Séance du jeudi 21 septembre 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 10e session - 42e séance

PL 8059-A
17. Rapport de la commission de l'enseignement supérieur chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur l'université (déléguée aux questions féminines) (C 1 30). ( -) PL8059
Mémorial 1999 : Projet, 3178. Renvoi en commission, 3196.
Rapport de Mme Véronique Pürro (S), commission de l'enseignement supérieur

La Commission de l'enseignement supérieur a examiné le rapport du Conseil d'Etat sur la motion 951-A et le projet de loi 8059 lors des séances du 26 août, des 16 et 30 septembre, du 14 octobre, des 4, 11 et 25 novembre, du 9 décembre 1999 et du 27 janvier 2000 sous la présidence de Mme Janine Hagmann.

M. Eric Baier, secrétaire adjoint du DIP, a assisté la commission dans ses travaux et MM. Jean-Luc Constant et Jérôme Savary, procès-verbalistes, ont assuré la prise de note des séances. Qu'ils soient tous trois remerciés pour leur précieuse collaboration.

Rappel

La loi sur l'université (C 1 30), du 26 mai 1973, dans son volet consacré à l'égalité entre femmes et hommes, est entrée en vigueur le 27 juillet 1991. Depuis lors, de nombreux rapports, initiatives et interpellations ont été déposés par différents organes sur les mesures mises en place et leur évaluation.

Cette dernière fait ressortir plusieurs points figurant dans le rapport du Conseil d'Etat sur la motion 951-A et dans l'exposé des motifs du projet de loi 8059. Les principaux d'entre eux sont les suivants :

la nécessité de mettre en place des mesures spécifiques pour augmenter le nombre de femmes aux différents niveaux du corps enseignant et plus particulièrement au niveau des professeurs-es (en 1996 sur un total de 407 professeurs-es, seules 35 étaient des femmes !) et, en amont, d'accroître le nombre de doctorantes ;

la nécessité de développer la question du genre, centrée sur le thème des rapports sociaux entre femmes et hommes, et l'importance qu'elle fasse partie intégrante de la formation initiale et puisse ainsi toucher l'ensemble des étudiants-es des premiers et deuxièmes cycles ;

l'intérêt, notamment dans la perspective de disposer d'un nombre suffisant de personnes formées dans la discipline de l'égalité, du développement du Diplôme d'études approfondies (DEA) interuniversitaire en études genres, basé sur la pluridisciplinarité et sur une approche intégrée de la problématique de l'égalité entre femmes et hommes ;

les difficultés à repourvoir le poste de déléguée aux questions féminines par une femme professeure ordinaire, comme la loi actuelle l'exige à son article 75 A, démontrées par la vacance du poste depuis le départ de Mme Anne-Lise Head, professeure ordinaire, le 30 septembre 1997 ;

l'exigence de consacrer des ressources financières suffisantes au poste de déléguée aux questions féminines pour permettre à cette dernière de remplir correctement sa mission.

En résumé, tous les acteurs-trices concerné-e-s s'entendent pour dire que la constitution d'une relève féminine doit devenir une des tâches prioritaires des autorités universitaires. Les efforts entrepris et les mesures développées doivent être renforcés. Seule une politique systématique, cohérente et soutenue d'encouragement des femmes dans une carrière universitaire, s'appuyant sur la synergie d'actions menées en parallèle dans différents domaines, sera en mesure de faire progresser l'égalité des femmes à l'université.

Par ailleurs, les difficultés à trouver une femme professeure pour occuper le poste de déléguée aux questions féminines a encouragé le rectorat, soutenu par la Commission de l'égalité de l'université et par le Bureau de l'égalité, à proposer une modification de la loi.

Dans ce sens, le Conseil d'Etat suggère dans le projet de loi 8059 de créer un poste de déléguée aux questions féminines appartenant au corps du personnel administratif et technique de l'université.

Auditions

Audition de Mme Anne-Lise Head, professeure ordinaire, ancienne déléguée aux questions féminines de l'université

Mme Mme A.-L. Head n'est pas favorable à la proposition visant à créer un poste de déléguée au corps du personnel administratif et technique, pour plusieurs raisons. Afin d'exercer sa fonction avec efficacité, la déléguée à l'égalité doit notamment posséder de solides compétences scientifiques, occuper une fonction que lui garantit une totale indépendance par rapport au rectorat et une entière liberté dans les commissions de nomination. Un-e membre du personnel administratif et technique n'occupe pas un poste permettant de remplir ces conditions, raison pour laquelle la plupart des universités qui ont montré une réelle volonté de faire progresser la situation des femmes ont désigné des professeures à de tels postes. Mme A.-L. Head insiste par ailleurs sur l'importance de la personnalité de la personne retenue et des moyens consacrés à l'exercice de cette fonction. Mme A.-L. Head s'étonne des procédures mises en place par l'ancien rectorat pour repourvoir le poste à son départ : des noms ont été avancés, sans que le recteur n'ait jamais jugé nécessaire de recevoir les éventuelles candidatures. Enfin, Mme A.-L. Head, en réponse à la question d'un commissaire, peut envisager qu'un tandem soit désigné pour faire face au volume conséquent de la tâche.

Audition de Mme Luisette Zaninett, vice-présidente, MM. Andreas Bucher, président, et Albert de Pury, vice-président du sénat de l'université

Par la voix de son président et de ses vice-présidents, le sénat de l'université a fait connaître son avis défavorable concernant le projet de loi 8059. En effet, il estime indispensable, pour promouvoir réellement l'égalité au sein de l'institution, de désigner une personne de rang académique qui dispose ainsi des compétences requises pour suivre les questions scientifiques et de l'autorité nécessaire pour pouvoir se faire entendre et s'exprimer notamment lors des procédures de nomination. Le personnel administratif et technique ne correspond pas à ce profil. De plus, étant subordonné au rectorat, il ne possède pas l'autonomie nécessaire pour l'exercice d'une telle fonction. Les personnes auditionnées mettent également l'accent sur l'importance de la disponibilité, sachant que le nombre des nominations prévues pour les prochaines années est conséquent. Enfin, elles s'interrogent sur la vacance du poste de déléguée aux questions féminines, qui serait en partie conséquente au fait que le rectorat n'ait pas entrepris des démarches actives auprès des femmes professeures susceptibles d'occuper le poste.

Audition de Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat, responsable du DIP et de M. Claude Raffestin, vice-recteur de l'université

Lors de son audition, Mme M. Brunschwig Graf relève que si le problème de la déléguée mérite de trouver rapidement une solution, il convient de ne pas oublier que d'autres mesures sont également importantes pour promouvoir les femmes. Ainsi, elle accorde par exemple une attention particulière à la formulation non sexiste des annonces dans la presse et marque une volonté particulière à ne pas entrer en matière sur des dossiers qui ne présentent pas de candidatures féminines.

Mme Mme M. Brunschwig Graf ne pense pas que l'enjeu se situe au niveau du poste occupé par la déléguée aux questions féminines (professeur-e ou personnel administratif et technique), ni sur son statut (semi-milicien-enne ou professionnel-elle) mais plutôt sur la légitimité et les compétences en matière de promotion de l'égalité de la personne nommée. Enfin, Mme M. Brunschwig Graf se montre ouverte sur la proposition de mettre en place une délégation à l'égalité.

M. M. Cl. Raffestin, favorable au projet du Conseil d'Etat, estime que la contrainte de confier la fonction de déléguée à l'égalité à une professeure est difficilement compatible avec celle d'une carrière scientifique. En effet, dans la mesure où il conviendrait de nommer à cette fonction une personne à plein temps, celle-ci serait alors amenée à devoir sacrifier son travail scientifique.

Audition de Mmes Martine Chaponnière et Mercedes Fretz-Chevalier, membres de la Commission consultative de l'égalité des droits entre hommes et femmes et du groupe de travail « Femmes et université »

Mme Mme M. Chaponnière précise que la Commission consultative de l'égalité des droits entre femmes et hommes a mis sur pied depuis 1998 un groupe de travail « Femmes et université » composé de représentantes des associations ayant été à l'origine de la loi en 1991 sur l'égalité et les études genres (Femmes Féminisme et Recherche, Association pour les droits de la femme, Centre de liaison des associations féminines et Association des femmes universitaires) et chargé de débloquer la situation dans laquelle a été placée l'université par la démission de la professeure A.-L. Head du poste de déléguée.

Mme Mme M. Chaponnière rappelle que deux visions du statut de la déléguée ont fait l'objet de vives discussions lors des débats sur la loi. La première suggérait que la déléguée soit en possession d'un statut administratif et soit issue d'un rang équivalent à celui de secrétaire générale, la seconde proposait que la déléguée soit professeure ordinaire, notamment afin de permettre son intervention dans les procédures de nomination. La vacance du poste de déléguée depuis plus de deux ans montre à l'évidence le caractère inapplicable de la loi actuelle et la nécessité de revenir sur la première vision du statut de déléguée.

Mme Mme M. Chaponnière rappelle également que la loi stipule à son article 75A que « la déléguée veille au développement des programmes d'enseignement et de recherche consacrés aux questions féminines » Ainsi, dans l'esprit de la loi, les deux missions principales de la déléguée, soit la promotion des femmes et le développement des études genres, constituent deux facettes d'une même réalité. La synergie prévue entre les deux types d'activité entend d'une part concilier la promotion des femmes dans le cursus universitaire avec l'étude des causes de discriminations faites aux femmes et d'autre part créer un certain équilibre dans le poste de déléguée composée d'un volet « gratifiant » consistant dans la promotion des études genres et d'un volet plus « ingrat », en particulier au niveau des procédures de nomination.

Mme Mme A.-L. Head ayant conservé ses responsabilités au niveau des études genres, la synergie entre les deux types d'activité, souhaitée par le législateur, n'est plus réalisée. Par conséquent il est nécessaire de revoir le mandat de déléguée en mettant l'accent sur les procédures de nomination ainsi que sur la mise en place et le contrôle des mesures de promotion des femmes à l'université. Mme M. Chaponnière insiste sur les compétences en matière d'égalité et de promotion des femmes de la personne retenue au poste de déléguée. Ces compétences sont actuellement acquises grâce au développement de connaissances techniques et scientifiques reconnues. Malheureusement cette discipline ayant tardivement été introduite à Genève ne permet pas à l'université de compter en son sein sur des professeurs-es scientifiquement compétent-e-s en la matière. Raison supplémentaire pour laquelle il est indispensable de revenir sur les exigences en terme de fonction du poste de déléguée.

A une question d'un commissaire, Mme M. Chaponnière précise enfin que le problème n'est pas tant de savoir par qui la déléguée doit être nommée mais de qui elle va dépendre. Cependant, si, comme le suggère le commissaire, le Conseil académique ou le Conseil de l'université est l'instance compétente pour la nomination, la déléguée aura un statut détaché du rectorat.

Position de l'université

Dans une communication de M. Maurice Bourquin, recteur, adressée aux membres de la commission, le rectorat a souhaité préciser qu'un des objectifs de sa politique générale est la promotion des femmes dans le domaine académique. Dans cette optique, le rectorat s'engage à mettre en oeuvre une série de mesures et plus particulièrement des projets dans le cadre du programme d'égalité des chances financés par la Confédération. La réalisation de ces mesures nécessite, selon le rectorat, l'engagement à plein temps d'une déléguée aux questions féminines avec la fonction d'adjointe du rectorat placée sous la responsabilité d'un-e vice-recteur-trice, lui/elle-même chargé-e des questions féminines et de la présidence de la Commission de l'égalité.

Concernant les procédures de nomination des membres du corps professoral, le rectorat étant compétent pour examiner les rapports des commissions de nomination et des experts-es, compte s'appuyer sur la déléguée aux questions féminines qui a le droit, selon l'article 42 de la loi sur l'université, de participer en tout temps à l'examen des candidatures.

Enfin, le rectorat considère que la modification proposée dans le projet de loi 8059 est convenable étant donné qu'elle lui permettra d'engager une personne spécialement chargée de remplir la tâche en question, non professeure, mais d'un niveau académique cependant élevé, à un poste classé à un niveau de cadre supérieur.

Discussion de la commission et conclusion

La discussion de la commission a porté essentiellement sur les points suivants : le choix entre une déléguée ou une délégation, la fonction, le rang (personnel administratif et technique ou professeur-e ordinaire), les compétences et le sexe de la ou des personnes nommées pour promouvoir l'égalité au sein de l'université.

La nomination des membres du corps professoral a également fait l'objet d'un débat, durant lequel il a été rappelé que le Conseil d'Etat était, en la matière, la seule autorité compétente. Le Conseil d'Etat peut ainsi se saisir en tout temps de cette compétence pour faire avancer la promotion des femmes au sein de l'université.

La question du rang académique ou non de la déléguée aux questions féminines

Dans son projet de loi, le Conseil d'Etat proposait le maintien d'un poste de déléguée aux questions féminines, repourvu toutefois non plus par une femme professeure ordinaire, mais par une personne appartenant au personnel administratif et technique de l'université. Le Conseil d'Etat inscrivait son projet de loi dans l'idée qu'il était fortement souhaitable que la déléguée aux questions féminines puisse consacrer une partie importante de son temps aux procédures de nomination. Il constatait qu'une déléguée professeure ordinaire, devant également être disponible pour l'exercice de ses travaux académiques, n'aurait pas ce temps à disposition, même avec une décharge académique.

Les membres de la commission n'ont pas été satisfaits par ce changement de rang pour toutes les raisons évoquées par les opinions défavorables au projet de loi exprimées lors des auditions et plus particulièrement le manque de compétences scientifiques, l'absence de légitimité vis-à-vis des professeurs-es ordinaires et le manque d'autonomie par rapport au rectorat. Toutefois, la solution, retenue par l'ensemble des membres de la commission, de constituer une délégation permet de concilier à la fois l'exigence de la compétence avec le souci de la disponibilité, deux critères indispensables pour pouvoir mener une action efficace.

En composant la délégation aux questions féminines « d'au moins deux professeurs ordinaires et d'une déléguée à temps complet » (Art. 75, al.1), les membres de la commission ont toutefois fait un pas en direction de la proposition du Conseil d'Etat, étant donné que tous les membres de la délégation ne doivent pas nécessairement être de rang académique.

Le sexe et les compétences des personnes nommées au sein de la délégation aux questions féminines

Les membres de la commission ont également abordé le profil des personnes composant la délégation. Certains commissaires souhaitaient laisser au rectorat la plus grande liberté d'appréciation dans le choix des personnes. D'autres pensaient au contraire qu'il fallait préciser les compétences et le sexe de ces personnes. Finalement, tous les membres se sont entendus pour une formulation qui veille à une représentation équitable de deux sexes et qui indique l'importance accordée aux compétences en matière d'égalité et de promotion de la femme.

En conséquence de tous ces éléments, Mesdames et Messieurs les députés-ées, les membres de la Commission de l'enseignement supérieur vous recommandent d'adopter le présent projet de loi dans sa teneur à l'issue de leurs travaux.

Projet de loi(8059)

modifiant la loi sur l'université (déléguée aux questions féminines) (C 1 30)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article unique

La loi sur l'université, du 26 mai 1973, est modifiée comme suit :

Art. 42, al. 3 (nouvelle teneur)

3 La commission est présidée par le doyen ou le président de la faculté ou de l'école ou par une personne désignée par lui. Le ou la représentant-e de la délégation aux questions féminines a le droit de participer en tout temps à l'examen des candidatures et un observateur du département de l'instruction publique à la phase finale des travaux de la commission.

Art. 43, al. 4 (nouvelle teneur)

4 En cas de plainte pour violation de la règle de préférence énoncée à l'article 26A, alinéa 1, le rectorat constitue une commission ad hoc, présidée par un vice-recteur et formée de deux professeurs ordinaires ou d'école de chaque sexe, désignés hors de la faculté ou de l'école concernée. Le ou la représentant-e de la délégation aux questions féminines participe à l'examen du dossier. Le règlement d'application détermine les conditions et les modalités du droit de plainte.

Art. 47, al 2, lettre b (abrogée)

Art. 75A (nouvelle teneur)

1 Une délégation aux questions féminines, composée d'au moins deux professeurs ordinaires et d'une déléguée à temps complet, est désignée par le rectorat. Une représentation équitable entre femmes et hommes est assurée parmi les professeurs ordinaires. Les membres de la délégation ont les compétences requises en matière d'égalité et de promotion de la femme.

2 En collaboration avec les facultés et écoles, la délégation veille au développement des programmes d'enseignement et de recherche consacrés aux questions féminines.

3 La délégation assiste le rectorat dans la mise en oeuvre du principe de l'égalité des droits et des chances entre femmes et hommes, en particulier de la promotion de la femme.

4 La mission et les attributions de la délégation sont précisées dans le règlement de l'université.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que la motion 951 avait déjà été retirée.

Premier débat

Mme Véronique Pürro (S), rapporteuse. Je n'ai pas grand-chose à rajouter, Monsieur le président, si ce n'est que l'unanimité des commissaires témoigne, d'une part, de l'importance que revêt pour nous la question de la promotion de l'égalité au sein de l'université et, d'autre part, de notre volonté de demander des comptes à l'institution en la matière. En effet, le nombre de femmes qui sont professeurs ordinaires à l'heure actuelle n'est pas admissible, si on se place dans une logique d'égalité entre les sexes. Nous espérons donc vraiment que la politique du nouveau recteur, qui nous a dit - en tout cas en commission - être très attaché à la politique d'égalité des sexes, se manifeste dans la réalité par des actes concrets pour promouvoir les femmes au sein de l'institution universitaire.

Par ailleurs, en lisant tout à l'heure la loi qui se trouve à la fin du rapport, nous avons remarqué avec Mme Janine Hagmann, présidente de la commission de l'université, une erreur de frappe. J'ai donc déposé un amendement pour corriger cette erreur. Je pense que l'amendement vous a été remis. Il s'agit, à l'article 43, alinéa 4, troisième ligne, de supprimer «...ou d'école...». Le texte deviendrait donc :

«...le rectorat constitue une commission ad hoc, présidée par un vice-recteur et formée de deux professeurs ordinaires de chaque sexe...» 

Mme Janine Hagmann (L). Puisque Mme Pürro a évoqué son amendement, je vous informe qu'en ma qualité de présidente j'en ai aussi déposé un. Je vais le développer maintenant, Monsieur le président, si vous êtes d'accord, même si vous n'en êtes pas encore à l'article 43.

Mon amendement fait suite à celui de Mme Pürro, en ce sens que, comme vous le savez tous, les universités sont composées de facultés, d'écoles et d'instituts et que nous avons oublié de faire apparaître le terme «institut», qui doit figurer à l'article 43, alinéa 4, à la quatrième ligne après : «...hors de la faculté, de l'institut ou de l'école concernés.», en mettant un masculin pluriel à concernés, puisque les trois sont concernés par concernés...

M. Bernard Lescaze. Il faut mettre institut à la fin !

Mme Janine Hagmann. ...ou alors en mettant institut à la fin, comme le dit M. Lescaze, pour éviter de mettre un mot féminin devant l'adjectif qui est au masculin. D'accord ! Voyez, nous sommes de nouveau dans un problème de féminin/masculin !

Et puis, à l'article 75, alinéa 2 : «En collaboration avec les facultés, instituts et écoles...». Alors, si M. Lescaze préfère que l'on mette instituts après écoles, je n'y vois pas d'inconvénient, ce qui donnerait : «En collaboration avec les facultés, écoles et instituts...».

Je vous remercie de bien vouloir prendre note de ces amendements.

Je voudrais juste préciser que la commission a travaillé avec beaucoup de conscience et de plaisir sur cette question de l'égalité. Il a été très agréable de se trouver dans un climat absolument pas politisé. Nous avons eu des discussions tout à fait intéressantes, et le recteur que nous avons auditionné plusieurs fois ainsi que la présidente du DIP ont montré tous les deux leur volonté d'améliorer les choses dans ce domaine, comme souhaité par la commission toute entière. 

M. Bernard Lescaze (R). J'aimerais tout d'abord souligner combien Mme Pürro a bien résumé les débats de la commission, ce qui n'était pas si facile, et combien aussi elle a su le faire avec délicatesse. (Exclamations.) En réalité, ce rapport est très consensuel et il y a eu unanimité de la commission.

Toutefois, certains points précis, non sans importance, ont été finalement réglés - je ne sais pas si j'ose le dire - à la satisfaction de tous ou, en tout cas, à la satisfaction générale. En effet, le problème de la promotion de la femme, notamment dans le milieu universitaire qui est un milieu extrêmement machiste, est un problème récurent depuis des années, et il faut savoir gré à Mme Brunschwig Graf d'essayer de l'empoigner, parce que si nous n'avions dû compter que sur les universitaires, nous serions encore très loin. Mme Pürro a su délicatement esquisser cet aspect des choses sans trop insister.

Je vais vous en donner un exemple : l'université a longuement essayé de nous imposer non pas une délégation mais une déléguée qui n'aurait pas eu rang de professeur ordinaire et qui aurait simplement été une adjointe au rectorat, c'est-à-dire une employée du rectorat. Cela paraît mineur, mais, en réalité c'est assez significatif, car si cette délégation doit s'occuper de vérifier que les femmes ne sont pas prétéritées à l'université une simple déléguée peut très bien le faire dans la plupart des postes universitaires, à l'exception des postes de professeurs ordinaires.

Toute personne connaissant le fonctionnement de l'université sait parfaitement que seul un ou une professeur ordinaire peut se faire entendre de ses collègues, de ses égaux, de ses pairs dans un tel débat. Il était donc particulièrement important qu'il y ait une délégation composée d'au moins deux professeurs ordinaires : un si possible de sciences exactes ou de médecine et l'autre de sciences humaines. Et je tiens à le redire ici, parce que le rectorat prétend parfois qu'il est très difficile de trouver des femmes professeurs ordinaires qui veuillent accepter cette charge - en effet, c'est une charge et pas simplement un honneur. Seulement il se trouve que les quelques femmes professeurs ordinaires interrogées n'ont même jamais été contactées pour une telle fonction ! On peut donc se dire qu'il y a parfois des réticences un peu curieuses...

La précédente déléguée à la condition féminine à l'université, si je puis employer ce titre, a exercé - il s'agissait de Mme Head - cette fonction pendant plusieurs années, et même s'il y avait parfois des critiques, un peu injustifiées à mon avis personnel, elle l'a fait parfaitement bien. On s'en aperçoit d'autant mieux que, depuis qu'il n'y a plus personne, la situation s'est nettement péjorée.

Je dis ici à tout le monde, sans approfondir, que rien qu'au cours de l'été dernier des problèmes quant à la position de femmes professeurs se sont posés tant à la faculté de médecine qu'à la faculté de droit et à l'école de traduction et d'interprétation. Et, dans les trois cas, qui sont tous les trois des cas différents - il s'agissait soit de personnes à nommer, soit de personnes à confirmer, soit de personnes déjà nommées - on peut constater que la loi actuelle de l'université, qui prévoit qu'à égalité de dossier le sexe sous-représenté - en clair, à l'heure actuelle, le sexe féminin - doit l'emporter, n'a pour l'instant tout simplement pas été appliquée. Et j'espère que non seulement le rectorat mais aussi la présidente du département sauront la faire respecter.

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à souscrire aux conclusions du rapport de Véronique Pürro et à accepter ce projet de loi. 

M. Albert Rodrik (S). Nous avons commencé nos travaux en entendant une délégation du rectorat qui, levant les bras au ciel, disait qu'aucun prof n'en voulait et qu'il fallait recruter du personnel administratif pour s'en occuper... Cela pour dire que les choses avaient mal commencé ! Effectivement, le rapport de notre collègue Pürro ne rend pas l'atmosphère tendue sur ce point, et elle a eu bien raison, parce qu'il faut mettre fin aux choses sans importance.

En fin de compte, nous avons fait un pas vers le rectorat en comprenant bien qu'il avait un problème. Toutefois, il ne faudrait pas qu'il en déduise que ce n'est pas un objectif politique majeur auquel nous sommes unanimement attachés que de promouvoir sérieusement l'égalité des droits entre hommes et femmes au sein de l'université.

Alors, nous avons imaginé cette délégation, parce que, comme le disait notre ami Lescaze tout à l'heure, quand vous ne mettez pas un prof ordinaire dans l'affaire à l'université, les choses ne vont pas très loin... Cela signifie que nous resterons, en tant que corps politique, régulièrement attentifs au fait que cette égalité progresse et se concrétise. Au fond, c'est pour qu'une attention quasi quotidienne soit exercée que nous confions cette affaire à la cheffe du département de l'instruction publique, sinon les choses ne se concrétiseraient pas.

Nous pouvons donc voter ce texte. 

Mme Véronique Pürro (S), rapporteuse. M. Lescaze a commencé son intervention par des flatteries à mon égard, mais la suite était beaucoup moins flatteuse... Et comme M. Rodrik a un petit peu enfoncé le clou, j'aimerais apporter quelques précisions, parce que je n'aimerais pas que l'on pense que mon rapport est trop consensuel et entrerait trop dans la logique du rectorat...

Je rappelle à mes deux collègues qu'en page 5 ils trouveront un résumé de l'audition de Mme Martine Chaponnière et de Mme Mercedes Fretz-Chevalier, qui sont toutes les deux membres de la Commission consultative de l'égalité des droits entre hommes et femmes et du groupe de travail «Femmes et université» et qu'on ne peut certainement pas taxer de consensuelles. Mme Chaponnière nous a bien dit, lors de son audition, qu'elle pensait qu'il convenait de revenir en arrière s'agissant du statut au vu de ce qui s'était passé, et qu'elle et son groupe de travail étaient d'accord pour que la déléguée ne soit pas forcément professeur ordinaire et pouvaient entrer en matière sur une déléguée qui soit rattachée à l'administration.

Ce n'est donc pas une volonté d'être consensuelle qui a dicté mon rapport ! J'ai simplement essayé d'être le plus proche possible des différentes auditions auxquelles nous avons procédé. 

Mme Martine Brunschwig Graf. Pour vous rassurer, Monsieur le président, je dirai qu'il n'est pas nécessaire de faire encore de longs débats...

Je remercie la commission de ses travaux. Comme vient de le dire Mme la rapporteure, le dépôt de ce projet de loi était consécutif à un rapport fait par la commission, qui demandait précisément la présence d'une déléguée pour qu'un contrôle soit exercé sur le déroulement des opérations en matière de promotion des femmes à l'université. La solution qui a été trouvée est bonne. Elle permet d'assurer la pérennité des travaux sur les questions de commissions de nominations mais aussi sur les contrôles à effectuer en rapport avec ces commissions de nomination. Elle permet également des actions de promotions qui ne sont pas nécessairement lié à des nominations mais à la valorisation des fonctions pour les femmes au sein de l'université. C'est bien comme cela qu'il faut la comprendre.

En tant que présidente du département, je n'ai plus qu'à vous assurer - je vous l'ai déjà dit et cela va de soi - de mon plein soutien à la volonté du parlement, qui s'inscrit dans la loi votée par le Grand Conseil en 1992. Je suis en mesure de vous préciser que depuis quelques années je n'accepte plus les propositions d'experts qui ne comprennent pas au moins le nom d'une femme sur les deux noms que le département transmet aux commissions de nominations. Toute proposition qui ne me laisse pas le choix de prendre au moins une femme sur cinq noms proposés est refusée. Dans de très rares cas seulement, cette règle peut ne pas être respectée, lorsque, par exemple, il s'agit d'une spécialité où on ne trouve pas de femmes.

J'ai une deuxième préoccupation, et ce sera ma conclusion : outre les efforts que nous fournissons déjà, il faut également faire en sorte d'attirer davantage les femmes. En effet, les annonces qui paraissent dans les journaux, même si elles comportent un paragraphe ajouté à la fin du texte disant que l'employeur est soucieux d'attirer des candidatures féminines, ne devraient plus être formulées avec des termes masculins. Et en ce qui me concerne, chaque fois que j'en vois une qui ne correspond pas aux normes, je le signale à l'université. Les femmes qui ont des liens particuliers avec le journal «Femmes suisses» feraient bien de me soutenir dans ma démarche pour que ce journal renonce définitivement à accepter les annonces les plus machistes que j'ai jamais vues !

Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je souhaitais vous dire en conclusion. 

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Article unique (souligné)

Mis aux voix, l'article 42, alinéa 3, est adopté.

Art. 43, al. 4 (nouvelle teneur)

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement présenté par Mme Pürro, qui consiste à supprimer «ou d'école» à la troisième ligne de l'article 43, alinéa 4, ce qui donne :

«4...le rectorat constitue une commission ad hoc, présidée par un vice-recteur et formée de deux professeurs ordinaires de chaque sexe, désignés...»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Le président. Nous sommes saisis d'un autre amendement présenté par Mme Hagmann, qui consiste, toujours au même article, même alinéa, à ajouter «de l'institut», ce qui donne :

«4...de chaque sexe, désignés hors de la faculté, de l'école ou de l'institut concernés.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mis aux voix, l'article 43, alinéa 4, ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'article 47, alinéa 2, lettre b), est adopté.

Art. 75A (nouvelle teneur)

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement, semblable au précédent, présenté par Mme Hagmann, consistant à ajouter «instituts» à l'alinéa 2 de l'article 75A, ce qui donne :

«2En collaboration avec les facultés, écoles et instituts, la délégation...»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mis aux voix, l'article 75A ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'article unique (souligné) est adopté.

Troisième débat

Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi(8059)

modifiant la loi sur l'université (déléguée aux questions féminines) (C 1 30)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article unique

La loi sur l'université, du 26 mai 1973, est modifiée comme suit :

Art. 42, al. 3 (nouvelle teneur)

3 La commission est présidée par le doyen ou le président de la faculté ou de l'école ou par une personne désignée par lui. Le ou la représentant-e de la délégation aux questions féminines a le droit de participer en tout temps à l'examen des candidatures et un observateur du département de l'instruction publique à la phase finale des travaux de la commission.

Art. 43, al. 4 (nouvelle teneur)

4 En cas de plainte pour violation de la règle de préférence énoncée à l'article 26A, alinéa 1, le rectorat constitue une commission ad hoc, présidée par un vice-recteur et formée de deux professeurs ordinaires de chaque sexe, désignés hors de la faculté, de l'école ou de l'institut concernés. Le ou la représentant-e de la délégation aux questions féminines participe à l'examen du dossier. Le règlement d'application détermine les conditions et les modalités du droit de plainte.

Art. 47, al 2, lettre b (abrogée)

Art. 75A (nouvelle teneur)

1 Une délégation aux questions féminines, composée d'au moins deux professeurs ordinaires et d'une déléguée à temps complet, est désignée par le rectorat. Une représentation équitable entre femmes et hommes est assurée parmi les professeurs ordinaires. Les membres de la délégation ont les compétences requises en matière d'égalité et de promotion de la femme.

2 En collaboration avec les facultés, écoles et instituts, la délégation veille au développement des programmes d'enseignement et de recherche consacrés aux questions féminines.

3 La délégation assiste le rectorat dans la mise en oeuvre du principe de l'égalité des droits et des chances entre femmes et hommes, en particulier de la promotion de la femme.

4 La mission et les attributions de la délégation sont précisées dans le règlement de l'université.