Séance du
jeudi 5 avril 2001 à
17h
54e
législature -
4e
année -
7e
session -
16e
séance
M 1395
EXPOSÉ DES MOTIFS
La loi, votée par la majorité du Grand Conseil le 31 août 2000, exigeait une généralisation de la 7e hétérogène à l'ensemble des Cycles d'orientation et ceci dans un temps record de deux ans, soit pour la rentrée 2002. Par son net refus de cette loi (65 %), le peuple a montré qu'il tenait à la qualité de l'enseignement et qu'il estimait que les structures actuelles étaient suffisamment souples pour prendre en compte les différents parcours des élèves et respecter une égalité de chance pour chacun.
L'école et les enseignants ont une mission difficile, particulièrement avec les adolescents et particulièrement dans les régions du canton les moins favorisées socialement. La réalité sociale de certains quartiers a beaucoup changé ces dernières années. La classe hétérogène ne ferait que compliquer la tâche des enseignants dans ces écoles. En raison de leur nombre et de l'ampleur de leurs difficultés scolaires, les maîtres n'auraient plus ni le temps ni les moyens d'encadrer et de soutenir les élèves qui en ont le plus besoin.
L'école est bien plus qu'un lieu de socialisation ! Elle se doit de conduire chaque élève vers des apprentissages nouveaux et des compétences acquises. C'est seulement au travers d'objectifs et des modalités de travail réellement adaptés à sa situation scolaire et à son développement que l'élève peut progresser.
L'étude du SRED retient essentiellement que le problème de l'intégration des élèves faibles et en difficulté reste la préoccupation de toutes les directions. Par conséquent, c'est à l'intention de ces élèves qu'il convient de renforcer leur prise en compte.
Dans certains cycles, les structures actuelles permettent un déroulement progressif de l'orientation des élèves avec des possibilités de soutien, d'encouragement et de valorisation des parcours scolaires selon les aptitudes et les intérêts de l'élève.
Pour que le Cycle d'orientation reste un instrument efficace de démocratisation des études, les dispositifs -tels la dérogation, le passage à l'essai, l'assistance pédagogique, les cours d'appui, le transfert- devraient être généraliser à l'ensemble des cycles pour donner un maximum de chance à chaque élève.
En espérant que vous ferez bon accueil à cette motion, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, de la renvoyer à la Commission de l'enseignement.
Débat
Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Il s'agit d'une motion de cohérence, après la sanction très nette de la population contre la volonté d'une majorité du Grand Conseil de généraliser une 7e hétérogène au Cycle d'orientation.
Nous les initiants du référendum, en défendant notre cause, nous avons été très clairs en disant : «Maintenons la qualité actuelle du Cycle d'orientation, car la majorité des parents et des élèves sont satisfaits du type d'enseignement, mais, par ailleurs, consacrons les montants qu'aurait nécessités une réforme à la hussarde aux élèves en difficultés.» Ces derniers nous paraissent prioritaires. En effet, dans l'optique de mettre des priorités dans les dépenses publiques, il nous paraît capital de renforcer le dispositif pour les élèves en échec, ceci en concordance avec le rapport du SRED. Nous sommes persuadés que les partisans de la 7e hétérogène nous rejoindront enfin sur cette préoccupation fondamentale.
Nous renvoyons cette motion à la commission de l'enseignement.
Mme Nelly Guichard (PDC). Comme on l'a dit tout à l'heure, je regrette vraiment que les sujets qui touchent à l'enseignement soient systématiquement traités en fin de soirée.
Il n'en reste pas moins, comme l'a relevé Mme de Tassigny, que durant toute la campagne qui a précédé le vote du 4 mars - qui a abouti au rejet massif de la loi votée par ce parlement à fin août 2000 - à différents niveaux de la direction du département aux enseignants, en passant par les chercheurs, tous s'accordaient à dire que le problème qui ne serait pas résolu, quelle que soit l'issue du vote, serait celui des enfants en grandes difficultés.
C'est donc dans le but d'une prise en charge de ces jeunes que nous avons déposé cette motion et que nous vous proposons de la renvoyer à la commission de l'enseignement.
Mme Jacqueline Cogne (S). Dans les termes «cycle d'orientation» il y a le mot orientation. Or, pour orienter ces élèves en grandes difficultés, il faudrait faire des propositions. Mais des propositions, je n'en vois pas ici ! Les opposants à cette loi n'avancent pas un seul argument pédagogique, tout en se cachant derrière une étude scientifique dont ils font une lecture partiale : je veux parler de l'usage abusif de l'étude du SRED...
Il est vrai que cette problématique pédagogique aurait dû, dans un monde conforme à l'esprit de l'article 4 de la loi sur l'instruction publique, être résolue par l'autorité scolaire elle-même. Et c'est à cause de l'obstination de cette dernière que la loi sur la 7e hétérogène a été déposée, étudiée et votée par le Grand Conseil. (Commentaires.)
Dans l'exposé des motifs, au premier paragraphe, les motionnaires abusent de la volonté du peuple en attribuant à son vote des motivations qui sont celles de la hiérarchie du DIP principalement, les motionnaires s'en faisant par là même les «porte-plumeaux», alors que les motifs du vote des citoyennes et des citoyens sont par essence inconnus, puisque les questions posées ne leur demandent jamais de motiver leur vote. Ne s'agirait-il pas essentiellement d'une affaire de gros sous, puisque passablement de désinformation a pollué les esprits à propos du coût de la généralisation de la 7e hétérogène ? On pourrait se poser la question...
En conclusion, je ne m'étendrai pas sur le reste du texte, principalement des lieux communs qui n'arrivent pas à recouvrir l'indigence et la vacuité de cette motion... Celle-ci ne parvient pas à masquer le fait qu'il s'agit d'un texte purement cosmétique pour rattraper certaines promesses faites pendant la campagne référendaire.
Nous nous rallions donc à nos préopinants, c'est-à-dire que nous renvoyons cette motion en commission de l'enseignement.
Mme Janine Hagmann (L). Il y a quelque temps, ce Grand Conseil a renvoyé une motion concernant les surdoués à la commission de l'enseignement. Aujourd'hui, la motion présentée demande de soutenir les élèves en difficultés. Si je comprends bien, on s'occupe des deux extrêmes, mais ceux du milieu - les «normaux» - sont un peu les laissés-pour-compte... (Exclamations.) Je plaisante ! Mais il est toutefois plus facile de parler d'un Mozart que d'un Salieri... (L'oratrice est interpellée par M. Dupraz.) Salieri n'était pourtant pas mauvais, comme vous le dites, Monsieur Dupraz !
Il est vrai que cette motion touche les vrais défis auxquels est et sera de plus en plus confrontée l'école obligatoire, dont le premier est le simple maintien du taux d'encadrement. N'oubliez pas que le cycle d'orientation va en effet devoir faire face, d'ici au milieu de cette décennie, à un afflux d'adolescents - je pense plusieurs milliers - qui sont en fait les petits-enfants des «baby-boomers» de l'après-guerre, auxquels s'ajoutera une vague de départs à la retraite des enseignants, encouragés par le PLEND !
C'est pour cette raison qu'il faut renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement, car il faut effectivement étudier toutes les solutions possibles pour ne laisser personne sur le carreau. Nous avons tous envie de concourir à une amélioration de la qualité de l'enseignement public en général et du secondaire obligatoire en particulier.
Je suis toutefois un peu étonnée de votre réaction, Madame Cogne : comme toujours, vous avez vraiment beaucoup de peine à admettre d'avoir perdu... La population s'est prononcée à deux contre un, Madame Cogne ! Ce n'était donc pas un résultat limite ! A deux contre un la population s'est prononcée en faveur d'une école de qualité ! Pendant toute la campagne, nous avons promis - la présidente du département de l'instruction publique l'a confirmé aux médias - de nous occuper des enfants en difficultés.
Cette motion tombe donc à pic pour étudier des solutions en commission de l'enseignement. Et puis, faisons confiance au département qui va nous aider à trouver les bonnes solutions !
La présidente. Monsieur Beer, vous avez demandé la parole ou vous renoncez ?
M. Roger Beer. Je renonce spontanément !
La présidente. Merci, Monsieur Beer ! Madame de Tassigny, vous renoncez aussi ?
Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Non, mais ce sera rapide, Madame la présidente. Je voulais juste apporter une précision par rapport à l'intervention de Mme Cogne.
Vous dites, Madame Cogne, que nous ne faisons pas de propositions... Alors, au lieu de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement, il me semble qu'il vaudrait mieux la renvoyer au Conseil d'Etat. C'est en effet à l'exécutif de trouver des solutions par rapport aux enfants en difficultés, et ce n'est pas nous, les députés, qui allons trouver les passerelles et les solutions à ce problème en commission. Il faut donc attendre que le Conseil d'Etat nous fasse des propositions, et, ensuite, nous pourrons traiter cet objet. Nous sommes peut-être tous des pédagogues en puissance, mais, à mon avis, le département est mieux placé pour faire des propositions pour améliorer la situation de ces élèves qui sont en échec scolaire.
Mme Jacqueline Cogne (S). Je me rallie totalement à ce que vient de dire Mme de Tassigny. Effectivement, renvoyons cette motion au Conseil d'Etat de façon qu'il propose des solutions à ce problème !
Mme Martine Brunschwig Graf. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons sombrer dans une touchante unanimité, puisque j'allais vous proposer de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat... Et ce, pour la raison suivante : le département ayant d'ores et déjà demandé aux cycles d'orientation de faire des propositions au sujet des élèves en difficulté - propositions qui seront connues d'ici la fin du printemps - et chaque collège du cycle d'orientation étant censé nous proposer un projet pour la rentrée déjà, je crois pouvoir aller au-devant de vos demandes et permettre ainsi que le Conseil d'Etat vous réponde rapidement, surtout que la rentrée c'est déjà demain, comme vous le savez !
La présidente. Mmes Guichard et Hagmann renoncent aussi à la demande de renvoi de cette motion en commission, je présume ? (Mme Guichard et Mme Hagmann acquiescent.) Nous passons donc au vote sur cette motion.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(1395)concernant un soutien accru aux élèves en grandes difficultés