Séance du vendredi 24 septembre 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 10e session - 43e séance

P 1233-A
28. Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : Création d'un nouveau chemin d'accès à Cologny. ( -)P1233
Rapport de Mme Janine Hagmann (L), commission des pétitions

Lors de sa séance du 25 février 1999, le Grand Conseil a renvoyé la pétition 1233 concernant la création d'un nouveau chemin d'accès à Cologny à la Commission des pétitions. Cette dernière a traité ce sujet lors des séances des 12 avril et 3 mai 1999 sous la présidence de Mme Louiza Mottaz. La teneur en est la suivante :

Pétition(1233)

concernant la création d'un chemin d'accès à Cologny

Mesdames etMessieurs les députés,

Notre association forme la pétition suivante :

Nous sommes préoccupés par l'existence d'un projet (APA 15079, DAEL) sur la parcelle 831, feuille 23 (Commune de Cologny), sise au 49, route de La-Capite.

Cette parcelle constitue un site exceptionnel inscrit dans le Plan de site des rives du Lac (L 4.2.3. du 4 décembre 1992), et comporte un peuplement boisé qui constitue manifestement une forêt au sens de la loi fédérale sur la protection des forêts (L.F.F )

Nous ne comprenons pas qu'un chemin d'accès privé ait pu être autorisé, et qu'une autorisation d'abattage d'arbres sur des essences rares ait été délivrée.

Nous protestons contre ces autorisations accordées de manière précipitée, et nous demandons où en est l'adoption de la future loi cantonale d'application de la L.F.F. et surtout comment les peuplements boisés ayant valeur de forêt sont recensés pour que la L.F.F. soit respectée, en attendant l'entrée en vigueur de la loi cantonale en la matière.

N.B. : 1 signature

Association "La Griffonne"

M. .

3

Auditions

1.  M. David Schlatter, pétitionnaire, président de l'association « La Griffonne » accompagné de M. Séverin Brocher, géographe.

Crée en novembre 1997, l'association « La Griffonne » est depuis cette date active dans le domaine de la sauvegarde du patrimoine culturel immobilier et des sites, principalement sur la commune de Cologny. Selon M. Schlatter, Genève vit une période où le débat autour de la question de la préservation des arbres et du paysage est d'actualité. Il désire apporter sa contribution à la sauvegarde de la dernière zone boisée de cette importance située au centre du village de Cologny. Il estime que le règlement portant sur la protection des arbres du canton de Genève est minimaliste et pourrait être contesté par la loi fédérale sur la protection des forêts (LFF), en vigueur depuis le siècle dernier. Il souhaiterait également être en possession d'un répertoire des arbres adéquat pour que la LCA (loi cantonale d'application) soit applicable. Il s'étonne de la facilité avec laquelle l'autorisation d'abattage a été délivrée dans le dossier étudié par la Commission des pétitions.

M. Brocher s'appuie, quant à lui, sur la notion de réseaux boisés à préserver, et estime que ce projet n'est pas acceptable car il ne respecte pas le paramètre paysager. D'autre part, il se pose la question du respect de la sécurité. Il estime la sortie sur la route cantonale particulièrement dangereuse et craint que, pour des raisons de visibilité, l'OTC ne demande une autorisation d'abattage supplémentaire.

Il est confirmé qu'un recours contre l'autorisation a été déposé.

2. M. Georges-André Cuendet, maire de Cologny

Le maire avoue qu'il a été surpris à la lecture de la pétition 1233 en ce qui concerne l'existence d'une forêt à cet emplacement. Un document officiel tiré de « Geokiosk » prouve qu'aucun espace vert n'y est répertorié. Quant au problème de sécurité, il ne peut y souscrire.

Il informe qu'un autre projet de constructions, avec une densification au sol beaucoup plus importante, avait été autorisé au préalable. La commune a donc préavisé favorablement le projet contesté actuellement car elle le juge adéquat. Quant aux arguments évoqués par les pétitionnaires concernant le manque de sécurité, M. le maire ne peut y souscrire. Ce débouché n'est pas le premier sur la route de la Capite. Le trafic supplémentaire induit par les trois ou quatre nouvelles maisons n'augmenterait pas de plus de 2 % le trafic. La vitesse est limitée à 40 km/h à cet endroit et la visibilité est suffisante.

M. Cuendet décrit la qualité environnementale de l'emplacement, situé d'une part à côté de la villa Diodati et d'autre part de 13000 m2 viticoles. Le lotissement est conçu de telle sorte qu'il laisse à chaque propriétaire la vue la plus large possible... raison pour laquelle le chemin d'accès a été prévu à l'arrière des maisons. Cette parcelle est bien située en zone « villas » et n'a pas d'effets négatifs sur l'environnement.

Visite sur place de la commission (3 mai 1999)

3. MM. André Joly, inspecteur cantonal des forêts et Pierre Staehelin représentant la division technique du DAEL

La prise de position du SFPNP est jointe à ce rapport (cf. annexe).

La commission a désiré se rendre sur place pour juger de visu du problème soulevé par la pétition.

Quelques commissaires déplorent la création d'un nouveau chemin, regrettant que les promoteurs n'aient pas utilisé ce qui est déjà existant, ce à quoi M. Joly explique que l'OTC s'est prononcé contre le fait que le chemin débouche sur le carrefour où se trouve l'entrée actuelle.

Quant au sous-bois, il est constaté qu'il n'a vraiment pas l'allure d'une forêt. Il est composé principalement de tilleuls et de marronniers, auxquels se sont ajoutés, vraisemblablement en générations semi-spontanées, des ifs et des érables, ce qui ne constitue pas un sous-bois forestier. Le tout n'est absolument plus entretenu, plusieurs arbres penchent d'ailleurs dangereusement sur la route. Les quatre arbres concernés par l'abattage sont un chêne, un charme et deux marronniers, on ne peut donc parler d'essences rares. Les autorisations ont été assorties de certaines conditions : l'une consiste à exiger le reboisement, à hauteur de la valeur estimée des arbres à abattre et l'autre à « riper quelque peu l'assiette du chemin pour épargner un tilleul ».

Il est constaté que cette parcelle est spacieuse : environ 10 000 m2 et qu'elle abrite la maison de l'ancien propriétaire. Ayant été divisée en quatre lots, il a été nécessaire de prévoir une autre voie d'accès pour desservir l'ensemble des constructions.

Discussion et vote

Lors de la discussion du 12 avril 1999, plusieurs commissaires avaient émis des doutes sur le fait de continuer l'étude de cette pétition, estimant qu'une autorisation de construire avait été accordée par le DAEL et que les opposants avaient déposé un recours. Ils ressentaient un malaise et craignaient que la Commission des pétitions joue un peu le rôle d'un office de recours des autorisations de construire. D'autres, au contraire, se sont inscrits dans une ligne de réflexion différente, estimant que le droit de pétition étant un droit démocratique, chaque cas proposé mérite une étude approfondie. C'est en suivant ce raisonnement que les commissaires se sont rendus sur place. Chacun a eu ainsi la possibilité de constater le bien-fondé de cette pétition.

La discussion, vive et animée, a démontré que les problèmes d'environnement deviennent vite passionnels. Chaque commissaire a une vision de l'aménagement du territoire qu'il voudrait faire partager aux autres. Malgré la correction de chacun et le respect de l'autre, aucun consensus n'a pu être trouvé.

L'un des commissaires propose le classement de cette pétition, estimant que ce type de dossier n'est absolument pas du ressort de la Commission des pétitions, à partir du moment où un recours, quel qu'il soit, a été interjeté.

Un autre commissaire pense que cette pétition doit donner un signe politique et propose son renvoi au Conseil d'Etat. Même si l'abattage de quelques arbres n'apparaît pas catastrophique en l'occurrence, il ne faut pas minimiser l'importance de l'apport général des arbres en matière de faune et de flore. D'autre part, les arguments montrant la nécessité de la création d'un nouveau chemin n'ont pas été convaincants !

Quant aux autres commissaires, ils estiment qu'à ce stade de leurs réflexions, il faut déposer cette pétition sur le bureau du Gand Conseil à titre de renseignement. La pétition 1233 ne sollicite pas l'utilisation de l'ancien chemin. La loi sur les forêts a été votée lors du dernier Grand Conseil. Quant à l'autorisation d'abattage délivrée sous forme d'APA, cela reste du ressort du Conseil d'Etat. La marge de manoeuvre de la commission est, par conséquent, réduite.

La majorité de la commission approuve la prise de position du Service des forêts, de la protection de la nature et du paysage. Elle réfute l'argument du pétitionnaire auditionné qui prétend que « l'intention des auteurs de ce dossier est d'apporter leur contribution à la sauvegarde de la dernière zone boisée de cette importance au centre du village de Cologny ».

Mise au vote, la proposition de classement est rejetée par 7 non (2 AdG, 3 S, 2 Ve) contre 2 oui (2 R), et 4 abstentions (2 L, 2 DC).

Le renvoi au Conseil d'Etat est rejeté par 7 non (2 L, 2 R, 2 DC, 1 S) contre 2 oui (1 AdG, 1 Ve), et 4 abstentions (1 AdG, 2 S, 1 Ve).

La proposition de dépôt sur le bureau du Grand Conseil est acceptée par 9 oui (2 L, 2 R, 2 DC, 3 S), et 4 abstentions (2 Ve, 2 AdG).

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission vous propose de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.

8

9

10

11

12

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.