Séance du
jeudi 25 mai 2000 à
17h
54e
législature -
3e
année -
8e
session -
24e
séance
M 1060-B
En date du 8 juin 1998, le Grand Conseil renvoie au Conseil d'Etat une motion de la Commission fiscale invitant le Conseil d'Etat :
- à établir un rapport relatif aux dysfonctionnements relevés à l'administration fiscale à partir de 1995, à déterminer les responsabilités y relatives et à préciser les conséquences sur la perception des impôts et sur l'organisation de l'AFC ;
- à dresser l'inventaire des besoins permettant une efficacité accrue de l'AFC, notamment pour la maîtrise du passage à l'an 2000.
A. Etat des lieux avant 1998
Les problèmes rencontrés par l'administration fiscale cantonale ces dernières années tenaient au moins autant à l'ancienneté des équipements et des langages informatiques qu'à l'organisation de cette grande direction et du projet d'imposition assistée par ordinateur (IAO).
a) Les dysfonctionnements liés au système informatique et au projet « impôts assistés par ordinateur »
C'est au début de l'année 1995, pour la taxation de 1995, qu'a été introduit le logiciel « impôts assistés par ordinateurs » (IAO).
Les déclarations, après que leur réception ait été enregistrée, étaient entièrement saisies par les taxateurs/trices. Ces derniers procédaient ensuite à la taxation proprement dite directement à l'écran (le crayon était banni). Enfin les bordereaux, accompagnés d'un avis de situation, étaient émis par le vieux système Unisys.
Le système de taxation mis en place s'est tout de suite caractérisé par son extrême lenteur. La production journalière moyenne du taxateur/trice, qui était de 30 taxations, n'était plus que d'une douzaine. Le 10 août 1995, seuls 40'000 bordereaux pour un montant de 270 millions de francs avaient été notifiés, alors qu'à la même date en 1994, 105'000 bordereaux totalisant 784 millions de francs avaient été expédiés.
Ces informations étaient connues. A fin 1995, il a été décidé de procéder à des taxations allégées et à environ 30'000 taxations provisoires. Ces dernières ont été établies sur la base de la seule saisie des éléments déclarés par les contribuables, saisie effectuée par du personnel temporaire, une soixantaine de personnes engagées dans le courant de l'année. La qualité de ces taxations provisoires était franchement mauvaise.
Durant les premiers mois de 1996, l'administration fiscale a dû rendre définitives les 30'000 taxations provisoires et procéder dans l'urgence à la taxation de l'impôt fédéral direct. La taxation de 1996 a dès lors débuté avec trois mois de retard. Considérant ces faits, décision a été prise le 1er avril 1996 de revenir à la taxation « à l'ancienne ». Les déclarations, après que leur réception ait été enregistrée, sont taxées sur papier, puis remise à un pool de saisie qui enregistre les informations sur IAO, pour que sortent les bordereaux, toujours sur le vieux système Unisys. C'est ainsi que se termine l'avancement du projet IAO, la suite ayant été gelée.
Les perturbations vécues dans les services de taxation ont abouti au retard que l'on sait et à l'accroissement important des taxations provisoires pour les personnes physiques à fin 1995. Des mesures ont dû être prises, en matière de procédure de remboursement, dès le quatrième semestre 1995, en matière de modification des acomptes provisionnels 1996, ainsi qu'en matière de procédure de recouvrement des soldes dus de l'exercice 1995.
Ces mesures visaient à supprimer certains automatismes, dès fin 1995, (remboursements) au profit de contrôles et de procédures manuelles et restrictives d'une part, et, d'autre part, à décaler dans le temps des actions de recouvrement des soldes dus résultant des dernières notifications de l'exercice 1995, jusqu'à ce que toutes les rectifications aient pu être effectuées par les services de taxation.
En outre, les contribuables n'ont eu à intervenir que de façon très réduite pour faire modifier leurs acomptes provisionnels 1996, le service du recouvrement ayant spontanément pris en charge ces modifications au fur et à mesure que les taxations provisoires 1995 devenaient définitives.
Il a, également au fur et à mesure, été procédé aux remboursements des trop-perçus d'impôts 1995 dans le courant 1996.
Globalement les montants et le nombre, très importants au 1.1.96, des créances ordinaires de l'exercice 1995 dues par les personnes physiques domiciliées ou non à Genève ont plus fortement diminué que d'habitude au cours de 1996, pour atteindre vers la mi-avril 1997 le niveau des créances correspondantes de l'exercice 1994 au 31.12.95. Ce « retard » de 3 mois et demi est cependant également lié aux problèmes conjoncturels, comme en atteste l'augmentation croissante des sommations de payer depuis plusieurs années. C'est vers la mi-mars 1998 que les montants et le nombre des créances ordinaires de l'exercice 1996 dues par les mêmes catégories de contribuables, moins importants au 1.1.97, ont atteint le niveau des créances correspondantes de l'exercice 1994 au 31.12.95.
En 1996, les travaux de taxation ont été retardés pour l'impôt fédéral direct 1995-1996. Le solde des bordereaux n'a pu être notifié qu'au printemps 1997. Pour atténuer les effets pour les contribuables de l'obligation de payer dans les 30 jours la totalité des impôts dus pour les deux années, la décision a été prise de leur accorder un délai supplémentaire automatique jusqu'au 30 septembre 1997 pour la tranche 1996.
b) L'organisation de l'administration fiscale cantonale
Jusqu'à fin 1993, l'AFC était organisée en six divisions ; à la tête de chacune d'entre elles se trouvait un directeur, l'ensemble étant sous la responsabilité d'un directeur général. Suite au départ du directeur général en 1993, ce poste a été dédoublé en une fonction administrative et logistique et une fonction de responsable des questions relatives au développement du droit fiscal et à sa mise en oeuvre. La volonté étant de privilégier la fonction de gestion, en vue d'un développement et d'une introduction rapides du logiciel IAO. La maîtrise de la conduite de ce projet s'est située auprès de l'administrateur général et du directeur de la division des personnes physiques de l'AFC. Ce dernier a pris sa retraite dans le courant de l'année 1995, mais a continué à être impliqué dans le projet IAO, en tant que consultant, jusqu'à fin 1995.
Courant 1996, après le gel de l'avancement de l'application IAO, l'administrateur général s'est vu confier d'autres tâches, hors AFC. Dès le 1er novembre 1996, l'AFC a été réorganisée en trois directions. La direction générale était désormais assumée conjointement par les responsables des trois nouvelles directions.
La première tâche de cette direction tricéphale a été de poursuivre le processus de normalisation des travaux de taxation. Il s'est ensuite agi de faire face aux divers problèmes informatiques de l'AFC, qui sont apparus avec une plus grande acuité à la suite du regroupement de l'ensemble de la maîtrise d'oeuvre au sein des nouveaux centres d'exploitation et de développement des technologies de l'information, début 1997.
C'est dans ce contexte qu'il est apparu nécessaire de lancer le projet « Expertise AFC » et, donnant suite à l'une des conclusions de ce rapport, de confier au cabinet Revisuisse Price Waterhouse une mission destinée à établir une cartographie des flux comptables au sein de l'AFC.
c) Le rapport « expertise AFC »
Les conclusions du rapport d'expertise, rendu en septembre 1997, mettent en évidence un système d'information trop atomisé avec des sous-systèmes qui communiquent mal entre eux, une très mauvaise qualité des données, avec des pertes d'information, un système si vieux que toute maintenance entraîne des problèmes.
Mesdames et Messieurs les député-e-s ont d'ores et déjà eu connaissance de ce rapport. Nous souhaitons néanmoins reproduire ci-dessous l'inventaire des dysfonctionnements dus au système IAO, tel que nous l'analysons aujourd'hui :
il n'y a pas eu au départ de réflexion globale. L'AFC n'a pas été abordée comme une entité mais comme une addition de services distincts. Résultat : l'outil informatique constitué d'applications de générations différentes (Unisys, Magic, Oracle Unix) est précaire. Les plates-formes sont hétérogènes et le dialogue par le biais d'interfaces n'est pas fiable, voire inexistant ;
les utilisateurs/trices n'ont pas été suffisamment consultés et leurs besoins n'ont pas été pris en compte. De ce fait les applications ne répondent pas aux besoins. Les taxateurs/trices des personnes physiques n'expriment pas de satisfaction. D'après eux, l'outil informatique n'est pas adapté à leur travail. Ils estiment qu'IAO a causé des retards considérables et à fait perdre de l'argent à l'Etat. En revanche, l'outil semble mieux correspondre à la taxation des personnes morales ;
systèmes d'information : il n'y a, au départ, pas eu d'état des lieux, la période de test n'a pas été respectée, les interfaces entre les sous-systèmes n'ont pas été sécurisées et aucun élément n'a été mis en place pour suivre les changements et constater les dérives. Les applications ont vraisemblablement été développées en tenant compte des règles de gestion énoncées, sans pouvoir cependant garantir leur fiabilité. En outre, les investissements consentis pour IAO ont eu pour effet de stopper tous les travaux sur les autres systèmes ;
chaînes de traitements : les interventions sur les bases de données n'ont pas été répertoriées, il n'y a pas eu d'inventaire des incidents, le système a été désécurisé avec l'objectif déclaré d'améliorer les performances. La porte était ainsi grande ouverte à l'introduction volontaire ou involontaire d'anomalies ;
les problèmes concernant Unisys existent depuis plus de 10 ans, notamment pour ce qui concerne l'exécution des chaînes de traitement. On n'a jamais tenté de remédier aux causes des problèmes. On s'est contenté d'agir sur les seules conséquences ;
magic nécessite un suivi permanent, une diminution de sa surveillance entraînant immédiatement des effets négatifs sur son bon fonctionnement ;
la fiabilité des interfaces entre les systèmes est mauvaise. Le système IAO ayant manqué de temps pour sa réalisation, les interfaces font partie des opérations délaissées ;
bien que primordial, le niveau de contrôle informatique en matière d'intégrité et de sécurité est faible ;
les applications des rôles et de la comptabilité sont obsolètes et doivent être revues en profondeur. Il existe des différences pour la plupart des impôts gérés par le service de la comptabilité de l'AFC.
du côté de la direction de l'AFC, mise en place d'un organe de conduite de la maîtrise d'ouvrage (OCOMOA). Mais l'action de la direction générale tricéphale est entravée par l'absence de lignes directrices claires et le manque d'une fonction de coordination des activités administratives.
d) Les causes
1. La précipitation
Techniquement le projet IAO s'est effectué dans la précipitation et sans analyse sereine de la situation. Les principales règles de gestion de projet n'ont pas été appliquées et l'échec était quasi programmé. Les tests grandeur nature n'ont pas été effectués et il n'a de ce fait pas été possible de se préparer aux réglages de l'application. Entre les bugs, la mauvaise utilisation et la non performance de l'application, le retard s'est très vite installé et a encore fragilisé l'édifice informatique.
Aucun plan de secours n'a été prévu avant la mise en fonction du nouveau système. Comme la machine s'est emballée très rapidement, le temps a fait défaut pour mesurer l'incidence des décisions prises. Ces dernières l'ont été à la hâte. Très vite, les taxateurs/trices se sont rendus compte qu'ils manquait des champs d'application et qu'ils ne pouvaient pas rentrer toutes les données d'une feuille d'impôt. De plus, la lenteur du système a nécessité l'installation de deux PC supplémentaires par taxateur/trice, afin qu'ils puissent traiter plusieurs déclarations ensemble. Le rapport d'expertise précise que 60 % seulement des informations de la déclaration des personnes physiques figure dans la base de données. Dans certains cas les taxateurs/trices sont contraints de se référer à la version papier. Le retard pris dans la taxation a également obligé l'administration à ouvrir le samedi et un grand nombre d'auxiliaires ont été engagés pour saisir les données. Il a dès lors été décidé de toucher à la partie vitale de l'applicatif et certains contrôles d'intégrité initialement appliqués ont été supprimés.
Les conséquences d'une telle situation sont difficiles à évaluer, car les interventions directes de rectification de données sur la base IAO ont été effectuées par le support-système et n'ont pas été répertoriées.
Une grande partie des problèmes aurait pu être évitée si l'opération test avait été effectuée au préalable. Elle aurait servi de référence pour comparer les résultats et mesurer la qualité du nouveau système. Les tests permettent de travailler des scénarii qui vérifient tous les aspects de l'introduction d'un nouvel outil au niveau organisationnel et technologique. Ils indiquent également dans quelle mesure l'outil est adapté aux objectifs de départ. Ces validations sont associées à un indice d'importance et il est déconseillé de poursuivre un projet tant que les valeurs souhaitées n'ont pas été atteintes.
Dans le métier informatique, on parle de politique de tests. Cette étape indispensable est évaluée à 50 % du temps total du projet. En évitant cette étape, on peut avoir au premier abord l'impression que le projet fonctionne malgré tout. Dans le cas présent, on s'est très vite rendu compte que ça n'était pas le cas : absence de référence unique des données, interfaces non synchronisées et non fiabilisées, élimination d'informations déterminantes, codification divergente. Les tests auraient sans doute abouti à un report du démarrage ou dans le pire des cas à un retour à la case départ pour non conformité aux fonctionnalités. L'absence d'outil automatique de contrôle de saisie n'a évidemment pas arrangé les choses. Enfin, il était impossible de se retourner contre les fournisseurs puisque les machines n'ont pas été utilisées correctement.
2. L'absence de concertation et la non adéquation aux besoins
Ces problèmes informatiques ont eu des répercussions directes sur la qualité du service rendu au contribuable. Au milieu 1995, le retard constaté était tel qu'il a fallu augmenter la vitesse de traitement des dossiers au détriment du temps consacré aux réponses, ainsi qu'aux renseignements.
La commission d'évaluation des politiques publiques, dans un rapport publié en 1997, met en évidence que de 1992 à 1994, la moitié des taxations étaient réalisées au premier semestre, 21 % en 1995 et 15 % en 1996. L'administration fiscale était en train d'étouffer.
Pour accélérer au maximum le traitement des déclarations, le système informatique a été dépouillé de son système de sécurité et de contrôle, considéré comme un frein. La qualité de traitement des dossiers, l'équité devant la loi, l'intégrité et la confidentialité des données sont devenues difficiles à garantir. Dans le même temps certaines activités ont été arrêtées comme la gestion des débiteurs « sans autre adresse (SAA) » ; le dégrèvement de ces débiteurs représente un montant actuel de 112 millions de francs.
Du côté du personnel, cette période a été très dure à vivre. Les collaborateurs et les collaboratrices n'ont pas eu la possibilité de s'investir dans le projet. La méthode choisie par la direction a été le passage en force. L'esprit d'équipe a fait ici particulièrement défaut. Dès que les premiers incidents sont apparus, la majorité des collaborateurs et des collaboratrices n'a pu que s'accommoder du système proposé. Les conditions de travail se sont aggravées, les cadences de travail ont augmenté : 10 à 12 heures par jour et des semaines de 6 jours et les défauts du système attribués à un soi-disant « faible niveau du personnel ».
En tout état de cause, le manque de concertation s'est fait sentir partout, entre les utilisateurs/trices et les informaticiens et entre les utilisateurs/trices et la maîtrise d'ouvrage (chefs de projet). La mise en application s'est faite sans que jamais l'on soit venu dans les services et lorsque les utilisateurs/trices ont tenté de s'exprimer, il n'a pas été tenu compte de leurs remarques.
La conséquence de ces erreurs figure dans la conclusion du rapport d'expertise : « les expertises et plans d'actions élaborés depuis le début des années 90, restés sans lendemain, ainsi que les tentatives de mise en place de nouveaux concepts globaux tels que machine de base de données RDBC, applications Magic et plus récemment IAO, n'ont pas atteint l'objectif souhaité ». Le rapport relève également qu'aujourd'hui IAO fonctionne bien, au détail prêt qu'il ne sert plus à la taxation, sauf pour les indépendants. Pour tous les autres domaines de taxation, la taxation est manuelle, ensuite ses différents éléments sont repris par les saisisseurs.
Mesdames et Messieurs les député-e-s, la motion de la Commission fiscale nous demande de déterminer les responsabilités relatives aux dysfonctionnements de l'administration fiscale à partir de 1995. Le 15 décembre 1998, le département a chargé M. P. Heyer, juge, de déterminer les responsabilités éventuelles des personnes en place actuellement ou au moment présumé des faits dans le cadre de la recherche des causes des différences comptables de 75 et 40 millions de francs constatées par le rapport fiduciaire et de la disparition supposée de registres de comptes.
Le juge Heyer conclut, nous citons : « Je pense qu'il serait injuste de mettre en évidence l'une ou l'autre défaillance individuelle. Ce qui est arrivé me paraît plutôt être le résultat d'une manière de gérer les affaires de l'Etat qui n'a heureusement plus cours. Les personnes chargées du service de la comptabilité n'étaient pas formées pour cela. Les supérieurs hiérarchiques s'intéressaient à d'autres affaires.
Je pense par conséquent qu'il convient de tirer un trait sur ce douloureux chapitre de l'AFC et de consacrer son énergie à la mise en place d'une administration rigoureuse et performante. »
Le Conseil d'Etat rejoint le juge Heyer dans ses conclusions. Les responsabilités de ce qui s'est passé sont diffuses. Elles tiennent d'un ensemble de pratiques et d'un état d'esprit et il est difficile d'individualiser de quelconques responsabilités.
Quant à l'effet des dysfonctionnements sur les recettes fiscales, il est certain que les taux de croissance que nous connaissons en 1998 et en 1999, respectivement 5,9 et 3,8 % (baisse d'impôt incluse) pour les personnes physiques, ne s'expliquent pas entièrement par l'amélioration conjoncturelle. Ils ne sont pas le seul fruit de la croissance mais intègrent aussi une bonne qualité de travail à l'administration fiscale.
B. De 1998 à nos jours : ce qui a été entrepris
1. Principes et étapes
Dès 1998, le Département des finances a mis sur pied une démarche de refonte et de modernisation du système d'information de l'administration fiscale. L'objectif est un système intégré construit autour d'une base de données unique, un système qui gère des données fiables, dont les règles de gestion sont transparentes et modifiables rapidement et qui offre un meilleur service aux contribuables.
La stratégie pour y parvenir est raisonnable. Elle consiste à assurer le fonctionnement de ce qui existe, y compris le passage à l'an 2000, et à réaliser en parallèle la modernisation et la refonte du système de manière échelonnée jusqu'en 2002. Nous avons renoncé à une manière de faire plus agressive et plus rapide, mais aussi plus dangereuse au profit du pragmatisme et de la sécurité, car il nous incombe la responsabilité d'assurer les recettes fiscales et le financement des prestations publiques.
2. OSI et comité de reconstruction
Au printemps 1998 un service d'organisation et systèmes d'information (OSI) a été créé. Directement rattaché à la présidence du département, il a pour mission d'assurer une vue d'ensemble du système d'information du Département des finances, de participer à l'élaboration et de garantir la mise en oeuvre des objectifs stratégiques de gestion, d'accompagner la maîtrise d'ouvrage face aux défis technologiques et organisationnels, de faciliter ses relations avec la maîtrise d'oeuvre, ainsi que de coordonner, planifier et mettre en place le contrôle interne des projets organisationnels et informatiques.
Il est mis en place dans le même temps un comité de reconstruction, présidé par la cheffe du département et qui regroupe l'ensemble des chefs de projet. Ce comité pilote et coordonne la maîtrise d'ouvrage et toutes les opérations entreprises. Il gère la collaboration avec le centre des technologies de l'information ainsi que la participation du personnel au projet.
3. Financement
La loi 7838 votée par le Grand Conseil en date du 25 novembre 1998 prévoit un volet de 18,2 millions de francs pour l'administration fiscale. Il garantit ainsi la maîtrise des ressources financières et d'assistance au Département des finances. Il s'agit concrètement :
d'adapter à l'an 2000 l'ensemble des applications utilisées par l'administration fiscale cantonale ;
de piloter les nombreuses maintenances correctives et les mesures de stabilisation techniques qui permettront de fiabiliser les traitements et les résultats et d'améliorer l'intégrité des données ;
d'organiser la mise à disposition pour l'ensemble des collaborateurs/trices de l'AFC de matériel performant permettant d'accueillir les nouveaux outils bureautiques et les futures applications ;
d'analyser les incidences informatiques et organisationnelles de l'adaptation des dispositions relatives à l'imposition des personnes physiques à la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes et assurer la mise en oeuvre des applications y relatives ;
de réaliser la première étape du projet de refonte visant à réorganiser le système d'information de l'AFC.
4. Les mesures prises
L'état des lieux tel qu'il a d'ores et déjà été décrit a rapidement mis en évidence la mauvaise qualité des données. Les problèmes informatiques se retrouvaient à plusieurs niveaux, tant du côté des logiciels que de l'infrastructure. Ils coexistaient avec des difficultés organisationnelles, soit difficulté d'utiliser les outils, manque de contrôle dans la production, absence de ligne claire de la part de la direction. Il devenait urgent d'agir.
1. Les mesures d'organisation
a) l'organisation de l'AFC
L'organisation en place début 1998 reposait sur une direction à trois et n'était de toute évidence pas satisfaisante, y compris pour ses titulaires. Elle devait changer au profit d'une direction plus claire et plus profilée. Décision a donc été prise, en accord avec la direction en place, de créer un poste de directeur général dont les capacités de gérer, de rassembler et de coordonner doivent permettre de mener à bien les importantes réformes en vue à l'administration fiscale.
D'autres changements de structures sont intervenus depuis, dans le but d'améliorer le fonctionnement des services : fusion des services de contentieux et de recouvrement, renforcement du contrôle, création d'un service de vérification, rattachement de la comptabilité et de l'économat de l'AFC aux services financiers du département, en leur donnant une mission départementale.
Enfin, considérant d'une part, que la mission de l'AFC, à savoir assurer le financement des prestations publiques, ne devait pas être mise en danger par la conduite des projets informatiques et que, d'autre part, la réussite des projets de modernisation de l'AFC était liée à l'engagement des membres du personnel, il convenait d'adapter en conséquence les processus de décisions.
La conduite du projet de refonte informatique par le comité de reconstruction, c'est-à-dire par une structure parallèle à la structure hiérarchique, autorise une démarche participative et a le mérite de ne pas mettre en danger le fonctionnement normal de l'administration auquel les directeurs se doivent de consacrer l'essentiel de leur temps et de leur énergie.
Stimuler l'esprit de coopération, permettre à chacun-e de s'approprier ses tâches et ses responsabilités, suppose des procédures de travail transversales et non hiérarchiques. Concrètement cette nouvelle organisation se caractérise par :
le comité de reconstruction.
Le comité de reconstruction constitue l'instance décisionnelle des projets liés à la refonte. Son rôle est d'orienter par ses décisions et de contrôler le bon déroulement en termes de coûts, de délais et de qualité.
Autour de la présidente du département, le comité de reconstruction réunit le directeur général de l'AFC, le responsable de l'OSI et tous les chefs/cheffes de projets. Les directrices et les directeurs de l'AFC ne sont pas appelés à participer en temps que tels aux séances du comité.
des comités de projets, chargés de l'exécution et de la livraison de tout ou parties du projet. Chaque comité est composé et piloté par des spécialistes « métiers », assistés par des professionnels de la conception et de la réalisation informatique. Les projets sont définis précisément, limités dans le temps, les modalités et le calendrier sont connus. Les chefs/cheffes de projets répondent devant le comité de reconstruction.
des ateliers réunissant tous les collaborateurs et les collaboratrices pour définir les besoins. Ces ateliers favorisent l'implication d'un grand nombre d'acteurs. Ils sont largement utilisés aussi bien dans les phases de conception (plan directeur, étude préalable) que dans les phases de construction (étude détaillée, réalisation).
des points de rencontre hebdomadaires avec les directeurs et les directrices et les chefs/cheffes de service pour intensifier la circulation de l'information tant verticale qu'horizontale.
Cette façon de fonctionner est partie intégrante de la volonté de la présidence du département et de la direction de l'AFC de mieux valoriser les fonctions « métiers » de l'AFC. Dans ce but, le plan de formation continue du personnel est renforcé et le statut des taxateurs et des taxatrices est en cours de réévaluation. La démarche a eu jusqu'ici des résultats globalement positifs en faisant progresser les projets de fiabilisation et de modernisation.
b) les mesures d'organisation du système d'information
b.1. les relations avec l'informatique de l'Etat (CTI)
Les différents états des lieux ont clairement démontré les lacunes de la production informatique. Ces dernières ont eu des répercussions directes sur les prestations de l'administration fiscale. Il a par conséquent été nécessaire de clarifier les besoins du département en la matière, c'est-à-dire :
1. faire l'inventaire des travaux de production effectués par le centre des technologies de l'information pour le compte de l'AFC, tels que l'impression des déclarations, le calcul des intérêts, etc. ;
2. vérifier l'adéquation des traitements avec les besoins des utilisateurs/trices ;
3. sécuriser les échanges de données entre les systèmes ;
4. optimiser la gestion des impressions et le post traitement ;
5. offrir aux utilisateurs et aux utilisatrices la possibilité de consulter les données.
L'amélioration de la situation passe par un partenariat continu avec le centre des technologies de l'information.
De surcroît, la nécessité de renforcer la sécurité informatique est devenue urgente car l'ouverture aux nouvelles technologies conduit à une plus grande vulnérabilité du système. C'est pourquoi l'OSI a introduit une charte utilisateur/trice et a accru les moyens de surveillance et de mesures du système.
b.2. Le passage à l'an 2000
Deux mille programmes ont dû être transformés pour la fin de l'année 1999. Les premiers programmes ont été mis en test dès le 15 juin 1998. Pour des raisons de sécurité, un deuxième système Unisys d'occasion a été acheté qui a séparé les environnements de tests et de développement de celui de la production.
Le passage à l'an 2000 s'est effectué comme prévu avec un plan de secours à disposition. La fin de l'opération est programmée pour le deuxième trimestre 2000.
b.3. Les premières mesures de modernisation
Le département a débuté un processus de modernisation sur des applications lorsque ces interventions étaient de nature à favoriser les évolutions futures et n'avaient pas d'impact sur les urgences.
Le projet « infrastructures » a redéfini les stations de travail de l'AFC et les a rendues plus compatibles avec les besoins des utilisateurs et des utilisatrices. A fin juin 1999, 510 postes de travail avaient été transformés.
Le passage de word 1 et excel 3 aux versions actuelles, ainsi que l'accès à la messagerie et à internet, représentent un saut technologique important qui a demandé un effort de formation. Le transfert sur la nouvelle plate-forme de tous les collaborateurs et collaboratrices de l'AFC était ambitieux, 1500 jours de formation ont été dispensés pour y parvenir et grâce à la collaboration entre le CTI et le personnel de l'AFC, la bureautique existante a pu être adaptée.
Des correspondant-e-s informatiques ont été désignés dans chaque service de l'AFC. Ils ont pour rôle d'assister leurs collègues dans l'utilisation des outils informatiques. Une procédure « info-panne » a été mise en place. Elle charge les correspondant-e-s informatiques de faire un premier diagnostic, de dépanner si possible l'utilisateur ou l'utilisatrice ou d'annoncer la panne à la centrale d'appel.
Une fois cette mutation technologique achevée, priorité a été donnée aux relations avec le public et au renforcement de la confiance dans l'administration fiscale. Pour ce faire :
les conditions d'accueil ont été améliorées, des salles d'attente nouvelles ont été créées ;
un central d'appel téléphonique pour l'AFC a été mis en place, afin que les contribuables puissent obtenir des renseignements plus ciblés. Ce central est assisté d'un répondeur numérique 24 h/24 et 7 jours sur 7 ;
les contribuables ont reçu pour la première fois un relevé de compte avec l'avis de notification ;
par l'intermédiaire des médias, le public a été informé de toutes les nouveautés pouvant faciliter son rapport avec l'administration : ouverture du site internet du département, qui contient des renseignements pratiques, des documents téléchargeables et une calculette pour estimer son bordereau d'impôt.
Enfin, certaines technologies nouvelles ont été expérimentées pour changer les processus existants et étudier la capacité d'adaptation de l'administration :
le projet GEPETO, soit le développement et la mise en production de programmes d'aide à la gestion des commandements de payer, pour le service du contentieux ;
l'intranet pour faciliter la communication interne, l'assistance on-line et la gestion de projet ;
l'introduction de télékurs au service des titres.
Des mesures particulières ont été prises pour le service de l'impôt à la source qui représente une mini administration fiscale :
le projet GEDO : gestion électronique des documents. Depuis le 1er janvier 1999, 1,5 million de documents papier ont été mis à disposition électroniquement ;
l'analyse de processus pour accompagner les services dans une démarche de réflexion et d'optimisation ;
l'approche workflow pour le suivi des processus.
2. La comptabilité de l'AFC
Une comptabilité rigoureuse est un élément essentiel de la crédibilité du service public. Une fiduciaire a eu pour mission, avec un appui important du service de comptabilité, d'identifier les maillons faibles et de dresser un inventaire des principaux dysfonctionnements de la comptabilité. Dans un rapport remis le 8 septembre 1998, figure l'analyse des différences constatées entre les comptes de l'AFC et les comptes individuels des contribuables, ainsi qu'entre la comptabilité de l'AFC et la comptabilité générale de l'Etat. Cette analyse a permis d'élucider une partie des problèmes. Elle a également mis en évidence des défauts organisationnels et informatiques, notamment en ce qui concerne la production.
Contrairement à ce que l'on pourrait imaginer, les différences comptables ne sont pas récentes. Ainsi, le cas d'un compte créditeur qui présente un solde de 75 millions depuis l'année 1983, solde qui résulte d'une accumulation de provisions entre 1973 et 1982.
Par ailleurs, depuis 1985, les problèmes concernant les mouvements comptables ont généré une différence d'environ 40 millions de francs entre la comptabilité de l'AFC et les comptes individuels.
Les recommandations de la fiduciaire ont été suivies d'une série de mesures. Le détail des unes et des autres figure ci-après :
1. Les opérateurs ne devraient pas tous avoir accès au langage qui permet d'intervenir sur l'enchaînement des programmes (JCL). La possibilité de modifier une chaîne de traitement ou son déroulement doit être limitée et identifiée.
Risque : voir apparaître des erreurs de comptabilité dans les flux financiers.
Mesure : les fonctions et les environnements ont été séparés, ce qui a eu pour effet de limiter le nombre des accès.
2. Les noms des fichiers temporaires devraient être tous différents. Il s'agit d'éviter des erreurs en cas de passage simultané des chaînes de traitement, opération très courante étant donné la surcharge des travaux planifiés.
Risque : la mise à jour des bases de données comptable et des comptes individuels des contribuables n'est pas cohérente.
Mesure : situation traitée par les équipes de développement et de production du centre des technologies de l'information.
3. Les comptes individuels des contribuables devraient permettre de retrouver la trace comptable des mouvements de perception enregistrés. Cette opération est aujourd'hui difficile, voire impossible. La durée de conservation des éléments dans le système est trop faible.
Risque : des pertes financières ne sont pas à exclure, car il est impossible de vérifier si toutes les créances ont été comptabilisées.
Mesure : les programmes et les fichiers ont été adaptés. La durée de conservation de ces derniers, ainsi que le nombre de sauvegardes ont été augmentés.
4. La documentation générale des programmes et la gestion des modifications devraient être améliorées. Impossibilité de suivre l'évolution d'un programme dans le temps et donc de connaître la nature des modifications qui y ont été éventuellement apportées.
Risque : la méconnaissance des modifications entraîne une perte de vision d'ensemble d'où des corrections inappropriées. Dépendance à l'égard de certaines personnes qui détiennent seules le savoir des choses.
Mesure : la documentation a été faite lorsqu'elle demandait un investissement en temps relativement court. Pour le reste, mise en place de la conservation de l'information.
5. La connaissance de la chaîne de traitement de la perception devrait être étendue à plusieurs collaborateurs et collaboratrices. Cette connaissance est essentielle. Il s'agit de l'attribution des versements des contribuables dans leurs comptes individuels.
Risque : la personne à l'origine de cette chaîne a quitté l'AFC en 1993, et depuis, faute de connaissance, l'évolution de ce système est freinée, voire stoppée.
Mesure : les équipes de développement ont été renforcées, ce qui a permis à certains collaborateurs/trices du secteur informatique de se spécialiser sur ces programmes stratégiques.
6. Les documents produits par les chaînes de traitement devraient être fiables. Certains documents sont incohérents et ne correspondent pas aux informations fournies à la base. Ces documents sont destinés aussi bien à l'AFC qu'à l'extérieur.
Risque : prises de décisions erronées, impact direct sur la qualité du contrôle interne.
Mesure : chaque anomalie est répertoriée et corrigée. Une procédure de contrôle est mise en place. C'est là une des tâches principales de la fiabilisation.
7. Les corrections de programmes et les tests ne devraient plus être effectués sur l'ordinateur de production car des projets de développement non fiabilisés pourraient entraver la production.
Risque : problèmes techniques et de cohérence jusqu'aux possibilités d'erreurs intentionnelles.
Mesure : un ordinateur de réserve a été mis en service pour effectuer les tests et pallier aux incidents techniques. De plus, tous les programmes modifiés sont désormais testés par une autre personne que celle qui l'a développé. Ce n'est qu'une fois la certification obtenue qu'il peut passer en production. Cette deuxième machine permet également de décharger l'outil de production et de préparer l'automatisation des chaînes.
8. Les bulletins de remboursement (BPR) présignés devraient être stockés dans un endroit sécurisé. Ce sont des papiers-valeur au même titre que les chèques.
Risque : possibilité de substitution, donc de fraude.
Mesure : l'accès au lieu de stockage a été restreint aux personnes autorisées.
9. La comptabilité devrait pouvoir bénéficier d'outils de recherche performants, sa mission comprenant le suivi et le contrôle précis des mouvements comptables.
Risque : le contrôle des mouvements comptables n'est pas sûr, les recherches adéquates ne pouvant être effectuées.
Mesure : une démarche de contrôle a été mise en place et permet de détecter rapidement une anomalie. Le fonctionnement de ce dispositif a permis de stabiliser les déséquilibres comptables depuis 18 mois.
10. L'organisation et les outils du service de la comptabilité de l'AFC devraient être adaptés.
Risque : la qualité du contrôle et le suivi des opérations comptables ne sont pas garantis.
Mesure : création d'un service financier du Département des finances (SFDF) dans lequel est intégré le service de la comptabilité de l'AFC. L'ensemble des questions financières est ainsi centralisé au niveau départemental. L'analyse des processus et procédures comptables a débuté et devrait se terminer en juin 2000.
3. Les rôles
Le travail de l'administration fiscale s'effectue sur la base des rôles. Un nombre important d'indices nous permettait de douter de sa fiabilité. Un état des lieux a permis de faire le point de la situation et mis en évidence les problèmes suivants :
la mise à jour du rôle des personnes physiques : une application permet de gérer la mise au rôle des entités fiscales « personnes physiques » et de suivre leurs évolutions et ce, afin de fournir les éléments nécessaires à la taxation sur le site central Unisys.
Risque : les fichiers ne sont pas toujours à jour ainsi les courriers peuvent être envoyés à la mauvaise adresse, les situations personnelles ne pas être modifiées, par exemple.
Mesure : la plus grande partie des procédures a été automatisée.
blocages techniques au rôle des employeurs. Il s'agit ici de la gestion du fichier des employeurs qui ont du personnel soumis à l'impôt à la source.
Risque : retard dans le traitement des dossiers.
Mesure : le logiciel du programme a été changé et les blocages éliminés.
corruption des fichiers permettant de saisir les éléments de taxation et de perception qui sont ensuite envoyés sur le site unisys pour traitement.
Risque : les problèmes de mise à jour entre les deux systèmes sont fréquents et nécessitent des arrêts de production pour y remédier.
Mesure : transformation du système de mise à jour et de contrôle.
fonctionnement de l'application « tourisme » : elle suit les dossiers dès l'envoi du décompte jusqu'à la perception, en passant par la taxation. La comptabilisation s'effectue via l'application « comptabilité tourisme ». Or, les éléments comptables n'étaient pas tous pris en compte.
Risque : perte de temps pour le contrôle des comptes.
Mesure : une automatisation a permis de supprimer ces problèmes.
non-adéquation aux besoins au rôle immobilier. Son application produit notamment le visa immobilier. Elle gère les estimations des biens immobiliers, de leurs propriétaires et de leurs usufruitiers/tières, ainsi que les informations annexes pour aboutir à la production du visa. Cette application n'a jamais répondu aux demandes des utilisateurs/trices.
Risque : la majorité des tâches étant manuelle, celles qui s'effectuaient par l'informatique bloquaient toutes les applications Magic de l'AFC.
Mesure : cette application a été adaptée et transformée et les blocages éliminés.
Les mesures prises ont conduit à des transformations des applications Magic. Elles ont permis d'obtenir une stabilité des fichiers et la disparition des lenteurs du système, une gestion plus efficace de la maintenance et une meilleure sécurité. Nous patienterons ainsi, jusqu'à la refonte, en donnant une satisfaction relative aux utilisateurs/trices sans impact négatif sur les résultats journaliers.
C. En perspective : la refonte
Aujourd'hui, l'administration fiscale cantonale est entrée dans une ère nouvelle : sa situation s'est stabilisée, sa capacité de travail renforcée, son infrastructure se modernise. Après une synthèse des procédures existantes et de leurs limites, voire de leurs anomalies, après la prise de mesures urgentes et la mise en place de nouvelles structures de fonctionnement, l'AFC se donne une vision d'ensemble en matière d'organisation.
Les objectifs fixés s'articulent autour de 4 axes :
1. Les outils informatiques ont pour finalité d'aider les collaborateurs et les collaboratrices et non de remplacer les personnes par des machines. Il s'agit en fait de dégager du temps pour des tâches à haute valeur ajoutée et améliorer la qualité du travail et dans ce but de faciliter au maximum les tâches répétitives comme la recherche de dossiers ou le contrôle de saisie. Nous avons tiré les leçons d'un proche passé. Tenter de se démunir en ressources humaines pour s'en remettre à la seule informatique n'est pas de mise.
2. Le système d'information sera performant, ouvert sur l'extérieur et capable de s'adapter aux évolutions législatives et organisationnelles à venir. Notre système formera un tout cohérent. En particulier, ses composants seront compatibles entre eux, pourront communiquer et seront faciles et agréables à utiliser.
3. Le nouveau système est pensé pour améliorer le service aux contribuables. Notre mission est en effet celle de tout service public, être au service des habitants et des habitantes de Genève. C'est particulièrement vrai pour l'administration fiscale. Son fonctionnement influe directement sur le financement des prestations publiques d'une part, et d'autre part, la façon dont elle effectue son travail a des conséquences sur l'égalité de traitement face à l'impôt et touche quelque 300'000 personnes. Le système sera construit autour de la simplification de la relation entre le contribuable et l'administration. Il devra bien évidemment assumer le bon déroulement de la production fiscale, mission essentielle de l'AFC.
4. Nous souhaitons plus de transparence, c'est-à-dire nous donner des moyens et des outils de pilotage et le système d'information devra répondre à cet impératif tant il n'est pas admissible, du point de la politique budgétaire notamment, de ne pas connaître l'état d'avancement de la production fiscale avant la toute fin d'année et tant il est nécessaire de pouvoir disposer d'instruments de simulation et d'analyse de manière à ce que les modifications législatives puissent se faire en toute connaissance de cause. Enfin, l'outil informatique intégrera un contrôle qualité.
Mesdames et Messieurs les député-e-s, le processus de refonte est en marche. Le lancement du projet a eu lieu le 7 mars dernier devant l'ensemble du personnel réuni.
Vous nous permettrez de conclure ce rapport sur ces propos d'avenir en mettant en évidence deux faits. Le premier, nous avons, en décidant des différentes mesures à prendre et en élaborant les principes régissant le projet de refonte, tiré un certain nombre de leçons des expériences passées. En ce sens, et à défaut d'avoir abouti, elles nous seront utiles. Le deuxième, ce texte ne met pas fin à notre relation. Mesdames et Messieurs les député-e-s, vous ferez partie du projet de refonte. Un projet de loi le concernant devrait vous être présenté dans le cours de cette année et nous avons l'intention de vous informer régulièrement sur l'état d'avancement de nos travaux, ce qui vous permettra de vérifier la cohérence de notre démarche et, le cas échéant, de nous interpeller pour justifier nos choix.
A ce stade, nous vous remercions de bien vouloir prendre acte de ce rapport et de considérer que les informations qu'il contient sont suffisantes pour autoriser le bouclement de la loi sur la création d'un outil d'impôt assisté par ordinateur (PL 8031).
Débat
M. Bernard Clerc (AdG). Nous remercions le Conseil d'Etat de ce rapport, qui, je dois le dire, est assez accablant. Accablant, lorsqu'on lit un certain nombre de choses sur les retards pris dans les taxations en 1995 et 1996 ; lorsqu'on lit que, selon le rapport de la Commission d'évaluation des politiques publiques, «la qualité de traitement des dossiers, l'équité devant la loi, l'intégrité, la confidentialité des données sont devenues difficiles à garantir» ; lorsqu'on lit, à la page 8, «qu'aujourd'hui IAO fonctionne bien, au détail près qu'il ne sert plus à la taxation, sauf pour les indépendants. Pour tous les autres domaines de taxation, la taxation est manuelle, ensuite ses différents éléments sont repris par les saisisseurs». J'en passe et des meilleures, notamment le fait que «les personnes chargées du service de la comptabilité n'égaient pas formées pour cela» et que «les supérieurs hiérarchiques s'intéressaient à d'autres affaires» !
Mesdames et Messieurs les députés, l'Alliance de gauche, pendant plusieurs années, comme cela a d'ailleurs été le cas pour la Banque cantonale, a dénoncé les dysfonctionnements à l'administration fiscale et, comme pour la Banque cantonale, pendant des mois, des années, on nous a dit qu'il n'y avait pas de problème, que nous devions nous rassurer, que tout allait bien et que c'était un problème informatique. En l'occurrence, l'informatique a bon dos, parce que, que je sache, les décisions qui se prennent en la matière et la manière de mener un projet informatique sont déterminantes dans son aboutissement.
Ce rapport nous satisfait globalement, à une exception près, c'est qu'évidemment personne n'est responsable. Tout a dysfonctionné, mais personne n'est responsable ! On ne peut pas retrouver de responsabilités individuelles, que ce soit au niveau de cadres de l'administration ou encore moins, évidemment, au niveau des responsables politiques. Et cela, Mesdames et Messieurs les députés, en ce qui nous concerne, nous ne l'acceptons pas. Nous estimons qu'un chef de département, qui a la responsabilité d'un secteur aussi essentiel pour le fonctionnement de l'Etat que le département des finances, porte la responsabilité politique des choix qui ont été faits et des conséquences graves pour le fonctionnement de l'Etat des dysfonctionnements qui sont intervenus.
Mme Christine Sayegh (S). Nous sommes également très satisfaits de recevoir enfin un rapport sur l'état des lieux des dysfonctionnements du département des finances. Il est vrai qu'il est souvent difficile d'avouer ses faiblesses, d'avouer ses dysfonctionnements. A plusieurs reprises, depuis bien des années, ces dysfonctionnements apparaissaient ponctuellement et nous avions tenté de les identifier. Mais il est évident qu'en tant que députés il nous fallait le concours du département.
Nous remercions donc infiniment le Conseil d'Etat et particulièrement Mme Micheline Calmy-Rey d'avoir accepté de jouer la transparence et de nous remettre les rapports de l'audit de ce dysfonctionnement interne. Nous espérons qu'à l'avenir non seulement cette transparence perdurera, mais que nous pourrons la vérifier régulièrement et que le contrôle parlementaire sur le fonctionnement des départements puisse s'exercer.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.