Séance du vendredi 1 décembre 2000 à 17h
54e législature - 4e année - 2e session - 58e séance

M 1367
17. Proposition de motion de Mmes et MM. Christian Brunier, Françoise Schenk-Gottret, Laurence Fehlmann Rielle, Anne Briol, David Hiler, Pierre Vanek, Christian Grobet et Jean Spielmann concernant les mesures d'accompagnement de la 3e voie CFF Genève-Coppet afin de dynamiser le transfert modal. ( )M1367

EXPOSÉ DES MOTIFS

Dans le cadre de leur programme Rail 2000, les CFF ont décidé de tripler la voie entre Genève et Coppet afin d'améliorer les prestations offertes aux usager-ère-s et de permettre l'accroissement des dessertes entre Lausanne et Genève.

Par ce triplement, selon ses initiateurs : « ...Les agglomérations de Genève et Lausanne gagneront en accessibilité et disposeront d'une offre de transports ferroviaires efficace, alternative avantageuse à l'automobile. »

Le but visé par ces transformations est donc l'amélioration du transfert modal route-rail par une offre accrue dans les domaines de la fréquence et de la rapidité des transports en commun et celui du confort des usagers et de l'environnement. Ces trains seront aussi moins bruyants et des installations antibruits (murs et haies) sont en cours d'installation.

Actuellement, on constate que le taux d'usager-ère-s du rail reste faible. Il est évident que l'amélioration du transfert modal route-rail souhaitée par le triplement de la voie entre Genève et Coppet, ne pourra se faire que si toutes les conditions sont réunies pour que les usager-ère-s potentiel-le-s soient réellement incité-e-s à prendre le rail et ainsi améliorer leur environnement.

On doit donc concevoir, en complément des mesures strictement ferroviaires, d'autres mesures incitatives d'accompagnement, soit :

1. des mesures physiques : aménagements et constructions ;

dès 1993, à la demande de la direction de l'arrondissement des CFF de Lausanne, le bureau d'ingénieurs RIBI & associés S.A. a étudié les concepts de transports. Puis deux ans plus tard, la Direction du 1er arrondissement des CFF, l'Office des transports et du tourisme du canton de Vaud et l'Office des transports et de la circulation de la République et canton de Genève ont élaboré un catalogue complet des mesures à prendre à l'attention des communes concernées ;

2) des mesures de transports : réorganisation et amélioration des transports en commun desservant le réseau CFF ;

3) des mesures économiques : tarifs attractifs et gamme d'abonnements étendue, construction de parkings proches des gares de départ, restrictions de parcage dans les centres-villes des destinations finales ;

4) des mesures de communication : prise de conscience de la problématique environnementale.

Le transfert modal ne pourra réussir sans réelle volonté politique. Si à travers les mots et les écrits, le gouvernement genevois montre une certaine volonté, dans les actes, les résultats sont moins probants. C'est pourquoi nous demandons :

un inventaire précis des mesures de compensation liées à cette 3e voie afin de réaliser concrètement le transfert modal,

et leur planification détaillée.

Sans ces mesures, la 3e voie risque d'augmenter simplement l'attractivité de certaines destinations et d'attirer davantage de personnes dans les villes, sans que ceci ne provoque une baisse du trafic routier.

En espérant que vous serez sensibles à la problématique soulevée, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les député-e-s, à soutenir cette motion.

Débat

M. Christian Brunier (S). Comme vous le savez, le programme Rail 2000 a permis de commencer les travaux pour tripler la voie CFF entre Genève et Coppet. L'objectif est le suivant : c'est bien sûr d'améliorer l'offre en matière ferroviaire, mais c'est aussi - c'est en tout cas l'objectif avoué au départ - de développer le transport modal de la voiture vers le rail afin de diminuer la pollution, ce qui est primordial, vous pouvez le concevoir ! Or, si l'objectif d'améliorer l'offre va être atteint par la construction même de cette troisième voie, rien de concret n'a été entrepris à ce jour pour réaliser un vrai transfert modal. Ceci est particulièrement inquiétant si l'on se réfère à l'exemple ou plutôt au mauvais exemple du RER zurichois. Ce mauvais exemple devrait vraiment nous inspirer pour en tirer un certain nombre de conséquences et ne pas renouveler les erreurs commises par nos amis zurichois. Je vous rappelle que le canton de Zurich a également mis en place un grand réseau RER afin de développer l'offre et de réaliser le transfert modal, mais il n'a pas défini, lorsqu'il a entrepris cet important travail, un peu comme nous sommes en train de le faire maintenant, une vraie politique de transfert modal. Le résultat a été le suivant : on a développé l'attractivité de Zurich, ce qui est peut-être une bonne chose, mais le nombre de voitures n'a pas du tout diminué. Bien au contraire ! Aujourd'hui, Zurich essaye de rattraper son retard en prenant des mesures d'urgence pour réaliser enfin ce transfert modal.

Nous devons donc établir aujourd'hui un catalogue précis de mesures dissuasives par rapport à l'automobile afin de pousser les gens à choisir le rail pour se rendre à Genève par la voie Genève-Coppet.

Pour ne pas copier le mauvais exemple de nos amis zurichois, cette motion invite le gouvernement à faire deux choses : premièrement, à mettre en oeuvre, en collaboration avec les différents partenaires cités dans cette motion, de vraies mesures d'accompagnement propres à assurer ce transfert modal. Deuxièmement, à présenter à ce Grand Conseil un catalogue concret de mesures et un planning détaillé de mise en oeuvre de ces mesures.

Nous vous invitons bien sûr à soutenir cette motion et à la renvoyer au Conseil d'Etat afin de recevoir dans les plus brefs délais un rapport, un catalogue de mesures concrètes et un planning. 

M. Pierre Ducrest (L). Ainsi donc, je crois entendre à nouveau le débat d'hier soir concernant un certain parking et des mesures d'accompagnement.

Il est certes intéressant d'avoir un transport supplémentaire par une troisième voie ferroviaire. Le ferroviaire est un mode de transport qui équivaut à la voiture, au tram, au bus ou au vélo. Il s'agit d'un moyen de transport. Mais dans votre bouche, Monsieur Brunier, l'aspect constructif fait défaut. C'est l'aspect dissuasif qui prend le pas. Or, cette motion, que nous enverrons, je l'espère, à la commission des transports afin d'en discuter, contient de bonnes et de mauvaises choses. Les bonnes choses, c'est que cette motion demande la construction de parkings à proximité des gares de destination. La seconde chose, moins bonne, ce sont les restrictions de parcage dans le centre-ville des destinations finales. Les destinations finales sont Genève d'une part et Coppet d'autre part. Je ne sais pas si les habitants de Coppet prévoient la construction de parkings - ce serait une bonne chose pour rabattre certains transports venant soit par bus, soit par voiture sur la gare de Coppet par exemple - mais pour ce qui est de Genève, nous avons déjà un plan, le plan de mobilité 2005, nous avons des projets de construction de parkings, qui ne plaisent d'ailleurs pas à tout le monde, nous l'avons vu, et nous avons en particulier un parking prévu près de la gare de Cornavin. C'est le parking de Sécheron, doublé du parking de l'OMC. Il n'est pas loin de la gare de Cornavin !

Je rappelle qu'il y a deux choses dans ce discours-là. Il y a le bon et le mauvais. Le bon, je vous l'ai indiqué. Quant au mauvais, il semblerait que la discussion a tourné là autour hier soir.

Je demande, Mesdames et Messieurs, que cette motion soit renvoyée à la commission des transports, afin que l'on puisse trier le bon du mauvais et essayer d'aboutir - de manière consensuelle bien entendu, parce que cette commission travaille de temps en temps de manière consensuelle - à une solution à proposer à ce parlement. Nous reviendrons alors avec une bonne solution que l'on pourra renvoyer au Conseil d'Etat. 

M. Jean-Marc Odier (R). J'ai bien écouté M. Brunier. Ce qu'il propose a en fait pour but d'atteindre un objectif environnemental. Il propose des mesures dites incitatives d'accompagnement pour rendre le rail attractif. Jusque-là, je pense que nous pourrions être d'accord. Nous avons tout intérêt à ce que les transports collectifs soient mieux utilisés. Par contre, là où nous divergeons, c'est sur la manière. Dans l'exposé des motifs, vous présentez quelques mesures, notamment la première, qui constituent un catalogue de mesures d'aménagement des constructions. Il faudra l'étudier, car l'on ne sait pas du tout ce que contient ce catalogue de mesures d'aménagements. Comme deuxième mesure, vous proposez de réorganiser et d'améliorer les transports en commun dans les communes pour soutenir les CFF - je partage tout à fait votre point de vue sur cette mesure qu'il me semble possible de réaliser. Parmi les mesures économiques, je retiens une phrase de votre exposé, phrase que M. Ducrest a reprise. Vous parlez de « restrictions de parcage dans les centres-villes des destinations finales ». C'est là que nous divergeons fondamentalement. Nous pensons que la mobilité individuelle est nécessaire et qu'il est inconcevable de restreindre un mode de transport pour prétendre qu'un autre est efficace. De plus, vous parlez d'une mesure économique. Si l'on s'en réfère uniquement à cette phrase, il s'agit bien d'une mesure économique à l'encontre du commerce d'une ville.

Je vous cite encore une phrase de la dernière page de votre exposé des motifs qui exprime tout à fait nos divergences : « Sans ces mesures, la troisième voie risque d'augmenter simplement l'attractivité de certaines destinations et d'attirer davantage de personnes dans les villes. » Vous pensez donc qu'il s'agit d'un risque. Je pense au contraire qu'il s'agit d'une chance. C'est surtout une chance si l'on considère que Genève est un centre, un centre que l'on dit économique et qui fonctionne bien. Pour toutes ces raisons, je pense que nous ne pouvons pas voter cette motion telle quelle. Nous devons la discuter en commission. C'est ce que je vous propose de faire.

M. Christian Brunier (S). J'ai bien entendu M. Ducrest et M. Odier. Vous connaissez la réputation des Verts, de l'Alliance de gauche et du PS. Nous sommes éminemment consensuels. Nous acceptons donc votre proposition de renvoyer ce projet en commission.

Une voix. Bravo ! 

M. Gérard Ramseyer. A l'origine, la 3e voie entre Coppet et Genève n'a pas été initiée par les CFF pour développer en priorité le trafic régional, mais pour libérer une capacité et une souplesse supplémentaires au bénéfice du trafic Intercity et du trafic interrégional. C'est sous l'impulsion de mon département que le caractère indispensable, voire vital d'un développement réel de l'offre régionale s'est imposé. C'était une manière de répondre aux objectifs du plan de mesure Opair dans le couloir compris entre lac et Jura et plus récemment encore par la réalisation d'un véritable RER franco-valdo-genevois utilisant la liaison Praille - Eaux-Vives.

Deux groupes de travail ont été mis sur pied dans le cadre des relations Vaud-Genève. Une concertation a été lancée auprès des communes vaudoises et genevoises. Un premier diagnostic nous est d'ores et déjà parvenu, mettant en évidence la nécessaire application de politiques d'urbanisme concertées.

Nous réservons bon accueil à cette motion, qu'elle soit renvoyée en commission ou qu'elle soit traitée directement par le biais du dépôt d'un rapport, surtout dans la mesure où nous avions déjà, bien avant l'été dernier, quasiment terminé ce travail. C'est donc avec plaisir que nous reviendrons ensemble sur cette question dont l'importance doit être soulignée et que nous vous remercions d'avoir mise en évidence !

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission des transports.