Séance du
jeudi 29 avril 1999 à
17h
54e
législature -
2e
année -
6e
session -
14e
séance
PL 8021
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La loi sur l'instruction publique, du 6 novembre 1940, est modifiée comme suit :
Art. 120, al. 3 à 5 (abrogés)
Art. 129A Résiliation des rapports de service pour motif objectivement fondé (nouveau)
1 Le Conseil d'Etat peut, pour motif objectivement fondé, mettre fin aux rapports de service d'un fonctionnaire ou d'une fonctionnaire.
2 Est considéré comme objectivement fondé, tout motif dûment constaté démontrant que la poursuite des rapports de service est rendue difficile en raison :
3 Le délai de résiliation est de 3 mois pour la fin d'un mois.
4 Cette mesure est précédée d'une enquête interne au département. Les dispositions de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985, sont applicables, en particulier celles relatives à l'établissement des faits (art. 18 et suivants).
5 Lorsque l'intérêt des élèves l'exige, le département peut prendre des mesures provisoires. Une mesure provisoire d'éloignement de la classe doit être confirmée par le Conseil d'Etat dans les meilleurs délais. Ces mesures ne peuvent entraîner une diminution de traitement de l'intéressé.
Art. 130 Mesures disciplinaires (nouvelle teneur)
1 Les membres du personnel enseignant qui enfreignent leurs devoirs de service, soit intentionnellement, soit par négligence, peuvent faire l'objet des sanctions suivantes dans l'ordre croissant de gravité :
2 Ces mesures sont précédées d'une enquête interne au département dans les cas cités à l'alinéa 1, lettres a, b et c et d'une enquête administrative ouverte par le Conseil d'Etat dans les cas cités à l'alinéa 1, lettre d.
Art. 130A Suspension provisoire pour enquête (nouveau)
1 Dans l'attente du résultat d'une enquête administrative ou d'une information pénale, le Conseil d'Etat peut, de son propre chef ou à la demande de l'intéressé, suspendre provisoirement le membre du personnel auquel une faute, de nature à compromettre la confiance ou l'autorité qu'implique l'exercice de sa fonction, est reprochée.
2 Cette décision est notifiée par lettre motivée.
3 La suspension provisoire peut entraîner la suppression de toute prestation à la charge de l'Etat.
4 A l'issue de l'enquête administrative, il est veillé à ce que l'intéressé ne subisse aucun préjudice réel autre que celui qui découle de la décision finale. La révocation peut cependant agir rétroactivement au jour d'ouverture de l'enquête administrative; le licenciement disciplinaire ou la démission peuvent également agir rétroactivement jusqu'au terme du délai de trois mois pour la fin d'un mois à compter de l'ouverture de l'enquête.
Art. 131, al. 1, 1re phrase (nouvelle teneur)
al. 5 (nouveau)
1 Dans les cas prévus par les articles 128, 129, 129 A, 130, alinéa 1, lettres c et d et 130 A, le ou la fonctionnaire intéressé a le droit de recourir dans les 30 jours contre la décision prise à son égard auprès d'une commission de 5 membres composée comme suit :
5 Le membre du personnel qui fait l'objet d'un avertissement ou d'un blâme peut porter l'affaire, dans un délai de 10 jours, devant le conseiller ou la conseillère d'Etat chargé du département, qui statue définitivement.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Introduction
Les modifications légales qui vous sont présentées concernent, pour le corps enseignant, les sanctions disciplinaires, la résiliation des rapports de service pour motif objectivement fondé et la suppression de l'exigence de la nationalité suisse à l'engagement.
Ces modifications ont pour but :
Les sanctions disciplinaires et la résiliation pour motif objectivement fondé (justes motifs) s'appliquant au personnel de l'administration centrale ont déjà été modifiées en 1987 à l'occasion de l'adoption de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements médicaux. Les discussions à ce sujet ont été reprises notamment avec les associations professionnelles dans le cadre de l'adoption de la nouvelle loi du 4 décembre 1997. Des éléments essentiels issus de ces deux refontes légales peuvent maintenant être transférés dans la LIP.
La Commission paritaire du statut des enseignants et enseignantes de l'enseignement primaire et secondaire, consultée au sujet du présent projet de loi, a donné son accord pour les modifications proposées.
Sanctions disciplinaires
L'annexe 1 permet une comparaison rapide des sanctions disciplinaires du statut actuel du personnel de l'administration centrale et de celles du personnel enseignant. Cette annexe permet ensuite une lecture juxtaposée des textes légaux pertinents.
Selon le projet, la LIP s'harmonise désormais avec la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale en ce qui concerne les points suivants :
les sanctions sont dorénavant énumérées dans l'ordre croissant de gravité. Pour mémoire, le choix de la sanction a pour seul critère la gravité de la faute commise. L'échelle des sanctions n'a donc pas à être parcourue avant qu'un licenciement disciplinaire (voire une révocation) soit prononcé ;
les sanctions financières sont la suspension d'augmentation de traitement et la réduction à l'intérieur de la classe de fonction ;
les éléments essentiels de procédure prévue pour les cas graves, soit la suspension provisoire et l'enquête administrative, sont transférés du règlement fixant le statut à la loi.
Une corrélation claire et plus responsabilisante est établie entre la gravité de la sanction et l'instance qui la décide, que ce soit en première instance ou sur recours :
la sanction la plus légère est prise par le supérieur ou la supérieure direct ;
. .
les sanctions les plus graves sont prises par le Conseil d'Etat.
Par conséquent, le recours à la Commission de recours des enseignants ne sera désormais possible que contre des sanctions d'une certaine gravité. Il n'est plus ouvert contre l'avertissement ou le blâme. Dans ces deux cas, un recours peut être déposé auprès du conseiller ou de la conseillère d'Etat chargé du département, qui statue définitivement.
Les modifications proposées affichent cependant quelques différences justifiées avec la nouvelle loi B 5 05 :
la révocation est maintenue comme sanction la plus grave. Elle indique la gravité d'une conduite incompatible avec la mission d'enseignant(e) qui consiste à former et à éduquer des enfants et des jeunes ;
le licenciement disciplinaire, avec la possibilité de démissionner après y avoir été invité, est également maintenu. Cette sanction implique la fin des rapports de service mais dans un cas moins grave que celui justifiant la révocation ;
le transfert dans un autre emploi subsiste. La loi le subordonne expressément aux qualifications professionnelles et personnelles requises pour occuper le nouveau poste. Cette mesure se justifie au vu du caractère exposé de la situation professionnelle de l'enseignant(e) face aux élèves et à leurs parents, et aux possibilités encore restreintes de mobilité professionnelle.
Résiliation des rapports de service pour motif objectivement fondé
L'annexe 2 permet une comparaison rapide des dispositions relatives à la résiliation pour motif objectivement fondé du statut actuel du personnel de l'administration centrale et de celles applicables au personnel enseignant. Cette annexe permet ensuite une lecture juxtaposée des textes légaux pertinents.
La nouvelle formulation tient mieux compte de l'exigence de professionnalisme et de l'adéquation des prestations fournies par les membres du personnel enseignant.
Quelques spécificités liées au corps enseignant demeurent et créent une différence avec la loi B 5 05 :
le projet ne retient pas l'insuffisance des prestations mais « l'inadéquation » des prestations, terme plus approprié pour les activités professionnelles de l'enseignant(e). En effet la qualité de ces activités tient aux connaissances de la discipline enseignée, aux compétences liées à l'apprentissage par un public d'élèves diversifié, à la relation pédagogique et à la relation avec les autres partenaires professionnels : collègues, parents, membres de direction, aspects qui ne se prêtent guère à une évaluation quantifiée ;
le motif d'inaptitude à observer les devoirs généraux de la fonction d'enseignant(e) est maintenu. Il se justifie compte tenu de la mission particulière de l'enseignant(e) vis-à-vis des élèves, des parents et de l'autorité scolaire ;
une enquête interne au DIP permettra d'établir les faits conformément à la loi sur la procédure administrative. Cette enquête tiendra compte des aspects pédagogiques et relationnels du métier. Elle sera faite par une personne au bénéfice d'une formation professionnelle dans l'enseignement, comme c'est le cas actuellement.
les mesures provisoires prises par le DIP (sans suppression ou diminution du traitement du maître) si l'intérêt des élèves le justifie, trouvent une base légale claire.
Suppression, à l'engagement, de l'exigence de la nationalité suisse
Cette mesure vise les personnes domiciliées dans le canton, au bénéfice d'un permis de travail et qui ont, par ailleurs, toutes les qualifications professionnelles et personnelles requises pour l'enseignement, dont la maîtrise du français, et une bonne intégration dans la communauté cantonale. La suppression de l'exigence de la nationalité n'entraînera donc pas un flux d'enseignant(e)s venant de l'étranger; un permis de travail, selon la législation en vigueur, est en outre exigé.
Pour les dix prochaines années qui seront marquées par le départ massif à la retraite de membres du personnel, engagés durant les années 60 et 70, le DIP devra procéder à de nombreux engagements. Le recrutement de personnes compétentes peut se trouver facilité en cas de pénurie d'indigènes, candidats à l'enseignement, avec ou sans la mise en vigueur progressive de l'accord bilatéral entre la Suisse et l'Union européenne sur la mobilité des personnes.
Commentaires article par article
L'annexe 3 permet la comparaison des textes légaux actuels avec ceux du projet.
Remarques préalables
Les modifications légales proposées entraîneront des modifications dans les statuts des membres du corps enseignant : règlements B 5 10.04 pour les enseignant(e)s primaire, B 5 10.08 pour les membres du personnel enseignant du Centre de Lullier et B 5 10.12 pour les enseignant(e)s du Centre d'enseignement de professions de la santé et de la petite enfance (CEPSPE).
La féminisation des titres et des statuts est systématiquement opérée dans les textes proposés.
Art. 120 Suppression de l'exigence de la nationalité suisse à l'engagement
Abrogation des alinéas 2, 4 et 5 :
Il est rappelé que durant les périodes de pénurie d'enseignant(e)s, ces dispositions n'ont pas toujours pu être appliquées et que des maîtres et maîtresses étrangers ont déjà, actuellement, le statut de fonctionnaire.
Art. 129 A Résiliation pour motif objectivement fondé, mesures provisoires et enquête interne au DIP
Les dispositions relatives au licenciement pour justes motifs figurent actuellement dans le règlement du Conseil d'Etat fixant le statut des membres du corps enseignant B 5 10.04. Vu son importance pour le bon fonctionnement des écoles, la nouvelle disposition qui met l'accent sur le professionnalisme et l'adéquation des prestations, doit trouver sa place dans une loi formelle ainsi que la procédure applicable.
alinéa 2 :
Les trois motifs retenus se recoupent en partie. Mais ensemble, ils couvrent les situations qui sont préjudiciables à la qualité de l'enseignement, que l'on est en droit d'exiger de tous les membres du corps enseignant.
alinéa 3 :
Le délai de 6 mois pour la fin d'une année scolaire est ramené à trois mois pour la fin d'un mois.
alinéa 4 :
L'enquête interne au DIP correspond à la pratique actuelle.
alinéa 5 :
Une mesure d'éloignement de la classe, avant l'aboutissement de l'enquête interne du département, doit être confirmée dans les meilleurs délais par le Conseil d'Etat. Cette mesure correspond déjà à la pratique actuelle du DIP.
Art. 130 Mesures disciplinaires et enquête interne au DIP
La référence à « l'imprudence » dans la phrase introductive est supprimée ; l'imprudence est couverte par la négligence.
Le blâme et l'avertissement sont transférés du règlement du Conseil d'Etat à la loi formelle. Ces sanctions trouvent ainsi une base légale suffisante dans une loi formelle.
lettre a)
Le terme « autorité scolaire » est remplacé par le terme, plus précis, de « supérieur hiérarchique ».
Lettre d), 6°
Le terme archaïque de « congé » est remplacé par le terme plus adéquat de « licenciement disciplinaire ». Ce dernier n'est pas lié à un enseignement insuffisant, permettant ainsi de mieux différencier cette sanction qui suppose une faute, de la résiliation pour motif objectivement fondé (cf. 129A).
Le délai de licenciement passe de 6 mois en principe pour la fin d'une année scolaire, à trois mois pour la fin d'un mois (cf. art. 129 A al. 3)
Art. 130 A suspension provisoire pour enquête
Les garanties relatives à la procédure applicable dans un cas grave, figurent dans la loi.
alinéa 3 :
En vertu du principe de proportionnalité, le traitement ne peut être supprimé que si les faits essentiels sont établis, ce qui n'est pas la règle.
alinéa 4 :
Comme le projet maintient le licenciement disciplinaire, cette mesure doit également rétroagir si la suspension provisoire s'avère justifiée. Dans ce cas, le délai de trois mois pour la fin d'un mois, depuis la suspension provisoire, doit être respecté.
Art. 131, al. 1 Cas de recours
Le recours à la Commission des enseignants. Ces sanctions seront tranchées en dernière instance par le conseiller ou la conseillère d'Etat chargé du DIP. Les autres cas de recours (art. 129 A et 130 A) seront transférés du règlement à la loi.
Au vu des explications qui précèdent, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter le présent projet de loi.
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Ce projet est renvoyé à la commission des finances sans débat de préconsultation.