Séance du vendredi 21 mai 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 7e session - 22e séance

PL 7939-A
19. Rapport de la commission des transports chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Christian Grobet, Jean Spielmann, Pierre Vanek, Anne Briol, Antonio Hodgers, Françoise Schenk-Gottret, Christian Brunier et Myriam Sormanni modifiant la loi sur le réseau des transports publics (H 1 50). ( --1) PL7939Rapport de majorité de M. Antonio Hodgers (Ve), commission des transports
Mémorial 1998 : Projet, 6851. Renvoi en commission, 6852.
Rapport de majorité de Mme Anne Briol (Ve), commission des transports
Rapport de minorité de M. Pierre Froidevaux (R), commission des transports

Le projet de loi 7939 modifiant la loi sur le réseau des transports publics a été étudié par la Commission des transports lors de ses séances des 9, 16 et 23 mars 1999. Suite à cette étude, il s'est avéré que l'art. 8A du projet de loi 7939 devrait figurer dans un projet de loi expérimental. Il a donc été décidé de rédiger deux rapports différents, l'un concernant l'art. 8A du projet de loi 7939 et l'autre concernant l'art. 9, lettre a du projet de loi 7939. Le présent rapport traite de l'art. 9, lettre a du projet de loi 7939.

MM. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat en charge du Département de justice et police et des transports, Jean-Daniel Favre, chef de la division de l'aménagement cantonal et régional DAEL, Philippe Matthey, secrétaire adjoint du DJPT, Christoph Stucki, directeur général des TPG, Freddy Wittwer, directeur de l'OTC, ont assisté aux travaux de la commission. Les procès-verbaux ont été rédigés par Mme Sandrine Baume.

Introduction

L'art. 9, lettre a du projet de loi 7939 a pour objectif de reporter sur les exercices suivants la part non dépensée de la participation annuelle de l'Etat, de 30 millions de francs, aux infrastructures nouvelles du réseau sur rail à écartement métrique. Les auteurs du projet de loi 7939 estiment en effet qu'un maximum de moyens financiers doit être consacré au développement des infrastructures du réseau de tramways des TPG afin que les objectifs définis dans la loi sur le réseau des transports publics puissent être respectés et qu'un véritable réseau de tramways voit le jour.

A l'heure actuelle, il est peu probable que ces 30 millions annuels soient totalement dépensés ces deux prochaines années. En revanche, ils seront vraisemblablement insuffisants par la suite.

Le report de la part non dépensée permettrait ainsi de pallier partiellement à une insuffisance de financement lorsque les divers projets de lignes de tramways, figurant dans la loi sur le réseau des transports publics, démarreront.

Informations de la part du Conseil d'Etat et des TPG

Le Conseil d'Etat se déclare favorable au principe d'un report sur les exercices suivants de la part non dépensée de la participation annuelle de l'Etat aux infrastructures nouvelles du réseau sur rail à écartement métrique. Il propose en revanche qu'une période-cadre de dix ans soit définie pour que la part non dépensée ne soit pas reportée indéfiniment. Une proposition d'amendement allant dans ce sens, co-rédigée par le Département des finances et le Département de justice et police et des transports, est soumise à la commission.

M. Stucki, directeur des TPG, rappelle à la commission la simulation financière des TPG relative aux réalisations : jusqu'en 2001, les investissements devraient être inférieurs à 30 millions ; de 2002 à 2004, ils devraient correspondre à 30 millions et de 2005 à 2006, ils devraient correspondre à 50 millions. La proposition de report serait donc compatible avec la simulation financière.

Discussions de la commission

La majorité de la commission estime qu'un report sur les exercices suivants de la part non dépensée de la participation annuelle de l'Etat aux infrastructures nouvelles du réseau sur rail à écartement métrique est un élément nécessaire au développement rapide d'un réseau de transports publics efficace et concurrentiel.

La réduction du trafic automobile et de ses nuisances et le développement du réseau des transports publics constituent une priorité pour la majorité (AdG, PS, Verts) de la commission. Jusqu'à ce jour, les dépenses consacrées au transport individuel motorisé ont été largement supérieures à celles destinées au développement des transports publics. Il est temps qu'une impulsion forte soit donnée au développement des transports publics afin que Genève bénéficie d'une politique des transports durable.

La réalisation du réseau de tramways, exigé par la loi sur le réseau des transports publics, nécessitera des moyens financiers en dents de scie ces prochaines années. Par sa proposition de report de la part non dépensée, la majorité propose un moyen cohérent de concrétiser ce réseau indispensable au désengorgement automobile de Genève. Il suffit de se pencher quelque peu sur la simulation financière des TPG décrite ci-dessus, pour admettre qu'un tel report est logique et constructif.

A la lumière de la simulation financière et des propositions du Département des finances, la majorité de la commission juge raisonnable de fixer un crédit-cadre de dix ans au report de la part non dépensée et que les investissements ne dépassent pas deux fois la moyenne annuelle (60 millions). Dans ce sens, l'art. 9, lettre a est amendé de la manière suivante :

Art. 9, lettre a (nouvelle teneur)

a) de 1999 à 2008, un investissement moyen annuel à hauteur de 30 millions de francs ; le montant annuel inscrit au budget d'investissement ne peut dépasser deux fois la moyenne annuelle fixée. Dès 2009, un investissement jusqu'à concurrence de 30 millions de francs par an. 

Votes de la commission

L'entrée en matière est acceptée par 8 oui (3 AdG, 3 S, 2 Ve), contre 3 non (2L, 1R) et 1 abstention (DC).

Art. 9, lettre a (nouvelle teneur)

L'art. 9, lettre a, amendé, est accepté par 8 oui (3 AdG, 3 S, 2 Ve), contre 4 non (2 L, 2 R) et 2 abstentions (2 DC).

Le projet de loi 7939-1 est accepté par 8 oui (3 AdG, 3 S, 2 Ve), contre 3 non (2 L, 1 R) et 1 abstention (DC).

Nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir suivre la majorité de la commission et voter le projet de loi 7939-1 tel qu'il ressort des travaux de la commission.

ANNEXE

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article unique

La loi sur le réseau des transports publics, du 17 mars 1988, est modifiée comme suit :

Art. 8A Suivi des projets et des travaux (nouveau)

La Commission des transports du Grand Conseil désigne une délégation formée d'un membre par parti représenté en son sein, dont elle désigne le président et le vice-président, pour suivre l'élaboration du projet de réseau au sens de l'article 4 et l'avancement de sa réalisation.

La délégation convoque régulièrement les responsables des projets et des travaux, pour remplir la mission qui lui est confiée. Elle présente tous les six mois un rapport au Grand Conseil.

Art. 9, lettre a (nouvelle teneur)

a) une participation de l'Etat inscrite au budget de l'Etat jusqu'à concurrence de 30 millions de francs par an, dont la part non dépensée sur l'exercice concerné est mise en compte pour un exercice ultérieur.

RAPPORT DE LA MINORITÉ

Le rapporteur de minorité tient d'emblée à rappeler le soutien constant de l'Entente dans le développement des Transports publics genevois (ci-après TPG). Ses rangs ont soutenu et voté leurs budgets depuis leur création en service public. L'Alternative ne peut se prévaloir d'un tel bilan. Au contraire, elle ne peut que s'enorgueillir d'avoir voté ce budget pour le seul et unique exercice 1998. Or, celui-ci avait été préparé par l'Entente... L'année suivante, l'Alternative se montrait incapable de présenter aux Genevois ce qui aurait dû être « le premier budget de gauche » de l'histoire du canton. Non satisfaits de se montrer incompétents à gérer l'Etat, un quarteron de députés de cette même Alternative voudrait maintenant s'attribuer une part du budget cantonal afin de piloter eux-mêmes le développement des TPG. Et notre Conseil devrait même croire cela possible !

Le curieux comportement de l'actuelle majorité

Le projet de loi 7939 comprenait à l'origine deux volets distincts. L'un consistait à mettre en place une sous-commission des transports chargée d'assurer, en doublon avec la Commission des transports, le suivi de la loi sur le réseau des TPG, en particulier selon les priorités définies dans son article 4 qui prévoit comme prochaine étape impérative le développement d'une ligne de tramway entre la place des Nations et le quartier des Palettes au Grand-Lancy.

Le second volet de ce projet de loi demandait et demande encore que 30 millions d'investissements soient annuellement et définitivement attribués aux TPG quels que soient leurs besoins, et cela sans la moindre préoccupation de la gestion et de l'état des finances publiques.

La crédibilité de la mise en place d'une sous-commission destinée à gérer cette manne n'ayant pu être établie même par la majorité, celle-ci a préféré scinder en deux ce projet de loi en présentant à notre Conseil ce rapport intermédiaire afin de ne pas faire trop mauvaise figure devant lui. Cependant, il ne fait aucun doute que la majorité imposera dans un second temps cette sous-commission, tant est grand l'enjeu de la politisation de la circulation à Genève.

La pratique de notre Conseil permet ces rapports intermédiaires lorsque nous dépendons de limites de temps. Or, ici point n'en faut. Ce n'est qu'une pirouette afin d'imposer à terme, sans débat et sans recours devant le peuple, une vision grobétienne de la circulation à Genève.

La force politique de ce projet de loi

La force politique de ce projet de loi est de voter un amendement à la loi sur le réseau des transports publics, d'apparence mineur, et qui consiste à reporter d'année en année et sur 10 ans, les 30 millions pourtant déjà prévus depuis 1993 pour le développement des TPG. Ce report permettra d'engager, déjà d'ici à 5 ans, quelque 300 millions d'investissements sans possibilité de référendum en dehors de la période référendaire qui suivra immédiatement le vote du présent projet de loi.

Le financement étant acquis, le recours au peuple devient plus aléatoire. Il ne restera alors qu'aux Pepones de la politique genevoise de décider en petits comités de l'usage de la voie publique et de la place qui y sera réservée aux différents usagers, qu'ils soient motorisés ou non. La sous-commission est donc, d'ores et déjà, bien inscrite dans les gènes de l'actuelle majorité.

Une technique financière aussi nouvelle qu'illégale

Comme la loi budgétaire annuelle ne permet pas le report systématique des budgets, la majorité de la commission pense avoir contourné l'obstacle en limitant la portée de ce report à 10 ans. Le but avoué est de lisser une dépense globale qui couvrira différents projets.

Cette technique financière est aussi nouvelle que contraire à l'esprit de nos lois. En effet, la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat prévoit expressément l'absence de crédits en blanc. Son article 52 réglemente strictement les investissements. Un crédit d'investissements n'est autorisé que sous la forme de crédit d'ouvrage ou d'acquisition ou de crédit complémentaire pour des engagements entraînant des paiements au-delà de l'exercice budgétaire. A cela s'ajoute une condition impérative : l'ouverture d'un crédit n'est possible que pour des travaux entièrement étudiés et dont l'exécution peut être entreprise immédiatement. Il n'y a pas d'exception possible.

Or, force est de constater que les oppositions sont si vives que nous sommes bien loin de voter, hélas, un nouvel axe de tramways. Il ne s'agit donc pas dans ce projet de loi de vouloir développer les TPG. Il s'agit avant tout de bloquer d'éventuels crédits pour qu'ils ne puissent être affectés ailleurs.

Là encore, il s'agit d'une erreur de gestion, car les investissements doivent être choisis année après année selon des critères de rendement, afin d'assurer à nos concitoyens la meilleure infrastructure possible. Il est contraire à l'entendement de décider aujourd'hui ce qui sera le mieux dans 10 ans, personne ne pouvant prévoir l'avenir des développements futurs, notamment sur le plan technologique.

La politique de la gauche : une politique privilège !

Plus généralement encore ce projet de loi interpelle sur le fonctionnement même de nos institutions. Une délégation du CE AET, à majorité de gauche, a soutenu ce projet de loi en commission.

Pourtant, un exécutif, quelle que soit sa couleur politique, ne devrait pas craindre de présenter au législatif un projet et son financement. Cela devrait être précisément le contraire, persuadé qu'il est d'avoir bien travaillé. Or, ce projet de loi permettra d'éviter le débat, l'exécutif n'ayant plus la nécessité économique d'avoir à justifier ses dépenses. Il est alors à craindre une course de chaque chef de département afin de s'appuyer sur l'actuelle majorité pour obtenir les crédits nécessaires au développement de son propre dicastère au détriment de l'intérêt général. Cela participe à la dégradation financière d'un Etat surendetté qui ne dispose même plus d'un budget.

La gauche genevoise mène ainsi une politique privilège et se désolidarise des intérêts communs de l'Etat.

Aussi, forte de ces arguments, la minorité de la commission engage notre Conseil à refuser l'entrée en matière de ce projet de loi.

Premier débat

M. Antonio Hodgers (Ve), rapporteur de majorité ad interim. L'aspect principal de ce projet de loi relève tout simplement du bon sens. En effet, cette proposition permettra un développement plus rapide des infrastructures nécessaires du rail à écartement métrique. Elle correspond d'ailleurs au mieux à la simulation financière des dépenses faites par les TPG, dépenses qui ont un caractère en dents de scie et qui nécessitent un peu de souplesse. C'est la raison pour laquelle elle est soutenue par la majorité.

De plus, elle a été assortie de deux garde-fous financiers. Elle n'est valable que sur une période de dix ans, ce qui fait que l'Etat ne pourra pas investir plus de 60 millions par année, ce qui est le double des 30 millions actuellement en vigueur pour une année.

Je ne sais pas quoi dire du rapport de minorité tant il contient d'invectives gratuites contre la majorité et ne dit rien sur le fond... Le fait est pourtant simple. La majorité veut donner un peu plus de flexibilité au gouvernement et aux TPG pour qu'ils puissent réaliser les objectifs fixés par la loi sur le réseau des transports publics dans les meilleurs délais. Il est cocasse de constater que la minorité, pour qui le principe de flexibilité dans la gestion des entreprises importe tant, veuille le limiter pour une entreprise publique comme les TPG !

Mesdames et Messieurs, avec logique et cohérence, nous devons approuver ce projet de loi.

M. Pierre Froidevaux (R), rapporteur de minorité. Le rapporteur de majorité vient d'évoquer le bon sens et la logique pour présenter un projet de loi qui n'a ni bon sens ni logique... Son argument consiste à dire que si on vote ces 600 millions - ou plutôt 300 millions d'ici à cinq ans - la construction des tramways et le développement des TPG se feront plus vite.

Cela est contraire à toute logique financière et à une saine gestion de l'Etat. Le terme de «flexibilité» auquel vous vous accrochez n'a rien à voir avec des crédits d'investissement et des crédits de fonctionnement. Les crédits d'investissement représentent une volonté de mettre en place une structure qui, ensuite, a besoin de flexibilité pour fonctionner. C'est ce qui s'appelle de la gestion. Mais pour pouvoir gérer correctement il faut que ces crédits d'investissement soient particulièrement bien choisis. Or, les crédits que vous voulez voter sont des crédits «en blanc» : ils sont absolument contraires à la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, notamment dans son article 54 - à partir de l'article 52 jusqu'à l'article 57. Il y est prévu, expressément exprimé, qu'un crédit d'investissement ne peut être alloué que lorsque l'ouverture du chantier est imminente, au moment où tout le travail préalable a été effectué, que l'on connaît le mode de financement et le coût de l'ouvrage.

Or, la structure de votre projet de loi nous dit, au chapitre III sur la loi sur les réseaux des transports publics «ressources» : «Le financement des infrastructures nouvelles du réseau sur rail à écartement métrique, prévu à l'article 4, est assuré par un investissement - au lieu d'une participation - de 1999 à 2008, moyen annuel à hauteur de 30 millions de francs.» C'est donc un crédit d'investissement que vous votez dans un projet de loi sur le réseau des transports publics... C'est totalement incompatible avec l'ordre légal ! Si par hasard, vous vouliez vous entêter à voter cette loi, il faudrait maintenant que le Conseil d'Etat - qui fait preuve d'une grande absence en ce moment... - se détermine pour savoir si c'est la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat qui doit s'appliquer pour inscrire dans le budget une ligne de budget ou si c'est la loi sur les réseaux des transports publics !

Il est évident à ce jour que vous faites un conflit légal, qui sera laissé à la libre appréciation de l'exécutif.

M. Pierre Ducrest (L). Jusqu'à il y a quelques années, la commission des transports avait travaillé de façon consensuelle, ce qui a donné quelques résultats devant ce parlement, quand bien même certains ont de l'urticaire, se retranchent derrière des idées reçues ou bloquent, dès que l'on parle de transports.

Il est regrettable de constater que, par deux fois - aujourd'hui c'est la deuxième - cette commission travaille unilatéralement. La première fois il s'agissait d'une résolution sur la politique des transports de l'Etat, cette fois-ci il s'agit des Transports publics genevois. J'en veux pour preuves quelques phrases que j'ai pu lire dans le rapport de Mme Briol, représentée ici par M. Hodgers, qui ne cherchent visiblement pas à arranger les choses. Je cite : «La réduction du trafic automobile et de ses nuisances et le développement du réseau des transports publics constituent une priorité pour la majorité de la commission.»

Mesdames et Messieurs les députés, je ne vois pas dans ce projet de loi quel élément pourrait réduire le trafic automobile et ses nuisances ! Nous sommes - et nous le répéterons toujours - pour la complémentarité des transports. C'est dire que nous sommes pour le développement des transports publics. C'est dire que nous sommes pour la fluidité du trafic automobile, qui évitera certaines nuisances. Mais nous n'avons jamais voulu mettre en conflit le développement des transports publics et le transport automobile. Nous voulons au contraire que ces deux modes de transport soient complémentaires. Nous sommes favorables aux transferts modaux. Nous sommes pour le développement de l'ensemble des moyens de transport.

Cela dit, j'en viens au fond de ce projet de loi. Que dit-il ? C'est un magistral autogoal, car le premier contrat de prestations, conclu entre le Conseil d'Etat et les TPG, qui était basé sur trois années, puisqu'il était embryonnaire et qu'il ne couvrait pas une législature entière, prévoyait dans ses annexes une somme annuelle en investissement pour les infrastructures. Et cette somme était déjà de 30 millions... Mais, malheureusement, les finances étant ce qu'elles sont, la somme n'a pas pu être mise dans son entier dans les budgets que vous avez pu examiner ces dernières années.

Que se passe-t-il ? Un projet de loi nous est présenté, dont le but, au départ, était de reporter les sommes non dépensées d'année en année, en ajoutant chaque année le solde à la subvention prévue. C'est tout simplement créer un fonds. Mais vous savez que notre République a déjà beaucoup de fonds divers - ils avoisinent les 100 millions - qui sont tous pris dans l'investissement. Nous devons investir, mais nous devons, surtout, avoir une liberté d'investissement, au gré des années et des besoins. Or, un tel blocage financier d'investissement réduit d'autant la souplesse dans les investissements futurs.

Alors, le Conseil d'Etat a adouci ce projet de loi : il fallait faire attention au budget en fixant une limite, c'est-à-dire en définissant un laps de temps. C'est ce qui a été fait et accepté par la majorité de la commission. En quoi consiste ce laps de temps : il s'agit d'une somme de base de 30 millions en moyenne. Cela signifie - je vous donne un exemple concret, puisque nous sommes déjà en 99 et que le budget n'est pas encore voté - qu'à la fin de cette année nous n'aurons pas 30 millions à dépenser - c'est une réalité. On pourrait, bien sûr, prendre la différence et faire en sorte d'arriver à une moyenne de 30 millions, dans le temps, ce qui augmenterait cette somme d'autant jusqu'à l'an 2009 ; on arriverait ainsi à une somme énorme.

Mais c'est un mauvais calcul. Cela ne va pas développer d'un iota les transports publics, au contraire ! Cela vous conduira, Mesdames et Messieurs les députés, à grossir les budgets de fonctionnement. C'est ce que vous devrez faire, si vous voulez accélérer le développement des transports publics d'une manière outrancière ! A ce moment-là, Messieurs des bancs d'en face, vous crierez haro sur le baudet...

M. Pierre Meyll. Qui c'est le baudet ?

M. Pierre Ducrest. ...parce que vous ne pourrez pas tout faire... Vous voudrez mettre de l'argent ici, vous voudrez mettre de l'argent là, mais vous n'en aurez pas assez pour tout faire !

Je suis étonné, Monsieur Grobet, que vous soyez signataire de ce projet, parce que vous nous aviez habitués à donner au Grand Conseil l'outil pour contrer le Conseil d'Etat et non à lui laisser carte blanche, comme vous le faites dans ce cas ; celui-ci pourra, au gré des vents, sachant qu'une somme est à sa disposition, qui est prévue dans l'investissement, en effet orienter le navire comme il le veut. N'oubliez pas, Monsieur Grobet, que les temps changent, que les majorités peuvent changer tous les quatre ans et que beaucoup de choses peuvent encore se passer jusqu'en 2009. Si le Conseil d'Etat a voulu revenir en arrière ou convaincre la commission d'être plus logique et de ne pas entrer dans une politique budgétaire impossible, alors, je vous le dis, cela va trop loin ! Et vous pouvez faire tous les calculs que vous voulez... Les desiderata des uns et des autres, sur la base des auditions, sont indiqués dans le rapport. Bien sûr, ces gens aimeraient que le réseau des transports publics soit réalisé d'un coup de baguette magique. Nous aussi nous aimerions bien qu'il se réalise pour mieux évaluer, dans la complémentarité, ce qui doit être fait pour que l'économie marche. Mais nous savons que cela prendra des années - des années !

Alors, soyez logiques... Nous ne pourrons tout simplement pas voter ce projet de loi, parce qu'il est illogique du point de vue de la technique budgétaire.

M. Jean-Marc Odier (R). Que l'on soit favorable ou pas au développement des transports collectifs, il faut savoir que ce projet de loi d'investissement de 300 millions n'est en réalité qu'un chèque en blanc, puisqu'il ne porte pas sur un ouvrage précis mais sur un ensemble de projets pour lesquels nous n'avons aucune certitude quant à leur réalisation, tant ils sont combattus, et dont on ne nous a pas présenté les coûts exacts. Voter ce projet de loi, c'est mettre la charrue devant les boeufs, c'est créer un fonds dans lequel les transports publics n'auront qu'à puiser !

Les partis de gauche disent vouloir une impulsion forte pour le développement des transports publics. Je pense que les contribuables genevois apprécieront les impulsions à 300 millions pour des projets que l'Etat ne maîtrise pas... Nous ne pouvons adhérer aux propos de la majorité qui parle de : moyen cohérent pour concrétiser un réseau indispensable au désengorgement automobile de Genève. Si un métro léger ou des trams sont nécessaires - ce dont nous sommes persuadés - il est faux d'imaginer qu'ils remplaceront le véhicule individuel. Bloquer les artères en multipliant les voies réservées aux transports publics est une erreur, car ce procédé ne tient pas compte des automobilistes et des commerçants dont la patience a des limites.

En agissant ainsi, vous vous écartez d'une possibilité de politique consensuelle des transports. Pour l'actuelle majorité, le transport public est une bataille idéologique visant à interdire Genève à l'automobile. Pour l'autre partie de ce Grand Conseil, pour le parti radical en tout cas, le transport public est une alternative complémentaire à l'automobile.

Faut-il rappeler, Mesdames et Messieurs les députés, qu'un des principes énoncés à l'article premier de la loi de 1988, que vous voudriez changer aujourd'hui, parle de complémentarité entre les transports collectifs et individuels ? Or, ce projet de loi ne respecte pas ce principe de complémentarité, puisqu'il bloque d'autres perspectives d'investissement, notamment pour des projets routiers tels que ceux qui sont réclamés par les communes de Meyrin ou de Vésenaz.

Quant au financement des différents modes de transport, si l'on comptabilise toutes les taxes payées par les automobilistes genevois, le compte routier est largement couvert, alors que celui des transports collectifs est grandement déficitaire, et que les TPG le sont à raison de 150 millions par année ! Non, ce projet de loi n'est pas cohérent ! La politique des transports est fondée sur un équilibre entre les transports individuels et collectifs, et ce projet de loi rompt cet équilibre.

C'est pourquoi le groupe radical s'oppose fermement à ce projet de loi.

M. Christian Grobet (AdG). On constate une nouvelle fois que, dès que le sujet des transports publics est abordé, les députés de l'Entente excellent dans le double langage... Toutefois, Monsieur Odier, vous, vous ne vous êtes pas caché de votre conception de la complémentarité des transports : pour vous, les transports publics sont le complément au transport automobile, qui est donc de ce fait prioritaire. Pourtant, ces deux modes de transport doivent pour le moins être sur un pied d'égalité. Mais votre franchise ne fait que refléter la politique qui a été menée par l'Entente depuis maintenant vingt-cinq ans, qui prétend vouloir développer les TPG, mais qui s'oppose à tout projet dans ce sens, sous prétexte qu'il y en a de meilleurs. En effet, la recherche d'une idée meilleure est toujours le meilleur moyen pour ne rien faire du tout !

Quand nous étions prêts, en 85, à démarrer le projet des tramways, M. de Tolédo nous a fait l'article avec le métro automatique léger... Nous avons ainsi perdu cinq ou six ans jusqu'à ce que, finalement, le gouvernement monocolore reconnaisse lui-même que nous n'avions absolument pas les moyens de réaliser ce métro automatique léger, qui est passé à la trappe avec la révision de la loi sur les transports intervenue en juin de l'année dernière.

Et puis, surtout, le plan des transports par voie de tramways, qui a été adopté en 1993, a été gelé durant la dernière législature par le Conseil d'Etat qui nous aura fait perdre trois ou quatre ans. A l'origine, ce plan devait être réalisé à l'échéance de l'an 2000 - et maintenant de l'an 2005 - et, évidemment, il ne sera pas réalisé dans les temps. Tout cela parce que ce projet a été gelé au profit d'un projet dont chacun savait qu'il ne verrait pas sa conclusion, à savoir ce pseudo-métro entre la gare des Eaux-Vives et Annemasse où l'accord avec la France est bien loin d'être trouvé... Il faudra encore bien des années pour que cet accord soit ratifié par les parlements nationaux des deux pays respectifs !

Notre objectif, en fait, est de tenter au moyen de cette loi, de réaliser le maximum du réseau tramway dans le cadre de l'échéance de l'an 2005 qui a été fixée. Or, il est évident qu'avec le retard qui a été pris, si nous nous contentons du plafond de 30 millions par année, sans pouvoir récupérer ce qui n'a pas été dépensé, eh bien, le délai de réalisation sera beaucoup plus long.

Aujourd'hui, Monsieur Odier, vous nous avez fait un grand discours en disant que le mode de financement auquel nous voulions recourir était inacceptable... Vous le savez aussi bien que tout le monde dans cette salle : le mode de financement du réseau tramway est la simple copie de ce qui a été prévu pour l'autoroute de contournement !

Monsieur Froidevaux, vous feignez de l'ignorer. Mais, malgré tout le respect qui vous est dû, Monsieur Froidevaux, vous déraillez complètement... (Rires.) Vous évoquez des systèmes de financement qui n'ont strictement rien à voir avec ce qui avait été décidé par le Grand Conseil ! Le Grand Conseil avait décidé, pour l'autoroute, d'inscrire des montants au budget, qui ne faisaient pas l'objet d'un crédit ad hoc. Vous savez aussi bien que moi, Monsieur Froidevaux, qu'aucune loi de financement n'a été votée par le Grand Conseil pour l'autoroute de contournement ! Vous le savez ! Nous n'avons voté qu'une seule et unique chose : le tracé de l'autoroute de contournement. C'est cela qui a été soumis à référendum. Le financement, en raison de notre loi cantonale d'application de la loi fédérale sur les routes nationales, était prévu dans le budget, sans recourir à un crédit d'investissement au sens de la loi sur la gestion administrative. Alors, excusez-moi, mais vous avez déraillé ! Vous faites semblant de ne pas comprendre le système ! Je le répète, le mode de financement que nous avons retenu pour le réseau des tramways est exactement le même que pour l'autoroute : les annuités !

En l'occurrence, étant donné le retard que nous avons pris sur la réalisation de ce réseau, nous ne demandons qu'une chose : c'est qu'à l'avenir et tant que les projets ne sont pas prêts à démarrer on mette les montants en compte - et pas sur un fonds ! Cette idée, Monsieur Ducrest, vous le savez aussi, a été abandonnée. C'est un simple jeu d'écritures. Vous rigolez, Monsieur Ducrest, mais ce n'est pas à nous que vous en ferez accroire ! Nous savons très bien que si une année, dans trois ans par exemple, nous voulions mettre - non pas 50 millions, comme nous l'avions fait pour l'autoroute - mais 40 millions, pour le réseau des tramways, vous seriez le premier sur les bancs d'en face à vous insurger, car nous dépasserions les 30 millions alloués ! Par conséquent, connaissant votre tactique... (L'orateur est interpellé.)

Monsieur Odier, vous réclamez des crédits pour les routes, alors que celles-ci ont bénéficié de sommes astronomiques ces trente dernières années à Genève, et vous avez l'audace de prétendre que le compte routier serait positif ! Mais c'est complètement faux ! Vous ne tenez pas compte de toutes les dépenses budgétaires qui sont faites pour les routes : l'entretien, les feux, la police, etc. C'est bien plus que les sommes destinées aux transports publics. Du reste, ce ne sont pas 150, mais 100 millions qui sont inscrits au budget de fonctionnement pour les transports publics ! Lorsque j'étais au département des travaux publics, j'ai fait le calcul du coût des routes : nous consacrons certainement 200 millions au réseau routier et à son fonctionnement - dont à déduire, il est vrai, 45 millions de taxes auto. Si un compte est déficitaire, c'est bien celui des routes... Alors, arrêtez de nous mener en bateau !

Mais pour en revenir à vos propos de tout à l'heure, Monsieur Ducrest, comme nous savons que vous faites semblant de vous intéresser aux transports publics et que vous faites tout ce que vous pouvez pour bloquer le développement du réseau tramways, nous pouvons imaginer que, si une année nous avions besoin de plus de 30 millions, vous vous y opposeriez. En l'état, nous demandons simplement que ce qui n'est pas dépensé une année soit mis en compte : ce n'est pas un fonds, il n'y a pas d'intérêts à payer, donc cela ne coûte rien à l'Etat.

Nous voulons avoir la possibilité, comme cela a été le cas pour l'autoroute, d'investir plus de 30 millions sur certains exercices. Nous l'avons bien fait pour l'autoroute ! Quelqu'un de chez vous s'est-il opposé à ce que nous sortions 50 millions l'année où nous en avons eu besoin ? Quelqu'un a-t-il dit que c'était un scandale ; qu'on devrait s'en tenir aux 30 millions prévus ? Tu parles ! Que demandaient les copains d'Odier ? Ils déposaient des résolutions démagogiques pour demander que le chantier soit activé pour les Jeux olympiques d'Albertville... Il fallait soi-disant pouvoir utiliser le tunnel de Vernier, en plein chantier, ce qui aurait occasionné des millions de dépenses pour rien du tout... Et puis, après on s'est rendu compte que les autobus faisaient parfaitement l'affaire et qu'il n'était pas nécessaire de proposer de pareilles inepties !

Vous qui veniez demander de jeter de l'argent par les fenêtres pour accélérer les travaux de l'autoroute, qui avez toujours considéré qu'il était normal de dépenser davantage que les 30 millions estimés au départ, vous qui n'avez jamais voté ni exigé de loi de financement pour l'autoroute, vous vous permettez, ce soir, de nous donner des leçons de gestion financière... Mais, Monsieur Froidevaux, retournez à votre place vous coucher, parce que tout cela ne tient pas debout ! (Rires et applaudissements.)

Une voix. Il est bon ! On voit qu'il boit genevois, il est bon !

Mme Nelly Guichard (PDC). Je ne m'attarderai pas à faire un débat idéologique autour de ce projet de loi, d'autres s'en chargeant largement !

Sur le fond, j'estime que la proposition est intéressante tant il est vrai que pour développer les transports publics, ce Grand Conseil a accepté, en 1993, le principe d'un investissement annuel de 30 millions. Dans la réalité, l'extension du réseau de tram nécessite des moyens financiers qui évoluent en dents de scie au gré des projets, des oppositions, des travaux vraiment réalisés en une année.

Comme d'autres députés, je privilégie une politique des transports sur la base d'une approche globale à long terme, et, à ce titre, je pourrais être d'accord avec la proposition. Je tiens aussi à préciser que je suis favorable, tout comme mon groupe, au transfert modal, à une complémentarité des déplacements, véhicules privés/transports publics. Mais nous sommes tout à fait opposés à mettre en concurrence le transport public et le transport privé.

Etant donné que le financement proposé dans ce projet de loi n'est pas conforme aux règles de la comptabilité analytique et, surtout, que nous n'avons aucune certitude que les projets ne rencontreront pas une succession d'oppositions qui les empêchent d'avancer comme prévu, nous ne pouvons pas sans autre voter une sorte de chèque en blanc sur dix ans. Un plan quadriennal aurait été beaucoup plus réaliste et raisonnable.

Mon groupe, ce soir, s'opposera donc à ce projet de loi.

M. Christian Brunier (S). Lorsque nous n'avons pas d'argument, il est d'usage d'utiliser deux moyens : soit nous disons que le projet est juridiquement limite, soit nous faisons de la démagogie... Mesdames et Messieurs de la droite, vous venez de faire une brillante démonstration dans le domaine !

Monsieur Froidevaux, vous jouez à l'expert en droit - ce que vous n'êtes malheureusement pas - en nous disant que ce projet est juridiquement limite. Je vous dirai simplement que les juristes du département de votre ami, M. Ramseyer, nous ont indiqué qu'il était conforme au droit, ce que les juristes du département des finances ont également confirmé. Alors, je sais, Monsieur Froidevaux, que vous n'aimez pas beaucoup les fonctionnaires, mais, je vous en prie, ne salissez pas le travail des professionnels, surtout dans un domaine dans lequel vous ne connaissez rien !

Monsieur Odier, dans le domaine de la démagogie, vous avez fait une performance ! Vous faites peur à la population en parlant d'un investissement de 300 millions... C'est vrai que ce montant peut sembler affolant vu l'état des finances cantonales. Mais ce que vous ne dites pas c'est que ces 300 millions seront étalés sur dix ans et que, de toute façon, il est déjà prévu de dépenser 30 millions par année. On travaille donc dans la même enveloppe. Monsieur Odier, vous utilisez le mensonge, ce qui n'est pas très joli à votre âge ! (Rires et exclamations. Le président agite la cloche.)

Par contre, vous nous faites une excellente proposition que j'aimerais soutenir : investir autant pour les transports publics que pour les routes ! Nous pourrions tout à fait présenter une initiative dans ce sens, ensemble, Monsieur Odier ! Cette proposition me semble excellente, elle va sensiblement accélérer le développement des transports publics !

Maintenant, n'en déplaise à certains, la configuration politique est particulière à Genève : le gouvernement est à majorité de droite et le parlement est à majorité de gauche. Nous avons toutefois un point commun : la priorité, dans le discours de Saint-Pierre du gouvernement comme dans les programmes des partis de l'Alternative, est le développement des transports publics. Et nous, nous tenons véritablement à honorer cette promesse. Nous ne voulons pas lâcher cette priorité ; aussi nous ferons tout pour concrétiser cette promesse, même si cela ne plaît pas à certains.

Monsieur Ducrest vous êtes devenu très consensuel depuis que vous êtes dans la minorité... Vous dites que nous marquons un autogoal, mais cet autogoal est souhaité par le Conseil d'Etat, la majorité parlementaire et les TPG. Aussi, nous sommes en droit de penser que cet autogoal n'est pas si insatisfaisant que cela pour le développement des transports publics.

Et puis, pour finir, je dirai que j'en ai assez de recevoir des conseils de finances publiques et de gestion financière d'une ex-majorité qui nous a tout de même plongés dans une catastrophe économique certaine... (Exclamations.) Nous vous avons vu à l'oeuvre pendant des décennies, dans la pratique... Nous constatons aujourd'hui que vous êtes aussi nuls dans la théorie que dans la pratique ! (Rires.)

M. Michel Halpérin. Merci, pour ce discours bien pensé !

M. Pierre Froidevaux (R), rapporteur de minorité. Monsieur Grobet, vous m'avez dit que je déraillais, mais je crois que je ne suis pas le seul ! Si véritablement je déraille, Monsieur Grobet, en tout cas, nous ne sommes pas sur les mêmes voies ! Vous, vous êtes sur la voie qui régresse dans le temps, moi, je l'espère, je suis sur la voie de l'avenir !

En parlant de ce projet de loi, vous reprochez à l'actuelle minorité le retard de vingt-cinq ans des TPG et notamment le blocage du développement des tramways depuis 1985... Cela montre à quel point vous vous accrochez à des projets particulièrement anciens et que vous ne réactualisez pas vos désirs d'investissement !

Nous, nous préparons plutôt l'avenir ! Et pour cet avenir, nous aurions souhaité avoir un bon projet et un bon financement. Or, si cette proposition de 30 millions, alloués aux transports publics pour le développement du réseau, a été votée en 1992, pendant le même temps tous nos projets étaient bloqués par l'actuelle majorité. Et c'est vous encore - et vos milieux - qui bloquez actuellement le développement de la nouvelle croix des tramways... (L'orateur est interpellé.) Ce sont vos milieux qui bloquent les projets depuis des années - depuis 1985. C'est pour cela que les 30 millions alloués n'ont jamais été débloqués ! (Exclamations.)

A propos des modes de financement, j'ai entendu parler de démagogie... Monsieur Grobet, vous expliquez que ce mode de financement est comparable à celui de l'autoroute de contournement. Or, celui-ci était déterminé par le droit fédéral, avec une participation cantonale qui ne pouvait faire l'objet d'un référendum. L'autoroute dépend de lois fédérales, mais les TPG relèvent du canton et de son propre développement. Nous touchons une subvention sur le plan cantonal, mais il ne s'agit pas du même type de financement. Ce n'est pas le canton qui a financé l'autoroute : c'est le compte des autoroutes, avec une participation cantonale. Ce n'est pas le mode de financement utilisé pour les TPG ! (Exclamations.)

J'aimerais calmer les débats. Tous, ici, nous souhaitons un développement sain des transports publics, mais nous voulons participer à l'élaboration de chacun des projets. Nous souhaitons, pour chaque phase de développement, une présentation claire des objectifs de la part du Conseil d'Etat, avant de voter ces projets. Il n'est pas question de ne pas voter ces 300 millions, mais ils doivent l'être en temps voulu. D'autant que, si nous votons ces 300 millions aujourd'hui, le délai référendaire pour s'opposer à ces dépenses ne s'appliquera qu'au présent projet de loi ; il n'y aura ultérieurement plus de possibilité de référendum. Il est donc important que notre parlement vote les crédits de financement au moment où les projets seront élaborés.

Nous ne voulons pas voter un crédit en blanc. Il en va de notre responsabilité de parlementaires, et je vous encourage à prendre cette responsabilité.

M. Pierre Ducrest (L). J'étais consensuel quand je faisais partie de la majorité, je suis toujours consensuel maintenant que je suis dans la minorité, mais vous savez, Monsieur Brunier, tout se soigne ! Même cela ! Et je me réjouis, pour ma part, de discuter bientôt du budget. Nous verrons quels sont les plus dépensiers de la République ; ceux qui sont pour détruire la République, qui ont détruit la République et qui la détruiront encore au niveau financier !

Mais je reviens au sujet qui nous occupe ce soir. Mesdames et Messieurs les députés, la ville de Lyon a construit un métro ; elle a construit la rocade Est ; elle va construire un tram ; elle le fait d'une manière chronologique, pour favoriser et les transports publics et les transports privés, tout en respectant ses finances. Ce qui signifie qu'on peut tout faire, lorsqu'on est de bons gestionnaires. Mais ici, à Genève, on veut mettre la charrue devant les boeufs, on veut bloquer des montants sans savoir où on va, on veut fixer certains investissements et, ce faisant, on en prétérite d'autres.

On connaît les pratiques de certains, qui réunissent autour d'une table certains petits amis, certains petits copains pour les persuader qu'il faut procéder ainsi et que la République s'en portera mieux. Malheureusement, on ne voit les effets de ces blocages que quelques années, voire plusieurs années après. Ce projet de loi en est un exemple typique, comme l'a rappelé avec intelligence le rapporteur de minorité, M. Froidevaux. Ce dernier a fait une démonstration parfaite de ce qui pourrait advenir si nous votions ce chèque en blanc.

Quant à moi, je renchéris : quel que soit l'argent que l'on bloque sur une ligne budgétaire au niveau des investissements, encore faut-il qu'il y ait des projets, encore faut-il que ces projets soient réalisables, techniquement et dans le temps. Or, il est prouvé que, dans ce canton qui n'a que 282 km2, avec les fleuves qui le traversent, il faut du temps pour mettre en place des transports publics performants. L'infrastructure existante nous coûte déjà assez cher, mais nous devons l'assumer. Il est en effet normal que des gens puissent se déplacer en transports publics, il est normal qu'ils puissent abandonner leur véhicule privé pour utiliser les transports publics, il est normal qu'il y en ait pour tout le monde. C'est la complémentarité des transports, je n'y reviendrai pas. Mais, par contre, il est anormal de bloquer des sommes sur des lignes budgétaires sans être assuré d'aucun résultat tangible dans les années futures. Si l'on veut aller de l'avant, il faut que ce parlement soit nanti de projets réalistes, calculés, élaborés, de façon qu'à la fin nous ayons une réalisation. Il ne suffit pas de faire des diatribes, comme on l'entend ce soir, car dans quelques années, j'en fais le pari, nous aurons la même discussion et rien n'aura avancé !

M. Christian Grobet (AdG). Je vois que M. Ducrest persiste dans une mauvaise foi évidente. Aucune somme ne sera bloquée par cette loi et vous le savez pertinemment bien. Vous savez qu'actuellement on ne dépense pas 30 millions par année et que le seul but de la loi est de permettre de pouvoir, le cas échéant, dépenser plus que 30 millions. Rien n'est donc bloqué, n'essayez pas d'induire les députés en erreur !

Quant à vous, Monsieur Froidevaux, je suis navré, mais quand vous ne connaissez pas un sujet, n'essayez pas de vous rattraper, car vous vous enfoncez davantage. En ce qui concerne les routes nationales, je ferai un peu d'Histoire. Avant le référendum sur le tracé de l'autoroute, sachez qu'il y avait eu un premier référendum qui portait précisément sur le crédit cantonal nécessaire à la réalisation du secteur de l'autoroute entre l'aéroport et la route de Vernier. C'était un crédit qui avait été voté par le Grand Conseil, un de ces crédits qu'on appelait crédits grands travaux. Ce référendum, je vous le rappelle, avait abouti et le peuple avait refusé le crédit. Après cela, M. Vernet était très inquiet quant au fait de savoir si l'autoroute allait pouvoir se réaliser. En effet, il était clair que si le Grand Conseil votait un crédit de 400 ou 500 millions et qu'il y avait un référendum il y avait de fortes chances qu'une somme pareille soit également refusée par le peuple. Et c'est pourquoi la loi a été modifiée, mais cela n'a rien à voir avec le droit fédéral. C'est nous, sur le plan cantonal, qui avons estimé que le référendum facultatif devait porter sur le tracé et non sur le financement. On a donc élaboré une loi spéciale concernant le financement de la part cantonale de l'autoroute, en décidant que ce financement ne se ferait plus par des crédits grands travaux, mais qu'il serait inscrit dans le budget. Voilà !

Votre digression, tout à l'heure, est donc tout simplement fausse, c'est en raison du référendum... (Commentaires.) Mais, relisez le Mémorial de 1979, Monsieur, vous retrouverez tout cela... Il est inutile de faire le grincheux, Monsieur Annen, vous savez aussi bien que moi qu'il y avait eu un référendum. Prenez le Mémorial, à la salle Nicolas-Bogueret, et vous trouverez la loi de financement de l'autoroute qui a été annulée par le peuple !

M. Laurent Moutinot. Le Conseil d'Etat entend bien construire les lignes de tram de la place des Nations et des Acacias. Ce sont des objectifs importants qui n'ont pas le flou que certains semblent leur prêter, étant en particulier rappelé que la ligne de tram à destination de la place des Nations vient de recevoir l'approbation de l'office fédéral concerné. Il est vrai que le délai de recours n'est pas échu, mais je suis persuadé que ceux qui souhaitent des investissements dans le génie civil auront la sagesse de s'abstenir de tels recours. S'agissant de la ligne à destination des Acacias, la concession a été donnée et la demande d'approbation des plans sera déposée prochainement.

Ce soir, le projet de loi qui vous est soumis prévoit un mécanisme de financement raisonnable, qui a recueilli l'accord du département de justice et police et des transports, du département des finances et, bien entendu, de mon département. Ceci pour l'excellente raison rappelée par Mme Guichard, à savoir que la conduite de travaux de cette nature se fait forcément en dents de scie, qu'il y a des années où on dépense plus et des années où on dépense moins et qu'un mécanisme budgétaire qui équilibre ces situations, qui évite ces effets de dents de scie, constitue un lissage financier parfaitement raisonnable. De plus, le projet initial a été modifié, en introduisant deux garde-fous : le premier dans la durée, puisque le mécanisme est limité à dix ans ; le second quant au montant, puisqu'un plafond a été fixé.

Dès lors, le Conseil d'Etat soutient clairement ce projet de loi - Conseil d'Etat qui, à ma connaissance, n'est pas à majorité de gauche, quoi qu'en pense le rapporteur de minorité ! (Rires.) 

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi(7939-1)

modifiant la loi sur le réseau des transports publics (H I 50)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article unique

La loi sur le réseau des transports publics, du 17 mars 1988, est modifiée comme suit :

Art. 9, lettre a (nouvelle teneur)

a) de 1999 à 2008 un investissement moyen annuel à hauteur de 30 millions de francs ; le montant annuel inscrit au budget d'investissement ne peut dépasser deux fois la moyenne annuelle fixée. Dès 2009 un investissement jusqu'à concurrence de 30 millions de francs par an. 

Le président. Nous suspendons là nos travaux. Mesdames et Messieurs les députés, je rappelle que vous avez reçu sur vos places une invitation à vous joindre à un rassemblement sur la place du Bourg-de-Four, rassemblement en présence de la présidente de la Confédération.  

La séance est levée à 19 h.