Séance du
vendredi 17 mars 2000 à
17h
54e
législature -
3e
année -
6e
session -
14e
séance
M 1228-A
En date du 3 décembre 1998, le Grand Conseil a renvoyé au Conseil d'Etat une motion qui a la teneur suivante :
« Le Grand Conseil de la République et canton de Genève considérant :
que l'information au grand public est l'un des éléments clés d'une politique énergétique ;
qu'une information critique digne de ce nom doit parler de tous les sujets, y compris du nucléaire, pour motiver la population et l'informer ;
que le journal tous ménages « l'Energie », édité par l'OCEN (entre autres), donne l'impression par son absence de réflexion critique, d'être rédigé en partie par des pro-nucléaires.
invite le Conseil d'Etat
à faire rapport un rapport au Grand Conseil sur sa politique d'information au grand public en matière d'énergie. »
La politique d'information au grand public en matière d'énergie s'articule en trois axes principaux :
1. la publication du magazine « l'Energie » devenue aujourd'hui « Energie-Environnement » ;
2. le centre d'information sur l'énergie ;
3. les activités pédagogiques,
auxquels s'ajoutent diverses actions ponctuelles, telles les Rencontres (conférences-débats avec les professionnels).
Le magazine « l'Energie »
Le journal « l'Energie » a été lancé en juin 1988 par l'OCEN. Cette publication diffusée tout ménage est destinée à sensibiliser le public, à lui offrir des conseils pratiques. Elle ne prétend pas détenir la vérité, encore moins la cacher. Ce magazine répond à un voeu d'information clairement exprimé par la population genevoise lors d'un sondage d'opinion réalisé l'année précédente (1987). Le magazine est devenu en 1998 « Energie-Environnement ». Il est aujourd'hui édité par la Conférence romande des délégués à l'énergie, les services romands info-environnement, l'Office fédéral de l'énergie, l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage. Dans aucun des numéros édités à ce jour, le magazine n'a vanté ou critiqué des agents énergétiques. Le magazine veut être une source de conseils pratiques à l'usage du grand public pour une meilleure gestion des ressources énergétiques.
A ce point, le Conseil d'Etat relève qu'il y a dans l'exposé des motifs des motionnaires un curieux amalgame entre le journal « Les cahiers de l'électricité » édité par électricité romande, et donc étranger au débat, et le magazine « Energie-Environnement ». Et c'est pour cette raison que le Conseil d'Etat, lors de la séance du Grand Conseil du 3 décembre 1998 au cours de laquelle la motion a été déposée, a tenu à marquer clairement qu'il n'acceptait pas l'exposé des motifs mais seulement l'invite de la motion. Le magazine « Energie-Environnement » s'est effectivement ouvert en 1997 à des collaborations extérieures; les producteurs d'énergie, à savoir l'électricité, le gaz et les produits pétroliers. Les électriciens, cités par les motionnaires, étaient représentés par « Electricité romande ».
En raison de la difficulté prévisible de collaboration avec certains de ces nouveaux partenaires, une charte déontologique a été mise en place par les cantons comme cadre contraignant à cette expérience. Elle a été appliquée avec rigueur.
Pour des motifs qui lui appartiennent, Electricité romande a préféré cesser sa collaboration fin 1997, après deux numéros. Quant aux éditions parues durant cette période, un examen minutieux montre que les messages que citent les motionnaires dans leur exposé des motifs n'ont jamais réussi à passer le filtre. En même temps, plusieurs dizaines de milliers de francs ont été économisés sur les budgets cantonaux.
Certes, on peut regretter dans un premier temps que les diverses évolutions qu'a subies le magazine au fil des années n'aient pas toutes eu le succès attendu. Néanmoins, le Conseil d'Etat relève que le coût pour le contribuable genevois de l'exemplaire distribué en boîte aux lettres, tous frais confondus, est passé de 1,20 F en 1988 à 12 cts aujourd'hui. Alors qu'en même temps, ce journal a été reconnu par l'ensemble de la Suisse romande et la Confédération et s'est ouvert aux préoccupations de la protection de l'environnement. Il est également nécessaire d'être conscients que cette évolution s'est faite au détriment de l'autonomie rédactionnelle puisqu'aujourd'hui des représentants des nombreuses entités qui l'éditent participent à sa rédaction.
Il faut savoir qu'en raison des difficultés de financement qui ne font que s'accroître, les cantons romands ont remis en discussion, tant sur le fond que sur la forme, la suite qui doit être donnée à cette publication pourtant essentielle à leurs yeux. D'une part, la contribution fédérale n'est garantie que jusqu'à fin 2000. D'autre part, la période d'essai de coopération avec les instances romandes fédérales et cantonales de l'environnement s'achève également à cette date. Le Conseil d'Etat saisit cette occasion pour exprimer son soutien au magazine dont il considère l'édition indispensable.
Enfin, le Conseil d'Etat relève avec satisfaction que les sondages conduits par des organismes indépendants, notamment le dernier en date, sous mandat de la Confédération, qui montre que le taux de satisfaction des lecteurs de ce magazine est exceptionnellement élevé pour une publication de ce type. Le taux de lecteurs dépasse 30 % de la population adulte et le taux de satisfaction de lecteurs dépasse 95 %. Même la publicité dont la contribution financière est essentielle est sévèrement sélectionnée. De nombreuses publicités, notamment pour des chauffages électriques, ont dû être refusées.
Centre d'information sur l'énergie
Créé en 1989, le Centre d'information sur l'énergie offre une large palette de prestations. Il s'adresse à toute personne qui a une interrogation ou un projet relatif à l'utilisation économe et rationnelle de l'énergie et au développement des énergies renouvelables.
Au-delà des simples demandes d'information ou de renseignements qui permettent à la population de prendre conscience de la vraie valeur que représente l'énergie pour la société, ce sont surtout les centaines de projets concrets pour lesquels le centre d'information est intervenu qui marquent son activité. Pour les professionnels, l'accompagnement se fait non pas par la mise à disposition de solutions toutes faites, mais bien plus par l'apport de nouveaux thèmes de réflexions, de méthodes de travail, d'actualisation de leurs connaissances toujours dans le sens de l'utilisation économe et rationnelle de l'énergie et du développement des énergies renouvelables.
En parallèle, le centre d'information a édité de nombreux documents de synthèse, mis à disposition des logiciels techniques et organisé, depuis près de quatre ans, mensuellement des conférences à l'attention des professionnels intéressés.
Il est malheureusement pratiquement impossible de chiffrer en énergie l'efficacité du centre d'information au fil des années, bien que l'on sache que de très nombreux projets ont été modifiés suite à ses interventions. En 1996, l'OCEN a confié une évaluation du centre d'information sur l'énergie à une entreprise indépendante (Kalvin Associate SA), laquelle conclut par « On peut affirmer que le centre d'information sur l'énergie répond à un besoin des professionnels de la construction et offre un service de qualité à ceux qui s'en servent. »
Activités pédagogiques
Le choix de s'adresser aux jeunes est évident mais l'organisation des activités doit répondre à deux exigences qui sont l'objet d'une réflexion permanente :
1. Une réelle efficacité énergétique, c'est-à-dire une influence durable sur le regard que porteront ces jeunes sur le rôle de l'énergie dans la société et, par-là, sur leurs comportements futurs.
2. Le respect d'un code de déontologie qui doit permettre de préserver l'enfant.
C'est ainsi qu'est née une charte rassemblant l'essentiel des messages que devrait pouvoir retenir l'enfant à l'issue des animations. Les messages de la charte, bien qu'essentiels, sont neutres et peuvent même paraître banals lors d'une première lecture. Ce document est destiné aux enseignants et animateurs et sert de référence pour la création et la conduite des activités. La charte est en cours de révision et l'ancienne version (1996) est annexée à la présente réponse.
Ainsi, au travers d'activités ludiques de débats ou de projets scolaires, l'enfant peut échafauder sa propre pensée. En fait, cette maturation de l'intérieur est bien plus forte et durable qu'une pensée imposée de l'extérieur.
Aujourd'hui les activités sont de trois types :
les classes vertes énergie : d'une durée d'une semaine au cours de laquelle une classe, en général de 6e primaire, est immergée dans un programme ludique et de réflexion, de sensibilisation et de responsabilisation à l'égard de nos ressources en énergie et de la préservation de notre environnement et également d'actions visant à une utilisation plus économe de l'énergie au quotidien. Ces classes vertes sont organisées en partenariat avec les Services industriels qui, durant une journée, montrent le rôle essentiel d'un approvisionnement régulier et fiable de notre société ainsi que des démonstrations sur les risques que peuvent encourir les enfants en manipulant de façon maladroite l'électricité ;
les camps de vacances énergie : il s'agit de camp d'une durée d'une à deux semaines qui, sur le fond, ressemble aux classes vertes. Le contexte des vacances autorise toutefois deux types de nouveautés, l'une consiste à expérimenter de nouvelles activités, à les évaluer dans le but d'améliorer les activités pédagogiques qui peuvent être proposées aux jeunes, et l'autre d'intégrer des entités indépendantes poursuivant des buts similaires, par exemple la conférence romande des délégués à l'énergie ou l'association WWF, etc.
La maison « Clos des Sapins », propriété de l'Etat qui abrite les activités, est équipée depuis Pâques d'une installation solaire. Cette installation, financée notamment grâce à la direction des bâtiments du DAEL, a été réalisée par des enfants, y compris la construction proprement dite des capteurs. Cette installation de 15 m2 fonctionne et préchauffe l'eau sanitaire du bâtiment au service de tous les enfants et adultes qui le fréquentent durant l'année.
les classes énergie qui intègrent durant l'année scolaire ou une partie de cette année scolaire l'énergie dans leur programme. L'OCEN collabore étroitement avec l'enseignant pour la conduite d'un programme qui permet à la classe de devenir experte dans son école. Une classe experte est une classe consciente des enjeux de l'énergie, responsable de sa bonne utilisation et qui a acquis les connaissances fondamentales lui permettant d'agir correctement. Mais c'est surtout une classe qui va, à terme, entraîner les autres classes de l'école et leurs enseignants vers une gestion plus rigoureuse, plus économe de l'énergie et surtout plus respectueuse de l'environnement.
En règle générale, la mise en place d'une classe énergie accompagne une action technique d'assainissement de l'école et des autres bâtiments communaux conduite par la commune en collaboration avec l'OCEN.
En matière d'information sur l'énergie, l'OCEN participe également à diverses manifestations ponctuelles, par exemple aux quais de l'immobilier, dans des expositions d'entreprise ou lors de l'exposition Air qui a ouvert ses portes le 29 novembre 1999 au Musée d'histoire naturelle.
Pour l'avenir, deux tendances majeures se dessinent : la collaboration de plus en plus étroite avec les cantons romands afin de partager les expériences acquises par les uns et les autres, et surtout dans le but de partager les ressources et les moyens financiers dont ils disposent, et cela bien entendu dans le but d'accroître l'efficacité et de réduire les coûts des programmes d'information.
Le second grand projet est la création d'une maison de l'énergie à Genève, comme cela figure dans la conception générale de l'énergie 1999, afin de regrouper géographiquement les activités didactiques et pédagogiques de l'énergie, d'en accroître la puissance grâce aux opportunités de partenariat et de synergie que peut offrir un tel regroupement. Ce projet est en cours d'élaboration. Il sera présenté, sous réserve d'approbation de la conception générale de l'énergie, au tournant 1999/2000 afin d'être entrepris en cours de législature.
Dans ses considérants et dans l'exposé des motifs, les motionnaires ont insisté sur une meilleure prise en compte de la volonté populaire de renoncer à l'énergie nucléaire dans la politique d'information.
Le Conseil d'Etat observe que ce point figure explicitement dans le projet de conception générale de l'énergie qu'il a présenté au Grand Conseil pour approbation et que la Commission parlementaire de l'énergie et des Services industriels a modulé dans le sens suivant : « Au-delà de l'information pratique visant une utilisation rationnelle de l'énergie et le développement des énergies renouvelables, l'information à la population précisera que le but de l'utilisation rationnelle de l'énergie est aussi le renoncement à l'usage d'énergie d'origine nucléaire ». Le Conseil d'Etat se propose de prendre en compte ce mandat qui complète celui défini à l'article 18
Art. 18 Informations et conseils
En collaboration avec les établissements de droit public, notamment avec les Services industriels et les établissements d'enseignement, ainsi qu'avec les entreprises du secteur privé, le canton et les communes mettent à la disposition de la population les informations utiles et conseils se rapportant à l'énergie et à son utilisation rationnelle et économe, afin de sensibiliser les consommateurs sur la nécessité d'économiser l'énergie.
Bien entendu, la proposition de la Commission parlementaire de l'énergie et des Services industriels devra encore être entérinée par le Grand Conseil.
On le voit, la dynamique de l'information est le fruit de partenariats divers. L'importance de l'énergie pour la société, pour son fonctionnement économique, ses prestations sociales et la protection de l'environnement font que la politique d'information en cette matière est un sujet délicat et parfois controversé. Le Conseil d'Etat entend mettre à disposition de la population une information qui prend en compte de façon équilibrée les trois pôles du développement durable.
Au bénéfice de ces explications, le Conseil d'Etat vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à prendre acte du présent rapport.
Annexe : charte de l'énergie
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Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.