Séance du jeudi 13 avril 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 7e session - 16e séance

PL 8198
9. Projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit extraordinaire de fonctionnement pour au maximum 140 000 F pour 2000 et un crédit de fonctionnement pour au maximum 400 000 F dès 2001 au titre de subvention cantonale annuelle pour la crèche sise à l'Hôtel des finances. ( )PL8198

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Art. 1 Crédits de fonctionnement

1 Un crédit extraordinaire de fonctionnement au maximum de 140 000 F est accordé à l'espace de vie enfantine, fondation de droit privé, sise à l'Hôtel des Finances, 26, rue du Stand, ci-après la crèche, au titre de subvention cantonale de fonctionnement couvrant la période d'exploitation de septembre à décembre 2000.

2 Une subvention annuelle au maximum de 400 000 F est accordée à la crèche au titre de subvention cantonale de fonctionnement dès 2001.

Art. 2 Budget de fonctionnement

1 Le crédit extraordinaire mentionné à l'article 1, alinéa 1 ne figure pas au budget de fonctionnement 2000. Il sera comptabilisé en 2000 sous la rubrique 21.02.00.365.01.

2 La subvention mentionnée à l'article 1, alinéa 2 est inscrite au budget de fonctionnement dès 2001 sous la rubrique 21.02.00.365.01.

Art. 3 But(s)

1 Cette subvention, ainsi que celle de la Ville de Genève, doit permettre à la crèche, d'accueillir des enfants d'âge préscolaire dont les parents travaillent à l'Hôtel des Finances ou habitent dans le quartier.

2 Elle doit notamment servir à couvrir tout ou partie du déficit d'exploitation mais dans les limites de montant fixées à l'article 1.

Art. 4 Durée

Elle est reconduite d'année en année sauf décision contraire du Grand Conseil.

Art. 5  Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le Conseil d'Etat, en partenariat égal avec la Ville de Genève, vous sollicite aujourd'hui pour un projet social, l'ouverture de la première crèche, dans les locaux de l'Etat, soit à l'Hôtel des Finances. Compte tenu de la répartition des tâches entre la Ville et l'Etat, de l'expérience importante du département municipal des affaires sociales, plus particulièrement de son service « Délégation à la petite enfance », le Conseil d'Etat, soit pour lui, le Département des finances, a imaginé la nécessité d'une complète collaboration entre ces deux corporations de droit public pour ouvrir cette crèche. Cette nouvelle institution, fruit de la collaboration des deux entités précitées, sera une fondation de droit privé - on préserve ainsi l'équilibre au niveau public - dont les frais de fonctionnement seront couverts par les pensions payées par les parents (9 à12 % de leur revenus nets) et les subventions égales de l'Etat (dans les limites du projet de loi) et de la Ville.

Rappel de la situation de la petite enfance à Genève

Les publications de la Délégation à la petite enfance (voir notamment « La petite enfance en Ville de Genève », indicateurs en tendances, éd. 1998, No 2) résument la plupart des problèmes à résoudre par les privés et les collectivités publiques dans ce domaine et nous en donnons un bref aperçu ci-dessous.

Les femmes occupent de plus en plus une place sur le marché du travail et le taux d'activité des femmes mariées a plus que doublé entre 1960 et 1997, passant de 30 à 70 %. La tertiarisation de l'emploi à Genève et la possibilité de travailler à temps partiel favorisent l'activité professionnelle de la mère de famille.

Il y a 22'984 enfants de moins de 5 ans au 31 décembre 1997 dont un tiers fréquentent de manière régulière une institution de la petite enfance.

Pour résoudre le problème de placement des jeunes enfants, la capacité d'accueil a augmenté de 65 % dans les crèches entre 1987 et 1997. Il y a 152 institutions de la petite enfance dans le canton dont 34 crèches, en 1997. Trois demandes sur cinq ne peuvent obtenir satisfaction dans les crèches. Par crainte de ne pas pouvoir trouver de place pour leur enfant, les parents l'inscrivent à la crèche dès le début de la grossesse de la mère. Les demandent affluent au printemps, et en septembre. La famille se règle sur l'école, puisque pour certains, l'enfant passe de la crèche à l'école ; on harmonise donc les « rentrées ».

L'effort financier des pouvoirs publics est important dans ce domaine puisqu'on sait que la Ville de Genève couvre à hauteur de deux tiers les charges des institutions de la petite enfance sur son territoire ; cela signifie que les parents ne couvrent que le tiers des frais de fonctionnement, même si l'effort financier qui leur est demandé n'est pas négligeable pour leur budget familial, soit 9 à12 % des salaires nets. Les coûts de fonctionnement sont dus en partie à la progression des charges salariales, 70 % du personnel exerçant des charges éducatives pour lesquelles il a été dûment formé. L'encadrement éducatif de valeur, mérite une rétribution adéquate. En 1997, il y a en moyenne 6 enfants par poste éducatif dans les crèches. Compte tenu des stagiaires et auxiliaires, il y a en fait 9,5 enfants par employé(e) diplômé(e).

La fréquentation à temps partiel dans les crèches est en progession, se calquant sur les horaires de la mère. Les crèches sont fréquentées aujourd'hui par des enfants de tout milieu social. Les enfants de condition modeste, entre autres les enfants de familles monoparentales, y sont bien représentés. Quant aux autres enfants, leur placement est souvent sollicité pour des motifs de socialisation, d'intégration lorsqu'ils sont de langue étrangère notamment. La valeur éducative de la crèche qui complète celle offerte par la famille n'est donc plus à démontrer. L'accueil des jeunes enfants contribue à aider les mères à exercer harmonieusement une activité professionnelle souvent indispensable pour des raisons économiques.

Sans aller comme certains pays jusqu'à inscrire le droit à la crèche dans la constitution (Finlande), ou envisager une scolarisation dès l'âge de deux ans et par là-même une prise en charge étatique de l'éducation très tôt et certes coûteuse, on peut participer à la résolution du problème de l'accueil des moins de 5 ans par le soutien financier efficace des pouvoirs publics, aux structures encore privées destinées à la petite enfance. Une collaboration complète entre les collectivités publiques et les responsables des lieux d'accueil permet une bonne adéquation entre la famille, la structure d'accueil (crèche, jardin d'enfants ou école) et le monde professionnel.

Les parlements cantonal et municipal sont d'ailleurs parfaitement conscients de ces problèmes puisqu'ils ont voté en 1991, la création de la crèche-garderie pour la communauté universitaire (voir mémorial du Grand Conseil 1991, p. 1827 et ss), que la Ville de Genève finance en partenariat avec l'Université la nouvelle crèche au quai du Cheval-Blanc, près d'Uni-Mail. De plus, un rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la politique familiale répondant à diverses interventions parlementaires concernant la famille, du 10 novembre 1999, retrace aussi la problématique des diverses formes de soutien à la famille (RD 341 ; M 941-B ; M 1078 -A ; M 1090-A ; Q 3300). La motion 1314, déposée le 30 novembre dernier, concernant les structures d'accueil des enfants de 3 à 4 ans, au titre de soutien à la famille et au travail des femmes, est le signe récent d'un appel devenu nécessaire à la collaboration financière entre le canton et les communes pour permettre de compléter et parfaire le rôle social des collectivités publiques dans le domaine de l'éducation en partenariat avec la famille d'aujourd'hui.

Présentation de la crèche sise à l'Hôtel des Finances

Depuis de nombreuses années, notamment lorsque l'Etat a commencé à décentraliser ses services, à construire notamment « l'Hôtel des Finances », avec des locaux modernes et tout neufs en 1982, des idées de crèche ont circulé parmi le personnel. Les femmes y sont nombreuses comprenant parmi elles beaucoup de jeunes mères. La Commission du personnel du Département des finances, plus particulièrement constituée de représentants de l'administration fiscale cantonale, a demandé à plusieurs reprises qu'une crèche soit créée à l'Hôtel des Finances. La présidente du département des finances, Mme Micheline Calmy-Rey, préoccupée de la condition féminine en général et de celle de mère exerçant une activité professionnelle en particulier, a annoncé, dès l'automne 1997, au moment de son élection au Conseil d'Etat, qu'une crèche puisse voir le jour dans les murs de l'Hôtel des Finances.

A ce jour, entre 70 et 100 enfants du personnel de ce département sont en âge d'en bénéficier. Des places supplémentaires pour les enfants des habitants du quartier sont aussi nécessaires. En effet, les trois crèches qui sont dans les environs de l'Hôtel des Finances sont saturées.

Fondation de droit privé

La crèche en constitution est une fondation de droit privé. Cette solution est choisie parce qu'elle permet aux deux collectivités publiques qui la soutiendront financièrement d'avoir un droit de regard égal dans la structure aidée. Le but de la fondation est de permettre aux parents d'enfants d'âge préscolaire qui travaillent à l'Hôtel des Finances ou habitent le quartier de les confier, pendant leurs heures de travail, à un établissement de la petite enfance. La fondation est responsable du bien-être des enfants lorsqu'ils sont à la crèche, mais ne se substitue pas à la responsabilité éducative des parents.

Dans le Conseil de fondation, l'Etat et la Ville de Genève, subventionneurs à égalité, auront chacun deux représentants.

Les ressources de la fondation sont constituées des pensions versées par les parents, des subventions officielles et privées, des dons et legs. Le prix de pension payé par les parents est conforme au barème des prix de pensions fixé par la Ville de Genève (9 à12 % du salaire net).

Localisation de la crèche

Les locaux qui lui sont destinés ont été prévus dans l'Hôtel des Finances, secteur « Clos Bouillane » (perpendiculaire à la rue du Stand, au rez-de-chausssée, sur 300m2 de surface brute. Les enfants disposeront d'une place de jeux engazonnée, derrière les locaux de l'Office des transports et de la circulation, au 20, rue du Stand, soit à proximité immédiate de leurs propres locaux. La crèche aura sa propre entrée, donnant sur le « Clos Bouillane ».

Nombre des places disponibles et horaire d'ouverture

Le service d'évaluation continue des lieux de placement pour enfants et adolescents, service de protection de la jeunesse dépendant de l'Office de la jeunesse, sur la base des plans qui lui ont été soumis, a donné, le 15 février 2000, un préavis favorable pour une capacité d'accueil de 35 enfants présents. Il pourrait s'agir de 10 bébés jusqu'à l'âge de la marche et 25 enfants de la marche à 4 ans.

La crèche sera ouverte 12 heures par jour soit par exemple de 7h30 à 19h30.

La Ville et l'Etat se partageant à égalité les frais de fonctionnement de cette nouvelle structure, ils disposeront chacun de la moitié des places. Cela signifie qu'il y aura 17 places pour des enfants du quartier. Les prestations publiques sont ainsi mises à égalité à disposition du contribuable-parent et du contribuable-fonctionnaire.

A l'Hôtel des Finances, le personnel s'inquiète déjà de la date d'ouverture de l'institution, de l'accord du Parlement pour permettre cette ouverture puisqu'elle est subordonnée à une aide financière. A l'extérieur de l'Hôtel des Finances - puisque la rumeur a déjà couru de l'éventuelle ouverture d'une nouvelle structure pour la petite enfance - on se renseigne. Ainsi donc tant à l'intérieur de l'Hôtel des Finances que dans le quartier, on sollicite des places pour des enfants.

Budget de la fondation

Le budget de la fondation figure en annexe. On y constate un déficit de fonctionnement de. 729'393 F. D'une manière générale, le coût d'un enfant dans ce type d'établissement est d'environ 20'000 F. La Ville et l'Etat souhaitent prendre en charge le déficit précité de fonctionnement par moitié chacun. Cela revient à solliciter de votre Parlement 400'000 F, part de l'Etat pour une année. Compte tenu de la date d'ouverture de la crèche souhaitée au 1er septembre 2000 - parce qu'elle correspond à un moment favorable pour l'entrée en crèche, la sortie arrivant au moment de l'admission à l'école publique - il est sollicité une subvention partielle pour l'an 2000 soit 140 000 F comprenant le salaire d'une directrice avec les charges, engagée deux mois avant l'ouverture. En effet, pour assurer un bon fonctionnement de la crèche dès septembre, il sera nécessaire d'engager notamment la directrice dès juin-juillet 2000 pour qu'elle puisse préparer l'équipement et l'organisation demandés par le service d'évaluation des lieux de placement pour enfants et adolescents (Service de protection de la jeunesse).

Collaboration étroite entre Ville et Etat

Il faut souligner que ce projet est possible grâce à une collaboration complète entre la Ville et l'Etat.

L'Etat met à la disposition les locaux gratuitement, sans reporter les loyers, l'énergie, l'assurance-incendie ou les coûts des travaux pour aménager la crèche. Ces travaux ont néanmoins eu un coût, soit 650'000 F. La participation du fonds Eckert, en payant les infrastructures mobilières et octroyant le capital de dotation de 10'000 F de la fondation, est aussi un autre élément dont il faut tenir compte. Il participera d'ailleurs également par la suite, à part égale avec la Ville de Genève, au renouvellement/remplacement du matériel, mobilier de la crèche. Le Département de l'instruction publique, soit pour lui le service d'évaluation continue des lieux de placement pour enfants et adolescents, par ses échanges et conseils nombreux et fructueux au Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, chargé d'établir les plans de la crèche, a joué un rôle important pour trouver des solutions d'utilisation optimale des 300 m2 disponibles.

La Ville gérera les salaires du personnel et sera office payeur, en appliquant ses normes de salaires selon la convention collective relative aux salaires de la petite enfance comme elle le pratique pour ce type d'institution subventionnée. Le personnel est assuré à la FOP (fondation de prévoyance en faveur du personnel des institutions subventionnées), comme tout le personnel des crèches subventionnées par la Ville de Genève. En ce qui concerne le paiement des pensions dues, la fondation se chargera des écolages, mais à l'aide de logiciels fournis par la Ville de Genève.

Le Département des finances est depuis plusieurs mois en contact avec la Délégation à la petite enfance de la Ville de Genève, pour mettre au point ce projet. Ce service, grâce à son expérience, a pu donner des conseils pour les locaux et participera au choix du matériel nécessaire à l'exploitation de la crèche. Ce travail de consultant offert gratuitement par la Ville représente un coût non facturé. Le personnel de la crèche pourra aussi compter sur l'appui de la Ville pour composer et mener son programme éducatif auprès des enfants.

La Ville, l'Etat et la fondation de droit privé, dans les limites du présent projet de loi, en conformité du règlement relatif aux conditions de subventionnement des institutions de la petite enfance, signeront en sus une convention de partenariat.

Enfin, cette collaboration permettra l'ouverture de la crèche, sise à l'Hôtel des Finances, aux enfants du quartier, démontrant ainsi que les deux collectivités publiques mettent leurs structures - bien qu'elles revêtent ici la forme d'une fondation droit privé - à disposition de la population.

Conclusion

Au vu des explications ci-dessus, nous sollicitions, Mesdames et Messieurs les députés, votre bienveillant examen en vue de l'octroi de la subvention nécessaire au fonctionnement de la crèche, sise à l'Hôtel des Finances, qui doit contribuer à améliorer l'accueil de la petite enfance.

Annexe : budget de la crèche

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Préconsultation

M. Pierre Ducrest (L). Nous y voilà donc ! Voici quelques mois, j'avais développé une interpellation urgente, par rapport aux rumeurs qui couraient dans la République, pour savoir ce qu'il advenait de cette crèche et comment elle allait être réalisée. Ce soir, nous avons une partie de la réponse sous forme d'un projet de fonctionnement de ladite crèche - qui n'est pas un petit projet, j'y reviendrai tout à l'heure. Concernant le reste de la réponse que j'aurais souhaité recevoir, il n'y a malheureusement qu'une lumière diffuse, qu'une lumière tamisée dans l'exposé des motifs. Celui-ci parle, à propos de l'investissement et des travaux nécessaires à l'implantation de cette crèche, de 650 000 F, mais ceci n'est pas tout. En effet, cette crèche va bénéficier de locaux qui étaient nécessaires pour des salles de conférence ; par conséquent, dans le même Hôtel des finances, il faudra bien reaménager des salles de conférence, ce qui aura un coût. D'autre part, l'aménagement du clos dit Bouillane, derrière l'Hôtel des finances et derrière les locaux de l'OTC de 20, rue du Stand, entraînera aussi un coût.

Lundi, j'ai posé la question du coût à M. Moutinot, lors de son audition à propos des comptes de son département, mais je n'ai pas eu de réponse. En effet, nous traitions les comptes 1999 et il était un peu difficile de donner les dépenses réelles pour la crèche en 2000. Cela dit, comme ce soir nous avons la chance d'avoir parmi nous la présidente du département des finances et le président du DAEL, j'espère que je vais avoir, tout à l'heure, les réponses qui me manquent. D'autant plus, Mesdames et Messieurs, que naguère nous avons voté un projet de loi modifiant la LDTR, qui a été adopté récemment par le peuple du bout des lèvres, dans lequel on mélangeait un peu tout, c'est-à-dire la rénovation, la transformation et l'entretien. Dans le cas présent, 650 000 F, plus le reste, est-ce de l'entretien, des transformations, des aménagements, on ne le sait pas ! Alors, à toutes ces questions, qui concernent l'installation et l'investissement, j'aimerais bien obtenir une réponse.

D'autre part, au niveau du fonctionnement, la combinazione entre les représentants de la Ville de Genève et le département des finances montre à l'envi que cette crèche est très chère au niveau du fonctionnement, du fait des normes outrancières que l'on impose dans ce domaine. Nous sommes bien sûr acquis au principe des crèches, qui sont nécessaires, mais nous sommes aussi acquis à une saine gestion des deniers publics, y compris dans le cadre des crèches. Or, ces normes qui entraînent des coûts de plus de 20 000 F, voire de 25 000 F par enfant et par année, ont des effets énormes qu'il faut prendre en compte. En l'occurrence, le problème est le suivant : notre parlement est appelé à voter une loi qui prévoit, pour 2001, une subvention de 400 000 F, mais qu'en sera-t-il plus tard ? Vous savez tous, Mesdames et Messieurs les députés, que les subventions que l'Etat accorde aux différentes sociétés, différents groupements, augmentent souvent automatiquement, d'année en année, simplement du fait que les personnes qui travaillent dans ces groupements sont assimilés aux fonctionnaires, sont soumis aux règles de la fonction publique et que, si les salaires de la fonction publique augmentent, ces salaires-là augmentent aussi. Il y a donc, dans ces histoires de crèches, quelque chose qui nous interpelle : on nous demande 400 000 F pour 2001, mais que va-t-il se passer plus tard ? Si, chaque année, on nous demande une somme toujours plus grande, ce ne sera jamais fini et, un jour, ce ne sera plus le coût de la crèche mais le coût total des subventions qui devra faire l'objet d'un débat de fond dans ce parlement.

Voilà les réponses, Madame la présidente, Monsieur le président, que j'aimerais obtenir. Ensuite, nous verrons comment la discussion se poursuivra en commission des finances, puisque celle-ci a déjà commencé.

Mme Nelly Guichard (PDC). Comme nous l'avons dit à maintes reprises dans cette enceinte, nous sommes favorables à l'ouverture de crèches et savons que l'offre est encore largement insuffisante par rapport à la demande, puisque seules trois demandes sur cinq sont satisfaites. Par contre, nous nous étonnons quelque peu de voir surgir, comme par miracle - et Dieu sait si le parti démocrate-chrétien est prêt à croire aux miracles ! (Exclamations et rires.) - ... à l'intérieur de l'Hôtel des finances, une crèche pour laquelle ce Grand Conseil n'a jamais vu le moindre projet de loi pour financer une quelconque transformation de locaux.

Heureusement que, dans sa grande générosité, la Ville a offert gratuitement ses services de consultant pour l'aménagement des locaux et le choix du matériel, comme nous avons pu le lire en page 8 de l'exposé des motifs : «Le département des finances est depuis plusieurs mois en contact avec la délégation de la petite enfance de la Ville de Genève pour mettre au point ce projet. Ce service, grâce à son expérience, a pu donner des conseils pour les locaux et participera au choix du matériel nécessaire à l'exploitation de la crèche. Ce travail de consultant offert gratuitement par la Ville représente un coût non facturé.» Merci à la Ville ! L'Etat vous en sera éternellement reconnaissant !

Si je vous ai fait la lecture de ce paragraphe, c'est parce qu'il est à l'image de la crèche qui est mise en place, avec des normes très strictes en vigueur en Ville de Genève et édictées, de par ce fait, pour le reste du canton. La prise en charge, la socialisation des petits enfants doit être faite dans de bonnes conditions, certes, mais pas dans le luxe, avec des normes tellement excessives qu'elles empêchent d'autres crèches de voir le jour dans des quartiers, dans des villes suburbaines, dans des entreprises, dans des villages, et je le déplore.

Au sujet du projet de loi 8198, je trouve très bien d'accueillir 35 enfants, mais ne pourrait-on pas en accueillir davantage ? A part cela, 400 000 F, c'est beaucoup pour 17 enfants du personnel de l'Hôtel des finances. C'est une somme rondelette et qui, de surcroît, ne nous dit pas comment le personnel perçoit cette prise en charge très partielle des 70 à 100 enfants potentiellement concernés. Pour le surplus, je peux juste dire que je m'étonne qu'on traite le sujet en commission avant qu'il n'ait été formellement envoyé à la commission concernée par le Grand Conseil, comme M. Ducrest l'a relevé tout à l'heure.

Mme Dolorès Loly Bolay (AdG). Je ne partage pas et l'Alliance de gauche ne partage pas, mais pas du tout, l'avis des libéraux. Nous considérons au contraire que ce projet est à saluer et qu'il est, comme le dit l'exposé des motifs, un véritable projet social.

Nous avons eu le loisir, mardi passé, d'entendre M. Manuel Tornare et notre camarade Mme de Tassigny... (Exclamations et brouhaha.) ... nous dire qu'aujourd'hui il y a un manque de places dans les crèches en Ville de Genève. On compte 46 crèches en Ville de Genève et les deux tiers des demandes ne sont pas agréées. Ce projet vient donc à point. Certes, la capacité d'accueil, dans un quartier défavorisé comme le quartier de la Jonction, n'est peut-être pas suffisante, mais c'est un pas en avant. Il faut savoir qu'aujourd'hui beaucoup de familles et, parmi elles, beaucoup de familles défavorisées sont aux abois, car elles n'arrivent plus à trouver des places pour leurs enfants. C'est pourquoi nous saluons cette démarche. Nous voterons ce projet de loi et je tiens à remercier Mme Calmy-Rey de son initiative.

Mme Christine Sayegh (S). Le groupe socialiste salue aussi l'heureuse initiative du Conseil d'Etat et plus particulièrement de Mme Calmy-Rey d'avoir concrétisé l'idée d'une crèche à l'Hôtel des finances. Ce projet permet de contribuer au dynamisme de la politique de la famille ; il permet à beaucoup de femmes, d'hommes aussi, de ne pas se trouver toujours devant le dilemme : le travail ou l'enfant. Il y a lieu aussi de reconnaître que c'est un bon appui à nos initiatives sur l'assurance-maternité. Cela encouragera Mesdames et Messieurs à fonder des familles et à rajeunir notre société, qui en a besoin.

Nous saluons également la collaboration de la Ville et du canton. Nous nous plaignons souvent des doublons : aujourd'hui, nous pouvons saluer cette collaboration. Quant au coût de ce projet, Mesdames, Messieurs, je dirai que c'est un investissement essentiel pour notre société, pour une société que nous souhaitons de qualité. Aussi, nous espérons une ambiance joyeuse dans cette future crèche, à l'image de Jaques-Dalcroze, dont nous fêtons le jubilé cette année, et du cabaret de ses chansons Nix, Nax, Nox ! Nous nous réjouissons donc de traiter ce projet en commission.

Le président. Dans cette agréable ambiance, je donne la parole à M. Dupraz !

M. John Dupraz (R). Mesdames et Messieurs les députés, il peut vous paraître étonnant qu'un vieux macho comme moi s'intéresse à un tel sujet, ce d'autant plus qu'issu d'un milieu rural, élevé à la campagne, travaillant à la campagne, j'ai eu un privilège : nous avons eu le bonheur d'avoir trois enfants et ma femme, restant à la maison, a pu s'en occuper avec attention et leur consacrer tout son temps quand ils étaient petits. Mais, aujourd'hui, il clair que les temps ont changé, que la société actuelle exige, bien souvent, que l'époux et l'épouse aient un emploi et je dois dire que la crèche est un moyen de garder les enfants en famille, de les préparer, de les épanouir pour l'école. En l'occurrence, ce projet est un bon projet, d'autant plus excellent qu'il démontre que la collaboration entre la Ville et l'Etat n'est pas impossible. Sur des bons projets, elle peut se concrétiser.

Alors, il est vrai que l'on pourrait ergoter, comme certains le font, sur les prix, les coûts, mais pour moi les enfants n'ont pas de prix et pas de coût... (Applaudissements.) ...ils sont l'avenir de notre société. Si, jusqu'à maintenant, les politiciens et les responsables des deniers publics des parlements municipaux ou cantonaux, voire des Chambres fédérales, se préoccupent beaucoup des personnes âgées - ce qui est juste aussi - il ne faut pas oublier que les enfants sont l'avenir de la société et du pays. Ils méritent notre attention et nous devons fournir des efforts concrets pour les préparer à prendre la relève et qu'enfin il y ait de bons députés dans ce parlement dans vingt ans ! (Applaudissements.)

Mme Micheline Calmy-Rey. Un mot pour répondre aux interrogations de M. Ducrest. Monsieur Ducrest, le coût des investissements est couvert par la rubrique du DAEL «Rénovation, transformation et adaptation des bâtiments». Je vous ai dit que je vous donnerai le numéro de ladite rubrique lors de notre prochaine séance de commission. Quant à parler de combinazione Ville-canton, Monsieur Ducrest, je ne peux accepter ce terme : ce n'est pas une combinazione, c'est un partenariat Ville-canton, qui permet de financer à 50% chacun le fonctionnement de cette crèche, qui permet aussi d'ouvrir la crèche sur le quartier, ce qui est, à mon sens, un immense plus. En outre, c'est un premier partenariat entre la Ville et le canton, ce qui démontre tout de même que c'est une chose possible. Je remercie ici la délégation de la petite enfance pour sa collaboration.

Par ailleurs, il est absolument faux de dire que c'est une crèche chère, Monsieur Ducrest. Ce n'est pas une crèche plus chère que les autres, c'est une crèche qui applique les normes de la Ville en matière de salaires du personnel et en matière de participation des parents aux coûts de fonctionnement. D'ailleurs, dans votre calcul, vous n'avez probablement pas vu que la participation des parents vient en diminution du coût de fonctionnement. Ce n'est donc pas 30 000 F de déficit, mais bien 20 000 F par enfant, qui seront à couvrir pour moitié par le canton, pour moitié par la Ville ; par conséquent, ce n'est pas une crèche plus chère que les autres.

Enfin, je voudrais encore dire une chose : ce projet me tient à coeur, parce qu'il fait partie d'une politique du personnel que je souhaite, une politique qui vise à motiver les gens, à les fidéliser, à ce qu'ils se sentent bien à l'endroit où ils travaillent. Il me tient à coeur pour une deuxième raison, c'est qu'il offre une possibilité aux femmes de disposer des infrastructures nécessaires pour travailler tout en ayant des enfants. A cet égard, il est quand même piquant que, ce soir, ce soit un député radical qui doive défendre cette crèche, alors que les PDC la critiquent ! (Applaudissements.)

Ce projet est renvoyé à la commission des finances.