Séance du
vendredi 17 novembre 2000 à
17h
54e
législature -
4e
année -
1re
session -
52e
séance
PL 8188-A
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
Rapporteur: M. Alberto Velasco
La Commission du logement s'est réunie les 8, 15 et 22 mai 2000, sous la présidence de Mme Alexandra Gobet, pour débattre du projet de loi susmentionné visant à modifier la loi sur les démolitions, transformations et rénovations d'immeubles d'habitation.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat chargé du Département de l'aménagement de l'équipement et du logement a participé aux travaux de la commission, assisté de M. Pascal Chobaz, chef de service du service juridique de la police des constructions et de Mme Marie-Christine Dulon, juriste de l'OCL.
Introduction
Après avoir voté l'entrée en matière du projet de loi, la commission a décidé de traiter uniquement les propositions législatives en cause et de laisser en suspens les autres propositions de modification de la LDTR jusqu'à ce que le Tribunal fédéral se soit prononcé sur le recours interjeté contre la dernière modification apportée le 25 mars 1999 par le Grand Conseil à cette loi, qui a ensuite été approuvée en votation populaire.
C'est la raison pour laquelle la commission rend un premier rapport sur les modifications proposées aux articles 8, alinéa 2 et 39, alinéas 4 et 6.
En ce qui concerne l'article 8, la proposition visait à rétablir à l'alinéa 2 la deuxième phrase de cette disposition, qui avait été supprimée par erreur lors de la dernière révision de la LDTR, étant précisé que la référence à des loyers équivalents figurant dans l'ancien texte a été remplacée par celle de « loyers répondant aux besoins prépondérants de la population ».
Par contre, la suite de cet alinéa a été précisée de manière à répondre à l'objectif poursuivi lors de la modification précédente de la LDTR, telle qu'elle avait été exposée dans le rapport de majorité du Grand Conseil (cf. Mémorial 25 mars 1999, XII) à savoir qu'une opération compensatoire de logement, s'inscrivant dans le cadre d'un changement d'affectation de logements au centre ville au profit de locaux commerciaux, ne devait pas avoir pour effet de diminuer le taux d'habitat au centre ville.
Rappelons que l'initiative populaire à l'origine de la LDTR, adoptée le 26 juin 1983, avait clairement pour but de rétablir l'habitat au centre ville, à la suite des nombreuses transformations illégales de logements en bureaux.
Le texte adopté à cette fin lors de la dernière révision de la LDTR était ambigu et a amené le Tribunal administratif à une interprétation différente du sens qu'entendait lui donner le rapport de majorité de la Commission du logement.
Cet arrêt du Tribunal administratif a amené la Commission du logement à adopter un nouveau texte pour la deuxième partie de l'alinéa 2 précité, afin de lever l'ambiguïté.
Le nouveau texte est parfaitement clair et va jusqu'à favoriser des changements d'affectation dans d'autres quartiers fortement habités, au profit de quartiers faiblement habités, comme celui du centre ville.
L'inverse, à savoir une opération d'échange telle que celle autorisée entre le quai des Bergues et la rue Marignac, ne sera plus admis et la dérogation ne pourra donc pas être accordée dans de tels cas.
Par contre, des opérations compensatoires pourront néanmoins être effectuées dans les quartiers peu habités, pour autant que la compensation se fasse à l'intérieur de ce quartier et à proximité immédiate.
Quant à l'article 39, il constitue la disposition introduite en 1988 à la suite de l'acceptation en votation populaire de l'initiative du Rassemblement pour une politique sociale du logement contre les congés-ventes.
S'agissant plus particulièrement d'empêcher la vente d'appartements locatifs qui avaient été mis sous le régime de PPE, mais qui n'avaient pas été vendus avant la votation populaire.
Bien entendu, parmi ces appartements, nombre d'entre eux s'inscrivaient dans le cadre d'opérations spéculatives, ce qui a contraint leurs acquéreurs à les vendre. Le département a admis de telles ventes, pour autant qu'elles se fassent en bloc et portent sur l'ensemble des appartements d'un même immeuble avec comme condition que l'acquéreur maintienne leur affectation à destination locative.
L'alinéa 4 de l'article 39 est complété par une disposition qui codifie la pratique du département. Quant à l'alinéa 6, il impose cette solution, qui a été légitimée par un arrêt du Tribunal fédéral, à l'Office des poursuites en cas de vente aux enchères de lots de PPE d'un même immeuble dans le cadre d'une procédure en réalisation de gage.
L'office devra vendre en bloc les appartements mis en PPE dans un même immeuble et obtenir l'autorisation préalable du DAEL avec les conditions figurant à l'alinéa 1, à savoir que les appartements mis en vente doivent conserver leur vocation locative. A défaut, le registre foncier devra rejeter la réquisition d'inscription de la vente.
Travaux de la commission
Auditions
Audition de la Fédération genevoise des Métiers (FMB)
M. .
M. François Perrin - vice-président
Les représentants de la FMB informent la commission qu'ils refusent le projet deloi 8188. En effet, M. Perrin constate que la reprise économique n'est pas très effective et invoque la nécessité d'une certaine stabilité pour les milieux de la construction. Il semble que les modifications de la LDTR proposées retardent le processus décisionnel des investisseurs et des propriétaires soucieux d'apprécier la portée et les effets des modifications. La FMB demande notamment le gel de ce type de procédure afin de laisser à chaque partenaire le temps d'étudier les effets des récentes modifications apportées à cette loi. Abordant le volet politique, M. Rufener déclare que la votation du mois de septembre 1999 représente l'aboutissement d'une très longue procédure parlementaire, puis référendaire et qu'il faudrait laisser le temps à la loi actuellement en vigueur pour pouvoir en juger les effets. S'agissant du volet juridique, pour la FMB, l'art. 8 voté en septembre 1999 représentait un premier pas en direction d'un consensus et de regretter qu'il soit à nouveau durci.
Audition de la Société des régisseurs de Genève (SRG)
M. Paul Epiney - président
M. .
M. Epiney déclare que la Société des régisseurs de Genève s'inquiète des durcissements progressifs de législation et de réglementation qui pénalisent les propriétaires désireux de jouer le jeu, comme on le recommande en général. Il estime dangereux de durcir encore le processus de la LDTR qui finit par contraindre les propriétaires à ne plus faire de travaux. Car une observation empirique du marché montre que les travaux de rénovation sont en phase de stagnation, voire de récession par rapport au gros-oeuvre.
M. Blanc relève le resserrement des possibilités de réaffectation qui résulte de l'art. 8, al. 2 du projet de loi 8188 (dérogations pour les changements d'affectation). Il souligne que la Société des régisseurs avait assez souvent plaidé pour une certaine souplesse dans l'application de ces dérogations, mais les conditions précitées lui semblent extrêmement restrictives, voire impossibles à réaliser et que dans ces conditions il deviendra impossible de réaffecter certaines surfaces au logement. Si bien que les propriétaires se verront encore davantage contraints à les réaffecter à des locaux commerciaux.
Ensuite, M. Blanc déclare que, sur le fond, faute d'avoir tous les éléments historiques en sa possession (jurisprudence du Tribunal fédéral, pratique des Offices des poursuites), la Société des régisseurs de Genève n'a pas réussi à mesurer la signification de l'article 39, al. 4 et al. 6, qui ne se comprennent pas d'eux-mêmes, d'où une certaine insécurité. Commentant l'art. 35, al. 6, il relève qu'il élargit le cercle des personnes (morales ou physiques) ayant qualité pour recourir, ce que la Société des régisseurs de Genève ne juge pas souhaitable, estimant que ces dispositions finiraient par être au détriment des locataires.
En conclusion, M. Blanc déclare que le projet deloi 8188 n'est pas souhaitable d'un point de vue politique et que sur le plan pratique, il s'avère prématuré eu égard au recours déposé par la CGI, dont le bien-fondé devrait être connu par le Tribunal fédéral à l'heure actuelle.
Audition du Rassemblement pour une politique sociale du logement
M. .
. .
M. Sommaruga déclare qu'on peut se poser la question de la justification de principe du projet de loi 8188, un an après l'adoption par le Grand Conseil d'une modification importante de la LDTR, d'autant plus qu'un recours de droit public a été déposé, qui porte sur certaines des dispositions votées. Il ajoute toutefois que le projet de loi 8188 permet d'aborder une question mal résolue dans la loi suite à erreur dans le rapport de majorité à l'art. 8, al. 2. Par ailleurs, ce projet a le mérite d'aborder des sujets apparus vers la fin des travaux de la commission concernant la dernière modification de la LDTR et sur lesquels il eût été malvenu de revenir alors que les travaux étaient pratiquement terminés. Le Rassemblement pour une politique sociale du logement (ci-après « RPSL ») est d'avis qu'il convient d'entrer en matière sur le projet de loi 8188 même si la loi est encore contestée devant le Tribunal fédéral.
Commentant l'art. 8, al. 1, M. Sommaruga rappelle qu'en tant qu'organisation faîtière, le RPSL regroupe en effet plusieurs partis et organisations syndicales et que la volonté avait été de maintenir l'art. 8, al. 1 sous sa forme actuelle. Le RPSL estime que l'art. 8, al. 1 est suffisant, à condition de maintenir l'art. 8, al. 2 dans sa version de 1996 et réaffirme leur politique stricte en matière de changement d'affectation. En effet, le régime dérogatoire prévu aux termes de l'art. 8, al. 1 exige que soient réunies un certain nombre de conditions particulières, précisées à l'art. 8, al. 2.
M. Sommaruga cite la proposition du RPSL qui rajoute la mention « [...] et des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population »., à la suite de la phrase contenue à l'al. 2 de l'art. 8 « Dans ce cas, les locaux réaffectés au logement doivent être d'une surface au moins équivalente, situés en règle générale dans le même quartier, si possible à proximité immédiate, et offrir des conditions de logement et de loyer au moins équivalentes ». Ensuite, il rappelle la proposition faite par le RPSL d'un alinéa 3, « La commission d'urbanisme instituée par la loi sur les commissions d'urbanisme et d'architecture L 1/55 préavise le lieu des surfaces compensatoires réaffectées au logement. 7
A l'époque, le président du DAEL et la commission avaient estimé que le renvoi en commission d'architecture de toute affectation représentait une procédure trop lourde. Citant le jugement du Tribunal fédéral sur la nouvelle teneur (erronée) de la LDTR, M. Sommaruga propose un retour à la teneur de la version 1996 de l'art. 8, al. 2, ainsi que l'ajout de la mention précitée.
S'agissant de l'art. 39, al. 4, M. Sommaruga estime très important d'introduire dans la LDTR, le paragraphe 2 proposé dans le projet de loi 8188, afin de résoudre un problème qui s'était matérialisé lors des derniers travaux de la commission. Le Département des travaux publics, celui de l'énergie, puis le DAEL ont autorisé en tout temps la vente en bloc d'appartements pour permettre la liquidation de sociétés, le partage de successions, voire des opérations de désendettement. En évitant la vente individualisée d'appartements, ceci permettait d'en maintenir l'aspect locatif. Or, ces autorisations ont été données il y a 10 ou 15 ans et les propriétaires s'en prévalent maintenant pour asseoir leur droit de les revendre, tentant ainsi de bénéficier d'avantages indus, qui n'étaient pas dans l'esprit de l'autorisation d'origine. Le RPSL est d'avis que la revente de ces appartements doit, elle aussi, s'effectuer en bloc.
S'agissant de l'art. 39, al. 6, M. Sommaruga estime parfaitement justifiées les préoccupations des auteurs du projet de loi. En effet, les seules entités qui violent aujourd'hui les dispositions de la LDTR sont les Offices des poursuites (ci-après « OP »). M. Sommaruga rappelle le mécanisme selon lequel des promoteurs achetaient des immeubles, les transformaient en PPE puis essayaient de les revendre morceau par morceau. La LDTR ayant empêché les congés-ventes, les opérations se sont effondrées et sont tombées aux mains des OP, qui vendaient appartement par appartement (comme prévu à l'origine par les promoteurs) et ce pour le bénéfice des créanciers gagistes. A ce sujet, il cite les nombreuses interventions de M. Moutinot auprès des OP, lesquels ont nié tout assujettissement à l'autorité du DAEL ou du Conseil d'Etat. Leur seule autorité étant celle de la Cour de justice, les OP refusent d'appliquer la LDTR. Le Tribunal administratif (ci-après « TA ») a donné raison aux milieux des locataires et au DAEL en reprenant les considérants d'un arrêté du Tribunal fédéral lors du recours de droit public : « toute aliénation d'appartements, aussi sous forme de vente forcée, tombe sous le coup de la LDTR »". Etant donné que les organisations ayant droit de recours ne peuvent malheureusement pas intervenir pour imposer l'application de la LDTR, il est important d'inclure cette disposition dans la LDTR. Les effets prévisibles sont les suivants :
soit les OP recourront au Tribunal fédéral au motif que ces dispositions ne leur sont pas applicables (et il est probable que le Tribunal fédéral confirme les décisions du Tribunal administratif),
soit le chef du DAEL pourra intervenir, sanctions à l'appui, à l'encontre des personnes n'appliquant pas la LDTR.
En effet, M. Sommaruga ne voit pas pourquoi les OP pourraient contrevenir à la LDTR en toute impunité alors qu'un particulier ferait l'objet de sanctions.
Réponses aux questions
Répondant aux questions des commissaires au sujet des diminutions au centre ville, M. Sommaruga rappelle les débats passés au sein du RPSL concernant le maintien de l'habitat au centre ville et la volonté d'empêcher les transformations d'appartements au centre ville sans compensations immédiates. Il rappelle également que la commission à cette époque tenait un discours quartier par quartier, lequel pouvait se faire au détriment du centre ville. Il déclare que la solution idéale consisterait, dans les quartiers à faible taux de logement, à ce que l'on ne puisse obtenir de compensation sauf en cas de proximité immédiate. Il est en faveur d'une rédaction qui, sans restreindre les possibilités d'affectation, pose des conditions sévères en cas de quartier à faible taux de logement. M. Sommaruga propose de préserver les lieux avec des taux d'habitation faibles et laisser une plus grande souplesse aux zones d'habitation denses.
Autour de cette question, Mme Karin Grobet Thorens précise qu'il n'existe à ce jour qu'un arrêt du Tribunal fédéral sur la base de la nouvelle loi. Pour ce qui est du changement d'affectation, le Tribunal fédéral considère aujourd'hui que les notions de quartier et de surface équivalente n'entrent plus du tout en compte, ce qui implique une ouverture nettement plus importante du changement d'affectation que précédemment.
Au sujet de la notion de quartier, M. Sommaruga rappelle que la notion de quartier n'est pas définie dans la loi et qu'il conviendrait peut-être de parler de proximité immédiate, 1 km ne représentant plus une proximité immédiate. Mme Karin Grobet Thorens ajoute que, suivant la jurisprudence, les Eaux-Vives et Champel sont parfois assimilés à un même quartier et invoqués comme tels.
Audition de la Chambre genevoise immobilière (CGI)
M. .
M. .
M. Muller annonce l'opposition de la CGI à ce nouveau projet de loi. La loi actuellement en vigueur, acceptée le 26 septembre 1999, étant devant le Tribunal fédéral (ci-après « TF ») et plusieurs des dispositions contestées se retrouvant dans le projet de loi 8188, il conviendrait d'attendre au moins la détermination du Tribunal fédéral sur les articles 15 (al. 6) et 39 avant de présenter un nouveau projet de loi. Les différentes modifications rendent la lecture de la LDTR déjà difficile.
Me Jean-Marc Siegrist estime superflu le rajout de « à titre exceptionnel » à l'art. 8 (changement d'affectation) est inutile, dans la mesure où il s'agit en l'état de situations marginales (5 ou 6/an). Ayant fait allusion au 'couac' de transcription de la LDTR, il croit que les principes de cette disposition y sont déjà appliqués.
Commentant l'art. 39, al. 6 qui donne une base légale aux autorisations de vente en bloc, Me Siegrist estime qu'il n'innove guère dans la mesure où la pratique existe depuis environ 10 ans. En revanche, dans le cadre de l'art. 39, al. 6 qui concerne aussi l'autorisation des ventes en bloc, les faits présentés sont erronés. Me Siegrist rappelle une affaire jugée au Tribunal fédéral :
« l'UBS, créancière gagiste, avait été confrontée à un cas d'exécution forcée d'un propriétaire possédant en bloc trois appartements dans un immeuble, lesquels avaient été vendus individuellement le même jour par l'OP à l'UBS. Quelques mois plus tard, souhaitant revendre, l'UBS a dit avoir acheté trois lots individuels, certes le même jour, mais individuels. Le DAEL a sollicité une vente en bloc, l'UBS a refusé. Le Tribunal fédéral a été saisi et a dit que la 2e vente devait être considérée 'en bloc' (car les appartements avaient été vendus au même acheteur, le même jour). Toutefois, dans cet arrêt, le Tribunal fédéral s'est aussi prononcé sur la 1re vente à l'UBS. En effet, le Tribunal administratif avait estimé que les deux ventes devaient être faites 'en bloc'. Le Tribunal fédéral quant à lui restreint cette application à la 2e vente, avouant son ignorance quant aux dispositions applicables à la 1re vente, malgré les avis de droit et le jugement du Tribunal administratif ».
Poursuivant son intervention, Me Siegrist est d'avis que le droit de la poursuite impose à l'autorité compétente de liquider au mieux. Le mandat politique est extrêmement clair puisqu'en droit fédéral le mandat de l'Office des poursuites (ci-après « OP ») est de réaliser au mieux, par tous les moyens possibles et vendre, le cas échéant, unité par unité et non en bloc. La vente en bloc présente l'inconvénient d'un acquéreur unique pour tous les lots. Enfin, s'agissant de l'art. 39, al. 6, Me Siegrist relève que l'autorité compétente pour se prononcer n'est pas le Tribunal administratif (ci-après « TA »), mais l'autorité de surveillance, puis la chambre des poursuites au Tribunal fédéral, qui peut analyser dans quelles conditions une procédure d'exécution forcée est conforme au droit.
Réponses aux questions
Répondant aux questions des commissaires, Me Siegrist précise que, dans le cas d'une vente aux enchères publiques de plusieurs lots en PPE, la demande de l'OP peut être combattue par tout créancier gagiste ou autre faisant valoir que le mandat assigné à tous les offices de poursuite est de vendre au mieux. Selon Me Siegrist, bien qu'il soit impossible de prédire la détermination du Tribunal fédéral, il n'appartient assurément pas au Tribunal administratif d'en juger. Et de conclure que cette disposition du droit cantonal public serait en contradiction avec le droit fédéral.
Sur la question des changements d'affectation, Me Siegrist concède que les demandes sont peut-être beaucoup plus nombreuses ; toutefois, les données publiées par la FAO montrent que les changements effectifs sont de 5 ou 6 par an. Sur ce point, M. Chobaz (juriste du département) confirme que ces opérations sont effectivement marginales, et que la disposition introduite à l'art. 8 codifie simplement une pratique déjà ancienne du DAEL.
En réponse à la communication de Me Siegrist sur l'affaire UBS jugée au Tribunal fédéral, M. Ferrazino relève que Me Siegrist fait une lecture différente de l'arrêt du Tribunal fédéral que les auteurs du projet de loi.
Suite à la demande de M. Moutinot aux auditionnés, au sujet de l'erreur de transcription qui s'est traduite par la publication dans la FAO du texte incomplet de l'art 8, alinéa 2 de la nouvelle LDTR et qui n'a attiré l'attention qu'au moment d'une procédure, s'ils s'opposeraient à cette modification, Me Siegrist déclare être informé sur l'erreur de transcription, mais pas sur le texte qui n'a pas été publié.
Discussion
Le groupe libéral estime qu'entrer en matière sur une loi qui vient d'entrer en vigueur et qui par ailleurs fait l'objet d'un recours ne fera que compliquer la situation. Pour le groupe libéral, ce projet de loi témoigne d'une volonté de rigidifier un ensemble déjà d'une rigidité incommensurable, et par conséquent, le groupe refusera le vote d'entrée en matière. A la suite de cette prise de position, M. Moutinot fait part à la commission de la position du DAEL, dont il souligne qu'elle aura le mérite de ne plaire à personne. Il a appris à la lecture de l'exposé des motifs que le DAEL continuait à appliquer les dispositions de manière abusive, comme en 1996. Or ceci n'a porté que sur un seul cas, dans lequel le département a suivi l'avis donné par la LCI. Après quoi, le président du DAEL expose à la commission la vision du département sur les 2 articles proposés.
Concernant l'art. 8, al. 2, la loi telle qu'elle est publiée actuellement ne correspond pas à la volonté du législateur. En l'état, elle est absurde puisqu'il y manque une condition, qui doit être remise dans la loi. Quant à la question de savoir s'il convient ou non de modifier cette disposition, M. Moutinot n'est pas sûr que le moment soit opportun, surtout si l'on souhaite obtenir une décision rapide du Tribunal fédéral dans la procédure de recours.
S'agissant de l'art. 39, al. 4, M. Moutinot n'en voit pas l'utilité, et quant à l'art 39, al. 6, il admet l'existence du problème et la nécessité de le résoudre. Toutefois, deux questions se posent, l'une de principe (est-il correct de proposer une modification maintenant ou doit-on attendre la fin de la procédure de recours ?), l'autre technique (les obligations des offices de poursuites invalident peut-être la disposition proposée).
En réponse à la demande de la présidente, de bien vouloir restituer un peu plus avant l'état des échanges relatifs aux ventes forcées et de préciser s'il y a eu des intentions de modifier la pratique en dehors de ce projet de loi, M. Moutinot confirme que tel est le cas, car les ventes forcées posent problème. En effet, le DAEL a essayé de convaincre les OP qu'ils étaient soumis à la LDTR, et cela s'est soldé par un échec, les OP s'estimant uniquement soumis à la législation en matière de poursuite et de faillite, avec recours à l'autorité de surveillance de la Cour de justice ou au Tribunal fédéral. Par ailleurs, le DAEL informe la commission qu'il est actuellement en discussion avec le conservateur du registre foncier, qui doit veiller à la conformité avec l'ensemble de la législation genevoise, et qu'une rencontre est prévue pour connaître sa position. D'autre part, s'il est vrai que le DAEL est d'accord qu'une vente aux enchères en bloc exige une autorisation pour permettre une vente individualisée subséquente, le problème qui subsiste est celui de la vente, et M. Moutinot pose à nouveau la question technique aux auteurs du projet de loi 8188 : est-il possible de procéder ainsi ? A cet effet il cite l'ordonnance du Tribunal fédéral sur la réalisation forcée des immeubles (ORFI) et le système de la double enchère envisageable dans ce genre de cas, afin d'éviter les critiques.
M. Ferrazino, par ailleurs auteur de ce projet de loi, relève l'urgence de revoir l'art. 8, al. 2, modifié pour tenir compte de quartiers tel le centre ville où l'habitat s'est vidé au profit de l'activité commerciale. Toutefois, même si l'art. 39, al. 4 correspond à la pratique actuelle, les auteurs souhaitent la codifier dans la loi. Il est certes possible de s'interroger sur la conformité au droit supérieur des dispositions de l'art. 39, al. 6, mais les recours que son adoption ne manquerait pas de provoquer donneront immanquablement lieu à un arrêt du Tribunal fédéral. M. Ferrazino précise que, selon certains juristes, cette disposition ne serait justement pas contraire au droit fédéral.
Art. 8, al. 2
La commission est saisie, pour les alinéas 2 et 3 de cet article d'une proposition de texte venant du RPSL, et reprise par M. Ferrazino, et dont la teneur est la suivante :
En cas de changement d'affectation, les surfaces de logements supprimées seront compensées par la réaffectation simultanée de surfaces commerciales ou administratives en logement.
§1 « Dans ce cas, les locaux réaffectés aux logements doivent correspondre à une surface ainsi qu'à des conditions de logement au moins équivalentes et avoir des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population qui ne soient pas supérieurs à ceux des logements supprimés.
§2 De plus, les locaux réaffectés aux logements doivent être situés en règle générale dans le même quartier, si possible à proximité immédiate, à moins que le changement d'affectation ne soit effectué au profit d'un secteur comme le centre ville où la proportion de logements est faible par rapport aux surfaces d'activités.
§3 Si le changement d'affectation a lieu à l'intérieur d'un tel secteur, la compensation doit être effectuée à proximité immédiate.
§4 En cas de doute sur la nature du secteur ou sur la demande du requérant, la Commission d'urbanisme préavise. »
S'exprimant au nom de l'Alliance de gauche, M. Ferrazino propose de compléter la première phrase de l'al. 2 en remplaçant « et de loyer au moins équivalent » par « et des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population ». Le département soulève la question d'équivalence de prix afin que les logements répondant aux besoins prépondérants de la population ne soient pas supérieurs à ceux des logements supprimés. Cette proposition qui émane du RPSL, fait référence à la fourchette évolutive, qui est fixée dans la loi et qui se situe entre 2000 et 3225 F la pièce.
Revenant sur le document du RPSL au sujet de la notion de 'proximité immédiate', le département pose la question des secteurs. Pour les auteurs du projet de loi, cela veut dire « en règle générale dans le même quartier et si possible à proximité immédiate ». Dans le cas du centre ville ou d'un secteur de ce type, cela « absolument à proximité immédiate ». Au sujet de la nature du secteur, les auteurs du projet de loi précisent qu'il s'agit de la proportion des logements par rapport aux secteurs commerciaux. A la suite de ces explications, le département déclare vouloir s'en tenir à la restitution de l'art. 8, al. 2 tel qu'il a été voulu par le Grand Conseil, mais dont une partie a disparu par erreur, et par conséquent il ne souhaite pas aller dans le sens des amendements présentés par les auteurs du projet de loi.
A ce niveau du débat, M. Parrat, afin de répondre à des critères de qualité, propose de garder le § 1 jusqu'à « population » et de supprimer « qui ne soient pas supérieurs à ceux des logements supprimés » et d'amender ainsi la proposition du RPSL.
Proposition d'amendement formulée par M. Parrat (art. 8, al. 2)
Cet amendement concerne le §1 :
« Dans ce cas, les locaux réaffectés aux logements doivent correspondre à une surface ainsi qu'à des conditions de logement au moins équivalentes et avoir des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population. »
La commission est saisie d'un second amendement proposé cette fois-ci par M. Ducrest et qui précise que cette disposition s'ajoutera au texte voté, dans la version qui aurait dû être publiée. D'autre part, une qualité de vie équivalente pourrait être obtenue en compensant un appartement situé dans un quartier limitrophe du centre ville par un appartement dans une zone moins bruyante, par exemple.
Proposition d'amendement formulée par M. Ducrest (art. 8, al. 2)
«…au moins équivalentes. Une compensation des surfaces pourra également s'opérer dans un quartier offrant de meilleures conditions de logement ou de loyer. Le département tient compte... »
Amendement rejeté
A la demande des auteurs du projet de loi, M. Parrat confirme que son amendement est destiné à permettre d'aller jusqu'en haut de la fourchette.
Les auteurs proposant d'utiliser la proposition d'amendement présentée par le RPSL en lieu et place du projet de loi 8188, le vote se poursuit sur la base du texte présenté par le RPSL et auquel se réfèrent désormais les travaux des commissaires, l'AdG ayant fait sien ce texte.
§ 2
Ce paragraphe soulève un débat au sujet de la notion de secteur. En effet, la question est de savoir si cette notion est suffisamment claire pour être applicable par le DAEL ou si elle peut être appliquée, d'entente par le Département aux lumières de la commission d'urbanisme.
Le département est d'avis que la notion est claire pour, par exemple, le secteur des banques, mais qu'à terme, il faudra établir une liste des secteurs, car à la lecture du texte, quartiers et secteurs ne semblent guère différents.
La présidente résume en déclarant que l'intention est de ne pas établir une liste exhaustive des quartiers, mais de laisser le soin au DAEL de qualifier.
Des différentes interventions des commissaires, il en résulte deux visions qui s'opposent, la première consistant à laisser délibérément une marge d'appréciation, la seconde préférant préciser. La présidente résume la proposition de M. Parrat d'enlever le membre de phrase du para. 2 RPSL:
« […] si possible à proximité immédiate […] ».
L'amendement étant refusé, et les § 2 et 3 acceptés, la commission poursuit ses travaux sur le § 4.
Le département déclare que la formulation n'est pas satisfaisante, car elle restreint la consultation de la Commission d'urbanisme, laquelle ne pourra plus être consultée que sur la nature du secteur.
Mis au vote, le § 4 est accepté.
Art. 39, al. 4 et 6
Le département rappelle le mécanisme des autorisations qui font l'objet de l'art. 39, al. 4. La première partie des dispositions rappelle la teneur actuelle de la loi. La proposition vise à codifier une pratique du DAEL en cas de vente en bloc, dans un même immeuble, de plusieurs appartements. Ceci se produit souvent dans le contexte d'assainissements financiers où un promoteur se retrouve avec un solde d'appartements dont il doit se dessaisir pour cause soit de poursuites, soit de pressions de la banque créancière gagiste poussant à la mise en vente. Au sens du présent alinéa, la vente en bloc des appartements peut se faire à condition que le nouvel acquéreur ne puisse revendre qu'en bloc, sous réserve de l'obtention d'une autorisation individualisée. Le département demande s'il ne conviendrait pas de réserver la teneur de l'al. 3 de la loi actuelle, aux termes duquel les locataires peuvent acquérir leur logement sous certaines conditions.
Suite à l'intervention de certains commissaires qui comprennent mal pourquoi un propriétaire qui possède plusieurs appartements dans le même immeuble, et face à des problèmes financiers que la vente de quelques appartements permettrait d'assainir, en serait désormais empêché, M. Grobet revient sur l'initiative de 1985 sur les congés-ventes.
Avant la votation, quelque 10'000 appartements avaient été mis en PPE dans le but de transformer des appartements locatifs en PP. Toute une série de ces opérations (ex. M. Stäubli) étaient typiquement spéculatives, les immeubles étant revendus à 4, voire 5 fois leur valeur de rendement. L'initiative avait eu pour effet de bloquer ce processus. Or, la mise en vente d'immeubles en PPE est du ressort du Code des obligations et partant du droit fédéral. Les auteurs de l'initiative avaient pensé pouvoir empêcher la vente des appartements. Suite à la votation populaire, plusieurs recours avaient été déposés par-devant le Tribunal fédéral et les réponses à ces recours avaient fait valoir qu'il ne s'agissait pas d'empêcher la mise en PPE, mais une vente assimilable à un changement qualitatif de l'immeuble. Le Tribunal fédéral avait confirmé la modification législative résultant de l'initiative. Toutefois, les propriétaires des 10'000 appartements mis en PPE souhaitaient les vendre, ce qui avait toujours été refusé par le DAEL au motif que les appartements devaient rester locatifs. Pour résoudre le problème, le Département avait déclaré à l'époque que, dans l'hypothèse où un propriétaire avait acheté 15 appartements sur un immeuble en contenant 20, il serait autorisé à les vendre en bloc à un acquéreur qui les achèterait en bloc et les garderait comme appartements locatifs. Cette pratique a fonctionné tant qu'il n'y avait pas de poursuites en réalisation de gage.
Il y a 4 ou 5 ans, lorsque l'Office des poursuites a mis en vente des appartements, il a autorisé les ventes individuelles, si bien que des appartements mis en PPE à des fins spéculatives se sont retrouvés vendus individuellement. L'Asloca a fait valoir qu'il faudrait procéder à des ventes en bloc, l'acheteur ne pouvant vendre individuellement. L'affaire est allée jusqu'au Tribunal fédéral, qui a confirmé la justesse de l'argumentation de l'Asloca.
Le projet de loi 8188 est le fruit de ces démarches. Ses auteurs estiment aujourd'hui que lorsque l'Office des poursuites met à la vente aux enchères plusieurs appartements qui appartiennent à un même propriétaire, les ventes doivent se faire en bloc et l'acheteur doit être tenu de les garder comme appartements locatifs. La modification prévue à l'al. 4 codifie la possibilité d'imposer la vente en bloc. L'al. 6 indique que l'Office des poursuites doit procéder ainsi. M. Grobet conclut que l'article a été examiné en détail par plusieurs juristes.
Certains commissaires sont en désaccord avec le principe même. En effet, selon eux, la PPE regroupe des appartements inscrits au Registre foncier en tant qu'objets séparés. Ils se demandent comment le nouveau régime de propriété (assimilation de groupes de lots individuels) sera assimilé. Le deuxième point a trait à l'acquéreur, contraint à la vente suite à des pressions bancaires et auquel il suffirait de vendre un appartement pour assainir sa situation. Ce propriétaire devra désormais passer par le régime de l'art. 39, al. 4 et solliciter une autorisation individuelle. Si la disposition est votée telle quelle, ce mécanisme peut fonctionner. En revanche, dans le cadre d'une vente aux enchères, puisque l'Office des poursuites doit réaliser le gage « au mieux », si l'unique possibilité est une vente en bloc, ceci restreindra nécessairement le nombre d'acheteurs potentiels. Pour ces deux motifs (obstacle à l'achat par le locataire et empêchement aux offices de poursuite d'accomplir leur mission, à savoir réaliser de la meilleure vente possible, ces commissaires estiment que la disposition n'est guère heureuse.
Enfin, le département précise que les 60 % mentionnés dans l'article 39, alinéas 3 et 4, concernent le pourcentage requis en terme d'accord des locataires.
A la suite de ces remarques et du vote, l'art. 39, al. 4 est adopté.
Art. 39, al. 6
D'autre part, s'agissant de l'al. 6, selon ces commissaires, son contenu fait disparaître la possibilité du locataire en place d'acquérir son logement.
Les auteurs du projet de loi déclarent que, sur la base d'un avis de droit selon lequel les ventes aux enchères n'étaient pas soumises au droit cantonal, ils avaient fait le parallèle avec le fait que, même dans le cadre de ces ventes, un étranger était soumis à une autorisation spéciale, eu égard à la lex Friedrich. Tout cela ne change rien à la problématique, car on ne connaît toujours pas les obligations de l'Office de poursuite. Le département ne délivrant pas d'autorisation suite à une vente aux enchères, qui est simplement inscrite au Registre foncier, les auteurs du projet de loi 8188 ont décidé de proposer qu'une autorisation préalable soit délivrée par le DAEL à l'Office de poursuite. Deux paragraphes, destinés à compléter l'art. 39, al. 6, sont présentés :
L'office doit requérir l'autorisation d'aliéner les appartements mis en vente aux enchères avant de procéder à la vente.
Le Registre foncier rejette les réquisitions de transfert de propriété qui ne sont pas au bénéfice d'une autorisation d'aliéner en force.
Le département émet un doute concernant la deuxième phrase. Le Registre foncier peut en effet rejeter des réquisitions de transfert, mais pas dans le cas d'une vente aux enchères. Sauf erreur, le conservateur a déclaré qu'il n'était qu'un organe d'enregistrement, le transfert de propriété s'effectuant au moment de la vente aux enchères.
Les auteurs du projet avouent qu'il est certes impossible de savoir à l'avance si une disposition tiendra vraiment la route devant le Tribunal fédéral. Toutefois, sur la base d'un avis de droit donné par M. Grobet, il y a environ 4 ans, l'Asloca avait estimé que la vente en bloc pouvait être imposée. Personne n'y a cru, mais M. Berenstein, juge fédéral, a confirmé par la suite que tel était bien le cas. D'autre part, au moment du vote populaire sur l'initiative relative à la vente d'appartements, six recours avaient été déposés, mais le Tribunal fédéral a fini par donner raison à l'initiative.
Suite à la relecture par la présidente de l'art. 39, al. 6, modifié comme indiqué, M. Ducrest souhaiterait obtenir plusieurs avis de droit sur ce point, afin d'éviter tout bricolage juridique.
Soumise au vote, la proposition de M. Ducrest d'obtenir un avis de droit supplémentaire est rejetée.
A la suite de ces remarques et du vote, l'art. 39, al. 6 est adopté.
Votes
Entrée en matière
Soumise au vote lors de la séance du 15 mai 2000, l'entrée en matière du projet est acceptée par 8 oui (3 S, 3 AdG, 2 Ve) et 5 non (3 L, 1 R, 1 DC).
Art 8, al.2
Amendement de M. Parrat
L'amendement de M. Parrat est accepté par 10 OUI (1 DC, 1 R, 2 Ve, 3 S, 3 AdG), 1 NON (1 L) et 3 abstentions (2 L, 1 R).
Amendement de M. Ducrest
L'amendement de M. Ducrest est rejeté par: 4 OUI (3 L, 1 R), 8 NON (2 Ve, 3 S, 3 AdG) et 2 abstentions (1 R, 1 DC).
Amendement proposé par M. Parrat d'enlever la partie de phrase « si possible à proximité immédiate » du § 2 RPSL
L'amendement est refusé par 5 OUI (2 R, 1 DC, 2 L) contre 7 NON (3 S, 1 Ve, 3 AdG).
§ 2 RPSL (tel que libellé)
Le paragraphe 2 RPSL est adopté par 7 OUI (3 S, 1 Ve, 3 AdG) contre 5 NON (2 L, 1 DC, 2 R).
§ 3 RPSL (tel que libellé)
Le paragraphe 3 RPSL est adopté par 7 OUI (3 S, 1 Ve, 3 AdG) contre 5 NON (2 L, 1 DC, 2 R).
§ 4 RPSL (tel que libellé)
Le para. 4 RPSL est adopté par 7 OUI (3 S, 1 Ve, 3 AdG) contre 5 NON (2 L, 1 DC, 2 R).
Art 39, al. 4
L'art. 39, al. 4 est adopté par 8 OUI (3 AdG, 3 S, 2 Ve) contre 7 NON (3 L, 2 DC, 2 R).
Proposition de M. Ducrest d'obtenir un avis de droit supplémentaire
La proposition de M. Ducrest est rejetée par 7 OUI (3 L, 2 DC, 2 R) et 8 NON (3 S, 2 Ve, 3 AdG).
Art. 39, al. 6 nouvelle teneur (y compris le rajout des deux phrases)
L'art. 39, al. 6 nouvelle teneur modifié est adopté par 8 OUI (3 S, 2 Ve, 3 AdG) contre 7 NON (3 L, 2 DC, 2 R).
Au bénéfice de ces explications, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés que vous réserverez un bon accueil au présent projet de loi.
Proposition d'amendement du rapporteur
Lors de l'adoption des articles 8, al. 2, 39, al. 4 et 39, al. 6 par la Commission du logement, celle-ci a omis d'adopter l'article relatif à l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions et le rapporteur propose de compléter le projet de loi de la disposition ci-après, qui correspond à la clause d'entrée en vigueur qui a été retenue à l'occasion des diverses modifications de la LDTR intervenues ces dernières années :
Article 2 Entrée en vigueur
1 La présente loi entre en vigueur dès le lendemain de la publication de l'arrêté de promulgation.
2 Ses dispositions s'appliquent aux demandes d'autorisation pendantes devant le département au jour de son entrée en vigueur, ainsi qu'à celles qui, à ce même jour, font l'objet de procédures pendantes devant la commission de recours ou le Tribunal administratif.
3 Les alinéas 1 et 2 s'appliquent également aux modifications apportées à la présente loi.
Projet de loi(8188)
modifiant la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) (L 5 20)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi), du 25 janvier 1996, est modifiée comme suit :
Art. 8, al.2 (nouvelle teneur)
2 En cas de changement d'affectation, les surfaces de logements supprimées seront compensées par la réaffectation simultanée de surfaces commerciales ou administratives en logement.
Dans ce cas, les locaux réaffectés aux logements doivent correspondre à une surface ainsi qu'à des conditions de logement au moins équivalentes et avoir des loyers répondant aux besoins prépondérant de la population. Dans ce cas, les locaux réaffectés aux logements doivent correspondre à une surface ainsi qu'à des conditions de logement au moins équivalentes et avoir des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population."
De plus, les locaux réaffectés aux logements doivent être situés en règle générale dans le même quartier, si possible à proximité immédiate, à moins que le changement d'affectation ne soit effectué au profil d'un secteur comme le centre ville où la proportion de logement est faible par rapport aux surfaces d'activités.
Si le changement d'affectation a lieu à l'intérieur d'un tel secteur, la compensation doit être effectuée à proximité immédiate.
En cas de doute sur la nature du secteur ou, sur la demande du requérant, la commission d'urbanisme préavise.
Art. 39, al. 4 Motifs d'autorisation (nouvelle teneur)
4 Le département autorise l'aliénation d'un appartement si celui-ci :
L'autorisation ne porte que sur un appartement à la fois. Une autorisation de vente en bloc peut toutefois être accordée en cas de mise en vente simultanée, pour des motifs d'assainissement financier, de plusieurs appartements à usage d'habitation ayant été mis en propriété par étages et jusqu'alors offerts en location, avec pour condition que l'acquéreur ne peut les revendre que sous la même forme, sous réserve de l'obtention d'une autorisation individualisée au sens du présent alinéa.
Art. 39, al. 6 Ventes forcées (nouveau)
6 En cas de vente aux enchères portant sur plusieurs appartements à usage d'habitation ayant été mis en propriété par étages et jusqu'alors offerts en location, l'office des poursuites et faillites est tenu de les vendre en bloc, avec comme condition que l'acquéreur ne peut les revendre que sous la même forme, sous réserve de l'obtention d'une autorisation individualisée au sens de l'alinéa 4. L'office doit requérir l'autorisation d'aliéner les appartements mis en vente aux enchères avant de procéder à la vente. Le registre foncier rejette les réquisitions de transfert de propriété qui ne sont pas au bénéfice d'une autorisation d'aliéner en force.
RAPPORT DE LA MINORITÉ
Rapporteur: M. Pierre Ducrest
Le projet de loi 8188 concernant des modifications à la loi LDTR revient de commission dans une forme dont il convient de déclarer qu'elle est surprenante et inadéquate.
Il faut rappeler ici que cette loi contraignante a déjà fait l'objet de nombreuses modifications. Elle est actuellement devenue un cheval de bataille de basse politique pour certains députés qui se soucient peu que l'économie genevoise subisse de plein fouet les effets pervers de son application.
La dernière modification a été acceptée par une faible majorité du souverain en date du 26 septembre 1999 et, à l'heure actuelle, le règlement d'application en est à ses balbutiements alors qu'un recours est pendant devant le Tribunal fédéral.
C'est dire que toute modification en l'état est inopportune et ne correspond pas à la logique qui voudrait que l'on attente les effets de la nouvelle mouture de la loi récente dans le cadre de son application ainsi que les conclusions du Tribunal fédéral relatif au recours déposé.
Les étranges travaux de la Commission du logement
Les auditions concernant le projet de loi ont, comme de coutume, réuni les milieux concernés qui ont été entendus à tour de rôle lors des séances des 8 et 15 mai 2000. Ainsi la Société des régisseurs, la Chambre immobilière, La Fédération des métiers du bâtiment ont pu dire tout le mal qu'ils pensaient à l'encontre du projet de loi.
De même, le Rassemblement pour une politique sociale du logement a pu au contraire dire tout le bien qu'il y trouvait.
Jusque là, ces auditions ont pu donner une idée aux députés de la commission sur le sentiment des auditionnés et, à leur tour, les commissaires se sont fait une opinion favorable ou défavorable selon leur convictions et leurs appartenances politiques.
Ces travaux semblaient donc être menés d'une manière habituelle à l'étude d'un projet de loi en commission.
L'inconvénient majeur a résidé dans la suite des travaux où l'on a vu le Rassemblement pour une politique sociale du logement, qui soit dit en passant touche annuellement de l'Etat une subvention de 50000 F, s'ériger en faiseur de lois, modifiant fondamentalement la teneur des articles du projet.
Le projet de loi étant modifié de manière substantielle voire complètement transformé, et dans son contenu et dans sa forme, les auditions précédentes devenaient de fait obsolètes et la logique voulait qu'on les refasse. C'est en l'occurrence la demande faite par les députés de l'Entente, demande qui fut refusée par les députés de l'Alternative.
Cette façon de procéder est contraire au débat démocratique mais il est vrai que pour certains députés l'habitude a été prise depuis longtemps de fonctionner de la sorte.
Ainsi Mesdames et Messieurs les députés, le projet de loi portant le numéro 8188 n'a guère plus que le chiffre que le Parlement lui a donné, le solde se résumant à 2 articles modifiés qui n'ont pas le caractère d'urgence que les déposants du projet de loi voudraient leur attribuer.
Sur le Fond
Les articles modifiés par la commission et notamment l'article 8, alinéa 2 qui lui est écrit entièrement par le Rassemblement pour une politique sociale du logement sont un durcissement inadmissible des conditions d'application de la LDTR.
Article 8, al. 2
Il s'agissait de rétablir une erreur de texte publié dans la FAO, l'article 8, al. 2, deuxième phrase manquante selon le projet de loi 7752.
Dans la foulée cet article a été complètement remanié et l'on est en droit de croire qu'il s'agit ici d'empêcher purement et simplement tous les changements d'affectation de logements en locaux commerciaux.
Cette modification est inadmissible. En effet, les conditions d'obtention d'une dérogation sont telles, qu'aucun changement d'affectation ne pourrait plus intervenir.
De plus, la position du DAEL, par la voix de son président M. Moutinot, démontre qu'il n'est pas sûr que le moment soit opportun de modifier cet article, surtout si l'on souhaite obtenir une décision rapide du Tribunal fédéral dans la procédure de recours.
Article 39, al. 4
Le paragraphe ajouté par le projet de loi 8188 n'apporte rien d'autre que la pratique actuelle, qui n'a jamais été contestée.
Article 39, al. 6
Cette disposition est contraire à la jurisprudence du Tribunal fédéral, qui veut que la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et faillites (LP) rende inapplicable la LDTR (de rang cantonal) en matière de vente d'appartements. La jurisprudence citée par les auteurs du projet de loi 8188 dans l'exposé des motifs est utilisée à mauvais escient, car elle traitait d'un cas bien particulier.
Dans les faits, les difficultés pouvant être engendrées par une telle disposition feront que les OPF auront davantage de problèmes pour la réalisation des gages garants pour les créanciers. Ainsi l'on peut se demander si les prêteurs potentiels ne vont pas demander plus de garanties au vu de la qualité du gage soumis à ce nouvel alinéa 6 de l'art. 39 LDTR.
Conclusion
Le Parlement va une fois de plus être saisi d'une modification de la LDTR déjà fort remaniée et ceci par de nombreux durcissements voilà peu de temps.
Elle est contestée au Tribunal fédéral, son règlement d'application est tout récent et donc en l'état pas analysable sur le fond.
Est-ce bien le moment de modifier la LDTR une fois encore en la durcissant un peu plus ?
Est-ce que l'urgence est telle que la commission revienne devant le Parlement sachant que ses travaux ne sont pas terminés et devra de toute manière recréer un autre débat sur la LDTR ?
Est-ce que les dispositions nouvelles ne vont pas provoquer des recours au Tribunal fédéral rendant l'application de cette loi encore plus délicate pour le DAEL ?
A ces différentes questions la minorité de la commission (L, R, DC) répond que le moment est mal choisi et vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, de refuser le projet de loi 8188.
Erratum
Premier débat
La présidente. J'invite les députés à faire silence pour que nous puissions entamer ce nouveau point de l'ordre du jour !
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. L'article 8, alinéa 2 concerne les opérations de compensation en cas de changement d'affectation. C'est-à-dire qu'en cas de suppression de surfaces de logements, celles-ci doivent être compensées par la réaffectation de surfaces commerciales ou administratives en logements. La proposition consiste à rétablir la deuxième phrase de l'alinéa 2 qui avait été supprimée lors de la dernière révision de la LDTR. Par contre, la référence à des loyers équivalents a été remplacée par celle de « loyers répondant aux besoins prépondérants de la population ». La deuxième partie de cet alinéa répond au désir de la commission de lever l'ambiguïté issue des travaux de celle-ci lors de la dernière révision et qui a amené le Tribunal administratif à adopter une interprétation différente de celle voulue par la commission. Le nouveau texte clarifie le sens voulu par la commission et va jusqu'à favoriser les changements d'affectation dans d'autres quartiers, fortement habités, au profit de quartiers faiblement habités.
Quant à l'article 39, il s'agit d'une disposition introduite lors de l'acceptation en votation populaire de l'initiative du Rassemblement pour une politique sociale du logement et contre les congés-ventes. Il est plus particulièrement question d'empêcher la vente d'appartements locatifs placés sous régime PPE, mais qui n'avaient pas été vendus avant la votation. Quant à l'alinéa 4, il codifie la vente en bloc. L'alinéa 6 indique la façon avec laquelle l'office des poursuites doit procéder.
Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à voter notre rapport tel qu'il est sorti de la commission et je vous prie, Madame la présidente, de bien vouloir donner lecture de la lettre du Rassemblement pour une politique sociale du logement et contre les congés-ventes que vous avez reçue à ce sujet.
La présidente. Nous allons rechercher cette lettre, Monsieur Velasco ! En attendant, je passe la parole à M. Ducrest.
M. Pierre Ducrest (L), rapporteur de minorité. Ainsi donc, nous voilà une fois encore dans ce parlement pour parler de cette fameuse loi LDTR. Nous n'allons pas - je ne vais pas le faire - vous retracer ici toute l'histoire de cette loi qui est fort longue et qui pourrait occuper de nombreuses heures de ce parlement qui a des minutes plus précieuses à consacrer au restant de ses travaux.
Néanmoins, il faut bien le dire, après deux législatures, la précédente et celle que nous vivons aujourd'hui, cela fait la troisième fois que nous revenons devant ce parlement. La première fois, c'était bien entendu de notre fait, c'est-à-dire qu'il s'agissait de rendre cette loi plus réaliste, plus souple, afin, en un mot, qu'elle corresponde, non pas aux besoins de la population, mais aux besoins de l'ensemble de la population, des constructeurs, des locataires et de ceux qui sont chargés dans la République de mener à bien certaines tâches dans le cadre de l'Etat.
Il est évident que la majorité actuelle a voulu, au début 1998, durcir à nouveau la loi telle qu'elle avait été assouplie à bon escient deux ans auparavant. On aurait pu croire qu'il s'agissait en fait d'une revanche unique et que nous en serions restés là pour cette législature. Eh bien, non ! Il a fallu que l'on revienne avec des modifications d'articles. Que dit-on de ces articles ? Ce projet de loi, parti en commission, n'est pas celui qui revient aujourd'hui devant ce parlement. Et de beaucoup s'en faut ! En effet, ce projet de loi était parti avec une modification notoire de plusieurs articles. Nous sommes ici avec un projet tronqué, séparé en plusieurs parties - espérons que ce ne soit qu'en deux, mais il est tout de même séparé - et nous sommes ici pour discuter de deux articles qui sont l'article 8 et l'article 39.
Je ne veux pas tout de suite m'exprimer sur le fond, mais je dirais que les travaux qui ont eu lieu en commission ont été menés d'une façon fort étrange. Tout d'abord, il est d'usage que l'on auditionne différentes composantes de spécialistes qui parlent des rénovations, des démolitions, des transformations. Cela a pu être fait dans un premier temps et chacun a pu s'exprimer sur le texte des articles qui étaient à modifier. Malheureusement, une des composantes très agissantes dans ce domaine, je veux parler du Rassemblement pour une politique sociale du logement, est venue avec des propositions, comme il le fait d'habitude, qui n'étaient pas des conseils donnés à la commission, mais des ukases, des édits, pour dire aux députés de la majorité : « Mesdames et Messieurs, vous devez faire comme on vous le dit, à la virgule près. » Ce qu'a d'ailleurs fait la majorité de la commission. Ce qui fait aussi que les auditionnés, de bords différents et de franges différentes, n'ont pas pu se retourner, puisque ce que l'on présente ici n'est pas ce que l'on a discuté avant.
Il est évident que cette façon de faire est une façon fort peu démocratique, puisqu'on interroge des gens sur la lettre a, alors que l'on sait pertinemment que l'on va voter la lettre b. C'est une façon de faire détestable. Maintenant, qu'avons-nous aujourd'hui ? Nous avons, comme l'a dit le rapporteur de majorité, des modifications d'articles. Mais l'on va encore plus loin. L'article 8 consistait au départ à rétablir une soi-disant erreur de texte. Nous aurions encore pu, à la rigueur, l'accepter, bien que nous n'appuyons pas cet article 8, puisqu'il avait été voté et que le peuple souverain, consulté, l'avait accepté par une très faible majorité, mais une majorité tout de même. Nous l'aurions accepté si cet article avait été retranscrit, à la virgule près, dans la Feuille officielle. Mais il y a l'article 39, qui, dans un de ses alinéas, durcit encore plus cette loi. On va cependant encore plus loin. M. le rapporteur de majorité l'a d'ailleurs montré en demandant la lecture de la lettre du Rassemblement pour une politique sociale du logement. Cette lettre sera bien entendu lue pour que vous puissiez en avoir connaissance. Elle dit en substance une chose très simple : « Messieurs les députés du parlement, ne votez pas l'article 39 ! Repartez en commission pour l'étudier, car il y manque quelque chose ! » Si l'on va jusqu'au bout du raisonnement du Rassemblement, nous n'aurions plus que l'article 8, alinéa 2.
Dès lors, est-ce bien raisonnable que ce parlement délibère encore pendant des heures à propos du seul alinéa d'un article unique modifiant le texte de loi. C'est pour cela, Mesdames et Messieurs les députés, que je vous demanderai de renvoyer ce projet à la commission du logement.
La présidente. Nous avons, Mesdames et Messieurs les députés, une proposition de renvoi en commission. Nous allons cependant procéder auparavant à la lecture de la lettre du Rassemblement pour une politique sociale du logement.
Annexe
2
M. Pierre Ducrest (L), rapporteur de minorité. Vous avez tous entendu la lettre du Rassemblement pour une politique sociale du logement, Rassemblement qui fait les lois et donne des ordres à la majorité. La majorité va bien sûr suivre le conseil du Rassemblement et renvoyer tout ceci à la commission du logement. Nous vous remercions d'avance de simplifier nos travaux !
Mise aux voix, la proposition de renvoi en commission est rejetée.
M. Pierre Ducrest (L), rapporteur de minorité. Puisque le renvoi en commission, bien que le Rassemblement l'ait demandé, a été refusé, cet organisme ne sera pas très heureux. Mais que voulez-vous, on ne peut pas être tout le temps d'accord avec tout !
Pour ma part, je ferai remarquer que nous n'aurions pas eu de problème par rapport à l'article 8 si celui-ci avait constitué un simple toilettage, voire le retour au texte issu des travaux de la commission, et que cet article avait été imprimé dans la « Feuille d'avis officielle ». Mais cet article n'est actuellement plus le même. L'alinéa 2 n'a plus la même teneur que celle issue des travaux de la commission. Il a été, ainsi que d'autres articles, nous le prouverons, durci. Fort de ceci, je vous propose un amendement, que je dépose sur le bureau du Grand Conseil, afin de rétablir un certain équilibre de cet article.
La présidente. Je vous remercie, Monsieur le député. Nous reviendrons sur votre amendement au moment de la deuxième lecture, si vous êtes d'accord.
M. Michel Parrat (PDC). Si notre parti est très sensible à l'équilibre dans les quartiers entre le logement et les emplois, il voit dans les travaux actuels une certaine dérive qu'il convient de ne pas appuyer. Cette loi, si vous la lisez bien, inscrit une rigidité complète dans cette volonté d'équilibre en demandant une compensation, non seulement au m2 près des appartements convertis en activité, ce qui est déjà une difficulté majeure car il devrait y avoir une certaine souplesse, mais on demande maintenant que le logement équivalent soit trouvé à proximité immédiate du logement supprimé et non plus dans le quartier même. Pourquoi cela ? Une telle condition n'a plus rien à voir avec un équilibre urbanistique sensé entre logements et activités. Une telle proposition ne touche plus l'idéologie, qui nous aurait permis de tout comprendre, mais elle devient dogmatique et une loi dogmatique est particulièrement dangereuse et ne devrait pas trouver d'appui dans notre sein. C'est pourquoi le parti démocrate-chrétien ne pourra pas soutenir ce projet de loi.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Art. 8, al. 2
La présidente. Nous avons une proposition d'amendement du rapporteur de minorité et un erratum qui vous a été distribué et sur lequel nous reviendrons si l'amendement de M. Ducrest est rejeté.
M. Pierre Ducrest (L), rapporteur de minorité. Cet article, je l'ai dit tout à l'heure, n'a plus la teneur qu'il devait avoir selon les travaux de la commission qui ont abouti au vote du début 1998. Il a été fortement durci et il correspond à quelque chose qui ne peut malheureusement qu'être contré, puisque, avec un tel article, les conditions d'obtention d'un dérogation sont telles qu'aucun changement d'affectation ne pourra plus intervenir. De plus, si ma mémoire est bonne, le président du département concerné, le DAEL, avait dit à l'époque qu'il ne trouvait pas que ce soit le moment de modifier cet article en raison de procédures de recours. Ces procédures n'ont malheureusement pas abouti et les recourants n'ont pas eu gain de cause. Comme il est toujours préférable, dans une loi, de disposer d'une échappatoire et d'être en mesure de faire quelque chose dans les cas particuliers, je vous propose donc un amendement à l'article 8, alinéa 2 :
« Dans ce cas, [...] au moins équivalentes. Une compensation des surfaces pourra également s'opérer dans un quartier offrant de meilleures conditions de logement ou de loyer. Le département tient compte des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population. [...] »
M. Christian Grobet (AdG). Nous recommandons de rejeter cet alinéa. Il faut être clair, Monsieur Ducrest. Le projet de loi qui nous est proposé ce soir vise à revenir à l'ancienne LDTR, telle qu'elle résultait de la volonté populaire en 1983. De quoi s'agissait-il à l'époque ? Il s'agissait de lutter contre les pertes de logements au centre-ville. C'est la raison pour laquelle l'initiative du parti socialiste avait préconisé à la fois le renforcement de la LDTR et l'adoption des plans d'utilisation du sol pour empêcher les transformations de logements au centre-ville et pour essayer de rétablir l'habitat au centre-ville, à la suite des énormes pertes de logements enregistrées par cette partie de notre Cité dans les années 60 et 70 en raison des transformations illégales de logements en bureaux.
On ne peut pas à la fois se plaindre de la désertification du centre-ville et ne pas prendre les mesures nécessaires pour y conserver l'habitat et le rétablir. Par voie de conséquence, si l'on mène des opérations compensatoires, ce qui n'était du reste pas admis dans la loi de 1983 adoptée par le peuple, ces opérations doivent se faire à proximité immédiate et dans les secteurs où le taux de densité d'habitat est faible. C'est essentiel si l'on veut conserver l'habitat au centre-ville. C'est la raison pour laquelle nous vous demandons de voter le texte de cet article, tel qu'il est issu de la commission.
M. Jacques Béné (L). Deux choses me dérangent dans cet alinéa 2. Je suis d'accord avec M. Grobet. Il faut effectivement éviter de supprimer des logements au centre-ville. Il aurait peut-être fallu délimiter un périmètre dans lequel on aurait voulu éviter que des logements soient supprimés. Mais je trouve aujourd'hui regrettable que l'on soit obligé de procéder à des changements d'affectation qui se situent, dans la plupart des cas, à proximité même des deux objets concernés. Cela veut en quelque sorte dire qu'il n'y aura plus de changement d'affectation possible, même si la réalité économique, la réalité sociale, le principe même du logement pourraient être remis en question. Il ne sera malheureusement pas possible de procéder à ces changements d'affectation. J'aurais préféré que l'on ait une délimitation. Je ne vois pas en quoi il serait gênant que des logements situés à Plainpalais soient transformés en locaux commerciaux avec une compensation aux Eaux-Vives par exemple. Ni dans un cas ni dans l'autre, on ne peut se prévaloir d'une diminution du nombre de logements. J'aurais trouvé cela plus intéressant que de mentionner uniquement « à proximité immédiate ». Raison pour laquelle nous ne pouvons pas accepter cet alinéa.
Deuxième élément. Dans certains cas - c'est en fait toujours le cas la plupart du temps - il peut y avoir, économiquement parlant, une diminution de l'état locatif que le propriétaire encaisse. Si l'on peut encore admettre qu'un propriétaire, disposant de deux bâtiments situés l'un à côté de l'autre, procède à un changement d'affectation et y perde quelque chose - c'est son choix - parce que les loyers des appartements doivent correspondre aux besoins prépondérants de la population et que ces besoins prépondérants de la population, si on applique ce principe aux surfaces qui ont changé d'affectation, sont inférieurs aux loyers qui pouvaient être exigés auparavant. Mais c'est un choix. A partir du moment où l'on a deux propriétaires distincts, je ne vois pas comment ces propriétaires pourraient accepter des changements d'affectation sans qu'il y ait de compensation financière. Je trouve donc regrettable que l'on ait inséré cette disposition dans cet alinéa-là. Elle n'était pas nécessaire, tout comme il n'était pas nécessaire de préciser qu'il fallait que ce soit inévitablement à proximité immédiate. Cela démontre clairement qu'il n'y aura plus jamais de changement d'affectation possible à Genève, puisqu'on ne pourra plus procéder à ces changements, ni économiquement ni juridiquement.
Mme Alexandra Gobet (S). Pour les socialistes, l'amendement en question est tout simplement inacceptable. En effet, les conditions proposées pour les compensations de surfaces sont la porte ouverte à l'arbitraire. En effet, faire référence à des conditions de logement ou de loyer pour faire admettre une compensation ailleurs que dans le quartier dont il s'agit revient à accepter la migration de populations à l'extérieur de la ville pour permettre aux propriétaires de réaliser leurs projets sur des surfaces dont le prix du terrain s'avère plus intéressant. Il y a bien longtemps que nous avons refusé ce principe. La possibilité d'échange constitue déjà un assouplissement. Nous n'entendons pas prêter la main à de nouvelles opérations spéculatives.
La présidente. Je mets aux voix l'amendement de M. Ducrest que vous avez tous reçu entre-temps.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
M. Jacques Béné (L). Je me permets de revenir sur ce que je viens de vous dire. Avec cette notion de loyer répondant aux besoins prépondérants de la population, cela signifie, si vous avez un logement loué 4 500 F la pièce dans un endroit spécifique, que ce logement est affecté à un local commercial et qu'un local commercial est affecté à du logement à proximité, cela signifie que ce logement passera de 4 500 F la pièce à 3 225 F la pièce. Je ne vois pas quel raisonnement peut justifier ceci, si ce n'est de faire pression à la baisse sur les loyers de logements existants. Cela me pose un réel problème et je ne vois pas la justification de cette possibilité-là. Je vous invite donc à modifier - je n'ai pas rédigé d'amendement par écrit, Madame la présidente, mais ce sera suffisamment clair - la troisième ligne de la deuxième phrase de l'alinéa 2. Vous supprimez simplement « et avoir des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population ».
La présidente. Je veux bien faire voter cet amendement, Monsieur Béné, mais j'aurais quand même besoin d'un texte formellement écrit et signé de votre part. Je mets donc aux voix cet amendement.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
La présidente. Je fais à présent voter l'article 8, alinéa 2, avec les modifications figurant sur l'erratum qui vous a été distribué. Ces modifications corrigent des erreurs survenues lors de l'impression. Vous avez pu constater qu'une phrase du deuxième paragraphe a été reprise deux fois. Il faut supprimer la deuxième reprise : « les locaux réaffectés au logement [...] besoins prépondérants de la population ». Il y a une deuxième faute de frappe dans le troisième paragraphe : « à moins que le changement d'affectation ne soit effectué au profit d'un secteur comme le centre ville » et non pas « au profil ».
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 8, alinéa 2, ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 39, alinéa 4, est adopté.
Art. 39, al. 6
M. Pierre Ducrest (L), rapporteur de minorité. Voilà bien le cas typique du durcissement de cette loi. Il y a des gens, dans cette République, qui passe leur temps à réfléchir comment faire pour empêcher les choses de bien fonctionner, tout en tenant un discours trompeur sur la pénurie de logements, sur le manque de construction et sur le manque d'entretien des immeubles, et qui, ce discours étant fait, s'empressent d'introduire des articles coercitifs dans des lois telles que la LDTR.
L'article 39, alinéa 6, en est un cas typique. Si l'on voulait tout ramener à la LDTR, il faudrait que cette loi soit très puissante et qu'elle ait valeur de loi fédérale. Ce n'est guère qu'une loi cantonale. Par conséquent, elle doit s'adapter au droit fédéral, droit supérieur. L'article 39, alinéa 6, tel qu'il nous est proposé, constitue typiquement un cas d'espèce qui pourra être contesté au niveau fédéral. Que dit-il en substance ? Si l'office des poursuites vend ou réalise un gage pour qu'un créancier récupère son argent, il faudra que l'office des poursuites et des faillites vende l'entier d'un étage, voire l'entier d'un immeuble pour que cette vente soit valable. Pendant ce temps, le créancier ne rentrera pas dans son argent. Comme il est bien plus difficile de trouver un acquéreur pour plusieurs appartements, voire pour un immeuble entier, que plusieurs acquéreurs pour plusieurs appartements, il est évident que les personnes concernées ne récupéreront jamais l'argent qu'elles ont prêté. Est-ce la bonne méthode ? Est-ce que cela va encourager les prêteurs potentiels à engager de l'argent dans l'immobilier ? Voilà encore une question qui restera sans réponse, mais que les prêteurs potentiels méditeront à deux fois avant de prêter leur argent.
Libre à vous, à la majorité de ce Grand Conseil, de voter l'alinéa 6 de cet article 39. Je vous dis quant à moi qu'il s'agit d'un coup d'épée dans l'eau, car on va déboucher sur des conflits juridiques interminables qui finiront au Tribunal fédéral. Pendant ce temps-là, tout sera bloqué, pour les uns et pour les autres. Tout ceci à cause de l'imbroglio créé par un alinéa d'un article d'une loi que je veux qualifier de scélérate !
Mis aux voix, l'article 39, alinéa 6, est adopté.
Mis aux voix, l'article unique (souligné) est adopté.
Article 2 (souligné)
La présidente. Nous avons une proposition d'amendement du rapporteur de majorité.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Je veux souligner que cet article s'appliquera évidemment aux dispositions que nous sommes actuellement en train de voter, c'est-à-dire au projet de loi 8188 et non à la loi générale.
La présidente. L'amendement de M. Velasco figure à la page 18 du rapport. En voici la teneur :
Article 2 Entrée en vigueur
1 La présente loi entre en vigueur dès le lendemain de la publication de l'arrêté de promulgation.
2 Ses dispositions s'appliquent aux demandes d'autorisation pendantes devant le département au jour de son entrée en vigueur, ainsi qu'à celles qui, à ce même jour, font l'objet de procédures pendantes devant la commission de recours ou le Tribunal administratif.
3 Les alinéas 1 et 2 s'appliquent également aux modifications apportées à la présente loi.
Mis aux voix, cet amendement (adjonction de l'article 2 souligné) est adopté.
La présidente. Je vous propose de reprendre nos débats... (Brouhaha.) Le troisième débat est-il demandé ?
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Oui !
Troisième débat
La présidente. Le troisième débat étant demandé, je passe donc au vote d'ensemble de ce projet de loi avec une modification. L'article unique doit devenir l'article 1 (souligné) puisque vous venez de voter un article 2 (souligné).
M. Christian Grobet (AdG). Il a été fait allusion tout à l'heure à la lettre du Rassemblement en faveur d'une politique sociale du logement. Cette lettre soulève effectivement un problème. C'est la raison pour laquelle nous proposons de voter le troisième débat, mais sans l'article 39, alinéas 4 et 6. Que ces deux articles soient renvoyés en commission, mais que la loi soit votée en ce qui concerne l'article 8 qui a un caractère d'urgence !
M. Michel Parrat (PDC). Sans vouloir allonger, je propose un amendement à l'article 8, alinéa 2, consistant à substituer les termes « à proximité immédiate » - on parle des logements que l'on doit remplacer - par les termes « dans le quartier » . Cela permettrait de répondre aux besoins de conservation de logements dans un quartier, mais aussi de donner la souplesse nécessaire pour permettre quand même ces modifications, cette évolution de la ville.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Il se trouve qu'il n'y a pas de définition juridique du quartier. Nous ne pouvons donc pas accepter votre amendement, Monsieur Parrat. Par conséquent, je demande le rejet de cet amendement.
Article 1 (souligné)
La présidente. Je vous propose de procéder par ordre. Nous avons d'abord un premier amendement qui consiste à transformer l'article unique (souligné) en un article 1 (souligné), ce qui n'est que logique au vu de ce que vous venez de voter en introduisant un article 2 (souligné).
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Art. 8, al. 2
La présidente. Il s'agit de l'amendement que M. Parrat vient de vous exposer. Vous l'avez sur vos tables !
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Mis aux voix, l'article 8, alinéa 2, est adopté.
La présidente. Nous sommes saisis par M. Grobet d'une demande de renvoi en commission des articles 39, alinéa 4 et 39, alinéa 6.
M. Claude Blanc (PDC). C'est assez inhabituel, en troisième débat, de partager un projet de loi en deux et de n'en adopter qu'une partie. Dans le cas particulier, cela pourrait se faire compte tenu du fait que le rapport en question ne concerne qu'une partie du projet de loi. Vous ne pouvez cependant pas renvoyer comme cela des articles de lois, qui se baladeront dans la nature, s'ils ne sont pas rattachés à un projet de loi particulier. Nous allons voter en troisième débat le texte qui vient d'être discuté. Il sera publié comme loi. Quant au reste, il reviendra avec ce qui a déjà été renvoyé en commission. Si c'est comme cela que vous l'entendez, nous sommes d'accord.
La présidente. C'est parce que l'on peut, en commission, rattacher ces articles à un projet de loi en discussion, que nous pouvons procéder à ce vote.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer l'article 39, alinéas 4 et 6, à la commission du logement est adoptée.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Ce projet est adopté en troisième débat dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(8188-1)
modifiant la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) (L 5 20)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi), du 25 janvier 1996, est modifiée comme suit :
Art. 8, al. 2 (nouvelle teneur)
2 En cas de changement d'affectation, les surfaces de logements supprimées seront compensées par la réaffectation simultanée de surfaces commerciales ou administratives en logement.
Dans ce cas, les locaux réaffectés aux logements doivent correspondre à une surface ainsi qu'à des conditions de logement au moins équivalentes et avoir des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population.
De plus, les locaux réaffectés aux logements doivent être situés en règle générale dans le même quartier, si possible à proximité immédiate, à moins que le changement d'affectation ne soit effectué au profit d'un secteur comme le centre ville où la proportion de logement est faible par rapport aux surfaces d'activités.
Si le changement d'affectation a lieu à l'intérieur d'un tel secteur, la compensation doit être effectuée à proximité immédiate.
En cas de doute sur la nature du secteur ou, sur la demande du requérant, la commission d'urbanisme préavise.
Article 2 Entrée en vigueur
1 La présente loi entre en vigueur dès le lendemain de la publication de l'arrêté de promulgation.
2 Ses dispositions s'appliquent aux demandes d'autorisation pendantes devant le département au jour de son entrée en vigueur, ainsi qu'à celles qui, à ce même jour, font l'objet de procédures pendantes devant la commission de recours ou le Tribunal administratif.
3 Les alinéas 1 et 2 s'appliquent également aux modifications apportées à la présente loi.
La présidente. Nous reprendrons nos travaux à 17 h 15.
La séance est levée à 16 h 55.