Séance du vendredi 30 avril 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 6e session - 18e séance

IN 21-D
Initiative populaire «Halte à la spéculation foncière». ( -) IN21
 Mémorial 1988 : Projet, 1992. Renvoi en commission, 2008.
 Mémorial 1992 : Rapport, 5977. Renvoi en commission, 6061.
 Mémorial 1993 : Rapport, 2729. Renvoi en commission, 2784.
 Mémorial 1994 : Rapport, 2506.
Rapport de majorité de M. René Koechlin (L), commission d'aménagement du canton
Rapport de minorité de M. Alain Etienne (S), commission d'aménagement du canton
PL 7559-B
Projet de loi de MM. René Ecuyer, Christian Ferrazino, Christian Grobet, Jean Spielmann, Pierre Vanek et Pierre Meyll concrétisant la deuxième invite de l'initiative 21 «Halte à la spéculation foncière» et modifiant à cet effet la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire. ( -) PL7559
 Mémorial 1997 : Projet, 96. Renvoi en commission, 117. Rapport, 4495. Renvoi en   commission, 4566.
Rapport de majorité de M. René Koechlin (L), commission d'aménagement du canton
Rapport de minorité de M. Alain Etienne (S), commission d'aménagement du canton
R 336-A
b) Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la proposition de résolution de M. René Koechlin visant à établir que la loi votée le 23 juin 1994 (PL 6737) concrétise le deuxième volet de l'initiative 21 «Halte à la spéculation foncière». ( -) R336
 Mémorial 1997 : Développée, 4495. Renvoi en commission, 4566.
Rapport de M. Alain Etienne (S), commission d'aménagement du canton

27. a) Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier les objets suivants :

(IN 21-D et PL 7559-B)

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

Après que le 13 juin 1997, le Grand Conseil lui ait une nouvelle fois confié la tâche, délicate, de donner forme à un projet de loi concrétisant le deuxième volet de l'initiative 21, la Commission d'aménagement a consacré plus d'une demi-douzaine de séances à ce travail, d'abord sous la présidence de Mme Fabienne Bugnon, puis sous la conduite de M. Hervé Dessimoz.

Ont assisté aux séances M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat chargé du DAEL, ainsi que Mmes et MM. Sophie Lin, cheffe du Service du plan directeur, Anni Stroumza, chargée de mission, Georges Gainon, chef de la Division de l'information du territoire et des procédures, Didier Mottiez, secrétaire adjoint, Jean-Charles Pauli, juriste, Raymond Schaffert, directeur de l'aménagement et Bernard Trottet, adjoint au Service du plan directeur, tous employés du DAEL.

Le 3 décembre 1997, la commission a examiné le projet de loi 7559 ; puis, le 21 janvier 1998, elle a chargé les services du DAEL de bien vouloir élaborer un texte de synthèse entre ledit projet de loi 7559 et les projets issus des nombreux, volumineux et interminables travaux précédents. Vous trouverez en annexe le « Bref historique » résumant ces derniers et qui figurait au rapport de majorité traitant du même sujet et soumis au Grand Conseil le 13 juin 1997 ; est également reproduite la première partie du commentaire qui suivait.

Le 28 janvier 1998, la commission a interrompu ses travaux à la lecture des taux de taxation (art. 30I) et chargé un groupe d'étude du DAEL d'établir un « test pratique » permettant de vérifier le bien-fondé du projet de loi, de mettre en évidence les difficultés d'application de ce dernier et, cas échéant, de proposer des modifications.

Ce groupe, composé d'une quinzaine de collaborateurs du DAEL, a entrepris un travail considérable consigné dans un rapport et une annexe qui ensemble comportent plus de 220 pages. Il remit ces documents et les présenta à la commission en décembre 1998. Celle-ci, sur la base de ces textes, a finalement élaboré le projet de loi qui vous est présenté aujourd'hui, mais qu'au vote final, la moitié des commissaires a refusé pour le principal motif qu'une partie du projet, par certains de ses articles, non seulement n'aura aucun effet contre la spéculation foncière - ce qui le dépouille du rôle de concrétiser l'initiative 21 - mais risque en revanche de décourager un bon nombre de propriétaires et autres constructeurs et de les dissuader d'entreprendre ; car la taxe en cause accroîtrait sensiblement et de manière prohibitive le coût de leur opération.

Commentaire :

C'est cet effet pervers du projet que la moitié de la commission déplore et qu'avec l'appui du Grand Conseil elle voudrait encore tenter de supprimer. Cette correction serait d'autant plus justifiée qu'elle porterait sur des mesures qui n'auront aucun effet sur la spéculation foncière, mais contribueraient en revanche à renchérir purement et simplement les opérations de construction ; tous les cas de dérogations présentés par le groupe de travail du DAEL nous en fournissent la preuve. Notons en passant que ces exemples tablent sur une taxe égale à 20 % de la plus-value, alors que le projet de loi qui ressort des travaux de la commission prévoit un taux de 30 % ; ce dernier accroît par conséquent de moitié tous les montants « prélevables » mentionnés dans le document du DAEL.

De plus, il s'avère en réalité, comme signalé plus haut, que chaque fois qu'un projet bénéficie d'une dérogation, la taxe en augmenterait d'autant le prix de revient. Car dans ces cas de figure, il est d'usage de ne pas inclure dans le plan financier la plus-value du fond ou du bien que l'opération implique, afin de ne pas en alourdir la charge locative, quelle qu'en soit la nature. En revanche, dans tous les cas de déclassement de zone, la taxe s'incorporerait au prix du terrain et ne « péjorerait » nullement l'usuel plan financier de l'opération. Elle ne ferait que réduire le profit du tenant du fond, ce que l'on peut considérer comme un moindre mal, quand bien même cette diminution de gain pourrait dissuader un certain nombre de propriétaires d'entreprendre ou de vendre.

Nous appuyons ces propos notamment sur les trois exemples suivants dont l'un fut cité le 13 juin 1997 par M. le député Christian Grobet, coauteur du projet de loi 7559. Ce dernier évoquait le cas d'un agriculteur qui se construirait une maison sur son terrain sis en zone agricole, dérogeant au régime de celle-ci. En vertu de la présente proposition de concrétisation du deuxième volet de l'initiative 21, dont nous contestons la teneur, ce propriétaire, pour construire son logement, se verrait taxé d'une telle manière qu'il devrait probablement renoncer à son projet. Car en fait, cela reviendrait à l'obliger à augmenter le coût de son opération du tiers de la valeur supposée ou estimée de son terrain, ou, en d'autres proportions, de décupler la charge de ce dernier.

Ainsi, en supposant que le paysan en question construise une villa de 200 m2 de planchers, il verra s'accroître le prix de revient de sa réalisation de 100 500 F calculés comme suit :

Terrain affecté : 200 m2 pl. / CUS 0.2 = 1000 m2 t.

1000 m2 t. X 335 F (plus-value estimée par M. Grobet) = 335 000 F

Selon l'article 30I, tel qu'il ressort des travaux de la commission, le propriétaire en cause devra s'acquitter d'une taxe égale à 30 % de cette plus-value, soit 100 500 F, comme indiqué plus haut.

Relativement à un coût maximal de réalisation d'environ 500 000 F, cette taxe pénaliserait l'opération d'un surcoût égal à 20 % de son prix de revient. Un handicap qui risquerait fort de contraindre l'agriculteur à renoncer à son projet. Un agriculteur qui, par ailleurs, n'aurait rien d'un spéculateur. Il pourrait être soupçonné de l'être s'il vendait sa maison immédiatement après l'avoir construite - ou s'il la louait à un tiers - en incluant dans son prix une valeur du terrain affecté égale à celle de la cinquième zone « villas ». Mais dans ce cas, il se verrait imposé par le fisc en vertu de la loi sur les gains et bénéfices immobiliers à raison d'environ 45 % de la plus-value ou, en cas de location, sur le revenu et la fortune. La taxe que prévoit le projet de loi serait nécessairement déductible et par conséquent superflue.

Autre cas d'espèce :

Un propriétaire institutionnel obtient l'autorisation de surélever son immeuble sis en troisième zone. Ce dernier atteindrait, par dérogation, 24 mètres de hauteur à la corniche au lieu des 21 mètres conformes aux règles régissant la dite zone.

L'immeuble, d'une valeur globale de 10 millions de francs, comporte un terrain estimé par expertise à 2 millions de francs.

L'étage supplémentaire implique une plus-value de 14,3 % du bien en cause. Reportée sur le seul terrain, déduction faite des coûts de réalisation, elle s'élèverait à 286 000 F; et la taxe sur cette plus-value serait de 85 800 F équivalant à 30 % de ladite plus-value.

Or, elle ne ferait que renchérir l'opération d'autant. Répercutée sur les loyers de l'étage supplémentaire, elle les augmenterait d'environ 6 000 F (pour un rendement brut de 7,0 %). Cela constituerait une hausse pure et simple d'environ 7,5 % de l'état locatif de la surélévation.

Surélévation que l'institution en cause ne requiert pas nécessairement par spéculation. D'ailleurs, le résultat d'une requête de dérogation est suffisamment aléatoire pour exclure toute intention spéculative de la part de son auteur. Il dépend en effet uniquement du bon vouloir et de l'appréciation de l'administration et de l'autorité exécutive dont elle dépend.

Il appert des deux exemples susmentionnés que les auteurs du projet de loi 7559, sous prétexte de lutter contre la spéculation foncière, cherchent plutôt à mettre un terme à toute requête de dérogation en matière de construction, si nécessaire ou justifiée fut-elle. Ils devraient avoir au moins l'honnêteté de le dire.

La moitié de la commission, pour sa part, estime qu'en matière de dérogation, la taxe telle que proposée dans le nouveau projet de loi s'avère inopportune, voire « contreproductive ». Elle ne se justifierait que dans le cas où elle serait incorporée au plan financier d'une opération de construction sans en accroître le prix de revient.

Troisième cas d'espèce :

Ainsi, par exemple, lorsqu'un terrain en cinquième zone (villas) est déclassé par le Grand Conseil en troisième zone de développement avec un CUS, usuel, de 1,2, sa valeur unitaire passe de 320 F à 650 F le mètre carré (valeur OCL).

La plus-value est dans ce cas de 330 F le mètre carré et la taxe qui en découlerait s'élèverait à environ 100 F (soit 30 % de 330 F).

Or, ce dernier montant ne ferait que réduire d'autant le profit du propriétaire du fond, sans modifier le prix de 650 F figurant au plan financier de la réalisation.

Il appert clairement que dans tous les cas semblables, l'introduction d'une taxe ne péjore pas le prix de revient. Elle ne rompt pas l'équilibre économique des opérations.

Tandis qu'en matière de construction par dérogation, elle en accroît le coût présumé qui n'inclut usuellement pas la valeur accrue du terrain. La taxe sur la plus-value présumée devrait, dans ces cas, être perçue uniquement lors de l'aliénation du bien. Elle pourrait être alors assimilée à l'impôt sur les gains et bénéfices immobiliers.

C'est pourquoi il conviendrait de retenir pour principale règle en cette matière que la taxe concrétisant le deuxième volet de l'initiative 21 devrait n'être applicable ou perceptible - comme il est dit plus haut - que lorsqu'elle n'augmenterait pas le prix de revient de l'opération en cause.

Conclusion :

C'est avec cette condition pour objectif que le Grand Conseil devrait à nouveau charger la Commission d'aménagement de bien vouloir élaborer le projet de loi concrétisant le deuxième volet de l'initiative 21.

Cela n'empêche que la moitié de ladite commission se demande également si le moment n'est pas particulièrement mal choisi pour introduire un nouvel impôt - car c'est bien de cela dont il s'agit - alors que l'industrie du bâtiment est aux abois, que le marché immobilier est au plus bas et que la spéculation foncière - contre laquelle l'initiative 21 est dirigée - est pratiquement inexistante. Soumettre au peuple, dans de telles circonstances, l'introduction d'une nouvelle taxe paraît hasardeux et pour le moins inopportun.

Pour ces motifs, la moitié des commissaires présents vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer une fois encore le projet à la Commission d'aménagement pour qu'elle le réexamine et le modifie au moins dans le sens évoqué, soit selon la règle ci-dessus énoncée.

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Projet de loi(7559)

modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (L 1 30)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article unique

La loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, est modifiée comme suit :

Art. 30C Principe (nouveau)

Les avantages et les inconvénients décrits aux articles 30E et 30F résultant de mesures d'aménagement du territoire font l'objet d'une compensation, selon les articles 30D à 30O.

Art. 30D Fonds de compensation (nouveau)

1 Un fonds de compensation recueille le produit des taxes perçues en vertu des articles 30E et suivants ci-après et finance :

2 Le fonds de compensation verse à la caisse de l'Etat les montants qui, sans la taxation prévue à l'article 30K, auraient été perçus, le cas échéant, au titre de l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers.

3 La part du fonds qui, au 31 décembre de chaque année, excède le montant de 25 millions F, est versée à la caisse de l'Etat. A titre exceptionnel, le Grand Conseil peut cependant décider de laisser subsister ce montant excédentaire sur le fonds.

4 Le Conseil d'Etat présente à la fin de chaque législature au Grand Conseil un rapport sur l'utilisation du fonds.

Art. 30E Avantage (nouveau)

1 Une mesure d'aménagement entraînant un avantage, soit une plus-value d'un ou de plusieurs biens ou actifs immobiliers compris dans le périmètre concerné par celle-ci et représentant un montant total supérieur à 25 000 F, donne lieu à taxation.

2 Par mesure d'aménagement, on entend :

3 Dans la mesure où il sont susceptibles d'entraîner un avantage au sens de l'alinéa 1, sont assimilés à des mesures d'aménagement les actes administratifs suivants :

4 Les autorisations de construire délivrées en conformité d'une zone ou d'un plan d'affectation, sans dérogation, sont réputées ne pas entraîner de plus-value foncière. En zone de développement, il en va de même des plans localisés de quartier dont l'indice d'utilisation du sol est inférieur ou équivalent à celui, usuel, de cette zone, fixé dans le règlement d'application.

Art. 30F Indemnisation (nouveau)

1 Une indemnité ne peut être accordée que lorsque les inconvénients provoqués par une mesure d'aménagement sont équivalents à une expropriation matérielle.

2 Mention est faite au Registre foncier de tels versements.

Art. 30G Assujettissement (nouveau)

1 Le débiteur de la taxe sur la plus-value résultant d'une mesure d'aménagement au sens de l'article 30E est le propriétaire du terrain au moment de l'adoption de celle-ci.

2 Lorsque plusieurs personnes sont propriétaires d'un immeuble, elles sont solidairement obligées envers l'Etat.

Art. 30H Calcul de la plus-value (nouveau)

1 La plus-value soumise à taxation est calculée sur la base des éléments déterminants existant au moment où la mesure d'aménagement est adoptée. Il est notamment tenu compte de l'affectation future, de l'indice d'utilisation du sol et, selon la nature des mesures d'aménagement considérées, du prix de revient, dont le coût usuel de construction au m3 SIA selon l'indice genevois des prix de la construction de logements, et de la valeur de rendement. La plus-value équivaut à la différence de la valeur du bien ou actif immobilier, considéré avant et après l'adoption de la mesure d'aménagement considérée.

2 La valeur de rendement est déterminée sur la base du taux moyen des hypothèques de premier rang pratiqué par la banque cantonale de Genève, augmenté d'un pourcentage pour couvrir les charges, fixé par le règlement d'application.

Art. 30I Taux de la taxation (nouveau)

1 Le taux de la taxation de la plus-value est de 30 %.

2 Le montant de la taxe est adapté à l'indice suisse des prix à la consommation à dater de la notification du bordereau.

3 En cas de déclassement de terrains, réputés inconstructibles, en zone à bâtir ordinaire ou de développement, il est tenu compte des mesures de compensation simultanées consenties par le même bénéficiaire de ladite mesure de déclassement. Ces mesures sont portées en déduction, m2 pour m2, des surfaces déclassées en zone à bâtir ordinaire ou de développement.

Art. 30J Exonération (nouveau)

1 Les plus-values résultant des mesures d'aménagement visées à l'article 30E peuvent être exonérées lorsqu'elles ont pour objectif :

2 Dans les cas visés à l'alinéa 1er, lettre b, la taxation et la perception ont lieu simultanément lors de l'aliénation du terrain.

Art. 30 K Taxation (nouveau)

La taxation s'opère sur la base d'un bordereau notifié par le département simultanément à l'adoption d'une des mesures d'aménagement au sens de l'article 30E. La décision de taxation fait l'objet d'une mention au registre foncier. L'article 30I, alinéa 2 est réservé.

Art. 30L Perception (nouveau)

La créance découlant de la taxe visée à l'article 30E est exigible lors de l'aliénation du terrain ou lors de la délivrance d'une autorisation définitive de construire, au plus tard à l'ouverture du chantier de construction découlant de la mesure d'aménagement considérée.

Art. 30M Révision (nouveau)

Au cas où, postérieurement à la décision de taxation, l'un des éléments entrant dans le calcul de celle-ci subit une modification de nature à influencer sensiblement les possibilités de mise en valeur du terrain et pour autant que celui-ci n'ait pas changé de propriétaire, le département peut, d'office, ou à la demande de ce propriétaire, procéder à une révision de la taxe.

Art. 30N Hypothèque légale (nouveau)

1 Le paiement des taxes prévues au présent titre est garanti par une hypothèque légale. L'hypothèque prend naissance, sans inscription, en même temps que la créance qu'elle garantit. Elle est en premier rang, en concours avec les autres hypothèques légales de droit public, et prime tout autre gage immobilier.

2 L'hypothèque est inscrite au registre foncier à titre déclaratif, sur la seule réquisition du département, accompagnée du bordereau de taxation.

3 L'hypothèque est radiée d'office au paiement complet de la taxe.

Art. 30O Recouvrement (nouveau)

1 Les bordereaux définitifs relatifs au paiement des taxes, établis en application de l'article 30K, sont assimilés à des jugements exécutoires au sens de l'article 80 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, du 11 avril 1889. Le recouvrement est poursuivi à la requête du conseiller d'Etat chargé du département, représentant l'Etat, conformément aux dispositions de ladite loi.

2 Les dispositions de l'article 86A de la loi sur les contributions publiques, du 9 novembre 1987, sont, le cas échéant, applicables au recouvrement de la taxe.

3 Le paiement de la taxe prévue à l'alinéa 1 constitue, le cas échéant, une impense déductible au sens de l'article 82, alinéa 8 de la loi générale sur les contributions publique et son acquittement ne dispense pas l'aliénateur ou ses ayants-cause de tous autres impôts prévus par cette loi.

Art. 30P Règlement (nouveau)

Le Conseil d'Etat fixe par voie de règlement les modalités d'application des articles 30C à 30O.

Art. 34, al. 2 Recours contre les décisions du département (nouveau)

2 En dérogation à l'alinéa 1, les décisions prises en application de l'article 30K peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la commission cantonale de recours en matière d'impôts, instituée par la loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887. Le Tribunal administratif, siégeant en plénum, connaît des recours interjetés contre les décisions de la commission cantonale de recours en matière d'impôts rendues en vertu du présent alinéa.

Art. 36 Demandes d'indemnité (nouveau)

Les demandes d'indemnité pour expropriation matérielle au sens de l'article 30F peuvent être adressées au Tribunal de première instance dans un délai du 5 ans à dater de l'entrée en vigueur de la mesure d'aménagement considérée. Une transaction judiciaire peut intervenir pendant la procédure à tous les stades de celle-ci.

ANNEXE

Secrétariat du Grand Conseil

Proposition de MM. René Ecuyer, Christian Ferrazino, Pierre Meyll, Christian Grobet, Jean Spielmann et Pierre Vanek

Dépôt: 8 avril 1997

Messagerie

pl 7559-A

r 336

RAPPORT

de la commission d'aménagement chargée d'étudier le projet de loi concrétisant la deuxième invite de l'initiative 21 ";Halte à la spéculation foncière" et modifiant à cet effet la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire

(L 1 30)

Rapporteur: M. René Koechlin.

Mesdames etMessieurs les députés,

Bref historique

RAPPORT DE LA MINORITÉ

Introduction

En dépit de son titre (« rapport de minorité »), exact sur le plan formel mais néanmoins trompeur quand au fond, le présent rapport doit être considéré, de fait, comme reflétant l'avis réel de la majorité de la commission, laquelle n'était pas au complet lors du vote final qui a clos ses travaux sur le projet de loi 7559.

Les représentants des partis de droite ont, en effet, cru bon de profiter de l'absence d'un député de l'AdG au moment du vote final (certes coupable d'arrivée tardive !), pour se prévaloir d'une règle de procédure qui veut qu'en cas d'égalité des voix, la proposition est considérée comme non adoptée (art. 186 al. 4 de la loi portant règlement du Grand Conseil), et en votant contre le texte issu des travaux de la commission, plutôt qu'en choisissant, ce qui eut certes été élégant, l'abstention pour laisser transparaître la réelle volonté de la majorité de la commission à l'issue de deux ans de travaux.

En effet, le 3 février 1999, alors que le texte issu de ces deux ans de travaux et qui figure en annexe venait de faire l'objet d'une deuxième lecture article par article, chaque article ayant été accepté à l'unanimité, ce même texte, au vote d'ensemble, en fin de compte, a été refusé par 7 voix pour (2 AdG, 3 S, 2 Ve) contre 7 voix contre (3 L, 2 R et 2 PdC) !

On notera donc que, plus de 11 ans après le dépôt de l'initiative 21 intitulée « Halte à la spéculation foncière », 7 ans après que le Grand Conseil, pourtant à majorité de droite à l'époque, ait déclaré recevable cette initiative et se soit par là même engagé à mettre au point un projet de loi concrétisant le 2e volet de celle-ci et à l'adopter afin de le soumettre à votation populaire, les représentants des partis de droite persistent à donner dans la manoeuvre procédurière dilatoire. Méprisant les mêmes droits populaires dont ils se prévalaient bruyamment lorsqu'il s'agissait de concrétiser une autre initiative non formulée qui avait leur préférence, à savoir la traversée de la rade, ils préfèrent ne rien faire, et ainsi cautionner le système caractérisé de privatisation des bénéfices et de socialisation des pertes, conforme au dogme néolibéral qui prévaut actuellement.

A suivre le raisonnement tenu par les partis de droite, alors même qu'un rapport du DAEL estime le total des plus-values générées par l'ensemble des plans d'affectation du sol (plans de zone et plans localisés de quartier) adoptés en 1997 à près de F 17 millions, soit un montant dérisoire en regard des dizaines, voire des centaines de millions susceptibles d'être générées par les autorisations de construire délivrées par voie dérogatoire (11 millions pour 6 autorisations prises au hasard et représentant 3 % des cas), l'Etat ne devrait pas prélever de taxes sur ces plus-values dues aux mesures d'aménagement qu'il est amené à prendre, sans toutefois que les propriétaires ne disposent d'un droit. L'Etat devrait se contenter du modeste impôt sur les gains immobiliers, qui ne peut être perçu qu'en cas de vente, en évoluant à la baisse en fonction du temps pendant lequel le vendeur a été propriétaire, pour atteindre 0 % au bout de 25 ans. C'est le principe de la privatisation des bénéfices, qui, en l'occurrence, veut que les plus-values tirées des mesures d'aménagement restent autant que possible dans la seule poche des heureux bénéficiaires, sans que l'Etat, pourtant à l'origine de l'heureuse fortune de quelques propriétaires qui se trouvent soudainement privilégiés par rapport aux autres, ne bénéficie de cette manne tombée du ciel.

En revanche, lorsque l'Etat est amené à prendre des mesures d'aménagement susceptibles de léser plus particulièrement un propriétaire, par exemple lorsqu'il doit exproprier un terrain pour la création d'une route ou d'un équipement public, ces mêmes milieux ne voient aucun inconvénient, bien au contraire, à ce que l'Etat indemnise ces propriétaires. A titre d'exemple, on pourrait peut-être rappeler que le Grand Conseil est toujours saisi d'un projet de loi du Conseil d'Etat (PL 7610) ouvrant un crédit de 60 millions pour l'indemnisation des propriétaires riverains de l'Aéroport. L'on ne parlera même pas des coûts indirects qui ont pour origine des opérations de spéculation, à charge de l'Etat. On est très loin de la petite dizaine de millions (9,8) qu'a rapporté, en 1997, l'impôt sur les gains immobiliers ! C'est le principe de la socialisation des pertes, qui en l'occurrence veut que les pertes dues à la prise de mesures d'aménagement, au contraire des bénéfices tirés de ces mêmes mesures, soient pleinement supportées par l'Etat, et donc reportées sur la collectivité, puisque l'Etat tire ses ressources d'impôts frappant l'ensemble des contribuables.

Tel est, en réalité, l'objectif poursuivi par le projet de loi 7559 : lutter contre la spéculation et le système de privatisation des bénéfices et de socialisation des pertes qui prévaut actuellement en matière d'aménagement du territoire, une fois de plus cautionné par les représentants des partis de droite qui ont, in extremis, refusé d'adopter ce projet de loi.

Travaux de la commission

Sous les présidences successives de Mme Fabienne Bugnon, M. Hervé Dessimoz et M. Rémy Pagani (pour une séance), la Commission de l'aménagement s'est réunie à 9 reprises, les 3 et 10 décembre 1997, 21 janvier, 28 janvier, 4 février et 16 décembre 1998, 13 janvier, 20 janvier et 3 février 1999 pour traiter du projet de loi 7559.

Ont assisté aux séances, partiellement ou en totalité, M. Laurent Moutinot, chef du Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, M. Didier Mottiez, secrétaire-adjoint, Mme Anni Stroumza, chargée de mission, M. Georges Gainon, chef de la division de l'information du territoire et des procédures, M. Jean-Charles Pauli, juriste, M. Daniel Cheminat, contrôleur technique, M. Georges Albert, directeur de l'Office cantonal du logement et M. Claude Page, directeur a.i. de ce même office.

Sans vouloir dresser un « historique » complet de ce dossier, il convient tout de même d'en rappeler quelques dates qui en résument les épisodes les plus significatifs :

- 22 juin 1979 : adoption de la LAT

La loi fédérale sur l'aménagement du territoire, adoptée à cette date (ci-après LAT), oblige les cantons à « établir un régime de compensation permettant de tenir compte équitablement des avantages et des inconvénients majeurs qui résultent de mesures d'aménagement » (art. 5, al. 1 LAT).

Le fondement de cette disposition est limpide : le législateur fédéral a en effet estimé qu'il ne serait pas équitable qu'un particulier réclamant un dédommagement pour les restrictions que la collectivité publique apporte à son droit de propriété, puisse en outre bénéficier sans contrepartie des avantages que peuvent lui procurer ces mesures d'aménagement, alors qu'il n'a droit à aucun avantage (cf. Message relatif à la LAT, FF 1972 I 520). En d'autres termes, les mêmes mesures d'aménagement qui peuvent donner lieu à indemnisation pour expropriation matérielle doivent également pouvoir donner lieu à taxation sur la plus-value. C'est le principe dit de la symétrie des mesures, l'idée à la base des contributions de plus-value répondant à la simple exigence de l'égalité de traitement.

- 27 mars 1985 : dépôt du PL 5717 sur l'aménagement du territoire

A Genève, l'idée de créer un fonds de compensation, qui recueillerait le produit des taxes prélevées sur les plus-values résultant de mesures d'aménagement auprès des propriétaires pour financer les indemnités d'expropriation, date au moins de mars 1985. C'est, en effet, le moment choisi par le Conseil d'Etat de l'époque pour déposer un projet de loi de loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (PL 5717; ci-après Lalat), dont l'article 3 figurait à la dernière place de la partie introductive, juste après le but, le champ d'application et la désignation des autorités compétentes. La Lalat, dans sa teneur finale du 4 juin 1987, ne comporte toutefois plus aucune trace de cette très importante disposition.

- 8 février 1988 : dépôt de l'IN 21

C'est dans ce contexte que l'initiative IN 21, intitulée « Halte à la spéculation foncière », a été déposée en chancellerie le 8 février 1988 par le Parti du Travail.

Il s'agit, sauf erreur, de la dernière initiative non formulée déposée sous l'ancien droit constitutionnel et encore régie par celui-ci. Pour mémoire, les modifications apportées à la Constitution genevoise en 1992 fixent au Grand Conseil des délais pour traiter des initiatives non formulées, délais qui sont, en l'occurrence, amplement dépassés, comme il n'aura échappé à personne.

Cette initiative non formulée demande que le Grand Conseil légifère « aux fins de combattre efficacement la spéculation foncière », en proposant la mise au point et l'adoption de dispositions poursuivant cet objectif en matière de fiscalité, d'aménagement du territoire, de régime du crédit bancaire à l'achat de terrains et d'acquisition de terrains par les collectivités publiques.

- 15 octobre 1992 : le Grand Conseil déclare recevable l'IN 21

Le Grand Conseil, en date du 15 octobre 1992, s'est prononcé favorablement quant à la recevabilité de cette initiative, à l'exception du 3e volet de celle-ci, relatif au régime du crédit bancaire à l'achat de terrains. Il a, ainsi, évité que cette initiative soit, en tant que telle, soumise à votation populaire, seul le projet de concrétisation de l'un ou l'autre des volets de celle-ci devant faire l'objet d'une consultation populaire, étant encore précisé que, selon un avis de M. Andreas Auer, professeur de droit constitutionnel à l'Université de Genève, il ne peut y avoir qu'un seul projet de loi par volet, et non plusieurs à choix.

A partir de cette date, le Grand Conseil s'est donc engagé à concrétiser, notamment, le second volet de cette initiative, relatif à l'aménagement du territoire et qui est ainsi formulé :

« L'aménagement du territoire »

Le deuxième moyen est la mise au point d'un système de prélèvement d'une plus-value immobilière résultant de la simple délivrance d'une autorisation de construire. La loi fédérale d'aménagement du territoire permet au canton de prélever une telle plus-value. »

La Commission d'aménagement du canton fut alors chargée d'élaborer un projet de loi concrétisant cette invite.

Elle est parvenue, en juin 1995, à un avant-projet de loi proposant notamment de ne taxer que la plus-value d'un bien ou actif immobilier « résultant de la création d'une zone à bâtir en lieu et place d'une zone inconstructible » et reprenant l'idée précitée du fonds de compensation. Ce résultat ne satisfaisait toutefois pas une forte minorité de membres de la commission, au demeurant proche des initiants. Ces derniers auraient voulu voir figurer les autorisations de construire génératrices de plus-values, en particulier celles obtenues au moyen d'une dérogation, au nombre des mesures d'aménagement soumises à taxation.

La commission sollicita alors le professeur Andreas Auer plus haut nommé, qui, le 25 septembre 1995, a rendu un avis de droit sur la question. Selon ce dernier, la taxation de la plus-value résultant de la simple délivrance d'une autorisation de construire ne constituait pas « un point crucial et central de l'initiative sans lequel cette dernière n'aurait plus aucun sens » (p. 9, point 27). Toutefois, le projet de loi appelé à concrétiser l'initiative « traduirait probablement mieux le sens de l'initiative 21 s'il soumettait la plus-value résultant de la création d'une zone à bâtir mais aussi celle qui naît d'une dérogation exceptionnelle aux normes de la zone et à toute mesure législative de planification ou de construction ».

Le 26 mars 1996, la Commission d'aménagement sollicita la Commission fiscale en lui posant un certain nombre de questions. Le 28 novembre 1996, cette dernière lui répondit en lui communiquant son vote, négatif, quant à l'acceptabilité de la constitution d'un fonds de compensation et à l'opportunité d'une taxe de déclassement. Selon la Commission fiscale, la loi du 23 juin 1994 modifiant la loi sur les contributions publiques (selon PL 6737), relative à l'impôt sur les gains immobiliers, concrétisant le 3e volet de l'initiative 21, aurait également concrétisé le second volet de l'initiative 21 concernant l'aménagement du territoire.

- 8 janvier 1997 : dépôt du PL 7559 concrétisant la 2e invite de l'IN 21

Les travaux de la Commission de l'aménagement étaient pratiquement enlisés lorsque, le 8 janvier 1997, un groupe de députés déposa le projet de loi 7559, concrétisant la deuxième invite de l'initiative 21, qui fait l'objet du présent rapport. Ce projet de loi, parmi d'autres propositions, proposait la taxation d'une « autorisation de construire ayant pour effet d'accorder un avantage particulier à un bien immobilier, notamment du fait de l'application des normes d'une zone de développement lorsque celles-ci ne correspondent pas aux normes de la zone de fond, ou du fait de la mise au bénéfice d'une dérogation aux normes de la zone, à un plan d'affectation du sol, à la loi sur les constructions et installations diverses ou à toute autre loi fixant des règles en matière de construction » (art. 30D, let. b).

La Commission de l'aménagement reprit alors ses travaux et rendit, le 8 avril 1997, deux rapports, l'un de majorité, l'autre de minorité. Le rapport de majorité concluait au refus d'entrer en matière sur ce projet. Il était assorti d'une résolution (R 336) invitant le Grand Conseil à déclarer que la loi votée le 23 juin 1994 (PL 6737), concrétise le 2e volet de l'initiative 21. Le rapport de minorité, pour sa part, concluait à l'acceptation du projet de loi 7559 en l'état.

- 13 juin 1997 : renvoi en commission du PL 7559

Le 13 juin 1997, le Grand Conseil a décidé de ne suivre les conclusions d'aucun de ces deux rapports et de renvoyer le projet de loi 7559 à la Commission de l'aménagement. Quant à la résolution R 336, elle n'a pas été retirée et figurait toujours dans la liste des objets en suspens.

Auditions

C'est dans ce contexte que, le 3 décembre 1997, la Commission de l'aménagement du canton, renouvelée suite aux élections de l'automne 1997, reprit ses travaux sur le projet de loi 7559, en procédant à une série d'auditions. Certaines de ces interventions ont fait l'objet d'une prise de position écrite, qui figure en annexe. Pour l'essentiel, on en retiendra ce qui suit :

Audition de la Chambre genevoise d'agriculture (M. N. Ankers, le 3.12.1997)

La CGA a surtout attiré l'attention sur le nombre croissant d'agriculteurs endettés. Pour ceux-ci, la vente de terrains déclassés constituerait « souvent l'issue de secours, pour permettre aux exploitations saines dans leurs structures de repartir, et très rarement une réalisation de capital destinée à la consommation ». La taxe sur les déclassements prévue par l'initiative 21 et le projet de loi 7559 s'apparenterait à un « nouvel impôt sur les gains immobiliers », qui aboutirait à une « double imposition ». Les recettes découlant de déclassements de terrains de la zone agricole à la zone à bâtir devraient être affectées aux crédits d'investissements dans l'agriculture. Enfin, il ne devrait pas être question de cette taxe en cas de succession.

Audition de l'association des promoteurs constructeurs genevois (MM. J. Blanc et Th. Barbier-Muller, le 10.12.1997)

L'APCG a estimé que le principe de la taxation est juste et mérite d'être soutenu en cas de déclassement d'un terrain agricole en terrain constructible. Elle n'était en revanche pas d'accord avec le principe de la taxation d'une autorisation de construire délivrée par voie de dérogation, qui ne remplirait pas les conditions d'un avantage « majeur », au sens de l'article 5, alinéa 1 LAT, conféré à un terrain par une mesure d'aménagement et ne serait pas justifié par un intérêt public.

Audition de la Chambre genevoise immobilière (Mme M.-C. Dulon et M. M. Muller, président)

Pour la CGI, seul un déclassement de zone inconstructible en zone constructible serait susceptible de constituer un avantage « majeur » au sens de l'art. 5 LAT. Toutefois, les déclassements en zone de développement devraient être exclus de cette taxe, les prix étant contrôlés dans cette catégorie de zone.

Pour la perception de la taxe, seul le moment de l'aliénation du terrain devrait être pris en compte. Au surplus, cette taxe ferait double emploi avec l'impôt sur les gains immobiliers. En fin de compte, la Chambre genevoise immobilière préconisait de s'en tenir au projet de loi de concrétisation de l'initiative 21 élaboré sous la précédente législature.

Entrée en matière et nouvelle suspension des travaux

Le 10 décembre 1997, la commission est finalement entrée en matière sur le projet de loi 7559, par 8 voix (3 S, 3 AdG, 2 Ve) contre 6 avis contraires (3 L, 2 R, 1 PdC) et 1 abstention (PdC).

Cette entrée en matière paraissait signifier, implicitement, le rejet de la résolution n° 336, formellement voté le 3 février 1999. En effet, la plus-value due à une mesure d'aménagement mûrement réfléchie par l'autorité, mais pour l'obtention de laquelle le particulier ne dispose pas d'un droit, doit être distinguée, ne serait-ce qu'en vertu du principe de l'égalité de traitement déjà évoqué, du simple gain immobilier, sans changement de statut du terrain, dû aux seules fluctuations du marché ou à des circonstances particulières, lequel n'est en outre pas imposable après 25 ans de propriété continue.

Le même jour, la commission a effectué une première lecture article par article du projet de loi 7559. Cette première lecture a fait apparaître que les articles de ce projet de loi étaient rédigés de manière alambiquée, certaines dispositions traitant en un bloc de plusieurs sujets problématiques, ce qui rendait la discussion malaisée. Telles sont sans doute les raisons pour lesquelles cette première lecture n'est finalement pas arrivée à terme.

En effet, sur proposition du DAEL, le 21 janvier 1998, la Commission de l'aménagement a admis le principe de poursuivre ses travaux sur la base d'une nouvelle mouture du projet de loi, élaborée par le département. Cette nouvelle version était bien sûr axée sur le projet de loi 7559, dont les propositions et le contenu étaient pour l'essentiel repris. Elle tenait cependant compte, dans la mesure du possible, de certaines propositions émanant du texte du projet de loi issu des travaux de la commission de la précédente législature.

Ce nouveau texte présentait l'avantage d'une meilleure systématique, sériant plus distinctement les difficultés, ce qui était de nature à faciliter les débats.

L'on procéda alors à une première lecture de ce document, le 28 janvier 1999, qui s'arrêta toutefois à la lettre 30J. En dépit des améliorations apportées au texte, il s'avéra qu'aussi longtemps que des simulations de calculs chiffrant la plus-value due à certaines mesures d'aménagement concrètes n'auraient pas été effectuées, la discussion serait ardue, voire impossible. Aussi, la commission décida, le 4 février 1998, de suspendre ses travaux dans l'attente de documents chiffrés qui lui seraient fournis par le département.

Rapport du DAEL

Le 16 décembre 1998, chaque membre de la commission a reçu un exemplaire d'un rapport, élaboré par le DAEL, intitulé « IN 21, projet de concrétisation de la 2e invite concernant l'aménagement du territoire, essai d'application de la version DAEL du PL 7559 », accompagné d'une volumineuse annexe (191 pages), comprenant et commentant les calculs de taxation proprement dits, fondés sur des mesures d'aménagement effectivement adoptées en 1997, d'un tableau comparatif à deux colonnes, comprenant des propositions de modification du texte distribué en janvier 1998 (un exemplaire est disponible au service du Grand Conseil), lui même assorti d'un commentaire qui fait le lien entre ces propositions de modifications et les propositions de modifications issues des conclusions du rapport précité. Les travaux de la commission ont donc repris par la présentation, par le DAEL, de son rapport. Ce dernier répond à un bon nombre de questions complexes, notamment juridiques, qui ont pu être soulevées à différents stades des travaux. On voudra donc bien s'y référer en cas de besoin. Pour l'essentiel, nous en retiendrons ce qui suit :

a) Pour que soit applicable le système envisagé de compensation et de prélèvement d'une taxe sur la plus-value due à une mesure d'aménagement, il y a lieu de définir celle-ci comme équivalant à la différence de la valeur du bien ou actif immobilier, considérée avant et après l'adoption de la mesure prévue. En d'autres termes, il y a lieu de prendre en compte, le plus strictement possible, la différence de valeur imputable au seul changement de statut des terrains, à savoir aux nouvelles possibilités constructives qui se rattachent à ceux-ci, suite à l'adoption de la mesure d'aménagement concernée.

Cela implique que l'on renonce à la notion de valeur « vénale », que ne retiennent d'ailleurs, à juste titre, ni le texte initial du projet de loi 7559, ni le texte issu des travaux de la précédente législature. Il convient de faire abstraction des transactions effectives qui ont pu avoir cours dans un cas donné, trop souvent sans raison « objective » apparente, pour se concentrer uniquement sur la valeur qui résulte des nouvelles possibilités constructives d'un terrain suite à l'adoption de la mesure d'aménagement considérée par rapport à celles qui résultaient de son statut antérieur.

b) La méthode de calcul diffère fondamentalement selon que le terrain considéré se trouve, ou est déclassé, en zone de développement ou selon qu'il se trouve ou est déclassé en zone à bâtir ordinaire. En d'autres termes, la méthode de calcul diffère selon la mesure d'aménagement considérée.

En zone ordinaire, il y a lieu d'appliquer la « méthode bâloise », en référence au canton de Bâle-Ville, où est appliqué depuis 20 ans un système de prélèvement d'une plus-value portant non seulement sur les plans d'affectation, mais aussi sur les autorisations délivrées par voie dérogatoire.

Selon cette méthode, la plus-value équivaut à la valeur de rendement supplémentaire accordée potentiellement à la parcelle ou à la construction par la mesure d'aménagement prise, déduction faite du coût de construction des surfaces brutes de plancher (SPB) à réaliser pour bénéficier de cette valeur de rendement supplémentaire. Il s'agit, en bref et sans rentrer dans tous les détails de cette méthode, tout d'abord de déterminer les surfaces brutes de plancher supplémentaires obtenues grâce à la mesure d'aménagement, de déterminer ensuite le revenu brut locatif qui en résulte, lequel permet enfin, sur la base d'un taux de capitalisation, de déterminer la valeur de rendement de l'immeuble. Il ne reste plus qu'à soustraire de cette valeur de rendement le coût nécessaire pour obtenir la plus-value due à la mesure d'aménagement considérée.

En zone de développement, cette méthode ne peut pas être appliquée, dans la mesure où l'office financier du logement (ci-après OFL) exerce un contrôle indirect des prix de terrain, limitant artificiellement ceux-ci afin de lutter contre la spéculation.

Dans ces zones, il y a lieu d'appliquer la méthode que le rapport du DAEL nomme « méthode OFL ». Selon les normes actuellement en vigueur, le prix maximum qui peut être admis par l'OFL dans les plans financiers des opérations de construction selon les normes de la zone de développement est de 650 F/m2 de terrain, pour un IUS de 1,2. Lorsque l'IUS est supérieur à 1,2, le prix du terrain peut dépasser 650 F/m2 ; à l'inverse, lorsque l'IUS est inférieur à 1,2, le prix du terrain est réduit proportionnellement à la réduction de l'IUS.

Pour déterminer la plus-value, il faudra dès lors calculer la différence entre la valeur du terrain après la mesure d'aménagement adoptée, selon les normes susvisées, et sa valeur avant ladite mesure. L'application de cette méthode suppose que des prix de référence soient retenus pour des parcelles situées dans diverses zones ordinaires, qui devraient être fixés dans un règlement d'application.

c) Au niveau des résultats, le total des plus-values générées par l'ensemble des plans d'affectation du sol (plans de zone et plans localisés de quartier) adoptés en 1997 se monterait à près de 17 millions de francs. Ce chiffre doit être rapproché de celui de 11 millions de francs, qui correspond au total des plus-values générées par 6 autorisations de construire délivrées par voie dérogatoire, représentant 3 % de ce type d'autorisations de construire pouvant être concernées par le projet de loi 7559, le département ayant, pour celles-ci, dû procéder par sondage.

Cet élément constitue sans doute l'enseignement le plus intéressant du rapport, qui met donc en évidence que, « sur le plan comptable, les plus-values réalisées grâce à des dérogations sont plus importantes que celles dues à l'adoption de plans d'affectation du sol. Cela est dû au fait que l'immense majorité des plans d'affectation du sol adoptés en 1997 ont trait à des zones de développement, où le prix du terrain est limité et ne suit pas les règles du marché, ce qui démontre d'ailleurs l'efficacité de ce type de zone dans la lutte contre la spéculation » (p. 26).

d) C'est dire que les autorisations de construire délivrées par voie dérogatoire sont à même de conférer à un terrain un avantage « majeur » au sens de l'article 5, alinéa 1 LAT. Dès lors, leur inclusion dans la liste des mesures d'aménagement susceptibles de conférer à un terrain une plus-value et de faire l'objet d'une taxation se justifie pleinement.

e) Au surplus, le rapport conclut à la nécessité de modifier un certain nombre de dispositions contenues dans le texte distribué par le DAEL en janvier 1998, notamment en vue d'éviter le report éventuel de la taxe sur le prix de revient des constructions. Ces modifications ont été formulées par le DAEL dans un tableau comparatif, assorti d'un commentaire qui fait le lien avec les propositions issues du rapport précité, comme dit plus haut (cf. annexes).

Nouvelle lecture

C'est sur la base de ce nouveau tableau, dont la colonne de gauche reprend le texte de janvier 1998 incluant les amendements résultant de la première lecture (incomplète) du 28 janvier 1998 et la colonne de droite indique les nouveaux amendements présentés par le DAEL suite à son rapport, que les 13 janvier et 20 janvier 1999, la commission a entrepris la lecture article par article du projet de loi, qui a abouti au vote du texte final, le 3 février 1999.

Commentaire article par article

Le commentaire qui suit ne se veut pas exhaustif, certains articles étant parfaitement clairs et n'ayant, par ailleurs, pas fait l'objet de discussions particulières ou d'amendements significatifs. Le résultat des votes de 1re lecture est précisé à titre d'information, étant rappelé qu'en 2e lecture tous les articles ayant été acceptés à l'unanimité en 2e lecture, comme il a déjà été dit.

Art. 30 C : Principe

Pas d'observations.

Au vote 1re lecture, l'article 30C est accepté à l'unanimité.

Art. 30D : Fonds de compensation

L'alinéa 1 illustre les 3 axes de l'utilisation préconisée du fonds de compensation : le versement d'indemnités pour expropriation matérielle d'une part (let. a), le financement de mesures d'aménagement prises par l'Etat ou les communes d'autre part (let. b) et enfin le financement d'autres mesures compensatoires (let. c).

Il n'est pas inutile de rappeler que le budget de l'Etat ne prévoit actuellement aucune ligne pour les indemnités à verser en raison d'une expropriation matérielle ou des droits de voisinages, qui constituent, par essence, le poste de dépense naturel et principal du fonds.

Outre le financement des indemnités pour expropriation matérielle, le fonds de compensation pourrait également servir au financement de mesures d'aménagement. Cette notion doit être comprise dans un sens très large, plus large en tout cas que celui qui prévaut à l'article 30E, alinéa 2, dont il sera question plus loin. Il peut s'agir, par exemple, de l'acquisition de terrains par l'Etat (pour lequel le budget ne prévoit pas de ligne ordinaire), en vue de favoriser des opérations de construction, par exemple la réalisation de logements sociaux ou d'équipements publics. On pourrait aussi imaginer que ce fonds puisse alimenter le bonus conjoncturel à la rénovation prévu par la LDTR, soulageant le budget d'investissement de l'Etat.

Enfin, des mesures compensatoires, destinées à pallier certaines conséquences négatives résultant de la densification des quartiers pourraient trouver là un financement. On peut songer, par exemple, à la création de zones de verdure en milieu bâti.

L'article concernant le fonds de compensation, s'inspirant du modèle neuchâtelois, n'avait initialement pas été conçu pour un fonds susceptible de recevoir, à terme, plusieurs dizaines de millions de francs par an, comme c'est le cas avec un projet de loi incluant les dérogations. C'est la raison pour laquelle il a paru nécessaire de prévoir des alinéas donnant des directives un peu plus précises quant à son utilisation.

Ainsi, l'alinéa 2 prévoit que le fonds de compensation verse à la caisse de l'Etat les montants qui, sans la taxation, auraient été perçus, le cas échéant, au titre de l'impôt sur les gains immobiliers. La raison en est que le paiement de la taxe sur la plus-value instaurée par la présente loi constitue une impense qui vient en déduction de l'impôt sur les gains immobiliers (art. 30O, al. 3). Sans cette disposition, la caisse de l'Etat perdrait une partie de ses recettes dues à l'impôt sur les gains immobiliers, ce qui, compte tenu de la situation budgétaire actuelle, n'est pas acceptable.

Un montant important étant susceptible de s'accumuler sur ce fonds, il convient de fixer une limite au-delà de laquelle, sauf décision contraire du Grand Conseil (qui pourrait être motivée, par exemple, par un projet dont le financement est acquis et connu, mais devrait intervenir lors du prochain exercice budgétaire), le surplus de liquidités qui pourrait exister à la fin de chaque année doit être reversé à la caisse de l'Etat (al. 3). Enfin, vu l'importance probable des montants appelés à alimenter le fonds, il a paru légitime de demander au Conseil d'Etat de présenter à la fin de chaque législature, un rapport sur l'utilisation de celui-ci, afin que le Grand Conseil soit informé au mieux de l'utilisation du fonds (al. 4).

Au vote 1re lecture, l'article 30D est accepté à l'unanimité.

Art. 30E : Avantage

Le titre de l'article a été amputé de l'adjectif « avantage majeur », pour signifier que le projet de loi, s'il vise bien à mettre en place un système de compensation des avantages et inconvénients résultant de mesures d'aménagement, n'entend pas se limiter à la simple mise en oeuvre de l'article 5, al. 1 LAT. Le projet de loi s'assigne également d'autres buts, en particulier la lutte contre la spéculation foncière et ses effets négatifs.

L'alinéa 1, en tant qu'il définit l'avantage conféré par une mesure d'aménagement comme une « plus-value d'un ou de plusieurs biens ou actifs immobiliers compris dans le périmètre concerné par celle-ci et représentant un montant total supérieur à F 25'000.- », trace implicitement la limite entre un avantage mineur et un avantage majeur. Cette disposition s'inspire de l'article 10 de l'avant-projet d'ordonnance fédérale sur la compensation des avantages et inconvénients dus à des mesures d'aménagement du territoire, de mars 1994.

L'alinéa 2 définit les mesures d'aménagement au sens de l'alinéa 1, lesquelles sont assez strictes et ne doivent pas être confondues avec les mesures d'aménagement dont il est question à l'article 30D, al. 1, lettre b, relatif au fonds de compensation.

Il s'agit tout d'abord de l'adoption ou la modification d'un plan d'affectation du sol au sens de la Lalat (let. a), peu importe que le terrain en cause ait été, selon son statut antérieur, constructible ou non, que ce plan soit général (plan de zone) ou spécial (par exemple : plan localisé de quartier). Une réserve toutefois : les plans localisés de quartier en zone de développement dont l'indice est inférieur ou équivalent à celui, usuel, de cette zone sont réputés ne pas entraîner de plus-value (cf. al. 4).

Il s'agit ensuite de l'octroi d'une autorisation de construire en dérogation aux normes de la zone ou d'une autre plan d'affectation du sol au sens de l'article 13 Lalat et ... « ayant une influence sur l'aménagement du territoire ». Ces derniers termes signifient que la dérogation doit avoir une influence sur la capacité constructive du terrain en cause, et donc sur la valeur de celui-ci. Les dérogations purement « techniques » n'entrent donc pas en ligne de compte pour la perception d'une éventuelle taxe, y compris celles qui permettraient de diminuer le coût de la construction envisagée sur le territoire concerné.

L'alinéa 3 découle d'une proposition, issue du rapport du DAEL, qui reprend peu ou prou l'idée dite de la « taxation provisoire » du texte initial du projet de loi 7559. Le but poursuivi par cette disposition consiste à éviter autant que possible que le coût de la taxe puisse être reporté sur le prix de revient de l'immeuble et ne vienne augmenter les loyers. A cet égard, le rapport du DAEL a mis en évidence certains cas de vente et revente de terrains en cours de procédure d'adoption d'une mesure d'aménagement, au prix du statut futur du terrain. En d'autres termes, il existe des cas où, l'autorité ayant donné un signe selon lequel elle envisage l'adoption d'une mesure d'aménagement génératrice de plus-value dans un futur relativement proche, le propriétaire d'un terrain a pu trouver un acquéreur pour sa parcelle à un prix correspondant plus ou moins au statut futur de celle-ci, en tout cas largement supérieur à son statut actuel.

Dans de tels cas d'anticipation de la plus-value, qui s'apparentent peu ou prou à de la spéculation, contre laquelle l'initiative 21 entend précisément lutter, le fait de taxer le propriétaire au moment de l'adoption de la mesure (art. 30G et 30K) revient à toucher le nouveau propriétaire, qui a acheté au prix fort le terrain et n'a pas bénéficié de la plus-value, économiquement parlant. Le vendeur, qui, lui, a effectivement encaissé la plus-value, ne devrait s'acquitter d'aucune taxe ! Seul entrerait en ligne de compte l'impôt sur les gains immobiliers, et encore pour autant que soient remplies les conditions nécessaires à la perception de celui-ci, notamment la durée de possession. La taxe viendrait ainsi s'ajouter de façon indue au prix de revient de l'immeuble à construire, ce qui constitue un effet pervers à éviter.

D'où l'idée d'assimiler à des mesures d'aménagement les actes administratifs susceptibles de constituer les premiers signes, pour un propriétaire, que l'autorité est prête à envisager la prise d'une mesure d'aménagement génératrice de plus-value touchant son bien-fonds.

Les actes administratifs que l'on peut envisager d'assimiler, pour la circonstance, à des mesures d'aménagement sont la mise à l'enquête publique d'un projet de mesure d'aménagement au sens de l'art. 30E, al. 2 et la publication dans la Feuille d'avis officielle d'une demande de renseignement impliquant la mise à l'enquête publique d'une telle mesure d'aménagement ou de la réponse favorable à celle-ci (art. 30E, al. 3 let a et b).

A noter que la taxation ne signifie pas encore la perception, laquelle ne pourra avoir lieu qu'au moment de la réalisation de la plus-value, soit lors de la vente ou lors de l'autorisation définitive de construire (art. 30L). La taxation et la perception ne doivent donc pas être confondues.

L'alinéa 3 vise donc, comme dit plus haut, à éviter que la taxe ne vienne s'ajouter au prix de revient de l'immeuble et puisse être répercutée sur le niveau des loyers.

Enfin, l'alinéa 4, bien que cela ne soit pas nécessaire, précise, à toutes fins utiles, que les autorisations de construire délivrées sans dérogation, de même que les plans localisés de quartier dont l'indice d'utilisation du sol est inférieur ou équivalent à celui, usuel, de cette zone, fixé dans le règlement d'application, sont réputés ne pas entraîner de plus-value foncière, ce qui exclut la perception d'une taxe dans de tels cas. Bien entendu, il devrait en aller de même lorsque la loi qui a instauré la zone de développement a fixé un indice maximum d'utilisation du sol et que le plan localisé de quartier respecte cet indice.

Au vote 1re lecture :

- l'alinéa 1 est accepté par 11 oui et 4 abstentions (3 L, 1DC) ;

- l'alinéa 2 est accepté par 8 oui et 7 abstentions ;

- l'alinéa 3 est accepté à l'unanimité ;

- l'alinéa 4 est accepté par 14 oui et 1 abstention (L).

Art. 30F : Indemnisation

Cette disposition rappelle le principe figurant à l'article 5, al. 2 LAT. Elle illustre le principe de symétrie induit par le régime de compensation proposé : les inconvénients donnent lieu à indemnisation, les avantages donnent lieu à taxation.

Au vote 1re lecture, l'article 30F est accepté à l'unanimité.

Art. 30G : Assujettissement

Pas d'observations.

Au vote 1re lecture, l'article 30G est accepté par 10 oui et 5 abstentions (3 L, 1 R, 1 DC).

Art. 30H : Calcul de la plus-value

Cette disposition définit la plus-value et indique les critères à prendre en compte pour le calcul de celle-ci. Ceux-ci, en bref, reprennent les notions dégagées dans le rapport du DAEL précédemment évoquées, si bien qu'il n'y sera pas revenu pour éviter d'inutiles redites.

En bref, les termes « selon la nature des mesures d'aménagement possible » entendent consacrer la distinction à opérer pour le calcul de la plus-value selon que les terrains concernés sont sis ou déclassés en zone de développement ou en zone à bâtir ordinaire, l'alinéa 1 mentionnant les principaux critères utilisés par la méthode dite « OFL », applicable aux premiers, et la méthode dite « bâloise », applicable aux seconds.

Un amendement tendant à ce que seuls les critères de l'affectation et de l'indice d'utilisation du sol soient mentionnés dans cette disposition a été rejeté par une majorité de la commission (8 non contre 6 oui et 1 abstention).

Suite à ce vote de principe, la commission a, en revanche, tenu à préciser, au niveau de la loi, certains critères d'application de la méthode bâloise. Ainsi, il y a lieu de déduire de la valeur de rendement, non pas seulement le prix de construction, mais le prix de revient usuel de l'immeuble, dont le coût de construction est certes l'élément le plus important (C.F.C. 2). Il y a aura vraisemblablement lieu de considérer les autres postes du Code des coûts de construction (C.F.C) et de leur fixer un pourcentage moyen par rapport aux coûts de construction (C.F.C. 2) proprement dits. De même, il a paru utile de préciser que la valeur de rendement est déterminée sur la base du taux moyen des hypothèques de premier rang pratiqué par la Banque Cantonale de Genève, augmenté d'un pourcentage pour couvrir les charges, fixé par le règlement d'application, ce qui a été approuvé à l'unanimité. Selon le rapport du DAEL, la jurisprudence du Tribunal administratif rendue en matière d'expropriation formelle, sur laquelle se fonde cet article, a fixé ce pourcentage supplémentaire pour couvrir les charges à 1,5.

Au vote 1re lecture :

- l'alinéa 1 est accepté par 12 oui et 3 abstentions (L, R, DC) ;

- l'alinéa 2 est accepté à l'unanimité.

Art. 30I : Taux de taxation

L'alinéa 1 fixe, de manière uniforme, à 30 % le taux de taxation, quelle que soit la mesure d'aménagement génératrice de plus-value. Le texte initial du projet de loi 7559 le situait entre 20 et 40 % « selon l'importance de l'avantage concédé au bien et actif immobilier », critère un peu flou. La première version du texte DAEL proposait comme critère une distinction à opérer en fonction de la nature des différentes mesures d'aménagement envisagées. En fin de compte, il a paru plus simple de fixer un taux unique, qui soit tout simplement fonction du montant de la plus-value générée par une mesure d'aménagement.

Un amendement visant à fixer à 20 % le taux de la taxation a été refusé par la majorité de la commission (8 non contre 6 oui et 1 abstention).

Au vote 1re lecture :

- l'alinéa 1 est accepté par 8 oui contre 6 non et 1 abstention (DC) ;

- l'alinéa 2 est accepté par 8 oui contre 4 non (2 L, 1 R, 1 DC) et 3 abstentions (L, R, DC) ;

- l'alinéa 3 est accepté à l'unanimité.

Art. 30J : Exonération

Il a paru nécessaire d'ajouter un article traitant des exonérations, qui ne figurait pas dans le texte initial du projet de loi 7559.

La réalisation d'au moins 60 % de surfaces brutes de plancher destinées à des logements d'utilité publique, à des équipements publics ou à des logements soumis à la LDTR peut ainsi être exonérée de la taxe.

L'exonération ne peut pas être automatique. A titre d'exemple, le propriétaire d'un terrain déclassé, qui a bénéficié de la plus-value et qui construit du logement social à raison de 60 % sera exonéré, de telle façon que la taxe ne vienne pas s'ajouter au prix de revient de l'immeuble en cause. En revanche, on ne voit pas pourquoi il ne faudrait pas taxer le propriétaire qui a vendu son terrain à un prix qui tient compte de la plus-value, au motif que le nouvel acquéreur entend réaliser du logement social sur ce terrain : ce nouvel acquéreur ne bénéficiera en aucune façon de cette exonération.

Par conséquent, l'autorité devra apprécier, de cas en cas, l'opportunité d'une mesure d'exonération, étant encore précisé que l'emploi du terme « peut » signifie aussi que l'exonération peut n'être que partielle, le cas échéant.

A noter qu'un amendement visant à inclure les premiers F 25'000 de plus-value dans la liste des exonérations possibles a été rejeté (8 voix contre 6).

La notion d'équipement public (al. 1, let. b) peut aussi viser des équipements sportifs réalisés par une commune.

Au vote 1re lecture, l'article 30J est accepté à l'unanimité.

Art. 30K : Taxation

Pas d'observations.

Au vote 1re lecture, l'article 30K est accepté par 7 oui (3 S, 2 Ve, 2 AdG), 1 contre (DC) et 4 abstentions (3 L, 1 R).

Art. 30L : Perception

La créance de la taxe instituée par la présente loi est exigible lors de l'aliénation du terrain ou de la délivrance d'une autorisation définitive de construire.

L'idée générale poursuivie par cette disposition consiste à différer le paiement de la taxe au moment où le propriétaire qui a reçu son bordereau de taxation réalise concrètement la plus-value et est en mesure de l'acquitter, c'est-à-dire au moment de l'aliénation, d'une part, ou au moment de la délivrance d'une autorisation définitive de construire, au plus tard à l'ouverture du chantier de construction, d'autre part.

Le terme autorisation « définitive » de construire exclut que la taxe puisse être exigible lors de la délivrance d'une autorisation préalable de construire. Quant au terme « aliénation », il exclut que la taxe ne devienne exigible en cas de succession, ce qui répond notamment à l'une des préoccupations émises par la Chambre genevoise d'agriculture.

Au vote 1re lecture, l'art. 30L est accepté par 7 oui et 5 abstentions (3 L, 1 R, 1 DC).

Art. 30M : Révision

Il est bien entendu qu'au cas où, postérieurement à la décision de taxation, l'un des éléments entrant dans le calcul de celle-ci subit une modification de nature à influencer sensiblement les possibilités de mise en valeur du terrain, le département pourra réviser la taxe. Cette révision aura lieu d'office ou à la demande du propriétaire.

Une même parcelle pouvant successivement faire l'objet de plusieurs mesures d'aménagement ou actes administratifs assimilables (ex. : réponse favorable à une demande de renseignement, mise à l'enquête publique, adoption d'un plan de zone, d'un plan de quartier, dérogation), cette disposition est appelée à faire l'objet d'un usage intensif, la révision intervenant probablement d'office dans nombre de ces cas.

Encore faut-il que ce terrain n'ait pas été aliéné et n'ait pas changé de propriétaire entre-temps. Il s'agit, en effet, d'éviter qu'un propriétaire qui aurait vendu son terrain à un moment donné, suite à l'adoption d'une mesure d'aménagement, en fonction de la plus-value conférée par cette mesure et donc bénéficié économiquement de celle-ci, ait ensuite qualité pour demander une révision de la taxe qu'il a dû acquitter parce que, par la suite, la valeur de son terrain (qui ne le concerne plus, mais concerne désormais le nouveau propriétaire) s'est modifiée, par exemple suite à l'adoption d'une mesure d'aménagement moins favorable.

Au vote 1re lecture, l'article 30M est accepté par 7 oui et 6 abstentions (3 L, 2 DC, 1 R).

Art. 30N : Hypothèque légale

Bien que l'alinéa 1 dispose que l'hypothèque prend naissance sans inscription, il a paru utile, pour des raisons de publicité, de préciser, comme le fait l'article 22 du règlement d'application de la loi générale sur les zones de développement à propos des taxes d'équipement, que cette hypothèque peut être inscrite au registre foncier, à titre déclaratif, à la réquisition du département. Cette hypothèque sera radiée d'office lorsque la taxe aura été complètement acquittée.

A noter que cette hypothèque ne porte pas intérêt, le problème de l'adaptation de la taxe étant réglé par l'article 30I, alinéa 2 relatif à la taxation, qui dispose que le montant de la taxe est adapté à l'indice suisse des prix à la consommation à dater de la notification du bordereau.

Au vote 1re lecture :

- l'alinéa 1 est accepté par 7 oui et 6 abstentions ;

- l'alinéa 2 est accepté par 7 oui et 6 abstentions ;

- l'alinéa 3 est accepté à l'unanimité ;

- l'article 30N est accepté par 7 oui et 7 abstentions (3 L, 2 R, 2 DC).

Art. 30O : Recouvrement

Il convient ici de signaler que l'alinéa 3 de cette disposition éclaircit de façon décisive le lien qui peut exister entre la taxe instituée par la présente loi et l'impôt sur les gains immobiliers : cette taxe diminue le gain immobilier imposable. Elle en constitue, le cas échéant (c'est-à-dire pour autant que les conditions prévues par la loi sur les contributions publiques pour la perception de l'impôt sur le gain immobilier soient remplies), une impense déductible au sens de l'art. 82, alinéa 8 LCP. La taxe sur la plus-value ne revient donc pas à taxer deux fois le même objet pour la même cause et ne constitue pas davantage un cas de double imposition, étant de surcroît observé que cette dernière notion a une portée intercantonale (art. 46, al. 2 Cst féd) et non cantonale.

Un alinéa disposant que « les poursuites sont exercées dans le canton, quel que soit le domicile du débiteur » a été supprimé par la commission (7 oui et 7 abstentions), pour cause de redondance avec le droit fédéral et afin d'alléger un peu cette disposition.

Au vote 1re lecture :

- l'alinéa 1 est accepté par 7 oui et 7 abstentions ;

- l'alinéa 3 est accepté par 10 oui et 4 abstentions (2 L, 1 R, 1 AdG).

Art. 30 P : Règlement d'application

Un certain nombre d'articles se référant à des dispositions d'application à prendre dans un règlement, il a paru utile, bien que pas nécessaire pour toutes les disposition, de rappeler l'utilité d'un tel règlement.

Au vote 1re lecture, l'article 30P est accepté à l'unanimité.

Art. 34, al. 2 : Recours contre les décisions du département

Pas d'observations.

Au vote 1re lecture, l'article 34, alinéa 2 est accepté par 7 oui et 7 abstentions.

Art. 36 : Demandes d'indemnité

Dans la suite logique de l'article 30F qui rappelle le principe de l'indemnisation en cas d'expropriation matérielle et du principe de symétrie des mesures appliqué par ce projet de loi, cette disposition indique l'autorité compétente pour connaître des demandes d'indemnisation et les délais nécessaires à cette fin, en formalisant la pratique actuelle en la matière, qui n'a jamais été indiquée jusqu'à présent.

Il est en outre précisé qu'une transaction judiciaire peut intervenir pendant la procédure à tous les stades de celle-ci. Il s'agit là d'une faculté accordée à l'autorité en faveur des propriétaires lésés, de telle sorte que ceux-ci soient indemnisés rapidement lorsque le dommage apparaît indiscutable et son montant difficilement contestable. L'autorité devra utiliser cette faculté en faisant preuve de toute la réserve voulue. Le rapport sur l'utilisation du fonds (art. 30D, al. 4) devra contenir des explications circonstanciées pour tout versement qui interviendrait sans qu'un jugement définitif ne soit en force.

Au vote 1re lecture, l'article 36 nouveau est accepté par 10 oui et 5 abstentions (3 L, 1 R, 1 DC).

Au surplus, l'intitulé et la numérotation du titre de la Lalat sous lequel seront contenus les articles de la présente loi sont acceptés par 10 voix et 5 abstentions (3 L, 1 R, 1 PdC).

Deuxième lecture et vote final

En 2e lecture, comme il a déjà été dit, tous les articles ont été acceptés à l'unanimité, sans qu'aucun amendement ne soit présenté.

Toutefois, au vote final du texte dans son ensemble, le projet de loi issu des travaux de la commission est rejeté par 7 voix pour (2 AdG, 3 S, 2 Ve) contre 7 voix contre (3 L, 2 R, 2 DC), suite à la manoeuvre politicienne déplorable évoquée au début du présent rapport.

Tels sont les motifs qui nous amènent à vous recommander, Mesdames et Messieurs les députés, l'adoption du texte issu du projet de loi 7559 et qui figure en annexe.

Document disponible au Service du Grand Conseil :

Rapport DAEL de décembre 1998 sur un essai d'application du projet de loi 7559, version DAEL après 1re lecture partielle de la commission.

Annexes :

2. Prises de position de l'association des promoteurs constructeurs genevois et de la Chambre genevoise d'agriculture sur le projet de loi 7559, version d'origine.

ANNEXE 1

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ANNEXE 2

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(R 336-A)

La résolution 336 dont la majorité de la Commission d'aménagement propose le rejet invite le Grand Conseil à décréter que « la loi du23 juin 1994 modifiant la loi sur les contributions publiques (selon PL 6737) concrétise le deuxième volet de l'initiative 21, intitulé : « l'aménagement du territoire. »

Pour mémoire, l'initiative 21, intitulée « Halte à la spéculation foncière » et qui, comme son nom le suggère à juste titre, vise à « combattre efficacement la spéculation foncière », préconise de modifier les dispositions relatives à :

- la fiscalité ;

- l'aménagement du territoire ;

- le régime du crédit bancaire à l'achat de terrains ;

- l'acquisition de terrains par les collectivités publiques.

Cette initiative non formulée, déposée le 8 février 1988 par le Parti du Travail, préconise l'adoption de mesures dans chacun de ces 4 domaines. Le 15 octobre 1992, le Grand Conseil a déclaré recevable cette initiative, à l'exception du 3e volet relatif au régime du crédit bancaire à l'achat de terrains.

Les premiers et seconds volets de l'initiative 21 sont ainsi libellés :

« La fiscalité »

Le premier moyen, c'est l'impôt sur la plus-value immobilière. Bien que cet impôt soit élevé, il n'est qu'imparfait car il peut être actuellement détourné. Il faut donc revoir les lois fiscales pour décourager la spéculation immobilière par des prélèvements plus importants et empêchant la fraude et l'évasion fiscale. »

« L'aménagement du territoire »

Le deuxième moyen est la mise au point d'un système de prélèvement d'une plus-value immobilière résultant de la simple délivrance d'une autorisation de construire. La loi fédérale d'aménagement du territoire permet au canton de prélever une telle plus-value. »

Grossière violation des droits politiques des citoyens

Dans son avis de droit de septembre 1995, M. Andreas Auer, professeur de droit constitutionnel à l'Université de Genève mandaté par le Conseil d'Etat à la demande de la Commission d'aménagement, avait été très clair :

« Il y a lieu de confirmer que le Grand Conseil s'est effectivement engagé, le 15 octobre 1992, à concrétiser les trois chapitres recevables de l'initiative 21 sous forme de projet de loi. En l'état, il ne l'a fait que pour le volet 1, et encore au prix d'une violation grossière des droits politiques des citoyens. Le volet 2 attend encore concrétisation » (Mémorial Grand Conseil 1997, p. 4522).

La mise au point d'un système de compensation de la plus-value résultant de la simple délivrance d'une autorisation de construire (art. 5, al. 1 LAT ; 2e volet « aménagement du territoire ») ne doit pas être confondue avec la question de l'impôt sur les gains immobiliers prévu dans la loi sur les contributions publiques (art. 80 ss LCP; 1er volet « fiscalité »).

C'est une évidence !

On l'aura dès lors compris : en proposant au Grand Conseil de dire que la « la loi du 23 juin 1994 modifiant la loi sur les contributions publiques (selon PL 6737) », à savoir la loi relative à l'imposition des gains immobiliers, qui concrétise le 1er volet de l'initiative 21, « concrétise (aussi) le deuxième volet de l'initiative 21, intitulé : « l'aménagement du territoire », la résolution R 336 propose au Grand Conseil, ni plus ni moins, de ne pas concrétiser le second volet de l'initiative 21 et donc de bafouer, de manière scandaleuse, les droits politiques des citoyens !

Une politique pitoyable poursuivie de longue date

Il s'agit là d'une effronterie de plus, qui s'inscrit dans le cadre de la politique poursuivie de longue date par la droite de ce Grand Conseil en matière d'aménagement du territoire. On rappellera qu'au milieu des années 1980, la majorité de droite du Grand Conseil avait déjà rejeté la proposition de créer un fonds de compensation destiné à recueillir le produit des taxes sur les plus-values dues à des mesures d'aménagement du territoire, faite par le Conseil d'Etat dans le cadre de son projet de loi de 1985 (cf. art. 3 du PL 5717), ayant abouti à l'adoption de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire de 1987.

Comme l'expose le rapport de la minorité de la Commission d'aménagement concernant le projet de loi 7559 concrétisant la 2e invite de l'initiative 21 « Halte à la spéculation foncière », auquel le présent rapport est étroitement lié, les représentants des partis de la droite de ce parlement, au mépris des mêmes droits populaires dont ils se prévalaient bruyamment lorsqu'il s'agissait de concrétiser une autre initiative non formulée qui avait leur préférence, à savoir la traversée de la rade, persiste à ne rien vouloir faire, et à cautionner ainsi un système caractérisé de privatisation des bénéfices et de socialisation des pertes.

A suivre le raisonnement tenu par les partis de droite, alors même qu'un rapport du DAEL estime le total des plus-values générées par l'ensemble des plans d'affectation du sol (plans de zone et plans localisés de quartier) adoptés en 1997 à près de F 17 millions, soit un montant dérisoire en regard des dizaines, voire des centaines de millions susceptibles d'être générées par les autorisations de construire délivrées par voie dérogatoire (11 millions pour 6 autorisations prises au hasard et représentant 3 % des cas), l'Etat ne devrait pas prélever de taxes sur ces plus-values dues aux mesures d'aménagement qu'il est amené à prendre, sans toutefois que les propriétaires ne disposent d'un droit. L'Etat devrait se contenter du modeste impôt sur les gains immobiliers, qui ne peut être perçu qu'en cas de vente, en évoluant à la baisse en fonction du temps pendant lequel le vendeur a été propriétaire, pour atteindre 0 % au bout de 25 ans. C'est le principe de la privatisation des bénéfices, qui, en l'occurrence, veut que les plus-values tirées des mesures d'aménagement restent autant que possible dans la seule poche des heureux bénéficiaires, sans que l'Etat, pourtant à l'origine de l'heureuse fortune de quelques propriétaires qui se trouvent soudainement privilégiés par rapport aux autres, ne bénéficie de cette manne tombée du ciel.

En revanche, lorsque l'Etat est amené à prendre des mesures d'aménagement susceptibles de léser plus particulièrement un propriétaire, par exemple lorsqu'il doit exproprier un terrain pour la création d'une route ou d'un équipement public, ces mêmes milieux ne voient aucun inconvénient, bien au contraire, à ce que l'Etat indemnise ces propriétaires. A titre d'exemple, on pourrait peut-être rappeler que le Grand Conseil est toujours saisi d'un projet de loi du Conseil d'Etat (PL 7610) ouvrant un crédit de 60 millions pour l'indemnisation des propriétaires riverains de l'Aéroport. L'on ne parlera même pas des coûts indirects qui ont pour origine des opérations de spéculation, à charge de l'Etat. On est très loin de la petite dizaine de millions (9,8) qu'a rapporté, en 1997, l'impôt sur les gains immobiliers ! C'est le principe de la socialisation des pertes, qui en l'occurrence veut que les pertes dues à des mesures d'aménagement, au contraire des bénéfices tirés de ces mêmes mesures, soient pleinement supportées par l'Etat, et donc reportées sur la collectivité, puisque l'Etat tire ses ressources d'impôts frappant l'ensemble des contribuables.

La résolution 336 est donc l'une des nombreuses manoeuvres dilatoires visant au pire à retarder, au mieux à empêcher l'instauration d'un juste fonds de compensation, alimenté par les taxes à percevoir sur les plus-values dues à des mesures d'aménagement et qui permettrait en particulier à l'Etat de financer le coût des indemnités dues au titre de l'expropriation matérielle pour d'autres mesures d'aménagement du territoire, prises au bénéfice de l'ensemble de la collectivité, mais susceptibles de léser plus particulièrement un propriétaire.

Des manoeuvres politiciennes destinées à embrouiller l'esprit des citoyens et à les décourager de s'intéresser à la chose publique

Certaines de ces manoeuvres ont, parfois, été plus subtiles, à défaut d'autre chose.

Ainsi, le fait d'avoir, en 1992, déclaré recevable et d'être entré en matière sur l'initiative 21 pourrait être de nature à tromper un observateur non averti. Par cet acte, la majorité de droite du Grand Conseil de l'époque aurait pu sembler avoir brusquement changé d'avis à propos de la création d'un fonds de compensation pour les mesures d'aménagement du territoire, en s'engageant à concrétiser notamment le second volet de cette initiative par un projet de loi appelé à faire l'objet d'une votation populaire.

En réalité, cette décision (prise plus de 4 ans après le dépôt de cette initiative !) visait surtout à éviter non seulement une gifle du Tribunal fédéral, qui n'aurait pu qu'annuler une éventuelle décision d'irrecevabilité, mais surtout à prévenir la sanction politique qu'aurait pu constituer l'acceptation, par le peuple, de l'initiative 21, comme l'a du reste relevé le professeur Auer dans son avis de droit précité (Mémorial 1997, p. 4519, point 13). En effet, à défaut de déclarer recevable cette initiative et d'entrer en matière sur celle-ci, cette initiative aurait alors dû être soumise, en tant que telle, directement au peuple. La perspective d'une probable caution populaire de cette initiative a fait réfléchir la majorité de droite de l'époque, qui, bien que défavorable à cette initiative, a préféré l'accepter, en adhérant formellement à son second volet, ceci afin d'éviter d'avoir à gérer par la suite le caractère plébiscitaire qu'aurait constitué l'approbation par le peuple de cette initiative.

La majorité de droite de l'époque, en fonction du droit alors en vigueur, était alors coutumière de ce type de raisonnement qui révèle une triste conception des droits démocratiques. Elle n'avait, en effet, pas hésité à tenir le raisonnement inverse, quelques années plus tôt, s'agissant d'une autre initiative non formulée. On se souvient, en effet, qu'en 1988, la majorité de droite du Grand Conseil, bien que favorable à l'initiative sur la traversée de la rade (IN 16), avait refusé d'entrer en matière sur celle-ci (cf. Mémorial 1988, p. 1313), afin que le peuple soit appelé à se prononcer sur cette initiative non formulée et que le Parlement reçoive un clair mandat populaire de la concrétiser. Cette première votation, qui eut lieu le 12 juin 1988, dont le Grand Conseil aurait pu faire l'économie conformément à l'article 67, alinéa 1 de la Constitution genevoise (ancienne teneur), encore applicable pour l'initiative 21, au profit d'un projet rédigé par ses soins, avait alors revêtu un caractère plébiscitaire, jusqu'à la votation que l'on connaît où ni le pont, ni le tunnel n'ont trouvé grâce aux yeux des électeurs.

En cas d'acceptation populaire lors d'une votation sur l'initiative 21 elle-même, il n'aurait, en effet, pas été possible à la droite de ce Grand Conseil de différer aux calendes grecques la mise au point du projet de loi appelé à concrétiser la 2e invite de l'initiative 21, en venant par exemple prétendre, 11 ans après le dépôt de cette initiative, que le 1er volet concrétiserait également le second, comme c'est le propre de la résolution 336. Il n'aurait pas été possible non plus, pour les représentants des partis de droite au sein de la Commission d'aménagement, de se raccrocher à un avant-projet de loi alibi, pris sur le modèle neuchâtelois, comme, par exemple, le projet issu des travaux de la Commission de l'aménagement sous la précédente législature, pour ne rien faire. Ceci, bien sûr, sans pour autant que ce projet n'ait jamais été formellement déposé par l'un ou l'autre de ceux-ci, ce qui démontre encore une fois, si besoin est, la volonté sans cesse réaffirmée de la droite de ce Grand Conseil de ne pas concrétiser le 2e volet de l'initiative 21 et le mépris dans lequel elle tient les droits politiques des citoyens lorsqu'une initiative ne lui plaît pas.

Cette attitude antidémocratique mérite d'être dénoncée et sanctionnée, à commencer par le rejet de la résolution 336.

Au vote final, la résolution est rejetée par 7 voix pour (3 L, 2 R, 2 DC) contre 7 voix contre (2 AdG, 3 S, 2 Ve).

Tels sont les motifs qui nous amènent à vous recommander, Mesdames et Messieurs les députés, le rejet de la résolution 336.

Proposition de résolution(336)

visant à établir que la loi votée le 23 juin 1994 (PL 6737), concrétisele deuxième volet de l'initiative 21 « Halte à la spéculation foncière »

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève,considérant :

- le volet 2 de l'initiative 21 « Halte à la spéculation foncière » ;

- la loi du 23 juin 1994 modifiant la loi sur les contributions publiques (selon PL 6337 traitant de l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers) ;

- la lettre que la Commission fiscale a adressée le 28 novembre 1996 à la Commission d'aménagement ;

le deuxième paragraphe, chiffre 2, de la conclusion de l'avis de droit de Me Pierre Louis Manfrini, du 26 mars 1997,

décrète ce qui suit :

Premier débat

M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Alors que la commission d'aménagement pensait avoir achevé ses travaux, elle a été saisie de lettres plus ou moins relevantes, dont une de la Chambre genevoise d'agriculture, qui formule un certain nombre de propositions intéressantes qu'il paraît hasardeux et difficile de traiter en séance plénière.

Une des propositions se rapporte à l'affectation des recettes découlant de déclassements de terrains agricoles en zone à bâtir ; elle viserait à affecter ces recettes aux crédits d'investissement dans l'agriculture. Ce sont des questions qui sont, à notre sens, suffisamment importantes et fondamentales pour qu'on prenne la peine de les traiter à nouveau en commission et, surtout, d'auditionner les intéressés, à savoir les représentants de la Chambre genevoise d'agriculture.

C'est la raison pour laquelle je vous suggère de renvoyer ce projet en commission, afin que nous puissions procéder à ces auditions et tenir compte des observations les plus pertinentes de cette instance, notamment.

Le président. Une proposition de renvoi a été formulée, nous débattons sur ce renvoi.

M. Alain Etienne (S), rapporteur de minorité. Nous ne nous opposons pas au renvoi en commission que nous propose M. Koechlin !

M. Christian Grobet (AdG). Nous nous rallions également à cette proposition de renvoi en commission, même si cette initiative est déposée depuis fort longtemps devant ce Grand Conseil.

Nous pensons que les propositions de la Chambre d'agriculture, comme l'a dit M. Koechlin, méritent d'être examinées. Il faut que nous les analysions et il n'est effectivement pas possible de faire ce travail en séance plénière. Ce texte, qui est en train d'aboutir mais qui a posé certains problèmes délicats à résoudre, mérite d'être mis au point de manière très soignée pour que la votation populaire puisse se dérouler dans les meilleures conditions.

M. Hubert Dethurens (PDC). J'avais précisément déposé un amendement concernant le fonds de compensation qui est proposé. Je m'aperçois que tout le monde est d'accord de rediscuter cette question et je suis donc le mouvement : je suis très heureux de ce renvoi en commission !

Mis aux voix, les rapports sur l'initiative 21, le projet de loi 7559 et la proposition de résolution 336 sont renvoyés à la commission d'aménagement du canton.