Séance du
vendredi 17 novembre 2000 à
17h
54e
législature -
4e
année -
1re
session -
54e
séance
M 1210-A
Suite du débat
M. Laurent Moutinot. Cette motion pose la délicate question de savoir s'il convient d'apprécier le nombre de mètres carrés plutôt que les pièces pour fixer un prix. A vrai dire et très franchement, je ne crois pas que l'une des méthodes soit forcément préférable à l'autre, parce qu'il existe des appartements de qualité qui comptent peu de mètres carrés et beaucoup de pièces et l'inverse. Et, finalement, l'une ou l'autre méthode ont leurs défauts selon les cas.
Dans le système actuel, la LGL tient très largement compte des mètres carrés, alors qu'en revanche- c'est vrai - la LDTR tient essentiellement compte des pièces. Vous souhaitez changer de système, et la motion propose à juste titre qu'avant tout changement on détermine cette question en concertation avec les milieux intéressés. J'ai les plus grands doutes que la concertation aboutisse à une position unanime et je crains bien que l'exercice ne soit plus difficile que vous l'imaginiez !
Si vous souhaitez que nous le fassions démocratiquement, nous le ferons, mais ne vous attendez pas, Mesdames et Messieurs les députés, à des miracles sur une pareille question ! Ce d'autant plus que pour les nouveaux cas qui se présenteront, on peut imaginer pouvoir changer de système. Par contre, changer de système sur des cas établis implique des modifications à la hausse et à la baisse, qui pourraient s'avérer particulièrement désagréables pour les uns ou pour les autres, selon les circonstances.
C'est la raison pour laquelle j'exprime le plus grand scepticisme quant à la praticabilité de cette motion, mais, si votre désir est que nous tentions l'exercice, nous ferons correctement notre travail.
M. Jacques Béné (L). Cette motion va certainement déboucher sur une problématique qui sera peut-être difficile à régler.
Je pense que M. Ferrazino se battra avec force pour déterminer un prix au mètre carré, en fonction de la LDTR, qui soit évidemment le plus bas possible...
M. Pierre Meyll. Evidemment ! (Rires.)
M. Jacques Béné. ...mais la concertation peut effectivement être intéressante. Il est vrai que la LGL contient déjà cette notion et qu'il n'est pas nécessaire d'y introduire quoi que ce soit de plus. La seule problématique de la LGL, c'est que les services de M. Moutinot ne calculent pas un prix au mètre carré : ils vérifient si les critères de prix au mètre carré sont respectés, mais il n'y a pas de prix au mètre carré de référence en tant que tel. On a un prix à la pièce maximum autorisé par les services de M. Moutinot et rien de plus. En réalité, on procède à un calcul à l'envers.
Maintenant, je pense que dans certains cas, y compris pour des nouvelles réalisations, il serait assez bon d'analyser les dossiers sous un angle qualitatif. On se rend compte en effet à l'usage que certaines constructions ne correspondent pas forcément à l'attente des occupants, et je pense qu'on pourrait y gagner en qualité.
Je vous donne un ou deux exemples. Certaines personnes souhaitent avoir une salle de bains plus grande, d'autres mettent l'accent sur le salon... Les critères de qualité ne sont donc pas identiques d'un groupe familial à un autre...
Mme Salika Wenger. D'une classe à l'autre !
M. Jacques Béné. ...et je pense qu'il serait judicieux que le prix au mètre carré permette de jouer sur ces critères de qualité.
Pour ce qui est des anciens dossiers, il est clair que l'on ne pourra malheureusement rien faire, et qu'il faudra un certain nombre d'années avant qu'on puisse identifier les prix pratiqués au mètre carré sur l'ensemble du parc immobilier genevois. La CIA a fait cet exercice non seulement pour les logements nouveaux mais pour l'ensemble de son parc, ce qui lui permet d'avoir des loyers-cibles qu'elle essaye d'atteindre - qu'elle ne dépasse pas -pour l'ensemble de son patrimoine. Et je pense que c'est effectivement une bonne chose.
Je vous invite à voter cette motion telle quelle. Je ne vois pas à quoi servirait l'étude d'impact. Il ne devrait en effet logiquement pas y avoir d'impact sur le niveau des loyers, puisque l'on considère la situation existante pour calculer un prix au mètre carré qui soit cohérent et aboutir à une nouvelle répartition des mètres carrés.
Enfin, il aurait été appréciable, au niveau des finances de l'Etat, que certains dossiers de rénovation, qui ont été soumis à la LGL en parallèle à la LDTR, aient été moins subventionnés : en l'occurrence, il s'agissait de logements qui avaient des pièces d'une taille telle que, s'il s'était agi de nouvelles constructions, la LGL ne se serait pas appliquée. En fait, on a dérogé aux critères usuels de la LGL dans beaucoup de cas, pour subventionner des opérations LDTR qui ne se seraient pas réalisées sans ces subventions.
Dans ce type de dossiers, il sera donc intéressant d'avoir des prix au mètre carré qui correspondent mieux au marché - je sais bien que cela ne va pas faire plaisir à M. Ferrazino que je le dise - par rapport à la qualité des logements qui seront mis sur ce marché.
Je vous invite donc à accepter cette motion telle quelle, bien sûr sans l'étude d'impact proposée par M. Velasco, car, à mon avis, elle ne servira pas à grand-chose.
M. Pierre Ducrest (L), rapporteur de majorité. Mon intervention est technique. Mon collègue Jacques Béné dit que nous ne pouvons pas accepter cet amendement, et il a raison. Mais - mais - s'il était accepté par cette assemblée, nous accepterions tout de même cet objet dans son ensemble, car il faut absolument aller de l'avant dans cette histoire. Nous souhaitons que cette motion soit votée. Nous la voterons donc, même avec l'amendement, car j'imagine que nous allons perdre sur ce point.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Mes chers collègues, j'ai démontré dans mon rapport, point par point, que le Conseil d'Etat répond déjà à cette motion dans la pratique et qu'en réalité elle est dirigée contre la LDTR. Mais nous sommes magnanimes ! Vous voulez faire une étude : nous ne pouvons pas vous en empêcher, mais, toutefois, nous devons nous protéger, car l'histoire montre que l'on nous a déjà trop souvent joué des tours.
C'est la raison pour laquelle nous vous proposons d'accepter notre amendement. Si notre amendement est accepté, il est évident que nous enverrons cette motion, comme cadeau de Noël, à notre minorité au Conseil d'Etat.
M. Jacques Béné (L). Je ne peux pas laisser dire cela ! Dans la LGL aujourd'hui, le prix au mètre carré est calculé à l'envers. On prend le prix à la pièce, actuellement de 4 500 F maximum pour du HLM, et, ensuite, on calcule le nombre de mètres carrés de l'appartement, pour voir si le prix au mètre carré est cohérent ou non ! C'est le nombre de mètres carrés qui est contrôlé et non le prix au mètre carré ! C'est tout ce que je voulais dire.
La présidente. Je soumets donc au vote l'amendement proposé par M. Velasco, consistant à ajouter une nouvelle invite dont la teneur est la suivante :
«- à prévoir, avant toute modification des dispositions actuelles, une étude d'impact sur les conséquences de la prise en compte de la notion des m2, notamment sur les loyers.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mise aux voix, cette motion ainsi amendée est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(1210)
pour la fixation des loyers et des prix de locaux d'habitation en fonction de leur surface
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
- que de nombreuses lois genevoises confèrent, dans diverses circonstances, la compétence à l'autorité de fixer le prix d'acquisition d'un logement ou le loyer admissible de celui-ci ;
- que les prix et les loyers en question sont généralement fixés par pièce habitable ;
- que la notion de pièce habitable est sujette à interprétation et à contestation, la surface d'une pièce pouvant se situer entre 9 et 40 m2, voire plus ;
- que Genève est le seul canton suisse à fixer les prix et les loyers à la pièce ;
- que, de surcroît, Genève est le seul canton suisse à compter la cuisine comme une pièce ;
- que cette situation rend difficile, voire impossible, la comparaison entre les statistiques genevoises et les statistiques des autres cantons suisses sur les loyers et les prix pratiqués pour les logements ;
- que, pour la première fois, la loi sur l'aide à la propriété individuelle adoptée par le Grand Conseil en 1997 se réfère expressément à un prix au m2 ;
- que l'ensemble des services étatiques chargés de fixer, à un titre ou à un autre, des loyers ou des prix de logements, ont été réunis au sein d'un même département ;
- enfin que la Commission du logement du Grand Conseil, dans le cadre de l'examen du projet de loi 7752, étudie actuellement la problématique de la fixation des loyers ;
invite le Conseil d'Etat
- à adopter la référence du mètre carré pour fixer les prix et les loyers de logements lorsqu'il est appelé à le faire ;
- à adopter la même référence pour déterminer le montant des aides au logement ;
- à effectuer les modifications réglementaires éventuellement nécessaires pour répondre à la présente motion ;
- à déterminer, après concertation avec les milieux intéressés, les prix et les loyers applicables ;
- à prévoir, avant toute modification des dispositions actuelles, une étude d'impact sur les conséquences de la prise en compte de la notion des m2, notamment sur les loyers.