Séance du
vendredi 30 avril 1999 à
17h
54e
législature -
2e
année -
6e
session -
17e
séance
PL 8013
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1 But
1 La présente loi a pour but de régler les conditions de passation des marchés de l'Etat, tout en favorisant l'emploi et le respect des conditions de travail applicables dans le canton. Elle vise également à harmoniser les règles de passation des marchés de l'Etat, des communes et des collectivités locales, tout en mettant les entreprises sur un pied d'égalité. Elle vise enfin à assurer une saine concurrence, tout en évitant les abus de celle-ci. A cette fin, le Conseil d'Etat adopte des règles respectant les principes suivants, qui sont applicables à la passation des marchés par l'Etat, les communes et les établissements publics y compris ceux soumis à l'accord intercantonal sur les marchés publics (ci-après l'accord intercantonal), adopté le 25 novembre 1994 par la Conférence suisse des directeurs cantonaux des travaux publics, de l'aménagement du territoire et de la protection de l'environnement et par la Conférence des chefs des départements cantonaux de l'économie publique, et approuvé par le Conseil fédéral (à préciser), dont le texte est annexé à la présente loi.
2 Le Conseil d'Etat peut autoriser les communes ou les établissement publics à déroger aux règles applicables aux marchés publics si les circonstances le justifient.
Article 2 Champ d'application
1 La présente loi s'applique à la passation des marchés suivants lorsqu'ils sont adjugés par ou pour le compte de l'Etat, des communes, des collectivités publiques cantonales, d'établissements de droit public cantonal créés par une loi cantonale ainsi que des fondations, associations et sociétés contrôlées par l'Etat, des communes ou des collectivités publiques :
2 Les dispositions de la présente loi s'appliquent aux marchés de la construction passés par des maîtres d'ouvrage, y compris leurs sous-traitants, qui ont été mis au bénéfice d'une aide financière de l'Etat correspondant à 10 % au moins du coût de construction.
Article 3 Ouverture des marchés
Sous réserves des marchés soumis à l'accord intercantonal, les marchés mis en soumission sont ouverts aux entreprises ayant leur siège dans le canton depuis au moins 3 ans. Les adjudications peuvent déroger à cette règle pour assurer une concurrence réelle ou pour des marchés nécessitant de faire appel à des entreprises de l'extérieur, pour autant qu'elles acceptent de créer un établissement stable si le marché dépasse un million de francs.
Les adjudicateurs sont libres d'ouvrir ou non à des entreprises ayant leur siège hors du canton les marchés non soumis à l'accord intercantonal sur les marchés publics.
Article 4 Adjudications
1 Les adjudications dont le montant dépasse 1 million de francs sont soumises au préavis d'une commission formée de cinq membres, dont un représentant de l'adjudicateur, un représentant du Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, un représentant du Département de l'économie publique, un représentant des syndicats des employeurs et un représentant des syndicats des travailleurs.
2 Les décisions d'adjudication peuvent faire l'objet d'un recours dans le délai de 30 jours auprès du Conseil d'Etat, dont la décision est finale.
Article 5 Commission consultative
Le Conseil d'Etat nomme une commission consultative formée de représentants de l'Etat, des communes, des corporations de droit public et des partenaires sociaux chargée d'examiner le bon fonctionnement de la loi.
Article 6 Adhésion
Le Conseil d'Etat est autorisé à adhérer, au nom de la République et canton de Genève, à l'accord intercantonal sur les marchés publics (ci-après : l'accord intercantonal), adopté le 25 novembre 1994 par la Conférence suisse des directeurs cantonaux des travaux publics, de l'aménagement du territoire et de la protection de l'environnement et par la Conférence des chefs des départements cantonaux de l'économie publique, et approuvé par le Conseil fédéral le 14 mars 1996.
Article 7 Adjudicateurs
Les communes ou groupements de communes font également partie des pouvoirs adjudicateurs soumis à l'accord intercantonal, ceci sous réserve de réciprocité.
Article 8 Voies de recours
1 Le Tribunal administratif est l'autorité judiciaire compétente au sens de l'article 15 de l'accord intercantonal pour statuer sur recours contre les décisions de l'adjudicateur.
2 Sont réputées décisions sujettes à recours :
3 Si le caractère illicite de la décision est constaté, le recourant peut demander devant l'autorité compétente la réparation de son dommage, limité aux dépenses qu'il a subies en relation avec les procédures de soumission et de recours.
4 Sauf disposition contraire contenue dans l'accord intercantonal, la procédure est réglée par la loi sur la procédure administrative.
Article 9 Commissions
1 Le Conseil d'Etat nomme les commissions chargées de la vérification du respect des dispositions en matière de marchés publics, conformément à l'article 19 de l'accord intercantonal.
2 Pour les marchés de construction, la commission est composée de représentants de l'Etat, des associations d'entrepreneurs et des syndicats de travailleurs.
3 L'Office cantonal de l'inspection et des relations du travail (OCIRT) est chargé de contrôler que les soumissionnaires ont pris l'engagement de respecter les conditions de travail en vigueur à Genève. Ils sont tenus de mettre à sa disposition tous les documents nécessaires à ce contrôle.
Article 10 Dispositions pénales
Les infractions à la présente loi et à l'accord intercantonal sont passibles d'une amende prononcée par le Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement pouvant atteindre Frs 60 000.-. L'amende peut faire l'objet d'un recours auprès du Tribunal administratif.
Article 11 Dispositions d'exécution
Le Conseil d'Etat édicte les dispositions d'exécution de la présente loi et de l'accord intercantonal.
Le Conseil d'Etat réglemente la passation des marchés publics non soumis à l'accord intercantonal. Il peut soumettre ces marchés à certaines dispositions dudit accord. Les décisions y relatives ne sont pas susceptibles de recours au sens de l'article 2.
Article 12 Clause abrogatoire
La loi sur les soumissions et adjudications publiques des travaux de l'Etat, du 2 novembre 1892, ainsi que la loi autorisant le Conseil d'Etat à adhérer à l'accord intercantonal sur les marchés publics du 12 juin 1997 sont abrogées.
Article 13 Entrée en vigueur
L'accord intercantonal sur les marchés publics entre en vigueur lors de la publication de la déclaration d'adhésion de la République et canton de Genève dans le Recueil officiel des lois fédérales.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le présent projet de loi vise à se substituer au projet de loi 7416 qui a été renvoyé à la Commission des travaux et qui est devenu partiellement dépassé en raison de la loi autorisant le Conseil d'Etat à adhérer à l'accord intercantonal sur les marchés publics, votée le 12 juin 1997 par le Grand Conseil et en raison du règlement sur la passation des marchés publics en matière de constructions du 19 novembre 1997 adopté par le Grand Conseil.
De plus, la loi adoptée par le Grand Conseil le 12 juin 1997 ne s'applique qu'à l'adhésion du canton de Genève à l'accord intercantonal sur les marchés publics ;
Cet accord s'applique uniquement aux marchés de la construction pour un montant supérieur à 10 millions de francs. La loi du 12 juin 1997, à laquelle l'accord précité n'est même pas annexé dans le recueil systématique des lois genevoises (!), a abrogé l'ancienne loi sur les soumissions et adjudications publiques des travaux de l'Etat.
Cette loi n'a pas été remplacée et le Conseil d'Etat s'est borné à adopter un règlement L 6 05.01, qui n'a pas de base légale pour les marchés en dessous de 10 millions de francs qui ne sont pas soumis à l'accord intercantonal. Il paraît souhaitable que le Grand Conseil adopte cette base légale et fixe dans la loi les principes de base des adjudications.
A ce sujet, les auteurs du projet de loi ne souscrivent pas au principe figurant à l'article 8 du Règlement L 6 05.01 selon lequel les adjudications « doivent fondamentalement être obtenues dans une libre concurrence », sachant que la concurrence à outrance qui caractérise actuellement le marché de la construction, avec ses pratiques de dumping, est génératrice de suppressions d'emplois et de faillites. Les partenaires sociaux sont du reste très préoccupés sur le plan national par les effets pervers de la concurrence et demandent que des mesures soient prises pour lutter contre le dumping à l'instar de l'Union européenne qui, sur la base du rapport Atkins, s'efforce de procéder à l'aménagement du marché européen de la construction en recommandant un certain nombre de mesures régulatrices. Nous estimons que la loi doit énoncer les principes généraux sur lesquels la politique d'adjudication des travaux de l'Etat doit être fondée. Le projet de loi 7416 initial, qui prévoyait certains principes dans ce domaine a été complété et a intégré certaines règles figurant dans le règlement L 6 05.01.
Le projet de loi distingue entre les marchés soumis à l'accord intercantonal et ceux qui ne le sont pas et qui ne doivent donc pas être nécessairement ouverts à des entreprises ayant leur siège hors du canton. Les auteurs du projet de loi tiennent à préciser à ce sujet qu'ils considèrent que les travaux de l'Etat et des communes doivent être prioritairement adjugés aux entreprises locales. Le projet de loi prévoit à cet égard une commission d'adjudication pour veiller à ce que les intérêts de l'économie locale soient pris en considération, compte tenu des marchés qui ont été attribués depuis un certain temps à des entreprises hors du canton.
Les infractions à la législation sur les adjudications doivent pouvoir être sanctionnées si nécessaires par l'amende, ce qui nécessite une base légale.
Au bénéfice de ces explications, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que le présent projet de loi recevra un bon accueil de votre part.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission des travaux.