la collaboration absolument indispensable que pour des questions de transferts éventuels de postes, il ne me paraît pas utile, pour ne pas dire inadéquat, d'avoir une structure séparée de la FASe, comme le prévoit le projet de loi, avec une ligne budgétaire propre. Cette problématique... (Brouhaha.)
La présidente. Monsieur le vice-président, pouvez-vous laisser Mme Guichard terminer ?
Mme Nelly Guichard. Je pense donc que toutes ces problématiques devront être examinées en commission, et nous aussi proposons que ce soit la commission de l'enseignement qui soit chargée de se pencher sur ce projet de loi, puisqu'elle s'est occupée de la mise sur pied de la FASe et que le département de l'instruction publique est le répondant de cette institution. De plus, je rappelle que la commission de l'enseignement, en ce moment, n'est pas surchargée de travail, ce qui n'est pas le cas de la commission sociale.
Mme Martine Brunschwig Graf. Sans allonger, je ferai trois observations. La première, c'est qu'effectivement la commission de l'enseignement devrait s'occuper de ce dossier. Deuxièmement, il n'est pas nécessaire, à notre avis, de faire un projet de loi spécifique : il vaudrait mieux trouver des solutions dans le cadre de la FASe.
Troisièmement, je vous recommanderai, Mesdames et Messieurs, au cours du travail en commission et au-delà de l'intérêt réel des questions qui sont posées, de ne pas adopter une loi qui soit trop contraignante et qui entre trop dans les détails. En effet, si aujourd'hui nous avons plutôt besoin de travailleurs de rue, demain ou après-demain, la situation peut évoluer. Je trouverais dommage que l'on inscrive dans la loi générale des définitions de métiers particuliers, alors que les caractéristiques du système mis en place sont précisément la collaboration canton-communes - la Fondation pour l'animation socio-culturelle vise justement à permettre cela - et la souplesse dans les réponses, en fonction des problèmes posés. A cet égard, la loi telle qu'elle est rédigée méritera quelque réflexion.
Quant au problème posé, nous sommes tous conscients de l'intérêt de ce type de pratique. Je confirme que, même sans base légale, il est parfaitement possible aujourd'hui d'agir. Mais si vous souhaitez une base légale, essayons de trouver habilement un chemin pour ne pas figer les activités de celles et ceux qui sont sur le terrain.
Ce projet est renvoyé à la commission de l'enseignement et de l'éducation.