Séance du jeudi 31 août 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 9e session - 40e séance

PL 8011-A
10. a) Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Michel Halpérin, Micheline Spoerri et Bernard Annen modifiant la loi sur la nationalité genevoise (A 4 05). ( -) PL8011
Mémorial 1999 : Projet, 1357. Renvoi en commission, 1358.
Rapport de M. Alberto Velasco (S), commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil
PL 8066-A
b) Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi de MM. Alberto Velasco et Christian Brunier modifiant la loi sur la nationalité genevoise (A 4 05). ( -) PL8066
Mémorial 1999 : Projet, 3169. Renvoi en commission, 3173.
Rapport de M. Alain Charbonnier (S), commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil

PL 8011-A

Rapport de M. Alberto Velasco (S)

Notre commission a siégé le 19 mai 1999, sous la présidence de M. P. Vanek pour examiner ce projet. Assistaient à cette séance en représentation du département :

Introduction

Dans leur exposé des motifs, les auteurs du projet de loi mettent en question le plafond de 100 000 F que doit verser l'étranger candidat à la naturalisation âgé de plus 25 ans et qui est fixé dans le nouvel article 22 de la loi sur la nationalité entrée en vigueur le 17 février 1998. En effet, ils considèrent que le montant maximum de cette taxe est non seulement confiscatoire, mais qu'il alourdit la procédure par un prélèvement fiscal dissuasif

Ils ajoutent que la modification législative introduite n'était pas assortie de dispositions transitoires de sorte qu'un quart des candidats ayant déposé leur demande avant le 17 février 1998 s'est vu imposer une taxe parfois dix fois supérieures au montant de 10 000 F.

Par conséquent, ils demandent de revenir au statu quo ante et, compte tenu des délais de traitement des demandes, de prévoir par une disposition transitoire que les procédures de naturalisation en cours, initiées deux ans avant la modification législative, bénéficient de cette nouvelle.

Discussion et vote

Lors de la discussion M. Béné ratifie les propos énoncés dans l'exposé des motifs et tient à souligner le débat actuel sur les droits politiques des étrangers allant dans le sens de l'intégration tout comme le projet libéral. Tout en se ralliant à la position défendue par M. Cramer, qui estime injuste que se soit les contribuables qui doivent payer les frais occasionnés par les naturalisations, il confirme que la taxe de 10 000 F permet la couverture des frais de fonctionnement du service de naturalisation.

Le rapporteur, à ce stade du débat, fait remarquer que les futurs naturalisés sont en principe aussi des contribuables puisqu'ils ont du séjourné 10 ans pour pouvoir introduire la demande.

M. Cramer indique que par rapport au système antérieur. Avec l'actuel barème progressif, les revenus inférieurs à 70 000 F sont moins taxés et par conséquent le système actuel est plus social. S'agissant des recettes perçues par le service des naturalisations, on apprend qu'en 1998 les taxes ont rapporté la somme 5 millions de francs, alors que les frais de fonctionnement s'élevaient à 1, 5 millions de Fr..

Au sujet de la rétroactivité évoquée dans le projet de loi qui nous occupe, M. Cramer indique qu'il n'y a aucun problème s'il s'agit d'appliquer la loi dès son entrée en vigueur à toutes les demandes de naturalisations, quel que soit le moment où elles ont été déposées. Par contre, s'il s'agit de rechercher toutes les demandes déposées depuis le 1er janvier 1996, comme le prévoit le projet de loi, et de restituer une partie de la taxe aux personnes qui ont déjà acquis leur naturalisation, cela risque d'être assez compliqué malgré le fait que le nombre de cas concernés risque d'être relativement peu nombreux.

Les commissaires représentant le groupe libéral, soulignent le côté raisonnable de la proposition qui est faite puisque seulement deux cas qui se sont acquittés de la taxe de 100 000 F et 24 % dépassent de peu la barre des 10 000 F.

Certains commissaires rétorquent que le problème qui se pose est la justification morale d'une telle taxe. En effet, soit l'on admet qu'il n'est pas normal de percevoir une taxe pour des personnes résidant depuis de nombreuses années (parfois 30 ans en tant que contribuables), et que de surcroît on les astreints au difficile exercice d'acheter leur allégeance ou leur intégration à notre République, est dans ce cas il s'agira d'en finir avec cette mercantilisation de la nationalité en éliminant toute taxe. Par contre, si l'on juge que la nationalité genevoise doit se mériter, non pas selon des critères de citoyenneté mais selon un prix d'achat reflétant les avantages que cette acquisition permet, alors, ce prix doit être proportionnel au revenu. Dans ce cas laissons le barème tel quel et puisqu'il s'agit de gagner de l'argent, autant l'augmenter.

A la demande de certains commissaires, le président met aux voix l'entrée en matière du projet de loi 8011 :

Soumise au vote, l'entrée en matière du projet de loi 8011 est refusée par la majorité de la commission, par:

7 non (2 S, 2 Ve, 3 AdG), et

6 oui (3 L, 1 R, 2 DC).

Projet de loi(8011)

modifiant la loi sur la nationalité genevoise (A 4 05)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article 1

La loi sur la nationalité genevoise, du 13 mars 1992, est modifiée comme suit :

Art. 22, al. 3 (nouvelle teneur)

3 L'étranger âgé de plus de 25 ans doit verser une taxe proportionnelle à ses ressources, comprise entre 300 F et 10 000 F, dans le délai maximum de trois mois à partir de la date de l'arrêté du Conseil d'Etat.

Article 2 Disposition transitoire

La présente loi est applicable, avec effet rétroactif, aux demandes d'acquisition de la nationalité genevoise adressées au Conseil d'Etat depuis le 1er janvier 1996.

PL 8066-A

Rapport de M. Alain Charbonnier (S)

Préambule

Le projet de loi 8066, déposé devant le Grand Conseil le 29 avril 1999 ainsi que le rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1286-B ont été traités par la Commission des droits politiques : présidée par M. Pierre Vanek les 23  juin, 1er septembre, 13 octobre et 3 novembre 1999 ; présidée par Mme Micheline Spoerri les 1er mars, 15 mars, 22 mars, 29 mars et 5 avril de l'an 2000.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat chargé du Département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'énergie et de l'environnement, M. René Kronstein, directeur de l'administration des communes, M. Cédric Schoeni, directeur du Service cantonal des naturalisations et M. Marc Morgenegg, directeur adjoint du Service cantonal des naturalisations ont participé à ces séances. Mme Nicole Seyfried, MM. Paul Kohler et Carlos Orjales ont été les excellents procès-verbalistes de toutes ces réunions. Que toutes ces personnes soient remerciées ici pour leur indispensable collaboration au cours de ces débats.

Introduction

Ce rapport traitera séparément les deux objets, comme l'a d'ailleurs déjà fait la commission.

Plan du rapport

a) Historique de la taxe

b) La taxe en Suisse et en Europe

c) Pourquoi une taxe ?

d) Les débats de la commission

2) M 1286-B

(note du SGC: Le Grand Conseil a déjà pris acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1286 lors de sa séance du 17 mars 2000)

3) Conclusion

4) Votes de la commission

1) PL 8066

a) Historique de la taxe

La taxe en matière de naturalisation a déjà une longue histoire à Genève. En 1860, le prix à payer pour acquérir la nationalité genevoise s'échelonnait entre 100 et 200 Frs (le salaire de l'ouvrier était de 5 Frs par mois !). Ensuite au fil des années le prix à payer a continuellement augmenté pour arriver à un plafond de 100'000 Frs, le 12 septembre 1985. Le 13 mars 1992 le Parlement adoptait une nouvelle loi, portant le montant maximum à 10'000 Frs et le 18 décembre 1997 le Grand Conseil l'amenait à nouveau à 100'000 Frs.

Le 9 mars 1999 un projet de loi libéral (PL 8011) fut déposé au Grand Conseil. Il demandait à rabaisser le plafond à 10'000 Frs. Sans aborder la question de fond de la pertinence de cette taxe, ce projet allait uniquement dans le sens d'avantager les personnes aisées.

Toute ces modifications à l'image d'un « yo-yo », n'ont jamais ouvert le débat sur le sens et l'utilité de cette taxe.

Actuellement à Genève la taxe en fonction des revenus est au minimum de 300 Frs. pour arriver à un maximum de 100'000 Frs. Viennent se rajouter les frais de procédure cantonale qui s'élèvent à 960 Frs. (690 Frs. d'inscription et 270 Frs d'émoluments de la Chancellerie d'Etat) pour tous les candidats ainsi que l'autorisation fédérale de naturalisation de 55 Frs à 330 Frs.(cf. annexe 1)

Le total minimum par candidat âgé de plus de 25 ans est de 1260 Frs. sans tenir compte des frais pour l'autorisation fédérale.

Le 29 avril 1999, les députés : MM. Alberto Velasco et Christian Brunier déposaient pour le groupe socialiste le projet de loi 8066.

Ce projet demande l'abrogation de l'article 22, al. 3, 4 et 5 de la loi sur la nationalité genevoise (A 4 05), c'est-à-dire la suppression de la taxe, en sus des émoluments administratifs qui est demandée à toute personne étrangère qui se fait naturaliser à Genève.

b) La taxe en Suisse et en Europe

La perception d'une taxe sur la nationalité est courante dans les cantons suisses (cf. annexe 2). Il s'agit d'une pratique quasi unique en Europe. En effet, à l'exception de l'Allemagne qui impose une taxe beaucoup moins importante (1200 Frs au maximum), aucun autre pays d'Europe ne fait payer de taxe aux personnes qui se naturalisent ! Seul un émolument administratif est perçu.

Le canton de Vaud l'a supprimée en juin 1999, en la transformant en une taxe unique s'élevant à 500 Frs (100 Frs pour les moins de 25 ans).

c) Pourquoi une taxe ?

L'origine de cette taxe était un acte de solidarité sociale. La commune d'origine avait un devoir d'assistance de ses ressortissants. La taxe perçue lui permettait alors de garantir des moyens en cas d'assistance. Aujourd'hui dans la grande majorité des cas, c'est la commune de domicile qui a un devoir d'assistance, de plus à Genève, c'est l'Etat cantonal qui le prend en charge (RMCAS).

L'évolution de la construction sociale et le système d'imposition qui prévalent aujourd'hui en Suisse et dans notre République apportent une réponse différente à l'indispensable solidarité sociale de notre collectivité ainsi qu'à l'intégration de la population étrangère. Cette taxe est aujourd'hui un impôt qui ne peut être qu'un frein à la naturalisation.

En 1998, les montants perçus par cette taxe s'élevaient à 4,7 millions Frs, la somme afférente aux émoluments d'inscription s'est élevée à 708'695 Frs, le coût du service des naturalisations étant d'environ 1,5 millions, il s'est donc dégagé pratiquement 4 millions Frs de bénéfice pour l'Etat (moins de 0,9 % des recettes totales).

La nationalité est synonyme de citoyenneté et c'est une valeur qui n'a pas de prix. Il s'agit donc de faire appel, pour ceux et celles qui désirent acquérir la citoyenneté genevoise et suisse, à leur esprit de citoyen à travers une information appropriée et non à une valeur mercantile.

Les débats de la commission

Lors des deux premières séances (juin et septembre 1999) le projet de loi 8066 a été traité conjointement avec le projet de loi 8011. Ce dernier, nous le rappelons, déposé par le groupe libéral, demandait de ramener le plafond de la taxe à 10'000 Frs. La différence entre les deux projets est claire. Le projet de loi 8066 pose un problème d'éthique, alors que le projet de loi 8011 n'a pour but que de favoriser la partie de la population étrangère la plus riche.

Le principal problème posé par le projet de loi 8066 à ce moment des débats est celui de la non couverture des frais du Service cantonal de la naturalisation. Il ne faut pas oublier que nous sommes à quelques jours (fin septembre 1999) de la votation de l'initiative libérale pour la réduction d'impôt.

L'entrée en matière du projet de loi 8066 est acceptée par la même majorité qui refuse celle du projet de loi 8011.

A partir de ce moment et ceci pour ainsi dire jusqu'à la fin des débats les positions vont être assez claires.

Une majorité soutenant le principe de la gratuité avec le bémol de la non couverture des frais du service.

Une minorité attachée avant tout à la couverture des frais par les plus aisés, plutôt qu'au principe de la gratuité.

Une ou deux voix désirant le statu quo ante.

Les auteurs ont alors rédigé un amendement à ce projet de loi. Afin de rallier une plus grande majorité tout en gardant le principe de la suppression de cette taxe et par souci de la couverture des frais du Service cantonal de la naturalisation, ils ont proposé :

Un émolument de 330 Frs pour l'étranger de moins de 25 ans

Un émolument de 660 Frs pour l'étranger de plus de 25 ans, dont l'ensemble des revenus bruts annuels, ceux de son conjoint et de ses enfants compris dans sa naturalisation suisse et genevoise, sous déduction des cotisations AVS, AI, chômage, de la caisse de pension, du troisième pilier, des pensions alimentaires envers un ex-conjoint ou/et des enfants, sont inférieurs à 40'000 Frs.

Un émolument de 1500 Frs pour l'étranger de plus de 25 ans, dont l'ensemble des revenus bruts annuels, ceux de son conjoint et de ses enfants compris dans sa naturalisation suisse et genevoise, sous déduction des cotisations AVS, AI, chômage, de la caisse de pension, du troisième pilier, des pensions alimentaires envers un ex conjoint ou/et des enfants, sont égaux ou supérieurs à 40'000 Frs.

Cet amendement Velasco (du nom d'un de ses auteurs) amène une recette d'environ 1'500'000 Frs d'après les chiffres de 1998 (cf. annexes 3 et 4), permet ainsi de couvrir les frais du service et diminue pour tous les candidats les frais dus par leur naturalisation.

La minorité attachée à la couverture des frais par les étrangers les plus aisés, soutenue par M. Robert Cramer, conseiller d'Etat en charge du département, n'adhère pas à cet amendement. Si le fait de taxer un minimum les personnes à faibles revenus lui convient, cette minorité estime que les étrangers qui bénéficient de revenus plus importants doivent payer leur naturalisation. L'idée d'un émolument unique de 1500 Frs n'est pas acceptable pour elle.

Les auteurs du projet exposent à nouveau l'idée d'un projet d'éthique et pour eux, c'est l'impôt républicain qui doit taxer les hauts revenus et pas la naturalisation. Toutefois ce 3 novembre 1999, il se trouve une majorité au sein de la commission pour demander au département de produire différentes courbes. Ces courbes devraient tendre vers une diminution de la taxe pour les bas revenus avec des plafonds différents pour les hauts revenus. Le président R. Cramer prévient la commission que l'attente pourrait durer 3 mois.

Les travaux de la commission ne reprennent que le 15 mars 2000 sans posséder les courbes demandées par le département au Pr. Carlevarro, du département d'économétrie de l'Université. Le département a produit ses propres calculs et courbes (cf. annexe 5) ainsi que M. le député A. Hodgers ; qu'il en soit ici remercié(cf. annexe 6).

Les positions ne changent pas, une majorité se trouvant favorable au principe du projet de loi 8066 complété par l'amendement « Velasco ». Il est proposé et accepté à l'unanimité de la commission de changer le titre de l'art. 22. Le mot « émoluments » est remplacé par le mot « taxe ».

Le 22 mars 2000, le projet de loi 8066 et l'amendement « Velasco » sont acceptés par la majorité de la commission.

2) M 1286 B

Le département a proposé que cette motion soit prise en considération conjointement au projet de loi 8066. Les propositions du département répondant à la motion 1286-B ne posent pas de problème aux commissaires.

Seul un petit toilettage de 2 articles (art. 5 et 6) est effectué. Cela permet de modifier la loi sur la naturalisation genevoise (art. 5, 6, 7 et 8), afin que les Confédérés aient des procédures simplifiées, en évitant l'étape communale.

Le Confédéré peut ainsi acquérir pour lui-même et, le cas échéant son conjoint et ses enfants mineurs, la nationalité genevoise sur simple requête au Conseil d'Etat. L'enquête prévue actuellement étant supprimée.

Le département propose encore la modification de l'art. 11, al. 2 de la loi A 4 05.

La législation fédérale sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse n'émet aucune restriction quant à la nature du titre de séjour dont l'étranger peut se prévaloir pour solliciter sa naturalisation. Il n'y a donc pas lieu que cette exception genevoise, interdisant « l'étranger titulaire d'un permis strictement temporaire pour études arrivé en Suisse après l'âge de 18 ans révolus » de déposer une demande de naturalisation subsiste.

Un étranger au bénéfice d'un permis B pour études, pourra ainsi faire prévaloir ses années de séjour dans une procédure de naturalisation.

La commission accepte à l'unanimité ces amendements toilettés.

Le vote d'ensemble du projet de loi 8066 ( art. 5, 6, 7, 8, 11 al. 2 et 22) est accepté à la majorité.

3) Conclusion

Faciliter la naturalisation, d'une façon ou d'une autre, n'est-ce pas là un des meilleurs moyens d'intégration de la population étrangère et confédérée ?

La lettre (annexe 7) envoyée à la commission et écrite par un fils d'immigré en est un parfait exemple.

Face aux événements de ces derniers mois, aux relents xénophobes et racistes de certains, le silence pour une fois ne peut pas être d'or.

En conséquence, je vous prie de suivre la majorité de la commission et d'accepter le projet de loi 8066 ainsi modifié (art. 5, 6, 7, 8, 9, 11 al.2 et 22), qui permettra une naturalisation encouragée et facilitée autant pour les étrangers que pour les Confédérés.

4) Votes de la commission

PL 8066

Entrée en matière du PL 8066 : 7 oui (3 AdG, 2 Ve, 2 S) contre 6 non (3 L, 1 R, 2 DC).

PL 8066 proposant l'abrogation des articles. 3, 4 et 5 de l'art. 22 de la loi sur la nationalité genevoise : 8 oui (3 S, 3 L, 2 DC) contre 6 non (3 AdG, 2 Ve, 1R) et 1 abstention (1 R)

Art. 22 modification du titre : unanimité 3 S, 3 AdG, 2 Ve, 2 R, 2 DC, 3 L

Amendement Velasco (art. 22)

Art. 22, al.,1 : 8 oui (3 S, 3 L, 2 DC) contre 6 non (3 AdG, 2 Ve, 1 R) et 1 abstention (1 R)

Art. 22, al. 2 : 8 oui (3 S, 3 L, 2 DC) contre 6 non (3 AdG, 2 Ve, 1 R) et 1 abstention (1 R)

Art. 22 dans sa totalité : 8 oui (3 S, 3 L, 2 DC) contre 6 non (3 AdG, 2 Ve, 1 R) et 1 abstention (1 R).

Modification par la Commission du projet du département M-1286-B (art. 5, al. 3, art. 6, art. 7, art. 8, art. 11, al. 2)

Art. 5, al. 3 : unanimité 3 AdG, 3 S, 2 Ve, 1 R, 2 DC, 3 L

Art. 6 : unanimité 3 AdG, 3 S, 2 Ve, 1 R, 2 PdC, 3 L

Art.7 : unanimité 3 AdG, 3 S, 2 Ve, 1 R, 2 DC, 3 L

Art. 8 : unanimité 3 AdG, 3 S, 2 Ve, 1 R, 2 DC, 3 L

Art.11, al.2 : unanimité 3 AdG, 3 S, 2 Ve, 1 R, 2 DC, 3 L

Vote d'ensemble du PL 8066 (art. 5, 6, 7, 8, 11, al. 2, 22) amendé par la commission : 8 OUI (3 S, 2 DC, 3 L) contre 6 NON (3 AdG, 2 Ve, 1 R)

Projet de loi

(8066)

modifiant la loi sur la nationalité genevoise ( A 4 05)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

décrète ce qui suit :

Article unique

La loi sur la nationalité genevoise, du 13 mars 1992, est modifiée comme suit :

Art. 5 Conditions (nouvelle teneur)

1 Le Confédéré peut, à titre individuel ou avec son conjoint, demander la qualité de citoyen genevois s'il a résidé d'une manière effective sur le territoire du canton pendant 2 ans, dont les 12 mois précédant le dépôt de sa requête.

2 Il doit indiquer la commune dont il veut obtenir le droit de cité.

3 Il a le choix entre sa commune d'origine, l'une de celle où il a résidé précédemment ou la commune d'origine de son conjoint genevois.

Art. 6 Conjoint et enfants (nouvelle teneur)

1 Lorsque la requête émane d'un Confédéré marié, celle-ci n'inclut le conjoint que si ce dernier y consent par écrit.

2 Ses enfants mineurs sont compris dans sa requête ; toutefois, ils doivent y consentir par écrit s'ils ont plus de 16 ans. L'assentiment du représentant légal est en outre nécessaire si le candidat n'exerce pas sur eux l'autorité parentale. 3 Le Confédéré mineur qui présente une demande de nationalité genevoise à titre individuel doit produire l'assentiment de son ou de ses représentants légaux.

Art. 7 Procédure et émolument (nouvelle teneur)

1 Le candidat adresse sa demande au département chargé d'appliquer la présente loi sur une formule ad hoc.

2 Il doit verser un émolument destiné à couvrir les frais de procédure, dont le

montant est fixé dans le règlement d'application de la présente loi.

3 Cet émolument est exigible au moment de l'introduction de la demande et

reste acquis à l'Etat, quelle que soit la décision prise au sujet de la requête.

Art. 8 Octroi de la nationalité genevoise (nouveau, l'art. 8 ancien devenant l'art. 9, l'art. 9 ancien est abrogé)

Le Conseil d'Etat examine la demande et statue par arrêté.

Art. 11, al 2 (nouvelle teneur)

2 Il peut présenter une demande de naturalisation quel que soit le titre de

séjour dont il bénéficie.

Art. 22 Taxe (nouvelle teneur)

1 Le département perçoit, au moment du dépôt de la requête, une taxe pour frais administratifs de :

2 Cette taxe est exigible au moment de l'introduction de la demande et reste acquise à l'Etat.

ANNEXE 1

121314ANNEXE 2

ANNEXE 3

ANNEXE 4

ANNEXE 5

19ANNEXE 6

212223ANNEXE 7

25ANNEXE 8

Article unique

La loi sur la nationalité genevoise, du 13 mars 1992, est modifiée comme suit :

Art 3, 4 et 5 abrogés

2. Amendement Velasco

Art. 22 Emoluments (nouvelle teneur)

1 Le département perçoit, au moment du dépôt de la requête, un émolument pour frais administratif de :

a) 1500 Frs pour l'étranger de plus de 25 ans, dont l'ensemble des revenus bruts annuels, ceux de son conjoint et de ses enfants compris dans sa naturalisation suisse et genevoise, sous déduction des cotisations AVS,AI, chômage, de la caisse de pension, du troisième pilier, des pensions alimentaires envers un ex conjoint ou/et des enfants, sont égaux ou supérieurs à 40'000 Frs.

b) Un émolument de 660 Frs pour l'étranger de plus de 25 ans, dont l'ensemble des revenus bruts annuels, ceux de son conjoint et de ses enfants compris dans sa naturalisation suisse et genevoise, sous déduction des cotisations AVS,AI, chômage, de la caisse de pension, du troisième pilier, des pensions alimentaires envers un ex-conjoint ou/et des enfants, sont inférieurs à 40'000 Frs.

c) Un émolument de 330 Frs pour l'étranger de moins de 25 ans.

2 Cet émolument est exigible au moment de l'introduction de la demande et reste acquis à l'Etat.

Art. 22 (nouveau titre) : Taxe

3. Projet d'amendements proposé par le département (art 5,6,7,8 et 11 al.2) :

Art. 5 Conditions (nouvelle teneur)

1 Le Confédéré peut, à titre individuel ou avec son conjoint, demander la qualité de citoyen genevois s'il a résidé d'une manière effective sur le territoire du canton pendant 2 ans, dont les 12 mois précédant le dépôt de sa requête.

2 Il peut demander à acquérir:

a) le droit de cité de sa commune de domicile;

b) le droit de cité d'une commune où il a résidé précédemment ;

c) le droit de cité de la commune d'origine de son conjoint.

Art. 6 Conjoint et enfants (nouvelle teneur)

1 Lorsque la requête émane d'un Confédéré marié, celle-ci n'inclut le conjoint que si ce dernier y consent par écrit.

2 Ses enfants mineurs sont compris dans sa requête ; toutefois, ils doivent y consentir par écrit s'ils ont plus de 16 ans. L'assentiment du représentant légal est en outre nécessaire si le candidat n'exerce pas sur eux l'autorité parentale. 3 Le Confédéré mineur qui présente une demande de nationalité genevoise à titre individuel doit produire l'assentiment de son représentant légal.

Art. 7 Procédure et émolument (nouvelle teneur)

' Le candidat adresse sa demande au département chargé d'appliquer la présente loi sur une formule ad hoc.

2 Il doit verser un émolument destiné à couvrir les frais de procédure, dont le

montant est fixé dans le règlement d'application de la présente loi.

3 Cet émolument est exigible au moment de l'introduction de la demande et

reste acquis à l'Etat, quelle que soit la décision prise au sujet de la requête.

Art. 8 Octroi de la nationalité genevoise (nouveau, l'ancien art. 8 devenant l'art. 9)

Le Conseil d'Etat examine la demande et statue par arrêté.

Art. 11, al 2 (nouvelle teneur)

2 Il peut présenter une demande de naturalisation quel que soit le titre de

séjour dont il bénéficie.

4. Modifications par la commission du projet proposé par le département.

Art. 5, al. 2 : Il doit indiquer la commune dont il veut obtenir le droit de cité.

al. 3(nouveau) : Il a le choix entre sa commune d'origine, l'une de celle où il a résidé précédemment ou la commune d'origine de son conjoint genevois.

Art. 6, al 3 : Le Confédéré mineur qui présente une demande de nationalité genevoise à titre individuel doit produire l'assentiment de son ou de ses représentants légaux.

Premier débat

M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Lors des travaux de la commission, le projet de loi 8011, déposé par le parti libéral, a été rejeté par une majorité formée de deux groupes ayant des objectifs différents. Pour nous, socialistes, la baisse de la taxe à 10 000 F, comme l'ont proposé les libéraux dans leur projet de loi, ne nous semblait pas assez importante. Au contraire, pour les Verts et l'Alliance de gauche, cette réduction de taxe était trop importante et ils auraient souhaité la maintenir à 100 000 F, afin que la couverture des frais soit payée par les étrangers les plus aisés.

Nous, socialistes, sommes opposés tant à cette taxe de 100 000 F qu'à sa réduction à 10 000 F, car nous considérons que la nationalité doit être gratuite et qu'il n'y a aucune justification morale au fait que l'on paie une telle somme pour une prestation de l'Etat.

Ensuite, nous considérons que l'on ne peut pas contraindre les personnes ayant résidé chez nous pendant de nombreuses années à acheter leur allégeance ou leur intégration à notre République. Nous rejetons cette forme de mercantilisme. Nous sommes donc pour l'élimination de cette taxe injustifiée, mais, contrairement aux libéraux qui veulent éliminer un impôt caché, nous penchons en faveur d'un impôt républicain et proportionnel au revenu des personnes. Pour le reste, je pense que le contenu du rapport est assez exhaustif et je m'en tiendrai là pour le moment.

M. Alain Charbonnier (S), rapporteur. Voici déjà dix-huit mois que ce projet de loi demandant la suppression de la taxe des naturalisations a été déposé. Plus d'une année que des centaines d'étrangers attendent la décision de ce soir. Je ne referai pas le rapport que j'ai déposé, mais je tiens à préciser que ce ne sont pas seulement les étrangers aux revenus les plus élevés qui sont intéressés par la suppression de cette taxe.

En effet, avec un revenu de 35 000 F la naturalisation coûte aujourd'hui au minimum 2 000 F par candidat. La naturalisation après douze ans passés dans notre pays ne peut pas être un impôt déguisé pour les étrangers. Le projet initial demandait la suppression de la taxe ne laissant que les émoluments administratifs, à savoir 330 F pour les moins de 25 ans et 660 F pour les autres.

Les discussions en commission ont vite montré les soucis de nombreux commissaires quant à la couverture des frais du service de naturalisation. C'est donc dans la recherche d'un consensus que les auteurs du projet de loi 8066 ont déposé un amendement accepté par la majorité de la commission qui introduit une taxe unique de 1 500 F pour les revenus égaux ou supérieurs à 40 000 F. Les revenus inférieurs à 40 000 F ne paieront que les émoluments cités précédemment.

Le 14 juin dernier, lors d'une séance de la commission des droits politiques, le président Cramer nous informait du dépôt d'un nouvel amendement que vous avez reçu ce soir. Le parti socialiste accepte cet amendement et remercie le Conseil d'Etat pour son travail ayant pour but de rallier une plus grande majorité.

En effet, cet amendement introduit une progression proportionnelle au revenu, tout en conservant une somme maximum modique, ce qui devrait satisfaire la plupart des députés ici présents. L'intégration des étrangers ne se fait pas uniquement sur un problème de naturalisation et de paiement ou non de taxe, mais, à l'heure où d'autres méprisent la population étrangère et tentent de renfermer la Suisse sur elle-même, il est du devoir de ce parlement de prendre des décisions importantes dans le sens d'une ouverture à cette population qui représente, faut-il le rappeler, 40% des citoyens de ce canton. J'espère que ce ne sera qu'un premier pas, mais que l'on n'en restera pas là.

Mme Catherine Passaplan (PDC). Fondamentalement, il est important, voire essentiel, de faciliter au maximum la naturalisation des étrangers vivant depuis des années dans notre pays et qui souhaitent devenir suisses.

En effet, il est utile de rappeler ici l'effet négatif qu'a eu l'adoption du relèvement du barème des taxes, à fin 1997. Nombre de candidats, comme il a été remarqué tout à l'heure, qui avaient introduit leur demande de naturalisation, ont été confrontés à une augmentation substantielle de leur taxe, dont l'estimation, certes verbale, leur avait été faite en début de procédure. Certains d'entre eux se sont même trouvés dans l'incapacité financière de régler cette somme et se sont vu contraints de renoncer à l'octroi de la nationalité qui leur était faite.

D'autres ont suspendu le traitement de leur dossier en attendant des jours financièrement meilleurs ou dans l'attente éventuelle d'une modification de la loi. Comme conseillère municipale à l'époque, j'ai été sensible aux drames réels vécus par une famille habitant de longue date dans notre commune. J'ai heureusement été en mesure d'expliquer à mes collègues municipaux d'alors, qui se trouvaient surpris et même vexés de sa décision, les raisons pour lesquelles cette famille renonçait momentanément à devenir suisse.

Sensibilisé à son tour par mes explications, le Conseil municipal a adressé au Grand Conseil une résolution demandant au moins l'introduction de mesures transitoires, susceptibles de prendre en compte les dossiers en cours et concernés par l'augmentation des taxes en cours de procédure.

Le cas que je viens de citer ne fut du reste pas le seul. Devenue députée en juin 1999, j'ai pu, dès lors, participer aux travaux de la commission des droits politiques qui se trouvait saisie des deux projets de lois : l'un libéral, l'autre socialiste, sur ce sujet.

Si le projet de loi libéral n'a pas eu l'heur de plaire suffisamment pour remporter l'adhésion de la commission, le projet de loi socialiste d'origine, qui vous est également soumis ce jour, a été naturalisé, si j'ose m'exprimer ainsi, par les travaux de la commission qui l'a amendé.

Bien des choses ont été dites en commission, et certaines fort surprenantes par les représentants de l'Alliance de gauche. Ceux-ci pensent qu'obtenir un passeport à croix blanche facilite grandement les affaires financières de certains des candidats. Libre à ces députés de le croire.

Quant à moi, je pense qu'il est certainement plus judicieux de faciliter au maximum la naturalisation de tous ceux qui souhaitent devenir suisses et remplissent les conditions pour cela. Est-il bien nécessaire de les soupçonner de vouloir être suisses uniquement à des fins mercantiles ?

A la veille du vote fédéral que l'on connaît et qui est important je crois indispensable de rappeler qu'encourager la naturalisation est le meilleur garant contre ce genre d'initiative. Le parti démocrate-chrétien s'est engagé concrètement, tant sur le plan cantonal que fédéral, à faciliter au maximum la naturalisation, seule garante d'une véritable intégration.

Mais revenons au projet de loi 8066, un ultime amendement émane aujourd'hui du Conseil d'Etat qui allie couverture des frais administratifs et taxe raisonnable pour les naturalisés. Nous nous y rallions bien volontiers et c'est pourquoi nous accepterons ce projet de loi avec l'amendement du Conseil d'Etat. Je vous remercie de bien vouloir en faire autant.

M. Christian Brunier (S). Dans ce Grand Conseil ou, plutôt, dans la commission qui a traité ce dossier, nous avons tout entendu. Il y a des personnes qui voulaient, bien sûr, garder la taxe de 100 000 F pour taxer les riches, certains voulaient la descendre à 10 000 F, certains voulaient faire des cadeaux aux riches, certains voulaient les taxer.

Le groupe socialiste, quant à lui, a été fort clair dès le début de cette histoire. Il n'est pas question pour l'Etat de gagner de l'argent sur le dos des naturalisés. La naturalisation ne doit être qu'un acte d'intégration et non une histoire d'argent. Cette taxe, qui est totalement ringarde, donne à la personne étrangère, et Alberto Velasco vient de vous le dire, l'impression scandaleuse de devoir littéralement acheter son passeport à croix blanche.

Malgré l'amélioration des procédures, notamment à Genève, ce qui n'est pas le cas dans tous les cantons, il faut bien le reconnaître, cette acquisition de nationalité reste un parcours compliqué, long et humiliant, pour les personnes demandant la nationalité suisse, puisque l'on s'immisce carrément dans leur vie privée. De plus, cet acte de nationalité est coûteux. Nous sommes un des rares pays à monnayer si chèrement notre nationalité.

Le 13 mars 1992, une députée déclarait dans ce parlement, je cite : «Il y a quelque chose d'archaïque, voire choquant à devoir débourser des sommes importantes pour devenir citoyen suisse. Cette particularité a souvent suscité à l'intérieur et à l'extérieur de notre pays des critiques ironiques, voire acerbes.» Cette déclaration, Mesdames et Messieurs les députés, émane de Mme Françoise Saudan. On est bien loin des propos tenus malheureusement par certains radicaux dans cette commission. Oui, notre procédure de naturalisation, nos tarifs relèvent d'une vision vieillotte, indigne et arbitraire et ne correspondent, en tout cas pas, à notre vision, à la vision socialiste d'une citoyenneté moderne. Ce paiement souvent onéreux et cette procédure bureaucratique - j'allais dire : soviétisante - sont des obstacles importants à la naturalisation.

Si la Suisse compte aujourd'hui en pourcentage un petit peu plus d'étrangers que certains pays, ce n'est pas un hasard. Chez nos voisins, le droit du sol, la facilité et la gratuité de la nationalité sont des éléments importants d'une politique d'intégration digne de ce nom qui enlèvent de faux arguments aux mouvements qui progressent sur la haine humaine.

Face à cette volonté farouche que les libéraux et les socialistes ont manifestée durant les travaux de cette commission, il y a malheureusement certaines personnes de droite comme de gauche d'ailleurs, qui ont décidé - ou qui ont voulu - d'utiliser la nationalité comme un outil fiscal.

Mesdames et Messieurs les députés, pour le parti socialiste, il est clair que l'outil de redistribution, de justice sociale est l'impôt et en tout cas pas la nationalité qui doit être et doit rester uniquement un outil d'intégration. Cela est une valeur historique de la gauche et le parti socialiste l'a défendue en commission de manière acharnée comme nous tenons à la défendre ce soir.

Utiliser la naturalisation comme moyen pour remplir les caisses de l'Etat est tout à fait indigne. C'est une perversion du système, un dénigrement de la politique d'intégration. Il y a quelques semaines, nous condamnions - en tout cas une majorité de ce parlement - avec raison les citoyennes et les citoyens d'Emmen qui pervertissaient la nationalité, la naturalisation pour l'utiliser comme un moyen d'exclusion.

Aujourd'hui, nous devons démontrer qu'à Genève nous utilisons la naturalisation uniquement comme moyen d'intégration. Dans cette cohérence, nous devons balayer les notions de profit lié à la naturalisation. Nous devons définitivement jeter les vieux clichés des faiseurs de Suisses dans la poubelle de l'histoire et soutenir ce projet de loi qui a été amendé à juste titre et dans un climat de dialogue et de concertation par Robert Cramer, d'autant plus qu'il a fourni avec ses propositions d'amendements un projet très clair et tout a fait correct de règlement d'application. C'est en ce sens que je vous invite, ainsi que le groupe socialiste, à voter notre projet de loi amendé par Robert Cramer.

M. Michel Halpérin (L). Il ne sera pas nécessaire d'être très long. L'essentiel de ce débat, c'est naturellement les conditions de naturalisation. Il est tout de même intéressant, parce que nous ne sommes pas en train de corriger des erreurs historiques, de savoir ce que nous corrigeons aujourd'hui. Nous corrigeons le texte que, nous-mêmes, dans la composition de ce Conseil-ci, au début de cette législature, par rapacité fiscale, avons voté en décembre 1997 et, par conséquent, les justes commentaires que j'ai entendus de tous ceux qui sont intervenus dans ces dernières minutes pour dénoncer notre attitude de faiseurs de Suisses, mercantiles et cupides, ne sont pas des reproches que l'histoire adresse à ses prédécesseurs, mais une juste autocritique, comme on n'en avait plus entendue depuis les temps regrettés du camarade Joseph Djougachvili Staline.

Je dois vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que je suis heureux de cet acte de contrition publique. Je suis heureux qu'il émane de M. Brunier et je suis heureux que, par le texte que nous adopterons ce soir, quel qu'il soit, nous ayons ensemble, et à l'égard des naturalisés, une attitude enfin décente. Décente à deux titres. D'abord parce qu'effectivement il est problématique de vendre de la nationalité et lorsque nous faisons monter les tarifs, c'est effectivement l'impression que nous donnons.

Pour ma part, mais je suis content, comme vous l'imaginez d'être battu sur ce terrain-là et précisément par la gauche, je n'étais pas outrageusement scandalisé à l'idée que la taxe ou que l'impôt d'entrée soit proportionnel aux ressources, mais vous comprendrez que je ne peux qu'abonder dans votre sens si vous considérez qu'un impôt de plus sur ce sujet, c'est un impôt de trop et, par conséquent, je me rallie avec joie à l'opération qui consiste à remplacer l'impôt par la taxe. A cet égard, naturellement, l'amendement de M. le conseiller d'Etat Cramer est parfaitement bienvenu.

Sur le fond, nous voici donc tous d'accord. Reste la forme, Mesdames et Messieurs les députés. Pour ceux qui auraient eu la curiosité de parcourir ces deux textes, le 8066 et son prédécesseur le 8011, ils auront remarqué, je pense, avec un intérêt qui mériterait une exégèse, mais je vous l'épargnerai ce soir, que le texte socialiste, celui de MM. Brunier et Velasco, a été soutenu en commission, tant sur l'entrée en matière que sur le contenu, par les commissaires libéraux. Il vous aura probablement étonné, autant que moi, de constater que le texte 8011, libéral, a été refusé d'entrée en matière, sur le même thème et quelques semaines plus tôt, par les socialistes, les Verts et l'Alliance de gauche.

J'ai la faiblesse de penser, mes chers collègues, que ce qui nous sépare étant limité à la définition d'un impôt ou d'une taxe, vous avez cédé à la fâcheuse tentation d'écarter l'initiative d'autrui pour vous en attribuer le mérite. La tentation plagiaire est fréquente dans les milieux littéraires, je vous félicite d'avoir accédé à cette dignité-là que je ne vous connaissais pas encore.

Pour ma part, j'ai l'intention de voter, ce soir, pour mon propre texte avant de voter pour le vôtre parce que j'estime que par sa dignité le mien ne le cède en rien au vôtre et j'ajoute que je voterai le vôtre, bien qu'en dignité il soit inférieur au mien, puisqu'il en est la copie conforme parce que le contenu étant bon, il m'indiffère, au fond, que vous m'ayez volé mon idée, l'essentiel c'est qu'elle aboutisse. (Applaudissements.)

M. Pierre Vanek (AdG). Non, je ne me lancerai pas dans ces fleurs de rhétorique dont maître Halpérin a le secret, j'interviens ici pour dire que nous nous rallions à la proposition d'amendement faite par le Conseil d'Etat au projet 8066.

Je ferai quelques remarques au sujet de propos tenus dans ce débat. Tout d'abord, je rappelle que le projet libéral consistait à baisser, de manière considérable, le plafond de la taxe de naturalisation, ce qui aurait eu pour conséquence de créer un impôt très dégressif pour les personnes les plus aisées. C'est pour cette raison que les partis de l'Alternative, à l'unanimité, ont refusé l'entrée en matière d'un tel projet. Votre discours sur l'antériorité n'est donc pas pertinent.

Nous pouvons, en l'état, nous rallier à la proposition du Conseil d'Etat, même si nous regrettons de n'avoir pu en discuter en commission, puisqu'elle est arrivée post hoc et que les travaux de la commission avaient été conclus.

Pourtant, en commission, il y aurait eu un certain intérêt à discuter de cette proposition d'amendement et à se demander si ce règlement d'application - qui nous a été transmis pour information par le conseiller d'Etat après que la commission eut terminé ses travaux - n'avait pas, en partie, sa place dans la loi.

Enfin, par gain de temps et eu égard à l'ordre du jour de la commission, nous ne demanderons pas le renvoi de ce projet de loi en commission. Nous soutiendrons ce projet. Nous sommes d'accord sur le principe que la nationalité ne doit pas être «vendue» et, à ce sujet, nos interventions en commission ont été tout à fait claires. Celui qui vous parle a «acheté», relativement cher, sa nationalité en 1982. Je ne puis donc être suspecté d'avoir des réserves quant à la naturalisation et au droit des personnes à se naturaliser.

Ensuite, vous avez dit, Madame Passaplan - c'est l'intervention du parti démocrate-chrétien que je relève ici - que faciliter l'accès à la naturalisation était la seule garantie pour une véritable intégration. Je ne suis pas d'accord avec vos propos, car à mon avis nous ne devons pas exiger que les gens qui vivent avec nous dans cette République aient forcément un passeport rouge à croix blanche pour être réellement intégrés. Ce point nous sépare : la voie de la naturalisation n'est pas le passage obligé.

Monsieur Brunier, vous avez aussi dit que l'ouverture en matière de naturalisation, telle que prévue dans le projet de loi que nous traitons, était un élément essentiel pour une citoyenneté moderne. Pour ma part, je suis d'avis de séparer le concept de citoyenneté, au sens des droits politiques, démocratiques et sociaux, de la couleur du passeport de celui qui exerce ces droits. Je ne vous en fais pas le reproche, mais ce concept de citoyenneté ne doit pas être forcément marié à celui de nationalité.

M. Antonio Hodgers (Ve). Tout d'abord, ces deux projets de lois ont permis de faire reconnaître le principe, unanimement admis par les commissaires, qu'il est scandaleux pour le parlement, pour l'Etat de faire des bénéfices sur la naturalisation des étrangers qui désirent acquérir la nationalité suisse. Il convient de le rappeler, car c'est là le principal mérite de ces projets de lois.

Cependant, ces projets de lois sont différents, et pas seulement sur la forme, contrairement à ce que semble dire M. Halpérin. Le premier, le 8011, proposé par le groupe libéral avait pour principal et, finalement, unique objectif d'alléger la taxe de naturalisation pour les plus fortunés de ce canton. La situation qui prévalait avant 1997 - je vous rappelle que nous avons modifié la loi au début de la législature - était plus avantageuse pour les riches parce que le plafond se situait à 10 000 F. Mais elle était foncièrement injuste pour les moins fortunés, puisque la taxe augmentait très rapidement pour les petits et moyens revenus, alors qu'elle plafonnait après à 10 000 F.

Il ne m'apparaît donc pas que nous ayons commis une erreur en modifiant la loi en 1997. Notre seule erreur est d'avoir voulu gagner de l'argent avec ces taxes. Je rends hommage au groupe socialiste d'avoir déposé un nouveau projet de loi. Par contre, je n'accepte pas les critiques de MM. Velasco et Brunier qui soutiennent que l'Alliance de gauche et les Verts voulaient taxer les riches par le biais de la naturalisation.

Je le répète, comme je l'ai dit plusieurs fois en commission, il est acquis que l'Etat ne doit pas faire de bénéfice sur la naturalisation. Il restait toutefois à trouver la somme nécessaire pour financer ces services. Il nous est apparu plus juste que cette somme soit répartie de manière proportionnelle, suivant le revenu des candidats à la nationalité. De cette manière les plus fortunés de ce canton paient un peu plus pour leur naturalisation que les moins fortunés. C'est simplement ce principe que nous avons défendu en commission et c'est au nom de ce principe que nous n'avions pas accepté le projet de loi socialiste.

Finalement, la proposition du département vient à point, car elle propose un véritable compromis. En effet, elle prévoit certes une progressivité, mais très réduite par comparaison à celle acceptée en 1997. Le riche devrait donc payer un peu plus que le pauvre. Par ailleurs, elle satisfait certains d'entre vous, car cette taxe progressive ne peut plus être considérée comme un impôt. Je crois que c'est heureux, mais je tenais malgré tout à préciser notre position dans ce débat, car j'ai l'impression qu'elle a été mal comprise.

Pour conclure, je vais évidemment dans le sens de ce qui a été dit au sujet de la modernisation de la naturalisation. Genève est, entre tous les cantons suisses, championne à ce niveau-là, et c'est au niveau national que nous devons faire un effort, notamment, en réduisant le temps de résidence exigé des candidats à la nationalité et en abandonnant une procédure archaïque et conservatrice. M. Brunier a raison de le dire, et, cette semaine encore, j'ai lu un article à ce propos dans la presse internationale, qui ridiculise souvent notre pays à ce sujet.

M. John Dupraz (R). Je trouve quelque peu piquant de constater que certains députés s'offusquent du système en vigueur à ce jour. Je constate que le canton de Genève est un des cantons qui facilite le plus la naturalisation des étrangers qui en remplissent les conditions. C'est heureux et je m'en félicite, mais je tiens à dire que les taxes perçues jusqu'à maintenant n'ont jamais empêché quiconque d'acquérir la nationalité suisse.

Une voix. Arrête !

M. John Dupraz. Je dois dire qu'il est également assez piquant de constater que la plupart des personnes qui s'offusquent de cette situation n'étaient pas suisses il y a quelques années encore. Elles sont maintenant au Grand Conseil et nous font la leçon, comme quoi on serait de mauvais garçons, que l'on aurait été méchants, que l'on a fait payer les riches... Pourtant, avec le système que nous avions, ceux qui avaient davantage de moyens payaient plus et ceux qui n'en avaient pas ne payaient même pas le coût de la naturalisation.

Ce système était éminemment social et seul le plafond de 100 000 F pouvait paraître choquant. Et je le reconnais volontiers. En commission, certaines propositions allaient dans le sens d'abaisser ce plafond, mais la loi était parfaitement adéquate et fonctionnait. Elle permettait, à qui le demandait, d'acquérir la nationalité suisse dans de bonnes conditions.

Alors venir nous faire des leçons de morale est un peu fort de café ! Et le moment est malvenu ! Cela dit, le groupe radical soutiendra la proposition de M. Cramer. Heureusement que vous avez la droite pour vous soutenir, parce que votre Alternative, en fait, chaque fois qu'elle peut vous tirer dans le dos, elle ne manque pas de le faire ! (Exclamations.) Pour ce projet, je constate que vous avez plus d'appuis de notre côté que de celui de ces gens qui jouent les vierges effarouchées, aujourd'hui !

Mesdames et Messieurs les députés, le système que nous avions n'était pas scandaleux, exception faite du plafond de 100 000 F. Les gens qui se prennent pour des piliers de vertu, comme M. Velasco - qui nous a fait la morale en commission, se prend pour un champion de la naturalisation et veut révolutionner le monde - nous font bien rire. Pour moi, Monsieur, Velasco rime avec rigolo ! Nous soutiendrons le Conseil d'Etat. (Huées.)

Le président. Je vous demande un peu de respect - je le répète - dans les débats, s'il vous plaît !

M. Christian Brunier (S). M. Dupraz nous reproche nos origines étrangères, à Alberto Velasco et à moi-même. Moi j'en suis particulièrement fier, mais je redoute les propos que j'ai entendus dans la bouche de M. Dupraz. Habituellement, ce n'est pas son genre. J'espère donc que c'est l'après-20 h 30 qui l'influence et non pas ses désirs électoraux.

Je lui recommande de lire la déclaration de Mme Saudan, qui n'est pas de l'Alternative, en tout cas, je ne le crois pas. Ainsi, vous verrez, Monsieur Dupraz, qu'elle trouvait que la loi, que vous estimez magnifique aujourd'hui, était inique, et avec beaucoup de raison.

Je ferai une petite remarque à M. Halpérin. Comme je l'ai dit lors de ma première intervention, les libéraux qui ont siégé en commission ont fait preuve d'une grande éthique. Ils avaient un projet. Nous sommes arrivés avec un deuxième projet, plus ambitieux, et les trois libéraux siégeant en commission ont vite abandonné leur projet pour soutenir celui du parti socialiste... (Commentaires sur les bancs d'en face.) Oui, exactement !

Et ils ont vite... Monsieur le président, s'il vous plaît, mettez un peu d'ordre ! D'habitude, vous suspendez les séances quand cela se passe ainsi ! (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît, on arrive bientôt au bout de notre ordre du jour. Cela se passe très bien. Il faut continuer dans le calme, s'il vous plaît. Autrement, on devra malheureusement prendre quelques mesures pour évacuer les trublions ! (Commentaires.)

M. Christian Brunier. Bref, les libéraux se sont très bien comportés en commission et ont mis au placard leur avis partisan pour défendre la citoyenneté. Aujourd'hui M. Halpérin fait passer les intérêts partisans avant les intérêts de la citoyenneté, et je le regrette. (Exclamations.) Monsieur Halpérin, quand vous comparez notre projet au vôtre, vous savez très bien que ces deux projets n'ont rien à voir. Votre projet ne favorisait que vos amis et n'abaissait le plafond que pour les riches. Par contre, les plus défavorisés payaient toujours le même montant. Je sais que c'est votre politique. Heureusement, cette politique n'a pas été celle de votre groupe lors des travaux de la commission, mais le naturel revient vite au galop ! Je le redis, aujourd'hui, l'important est de défendre la citoyenneté...

Des voix. Ouais, bravo !

M. Christian Brunier. ...et la naturalisation ne doit être ni un instrument pour taxer les riches ni un instrument pour taxer les pauvres. C'est un instrument d'intégration, un outil parmi d'autres. Et là je suis d'accord avec M. Vanek, ce n'est pas le seul outil. Il faut aussi intégrer les gens qui ne choisissent pas d'acquérir notre nationalité. Il y a beaucoup de moyens d'intégration, mais l'acquisition de la nationalité ne doit être qu'un instrument d'intégration et rien d'autre.

Une voix. Bravo !

M. Alberto Velasco (S). Tout d'abord, je constate que pour M. Dupraz la naturalisation a un coût économique et non politique...

John Dupraz. Ce n'est pas vrai !

M. Alberto Velasco, rapporteur. Votre constat est intéressant, Monsieur Dupraz ! Pour répondre à M. Halpérin, je lui rappelle que l'entrée en matière des deux projets de lois a été votée le même soir. Contrairement à votre projet, Monsieur Halpérin, nous fixions un émolument à 650 F au maximum.

Ce plafond de 650 F a été perverti ensuite. En effet, si mes amis de l'Alternative avaient tenu les mêmes propos que ce soir, d'une part, on aurait vraisemblablement maintenu ce plafond à 650 F et, d'autre part, il y a des mois que cette loi aurait été votée. Il faut tout de même le dire !

Par la suite, c'est vrai, Monsieur Hodgers, à la demande des Verts nous avons dû mettre un deuxième plafond à 1 500 F afin que notre projet de loi soit accepté. Il fallait en effet parvenir à la fameuse somme de 1,5 million nécessaire pour couvrir le coût du service. Cependant était-il indispensable que les frais du service des naturalisations soient couverts ? Est-il juste de faire payer des taxes pour les frais de fonctionnement d'un service à des gens qui ont payé leurs impôts chez nous pendant douze, vingt ou trente ans au prorata de leur revenu ? Ce n'est pas logique et c'est injuste.

M. Jacques Béné (L). J'aimerais juste revenir sur les propos de M. Brunier. Je ne crois pas que l'on puisse nous accuser d'avoir été partisans pendant les travaux de la commission. D'ailleurs, M. Brunier n'a pas participé aux travaux de la commission.

Je constate que le projet de loi libéral avait un seul but, celui de supprimer rapidement les effets néfastes de ce que nous avions voté à la fin 1997. Votre projet va plus loin, le plafond est plus bas, nous ne pouvons que nous en féliciter, mais, s'il vous plaît, ne parlez pas de «partisanerie» dans cette enceinte !

On est tous d'accord sur le fond, mais, comme M. Velasco, je regrette la lenteur avec laquelle ce projet de loi a été traité. En effet, il a traîné pendant un an et demi en commission et, lorsque vous parlez de citoyenneté, je pense que toute l'Alternative aurait pu se mettre d'accord plus rapidement sur les amendements de M. Velasco, afin qu'effectivement on arrête de vendre cette citoyenneté. C'est ce qui s'est passé durant une année et demie, à savoir depuis que le projet de loi libéral a été déposé.

En ce qui concerne M. Cramer, il a fallu faire un petit peu de forcing afin qu'il admette que la volonté de la commission était effectivement de couvrir les frais du service, un point c'est tout. C'est clair que cela fait une diminution de produit pour son service, et c'est peut-être regrettable pour lui, mais c'était une volonté politique clairement exprimée.

M. Cramer avait notamment demandé au département de l'économétrie de nous transmettre des tableaux prévisionnels, très compliqués et que l'on ne pouvait soi-disant pas nous transmettre avant trois ou quatre mois. Or c'est M. Hodgers, que je tiens à féliciter pour ses talents d'économètre - le gouvernement devrait plus souvent solliciter ses services - qui nous a transmis des tableaux impeccables qui nous ont permis de faire des calculs beaucoup plus concrets et de terminer enfin ces travaux. Je le remercie.

Nous acceptons, bien évidemment, l'amendement proposé par M. Cramer, mais cependant, je souhaite que M. Cramer n'essaie pas, par le biais du règlement d'application, de contrer les volontés de la commission et de ce parlement.

M. Michel Halpérin (L). Mesdames et Messieurs les députés, je dois vous dire que ce débat n'a strictement aucun intérêt. Si j'y contribue encore une dernière fois, c'est pour deux raisons : d'abord pour vous dire que je le trouve affligeant, tant il remet en surface cet espèce de débat obsessionnel sur l'argent des autres, mais surtout parce que je veux au moins, pour la vérité historique, rappeler que, par charité, je n'ai pas cherché les citations des uns et des autres dans notre débat du mois de décembre 1997. Je persisterai dans cette attitude charitable ce soir.

En revanche, il faut que je vous rappelle tout simplement des dates pour que vous n'erriez pas dans vos explications. Le projet libéral a été déposé en mars 1999. Vous l'avez congédié sèchement en commission, le 19 mai 1999 vous avez déposé parallèlement votre propre projet, à fin avril et vous n'avez commencé à le traiter en commission qu'à partir du 23 juin.

Dans nos habitudes, lorsque vous faites des projets qui nous semblent intéressants, nous les examinons, nous entrons en matière et nous amendons. Vous avez préféré le shooter, c'est ce que j'ai appelé vos mauvaises manières, mais, encore une fois, je voterai le résultat de vos manières parce que le résultat me convient.

M. Robert Cramer. Tout d'abord, je me dois d'observer, à la suite des propos fort justes, qu'a tenus tout à l'heure M. Halpérin, que la question des taxes de naturalisation est en réalité un débat récurrent dans ce Conseil. On a vu ces taxes atteindre, à travers le temps, toutes sortes de plafonds. On a vu des plafonds à 10 000 F, à 60 000 F et à 100 000 F. Tel était notamment le cas en 1992.

A cette époque, j'avais l'honneur d'être parmi vous et de siéger dans ce Grand Conseil. Nous avions été saisis par le Conseil d'Etat d'un projet de loi, et c'était M. Haegi qui occupait cette place. Le Conseil d'Etat proposait une modification de la loi sur la naturalisation et la commission du Grand Conseil, dans sa grande sagesse, avait conclu qu'il était souhaitable de profiter de cette modification législative, en 1992 donc, pour descendre le plafond de 100 000 F à 10 000 F. Tel fut fait à la suite d'un vote à l'appel nominal dont je m'étais réjoui, à l'époque, puisque je faisais partie de ceux qui considéraient qu'il fallait que la naturalisation ne s'achète pas dans notre canton.

C'est ainsi que depuis 1992, le plafond a été réduit à 10 000 F, puis sont survenues toutes ces difficultés financières et budgétaires que vous connaissez, et le précédent gouvernement a estimé qu'il fallait essayer de faire en sorte que la naturalisation redevienne une ressource fiscale d'une certaine importance. C'est ainsi que, dans le budget 1998, on a proposé de remettre le plafond de 10 000 F à 100 000 F.

Cette taxe de 100 000 F, Mesdames et Messieurs les députés, vous l'avez tous acceptée, sans opposition et sans débat, en acceptant les lois qui accompagnaient le budget 1998. M. Halpérin a parfaitement raison de dire qu'ici nous ne sommes guère, les uns plus vertueux que les autres, puisque le Conseil d'Etat, auquel j'ai participé dès le mois de décembre 1997, a continué à présenter ce projet de loi devant vous et vous l'avez toutes et tous accepté.

Cela dit, et je remercie leurs auteurs, qu'il s'agisse d'un projet de loi libéral ou de l'Alliance de gauche, à juste titre, Mesdames et Messieurs les députés, vous avez estimé... (Exclamations.) Ou plutôt du parti socialiste, pardonnez-moi, Monsieur Brunier, c'est une confusion liée à la parenté ! Je retirerai cela en corrigeant mes propos dans le Mémorial ! (Brouhaha.)

Qu'il s'agisse du parti libéral ou du parti socialiste, vous avez effectivement toutes et tous estimé que la naturalisation ne se monnaie pas et que ce plafond de 100 000 F, qui est non seulement unique en Suisse mais, vraisemblablement, en Europe pour ne pas dire dans le monde, n'était pas digne de notre canton. Je me réjouis, au fond et après un certain nombre de péripéties sur lesquelles il n'y a pas lieu de s'étendre, que nous nous retrouvions finalement tous sur un principe : la taxe de naturalisation ne doit pas avoir un caractère fiscal; son seul but doit être de couvrir les frais de la procédure de naturalisation. C'est le sens de l'amendement qui vous est soumis par le Conseil d'Etat.

Nous avons voulu, dans le cadre de cet amendement, préserver une certaine progressivité. Les modalités en sont précisées dans le projet de règlement d'application que j'ai soumis à tous les groupes du Grand Conseil. Vous avez vu que cette progressivité est très limitée, puisqu'elle passe, pour un adulte, d'une taxe de base minimum d'un montant de 550 F à une taxe maximum, pour les montants les plus élevés, de l'ordre de 2 000 F. Lorsqu'il s'agit d'un étranger, âgé de moins de 25 ans, la taxe peut se situer entre 300 F et 1 200 F. Telle est cette progressivité minimum qui est prévue. Et je tiens à préciser de façon qu'il n'y ait pas d'ambiguïté - j'ai été interpellé tout à l'heure sur ce point - quant aux intentions du Conseil d'Etat dans le cadre de la réglementation d'application.

Cela dit et, tout en relevant les mérites des deux projets de lois dont vous êtes saisis, la commission n'a pas voulu entrer en matière sur l'un de ces deux projets, c'est finalement sur le second, c'est-à-dire sur le projet de loi 8066, qu'elle a concentré son attention. Ce projet de loi 8066, tel qu'il est issu des travaux de la commission, est plus complet, car non seulement il traite de la question des taxes de naturalisation, ce qui a fait l'objet du plus grand débat en commission, mais également de deux autres questions qui doivent également mériter votre attention.

Nous avons profité de cette modification de la loi sur les naturalisations pour prévoir, comme nous le demandait une motion fort opportune, dont vous avez été saisis, de supprimer toute taxe de naturalisation pour les confédérés qui désirent acquérir la nationalité genevoise, et c'est ainsi que dans les articles 5 à 8 du projet de loi 8066 vous trouvez une série de modifications de la loi sur la nationalité genevoise qui permet cette suppression des taxes pour les confédérés qui souhaitent acquérir la nationalité genevoise.

Enfin, il y a une seconde modification d'une certaine importance : celle de l'article 11, alinéa 2, qui permet que la durée du séjour d'un étranger pour études soit également comprise, comme l'exige d'ailleurs la législation fédérale, dans le calcul de la durée du séjour total que l'on compte pour savoir si un étranger a le droit ou pas de demander sa naturalisation.

J'aimerais conclure sur deux considérations. La première, comme l'a relevé très justement M. Charbonnier, c'est que la naturalisation n'est qu'un élément d'un processus d'intégration et que le fait de s'intéresser à la naturalisation n'empêche pas que nous serons amenés à porter une attention toute particulière ces prochains mois, notamment, sur la question de l'intégration. Le Conseil d'Etat y a veillé en mettant en place une commission que vous connaissez et qui est présidée par notre ancien collègue, M. Föllmi.

La seconde considération c'est que lorsque l'on parle d'intégration, lorsque l'on parle de naturalisation, on ne peut pas ne pas évoquer ce vote auquel la population genevoise sera conviée dans quelques semaines, lorsqu'il s'agira de se prononcer sur cette proposition immorale, inacceptable, qui nous est faite, de limiter à 18% la population étrangère dans notre pays. Une telle proposition est inadmissible dans son principe et dans un canton tel que le nôtre où nous avons une population de 40% d'étrangers. Comme vous l'a indiqué tout à l'heure M. Moutinot, le Conseil d'Etat unanime demande à la population genevoise de rejeter très clairement cette proposition lorsqu'elle exprimera son suffrage, dès le début de la semaine prochaine. (Applaudissements.)

M. Antonio Hodgers (Ve). Très brièvement, Monsieur le président, juste pour demander un petit éclaircissement à M. Cramer. J'ai cru comprendre de votre discours que vous vouliez faire passer la taxe concernant les moins de 25 ans de 300 F au minimum à 1 200 F au maximum, c'est-à-dire qu'elle serait également progressive. Il me semble que vous l'avez dit.

Si c'est le cas, je vous demande de ne pas approuver un règlement allant dans ce sens et qui rendrait plus chère la naturalisation pour les jeunes qu'elle ne l'est actuellement. Ce serait contraire à tout ce que l'on désire ce soir.

PL 8011-A

Le président. Je mets aux voix le projet de loi 8011.

Le projet est mis aux voix.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Ce projet est rejeté en premier débat par 47 non contre 34 oui.

PL 8066-A

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Article unique (souligné)

Mis aux voix, l'article 5 est adopté, de même que les articles 6 à 11, alinéa 2.

Article 22

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement présenté par le Conseil d'Etat consistant à modifier l'article 22 avec un texte que vous avez tous sur vos pupitres et qui est le suivant :

1 L'étranger doit verser une taxe destinée à couvrir les frais de procédure, dont le montant est fixé dans le règlement d'application de la présente loi. 

2 Cette taxe est exigible au moment de l'introduction de la demande et reste acquise à l'Etat, quelle que soit la décision prise au sujet de la requête.

3 Le règlement d'application fixe le tarif des taxes en tenant compte de l'âge et de la situation financière du requérant. Le montant maximum exigé ne peut dépasser de plus de quatre fois le montant de la taxe ordinaire.

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mis aux voix, l'article 22 ainsi amendé est adopté.

Article 2 (souligné)

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement proposé par M. Christian Brunier, à savoir la création d'un article 2 (souligné) concernant l'entrée en vigueur de la présente loi. L'article unique (souligné) deviendrait l'article 1 (souligné). La teneur de cet amendement est la suivante :

«La présente loi entre en vigueur le jour de sa promulgation.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Troisième débat

Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi

(8066)

modifiant la loi sur la nationalité genevoise ( A 4 05)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

décrète ce qui suit :

Article 1

La loi sur la nationalité genevoise, du 13 mars 1992, est modifiée comme suit :

Art. 5 Conditions (nouvelle teneur)

1 Le Confédéré peut, à titre individuel ou avec son conjoint, demander la qualité de citoyen genevois s'il a résidé d'une manière effective sur le territoire du canton pendant 2 ans, dont les 12 mois précédant le dépôt de sa requête.

2 Il doit indiquer la commune dont il veut obtenir le droit de cité.

3 Il a le choix entre sa commune de domicile, l'une de celles où il a résidé précédemment ou la commune d'origine de son conjoint genevois.

Art. 6 Conjoint et enfants (nouvelle teneur)

1 Lorsque la requête émane d'un Confédéré marié, celle-ci n'inclut le conjoint que si ce dernier y consent par écrit.

2 Ses enfants mineurs sont compris dans sa requête ; toutefois, ils doivent y consentir par écrit s'ils ont plus de 16 ans. L'assentiment du représentant légal est en outre nécessaire si le candidat n'exerce pas sur eux l'autorité parentale. 3 Le Confédéré mineur qui présente une demande de nationalité genevoise à titre individuel doit produire l'assentiment de son ou de ses représentants légaux.

Art. 7 Procédure et émolument (nouvelle teneur)

1 Le candidat adresse sa demande au département chargé d'appliquer la présente loi sur une formule ad hoc.

2 Il doit verser un émolument destiné à couvrir les frais de procédure, dont le

montant est fixé dans le règlement d'application de la présente loi.

3 Cet émolument est exigible au moment de l'introduction de la demande et

reste acquis à l'Etat, quelle que soit la décision prise au sujet de la requête.

Art. 8 Octroi de la nationalité genevoise (nouveau, l'art. 8 ancien devenant l'art. 9, l'art. 9 ancien est abrogé)

Le Conseil d'Etat examine la demande et statue par arrêté.

Art. 11, al 2 (nouvelle teneur)

2 Il peut présenter une demande de naturalisation quel que soit le titre de

séjour dont il bénéficie.

Art. 22 Taxes (nouvelle teneur)

1 L'étranger doit verser une taxe destinée à couvrir les frais de procédure, dont le montant est fixé dans le règlement d'application de la présente loi.

2 Cette taxe est exigible au moment de l'introduction de la demande et reste acquise à l'Etat, quelle que soit la décision prise au sujet de la requête.

3 Le règlement d'application fixe le tarif des taxes en tenant compte de l'âge et de la situation financière du requérant. Le montant maximum exigé ne peut dépasser de plus de quatre fois le montant de la taxe ordinaire.

Article 2

La présente loi entre en vigueur le jour de sa promulgation. 

11. Ordre du jour.

M. Michel Halpérin (L). Il est 22 h 45. J'avais demandé que l'on inscrive enfin le projet de loi 8036 à l'ordre du jour parce qu'il est important et qu'il traîne depuis longtemps, mais je le crois plus important qu'urgent. Le vote sur les Cheneviers doit être fait aujourd'hui. Je serais prêt, en ce qui me concerne, bien que le Bureau ait fait le choix juste de ne pas vouloir modifier l'ordre du jour d'une séance extraordinaire, à le voir traiter le 21 ou le 22 septembre, plutôt que de devoir, ou mal le traiter ou s'imposer une nocturne prolongée indésirable. Je laisse cela à votre appréciation, Monsieur le président et Mesdames et Messieurs les députés.

Le président. Je mets aux voix la proposition de M. Halpérin de reporter le traitement du projet de loi au 21 septembre.

M. Albert Rodrik (S). Enfin, qu'est-ce que M. Halpérin nous propose là... ? Adoptons les Cheneviers et nous verrons alors s'il est possible de finir ou pas ! (Brouhaha.)

Le président. Je mets aux voix la proposition de reporter ce projet.

Mise aux voix, cette proposition est adoptée.