Séance du vendredi 30 avril 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 6e session - 19e séance

IN 111-C
5. Rapport de la commission fiscale chargée d'étudier l'initiative : «Réduisons les impôts». ( -) Mémorial 1998 : Page, 2347. Rapport du Conseil d'Etat, 2351. Pris acte, 2360. Renvoi en commission, 2360. Rapport, 4978. Recevabilité, 4983. Renvoi en commission, 4983.IN111
Rapport de majorité de M. Bernard Clerc (AG), commission fiscale
Rapport de minorité de Mme Micheline Spoerri (L), commission fiscale

1.

Arrêté du Conseil d'Etat constatant l'aboutissement de l'initiative, publié dans la Feuille d'avis officielle le

16 février 1998

2.

Débat de préconsultation sur la base du rapport du Conseil d'Etat au sujet de la validité et de la prise en considération de l'initiative, au plus tard le

16 mai 1998

3.

Décision du Grand Conseil au sujet de la validité de l'initiative sur la base du rapport de la commission législative, au plus tard le

16 novembre 1998

4.

Sur la base du rapport de la commission désignée à cette fin, décision du Grand Conseil sur la prise en considération de l'initiative et sur l'opposition éventuelle d'un contreprojet, au plus tard le

16 août 1999

5.

En cas d'opposition d'un contreprojet, adoption par le Grand Conseil du contreprojet, au plus tard le

16 août 2000

La Commission fiscale a siégé sous les présidences de Mmes C. Sayegh et J. Hagmann et de M. B. Fontanet les 12 janvier, 2, 9 et 23 février ainsi que le 2 mars 1999. Les procès-verbaux ont été tenus par Mmes E. Monnin et N. Seyfried.

Ont assisté aux séances Mme M. Calmy-Rey, présidente du Département des finances, M. G. Adamina, directeur de la taxation et M. S. Tanner expert fiscal.

La Commission fiscale avait déjà eu l'occasion de traiter sur le fond le contenu de l'initiative 111 car un projet de loi (PL 7498) déposé par deux députés libéraux et portant sur le même objet, a été traité en 1997. Ce projet de loi avait été amendé en commission de telle manière que le contenu final présenté en séance du Grand Conseil correspondait très exactement au contenu de l'initiative 111. En date du 7 novembre 1997, notre Grand Conseil refusait d'entrer en matière sur ce projet de loi par 66 non, 15 oui et 2 abstentions. Les arguments relatifs à la baisse des impôts contenus tant dans le projet de loi 7498 que dans l'initiative 111 ont été largement évoqués lors de ce débat (voir Mémorial No 52/VIII, pp. 8945 à 9033).

La Commission fiscale n'a pas jugé utile de procéder à nouveau aux nombreuses auditions qui avaient eu lieu lors de l'examen du projet de loi 7498, à savoir : M. Robert Kuster, délégué à la promotion économique ; le professeur Jean-Christian Lambelet et M. Jean-Marc Natal, de l'Institut CREA ; M. Olivier Vodoz, alors président du Département des finances ; MM. Jacques Perrot et Carl Heggli, de la Chambre fiduciaire ; Mme Gabrielle Antille, du Laboratoire d'économie appliquée ; MM. Charles Beer, Bernard Mathey et Jacques Robert, de la Communauté genevoise d'action syndicale ; MM. Gérard Beran et Charles Bonvin, de la Chambre de commerce et d'industrie de Genève ; M. Andreas Novembrer, économiste ; le professeur Yves Fluckiger, du Laboratoire d'économie appliquée et enfin M. Jean-Paul Aeschimann, de l'Etude Lenz et Staehelin.

Par contre, à la demande des auteurs de l'initiative, la commission a entendu à nouveau la Chambre de commerce et d'industrie de Genève ainsi que la Chambre fiduciaire.

9 février 1999 : audition de M. Patrick Coïdan, président de la CCIG.

En se basant sur une étude de la CCIG de 1995 intitulée « Paie-t-on toujours trop d'impôts à Genève ? », M. Coïdan rappelle les différences existantes entre Genève et certaines communes du canton de Vaud en matière fiscale, sans nier cependant que si des contribuables ont quitté notre canton, ce n'est pas seulement en raison du différentiel d'impôt. La CCIG avait soutenu le « paquet ficelé » qui prévoyait une hausse temporaire des impôts. Devant le refus populaire, la CCIG estime qu'il faut tout faire pour attirer de nouveaux contribuables et dans ce sens l'initiative « Réduisons les impôts » prend tout son sens. M. Coïdan craint cependant que l'initiative ne soit trop raisonnable. Une relance de la consommation avec une réduction d'impôt aussi faible est peu probable et il y a le risque que l'économie d'impôt soit épargnée ou dépensée de l'autre côté de la frontière. La réduction proposée est étalée dans le temps, avec des conditions de rééquilibrage des finances publiques assez difficiles à remplir. Cependant, M. Coïdan estime que réduire les impôts consiste à savoir investir à court terme pour obtenir des résultats à moyen terme. Il cite à ce sujet l'exemple de l'Irlande et de la Nouvelle-Zélande. Tout en étant consciente que l'initiative « Réduisons les impôts » ne suffira pas à relancer l'économie et à forcer le redressement des finances publiques, la CCIG annonce qu'elle la soutiendra, notamment en raison de la force symbolique du signe.

2 mars 1999 : audition de M. Yvon de Coulon, Chambre fiduciaire.

Après avoir souligné que les mandataires sont fortement sollicités par des contribuables pour être orientés quant à leur localisation fiscale, M. de Coulon pense qu'il y a une assez forte probabilité que des personnes physiques quittent le canton de Genève sans que des chiffres puissent néanmoins être avancés. Les mandataires pensent que l'acceptation telle quelle de l'initiative sécuriserait les contribuables hésitants, voire ceux qui ont décidé de partir, tout en attirant des contribuables extérieurs au canton. Là encore, M. de Coulon se refuse à avancer des chiffres précis.

Comparaisons fiscales

Les initiants postulent que la fiscalité genevoise est trop lourde et qu'elle est la cause de l'installation dans le canton de Vaud d'un certain nombre de contribuables. Selon eux, une baisse de l'impôt sur les personnes physiques conduirait non seulement à une reprise de la consommation favorisant la croissance, mais serait susceptible de faire revenir sur le territoire cantonal des contribuables aisés ou, pour le moins, freinerait le départ de ceux-ci.

Il convient tout d'abord de rappeler qu'en comparaison internationale la quote-part fiscale en Suisse (comprenant les impôts et les cotisations de sécurité sociale) est inférieure à la moyenne des pays de l'OCDE et à celle de l'Union européenne. Le tableau ci-dessous est à cet égard éloquent.

Source : OCDE, statistiques des recettes publiques des pays membres de l'OCDE 1965-1996, Paris 1997 in « La Vie économique » 5/98.

Pays

Quote-part fiscale en % du PIB en 1995

Danemark

51.3

Suède

49.7

Finlande

46.5

Belgique

46.5

France

44.5

Rép. tchèque

44.3

Pays-Bas

44.0

Luxembourg

44.0

Pologne

42.7

Autriche

42.4

Norvège

41.5

Grèce

41.4

Italie

41.3

Hongrie

39.2

Allemagne

39.2

Nouvelle-Zélande

38.2

Canada

37.2

Royaume-Uni

35.3

Espagne

34.0

Suisse

33.9

Irlande

33.8

Portugal

33.8

Islande

31.2

Australie

30.9

Japon

28.5

Etats-Unis

27.9

Turquie

22.5

Corée

22.3

Mexique

16.0

Moyenne de l'OCDE

37.4

Moyenne de l'UE15

41.8

Ainsi, la Suisse se situe au 20e rang sur les 29 pays membres de l'OCDE, ce qui permet à l'auteur de l'article paru dans la « Vie économique » d'écrire : « ...la Suisse figure, avec l'Irlande, le Portugal, l'Australie, les Etats-Unis et le Japon, dans le groupe des pays les plus modérés dans leur ponction fiscale. ». Dans le même article, nous trouvons une comparaison internationale relative à l'impôt sur le revenu et les cotisations de sécurité sociale en % du revenu brut de 1996 pour un contribuable célibataire. La Suisse est placée au 22e rang sur les 29 pays considérés.

L'argument de la comparaison fiscale internationale étant écarté, il convient d'examiner les différences d'imposition avec les cantons voisins. Selon l'administration fédérale des contributions

Charge fiscale en Suisse, chefs-lieux des cantons, nombres cantonaux, 1997, p. 61

Valais

134.9

Jura

132.3

Neuchâtel

121.7

Genève

111.9

Vaud

109,2

Suisse

100.0

Contrairement aux idées largement répandues, Genève n'est pas en tête des cantons romands en termes de charge fiscale grevant le revenu et la fortune, puisqu'il se situe au quatrième rang, à 2,7 points au-dessus du canton de Vaud. Et encore cet indice ne tient pas compte d'autres impôts, comme par exemple l'impôt sur les véhicules à moteur qui est beaucoup plus bas à Genève que dans le canton de Vaud (GE : 68.0, Vaud : 126.7). Les partisans de l'initiative rétorqueront qu'il s'agit là de l'indice global, mais que les différences peuvent être plus importantes en fonction du niveau du revenu brut, ce qui est exact. Et c'est sans doute là que le parti libéral montre l'un des objectifs réels de son initiative, sur lequel nous reviendrons : obtenir une baisse d'impôt qui profite essentiellement aux hauts revenus. Par ailleurs, un récent rapport de la Commission externe d'évaluation des politiques publiques

Politique cantonale en matière de déductions fiscales, décembre 1998

Exode vers le canton de Vaud ?

Les partisans de l'initiative prétendent que la fiscalité genevoise fait fuir les contribuables vers le canton de Vaud. Pour défendre leur postulat, ils s'appuient sur l'évolution du nombre d'actifs travaillant à Genève et résidant dans le canton de Vaud. Voici l'évolution des entrées et des sorties d'actifs du canton de Genève vers le reste de la Suisse entre 1950 et 1990.

Source : « Les mouvements pendulaires d'actifs, d'écoliers et d'étudiants dans le canton de Genève », aspects statistiques No 106, Ocstat, août 1996.

Année

Sorties

Hausse en %

Entrées

Hausse en %

Ratio Sorties/entrées

1950

137

786

17.4%

1960

300

119%

1708

117%

17.5%

1970

692

130%

3998

134%

17.3%

1980

1131

63%

8327

108%

13.5%

1990

3050

169%

18109

117%

16.8%

Une première constatation s'impose : le nombre d'entrées d'actifs à Genève a toujours été supérieur au nombre des sorties en raison du volume d'emplois plus élevé offert dans notre canton. Si la théorie des initiants était correcte, à savoir qu'une proportion croissante d'actifs vont se domicilier dans le canton de Vaud, nous devrions enregistrer une diminution significative du ratio des sorties par rapport aux entrées. Or il n'en est rien, la proportion de 1990 étant presque identique à celle de 1950. Ces chiffres ne font donc qu'indiquer une plus grande mobilité professionnelle. En comparant les chiffres des personnes actives occupées venant d'un autre canton et en les rapportant au nombre total de personnes travaillant dans le canton, nous constatons que Genève avait en 1990 une proportion de 9 % d'actifs venant d'autres cantons. Cette part était de 10,2 % en moyenne nationale et elle était de 12,2 % à Zurich, de 43,9 % à Bâle-Ville et de 23,7 % à Zoug, canton particulièrement avantageux sur le plan fiscal... où l'on préfère donc venir travailler que résider ! A l'évidence les mouvements de navette intercantonale n'ont que peu de rapport avec la fiscalité mais bien plutôt avec le potentiel d'emplois offerts.

Pour clore ce chapitre sur « l'exode » vers le canton de Vaud, il faut encore signaler que pour les personnes travaillant à Genève et résidant dans le canton de Vaud, nous ne disposons d'aucune donnée permettant de savoir quelle est la proportion de celles qui ont toujours habité ce canton et de celles qui ont quitté Genève pour le canton de Vaud. Cela étant, il est indéniable que des résidents genevois désireux d'acquérir une maison ou de s'établir à la campagne ont choisi de s'établir dans le canton de Vaud où le prix des terrains et des villas était beaucoup plus avantageux, notamment dans les années 70 et 80, à l'heure où la pénurie de logements était au plus haut et la spéculation battait son plein dans notre canton.

Mais alors, que veulent les libéraux ?

L'argument de la concurrence fiscale avec le canton de Vaud s'avérant peu pertinent et celui de la concurrence internationale n'entrant pas en considération, il convient de se demander quels sont les buts réels poursuivis par l'initiative. Pendant la dernière législature, les libéraux n'ont cessé de prôner le retour à l'équilibre budgétaire. Pour parvenir à cet objectif, ils ont proposé et obtenu des coupes dans les dépenses qu'il s'agisse des suppression de postes, de baisse des salaires et des subventions ou de révision des barèmes de certaines prestations sociales. Et voilà qu'aujourd'hui les libéraux proposent de creuser le déficit en diminuant les recettes de l'Etat ! Cela pourrait paraître contradictoire. Mais à y regarder de plus près, il n'en est rien. L'objectif des libéraux n'a jamais été fondamentalement la réduction des déficits mais bien plutôt la réduction du rôle de l'Etat. Et comme cette réduction s'est heurtée à de fortes résistances, les libéraux empoignent le problème par l'autre bout en s'attaquant aux recettes, espérant ainsi accélérer ce processus. M. Coïdan, président de la Chambre de commerce et d'industrie et partisan de l'initiative, a parfaitement résumé cette option dans le document qu'il a remis à la commission : « Toutefois la seule façon de réduire le train de dépenses est de fermer le robinet ». A cet égard, les initiants se gardent bien de dire dans quels domaines ils entendent réduire les prestations de l'Etat. Ils se contentent de grandes généralités du type « Réforme de l'Etat » sans donner aucun contenu concret, car ils seraient alors obligés de dévoiler leurs véritables intentions.

Les partisans de l'initiative prétendent qu'à moyen terme la baisse de l'impôt attirerait à Genève de nouveaux contribuables aisés, ce qui permettrait d'engranger de nouvelles recettes fiscales compensant la perte fiscale escomptée. Toutes les personnes auditionnées par la commission se sont refusées à articuler le moindre chiffre à cet égard. Ce raisonnement simpliste et purement comptable ne tient absolument pas compte de la réalité : la décision de s'installer à Genève ne se prend pas d'abord sur des considérations fiscales, mais en fonction de plusieurs autres facteurs : l'emploi, le logement, le cadre de vie, la qualité des infrastructures, la sécurité, les distances, etc. Ces facteurs, qui sont valables dans la décision de quitter ou non le canton, le sont également dans la décision de s'y établir.

Les auteurs de l'initiative feignent de croire qu'une réduction des impôts contribuera à la relance économique. A cet égard, même les plus chauds partisans de l'initiative sont restés très prudents. En effet, les contribuables pour lesquels une baisse d'impôt signifie une hausse directe de la consommation, soit ne verront rien car il ne payent pas d'impôts, soit la baisse en terme absolu sera tellement minime qu'elle n'aura qu'une très faible influence sur la consommation. Par contre, pour les heureux bénéficiaires d'une baisse substantielle de la fiscalité, celle-ci ira alimenter leurs placements et leur épargne sans aucun effet sur la consommation.

A cet égard, il est intéressant de montrer quel serait l'effet d'une réduction de 12 % des impôts selon les différents niveaux de revenu imposable. Nous avons retenu ici le barème pour un couple marié sans enfants :

Revenu imposable

Impôt cantonal total

Réduction de 12%

10 000.-

653,25

78,40

30 000.-

4 097,10

491,65

50 000.-

8 409,35

1 009,10

80 000.-

15 176,35

1 821,00

150 000.-

32 041,40

3 845,00

300 000.-

71 234,30

8 548,00

Comme on peut le constater, pour un revenu imposable de 10 000 F (correspondant à un revenu brut de 40 000 à 50 000 F) l'économie d'impôt est très faible et correspond à moins de 7 F par mois. Par contre, pour un revenu imposable de 300 000 F, l'économie d'impôt s'élève à 712 F par mois. Les grands bénéficiaires des largesses libérales sont les hauts revenus. Ils le sont d'autant plus qu'en cas d'acceptation de l'initiative, la remise en cause des prestations touchera évidemment surtout les petits et moyens revenus. Enfin les personnes qui ont le moins de moyens et qui ne payent pas d'impôts, soit environ 47 000 contribuables, ne verront pas la couleur de la réduction d'impôt mais seront à coup sûr concernés par la réduction des dépenses de l'Etat qui s'en suivra. Cette initiative constitue en fait une redistribution de revenus à l'envers, c'est-à-dire en faveur des plus riches.

Les conséquences financières de l'initiative

Alors que les déficits du canton avoisinent les 400 millions et que la dette dépasse les 10 milliards, les libéraux, autrefois chantres de la rigueur budgétaire, nous proposent aujourd'hui de creuser davantage le déficit. Les calculs effectués par l'administration fiscale montrent que la première tranche de réduction d'impôt diminuera les recettes de 88 millions par an dès 1999, puis de 170 millions à partir de 2003 et enfin de 231 millions dès l'année 2005. A la fin des sept ans de mise en oeuvre de l'initiative, ce sera près d'un milliard de diminution de recettes fiscales. Ces chiffres ne tiennent évidemment pas compte des charges en intérêts supplémentaires dus à l'augmentation consécutive de la dette : 4,5 millions par tranches de 100 millions d'emprunt supplémentaire.

En outre l'acceptation de l'initiative entraînerait de graves perturbations dans le fonctionnement de l'administration fiscale qui ne pourrait envoyer les bordereaux qu'à la fin de l'année 1999 si elle choisissait d'attendre les résultats de la votation ou qui devrait notifier une première taxation sur la base du droit actuel et, le cas échéant, adresser une taxation rectifiée à chaque contribuable. L'expérience de ces dernières années a montré à quel point les perturbations de l'administration fiscale avaient des conséquences sur le niveau des rentrées fiscales.

A cela, il faut ajouter les difficultés liées à la mise en application de cette initiative qui serait bien plus complexe que son texte pourrait le laisser croire, du fait de la complexité du calcul de l'impôt. En effet, tant les applications informatiques de l'administration fiscale que les formules utilisées actuellement ne permettent pas le calcul de la réduction des impôts cantonaux sans influencer la part attribuée aux communes et aux églises. Dès lors d'importantes modifications des programmes informatiques devront être effectuées qui retarderont l'avancement des travaux liés au passage à l'an 2000.

Par ailleurs, l'administration fiscale ne pourrait pas établir un barème définitif de l'impôt à la source 1999 avant de connaître le sort réservé à cette initiative. Dans cette optique, il faut compter sur la réticence des employeurs à rectifier, à posteriori, les retenues d'impôt à la source effectuées, voire à une impossibilité pour ceux-ci de le faire pour les cas où ils se seraient séparés de leurs employés entre-temps.

Enfin, des retards dans les procédures de recouvrement pour les contribuables non sujets à la mensualisation et des coûts supplémentaires liés à la gestion des bonifications et des intérêts créditeurs seront générés.

Conclusion

Au terme de ses travaux et compte tenu des risques considérables que ferait courir l'application de cette initiative tant du point de vue du maintien des prestations essentielles de l'Etat que de celui de l'aggravation de la situation financière du canton, la majorité de la commission, par 7 non (3 AdG, 3 S, 1 Ve), 4 oui (3 L, 1 R) et 3 abstentions (2 DC, 1 R) vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de rejeter l'initiative sans contre-projet.

RAPPORT DE LA MINORITÉ

L'aboutissement de la présente initiative a fait l'objet d'un arrêté du Conseil d'Etat publié dans la Feuille d'avis officielle le 16 février 1998.

Sur préavis unanime de la Commission législative, la recevabilité de l'initiative 111 a été votée par le Grand Conseil lors de la session de septembre 1998. Renvoyée devant la Commission fiscale pour examiner sa prise en considération, ce n'est qu'en février 1999 que la majorité de ladite commission a décidé d'en aborder le fond, soit une année après l'aboutissement et au mépris de l'entrée en vigueur prévue pour le 1er janvier 1999.

En tant que rapporteur de la minorité, je déplore le peu d'empressement dont la majorité de la commission aura fait preuve, démontrant ainsi son hostilité latente de façon peu démocratique.

Il est vrai que ne pas maîtriser les dépenses revient à augmenter les impôts, ce que le peuple ne veut pas, mais ce que la gauche voudrait bien... Une telle initiative est alors bien encombrante ! On la renverrait bien aux calendes grecques, ce qui n'est pas possible ! Alors, on se creuse la tête pour trouver la date idéale des votations, c'est-à-dire la date où l'initiative aurait le plus de chance d'être rejetée... et patati et patata...

Cela fait penser à ces réceptions mondaines où le dernier petit four circule sans que jamais personne ne le saisisse : personne n'en veut. Mais le peuple, lui, pourrait bien en vouloir de ce dernier gâteau ! N'a-t-il pas, le peuple, suffisamment patienté avant de se servir ? Et finalement, n'est-ce pas la bonne solution - une fois n'est pas coutume - que de se servir d'abord, laissant l'Etat se serrer la ceinture ?

D'ailleurs, il pourrait bien arriver qu'un jour, à force de n'être pas entendu, le souverain impose la marche à suivre en fixant les limites de l'exercice.

Par le biais de l'initiative 111, le peuple répondra à ces questions. A en juger au ras le bol qu'il a exprimé le 20 décembre dernier, nous doutons qu'il se laisse bafouer, encore et encore.

Souvent interpellés pour retirer, cette initiative, les libéraux l'ont maintenue avec détermination, pressentant que ni le gouvernement, ni le Parlement n'auraient la sagesse d'imposer le retour au respect du bien commun.

La paix des sages aurait pourtant pu être trouvée avec le retrait de cette initiative, sous condition préalable qu'une réforme sérieuse de l'Etat soit entreprise, qu'un moratoire sur les dépenses soit adopté, et que l'Alliance de gauche retrouve le chemin de la table des négociations pour sortir de l'impasse budgétaire actuelle, comme le rappelait textuellement le rapporteur de la Commission législative. Aucune de ces trois conditions n'est remplie à ce jour. Notre dernière tentative date du 21 janvier 1999 : par 46 voix contre 44, les députés socialistes, verts et l'Alliance de gauche ont refusé un moratoire des dépenses. Le prix de leur insouciance politique sera lourd : c'est la quadrature du cercle.

La maladie fiscale à Genève

L'avenir de la fiscalité du troisième millénaire suscite partout des inquiétudes, notamment liées aux incertitudes économiques et au taux grandissant de la population inactive.

La fiscalité genevoise sur les personnes physiques est malade, tant sous l'angle de ses barèmes, de sa progressivité, de son système de déductions que de son poids en comparaison intercantonale.

Trois conséquences majeures en résultent :

La fragilité des recettes symbolisée par la fameuse pyramide fiscale. Quelques dizaines de milliers de Genevois ne paient aucun impôt. 1800 contribuables paient à eux seuls 375 millions d'impôts. 10 % de nos contribuables paient 65 % des impôts.

La progressivité est telle que la classe moyenne subit une pression fiscale insupportable. Pesant sur son pouvoir d'achat et son niveau de vie, cette pression ne lui donne en outre, ni l'envie de créer, ni l'envie de développer quoi que ce soit à Genève.

Quant aux plus hauts revenus, ils finissent par se domicilier principalement dans le canton de Vaud, où les avantages cumulés du coût de la vie, du prix du logement plus modéré ainsi que d'une fiscalité attractive sont déterminants. Pour un revenu brut de 100 000 francs, le montant des impôts est inférieur de 20 % à Nyon. Cette « évasion » coûte à Genève plusieurs centaines de millions par an.

A cette fragilité et à cette volatilité s'ajoute un manque de transparence, lié notamment à notre système de déductions (voir le rapport de la Commission externe d'évaluation des politiques publiques, daté du 23 décembre 1998).

Tout ceci fait de la fiscalité genevoise un bateau fou dont l'évolution est particulièrement imprévisible, mais surtout l'évolution à moyen terme extrêmement alarmante.

Ceci rend la maîtrise des dépenses plus que jamais indispensable.

Y a-t-il des remèdes ?

Rien n'est jamais acquis en matière de recettes. On observe cependant que c'est une révision totale de notre fiscalité qu'il conviendrait d'entreprendre. Encore faudrait-il que la volonté politique du gouvernement et du Parlement convergent, ce qui, au vu des forces politiques en présence, paraît tout simplement utopique alors que le temps presse !

Pour l'heure, la révision de la loi sur l'imposition des personnes physiques (LIPP), actuellement en relecture, paraît bien peu novatrice.

La future loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs (LHID) apparaît peu contraignante vis-à-vis des cantons, surtout en matière de déductions.

La démarche entreprise par la présidence du Département des finances auprès du Tribunal fédéral à propos des pendulaires vaudois est plus qu'incertaine et ne contribuera sans doute pas à donner de Genève une image attractive et collégiale.

Les dépenses de l'Etat continuent à augmenter comme si tout allait bien, alors qu'à ce jour, Genève n'a pas de budget, et que le peuple a exprimé vis-à-vis de son gouvernement et de son Parlement, le 20 décembre dernier, un désaveu total !

En attendant, la réalité se résume ainsi : en 1997, pour un revenu brut de 80 000 francs, personne mariée avec 2 enfants, les Genevois paient 52,3 % de plus d'impôts que les Zurichois.

Cette donnée-ci, extraite de l'Administration fédérale des contributions « charge fiscale en Suisse » No 18, est indiscutable, incontournable.

Cela veut dire, expressément, que notre niveau de fiscalité a complètement dérapé, sachant que les niveaux de vie de Genève et Zurich sont comparables.

Cela veut aussi dire que la taille de l'appareil de l'Etat de Genève et les moyens consacrés pour une même prestation - à Zurich et à Genève - ont augmenté chez nous dans des proportions aujourd'hui inadmissibles. Et que demander aujourd'hui à nos concitoyens de faire, eux, les efforts que nous, politiques, aurions dû mettre en oeuvre relève, de l'inconscience, de l'irresponsabilité politique et d'une arrogance que la population genevoise n'a pas manqué de nous signifier par sa réponse du 20 décembre.

L'initiative 111 « Réduisons les impôts » est plus que jamais d'actualité. Liée au redressement des finances, donc à la maîtrise des dépenses, elle trace les limites dont Genève ne peut désormais plus se départir sans mettre la République en péril.

Les libéraux ont constamment, et sans succès, demandé que cette initiative soit accompagnée :

d'une réorganisation de l'Etat ;

de l'élimination systématique des doublons Etat-Ville ;

de la diminution des coûts administratifs liés aux dépenses sociales ;

d'une augmentation de l'assiette fiscale par une politique plus attractive notamment en matière de taux fiscal, et d'une politique du logement répondant à des critères réalistes et non asservis aux subventionnements.

Les forces politiques étant inaptes à tenir le gouvernail, c'est donc par l'initiative 111 que le peuple genevois tranchera sur une première orientation, à savoir : baisse de la fiscalité et maîtrise des dépenses.

La diminution générale de la fiscalité sur les personnes physiques ne nous dispensera pas, dans un deuxième temps, de procéder à la révision des barèmes, c'est-à-dire à un examen détaillé de la progressivité de l'impôt. Et en particulier de corriger les barèmes très largement décalés par rapport à l'échelle des revenus, ce qui a pour effet de pénaliser lourdement la classe moyenne. Cela devrait être l'objet de notre prochaine étape qui ne peut intervenir :

que si le niveau général de la fiscalité a été ramené à des valeurs non prohibitives, premier signe d'une volonté politique propre à rassurer l'ensemble des contribuables et à modérer les velléités de départ ;

que si le niveau général des dépenses est programmé à la baisse, raisonnablement, mais selon des critères contraignants et des dates-butoir, comme l'indique l'initiative 111 ;

que si début de consensus politique voit le jour, faute de quoi aucune volonté politique ne sous-tendrait une réforme si sensible, laquelle serait alors vouée à l'échec.

A ce propos, les conclusions de la commission ad hoc audit de l'Etat (RD 272-A, RD 288-A) consignées dans son rapport du 1er décembre 1998 (pages 12 à 15), ont fait l'unanimité des commissaires, tous partis politiques confondus. Elles pourraient jeter les bases d'un consensus parlementaire et, actuellement examinées par le Conseil d'Etat, permettre la reconstruction d'un équilibre indispensable à notre canton.

La balle est dans le camp de notre gouvernement. Sa mission est difficile. Franchir ce pas suivant permettrait notamment celui d'une révision profonde de la fiscalité. Ne pas le franchir pourrait discréditer, sans appel, le gouvernement.

Travaux de la commission

Après bien des palabres, alimentées notamment par la volonté de l'Alliance de gauche de donner la priorité à la hausse (PL 7912) plutôt qu'à la baisse d'impôts, la commission a débuté ses travaux le 2 février 1999.

L'initiative 111 a été débattue sous la présidence de M. Bénédict Fontanet, président de la Commission fiscale, de Mme Christine Sayegh, vice-présidente et de Mme Janine Hagmann, lors de 5 séances consécutives, du 2 février au 9 mars 1999.

La commission a bénéficié, au fil des travaux, de la présence de Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Département des finances.

Elle a en outre été secondée par M. Georges Adamina, directeur de la taxation et de M. Stéphane Tanner, expert fiscal à l'AFC, que nous remercions tous deux vivement.

Rappelons que l'étude du projet de loi libéral 7498, relatif à la diminution de l'impôt sur les personnes physiques, avait été l'occasion de très larges discussions et de très nombreuses auditions auxquelles il est indispensable de se référer, tant les travaux concernant l'initiative 111 - à savoir le projet de loi 7498 amendé - leur ressemblent.

Qu'il me soit permis, Mesdames et Messieurs les députés, de vous recommander respectueusement la relecture attentive du rapport déposé le 2 septembre 1997 (PL 7498-A).

Les principales questions qui ont occupé, à nouveau, les commissaires ont essentiellement porté sur les thèmes suivants :

A quoi et à qui sert cette initiative ?

Les véritables motifs de l'exode des contribuables dans le canton de Vaud sont-ils liés à la fiscalité ?

Est-ce bien le moment de baisser les impôts ?

Il n'y a donc aucun nouvel élément par rapport à la précédente réflexion sur le projet de loi 7498, raison pour laquelle je laisserai au rapporteur de la  majorité faire le résumé, inchangé, des réponses apportées par les commissaires socialistes, verts et de l'Alliance de gauche.

Par contre, 2 années s'étant écoulées depuis, la Commission a souhaité, sur la proposition d'un commissaire libéral, auditionner la Chambre genevoise de commerce et d'industrie ainsi que la Chambre fiduciaire, afin d'apprécier l'état d'esprit actuel des milieux, proches de ces deux chambres par leur pratique professionnelle, et constituant par leur nombre et leurs caractéristiques des partenaires substantiels dans la collecte des contributions publiques.

Audition de la Chambre de commerce, le 9 février 1999 - M. Patrick Coïdan, directeur.

Il est rappelé en préambule que les dépenses du canton de Genève concernant l'enseignement, la santé, les prestations sociales, et les subventions au logement sont nettement supérieures non seulement à la moyenne des dépenses des autres cantons, mais également aux dépenses des cantons financièrement aisés comme Zurich, par exemple.

L'équilibre des finances passera par une diminution des dépenses qui implique une réforme des structures de l'Etat et une réduction de son endettement.

Quant aux recettes, se basant sur des études de 1991, 1995 et sur des travaux plus récents, M. Coïdan confirme les plus vives inquiétudes de la Chambre de commerce. Le manque à gagner fiscal, pour l'Etat de Genève, résultant du départ constant des contribuables des classes moyennes et aisées, se chiffre par centaines de millions. Le problème majeur réside dans la progressivité de l'impôt qui fait que lorsqu'une entreprise s'établit à Genève, ses cadres vont en général habiter sur le canton de Vaud. C'est ce problème-là qu'il faudrait résoudre en premier lieu. A titre d'exemple, dans une grande entreprise bancaire de la place, sur trente-six cadres, trente-quatre habitent le canton voisin !

Dans l'esprit de la Chambre de commerce, l'application de l'initiative 111 provoquera, en tout cas la première année, une réduction des rentrées fiscales. A terme toutefois, elle contribuera à retenir les contribuables aisés par davantage d'attractivité, ce qui fera augmenter la masse d'impôts.

L'initiative ne suffira pas à relancer la consommation et l'économie mais participe d'une politique générale salutaire pour Genève. C'est pourquoi la Chambre de commerce soutiendra l'initiative devant le peuple.

Audition de la Chambre fiduciaire, le 2 mars 1999 - M. Yvon de Coulon.

Sans que des chiffres fiables ne puissent être prononcés, l'extrapolation des demandes actuelles indiquerait une assez forte probabilité que de nombreuses personnes, pressées par le système fiscal, quittent le canton de Genève.

La concurrence pour Genève se situe au niveau des cantons de Vaud et du Valais, mais aussi de Londres et de Bruxelles. M. de Coulon estime que la baisse de la fiscalité de 10 à 12 % paraît pertinente. A cet égard, l'initiative 111 présenterait deux avantages : sécuriser les plus hésitants voire les plus décidés à partir, et avoir un effet attractif pour les contribuables extérieurs au canton. De ce fait, à moyen terme, il paraît concevable que la perte occasionnée par la baisse de taux serait compensée par le nombre des nouveaux contribuables.

En conclusion, le sens du témoignage de la Chambre consiste à dire qu'un nombre significatif de personnes estiment ne plus trouver leur compte à Genève.

Conclusion

Quelques comparaisons en chiffres

Un examen rapide de l'évolution intrinsèque des principaux paramètres du canton (tableau 1) confirme que l'évolution des recettes fiscales varie selon des écarts à peu près constants. A l'inverse, l'évolution résultante des charges est significative, entraînant une augmentation moyenne des déficits de l'ordre de 52 millions/an.

Le tableau 2 permet de comparer les dépenses publiques par habitant, et leur évolution vis-à-vis des dépenses suisses. On voit que les centres de charges continuent à augmenter à Genève entre 1993 et 1996, à l'exception de l'enseignement qui enregistre une économie de 600 francs par habitant, les frais de l'environnement et du trafic restant quant à eux constants.

Le tableau 3 confirme les écarts de fiscalité entre Genève et la Suisse ; entre Genève et Vaud qui accueille près de 18 000 pendulaires ; entre Genève et Zurich, cantons comparables quant aux prestations qu'ils fournissent et à leur niveau de vie socio-professionnel.

Effets de l'initiative 111

La première réduction de 5 %, effective dès le 1er janvier 1999, représentera une diminution des recettes d'environ 100 millions, soit une baisse relative de 2 % par rapport à un budget arrondi à 5 milliards (à l'heure où nous déposons le rapport, nous ne disposons malheureusement d'aucun chiffre budgétaire 1999).

Une deuxième réduction de 4 % déploiera ses effets lorsque la politique de redressement des finances aura fait ses preuves et que le déficit ne sera plus que de 150 millions.

La dernière réduction aura lieu, à hauteur de 3 %, lorsque le budget sera complètement équilibré.

Le manque à gagner pour l'Etat sera vraisemblablement de 100 millions, les autres tranches intervenant quand les effets d'une meilleure attractivité fiscale (et d'une meilleure attractivité en général !) seront opérants (c'est-à-dire dans un délai de 4 à 6 ans selon l'initiative).

Le tableau 4 simule l'incidence compensatoire sur les centres de charges, dans l'hypothèse où les 100 millions seraient économisés proportionnellement à ces centres de charges.

Bien sûr que d'autres scénarios sont à envisager, en fonction par exemple des départements et de leurs obligations législatives.

Mais aussi, en répartissant les économies sur les grands chapitres des dépenses : les dépenses générales, le fonctionnement public (son effectif et sa rémunération), les prestations à la population, les subventions aux associations privées.

Il appartiendra au gouvernement de proposer.

Mais un premier examen des chiffres, notamment en comparaison intercantonale et suisse, laisse apparaître que Genève dispose de certaines marges de correction si Genève le veut, sans pour autant déclencher d'effet cataclysmique.

L'audit demandé par le peuple et conduit par Arthur Andersen avait d'ailleurs mis en exergue que des économies de l'ordre de 150 à 200 millions pourraient être facilement réalisées par un effort de rationalisation dans le fonctionnement de l'Etat.

Enfin, devant l'évasion fiscale, le raisonnement ne consiste plus à se demander simplement s'il est raisonnable de perdre 100 millions de plus maintenant, il consiste à comparer cette perte, à celle générée par une érosion fiscale constante due au départ des contribuables.

C'est entre ces deux situations que nous devons choisir.

Faut-il rappeler que les actifs non résidents représentent 20 % de la population active totale et que l'on est passé de 3 à 20 % entre 1965 et 1995 ?

Le plan de redressement du 20 décembre proposé par le Parlement (à l'exception de l'Alliance de gauche) et le gouvernement fut un réel mais fugace, effort de convergence interpartis. Mais :

cet effort est arrivé trop tard ;

il n'a été précédé d'aucune remise en question et d'aucune réforme de l'Etat tout puissant ;

les citoyens ont été invités à payer eux-mêmes le prix de cet effort sans qu'aucune compensation ne leur ait été proposée en retour.

L'initiative 111 fait partie d'un plan de redressement. Ses propres atouts sont les suivants :

Elle symbolise une orientation politique forte et encourageante signifiant que le canton n'envisage pas de hausse de la fiscalité, préfigurant ainsi une réelle volonté de changement.

Elle appelle un effort collectif, mais en échange, elle implique un train de réforme de l'Etat et permet de lever la pression fiscale sur la classe moyenne et sur les plus hauts revenus, c'est-à-dire sur ceux qui font vivre Genève.

Le projet est donc motivant, y compris à l'intérieur de l'Etat puisqu'un grand nombre de fonctionnaires dont le salaire atteint 80 000 francs, subissent actuellement une pression fiscale trop forte.

Quant aux revenus inférieurs, rappelons que Genève détient déjà la fiscalité la plus sociale de Suisse. Il s'agira néanmoins de veiller à ce que les revenus les plus modestes bénéficient, en priorité, des prestations sociales qui leur sont nécessaires.

Enfin, dans un moyen terme, les contribuables qui avaient choisi de s'installer ailleurs risquent fortement de rester en terre genevoise. Le cas le plus sensible et le plus urgent des très nombreux cadres d'entreprises nationales et internationales pourrait permettre une compensation fiscale très rapidement.

L'intérêt de regagner des contribuables serait évidemment d'élargir, outre le montant des impôts, l'assiette fiscale genevoise !

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Débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de faire silence ! Monsieur Clerc, vous avez la parole... (Des députés s'invectivent. Chahut.)

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur de majorité. Je trouve un peu regrettable qu'au moment où nous allons débattre d'une initiative posant, à mon avis, un problème politique important, un problème de fond, il y ait autant d'agitation dans ce parlement et que l'on ne puisse pas suivre le débat ! J'attendrai, Monsieur le président, que le calme soit revenu pour intervenir !

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je suis contraint de suspendre la séance, puisque vous ne faites pas silence et ne rejoignez pas vos places !

La séance est suspendue à 20 h 55.

La séance est reprise à 21 h.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je donnerai deux explications par rapport au vote de la motion 1276 qui vient d'avoir lieu, suite à ce qu'on vient de me dire pendant la suspension de séance.

Premièrement, je note toutes les interventions : chaque fois qu'une demande de renvoi en commission est proposée, je fais immédiatement porter la discussion sur le renvoi en commission. En l'occurrence, je n'ai pas entendu de proposition de renvoi en commission, mais peut-être cela m'a-t-il échappé. M. Hausser est intervenu à 18 h 54 et je n'ai pas entendu une telle proposition de renvoi.

Deuxièmement, avant de passer au vote, je vous ai annoncé que nous votions le projet de loi, puis la motion, que nous adressions au Conseil d'Etat. Nous avons passé au vote et c'est après le vote qu'on a demandé le renvoi en commission, mais c'était bien sûr trop tard ! Le résultat était clair, il a été confirmé par un assis et levé. Nous poursuivons nos débats. Monsieur Clerc, vous avez la parole

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur de majorité. Le titre de cette initiative est en soi tout un programme. Au-delà de son aspect démagogique, c'est une conception politique du rôle et de la place de l'Etat que cette initiative entend défendre... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Aucune citoyenne, aucun citoyen ne paie des impôts pour le plaisir d'en payer. Les contributions publiques servent à répondre aux besoins collectifs et individuels que l'économie de marché n'est pas en mesure de satisfaire. Nous ne nous opposons pas à une baisse d'impôt pour le principe, mais parce qu'aujourd'hui notre collectivité cantonale ne dispose pas des moyens suffisants pour assumer les tâches qui sont les siennes, parce que le déficit est de l'ordre de 350 millions et la dette de plus de 10 milliards. La baisse d'impôts de 12% proposée par les initiants a pour objectif principal de contraindre à couper davantage dans les prestations. Le président de la Chambre de commerce et d'industrie ne s'y est pas trompé, puisqu'il a affirmé devant la commission fiscale, je cite : «Toutefois, la seule façon de réduire le train de dépenses est de fermer le robinet.»

Pendant quatre ans, sous le règne de la majorité de droite de ce Grand Conseil et avec l'appui d'un Conseil d'Etat monocolore, nous avons entendu un leitmotiv : il faut réduire le déficit et l'endettement ! Et voilà qu'aujourd'hui les libéraux, fers de lance de cette ancienne majorité, nous proposent ni plus ni moins que d'aggraver le déficit et l'endettement. A cet égard, je tiens à actualiser les chiffres fournis dans le rapport de majorité, au regard des comptes 1998 qui nous sont aujourd'hui connus. Si l'initiative devait être acceptée, ce serait 260 millions de recettes en moins pour le budget du canton et plus de 1 milliard cumulé en 2005, au terme de la baisse de 12% prévue par les initiants. Pour justifier le grand écart entre les promesses passées - réduire le déficit - et la réalité de l'initiative - qui consiste à l'aggraver - les libéraux tentent de nous démontrer qu'il est possible de réduire les impôts tout en maintenant les recettes de l'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, disent-ils, si vous acceptez l'initiative, les contribuables jouissant de revenus confortables vont affluer à Genève, et la baisse des revenus fiscaux sera compensée par l'arrivée de ces nouveaux contribuables ! Ce raisonnement est mystificateur, pour plusieurs raisons.

La première, c'est que la décision de s'établir ou non à Genève dépend de nombreux facteurs dont la fiscalité n'est qu'un aspect. La deuxième réside dans le fait que des expériences de ce type menées dans d'autres pays ne confortent pas la thèse des initiants. Enfin, la troisième, c'est que pour espérer la venue de ces contribuables il faudrait probablement baisser les impôts non pas de 12%, mais de 25 ou 30%, ce qui est tout simplement impensable, du seul point de vue budgétaire. (Exclamations.) Les initiants ont bien essayé de convaincre la commission que la baisse d'impôts pourrait constituer un facteur de relance de la consommation. Or, même la Chambre de commerce et d'industrie, favorable à l'initiative, s'est montrée sceptique à cet égard. Et là encore, les exemples étrangers montrent qu'il n'existe pas de corrélation entre les diminutions d'impôts et la croissance.

Dès lors que l'initiative aggraverait les déficits, les initiants se gardent bien de nous dire où ils entendent opérer des coupes. La rapporteuse de minorité nous propose une réduction linéaire sur tous les centres de charges ou, à choix : dans les dépenses générales - déjà comprimées - dans les effectifs et les salaires - je rappelle la réduction de 1500 postes déjà opérée et la perte de pouvoir d'achat de 10% supportée par la fonction publique - dans les prestations à la population - lesquelles ? - dans les subventions aux associations privées, et j'en passe ! Aucune proposition concrète... Non, excusez-moi, c'est inexact, une proposition concrète : il appartiendra au gouvernement de proposer ! Mesdames et Messieurs les députés, pour vous donner une idée de ce que signifierait la perte de 260 millions de substance fiscale, je précise que c'est l'équivalent de 2500 postes dans le secteur public.

Madame Spoerri, vous posez cependant dans votre rapport une excellente question : à quoi et à qui sert cette initiative ? A quoi, je l'ai déjà dit : à diminuer les recettes pour mieux justifier les coupes dans les dépenses et ainsi réduire le rôle de l'Etat. A qui, je vais vous le dire maintenant : la réduction d'impôts linéaire que vous proposez aurait pour conséquence une baisse d'impôts de 7 francs par mois pour un couple marié sans enfants, avec un revenu imposable de 10 000 F, soit l'équivalent d'un revenu brut entre 40 000 et 50 000 F, alors que la baisse d'impôts serait de 712 F par mois - cent fois plus - pour un revenu imposable de 300 000 F. Voilà à qui profitera cette initiative : aux plus hauts revenus de notre canton ! En fait, avec cette initiative, vous défendez une redistribution des revenus à l'envers.

Enfin, et j'en terminerai par là, la mise en oeuvre au 1er janvier 1999 de la réduction de la première tranche de 5% posera des problèmes considérables à l'administration fiscale et également aux employeurs chargés du recouvrement de l'impôt à la source. A l'heure où l'administration fiscale commence à émerger des dysfonctionnements qui l'ont paralysée pendant plusieurs années, faisant perdre des centaines de millions de recettes fiscales, l'acceptation de l'initiative causerait des dégâts considérables. C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission fiscale vous recommande de rejeter l'initiative 111, sans contre-projet.

Mme Micheline Spoerri (L), rapporteuse de minorité. Mme la présidente du département des finances n'a pas l'air très inquiète à propos de la mise en oeuvre dont vous parlez, Monsieur Clerc, puisqu'elle babille avec son voisin depuis le début de votre discours !

La situation financière de notre canton est désastreuse. Entre 1990 et 1998, la dette brute de l'Etat est passée de 4,3 à 10,2 milliards de francs, soit une augmentation moyenne et constante de plusieurs centaines de millions par an. Notre dette correspond aujourd'hui à 200% de nos revenus. L'Etat n'a pas les moyens de ses prétentions. Il endette ses contribuables à raison de 25 000 F par habitant et par an. Son endettement nous coûte 1,2 million par jour, somme que l'Etat est condamné à trouver pour fonctionner. La réduction du déficit de fonctionnement est donc un objectif impératif, le seul objectif que tous sans exception, dans cette enceinte, nous devons atteindre : ne plus emprunter pour fonctionner ! Inutile de nous perdre dans des combats d'académiciens, des hypothèses de théoriciens, la réalité est claire ; la population genevoise l'a très bien compris !

Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, l'argent qui vous est confié par les contribuables ne vous appartient pas. C'est ce qu'on appelle le bien commun, que vous êtes, sous serment, tenus d'utiliser non seulement au mieux mais pour les meilleurs résultats, comme dans un contrat d'entreprise. Quant à l'argent qui ne vous est pas donné par les contribuables, il ne vous appartient pas non plus ; vous l'empruntez, c'est ce qu'on appelle la dette, que vous êtes tous tenus, sous serment également, de rembourser à un certain prix et dans certains délais. Vous êtes donc très, très pauvres, vous n'avez pas d'argent, mais le peuple vous a élus pour accomplir des mandats, il vous a donné sa confiance, et c'est cela votre richesse ! C'est sur ce que la société attend de vous que vous devez travailler, et c'est avec les moyens qu'elle vous accorde que vous devez réussir. Avez-vous imaginé un instant que la société genevoise refuse de vous accorder autant de moyens ? Ou/et que les investisseurs de tout poil augmentent, à force de voir notre dette prendre l'ascenseur, le prix de l'argent qu'ils vous prêtent ? Ou encore que l'extrême fragilité de la fiscalité genevoise, décrite dans le rapport de minorité, ne vienne tout à coup faire basculer comme un château de cartes l'équilibre du canton de Genève ?

Mesdames et Messieurs les députés, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, réveillons-nous ! Nous devons impérativement maîtriser nos charges de fonctionnement. Et si nous devons le faire c'est pour être solides, pour avoir un Etat solide et nous armer sérieusement vis-à-vis de la concurrence internationale bien entendu, mais surtout et avant tout vis-à-vis de celle qui est à nos portes : la concurrence régionale, intercantonale et frontalière. Nous devons associer à cet effort nos concitoyens, sauf ceux qui ont perdu toute ambition et surtout tout espoir. Ce sont d'ailleurs ceux-ci et seulement ceux-ci que nous devons aider, car c'est souvent à force de souffrance et de renoncement qu'ils ont perdu leur espoir. Sauf ceux-ci, tous les autres sont prêts à jouer le jeu, pourvu que tous bénéficient d'une façon ou d'une autre de l'opération et qu'il ne s'agisse pas d'un jeu de dupes. Malheureusement, à cet égard, la crédibilité de notre gouvernement, sous la conduite de Mme Calmy-Rey, en a pris un sérieux coup, entre le 20 décembre et le 14 avril... (Commentaires.) Oui, heureusement, Monsieur Grobet, que vous ne vous êtes pas associés à nous, parce que, dans ce cas, ce n'aurait pas été 70% de non, mais 100% de non !

Enfin, nous devons empoigner le problème des recettes en général, des impôts en particulier. Impossible de laisser continuer à vau-l'eau, d'autant plus que là encore, qu'on le veuille ou non, la concurrence existe. Sans doute n'aurions-nous rien à y gagner si cette concurrence devenait débridée, mais nous sommes dans un Etat fédéraliste et cette concurrence existe, quitte à ce que nous ayons, à un moment ou à un autre, à en revoir les contours, à l'actualiser, notamment par la péréquation financière.

Le sens de l'initiative 111, c'est le sens de l'Histoire, et que personne aujourd'hui, encore moins qu'hier, Monsieur Clerc, ne vienne nous jeter à la tête les 100 millions que, mon Dieu ! il faudrait trouver ! Les annonces cataclysmiques du gouvernement en la matière ne sont tout simplement pas crédibles, pas sérieuses. Cela dit, on pensera ce que l'on veut de la démarche de Mme Calmy-Rey à propos des pendulaires, mais au moins aura-t-elle révélé l'importance qu'elle attache à ce phénomène, et ce n'est pas par hasard. Ce qui me donne l'occasion, Monsieur le rapporteur de majorité, avant de conclure, d'en venir à vos propos et à vos chiffres.

Après de savants calculs, vous tentez de nous démontrer que ces fameux mouvements pendulaires ne sont après tout pas si négatifs pour Genève. La démarche pragmatique de Mme Calmy-Rey anéantit toute votre démonstration ; de même, elle renforce la thèse de la minorité. Vous voulez par ailleurs nous convaincre qu'après tout nous ne payons pas autant d'impôts que cela, en comparaison internationale notamment ; que d'ailleurs, à ce propos, votre initiative sur l'augmentation de l'impôt ayant abouti, vous donnerez l'occasion aux Genevois de récolter 250 millions de francs supplémentaires, comme si l'on pouvait simplement forcer les gens à payer des impôts ! Si cela marchait, Monsieur le rapporteur, cela se saurait ! Aujourd'hui, la mobilité des individus nous oblige à réexaminer toutes nos analyses politiques, cette mobilité est devenue une nouvelle dimension incontournable.

Vous savez, Monsieur le rapporteur de majorité, l'estime sincère que je vous porte, j'ai eu l'occasion de vous la dire. Cependant, votre goût constant et immodéré pour les discours théoriciens m'effraie, en période de crise plus que jamais. Les théoriciens, me semble-t-il, sont mauvais conseillers. Je ne vous souhaite pas de devoir renouveler un jour, à force d'avoir échafaudé de mauvais calculs, le pénible mandat de M. Léon Nicole, tribun socialiste qui, ne parvenant plus à obtenir la trésorerie nécessaire pour faire tourner notre Etat par trop endetté, avait été contraint, en 1935, de diminuer les traitements des fonctionnaires de 10%. Si vous ne voulez pas en arriver là, c'est vous, forces politiques de gauche, qui devez convaincre que l'Etat providence est mort !

M. Daniel Ducommun (R). La position du parti radical a été précisée à plusieurs reprises, notamment dans le cadre de l'étude du projet de loi 7498, déposé en son temps par le parti libéral sur le même sujet. En substance, nous avions déclaré être opposés à une modification de l'assiette fiscale.

Nous précisons aujourd'hui qu'il s'agit avant tout d'une position liée à l'opportunité du moment, plus que d'un choix de société. Nous reconnaissons en effet que la charge fiscale des personnes physiques est lourde à Genève ; elle affecte notamment la classe moyenne, que nous considérons comme la colonne vertébrale d'une bonne partie de la santé de notre économie. De plus, nous sommes en situation de faiblesse face à la concurrence intercantonale. Enfin, certaines sociétés multinationales hésitent à proposer un domicile genevois à leurs cadres supérieurs. Ces éléments défavorables conditionnent une partie de notre groupe à soutenir l'initiative... (Commentaires.) Quoi qu'il arrive, Monsieur Blanc, nous ne nous abstiendrons jamais sur un tel sujet ! Mais est-ce le bon moment pour agir ? Pour des raisons de cohérence, nous disons non, car une baisse des recettes de l'Etat ne serait absolument pas compatible avec ce qui reste la priorité de notre parti, à savoir l'assainissement des finances publiques par un programme d'économies.

C'est vrai, nous constatons à regret que cette volonté n'existe toujours pas aujourd'hui, que ce soit au niveau des réformes institutionnelles ou, plus importantes encore, des réformes structurelles. Alors, Mesdames et Messieurs, agissons dans le bon ordre ! D'autant que la révision actuelle de l'imposition des personnes physiques, conformément à l'harmonisation fédérale, entraînera vraisemblablement d'autres manques à gagner, lesquels s'élevaient à plus de 30 millions lors de la première lecture du projet en commission fiscale. Si nous réduisons les impôts en l'absence d'un programme d'économies, nous ne sommes pas honnêtes avec nos concitoyens sur les conséquences au niveau des prestations offertes par l'Etat.

Ceci suscite même de notre part une intervention à un niveau constitutionnel. Par pure logique, si l'article 96 de notre constitution précise que, lorsqu'un député dépose un projet de loi comportant une dépense nouvelle, ce projet doit prévoir la couverture financière de cette dépense par une recette correspondante, nous sommes tentés de proposer un nouvel article constitutionnel qui préciserait que, lorsqu'un député dépose un projet de loi comportant une suppression de recettes, ce projet doit prévoir quelle est la dépense affectée par cette mesure. C'est une pure logique constitutionnelle.

Enfin, sans avoir l'outrecuidance de donner une leçon d'économie à nos cousins libéraux, je déclare qu'il n'est économiquement pas raisonnable de penser réaliser à court terme une action sur la consommation par le biais de la fiscalité. Nous n'avons pas la maîtrise de la planche à billets. A Genève, notre masse critique n'est pas suffisante pour réaliser une telle action et nous trouvons ridicules les références faites aux actions entreprises par Reagan aux Etats-Unis, ou encore en Nouvelle-Zélande - exemples entendus en commission fiscale. Nous savons qu'en période de morosité les moyens disponibles sont plutôt orientés vers l'épargne.

Enfin, nous savons aussi qu'une baisse d'impôts ne peut pas contribuer au retour d'exode des Genevois résidant sur sol vaudois notamment, l'orientation de ces derniers ayant plutôt été conditionnée par un habitat et un environnement plus favorables. L'arrivée de nouveaux contribuables à Genève, qu'ils soient des personnes physiques ou des personnes morales, est liée au développement d'une promotion économique dynamique et à des facilités administratives d'accueil, plutôt qu'à une réduction des entrées fiscales des personnes physiques, lesquelles affectent sans aucun doute l'équilibre à terme de nos prestations sociales.

En conclusion, la majorité du groupe radical, ce soir, s'oppose à l'initiative 111 !

Une voix. Bravo !

M. Michel Halpérin (L). Mesdames et Messieurs les députés, il y a deux ans, lorsque le projet de loi contenant à peu près les mêmes propositions que celles contenues dans cette initiative vous avait été soumis, j'ai le souvenir que les quolibets ont fusé de toutes parts, prétendant que ce projet était démagogique, qu'il était électoraliste et qu'il disparaîtrait aussitôt articulé. J'ai eu la satisfaction ce soir d'entendre que M. le rapporteur de majorité avait compris que ce projet était un projet fondamental, essentiel. C'est en effet un projet qui touche à l'organisation de la société dans son ensemble, car la fiscalité, sortie des chiffres en tant que tels, est effectivement la traduction arithmétique, mathématique et financière du modèle de société auquel nous voulons nous confronter ou auquel nous voulons adhérer.

Vous disiez tout à l'heure, Monsieur Clerc, que les citoyens ne paient pas leurs impôts avec plaisir ou volontairement. C'est probablement vrai, mais pas tant que cela : la Suisse, grâce à son système de démocratie directe, a souvent fait la démonstration que les citoyens, lorsqu'ils les comprennent et les acceptent, sont prêts à voter même des augmentations d'impôts. Notre peuple est civiquement instruit, il comprend que l'effort de chacun contribue à la collectivité, et c'est d'ailleurs le sens de la devise nationale : «Un pour tous, tous pour un» - principe qui n'a jamais été remis en question par notre initiative, pas plus qu'il ne l'avait été par le projet de loi, j'y reviendrai dans un instant. Dès lors, j'ai été un peu surpris, en lisant le rapport de majorité, d'y trouver un essai de psychanalyse sur les raisons profondes que les libéraux pouvaient avoir d'engager cette action. Et il faut lire, ligne après ligne, l'effort tortueux de M. Clerc pour essayer de comprendre ce qui nous anime, nous libéraux, comme si nous ne l'avions pas dit avec assez de clarté, sur tous les tons et constamment, en tout cas depuis dix ans !

M. Claude Blanc. Ce n'était pas assez... clair !

M. Michel Halpérin. Alors, Monsieur Blanc, nous allons essayer de clarifier tout cela !

Nous avons été confrontés, depuis des années, à l'insouciance navrante des autorités politiques du canton, ce parlement compris, s'agissant de dépenser l'argent des autres, et nos discours, aussi répétitifs qu'ils aient été, n'ont jamais apporté le commencement de sagesse que nous souhaitions. Nous avons, et je l'ai fait ici à bien des reprises dans les six derniers mois, formulé le voeu que nous nous rassemblions autour de la table ronde pour faire ensemble la démonstration que notre parlement et notre gouvernement étaient capables de s'engager dans une oeuvre commune. Mais le peuple nous a renvoyés à nos travaux et, autant que je le comprenne - mais M. Clerc le comprend mieux que moi, puisqu'il avait pressenti son refus, qu'il l'avait orienté - le peuple, me dis-je, doit être depuis le 20 décembre dans un état de ricanement perpétuel devant nos insuffisances ! Par les renvois brutaux qui sont les siens, que dit le peuple ? Qu'il ne nous fait pas confiance, que nous sommes incapables, sur les bancs du gouvernement comme dans cet hémicycle, de faire soigneusement ce qu'il attend de nous. Alors, Monsieur le rapporteur de majorité, les députés libéraux, puis les initiants, puis 12 000 signataires ont compris que, si la voie ne venait pas du peuple, nous ne ferions pas notre travail de rigueur et d'austérité. Vous n'aviez donc pas besoin de nous psychanalyser pour comprendre que nous continuions la même démarche d'austérité, démarche construite, consistant à dire que, si nous ne prenons pas nos responsabilités, le peuple nous forcera à les prendre. Vous nous avez compris, merci !

Je voudrais maintenant faire une rapide remarque à l'intention de M. le vice-président du Grand Conseil, qui a exprimé la position majoritaire, ou la position d'une partie - je n'ai pas bien compris combien de parties comptait son parti... - disons d'une partie majoritaire de son groupe. Sur le principe, si j'ai bien compris, il est grosso modo d'accord, et on peut le comprendre : après tout, si les radicaux ne défendaient pas la classe moyenne, Monsieur Ducommun, on se demande bien qui ils défendraient au sein de cette assemblée ! (Exclamations.) Sur le principe, vous êtes donc d'accord, mais vous vous interrogez toujours sur le moment opportun : le moment n'était pas opportun il y a deux ans et le moment n'est toujours pas opportun, dites-vous, parce qu'il ne peut l'être quand il y a déficit. Ici, je me permets de vous rappeler respectueusement à la lecture du texte de l'initiative, qui prévoit une diminution par paliers, paliers qui sont eux-mêmes liés à la réduction du déficit, ce qui devrait donc vous apparaître, à vous qui êtes un bon lecteur et un bon fiscaliste, une opportunité à exploiter. Si nous diminuons notre déficit, nous pouvons diminuer notre fiscalité.

Autre objection : il vous paraissait qu'au regard de l'article 96 de la constitution genevoise nous ne pouvions prendre ce genre de décision. Vous avez raison, mais vous avez perdu de vue que nous vous proposons un texte d'initiative, qui sera nécessairement voté par le souverain. Et le souverain saura bien, Monsieur Ducommun, trancher entre ce qui est bon et mauvais pour lui le moment venu, dans le pur respect de la constitution puisqu'il est constituant.

Enfin, votre allusion à Reagan et à la Nouvelle-Zélande serait pleine de pertinence, si nous avions pris pour seul modèle la Nouvelle-Zélande et Reagan. Mais voilà que le modèle se développe ! Alors, si je vous disais le Royaume-Uni, ou si je vous disais l'Allemagne de Kohl ou l'Allemagne de Schröder ? Sans doute me diriez-vous : encore cette mégalomanie typique des libéraux et d'Halpérin en particulier, qui s'imaginent que l'on peut comparer Genève aux Etats-Unis, ou à l'Allemagne, réunifiée de surcroît ! Mais si je vous avais fait la première comparaison qui me vient à l'esprit, Monsieur Ducommun, celle qui consiste à comparer Genève avec Zoug, ou avec Schwytz, que m'auriez-vous répondu ? Que j'ai fondu dans mes ambitions, que j'ai perdu le sens de la vraie dimension de Genève, que je compare notre géant cantonal aux lilliputiens de l'Est ? (Rires.)

Allons, soyons sérieux ! Nous savons que la compétition existe sur un plan international et sur un plan intercantonal. Et je dirais mieux, Mesdames et Messieurs les députés : gérer, c'est forcément se mettre en compétition ; c'est voir si les autres, avec le même argent, font mieux ou moins bien que nous. Quant à moi, je dis que les autres, avec moins d'argent, font mieux que nous. A cela, vous répondez que c'est exclu, qu'il faut uniformiser, refuser la concurrence, qui est pourtant le seul moyen de vérifier si nous gérons mieux ou moins bien que les autres.

J'en viens à l'essentiel. Vous prétendez, sur les bancs de l'opposition à ce projet, qu'en faisant perdre à l'Etat 100 petits millions - le rapporteur de majorité dit 88 - sur des recettes de 5 200 millions, nous allons mettre l'Etat dans une situation catastrophique. Non ! Nous allons le mettre devant ses responsabilités, mais parallèlement nous allons donner ce signe politique fort, signe qui émane d'une décision politique réfléchie et qu'attendent un certain nombre d'observateurs attentifs : ceux que Mme Calmy-Rey n'a pas encore besoin de pourchasser, parce qu'ils ne sont pas encore partis, dans l'attente de la réponse que la population donnera au signal que nous lui demandons d'envoyer ; ceux qui sont sur le ballant, parce qu'ils se demandent si cela vaudrait la peine de revenir ; et ceux, plus nombreux, plus importants, parce qu'ils représentent notre espérance et notre attente, qui font mois après mois des calculs pour savoir s'il est plus intelligent d'être ici que là-bas.

Une fois de plus, Mesdames et Messieurs, je vous invite à réfléchir au choix de l'intelligence. En effet, perdre 100 millions pendant un an pour en gagner 200, 500 ou 1 000 dans les années qui suivront, c'est faire le choix d'un pari optimiste sur l'avenir, mais c'est un choix qui nous engage et un choix politique. En effet, je rappelle que, si nous avons dû lancer cette initiative, c'est parce que Genève a de très loin la fiscalité la plus élevée de toute la Suisse, le coût le plus élevé par habitant, et pas nécessairement pour les meilleures prestations du pays. En comparaison, nous avons aussi la fiscalité la plus pointue du pays, avec une petite, toute petite frange de la population qui paie une grande, très grande part des impôts. Et l'absence éventuelle de cette frange de population, que vos habitudes, ici, dans cette salle, ont tendance à faire fuir, suffirait à réduire à néant l'autre volet de cette pyramide étonnamment fragile à laquelle nous sommes confrontés, qui fait de Genève - et je m'en félicite, comme tout le groupe libéral - le canton le plus solidaire et le plus social de ce pays.

Ainsi, la vraie, la seule, la dernière question, celle à laquelle le peuple répondra est : voulons-nous rester le canton le plus solidaire et le plus social de ce pays et, si oui, voulons-nous nous en donner les moyens ? Ou préférons-nous continuer cette politique absurde qui finira par appauvrir les pauvres, sans jamais avoir appauvri les riches, car ils nous auront claqué la porte au nez ? (Applaudissements.)

Mme Marianne Grobet-Wellner (S). Cette initiative va dans le sens contraire du redressement des finances cantonales souhaité par tous les partis représentés au Grand Conseil. En prévoyant une première baisse de 5% en 1999, à laquelle s'ajouterait une deuxième baisse de 4% en 2003 au plus tard, et une troisième baisse de 3% en l'an 2005, elle aura pour conséquence une aggravation du déficit et un alourdissement de la dette de centaines de millions de francs. La diminution des recettes ainsi accumulée pourrait totaliser près de 900 millions ; avant de pouvoir parler d'augmentation des recettes fiscales, il faudra d'abord avoir réussi à compenser ces 900 millions perdus. En l'état, rien ne nous garantit de pouvoir ne serait-ce que récupérer tout ou partie des ces recettes fiscales perdues. La seule certitude est une aggravation du déficit et de la dette de près de 900 millions, à compenser au bout de sept ans.

En ce qui concerne la fuite des contribuables aisés, le parti libéral fait état d'une telle fuite desdits contribuables vers le canton de Vaud pour justifier une sous-enchère fiscale. En supposant que cette sous-enchère aurait les effets bénéfiques escomptés pour le canton de Genève, rien ne nous garantit que nos voisins vaudois resteront sans agir pour rétablir la situation ! En outre, une telle sous-enchère n'aura probablement que très peu d'influence sur la décision d'un contribuable de s'établir à Genève. Les facteurs qui pèsent bien davantage dans une telle décision sont l'emploi, le logement, la qualité de l'enseignement, etc.

Par ailleurs, le parti libéral nous dit qu'en augmentant les revenus disponibles des contribuables, par une diminution de l'imposition de 12%, nous allons assister à une relance de notre économie grâce à une augmentation de la consommation. Ceci est vrai pour les bas revenus qui ont une propension de consommation élevée. Pour les revenus élevés, par contre, cette même propension de consommation d'un supplément de revenu disponible est quasi nulle. L'initiative n'aura donc aucun effet sur la consommation.

L'effet de la diminution de 12% des impôts sur les différents niveaux de revenus est illustré à la page 9 du rapport : moins de 100 F par année pour un revenu imposable de 10 000 F, et plus de 8 500 F pour un revenu de 300 000 F. Ainsi, si le parti libéral souhaite relancer l'économie par la consommation, c'est tout le contraire de ce qui est prévu dans l'initiative qu'il faudrait faire, à savoir : augmenter très fortement le revenu disponible des bas revenus, en diminuant très fortement celui des hauts revenus.

Ce sont les raisons pour lesquelles le parti socialiste vous recommande de suivre le préavis du rapport de majorité et de rejeter l'initiative sans contre-projet.

Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). L'initiative 111 suscite de nombreuses questions. Va-t-elle permettre de relancer l'économie ? Assurément non. A elle seule, elle ne sera en tout cas pas suffisante. Paie-t-on trop d'impôts à Genève ? La réponse est certainement oui.

Certes, en comparaison internationale, comme nous le rappelle le rapporteur de majorité, la fiscalité des personnes physiques suisse est relativement compétitive par rapport à d'autres, notamment par rapport aux pays du Nord. Mais la question n'est pas là. Lorsque l'on travaille dans la région lémanique et à Genève en particulier, on n'hésite pas entre s'installer à Genève ou à Malmö, mais dans des endroits plus proches de son travail ! Ce qui nous intéresse donc directement, c'est la comparaison intercantonale et à ce titre nous ne pouvons que déplorer que Genève ne soit guère compétitive, plus particulièrement en ce qui concerne la fiscalité des revenus moyens et supérieurs.

Si la lourdeur de la fiscalité genevoise n'a certainement pas provoqué d'exode vers les terres vaudoises notamment, il est certain qu'elle constitue un frein important à la venue de nouveaux contribuables. M. Clerc nous dit dans son rapport que l'on ne s'installe pas dans un canton pour ses impôts, mais pour son cadre, son environnement, pour ses infrastructures... Peut-être, mais ce n'est pas vérifié. A cet égard, une récente étude menée auprès des organisations internationales et des entreprises multinationales révèle en fait que la fiscalité est le critère premier, celui qui vient en tête de tous les critères d'attractivité d'une ville. Ce qui est en revanche certain, c'est que la fiscalité d'un canton peut, à elle seule - si elle est lourde, trop lourde, comme à Genève, en comparaison de ses voisins - déterminer le renoncement à s'installer dans un canton. Cela est d'autant plus vrai lorsque, à quelques kilomètres seulement, dans un environnement identique, on trouve une fiscalité nettement plus légère. Genève a ainsi vu de très nombreux contribuables préférer d'autres régions, notamment la Côte vaudoise.

Ce qui est également vérifié, c'est l'adage populaire - et nous connaissons tous évidemment la sagesse populaire - qui dit que trop d'impôts tue l'impôt ! Il est probable que le seuil à partir duquel toute nouvelle charge fiscale est contre-productive a été dépassé à Genève et que notre fiscalité contribue à chasser des contribuables potentiels. Le groupe démocrate-chrétien rejoint donc le parti libéral sur le constat que la fiscalité genevoise est trop lourde. Notre canton doit impérativement revoir sa fiscalité à la baisse et le fonctionnement de son appareil administratif, mais - car il y a un «mais» - une autre question se pose : si nous adhérons aux buts de l'initiative, est-ce vraiment le bon moment pour la mettre en oeuvre ?

Et c'est ici que notre analyse diverge de celle de nos amis libéraux. Bien que l'on constate une embellie, certes toute relative, sur le plan des finances publiques, les comptes de notre République sont toujours rouges, l'endettement atteint bientôt 11 milliards, on ne peut donc guère dire que la situation soit réjouissante. La situation économique est toujours sombre et l'Etat doit toujours faire face à d'importantes obligations. Sur ce point, nous sommes donc d'accord avec l'Alliance de gauche - dont nous nous surprenons à apprendre, dans le rapport de M. Clerc, qu'elle a un soudain et inattendu souci d'équilibrer les finances cantonales - et ne pouvons abonder dans le sens de l'initiative s'agissant de l'opportunité du moment choisi pour la soumettre au peuple. Nous estimons qu'elle est prématurée et que nous ne pouvons nous permettre aujourd'hui de grever davantage les finances cantonales. Par conséquent, le groupe démocrate-chrétien, fidèle au vote de ses députés en commission, s'abstiendra.

M. David Hiler (Ve). L'essentiel des arguments contre l'initiative du parti libéral a été donné, soit par M. Bernard Clerc, soit par Mme Grobet-Wellner. Toutefois, quelques éléments nouveaux - puisque nous n'avons pas le plaisir, Monsieur Halpérin, de vous compter parmi les membres de la commission fiscale - ont été développés, et l'un d'eux est assez intéressant.

En réalité, vous nous dites, Monsieur Halpérin, que les prestations dont nous disposons dans ce canton sont trop cher payées. Jusqu'à un certain point, nous pourrions vous suivre, mais votre proposition pour améliorer disons le rapport qualité-prix de ces prestations consiste à mettre l'Etat sous pression. Or, il me semble que l'Etat est maintenant sous pression depuis huit ans ; que le fait d'avoir aujourd'hui plus de 10 milliards de dettes et de nous être endettés à une vitesse très impressionnante est une pression ; que la succession des déficits est une pression ; et qu'à vous suivre, soit cette pression a été suffisante, soit rien n'y fera ! Et certainement pas le fait de dégrader encore la situation.

Ce qui est plus paradoxal, venant, non des bancs d'en face en général, mais des bancs du parti libéral, c'est d'entendre que la gestion de l'Etat est très mauvaise, alors que pendant quatre ans les libéraux étaient très largement représentés au Conseil d'Etat ! Avec une majorité parlementaire qui vous était toute dévouée, avec trois conseillers d'Etat et des finances publiques en constante dégradation, comment se fait-il que le miracle ne se soit pas accompli et que nous n'ayons pas vu une amélioration spectaculaire de la gestion, grâce à vos excellents conseils ? Nous sommes donc obligés de récuser cet argument comme les autres, et de constater que la seule conséquence de l'initiative sera un déficit croissant, une gestion de plus en plus difficile. Dans un monde où depuis fort longtemps les gros ont un avantage très décisif sur les petits, votre initiative tend simplement à enregistrer cet avantage et à l'accroître encore.

Peut-être le peuple vous suivra-t-il, mais ici la responsabilité du Conseil d'Etat me semble importante : puisque le parti libéral prétend que c'est au Conseil d'Etat de prendre les décisions, que le Conseil d'Etat nous les fasse connaître ! Que nous sachions à l'avance ce que nous allons perdre et que le peuple puisse trancher en toute connaissance de cause me paraît la moindre des choses. Un chiffre indiqué par M. Bernard Clerc tout à l'heure est significatif : si ma mémoire est bonne, M. Clerc a dit que la perte fiscale consécutive à l'initiative équivalait à 2500 postes. Or, 2500 postes, c'est beaucoup de prestations en moins, beaucoup de chômage en plus et probablement aussi beaucoup de recettes en moins. Il faudra bien décider où on trouvera l'équivalent de ces 260 millions, qui ne signifient rien pour la plupart des gens. Et que le parti libéral ne nous dise pas alors que ce n'était pas ce qu'il voulait ! Puisqu'il renvoie la balle au Conseil d'Etat, que celui-ci s'en saisisse et que le peuple se prononce en toute connaissance de cause !

En conclusion, nous trouvons désolant qu'au moment où une majorité de plus en plus large est convaincue qu'il faut revenir à l'équilibre budgétaire un parti, qui pendant de longues années en a fait son cheval de bataille, sabote tout et donne un coup pied de l'âne véritablement malvenu ! 

M. Michel Balestra (L). Certains prétendent que la question que posent les initiants se limite à celle-ci : voulez-vous baisser les impôts, ou plus exactement voulez-vous perdre 88 millions dans la première étape ? Mesdames et Messieurs, si l'initiative 111 était aussi simpliste et populiste, je proposerais comme vous de voter non ! Mais, rassurez-vous, je vais vous demander de préaviser favorablement cette initiative, d'autant plus convaincu - comme vous, je l'espère - par le discours enthousiasmant et vrai de mon chef vénéré ! (Exclamations et rires.)

M. Clerc nous dit en substance dans son rapport : la Suisse est peu taxée en comparaison internationale et Genève n'est pas le canton le plus taxé de Suisse romande. Nous sommes tous d'accord avec lui et je confirme même que cette fiscalité raisonnable est un des avantages décisifs qui font la compétitivité de notre pays et qui contribuent à la richesse que nous sommes capables de générer, qui est notre richesse à nous tous. Mesdames et Messieurs les députés, qu'il y ait de plus en plus de success stories - que vous résumez à des millionnaires - doit réjouir tout le monde, car chaque réussite individuelle profite à la collectivité tout entière.

Revenons aux arguments de M. Clerc, dans son excellent rapport de minorité... (Exclamations.) ...ou plutôt de majorité, qui a le premier défaut d'être justement un rapport de majorité, et le second de faire une démonstration fausse avec des arguments crédibles. J'y lis que le nombre d'actifs entrants est supérieur ou égal au nombre d'actifs sortants : je n'ai pas vérifié les chiffres, mais je ne doute pas des chiffres de M. Clerc, car c'est un député sérieux ! En l'occurrence, je lui rappellerai le problème chinois : «Il ne suffit pas d'accompagner mille brebis pour être un berger, encore faut-il leur montrer le bon chemin» ! Or, M. Clerc est un bon leader mais un mauvais berger, car par cette démonstration il ne montre pas le bon chemin. En effet, le nombre global des actifs non résidents est, lui, en augmentation constante depuis trente ans et cette évidence n'est contestée par personne.

J'arrive ici au point crucial de la démonstration qui vise à prouver que celle du rapport de majorité est spécieuse. Genève est le canton le plus social de Suisse, Genève est parallèlement un des cantons les plus taxés de Suisse. Résultat : le canton de Genève est un canton très intéressant pour les revenus imposables de moins de 80 000 F, et un canton effrayant pour les revenus de plus de 150 000 F !

Un budget de 5 milliards divisé par 400 000 habitants, c'est 12 500 F par habitants, soit une somme approximative de 31 000 F par ménage. Les impôts annuels payés par un contribuable qui a un revenu de 80 000 F sont d'un peu plus de 15 000 F, soit la moitié du coût par ménage. Source : Rapport Bernard Clerc du 12 avril 1999 ! Un contribuable qui a un revenu de 150 000 F équilibre les coûts par ménage avec 32 000 F d'impôts payés. Même source. Un contribuable qui a un revenu de 300 000 F laisse une marge nette de 40 000 F, en payant 71 240 F d'impôts pour la solidarité. Même source encore.

Une fois ce constat admis, un berger a peu de solutions : soit économiser sur les charges de l'Etat, soit attirer une plus large part de ces contribuables à forte marge fiscale positive - voilà une nouvelle notion sur laquelle il faudra que vous réfléchissiez. Mesdames et Messieurs, le solde migratoire est positif, dites-vous. La belle affaire ! Le solde migratoire des hauts revenus, lui, n'est pas positif et nous devons mettre en place une politique d'inversion de ce phénomène, car comment continuer à assurer notre nécessaire tâche de redistribution, sans une proportion plus importante de contribuables à forte marge fiscale positive ? En ce sens, l'initiative libérale est une vraie bonne solution, pour éviter de couper dans les charges sans continuer d'augmenter la dette, qui sinon deviendrait abyssale.

Vous n'avez pas de stratégie de substitution gagnante. Votre proposition d'augmentation d'impôt est de nature à amplifier le phénomène et non à le résorber, c'est-à-dire de nature, selon la démonstration que je viens de faire, à paupériser l'Etat ; c'est ce qu'on appelle le syndrome de New York. Mme le ministre des finances partage ce constat, puisqu'elle aimerait taxer les confortables contribuables vaudois. Mais sa stratégie n'est pas gagnante non plus ; elle est courageuse, mais condamnée à l'échec. La seule solution est de nous suivre en appuyant l'initiative 111, ce que je vous recommande de faire dans l'intérêt de tous les Genevois. Si vous ne le faites pas, dommage pour vous : vous aurez manqué le train. Mais les Genevois, eux, comprendront.

Mesdames et Messieurs les députés de l'Alliance de gauche, les Genevois vous ont suivis pour refuser quelques centaines de millions d'impôts supplémentaires prévus par la table ronde ; nous ne vous en avons pas fait grief, parce que les accords de la table ronde impliquaient que nous suspendions notre réflexion sur la baisse de la fiscalité. Le débat politique reprend et aujourd'hui les mêmes Genevois nous suivront dans notre projet mobilisateur et ambitieux pour Genève, et vous n'aurez pas le droit de contester ce choix ! 

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur de majorité. J'ai été, comme la majorité de cette assemblée sans doute, impressionné par la magnifique plaidoirie de Me Halpérin, mais aussi stupéfait, car j'ai eu l'impression qu'en défendant cette initiative il défendait la veuve et l'orphelin ! En quelque sorte, ce qui l'intéresse, c'est de pouvoir maintenir les prestations sociales à Genève, c'est d'avoir une fiscalité qui préserve les petits revenus ; pour cela, il faut que beaucoup plus de riches viennent alimenter les caisses de l'Etat et on va donc baisser les impôts ! Voilà en substance, mais dit avec beaucoup moins d'éloquence, ce qu'a déclaré Me Halpérin.

Vous avez dit, Me Halpérin, que dans mon rapport je faisais la psychanalyse des libéraux. Non ! Je n'ai pas fait de psychanalyse, j'ai simplement analysé le discours libéral en matière d'impôts. A cet égard, si votre initiative ne pose pas l'ensemble de la problématique, elle pose fondamentalement celle du rôle de l'Etat, et votre objectif, poursuivi dans nombre d'autres pays que les milieux libéraux mettent en avant, est bien de réduire le rôle de l'Etat par une diminution de ses recettes.

J'en viens aux chiffres que vous avancez et que curieusement vous minimisez beaucoup. Vous soulignez que l'initiative prévoit des paliers, mais je rappelle qu'en 2003 le palier est impératif, de même qu'en 2005. J'ai repris, dans mon rapport, les chiffres fournis par le rapport du Conseil d'Etat à l'époque, qui étaient basés sur des comptes plus anciens et que je me suis permis d'actualiser, puisque nous connaissons les résultats des comptes 98. En l'occurrence, la perte fiscale est de 109 millions, la première année. A partir de 2003, elle est de 195 millions et, à partir de 2005, elle est de 261 millions ! Alors, évidemment, c'est un peu différent du chiffre de 88 millions par année, qu'on va prétendument pouvoir récupérer avec la venue d'autres contribuables. En réalité, d'ici 2005, on peut s'attendre à plus d'un milliard de perte de recettes fiscales.

Quant à M. Balestra, ses arguments consistent à dire qu'actuellement le nombre des personnes fortunées n'augmente pas, puisqu'elles partent essentiellement dans le canton de Vaud, et que celles qui restent paient toujours plus d'impôts. Malheureusement pour M. Balestra, les comptes 1998 disent le contraire : les contribuables qui ont un revenu supérieur à 500 000 F imposable sont une centaine de plus que l'année précédente. Ils étaient 592, ils sont 698 ! Alors qu'est-ce à dire ? Nous trouvons-nous face à des individus un peu masochistes, qui préfèrent venir à Genève pour payer des impôts plus élevés que dans le canton de Vaud ? Selon votre raisonnement, Monsieur Balestra, on aboutit à ce type de conclusion.

En fait, si le nombre de ces contribuables augmente, comme ceux de la tranche juste en dessous qui déclarent entre 300 000 et 500 000 F, ce n'est pas parce qu'à Genève on paie trop d'impôt, c'est parce que ces contribuables ont un intérêt à s'installer à Genève, et cet intérêt dépasse de beaucoup la seule question de la fiscalité. La baisse d'imposition que vous proposez n'a donc, de ce point de vue, qu'un rôle non pas nul mais négligeable. Voilà les points qu'il me paraissait important de souligner dans ce débat.

M. Nicolas Brunschwig (L). M. Hiler a fait une ou deux affirmations qui sont au coeur même de la problématique. Il part, comme M. Clerc d'ailleurs, de l'idée que nous allons perdre des recettes fiscales. Je n'en suis pas du tout convaincu et dans une vision dynamique personne ne peut faire ce type de raisonnement.

Prenons un exemple très actuel : si la première année de baisse avait été 1998, nous aurions malgré tout enregistré une augmentation des recettes fiscales, puisque Mme la présidente du département des finances nous a annoncé avec plaisir et fierté qu'elle avait réussi - en grande partie grâce à ses services et à sa compétence, dont nous ne doutons pas - à augmenter les recettes fiscales de plus de 7%. La première réduction prévue par l'initiative étant de 5%, nous aurions enregistré un solde positif des recettes fiscales. En l'occurrence, il est dommage que nous ayons raté d'une année le bon timing, car les libéraux se seraient alors vraiment montrés forts et compétents ! Cet exemple démontre à l'évidence que le niveau des taux de fiscalité ne sont de loin pas l'unique ou le principal critère qui permette de déterminer les revenus fiscaux globaux.

Mme Grobet-Wellner a parlé de sous-enchère fiscale. Cet argument est d'ailleurs revenu très régulièrement en commission fiscale - où je siégeais - et si nous étions Schwytz ou Zoug, qui se battent pour les taux les plus bas, je pourrais comprendre le propos. Mais, alors que nous rivalisons avec le canton du Jura pour les taux les plus élevés, je crois qu'il vaut mieux parler de surenchère, plutôt que de sous-enchère. A cet égard, nous ne revendiquons pas d'être les meilleur marché de Suisse, nous voulons simplement ne pas être les plus chers de Suisse. Evidemment, M. Clerc, qui a le don de prendre les chiffres qui conviennent à ses démonstrations et qui adore les moyennes - bien qu'en bon statisticien il sache qu'une moyenne ne démontre rien du tout - prend évidemment la fiscalité moyenne pour prouver que Genève est à peine au-dessus de la moyenne nationale. En fait, Genève est quand même à 120%, c'est-à-dire grosso modo plus 20%, et la moyenne de M. Clerc mélange des indices totalement différents.

Nous l'avons dit à moult reprises, mais je crois qu'il faut le répéter : Genève est un canton très bon marché, très social, très solidaire pour les revenus inférieurs à 60 000 ou 70 000 F, et très cher, le plus cher pour les revenus supérieurs à 80 000 ou 90 000 F, sans parler des revenus de 150 000 F qu'évoquait Michel Balestra tout à l'heure. Il est vrai que, pour les revenus les plus élevés, nous sommes encore plus chers, mais nous sommes déjà très chers pour les revenus moyens, et c'est surtout la classe moyenne qui est pressurisée plus que de raison dans notre canton.

En ce qui concerne l'exode dans le canton de Vaud, nous n'avons jamais prétendu que cet exode se concrétisait de la manière dont vous l'évoquez souvent : la famille moyenne qui prend femme, bagages et enfants et va s'acheter sa petite maison de l'autre côté de la frontière ! Cet exode est beaucoup plus pernicieux et passe par le fait que les personnes s'implantant professionnellement à Genève, en provenance de Suisse alémanique ou de l'étranger, travaillant dans des multinationales ou dans des grandes banques, choisissent de résider dans le canton de Vaud voisin et non pas à Genève. C'est un phénomène que vous ne pouvez ignorer ; nous connaissons tous des dizaines de personnes qui ont fait ce choix, prioritairement pour des raisons fiscales même si, dans les déclarations publiques et officielles, cet argument n'est pas facilement mis en avant. En l'occurrence, le résultat des urnes constituera un sondage très précis sur ce genre de réaction et de comportement.

Toujours à propos des comparaisons faites dans le rapport de majorité, M. Clerc compare les taux de fiscalité globaux des différents pays de l'OCDE. Effectivement, la Suisse se trouve plutôt dans le peloton ayant des taux relativement faibles par rapport au revenu national, au PIB. Mais il faut ici distinguer les deux grandes catégories d'impôts existantes, à savoir les impôts directs sur le revenu et les impôts à la consommation. Monsieur Clerc, en Suisse, les impôts directs sur le revenu sont extrêmement élevés, tout particulièrement à Genève, et les impôts à la consommation, en particulier la TVA, sont beaucoup plus bas que dans tous les pays de l'OCDE et beaucoup trop bas d'ailleurs par rapport aux normes européennes. Alors, si vous voulez qu'on se rapproche des normes de l'OCDE, nous sommes tout à fait d'accord de vous suivre : nous sommes prêts à vous suivre sur des augmentations des impôts à la consommation, entre autres de la TVA, et sur des diminutions des impôts directs. D'ailleurs, les libéraux avaient fait une proposition dans ce sens, en suggérant de supprimer l'impôt fédéral direct. Ainsi, les taux suisses seraient plus compatibles avec les normes de l'OCDE. Nous serions donc prêts à nous rallier à un tel projet, mais je doute que vous nous accompagniez sur ce chemin-là et que vous alliez jusqu'au bout de votre démonstration !

En l'état, notre fiscalité directe est excessivement lourde et pénalisante. Le débat que nous proposons aujourd'hui - et nous assistons plutôt à un bon débat dans cette enceinte, ce qui est plutôt rare - concerne une vraie question politique qui doit et aura le mérite d'être posée à l'ensemble de la population. Elle va susciter des réflexions intéressantes dans bien des partis, en particulier les partis de l'Entente. A cet égard, les positions des radicaux et des démocrates-chrétiens, lors de l'étude du projet de loi, puis de l'initiative en commission fiscale, ont été très différenciées, avec des oui, des non, des abstentions. En fait, en commission il y a eu des abstentions et des oui, ou plutôt un oui, Monsieur Froidevaux : vous représentez donc une toute petite partie de votre parti... (Commentaires. Le président agite la cloche.) ...mais je suis sûr qu'au cours des débats ici en séance plénière et en assemblée générale, vous en rassemblerez une partie plus importante !

En tout cas, cette initiative suscitera des réflexions tout à fait intéressantes pour l'avenir de notre canton et nous nous réjouissons d'ores et déjà de participer éventuellement à ces débats contradictoires, ici et là, même dans vos partis. 

Mme Micheline Spoerri (L), rapporteuse de minorité. Je voudrais revenir sur quelques points évoqués. Tout d'abord, et c'est une discussion que nous avons souvent eue avec le rapporteur de majorité, nous n'avons jamais caché que nous voulions réduire la taille de l'Etat. Jamais ! Cela n'a jamais été un secret, un tabou : il est clair que la volonté des libéraux est d'accorder à l'Etat, pour une même qualité de prestations, des moyens plus réduits.

Lorsqu'on se réfère au tableau des dépenses publiques par habitant, à la page 23 de nos rapports respectifs, on voit que les comparaisons entre Genève et la Suisse démontrent de toute évidence que, pour un certain nombre de prestations, nos coûts sont considérablement plus élevés. Il en va de même lorsqu'on compare Genève, non pas à la Suisse, mais à d'autres cantons comme celui de Zurich, qui a un niveau de vie qui ressemble au nôtre et qui a pourtant une fiscalité nettement plus basse. Ici, je reviens donc sur ce qu'a dit M. Brunschwig : il est invraisemblable de continuer à contester que Genève ait des impôts élevés !

Monsieur Clerc, vous utilisez un indice général et, bien sûr, nous remontons ainsi dans le classement, parce que l'indice général tient compte du bas de la courbe, donc d'une fiscalité sociale favorable aux bas revenus, ce dont tout le monde se félicite. Mais, en réalité, on voit fort bien, à la page 24 du rapport, qu'en dehors du niveau général de la fiscalité c'est la progressivité de l'impôt qui pèche à Genève. Je l'ai précisé dans mon rapport et j'ajoute ici qu'en dehors de la baisse générale du taux d'imposition nous ne pourrons pas faire l'économie du travail qui consistera à revoir, courageusement, la courbe fiscale. Et cela non plus, les libéraux ne l'ont pas caché.

Deuxième remarque : il ressort du rapport de majorité et des propos tenus, comme de ce qu'on entend çà et là dans l'opposition à la thèse libérale, que le flux migratoire certes existe, mais qu'après tout c'est un mal nécessaire, que ce n'est pas si grave que cela. Mesdames et Messieurs, certains chiffres sont incontournables et, comme je le disais dans ma première déclaration, l'intervention de Mme Calmy-Rey à propos des pendulaires vaudois est à cet égard déterminante : vous pensez bien que Mme la présidente du département des finances ne serait pas entrée dans une procédure aussi lourde et aussi courageuse, il faut le dire, si le jeu n'en valait pas la chandelle ! En fait, que ces contribuables potentiels soient 18 000, 15 000, 14 500 ou je ne sais combien, l'essentiel est qu'ils représentent un poids important, une contribution fiscale qui échappe aux caisses genevoises.

J'aimerais dire une troisième chose, mais avant je m'adresserai à M. Hiler qui ironisait sur le précédent gouvernement : Monsieur Hiler, chacun fait ce qu'il peut ; vous serez peut-être un jour au gouvernement et j'espère que vous serez également en mesure de faire le mieux possible ! Le gouvernement précédent a fait des efforts, mais ils ont été insuffisants. Cela dit, la réalité est que la dette augmente chaque année de centaines de millions, de 500 à 600 millions par année ! Tout le monde ferme les yeux, personne ne bronche et quand les libéraux proposent une première réduction, soit, mais une première réduction qui nous laisse largement le temps de réagir, de 100 millions - 100 millions en regard des centaines de millions dont je parlais - tout le monde crie à la catastrophe ! Mais, je rêve, Mesdames et Messieurs ! Nous perdons complètement la notion, la proportion et l'identification des problèmes que nous avons à régler !

Le problème de Genève, avant tout, c'est sa dette. D'ailleurs, dans le tableau de présentation du département des finances, à la page 14, on voit à quel point - et cela nous rassure - la dette, sa variation, son évolution est prise en compte. Je lis : «La dette doit être mise en relation avec la valeur des infrastructures, avec la qualité et la quantité des prestations fournies, la répartition des tâches entre canton - là on en revient à la péréquation financière - les actifs productifs d'intérêts...», et en conclusion : «La réduction du déficit de fonctionnement devient impérative.» Mesdames et Messieurs, c'est effectivement la seule chose dont nous devrions discuter ce soir ! Que certains puissent encore le contester est parfaitement affolant pour l'avenir de Genève. En voulant laisser croire aux Genevois que vous avez fait, Mesdames et Messieurs, ou que nous avons fait, ensemble, tout ce qu'il fallait pour réduire nos dépenses, nous ne sommes pas crédibles, nous sommes ridicules. J'ai le regret de vous le répéter, après vous l'avoir dit en introduction, comme dans mon rapport.

A notre sens, ce qui reste important - oui, Monsieur Clerc ! - c'est que ce canton puisse continuer à assurer des prestations sociales de bon niveau, en particulier pour les gens qui en ont vraiment besoin, mais nous sommes convaincus qu'on peut faire mieux avec moins d'argent, et je reviens ici sur les comparaisons avec les autres cantons. Le mérite de notre initiative est effectivement de mettre sous pression l'ensemble des autorités politiques, comme disait M. Hiler à juste titre, parce que de toute évidence, dès qu'il y a une embellie, on continue à jouer à la cigale, et cela malgré les efforts faits au niveau des réserves, des amortissements, etc. En l'occurrence, ces 100 millions, au lieu de les mettre en réserve, on peut aussi les rendre aux Genevois, Mesdames et Messieurs, et c'est ce que nous vous demandons !

Mme Christine Sayegh (S). «Réduisons les impôts !», quelle phrase séduisante, enjôleuse, Mesdames et Messieurs les députés... Mais la simplicité de cette phrase n'est-elle pas dangereuse ?

Elle nous fait croire que réduire les impôts des personnes physiques est la solution de relance de l'économie, alors que les arguments à l'appui de cette idée audacieuse ne sont guère convaincants. L'excellent rapport de majorité le démontre avec pertinence, ainsi que les chiffres notamment cités par ma collègue Marianne Grobet-Wellner. Personne d'ailleurs n'ose s'aventurer dans des prévisions positives, car c'est un pari. Et le représentant de la Chambre fiduciaire l'a dit et répété en commission : c'est bien un pari.

Or, Mesdames et Messieurs les députés, c'est une pesée d'intérêts qu'il nous faut faire entre le pari qu'on nous propose et la société que l'on souhaite. Si, pour les initiants, la vision économique de la société est la seule qui les préoccupe, pour nous, socialistes, la vision humaine est plus importante et le manque de recettes qui résulterait de cette initiative engendrerait une réduction drastique des prestations sociales pendant plusieurs années, en attendant la relance qui n'est pas si sûre. Nous refusons catégoriquement ce pari.

Mesdames et Messieurs les initiants, vous voulez nous faire jouer au jeu du hasard et tenter de réaliser vos objectifs du moins d'Etat ! Vous n'avez donné aucune explication sur les risques de votre initiative : comment couvrir les dépenses sociales, par exemple ? Enfin le «produit» de cette réduction fiscale ne se dépensera pas forcément à Genève. Il ne se dépensera peut-être même pas du tout, car il sera vraisemblablement épargné. Pour mettre une cerise sur ce gâteau empoisonné, cette initiative a un effet rétroactif au 1er janvier 1999. Ce pari n'est pas tolérable pour un parlement responsable !

M. Armand Lombard (L). Je voudrais revenir, aussi brièvement que possible, sur trois points qu'il me paraît important de relever dans le cadre de la proposition libérale.

Tout d'abord, l'on nous dit que nous travaillons à saper le rééquilibre budgétaire. Or, je crois que nous travaillons simplement sur deux niveaux : le moyen et le long terme. Nous travaillons à l'équilibre budgétaire sur le moyen terme, à trois ans, à cinq ans, grâce aux décisions que nous prenons ici, dans ce plénum, en commission. Nous travaillons d'ailleurs tous au rétablissement de l'équilibre d'ici quelques années ; Dieu sait si nous nous battons, les uns les autres, sur les moyens, mais nous essayons tous d'arriver à cet équilibre et vous savez bien que les libéraux n'ont pas abandonné cette bataille-là. En revanche, la bataille que nous lançons avec l'initiative pour la diminution des impôts, c'est une bataille à long terme. C'est sur le long terme et sur une stratégie véritable que nous voulons créer le changement dans cette République.

Le deuxième point que je voudrais relever, c'est qu'à l'évidence la décision est politique. La décision est politique, car une diminution de l'impôt - c'est vrai, Monsieur Clerc - freinera l'Etat, freinera les développements possibles de la machine étatique, freinera le développement fou, énorme de la chose publique. Et ce n'est pas parce que nous n'avons pas su, comme le disait M. Hiler, pendant les quatre ans précédents, ou les vingt ans précédents, ou même les trois générations précédentes, éviter que l'Etat gonfle, devienne trop difficile à gérer, trop coûteux, ce n'est pas parce que nous n'y sommes pas parvenus jusqu'ici que nous n'allons pas essayer de le redimensionner et poursuivre des réorganisations qui nous paraissent nécessaires. Il est évident qu'en diminuant les impôts nous freinons l'Etat, mais nous nous efforcerons aussi de réorganiser l'Etat pendant cette période. C'est d'ailleurs bien ce qu'ont voulu nous signifier les 70% d'électeurs qui nous ont envoyé une gifle monumentale le 20 décembre, en refusant l'accord de la table ronde : ils nous ont demandé de réorganiser l'Etat, c'est ce que nous faisons.

Nous proposons une diminution d'impôts, parce que nous pensons que les fonds qui reviennent à l'Etat actuellement, au travers des impôts, doivent servir à augmenter la capacité d'investissement, la capacité d'achat des entreprises privées, le potentiel de développement des entreprises, l'épargne, qui est si nécessaire pour constituer les fonds propres des nouvelles entreprises. Ces montants qui n'iront pas à l'impôt mais qui iront à l'économie privée contribueront à créer des emplois et donc de nouveaux contribuables, à créer du chiffre d'affaires. En l'occurrence, Madame Sayegh, vous êtes totalement injuste et vos propos dépassent sans doute largement votre pensée. Je me permets de le dire, car je vous connais et je connais votre pensée dans ce domaine. Vous savez bien que nous ne cherchons pas simplement à créer une gigantesque épicerie néo-libérale dans cette République, que nous avons aussi un projet de société. Mais nous pensons que cette société doit se bâtir sur des projets qui naissent au sein de la population, au sein des entreprises, et pas trop au sein de l'Etat - de même que nous voulons une culture plus ouverte qu'une culture d'Etat.

Monsieur Clerc, il me semble que notre projet est un projet de flux financiers à long terme totalement keynésien, et je crois me rappeler que M. Keynes était un brillant gauchiste, tout lord qu'il était ! Si bien que nous pourrons peut-être trouver une certaine entente sur ce sujet.

Dernier point : M. Clerc parle de l'Etat, de l'Etat uniquement et d'une économie d'Etat. Or, nous sommes dans un partenariat économique et nous ne pouvons ne considérer que les besoins de l'Etat, qui s'en met un peu plus ou un peu moins dans la poche. Pour nous, il s'en met actuellement un peu trop dans la poche et nous voulons y remédier, car la société se compose de trois entités : l'économie et les entreprises, les associations, les contribuables, et enfin le politique. Je vous rappellerai que 170 000 personnes sont employées par le secteur privé, alors que 30 000 le sont par l'Etat ; que le budget de l'Etat de 5 milliards se compare à un revenu cantonal de l'ordre de 20 milliards. Dans le secteur privé, dans le domaine de l'entreprise, dans le domaine de l'activité dynamique réside toute une part de l'économie et nous ne pouvons pas seulement faire naître des projets d'Etat pour faire vivre le pays et la République.

C'est pour ces trois raisons, sur lesquelles je voulais insister, que je suis favorable à l'initiative. J'espère qu'au minimum, si vous ne la suivez pas, elle permettra une réflexion approfondie. 

Mme Madeleine Bernasconi (R). Lors du lancement de cette initiative, j'ai été interrogée par la presse : j'ai répondu que cette initiative me semblait intéressante, mais que ce n'était pas le moment - même si l'on dira toujours que ce n'est jamais le moment.

Il est vrai que, lorsqu'on a moins d'argent, la logique voudrait que l'on adapte nos dépenses ; si l'on veut vraiment assainir les finances du canton, ce n'est donc pas en augmentant les charges qu'on y arrivera, mais ce n'est pas non plus en diminuant la fiscalité. Que je sache, les infrastructures et les prestations de Genève ne peuvent être comparées à celles de Zoug et de Schwytz, qui par leur situation géographique peuvent utiliser très largement celles de Zurich, bien que Zoug y participe financièrement, même très modestement.

Par ailleurs, que le parti radical se sente proche de la classe moyenne, nous en sommes fiers - mais j'ose espérer que ce n'était pas, de la part du parti libéral, l'expression d'un mépris pour ce groupe de notre population !

Quand une entreprise a des difficultés, si elle cherche à faire des économies, elle recherche aussi activement d'autres ressources financières. Mais il est vrai que nous devons poursuivre une politique de rigueur pour arriver enfin, je l'espère, à alléger un jour notre fiscalité. 

Mme Micheline Calmy-Rey. Les libéraux croient à la théorie de la concentration des richesses. Ils veulent un canton peuplé de personnes aisées qui paient peu ou pratiquement pas d'impôts. Cette vision des choses ne correspond pas du tout à la réalité genevoise. Ce sont de beaux discours qui ne correspondent à rien.

Mesdames et Messieurs, vous comparez Genève au canton de Schwytz, mais Schwytz, que je sache, n'est pas un canton centre comme le canton de Genève. Vous avancez des statistiques sur les dépenses par habitant, mais il n'est tout simplement pas correct d'utiliser de telles statistiques. Genève est un canton qui, avec 230 000 contribuables, finance des prestations pour 600 000 à 700 000 habitants. Au surplus, la répartition genevoise des charges communes-canton est très différente de celle du canton de Schwytz. L'Etat, à Genève, assume 80% du total des charges ; dans les autres cantons cette proportion est plutôt de 50%.

Par ailleurs, nous supportons des dépenses sociales que le canton de Schwytz ne supporte pas et, avant d'avancer des chiffres et des statistiques, il faudrait comparer ce qui est comparable. La densité de notre population induit un certain nombre de charges sociales qui n'existent tout simplement pas dans le canton de Schwytz. Ce dernier est au surplus ce qu'on appelle un canton rapace : c'est un canton qui prend la richesse des autres. Genève est un canton qui donne et qui donne beaucoup à la solidarité confédérale. C'est la raison pour laquelle les statistiques de dépenses par habitant, je le répète, ne sont pas utilisables dans ce contexte. Et ce que vous proposez, avec votre théorie de la concentration des richesses, n'est donc pas une solution, ce n'est qu'un beau discours. Vous êtes admirable dans vos discours, Monsieur Halpérin, mais votre théorie n'est ni raisonnable, ni utilisable !

Plus sérieusement, le poids de la dette est très directement lié au poids de la répartition dans le temps de la fiscalité. Genève s'endette aujourd'hui pour couvrir ses dépenses courantes et répercute sur les contribuables futurs la charge du remboursement de la dette accumulée. Or, en diminuant les recettes fiscales de 12% au total, l'initiative rétrécit encore la marge d'autofinancement du canton et péjore la capacité des finances cantonales à maintenir à long terme une distribution équitable du fardeau fiscal entre les générations de contribuables. Le bon sens, Mesdames et Messieurs, voudrait que nous ne fassions pas de cadeaux fiscaux sans avoir les moyens de les financer !

Le seul effet à court terme de l'initiative est l'augmentation des déficits publics, ou des coupes dans les prestations, car si effets positifs il y a - mais aucun théoricien ne s'avance là-dessus - ils seront en tout cas décalés dans le temps. Une baisse d'impôt décidée aujourd'hui ne produira des conséquences qu'au moment où les gens paient les impôts, c'est-à-dire plus tard !

Deuxième remarque. Depuis plusieurs années, à Genève, la charge fiscale diminue pour les bas revenus et augmente pour les revenus moyens et élevés, ce qui indique effectivement une tendance au renforcement de la progressivité de l'impôt et par conséquent de son effet redistributif. Et comme le barème de l'impôt n'a pas subi de changement majeur, ni dans sa forme, ni dans sa progression, l'accroissement de la progressivité est principalement dû à l'accroissement des inégalités de revenus. On l'a dit au cours de ce débat : en 1998, nous observons une hausse des revenus imposables inférieurs à 100 000 F, de 0,7%. Par contre, les revenus supérieurs à 1 000 000 F augmentent, du fait de la croissance, de plus de 20%. La même polarisation est perceptible pour la fortune imposable. Dans ces conditions, pas plus la baisse linéaire d'impôts que la correction à la hausse de la courbe de progressivité ne me paraissent opportunes. Or, l'initiative renforce encore cette polarisation par le fait qu'elle avantage les contribuables aisés et que ces contribuables-là ont une propension à consommer plus faible que les catégories moyennes et faibles de revenus. Si l'objectif de cette initiative était véritablement de faire redémarrer l'économie et d'aider à la relance, alors la proposition de baisse d'impôt devrait être ciblée sur les catégories moyennes ou peu favorisées de contribuables.

Celles et ceux, Mesdames et Messieurs, qui font de belles propositions devraient avoir l'honnêteté intellectuelle d'indiquer clairement ce que cela entraînera du côté des dépenses. L'initiative prévoit, dans son mécanisme d'application, une première baisse de 5% dès 1999, les deux tranches complémentaires devant intervenir ultérieurement ; la deuxième étant liée à un rapport entre déficit après amortissements et compte de fonctionnement de 3%, la troisième à un résultat équilibré. Il faut bien constater qu'avec une baisse de revenu de plus de 100 millions de francs en 1999 il y a peu de chance que les deuxième et troisième tranches de baisse interviennent avant 2003 ou 2005. En tout cas, le canton n'a aucun intérêt dans ces conditions à rééquilibrer rapidement, puisque ses efforts sont sanctionnés par des baisses de revenu. Et c'est cela l'effet pervers de votre initiative : elle aura pour conséquence de décourager les bonnes volontés, la réforme et les gains d'efficacité. Quant à moi, je vous dis que, si cette initiative entre en vigueur, je ne serai plus du tout motivée à faire quoi que ce soit du côté des revenus, puisque de toute façon ils seront diminués après-coup.

Enfin, le projet est techniquement mauvais et se traduira, pudiquement dit, par des situations administratives compliquées et coûteuses. Par exemple, la présentation actuelle du bordereau n'est pas compatible avec l'initiative, la teneur de celle-ci ne se répercutant que partiellement sur les différents impôts calculés ; à tout le moins, les centimes additionnels ne doivent pas, selon l'initiative, subir de modification en quotité. Autre exemple, il y a impossibilité d'établir un barème définitif de l'impôt à la source 1999 avant de connaître le sort réservé à cette initiative. Il faudra compter sur la réticence de nombreux employeurs à rectifier, a posteriori, les retenues d'impôt à la source effectuées, voire sur l'impossibilité pour ceux-ci de le faire au cas où ils se seraient séparés de leurs employés entre temps. De même, l'initiative ne dit rien quant à l'impôt ecclésiastique, ni quant au centime pour les soins à domicile. Dans les deux cas, ces impôts se déterminent d'après les impôts cantonaux sur le revenu et la fortune et ils devraient donc aussi baisser.

En tout état de cause, je sais bien que ce ne sont que de «simples problèmes administratifs» et que, même s'ils coûtent plusieurs centaines de milliers de francs, cela ne devrait pas décourager les grandes théories et les beaux discours ! Mais quand même ! Les applications informatiques actuelles ne permettent pas le calcul de la réduction d'impôt sans influencer la part des communes et l'impôt ecclésiastique. Dont acte !

Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, les raisons pour lesquelles le Conseil d'Etat est opposé à cette initiative. (Applaudissements.) 

M. Nicolas Brunschwig (L). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi d'intervenir une dernière fois, très rapidement. Il est vrai, Madame Calmy-Rey, que votre motivation n'a pas été un des facteurs déterminants dans le dépôt de cette initiative... Quoique... Nous pensons que le fait de prélever moins d'argent à vos contribuables devrait être un de vos soucis, une de vos préoccupations, mais peut-être votre motivation va-t-elle évoluer avec le résultat du vote, nous l'espérons tout au moins !

J'aimerais revenir sur quelques-uns de vos propos qui me semblent inexacts. Vous avez relevé en particulier que la répartition des dépenses entre canton et communes est très différente suivant les cantons. Effectivement, mais vous remarquerez, et c'est écrit à la page 23, que nous n'avons fait que des comparaisons prenant en considération les dépenses du canton et des communes, qui sont d'ailleurs les seules normes statistiques utiles et qui figurent dans les documents fédéraux. Ce ne sont donc pas des chiffres qui sortent d'un chapeau de magicien ! En l'occurrence, ce sont des statistiques fédérales et cantonales, relevantes en tant que telles, qui montrent tout à fait clairement qu'en 1993 la dépense par habitant à Genève était de 16 327 F, alors que la dépense moyenne suisse était de 10 786 F, soit une dépense, à Genève, supérieure de quelque 50 à 55%.

Par ailleurs, les comparaisons que vous nous attribuez entre Schwytz et Zoug sont justement celles que nous n'avons pas faites. Nous ne les avons pas faites, parce que Genève n'est ni Schwytz, ni Zoug. M. Halpérin a cité ces cantons, parce qu'on nous reprochait de faire des comparaisons avec New York ou la Nouvelle-Zélande. Dans sa démonstration, Me Halpérin a voulu montrer que nous ne sommes ni New York, ni Schwytz : nous sommes Genève.

En revanche, Genève n'est pas très différent des cantons de Vaud ou de Zurich : ceux-ci nous semblent être des cantons significatifs, représentatifs, où il y a des hôpitaux universitaires, des universités, où, ma foi, les services publics ne sont pas si différents de ceux que nous connaissons dans le canton de Genève. Or, Mesdames et Messieurs, et ce sera notre conclusion, nous payons à Genève plus de 60% d'impôts en plus que dans le canton de Zurich, et plus de 30% d'impôts en plus que dans le canton de Vaud. Ceci est anormal, ceci n'est pas justifié et nous nous réjouissons de voir ce qu'en pense la population ! 

Le président. Nous sommes au terme de ce débat. Nous allons voter sur les conclusions du rapport de majorité, c'est-à-dire le rejet de cette initiative.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission fiscale (rejet de l'initiative sans contre-projet) sont adoptées.

L'initiative 111 est rejetée.