Séance du vendredi 27 octobre 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 11e session - 49e séance

R 428
9. Proposition de résolution de Mmes et MM. Laurence Fehlmann Rielle, Alberto Velasco, Dominique Hausser, Elisabeth Reusse-Decrey, Alain Etienne et Régis de Battista soutenant l'installation à Genève du Forum Permanent pour les affaires autochtones. ( )R428

EXPOSÉ DES MOTIFS

Rôle de Genève pour la question des peuples autochtones

Genève a historiquement joué un rôle actif concernant la problématique des peuples autochtones et accueille aujourd'hui les conférences les plus importantes sur ce thème, à savoir :

le Groupe de travail sur les populations autochtones de la sous-commission de la promotion et de la protection des Droits de l'Homme de l'ONU ;

le Groupe de travail de la Commission des Droits de l'Homme sur le projet de Déclaration des droits des peuples autochtones ;

la Commission des Droits de l'Homme et la sous-commission de la promotion et de la protection des Droits de l'Homme qui consacrent un point spécifique aux droits des peuples autochtones ;

parallèlement, l'Organisation mondiale de la santé et l'Organisation mondiale pour la propriété intellectuelle ont chacune mis sur pied des consultations régulières avec les représentants des peuples autochtones.

Il faut aussi mentionner l'Organisation internationale du travail qui est à l'origine des deux seules conventions internationales relatives aux droits des peuples autochtones, les « Conventions 107 et 169 ».

En outre, plusieurs organisations contribuent activement à l'accueil et au soutien des représentants de peuples autochtones durant leur séjour à Genève. Il s'agit de :

Mandat International, qui offre un soutien logistique et permet notamment l'hébergement des représentants des peuples autochtones au moment des conférences. Il organise également des rencontres, des formations et les aide dans leurs démarches auprès des organisations internationales.

Le Conseil oecuménique des églises, qui a joué un rôle de pionnier dans le domaine dès la fin des années 60, aide financièrement certains délégués et met à leur disposition des locaux pour leurs rencontres.

Le doCip (Centre de documentation, de recherche et d'information pour les peuples autochtones) qui appuie les démarches des autochtones à Genève depuis 1978, met à leur disposition un secrétariat technique aux Nations Unies pendant les conférences et rédige un bulletin d'information pour les organisations autochtones. Le doCip gère aussi un centre de documentation spécialisé sur les peuples autochtones qui constitue la mémoire de leur travail à l'ONU et dont l'essentiel sera mis à la disposition du Forum Permanent ; il organise des stages de formation pour leurs délégués et est largement soutenu par la Confédération.

Le principe de la création d'un Forum Permanent pour les affaires autochtones est issu des travaux du Groupe de travail de la sous-commission de la promotion et de la protection des Droits de l'Homme et a été récemment accepté par l'ECOSOC (Conseil économique et social) auquel il sera rattaché. Ce Forum Permanent constituera donc un organe important de l'ONU. Il disposera d'un large mandat dans la mesure où les peuples autochtones représentent environ 300 millions de personnes, soit 5 % de la population mondiale, et que les questions les concernant couvrent de nombreux domaines, la plupart relevant d'organisations spécialisées de l'ONU présentes à Genève.

Choix du siège

L'ECOSOC se réunissant une année à Genève et une année à New York, le Forum Permanent s'établira vraisemblablement dans l'une de ces deux villes.

Les arguments en faveur de Genève sont nombreux puisque notre ville dispose de certaines infrastructures d'accueil qu'il conviendra d'améliorer le cas échéant, et que des organisations expérimentées offrent déjà un soutien adapté aux besoins des délégués autochtones. En outre, rappelons-le, Genève a été le lieu où s'est effectué l'essentiel du travail sur la question des peuples autochtones au plan international. La Confédération a été l'un des premiers Etats à soutenir l'adoption du projet de Déclaration des peuples autochtones. Enfin, la Suisse représente un système politique proche de certaines de leurs aspirations : démocratie directe, autonomie locale, etc. Genève bénéficie ainsi du soutien de nombreux délégués de peuples autochtones.

Néanmoins, le choix du siège dépendra du soutien politique des différents Etats pour l'une ou l'autre option et dans ce contexte, il est important que la Suisse et Genève donnent des signes clairs de leur intérêt à voir s'installer ici ce Forum Permanent.

Pour toutes ces raisons, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les député-es, de faire bon accueil à cette résolution et de la renvoyer au Conseil d'Etat.

Débat

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Comme nous l'avons rappelé dans ce projet de résolution, Genève a joué par le passé et joue toujours un rôle actif et constructif pour les affaires des peuples autochtones, tant au plan des organisations internationales que sur le plan des organisations non gouvernementales, qui offrent un soutien logistique et appuient les représentants des peuples autochtones dans leurs différentes démarches. Je pense en particulier au DoCip, le Centre de documentation, de recherche et d'information pour les peuples autochtones, qui est une source d'information unique au monde, et à Mandat International.

Le principe de la création d'un forum permanent pour les affaires autochtones est issu du groupe de travail de la sous-commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme, et a été récemment adopté par l'ECOSOC auquel il sera rattaché. Ce forum permanent disposera d'un large mandat dans la mesure où les peuples autochtones représentent environ 300 millions de personnes. Le choix du siège de ce forum est imminent et Genève a donc de bons arguments à faire valoir à cet égard. Il est néanmoins très important que les autorités de notre canton se mobilisent et donnent des signes clairs en faveur de l'établissement de ce forum sur notre territoire. Si Genève est choisie, cela contribuera à renforcer sa position comme haut lieu d'accueil et de soutien des minorités.

Il convient aussi de souligner que ce forum ne devrait pas demeurer un lieu où seuls les délégués internationaux seraient concernés, mais que des synergies pourraient être trouvées avec la cité, notamment au travers du futur musée d'ethnographie, ou dans le cadre de certaines manifestations. On a également évoqué la possibilité de créer une Maison des peuples autochtones, qui représenterait un organisme indépendant au service des peuples autochtones, d'où ils pourraient coordonner leur stratégie et consulter leur base, selon le mode de fonctionnement qui leur est propre. Cela serait un élément concret qui permettrait de donner une cohésion à l'ensemble de la démarche. Les représentants des peuples autochtones sont en effet très attentifs à ce qui contribue réellement à faire avancer leur cause et ne se contentent plus maintenant de vagues promesses.

Pour toutes ces raisons, je vous engage, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter ce projet de résolution et à le renvoyer au Conseil d'Etat.

M. Alain-Dominique Mauris (L). Voilà certainement un sujet sur lequel le soutien de l'ensemble des députés est nécessaire, nécessaire bien sûr pour donner un signe précis sur la volonté du parlement genevois de soutenir l'installation à Genève du Forum permanent pour les affaires autochtones.

Dans le respect de la tradition d'accueil, notre cité agissait déjà en pionnière dès 1920, puisqu'elle recevait une première délégation d'Iroquois. Puis, dans les années 50, plusieurs représentants de peuples autochtones se réunissaient pour la Convention 107 et, dès 1977, les autochtones se retrouvent régulièrement à Genève, dont ils ont fait leur capitale. Toutefois, rien n'est encore assuré pour garantir leur maintien à Genève, la décision finale appartenant bien entendu aux Etats. Dès lors, il est primordial de prendre une position claire et d'énoncer des propositions concrètes et convaincantes, militant pour Genève.

Soutenir l'installation de la Maison des peuples autochtones et y ouvrir huit espaces correspondant aux régions du monde concernées est certainement un bon exemple. Autre exemple : l'aide qui a été apportée aux aborigènes d'Australie pour leur permettre de finir et présenter un travail destiné à l'ONU, qui a eu le succès que l'on sait sur les décisions politiques australiennes à l'époque. En plus du soutien logistique, il est bon de rappeler que le peuple genevois a su très vite ouvrir ses foyers pour y loger des représentants des peuples autochtones et a su les inviter dans ses communes lors de célébrations patriotiques, en leur accordant une tribune pour s'y exprimer. La voix de ces peuples se fait entendre, est reconnue au parlement : à nous de les écouter pour les comprendre et de soutenir cette résolution !

M. Robert Cramer. Il va de soi que le Conseil d'Etat accepte avec gratitude cette résolution, qui constitue un soutien dans les démarches que fait actuellement le Conseil d'Etat et sur lesquelles je vais peut-être vous dire un mot.

S'il est vrai, comme cela a été rappelé tout à l'heure, que la question se pose de savoir si le siège du Forum permanent pour les affaires autochtones va être à New York ou à Genève, il faut savoir que les peuples autochtones eux-mêmes sont divisés sur cette question et que ni la Confédération suisse, ni le canton de Genève n'entendent choisir à la place des peuples autochtones. Dans un premier temps, il convient donc que ce débat interne aux peuples autochtones et à leurs diverses organisations trouve une conclusion. A vrai dire, on peut comprendre leur embarras, parce que les deux localisations ont leurs avantages et leurs inconvénients - vous me permettrez de ne pas entrer dans les détails à ce sujet.

Au-delà du soutien concernant l'accueil à Genève de ce forum permanent, des actions sont menées. D'abord, par la Confédération, qui soutient le forum permanent avec une aide financière. Cette aide accordée au DoCip, le Centre de documentation pour les peuples autochtones, était, pour 1999, de 120 000 F, somme reconduite pour l'année 2000. Ensuite, le Conseil d'Etat est intervenu par de nombreuses actions, dont je voudrais rappeler la plus importante et la plus récente : il s'agit des rapports que nous entretenons avec le DoCip, et notamment de l'aide logistique que nous lui apportons actuellement dans le cadre de la recherche de locaux. En l'occurrence, il est évident que les besoins de ce centre vont être différents selon les décisions qui seront prises dans l'arène internationale quant à la localisation du forum.

Quoi qu'il en soit, cette résolution est effectivement bienvenue. Un vote massif des députés présents dans cette salle marquera votre soutien et rassurera le Conseil d'Etat sur le bien-fondé de ses actions.

Mise aux voix, cette résolution est adoptée. Elle est renvoyée à au Conseil d'Etat.

Elle est ainsi conçue :

Résolution(428)soutenant l'installation à Genève du Forum Permanent pour les affaires autochtones

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :