Séance du
vendredi 16 février 2001 à
17h
54e
législature -
4e
année -
5e
session -
9e
séance
PL 7891-A
Suite du premier débat
M. Christian Grobet (AdG). Je voudrais tout d'abord répondre à M. Koechlin, suite à son intervention de tout à l'heure. Chaque fois que la gauche et les Verts osent critiquer tant soit peu un projet, vous vous enflammez immédiatement, Monsieur Koechlin, mais c'est normal : vous faites partie des milieux de la construction qui sont favorables à bétonner notre canton d'un bout à l'autre ! Vous avez évoqué quelques projets où nous nous sommes non pas opposés fondamentalement, mais où nous avons proposé des variantes. Evidemment, vous avez oublié - mais cela vous a été rappelé tout à l'heure - un projet qui tenait tout particulièrement à coeur à la droite, à savoir la traversée de la rade, où nous avons été abreuvés pendant des années de vos insultes, où vous nous avez flanqué en pleine figure tout ce que vous pouviez, nous accusant de combattre l'intérêt de Genève... (Brouhaha. Commentaires de M. Dupraz.) Mais le peuple a tranché, Monsieur Dupraz, ne vous en déplaise !
M. Koechlin a également cité la place des Nations, le parking de la place Neuve... Or, je vous le dis, Monsieur Koechlin, car j'ai aussi beaucoup de respect à votre égard : vous avez fait preuve de beaucoup d'impudence. En effet, quand le peuple tranche - c'est une leçon que j'ai apprise comme jeune politicien - il a toujours raison ! Il nous donne tort à vous comme à nous, chacun à notre tour : ayons donc l'humilité d'accepter le verdict populaire ! Aujourd'hui, vous nous reprochez le fait que le peuple ait rejeté le parking de la place Neuve, l'aménagement grotesque de la place des Nations et d'autres projets, comme le parking de l'Alhambra ou la traversée de la rade... Mais vous aussi, vous contestez des projets, cher Monsieur : n'oubliez pas votre référendum contre le parking du Port-Noir, n'oubliez pas le référendum que vous allez très certainement lancer contre le Musée d'ethnographie, n'oubliez pas les blocages que vous provoquez sur tous les projets de transports publics, sur tous les projets de création de zones piétonnes, où nous sommes une des villes les plus à la traîne en Europe. En l'occurrence, vous n'avez vraiment pas de leçon à nous donner !
Je rappellerai ici que nous sommes pour des réalisations réalistes, qui s'intègrent dans une politique de développement durable... (L'orateur est interpellé.) Attendez, Monsieur Dupraz, j'aurai l'occasion de vous répondre tout à l'heure ! Vous le savez, Monsieur Koechlin, nous n'avons en rien bloqué la situation à Genève ; Genève est une des villes où on a le plus construit en Suisse ces dernières années, probablement trop, compte tenu de ce qui s'est passé en matière de spéculation immobilière. Nous savons, quant à nous, que les citoyennes et les citoyens de ce canton ne sont pas d'accord que l'on bétonne le canton de Chancy jusqu'à Hermance et que l'on sacrifie les espaces verts de notre canton quand ce n'est pas indispensable.
Dans le cas présent, la question est de savoir si cette plate-forme autoroutière peut être réalisée en zone à bâtir ou non. Monsieur Dethurens, quand vous dites - je ne crois pas trahir vos propos - que les préoccupations écologiques que nous évoquons sont dépassées, vous m'effrayez. En effet, aujourd'hui notre planète continue dans une voie qui la conduit à sa perte. Si nous ne comprenons pas que nous devons respecter un certain nombre de principes environnementaux, demain l'humanité est finie ! Ce qui est en train de se passer est dramatique et c'est le moment où jamais de comprendre que les principes de la protection de l'environnement doivent être appliqués, si nous voulons laisser aux générations futures une planète qui soit encore vivable. A cet égard, un des actes fondamentaux de notre pays a été l'adoption - non sans mal il faut bien le dire, car du côté de la droite on n'était pas très enthousiaste - d'une loi fédérale sur l'aménagement du territoire qui, bien qu'un peu minimaliste, fixe au moins un principe fondamental, à savoir qu'il y a des zones à bâtir et qu'à moins de ne pas pouvoir faire autrement on essaie de ne pas toucher à la zone agricole.
Cela m'amène à rappeler les débats que nous avons eus dans ce Grand Conseil il y a vingt ans sur l'autoroute de contournement. Je constate qu'aujourd'hui, sur les bancs d'en face, on se montre plus rétrogrades qu'il y a vingt ans et je trouve cela épouvantable compte tenu de l'évolution que l'on constate au détriment de l'environnement. Je rappellerai que dans ce Conseil, et je suis heureux que M. Dupraz soit là, car j'avais peur tout à l'heure d'intervenir à un moment où il n'était pas là... (Exclamations et brouhaha.) En effet, lui se souviendra qu'en 1979 les agriculteurs des partis de l'Entente sont intervenus, au moment où le Grand Conseil a voté le tracé de l'autoroute, pour dire que cela devait être la dernière grosse emprise sur la zone agricole. Vous vous souviendrez, Monsieur Dupraz, que les députés agriculteurs avaient déposé une motion disant que l'autoroute ne devait pas être le prétexte à une urbanisation le long de cette autoroute. Vous vous souviendrez également, Monsieur Dupraz, et c'était tout à votre honneur, que vous avez approché, après le vote populaire, celui qui avait repris le département des travaux publics, pour lui demander de modifier la branche de l'autoroute de contournement de Plan-les-Ouates, d'abandonner l'évitement par le sud d'Arare et de prévoir le passage par le vallon des Vaulx.
Il a fallu dix ans, Monsieur, vous vous en souvenez, pour que votre idée, que vous défendiez devant le département des travaux publics en tant que représentant de la Chambre d'agriculture, soit concrétisée. Cette idée visait à sauver six hectares de terre agricole et une zone de grande qualité : je constate qu'aujourd'hui on est prêt à sacrifier quatre hectares et demi de zone agricole pour créer ce relais autoroutier ! C'est dire que l'effort qui a été fait à l'époque pour passer par le vallon des Vaulx, et qui a coûté beaucoup d'argent, est tout simplement réduit à néant par ce projet-ci.
Ici, j'aimerais dire à M. Barthassat qu'en tant que représentant de la commune de Bardonnex il a un sacré culot ! En effet, quand je dirigeais le département des travaux publics, qui donc est venu me harceler... (Exclamations.) ...pour minimaliser les emprises de l'autoroute sur le territoire de la commune de Bardonnex ? C'étaient les autorités communales de Bardonnex, plus une association de citoyens. Je les avais soutenus à l'époque, en faisant front à la Confédération quant à la taille du parking que celle-ci voulait réaliser sur l'aire douanière de Bardonnex et qui était, à mon avis, totalement surdimensionné. Je dois dire qu'aujourd'hui, après tous les combats que vous avez menés dans l'intérêt des citoyennes et des citoyens de votre commune, vous ne manquez pas d'audace en demandant le contraire de ce que vous demandiez il y a vingt ans ! Et pourquoi demandez-vous le contraire ? Parce que la commune risque de toucher quelques retombées fiscales ! En l'espèce, baser l'aménagement du territoire sur un tel critère, déclasser du terrain parce qu'une commune va toucher quelques recettes fiscales supplémentaires, signifie la mort de l'aménagement du territoire ! (Applaudissements.) Votre intervention, Monsieur, est lamentable, aussi lamentable que le vote de tout à l'heure concernant la multinationale Reuters... (Chahut.)
La présidente. Monsieur Grobet, s'il vous plaît, il vous faut conclure !
M. Christian Grobet. ...sachant que Reuters avait largement les moyens de s'installer dans une zone à bâtir et que c'est une des communes les plus riches du canton qui souhaitait voir cette société s'installer sur son territoire pour bénéficier de retombées fiscales ! Tous les habitants de cette région peuvent d'ailleurs constater à quel point cette réalisation est épouvantable au niveau de l'aménagement du territoire... (Protestations, chahut.)
La présidente. Monsieur Grobet, je vous demande de conclure !
M. Christian Grobet. Je m'arrête là, Madame la présidente, et je m'inscris pour un deuxième tour de parole tout à l'heure ! (Applaudissements et brouhaha.)
M. Nicolas Brunschwig (L). Madame la présidente, il y a un règlement du Grand Conseil que nous vous demandons d'appliquer ! M. Grobet parlera plusieurs fois s'il le veut, mais il n'y a aucune raison qu'il parle quinze minutes, alors que tous les autres députés parlent dix minutes ! Aussi, soit vous présidez, soit vous laissez votre vice-président présider, qui le fera certainement beaucoup mieux ! (Huées.)
La présidente. Monsieur Brunschwig, M. Grobet n'a pas parlé quinze minutes, il a parlé onze minutes trente. Deuxièmement, vous faisiez tellement de bruit que M. Grobet était obligé de crier et qu'il ne m'entendait pas ! (Exclamations et brouhaha.) Je passe la parole à M. Vaucher !
M. Olivier Vaucher (L). Madame la présidente, permettez-moi en préambule de vous rappeler votre devoir : en tant que présidente, vous devez garder la plus grande neutralité et ne pas être partisane... (Exclamations.)
Mesdames et Messieurs les députés d'en face, j'aimerais tout d'abord vous rappeler, notamment à Mme Bugnon, à M. Etienne, à Mme Frei et à M. Grobet, que vous parlez tous, de façon assez sournoise, d'une surface de 44 000 m2, alors que le projet de loi tel qui nous était soumis et sur lequel vous avez refusé d'entrer en matière, projet que la commission avait demandé au département de revoir avec la société propriétaire, porte sur 20 000 m2. Cessez donc, s'il vous plaît, de parler de 44 000 m2, alors que vous avez refusé d'entrer en matière sur 20 000 m2 !
Cela dit, la non-entrée en matière sur un projet de loi est une chose particulièrement rare, qui devient très grave lorsqu'il s'agit d'un projet de loi qui a été ratifié non seulement par la commune - dois-je vous rappeler la résolution qui a été lue tout à l'heure, lecture que j'ai dû d'ailleurs vous arracher ? - mais aussi par le Conseil d'Etat, tant précédent qu'actuel. Ce projet a fait l'objet d'un concours dont le lauréat a été largement félicité par les instances que je viens d'évoquer. De plus, je rappelle la pratique constante en Suisse relative à la construction d'aires autoroutières de ravitaillement selon laquelle un déclassement de zone n'est pas nécessaire, la procédure s'opérant par voie dérogatoire et celle-ci étant expressément prévue par le droit fédéral. J'aimerais souligner que cette pratique - M. Grobet s'en souviendra fort bien - a été largement suivie par l'ancien président du département des travaux publics, M. Grobet ici présent, lorsqu'il a procédé à l'autorisation pour la COOP !
Maintenant, Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi de m'arrêter sur la société retenue pour réaliser ce projet... (Exclamations et brouhaha.) Forte des engagements pris par le Conseil d'Etat, elle a engagé à ce jour plus d'un million et demi pour le projet architectural qui, comme l'a relevé le rapporteur de minorité, est d'une très haute qualité. Dois-je vous rappeler que notre commission a pu constater que ce site était le seul possible pour réaliser cette aire ? La société Elf, décriée par la gauche, est un de nos plus gros contribuables, puisqu'elle figure parmi les dix premiers contribuables du canton de Genève. De plus, par cette aire, elle crée trente-deux nouveaux emplois. Bien sûr, il est notoire que, sur les bancs d'en face, l'emploi n'est pas votre plus grande priorité, vous l'avez déjà prouvé à maintes reprises... Dois-je rappeler encore que le projet Elf a fait l'objet d'une étude d'impact qui a reçu l'approbation de l'autorité fédérale et que l'enquête publique n'a provoqué que des préavis positifs, y compris celui de la Chambre genevoise d'agriculture, et n'a fait l'objet que d'un seul recours, déposé par un propriétaire éloigné de quelque 200 à 300 mètres ?
A cet égard, je relèverai que si le projet ne pouvait être réalisé sur notre territoire et en particulier sur la commune de Bardonnex, il se réaliserait assurément sur France, à quelques centaines de mètres, et que la gêne pour les voisins, en particulier les voisins du chemin des Ravières, serait donc quasiment identique.
J'aimerais aussi évoquer le titre du projet lauréat : «Genève, porte de la Suisse», avec tout ce qu'il a de porteur, puisque tout notre patrimoine agricole et rural y sera présenté. Je note en passant que le rapport de majorité - qui est un rapport, si je ne me trompe pas, de la fraction des Verts - ne pipe mot de cet aspect, de cet équipement de l'aire autoroutière. De plus, un nouveau projet nous a été soumis, fortement réduit en surface, impliquant donc des études et des coûts complémentaires, et c'est sur ce projet que la majorité de gauche a refusé d'entrer en matière. Comme l'a relevé M. le député Hausser dans la presse - alors qu'il s'oppose à ce projet, c'est assez étonnant ! - la réalisation du restoroute de Bardonnex ne coûterait pas un seul sou à la collectivité, puisqu'il est construit par des privés sur un terrain mis à disposition par un droit de superficie, et pire - ou mieux, cela dépend du côté où on se place ! - il rapporterait même un million aux caisses publiques.
En conséquence, Mesdames et Messieurs les députés, au vu de tout ce que je viens d'évoquer, ce refus est purement inacceptable. Dois-je rappeler que celui-ci nous coûterait la bagatelle de quelque deux millions de francs de dédommagement ? Pensez-vous vraiment que nous pouvons nous permettre d'agir ainsi ? J'en doute et vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, non seulement d'entrer en matière, mais de voter ce projet de loi pour montrer notre intérêt à la société promotrice, notre intérêt aux fruits de l'agriculture, notre intérêt à un de nos plus grands contribuables, à la création de dizaines d'emplois et, enfin, à la promotion du tourisme !
M. Roger Beer (R). Beaucoup de choses ont été dites sur ce restoroute de Bardonnex et si je suis satisfait de ce débat, je suis en même temps un peu étonné. D'habitude, nous nous empoignons sur des projets qui nécessitent des engagements financiers de l'Etat - je pense au projet à Battelle qui va nous coûter 90 millions, on ne sait pas exactement pourquoi... Or, ce soir nous nous battons, nous nous disputons depuis bientôt trois heures... (Exclamations.) ...sur un projet qui ne va quasiment rien nous coûter !
J'aimerais revenir sur l'opposition entre l'Alternative majoritaire et l'Entente. On a entendu les arguments de l'Entente en faveur de ce restoroute. Je peux le dire d'emblée : le groupe radical est pour ce restoroute... (Rires.) Bon, ce n'est pas un scoop, mais que voulez-vous, on ne se refait pas ! On a entendu les représentants de l'Alternative, que ce soit l'extrême-gauche, les socialistes, les Verts, démolir le projet. Malheureusement, Mesdames et Messieurs, je n'ai pas entendu, de votre part, de proposition concrète, réaliste et positive par rapport au développement de Genève. Tout en prônant un développement durable, nous devons accepter un certain développement de Genève.
J'aimerais revenir sur l'intervention de M. Grobet. M. Grobet a une longue histoire dans ce Grand Conseil, au Conseil d'Etat, à Genève, et il nous refait l'histoire. Monsieur Grobet, vous avez bâti votre carrière politique sur l'opposition : vous vous êtes opposé à l'autoroute de contournement, cela vous a fait conseiller d'Etat, puis vous avez construit cette autoroute, brillamment d'ailleurs; j'ai déjà eu l'occasion de le souligner et même de vous féliciter pour cet ouvrage qui a coûté un milliard ! Aussi, quand vous accusez les gens de droite de bétonner Genève d'un bout à l'autre, je vous réponds que, finalement, le seul qui ait réussi cet exploit, c'est vous, avec cette autoroute ! D'ailleurs, je me souviens qu'en 1993 - c'était ma deuxième législature - vous l'avez inaugurée de façon somptueuse. Je crois que cela a coûté un million... Vous avez couru devant tout le monde, puis, malheureusement, vous vous êtes planté à l'élection au Conseil d'Etat, mais cela, c'est une autre histoire !
Monsieur Grobet, si je me permets de vous taquiner, c'est parce que vous avez participé à la construction de cet ouvrage qui a coûté un milliard et qui traverse Genève ! A l'époque, cette autoroute était trop grande. Aujourd'hui, par moments, elle est déjà saturée, et heureusement puisque c'est un trafic que M. Ferrazino, conseiller administratif de la Ville, n'aura pas besoin de faire sortir de la ville : ces voitures sont déjà à l'extérieur.
J'en viens au restoroute. Je ne comprends pas, Monsieur Etienne, que vous dénigriez l'emplacement de ce restoroute. Vous prenez la défense du monde agricole, mais, rassurez-vous, le monde agricole est relativement bien représenté chez les radicaux, qui défendent bien sûr la zone agricole, mais pas à tous crins et n'importe quand. Faire de la politique, c'est avoir des projets d'avenir et le rôle du Grand Conseil, c'est arbitrer en fonction des intérêts en présence. Or, vous êtes en train de défendre des intérêts mineurs. Je ne connais pas bien M. Hottelier, même s'il habite ma commune. Il s'agite un peu et je le trouve sympathique, mais il représente peu de chose par rapport à la nécessité de ce restoroute, au bord d'une autoroute de contournement qui a coûté un milliard et sur laquelle je ne sais combien de milliers de voitures passent.
Par ailleurs, le lieu n'est pas un lieu génial, vous l'avez dit vous-même et M. Koechlin l'a dit de façon plus théâtrale. M. Barthassat qui est agriculteur, qui connaît la terre, sait qu'elle n'est pas géniale là-bas. En l'occurrence, j'ai l'impression que vous n'êtes même pas allé sur place : ce coin est nul, ce n'est pas là-bas qu'on va développer quoi que ce soit. Le restoroute va donc amener une plus-value extrêmement importante. Bien sûr, je comprends que les deux villas craignent quelques nuisances, mais le restoroute n'entraînera pas plus de nuisances que l'autoroute et la plate-forme douanière. Et c'est là où je ne comprends pas votre discours, Mesdames et Messieurs de l'Alternative. Vraiment, cela me dépasse ! Il n'y aura pas une voiture de plus à cause de ce restoroute.
S'agissant des retombées fiscales, Monsieur Grobet, c'est vrai qu'elles ne sont pas primordiales, mais vous ne pouvez pas nier que c'est important pour les petites communes. Vous ne pouvez pas nier que cela créera des emplois dans la commune et qu'il est important que les emplois ne soient pas tous en Ville de Genève, où il n'y a plus de place.
Quant à vous, Monsieur Krebs... Il n'est pas là... Alors, Monsieur Etienne... (Rires.) ...vous vous moquez des produits agricoles, alors que cette plate-forme pourrait également être un présentoir des produits agricoles. Je ne sais pas si vous avez suivi votre magistrat, M. Cramer : il est chef du département de l'agriculture et je l'ai toujours vu en première page devant les produits agricoles, lors de la Foire de Genève ! Pour une fois, il sera au restoroute !
Mesdames et Messieurs, ce soir, vous êtes majoritaires et nous sommes vraisemblablement partis pour aller dans le mur et perdre. Mais, contrairement à ce que vous imaginez, ce restoroute n'est pas une affaire qui se résume à défendre trois familles et cinquante opposants, peu importe qui est derrière : cela doit être l'affaire des Genevois et le débat n'est pas terminé. Nous devrons discuter, au sein de l'Entente, pour trouver une solution qui nous évite d'aller dans le mur. Même si nous étions plus nombreux que vous ce soir et que le projet soit voté, vous nous joueriez l'opposition à la couleur des rideaux, à la couleur de la pompe à essence et je ne sais quoi. Aussi, il nous faudra trouver une solution qui permette à la population de s'exprimer. Le débat va donc continuer. Ce soir, nous allons voter ce projet, vous voterez contre, mais vos arguments ne m'ont vraiment pas convaincu et je me réjouis de la suite ! (Applaudissements.)
M. Christian Brunier (S). Nous vivons un grand soir : cinq ans après la traversée de la rade, la droite a enfin retrouvé un projet ! (Exclamations.) Un projet qui la fait vibrer et qui n'est pas rien, puisque, d'après ce que j'ai entendu, cela va être un des grands lieux du tourisme européen !
Une voix. Après Montélimar !
M. Christian Brunier. Après Montélimar ! Mesdames et Messieurs, au début de l'histoire de ce dossier, nous étions tous d'accord sur le principe de réaliser éventuellement, je dis bien éventuellement, une station-service sur le réseau autoroutier genevois. La différence, à l'époque déjà, entre vous et nous, c'était que nous mettions un certain nombre de conditions quant à l'implantation de cette station sur un territoire cantonal hyper restreint - je le rappelle, car vous avez l'air de l'oublier, c'est votre côté un peu impérialiste... - et déjà très urbanisé. Les socialistes avaient été, avec la gauche, le moteur d'un premier projet, celui de Blandonnet, qui n'a pas été réalisé, puisque M. Joye est arrivé au gouvernement et l'a jeté.
M. Joye a lancé immédiatement un projet pharaonique, dans une zone agricole, une belle zone verte, on l'a entendu ce soir... (Protestations.) ...de 46 000 m2. Mesdames et Messieurs, nous avons été un certain nombre à aller sur place et cette zone n'a rien à voir avec la description que vous en avez faite : la zone caillouteuse que vous décrivez n'existe pas et vous le savez très bien ! (Brouhaha.) Dès que M. Joye a énoncé les principes de son projet, le parti socialiste et la gauche genevoise ont pris une position très nette et ont refusé ce projet pharaonique. M. Joye, malgré les oppositions, s'est entêté et a fait des promesses inacceptables à la société Elf. D'ailleurs, en commission, M. Moutinot nous a fait part des échanges de courriers entre M. Joye, alors conseiller d'Etat, et la société Elf, qui nous ont révoltés et inquiétés. En effet, ces échanges ressemblaient davantage à une correspondance amicale qu'à une correspondance officielle. Ce ton complaisant est totalement inacceptable de la part d'un conseiller d'Etat. Ces engagements abusifs et irréfléchis par rapport à cette compagnie pétrolière vont coûter aujourd'hui près d'un million et demi à la collectivité publique ! (Chahut.) M. Joye et le gouvernement monocolore portent une sacrée responsabilité dans cette perte d'un million et demi, parce qu'ils ont abusé de promesses qui ne peuvent être tenues !
Dès l'arrivée de M. Moutinot au département et de la majorité de gauche au parlement, nous avons naturellement réaffirmé notre opposition à ce projet qui détruisait une zone agricole importante pour le canton. Nous avons aussi parallèlement renoncé, du moins au niveau du parti socialiste, à l'implantation à Blandonnet, qui aurait pu être une alternative, mais vu le changement de configuration de cette zone ceci n'était bien entendu plus possible... (Mugissements dans la salle.) Madame la présidente, pouvez-vous calmer l'assemblée ?
Nous avons donc cherché d'autres solutions. En commission, le parti socialiste a ainsi proposé de réaliser le restoroute sur la plate-forme douanière de Bardonnex, qui est complètement disproportionnée, d'autant plus qu'avec la ratification des bilatérales et, j'espère, le vote pour une adhésion à l'Union européenne, cette plate-forme douanière ne servira plus à rien. A notre avis, c'est la seule solution pour implanter une station-service à Genève.
En conclusion, il y avait trois possibilités. L'une était de réaliser cette station-service à Blandonnet, mais on sait que cette zone a changé depuis et que cette solution n'est plus possible. La deuxième possibilité était d'implanter le restoroute sur la plate-forme douanière, mais la position, inacceptable, de la douane nous empêche de réaliser ce projet sur cette zone, qui est immense et qui ne sert à rien. Enfin, il y a votre projet de réaliser ce restoroute dans une zone agricole et de verdure, et de sacrifier la nature et l'environnement à des intérêts économiques. Face à cela, nous avons, quant à nous, tout simplement décidé de ne pas faire de restoroute à Genève, de ne pas faire de station-service... (Brouhaha.) Je crois que ce n'est pas un drame pour Genève et je vous invite à enterrer définitivement ce projet qui est un mauvais projet ! (Applaudissements.)
M. Dominique Hausser (S). Je crois que le débat que nous vivons ce soir ressemble plus à une discussion de la camora de Naples ou de la mafia de Sicile ! (Chahut. La présidente agite la cloche.) Mon Dieu, que de salades pour bétonner, pour empester, pour nous casser les oreilles de manière permanente... Je crois que Monsieur Prix devrait faire l'effort de contrôler le prix de certaines chaussures à Genève !
Une voix. Dumas est socialiste, débrouille-toi !
M. Dominique Hausser. Oui, il est socialiste de nom, il est de la gauche caviar et il fait partie des nombreux politiciens qui sont mis en examen, parce qu'ils n'ont pas respecté le rôle qui devait être le leur... Et nous nous trouvons effectivement dans une situation extrêmement désagréable !
Mesdames et Messieurs, en 1995, le gouvernement était prêt à négocier, sous forme de dérogation, un projet avec une société dont le directeur des affaires dites générales est aujourd'hui en situation difficile, après quelques années de fuite... Ce point me semble quand même assez important pour ne pas discuter de manière purement locale, pour ne pas accepter, sous prétexte de développer quelques emplois, une potentielle activité économique pour le canton... (Brouhaha. Claquements de pupitre.)
La présidente. Monsieur Serex, Monsieur Vaucher, s'il vous plaît !
M. Dominique Hausser. ...pour ne pas accepter le massacre d'un espace vert supplémentaire qui n'a aucune raison d'être !
Mesdames et Messieurs, vous prétendez que la gauche s'oppose à tout développement de Genève. Je peux vous dire que c'est faux : nous savons parfaitement choisir. Croyez-vous que, sans la gauche, l'extension de Palexpo existerait ? (Exclamations.) La réponse est non ! Or, Mesdames et Messieurs, cette extension a une envergure beaucoup plus importante pour l'avenir de la Genève internationale qu'une vulgaire station-service à la frontière !
M. John Dupraz (R). Une panne de train m'a empêché de suivre le début des débats... (Exclamations et rires.)
Une voix. Vive l'automobile !
M. John Dupraz. Non, moi je suis un écolo praticien ! Je prends les transports publics qui, en l'occurrence, étaient en panne durant une heure et demie à Fribourg. C'est pourquoi je n'ai pas pu participer au début de ce débat, et je le regrette !
Cela dit, j'ai écouté avec intérêt l'intervention de M. Grobet notamment. M. Grobet, tout comme moi, a beaucoup de défauts...(Exclamations et rires.) mais il a eu une grande qualité lorsqu'il était conseiller d'Etat. Je vous rappelle que c'était la haute conjoncture, qu'un certain nombre de gens dans ce canton auraient même bétonné le Jet d'eau et qu'il a su faire preuve de rigueur et imposer des restrictions. Cette rigueur, pour beaucoup, était d'ailleurs excessive et certains, à l'époque, m'accusaient même d'être son complice, en disant que la Chambre d'agriculture et son président Dupraz s'opposaient à tout déclassement et ne voulaient rien faire ! C'était de bonne guerre. Comme disait ma grand-mère, on ne jette des pierres qu'aux arbres qui portent des fruits !
A cette époque difficile, si M. Grobet était un opposant acharné de l'autoroute en sa qualité de député, la Chambre d'agriculture elle-même avait déclaré que c'était la dernière concession qu'on pouvait faire quant à l'empiétement sur la zone agricole. Lorsque M. Grobet est arrivé au pouvoir au Conseil d'Etat, je l'ai approché au sujet de l'évitement de Plan-les-Ouates - évitement que nous avions voté mais que je n'avais pas soutenu, car j'étais pour le tracé du vallon des Vaulx, qui a finalement été réalisé. Je lui ai fait aimablement remarquer qu'à mon sens on avait fait une erreur. Il m'a répondu : «C'est vrai, on était absorbé par la presqu'île de Loëx et ce qu'on a décidé là n'est peut-être pas très bien. Allez, on recommence tout, on repart de zéro, on réalise le vallon des Vaulx !»
A l'époque, nous étions les deux seuls contre tous, puis nous avons travaillé et convaincu ce parlement et l'autorité fédérale. Aujourd'hui, je prends pratiquement tous les jours cette bretelle d'autoroute pour aller en ville, bretelle qu'on pourrait appeler la bretelle Grobet-Dupraz ou Dupraz-Grobet... (Exclamations.) Il faut reconnaître que cette réalisation est bien intégrée dans le site et que, si M. Grobet était un ardent opposant en sa qualité de député - il avait rédigé le rapport de minorité contre l'autoroute - il l'a réalisée avec maestria, en maîtrisant notamment les oppositions. A ce jour, je n'ai encore jamais entendu un habitant se plaindre des perturbations que pourrait causer l'autoroute, je n'ai encore vu aucune organisation de protection de la nature soutenir qu'elle ne s'intègre pas dans le paysage. A cet égard, je voudrais rendre hommage à M. Matthey, l'ancien chef du Service des forêts, du paysage, de la chasse et de la pêche à l'époque, qui a fait un travail remarquable pour l'intégration de cette autoroute.
Bien. J'en viens au projet de restoroute. Il est vrai que, si on s'en tenait rigoureusement à des considérations de principe, à savoir aucun empiétement sur la zone agricole, il faudrait refuser cette réalisation. Mais, Monsieur Grobet, en ce qui concerne la renaturation de l'Aire à Lully, qui empiète sur vingt à quarante hectares de zone agricole, je ne vous ai pas entendu ! Or, c'est là un empiétement que j'ai aussi de la peine à comprendre, d'autant que l'on veut renaturer une rivière où il n'y a pas d'eau les trois quarts de l'année !
En fait, la construction de ce restoroute est imposée par sa destination et n'est pas soumise à la législation cantonale, en droit. Et si je pense que M. Moutinot a été raisonnable de déposer ce projet de loi, je regrette, Mesdames et Messieurs, qu'en commission vous ne soyez pas entrés en matière et que la gauche majoritaire n'ait pas suivi son magistrat sur un projet peut-être plus restreint. Il est quand même dommage que, pour des questions de dogme, on refuse ce restoroute, qui pourrait être la porte de Genève et de la Suisse, où nous pourrions présenter nos produits, les produits agricoles, les produits de l'industrie genevoise, dont nous pourrions faire un lieu de communication et d'échange. J'ai de la peine à admettre ce refus, parce que même la Chambre d'agriculture a accepté le projet, à condition que les produits agricoles soient présentés.
Enfin, je suis assez catastrophé, Madame la présidente, par les interventions de votre ancien président de parti et de votre président actuel : je dois dire que vous méritez mieux que cela ! Il est regrettable qu'on soit incapable de dialoguer et de trouver une solution de compromis. J'ai connu un temps où le parti socialiste appuyait ses magistrats. Je constate que, maintenant, il se confine dans un rôle d'opposition systématique et destructeur. Si vraiment on continue dans cette voie, on va faire de Genève un village gaulois où il n'y aura bientôt plus que deux ou trois paysans, vieux barbons comme moi !
Mesdames et Messieurs les députés, ce projet est raisonnable et nous le voterons. Je regrette qu'en commission la gauche ait fait preuve d'absolutisme et de dogmatisme, contre l'avis de son propre magistrat.
M. René Koechlin (L). Au préalable, je voudrais apporter une rectification à ce qu'a déclaré tout à l'heure M. Grobet, dont la mauvaise foi, en l'occurrence, n'a d'égal que sa verve et les décibels qui émanent de son discours... (Commentaires.) Voulez-vous que nous nous confrontions avec un décibelomètre ?
Contrairement à ce qu'il a déclaré tout à l'heure, le parking de l'Alhambra a fait l'objet d'un vote populaire et a été plébiscité par le souverain !
M. Christian Grobet. L'Alhambra ? Vous êtes amnésique !
M. René Koechlin. Oui, parfaitement ! Il s'agissait d'un contre-projet cantonal qui a été voté par le peuple ; et c'est la Ville qui n'a pas donné suite ! C'est vous qui êtes amnésique !
Deuxièmement, nous n'avons pas lancé un référendum contre le parking de Genève-Plage, mais contre les amendements pendables proposés par les Verts et soutenus par la gauche. Voilà pour la rectification !
M. Grobet, ensuite, a évoqué les principes de protection de l'environnement. Nous adhérons tous à ces principes, naturellement, tant qu'on en reste aux principes, évidemment ! En l'occurrence, ce sont de grands principes en regard d'une bien modeste aire autoroutière, et c'est une modeste aire autoroutière en regard de la grande, de l'immense autoroute de contournement que nous avons réalisée dans ce canton et dont M. Grobet, à son corps défendant il est vrai, a dirigé les travaux alors qu'il était chef du département des travaux publics. Cet ouvrage résultait, lui aussi, d'un vote populaire, vous vous en souvenez, vous ne le contestez pas ? C'était un référendum et le peuple a donné raison au Grand Conseil.
Le peuple est souverain, c'est une évidence. Alors, soumettons-lui ce projet et nous verrons bien ! Mais vous savez qu'en le refusant ce soir vous échapperez à ce verdict, puisque, lorsque l'on refuse un projet, il n'est tout simplement pas soumis au peuple. Le tour est joué : on refuse le projet et le peuple n'a pas à se prononcer ! Belle leçon de démocratie ! Mais rassurez-vous, nous reviendrons devant ce Grand Conseil avec un nouveau projet de loi. Dans un an, alors que nous aurons, comme il se doit, repris la majorité, nous le voterons ; vous lancerez alors un référendum et là, enfin, le peuple pourra se prononcer et tout rentrera dans l'ordre. Mais, Mesdames et Messieurs, à ce moment-là il sera probablement et même certainement trop tard, parce que nos voisins français auront réalisé l'aire autoroutière que ce soir vous refusez. Ils l'auront réalisée à quelques encablures du site que vous voulez protéger, de sorte que, du point de vue de la sauvegarde de l'environnement, vous n'aurez rien gagné, sinon peut-être un projet qui architecturalement parlant sera moins bon, et nous n'aurons alors que les yeux pour pleurer !
Enfin, Madame la présidente, permettez-moi de montrer à ce Grand Conseil que, dans bien des cas, l'automobile et l'agriculture sont conciliables ! (M. Koechlin montre deux pages de journal où figurent côte à côte une automobile et une vache. Rires et exclamations.)
La présidente. Bien ! Monsieur le député Grobet, par souci d'équité, si vous êtes d'accord, vous ne prendrez la parole que durant huit minutes et demie, ainsi la droite sera contente...
M. Christian Grobet (AdG). J'aimerais tout d'abord dire à M. Koechlin que nous avons tous des pertes de mémoire. Vous êtes donc parfaitement excusable, Monsieur, d'avoir oublié que l'initiative cantonale de M. de Tolédo et des commerçants du centre-ville demandant la construction d'un parking à l'Alhambra a été massivement rejetée par le peuple, ad acta.
Ensuite, j'ai été très sensible aux propos de M. Dupraz. Je ne l'en remercierai pas, mais je dirai qu'il a été une des personnes qui a le plus soutenu le chef du département des travaux publics à l'époque pour réaliser l'autoroute de contournement.
Par contre, je remercierai de tout coeur M. Beer. En effet, je m'identifiais peut-être un peu abusivement à l'inspecteur Colombo, mais il est vrai que, depuis environ vingt-trois ans, je me demandais comment j'avais réussi ce tour de force d'être élu au Conseil d'Etat avec cent vingt-deux voix d'avance sur M. Werner! Je vous remercie, Monsieur Beer, de me l'avoir enfin fait découvrir, je dois dire que je n'y avais pas pensé : c'est grâce à une cinglante défaite en votation populaire que j'ai réussi à être élu au Conseil d'Etat ! En effet, en tant que modeste représentant de mon parti à l'époque, je faisais partie de celles et ceux qui étaient opposés au projet d'autoroute, parce que nous considérions qu'il était mal intégré. Cela étant, Monsieur Koechlin, il est évident que j'ai toujours été respectueux de la décision populaire. C'est un fondement de notre démocratie, je l'ai dit tout à l'heure, le peuple a toujours raison. Dès lors, une fois élu au Conseil d'Etat, je n'y suis bien entendu pas allé à la retirette : je me suis fait un point d'honneur à réaliser cette autoroute dans des délais extrêmement rapides. Nous avons ainsi réussi, avec toute une équipe, à réaliser un ouvrage qui était bien intégré et qui était fort différent de celui qui avait été soumis en votation populaire.
Pour le reste, je suis resté fidèle à ce que le Grand Conseil a voulu en 1979, à savoir limiter les emprises agricoles. Aussi, quand la question a été posée au Conseil d'Etat s'agissant de réaliser le relais autoroutier, j'ai bien évidemment cherché un site en zone à bâtir. Ce site a été trouvé à Blandonnet, il a été retenu par le Conseil d'Etat et nous avons pris les dispositions pour qu'il puisse accueillir un relais autoroutier. On a réalisé le passage sous voie de la ligne de chemin de fer, on a prévu l'hôtel à l'arrière de la zone de Blandonnet et, contrairement à ce que Mme Bugnon a déclaré tout à l'heure - mais elle est tout à fait excusable, compte tenu du nombre de contrevérités qui ont été avancées au sujet de ce dossier - l'autorité fédérale n'a jamais refusé cette implantation. Au contraire, l'autorité fédérale a accepté le site de Blandonnet, avec les accès, et c'est sur la base de l'approbation du Conseil fédéral que le projet a été mis au point et accepté par le Conseil d'Etat.
Ici, puisque certains aiment bien parler de blocages, cela ne me gêne pas du tout de dire, n'étant plus au Conseil d'Etat, que c'est mon ancien collègue M. Jean-Philippe Maitre qui est intervenu pour demander que ce projet soit bloqué pendant cinq ans. En effet, il était prévu au départ que l'hôtel serait un hôtel deux étoiles pour les touristes de passage qui n'ont pas l'habitude de fréquenter les palaces genevois à quatre étoiles. Mais les palaces genevois se sont mobilisés contre cet hôtel deux étoiles et M. Maitre a obtenu que la majorité du Conseil d'Etat décide de bloquer le dossier pendant cinq ans. Aussi, lorsque M. Dessimoz parle de blocages, il faut savoir que, oui effectivement, la droite a bloqué ce projet !
Finalement, celui-ci était prêt à être réalisé, il n'y avait pas de problème, mais M. Joye est arrivé au Conseil d'Etat et il n'a pas voulu le réaliser sur ce site, qui ne lui paraissait pas assez prestigieux. Il a voulu le réaliser à Versoix, ce qui a été refusé par l'autorité fédérale, parce qu'il n'y avait pas la distance nécessaire par rapport à la station-service de Rolle, et c'est ce qui l'a amené ensuite à choisir le site de Bardonnex.
Pour ma part, je regrette profondément que le site de Blandonnet ait été abandonné. Il était le plus rentable économiquement, au niveau de l'emplacement de la station-service, au niveau de l'hôtel qui pouvait fonctionner toute l'année et qui était relié à la fois à l'autoroute et à la route de Pré-Bois. Je regrette de devoir le dire au nouveau Conseil d'Etat, parce que personnellement j'étais favorable, et l'Alliance de gauche est favorable, à la réalisation d'un restoroute, mais dans une zone à bâtir. Je regrette notamment que le Conseil d'Etat ait prévu des voies d'accès et de sortie de l'autoroute qui, aujourd'hui, empêchent toute réalisation à Blandonnet, et qu'il l'ait fait d'une manière illégale, puisque la loi cantonale d'application de la loi fédérale sur les routes n'a pas été respectée et que les projets d'accès n'ont pas été soumis à l'approbation de ce Grand Conseil. J'estime que, là, une grave faute politique a été commise, car c'était une solution de rechange.
A cet égard, Monsieur Koechlin, quand vous dites que nous n'avons pas proposé de projet, c'est faux et vous le savez, puisque nous avons déposé, il y a déjà trois ans, un projet de loi visant à réaliser le relais autoroutier à Blandonnet. Alors, ne dites pas que nous n'avons pas fait de proposition. Nous avons fait une proposition concrète qui était parfaitement réalisable... (Commentaires.) Il est vrai qu'entre-temps l'Office fédéral des routes a rendu sa décision. Mais, par expérience, je sais que les responsables de l'office sont très compréhensifs : quand on leur demande d'accepter quelque chose, ils l'acceptent, et si on leur demande ensuite de refuser, ils le font également... (Exclamations.) Parfaitement ! Et je sais très bien comment la décision a été prise, à Berne, de refuser la réalisation du restoroute à Blandonnet, qui entre parenthèses, pour parler fiscalité, Monsieur Beer, se trouve sur la commune de Vernier ! J'ai compris que, bien que vous soyez le responsable des espaces verts de la Ville de Genève, votre préoccupation n'est en tout cas pas de préserver les espaces verts dans le canton, ce qui est assez paradoxal ! (Brouhaha.) Mais, à part cela, je constate que vous avez surtout besoin d'une leçon de géographie ! En effet, en tant que directeur à la Ville de Genève, vous devriez quand même savoir que l'autoroute de contournement ne passe pas sur le territoire de la Ville et qu'il n'y aurait donc jamais eu de retombées fiscales pour la Ville de Genève ! Là, je vous donne un zéro de géographie ! Les éventuelles retombées fiscales auraient été pour la commune de Vernier, qui est une des plus défavorisées du canton sur le plan fiscal. Voilà ce qu'il en est de la fiscalité, mais malheureusement ce projet a été refusé.
Pour ma part, je dis simplement que les choses évoluent. Il y a dix ans, il aurait été impensable, par exemple, de prévoir l'extension de Palexpo par-dessus l'autoroute, elle aurait été refusée par Berne. Aujourd'hui, Monsieur Moutinot, je sais que l'autorité fédérale aurait accepté le restoroute à Vernier si le canton avait vraiment voulu le faire à cet endroit-là. Et je dis que le Conseil d'Etat a fait une faute politique en renonçant au site de Vernier, comme nous l'avions demandé et comme le Conseil d'Etat l'avait décidé il y a quinze ans, parce que la seule solution qui reste aujourd'hui, c'est celle de Bardonnex. Je regrette que nous nous trouvions devant ce dilemme, mais, pour nous, la solution de Bardonnex n'est pas acceptable. Il faudrait effectivement trouver une solution dans le secteur de l'aéroport.
En l'occurrence, puisque vous parlez de gros sous et qu'il n'y a que cela qui vous intéresse, Mesdames et Messieurs, je vais vous dire ce qui rapporte : ce n'est pas le restaurant, ce n'est pas l'hôtel - qui ne marchera pas, parce qu'il sera mal placé - mais c'est la pompe à essence. Il suffit de deux pompes à essence... (Commentaires.) Mais oui, Monsieur Vaucher, parce que les redevances sont payées sur les litres de benzine vendue ! Si vous voulez faire du fric, puisque cela semble votre préoccupation première, eh bien installez ces deux pompes de part et d'autre de l'autoroute, à côté de l'aéroport. Je vous assure que c'est là où cela marchera le mieux ! (Applaudissements.)
M. Pierre Marti (PDC). J'ai été très heureux d'entendre une leçon de politique, un rappel de nos responsabilités en tant que députés, surtout sur des points aussi essentiels que l'aménagement équilibré de notre territoire, la préservation de la zone agricole dans notre canton, sur ce territoire hyper restreint, comme cela a été dit. Mais alors, je n'arrive pas bien à comprendre le discours des députées et députés de l'Alternative, qui nous disent tout à la fois qu'il ne faut pas toucher la zone agricole, qu'il faudrait construire un certain nombre de logements...
Mme Fabienne Bugnon, rapporteuse de majorité. Quel mélange !
M. Pierre Marti. Ce n'est pas un mélange, Madame, je regrette ! Pour notre part, nous voulons véritablement un aménagement équilibré de tout notre canton, pas seulement de la zone de Bardonnex, mais de tout notre territoire. Lorsqu'il s'est agi de construire des HLM dans le périmètre de Soubeyran, ce n'est pas l'Entente qui s'y est opposée ; c'est bien vous, Mesdames et Messieurs d'en face, qui avez lancé un référendum qui a abouti. Or, c'est bien de cela que l'on parle : il s'agit d'avoir, comme l'a dit très justement M. Grobet, une vision globale de notre territoire. Cette vision globale, vous voulez bien l'avoir quand elle vous arrange, mais vous ne voulez pas l'avoir systématiquement. Lorsqu'il s'agit de construire des logements ou des aménagements qui sont absolument nécessaires, vous avez un langage différent. Faut-il préserver absolument la zone agricole ? Quelle est votre cohérence dans les différents votes cantonaux et municipaux, notamment ceux concernant la Ville de Genève ? Je pose la question, j'espère avoir une réponse !
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, il reste encore cinq orateurs. Je vous propose de clore la liste des inscriptions !
M. Michel Ducret (R). On fait ce soir trop d'histoire et pas assez de lendemain ! La question qui se pose dépasse largement le seul problème du restoroute de Bardonnex. Aucun projet isolé ne vaut pour lui-même et, au travers de l'aménagement du territoire, la question est de savoir quel avenir nous souhaitons pour Genève et pour nous tous.
La majorité ne nous propose finalement comme alternative que l'élevage de moustiques dans les vallons renaturés de l'Aire et du Foron, avec peut-être en prime le retour de la malaria ! C'est une politique qui, en vérité, cache l'exportation. L'exportation des nuisances vers la couronne voisine avec l'alibi régionaliste, vers Vaud pour les plus aisés, vers la France voisine pour les moins favorisés, avec en prime pour Genève, à long terme, l'exportation des revenus fiscaux et, peu à peu, celle des emplois qui se créent sur les équipements que les Genevois ont déjà consentis et payés. Une exportation, finalement, de ce qui fait la vie des femmes et des hommes de ce canton. C'est un refus, une absence de responsabilité vis-à-vis de toute la région.
Pour le groupe radical, ce ne sont certainement pas des lendemains qui nous chantent. L'attention à l'environnement est certes respectable, mais elle doit être aussi respectueuse des êtres humains qui font partie de ce biotope, avec leurs besoins, tous leurs besoins et même les déplacements et les inconvénients qui y sont liés ! Cette politique d'exportation de notre propre avenir ne conduit, Mesdames et Messieurs, nulle part. Elle n'est qu'arrogance, prétention vis-à-vis de nos voisins, elle est irresponsable. Cette affaire de restoroute, qui ne serait rien si elle ne s'inscrivait dans un tel contexte de négativisme, devient ainsi emblématique, et donc émotionnelle et dépourvue de toute rationalité.
A vouloir trop complaire aux quelques habitants du coin qui ne sont pas contents et aux grenouilles qui pourraient peupler le pré voisin, on verse dans une forme de populisme, certes qui n'est pas teinté de racisme et donc moins méprisant que celui que pratiquent certains partis de droite ailleurs, mais un populisme tout de même qui, sous couvert d'une attitude plus noble, n'est pas une attitude politique qui soit noble : ce n'est que de la courte vue, c'est ce qui est dramatique pour les gens de Genève et c'est les gens de Genève que nous prétendons défendre !
M. Philippe Glatz (PDC). Beaucoup de choses ont été dites ce soir et parmi elles beaucoup de choses très excessives. Or, tout ce qui est excessif peut aussi devenir insignifiant... M. Hausser a cité la camora de Naples, la mafia de Sicile... Par ailleurs, de graves fautes politiques auraient été commises dans cette affaire...
M. Brunier, quant à lui, nous rappelait plus modestement que refuser une station-service ne serait pas un drame pour Genève : en fait, Mesdames et Messieurs, nous sommes simplement en train de parler de la possibilité d'instaurer un relais autoroutier à Bardonnex !
Puis, j'ai entendu M. Grobet nous dire qu'il aurait préféré que le projet se réalise à Blandonnet, qu'il ne pouvait accepter qu'une grave faute politique ait été commise dans le passé et que, par conséquent, aujourd'hui il convenait de ne plus rien faire du tout. Est-ce la bonne attitude ? Sous prétexte que des fautes politiques ont peut-être été commises dans le passé, faut-il qu'aujourd'hui nous soyons bloqués ?
En fait, j'ai peur que les oppositions au projet ne reposent sur pas grand-chose. Essayons de les examiner. J'ai lu attentivement le rapport de Mme Bugnon, mais celui-ci ne nous explique pas vraiment dans le détail en quoi ce projet est négatif. Il dit simplement que le projet est contesté par les riverains réunis au sein de l'association ARIA et par le WWF, oppositions disponibles au DAEL. Ce rapport dit aussi que, s'agissant du site de Blandonnet tant souhaité par M. Grobet, «la difficulté réside de manière évidente dans l'exiguïté du terrain». Une réalisatiom est donc impossible à Blandonnet ! Puis, ce rapport nous indique qu'il y a encore eu quelques auditions. Il fait part de la position du Conseil d'Etat, expliquant que le Conseil d'Etat a fait tous les efforts possibles pour essayer d'harmoniser les positions, mais que ses efforts n'ont servi à rien. Par conséquent, la majorité de la commission de l'aménagement vous recommande donc, Mesdames et Messieurs, de suivre ses conclusions et de rejeter ce projet purement et simplement.
C'est un peu léger, Madame Bugnon ! Et je crois que M. Dupraz a raison quand il parle de dogme, quand il dit qu'aujourd'hui on est incapable de dialoguer, que dans cette République on est incapable d'envisager quoi que ce soit pour l'avenir. Pour ma part, Mesdames et Messieurs, je crains que, dans quelques années, nos enfants, paraphrasant Coluche, disent en parlant de nous : «Oui, mon père était député, ma mère ne travaillait pas non plus !»
M. René Koechlin (L). Je serai extrêmement bref, le temps de nous rafraîchir la mémoire à M. Grobet et à moi-même. D'aimables collègues m'ont fait remarquer qu'en ce qui concerne l'Alhambra l'initiative pour un parking de six cents places avait été rejetée par le peuple, mais qu'en revanche le contre-projet proposé par le Conseil d'Etat et voté par ce Grand Conseil avait été, lui, plébiscité par le souverain; il prévoyait un parking comportant un peu moins de trois cents places. Voilà la réalité, pour apporter toute la lumière sur les contrevérités que nous avons proférées tout à l'heure, M. Grobet et moi-même.
M. Hervé Dessimoz (R), rapporteur de minorité. Je voudrais d'abord intervenir sur les derniers propos de M. Grobet - je reviendrai ensuite sur les premiers... M. Grobet - qui n'est plus là... - m'a reproché d'avoir relevé que Blandonnet avait été victime de blocages. Personnellement, je déteste les blocages et il le sait, puisque depuis douze ans je les combats dans ce parlement. Par contre, ce que M. Grobet a dit sur les dessous de l'affaire de Blandonnet me navre et m'interpelle. J'ai le sentiment que les actions actuellement développées contre le dossier de Bardonnex relèvent de la même logique. Je le regrette, car l'on ne construit rien sur des règlements de comptes, ni sur le passé.
A M. Hausser je dirai que ses mauvaises manières portent atteinte à l'image que j'ai du parti socialiste. Prendre prétexte des affaires Sirven et Dumas pour démolir ce projet est inadmissible. Inscrire le propos dans la ligne de ceux qui ont été tenus à propos de la Suisse lors de l'affaire des fonds en déshérence, est tout à fait déplorable. Derrière la société Elf, qui est mise en cause dans un dossier qui sera traité par la justice... (Commentaires de Mme Wenger.) ...il y a des dizaines de milliers de personnes, Madame, tout à fait honorables, honnêtes, et il n'y a pas de raison d'en ricaner comme vous le faites ! Dans cette société, il y a des travailleurs, des personnes sérieuses, et ce n'est pas pour quelques affaires malsaines que vous devez mettre en péril le nom d'une société, qui au demeurant apporte des emplois et des choses extrêmement positives dans le monde d'aujourd'hui. Pour ma part, je respecte ces apports, comme beaucoup d'autres personnes les respectent.
Quant à vous, Monsieur Brunier, vous avez parlé du projet de Bardonnex comme étant celui de M. Joye. Cela, je ne l'accepte pas ! C'est le dossier du Conseil d'Etat de l'ancienne législature, et non le dossier de M. Joye comme vous l'avez dit. De même, dans la présente législature, la majorité que vous représentez a le droit de s'opposer à ce projet, mais elle doit en assumer les conséquences. Aussi, ne venez pas dire que la politique de M. Joye va coûter deux millions à l'Etat de Genève : c'est votre politique. Vous décidez, parce que votre ego vous y pousse, de refuser ce projet, cela coûtera de l'argent et vous assumerez cette décision !
J'ai quelques remarques à faire maintenant sur le débat initial. Certains ont parlé de la plate-forme de Valleiry comme étant une alternative à la plate-forme autoroutière de Bardonnex. Certes, c'est le cas pour les gens qui descendent sur Lyon, en direction de Marseille. Mais que faites-vous des personnes qui vont en direction du tunnel du Fréjus, ou qui reprendront la direction du tunnel du Mont-Blanc dès l'automne prochain ? Pour eux, il n'y a rien du tout, mais tout le monde s'en fout ! On cite Valleiry pour dire qu'il existe quelque chose de l'autre côté de la frontière, mais on oublie que c'est vingt kilomètres plus loin à l'ouest.
D'autre part, la plate-forme est un lieu de repos bien sûr, mais aussi un lieu de contact. Ceux qui voyagent à travers l'Europe savent que, sur les plates-formes autoroutières, on trouve aussi des offices du tourisme, des points de contact qui permettent aux voyageurs de se renseigner sur les possibilités d'hébergement, d'effectuer des réservations... Lorsque je vous entends, j'ai le sentiment qu'à Genève, c'est : circulez, il n'y a rien à voir ! Monsieur Etienne, contrairement à ce que vous avez dit tout à l'heure, la halte de Genève n'est pas une invention des partis de la minorité que nous représentons : la halte de Genève est une réalité historique. Je pars donc du principe que c'est un devoir pour la Genève internationale de créer cette plate-forme, lieu de contact avec les gens qui voyageront du nord au sud.
M. Grobet - qui n'est toujours pas là... - a dit qu'il fallait avoir l'humilité d'accepter le verdict populaire. Je lui donne raison à 100%. Et, en l'occurrence, il n'a pas le droit de s'approprier le savoir, ou de préjuger des attentes du peuple de Genève à propos de la circulation routière, à propos de la construction de cette plate-forme, de sa nécessité, de son intérêt, parce que justement le débat populaire n'a pas eu lieu, contrairement à ce qu'on dit.
Compte tenu de la controverse, j'ai d'ailleurs dit récemment dans la presse qu'il serait judicieux de lancer une initiative populaire. Je pars du principe que c'est vraiment la seule voie pour permettre au peuple de dire ce qu'il pense. Je demande ce soir à tous les gens de bonne composition d'envisager de déposer une motion du parlement qui appellerait le Conseil d'Etat à prévoir un vote populaire, pour savoir si Genève souhaite ou non cette plate-forme autoroutière et afin que cette décision n'appartienne pas seulement à ce Grand Conseil.
Mme Fabienne Bugnon (Ve), rapporteuse de majorité. Quelques réflexions sur les différentes interventions. Je n'ai pas entendu tout ce qu'a dit M. Glatz, mais il a émis des critiques assez virulentes sur mon rapport. Que ce rapport ne lui plaise pas, cela m'est égal, mais il ignore sans doute une chose, puisqu'il ne siège pas à la commission d'aménagement, c'est qu'il s'agissait de rédiger un rapport sur une modification de limites de zones et non sur la construction du restoroute! Cela dit, il est tout excusé, puisqu'il ne connaît pas le fonctionnement de la commission d'aménagement.
Je relèverai aussi une chose erronée dans le mémoire rédigé par Mes Jacquemoud et Stanislas qui a été lu tout à l'heure. Dans ce mémoire, il est dit que le projet de Blandonnet avait suivi la même procédure que celui de Bardonnex, c'est-à-dire une procédure par voie dérogatoire. Mais, entre les deux projets, il y a quand même une différence de taille, c'est qu'à Bardonnex il s'agit d'une zone agricole, qui demande donc un déclassement, alors qu'à Blandonnet il s'agit d'une zone à bâtir.
Ensuite, je remercierai M. Etienne de son intervention, car il est vrai que les pressions médiatiques ont été très fortes, les pressions par courrier aussi. Il y avait longtemps que je n'avais pas reçu autant de courriers négatifs. Quant à l'affirmation, en pleine page d'un quotidien, selon laquelle, si les conclusions du rapport sont adoptées, il en coûtera probablement un million à l'Etat, soit le dédommagement que demandera la société pétrolière Elf en cas de refus, elle est un peu facile. Elle résulte d'un simple copier-coller du mémoire qui nous a été donné et il faudrait quand même se renseigner sur les prétentions que Elf peut avoir. Quant à moi, je pense que ces prétentions, qui découlent de la promesse d'un magistrat, sont irréalistes et que le Conseil d'Etat, qui va prendre la parole en fin de débat, pourra nous le confirmer.
Enfin, j'ai trouvé choquant que M. Beer nous dise que M. Hottelier représente peu de chose. D'abord, il représente sa propre personne. Ensuite, trois familles et cinquante personnes, peu importe qui sont ces gens, peu importe qui est derrière, ceux qui nous importent, Monsieur Beer, ce sont les générations futures auxquelles nous aimerions laisser ce terrain!
Je terminerai en répondant à M. Vaucher, qui disait que la Chambre d'agriculture soutenait le projet. Je n'ai pas souvenir, Monsieur Vaucher - mais peut-être ma mémoire me fait-elle défaut - d'avoir entendu la Chambre d'agriculture dans ce dossier en commission d'aménagement. Vous devez donc avoir des informations dont nous ne disposons pas !
Enfin, s'agissant de la qualité du terrain, M. Barthassat, la «Tribune», tout le monde a dit que c'était un terrain caillouteux, une très mauvaise terre. Je ne m'y connais pas très bien en terre agricole, mais je me rappelle que le propriétaire, il y a quelques années, nous avait dit qu'il s'agissait d'une de ses meilleures terres. Alors, je ne sais pas qui il faut croire, mais il y a beaucoup de désinformation dans ce dossier ! (Applaudissements.)
M. Laurent Moutinot. Mesdames et Messieurs les députés, en entendant certains d'entre vous et en particulier M. Koechlin, j'ai craint que le débat de ce soir ne porte sur le salut de la République... En entendant M. Brunier, j'ai cru qu'il nous annonçait le Grand Soir...
Il faut raison garder : ce projet n'a de toute évidence pas l'importance de la halle 6, ni l'importance de Sciences III, ni celle de l'acquisition des terrains de Battelle. C'est un projet d'aménagement d'une certaine importance, qu'il convient d'examiner rationnellement et tranquillement. Je vais vous faire part de la manière dont le Conseil d'Etat l'a abordé, quelles décisions il a prises et, par conséquent, quelles recommandations il forme à l'intention du Grand Conseil.
Comme il a été rappelé, plusieurs des candidats au Conseil d'Etat en 1997 avaient indiqué qu'ils étaient prêts à rediscuter, à revoir ce projet. Nous n'avons jamais signé que nous le stopperions net. Nous avons donc tenu cet engagement en réexaminant ce dossier. Le deuxième paramètre était le concours qui avait été lancé, suivant les règles en usage en matière de concours, et qui avait désigné une société lauréate. Nous avions enfin la ferme volonté de ne pas agir par voie dérogatoire, dans ce dossier comme dans aucun autre, et nous avons considéré qu'un dossier de cette importance justifiait pleinement qu'il vous soit transmis par le biais d'un projet de loi de déclassement, pour permettre au parlement de déterminer son point de vue et, cas échéant, à la population, par le biais d'un référendum, de se prononcer.
C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat vous a transmis le projet de loi de déclassement, en vous recommandant initialement son acceptation. Lorsqu'il s'est avéré, en commission, que l'emprise sur la zone agricole était telle que ce projet allait à l'échec - M. Dethurens a rappelé tout à l'heure qu'effectivement il est un peu gourmand de zone agricole - nous avons essayé de le redimensionner, de sorte à le faire passer devant vous. D'une part, nous avons demandé au lauréat du concours de bien vouloir redimensionner son projet, ce que, non sans quelques difficultés, il a fait. D'autre part, nous avons demandé aux douanes fédérales s'il n'était pas possible qu'elles renoncent à une partie de leur gigantesque plate-forme autoroutière, pour précisément y installer le restoroute. La réponse des douanes fédérales a été catégoriquement négative. Toutefois, le Conseil d'Etat a persisté à penser que réaliser un restoroute à Bardonnex était une bonne idée, dans le cadre d'un projet redimensionné n'ayant une emprise sur la zone agricole que de 20 000 m2 et non plus de 40 000 m2.
En effet, dans la pesée des intérêts qu'il convient de faire pour ce projet, il y a en sa faveur des intérêts économiques, des intérêts fiscaux, des intérêts pour l'emploi, des intérêts touristiques et des intérêts pour l'agriculture - on a parlé de vitrine de l'agriculture genevoise. Ce sont des intérêts à prendre en compte. De l'autre côté de la balance, il y a des intérêts environnementaux, des nuisances pour l'environnement, qui doivent également être pris en compte. C'est la raison pour laquelle un projet de cette nature doit avoir une dimension modeste et ne doit, en aucune manière, être une cathédrale...
M. Claude Blanc. Comme le Bachet-de-Pesay ?
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Nous n'allons pas, Monsieur Blanc, laisser, comme cathédrales du XXIe siècle, des stations-service! Je pense que nous pouvons laisser de meilleurs témoignages à nos descendants...
J'aimerais maintenant répondre au sujet de Blandonnet. J'ignore, Monsieur Grobet, comment on obtient telle ou telle décision de l'Office fédéral des routes, mais j'ai quant à moi vu une décision, que je n'ai pas sollicitée, que je n'ai pas suggérée, catégoriquement négative. Quant à la construction des deux demi-jonctions autoroutières, il y a une divergence entre vous et moi sur la procédure à suivre. J'ai suivi celle que recommandait l'Office fédéral des routes pour deux ouvrages qui étaient notamment réclamés par les communes de Vernier et de Meyrin et qui correspondaient à la politique de transfert modal que nous suivons pour sortir les voitures de l'agglomération.
Une dernière remarque un peu désagréable, Monsieur Spinucci, mais vous m'en excuserez. J'ai trouvé très étonnant que vous fassiez en quelque sorte des catégories entre conseillers d'Etat et que vous imaginiez qu'un conseiller d'Etat socialiste ne pouvait être un bon conseiller d'Etat que s'il oubliait d'être socialiste! Ce n'est pas ainsi que je fonctionne. La totalité de ce que je vous ai dit aujourd'hui sur ce dossier reflète les discussions du Conseil d'Etat, qui vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à voter l'entrée en matière de ce projet de loi qui, cela fait, devra retourner en commission pour être redimensionné.
Mis aux voix, ce projet est rejeté en premier débat.