Séance du
vendredi 21 janvier 2000 à
17h
54e
législature -
3e
année -
4e
session -
5e
séance
IU 785
Mme Martine Brunschwig Graf. Mme Romaneschi s'interroge sur le contenu d'un article paru dans un quotidien. Diverses mesures possibles y sont évoquées pour, d'une part, remédier à la stagnation des effectifs dans la filière gymnasiale et, d'autre part, organiser à la fois la formation professionnelle commerciale et la filière gymnasiale, en respectant le principe de la mixité.
Madame la députée, vous avez le sentiment que certaines choses se font en catimini. J'aimerais à cet égard vous rappeler que le 25 juin 1999 Mme Deuber Ziegler m'interpellait dans ce Grand Conseil et soulevait une problématique cruciale : comment faire pour que les élèves bénéficient de tous les choix prévus par la maturité gymnasiale sans qu'ils se retrouvent dans de toutes petites unités qui n'ont aucun sens ni sur le plan pédagogique ni sur le plan financier. Mme Deuber Ziegler a évoqué des problèmes dans certaines disciplines comme le grec, mais des problèmes peuvent apparaître ailleurs. Je vous rappelle que nous avons d'abord des options spécifiques et, ensuite, des options complémentaires. A l'époque, j'ai répondu à Mme Deuber Ziegler que nous menions une réflexion sur cette problématique et qu'il s'agirait d'examiner minutieusement les mesures à prendre pour trouver des solutions.
Entre-temps, en septembre 1999, la direction générale du post-obligatoire envoyait une lettre évoquant cette problématique à l'ensemble du corps enseignant et du personnel administratif et technique de l'enseignement secondaire post-obligatoire. Au paragraphe contenant la question : «Quelle organisation pour la filière gymnasiale ?», il était relevé : «Les principes essentiels de l'application genevoise de l'ORRM ne seront pas remis en cause. Il faut éviter de créer des établissements spécialisés, offrir le maximum de possibilités de choix aux élèves, respecter la grille-horaire.» Et je dois dire que les élèves souffrent aujourd'hui de certaines difficultés avec la grille-horaire. Enfin, dans les grandes lignes, il s'agissait de rechercher quelle était l'organisation qui pourrait le mieux répondre à ces objectifs.
Dans le courant de l'automne, et de leur propre initiative, les directeurs de l'enseignement post-obligatoire responsables des écoles de commerce et des collèges se sont réunis à différentes reprises pour évoquer ces problèmes. Ils ont élaboré sept scénarios, dont je n'ai eu connaissance que tout récemment. La direction générale post-obligatoire s'est entretenue avec eux et a proposé de résumer la situation en deux scénarios.
Au début de cette année, après avoir pris connaissance de l'article dans «Le Temps» et m'être entretenue avec la direction générale du post-obligatoire, j'ai décidé que, dans un premier temps, il fallait rencontrer les directeurs; ce que j'ai fait mardi dernier. C'est dire qu'à ce jour aucune décision n'a été prise, mais j'ai souhaité entendre chacun d'eux pour qu'ils me disent s'il y avait de réels problèmes et, si oui, quelles solutions ils entrevoyaient.
Il est vrai qu'il existe de réels problèmes, mais j'aimerais les exposer ainsi. Aujourd'hui, un certain nombre d'élèves renoncent à faire des choix avant d'entrer au collège ou durant la première année pour rester avec des camarades dans un bâtiment ou pour ne pas être attribués à un autre établissement. Cela signifie que l'idée même de la nouvelle maturité, qui consiste à permettre aux élèves de faire des choix en fonction de leurs projets personnels, n'est pas respectée dans sa totalité, car certains établissements n'ont pas la taille critique suffisante pour offrir la quantité d'options nécessaires. Les collèges à options savent bien que la taille critique est, à l'heure actuelle, au minimum de 700-750 élèves. De ce fait, il y a impossibilité d'offrir toutes les possibilités d'options dans le même établissement. C'est bien la raison pour laquelle il y a un problème de fond et pas seulement de forme.
Nous avons évoqué avec les directeurs quelles solutions étaient les plus probables. Une première chose saute aux yeux, c'est qu'il n'y a pas qu'une seule solution pour douze directeurs. La majorité d'entre eux imaginent un établissement consacré à la maturité professionnelle et un établissement jusqu'ici mixte qui pourrait être consacré tout entier à la maturité gymnasiale. Il y a d'autres scénarios aussi, mais certains ne sont franchement pas crédibles, comme celui consistant à disséminer des apprentis dans tous nos collèges, sous prétexte de mixité. Je dois dire que ce n'est pas vraiment le scénario que j'aurais osé défendre.
Forte de ces constatations et après avoir demandé à chacun de se positionner, j'ai dû constater qu'il me reviendrait de trancher la question. Mais, préalablement, il me paraît important de rencontrer l'Union du corps enseignant, puisqu'il est notre partenaire. C'est la raison de notre rencontre de mardi prochain. J'espère que ce rendez-vous lui conviendra, étant donné la nécessité de prendre quelques décisions rapidement. En effet, nous entrons dans la troisième année de la maturité, celle qui concerne les options complémentaires.
Le choix que j'ai à faire est difficile et la question n'est pas tranchée. J'ai reçu, de la part des élèves d'André Chavanne, une lettre qui m'a été remise de la main à la main, mardi dernier, et dont j'ai pris connaissance immédiatement. J'entendrai les élèves s'estimant concernés par les décisions qui seront prises et qui désireront s'exprimer. Ce ne sera pas la première fois que je recevrai des élèves du collège ou des écoles professionnelles pour parler d'une chose ou d'une autre.
L'invitation est lancée et la date sera fixée le cas échéant. Mais vous devez bien comprendre que, quelles que soient la situation et les décisions à prendre, le statu quo n'est pas possible. Tous les directeurs sont d'accord là-dessus. En effet, comme vous l'avez rappelé, contrairement au scénario prévu au départ et sur la base duquel nous avions élaboré l'organisation actuelle, le nombre d'élèves stagne, mais ce n'est pas nécessairement pour de mauvaises raisons. Les filières professionnelles devenant plus attractives, nous avons constaté un regain d'intérêt marqué pour l'école d'ingénieurs, l'école d'enseignement technique en l'occurrence, ainsi que pour la maturité professionnelle et les hautes écoles spécialisées qui suivront.
Face à un nombre croissant d'élèves - les enfants du baby boom arriveront d'ici cinq à dix ans - nous nous trouvons, non pas en concurrence, mais en répartition. Par conséquent, nous ne pouvons pas simplement laisser aller. Encore que pour moi ce serait, je ne vous le cache pas, la solution la plus simple, car je ne suis pas masochiste et je n'ai pas l'intention de me mettre plus d'ennuis sur le dos que je n'en ai à l'heure actuelle ! Toutefois, j'essaierai de trouver la solution qui a le plus de sens pour les élèves, pour le projet, pour les locaux, pour l'organisation et pour l'intérêt aussi des enseignants.
Tous ces paramètres seront posés et les gens concernés seront entendus. Je m'y engage ici. Cependant, j'espère que, lorsque je viendrai expliquer les mesures à prendre devant votre commission, vous comprendrez que, parfois, il n'est pas possible de tout concilier et que nous avons quelques impératifs à respecter.
Mesdames et Messieurs les députés, ma réponse est un peu longue, mais je souhaitais vous dire que la situation que nous vivons dans le canton de Genève est un peu particulière. Nous sommes probablement le seul canton à avoir un nombre d'établissements aussi élevé et aussi concentré. Aucun autre canton suisse ne connaît cette situation, ni une offre aussi riche. Aucun autre canton ne permet à ses élèves de pouvoir bénéficier, à des distances que j'estime raisonnables, d'un choix aussi étendu. Ceci a aussi son prix, non pas en argent, mais en termes d'organisation, et à un moment donné le bon sens doit l'emporter. C'est que je vais tenter de faire, à travers un chemin difficile où, les directeurs n'ayant pas voulu trancher, il me reviendra de prendre mes responsabilités.
Cette interpellation urgente est close.