Séance du
vendredi 22 janvier 1999 à
17h
54e
législature -
2e
année -
3e
session -
3e
séance
PL 7675-A
Présidée par M. Bernard Lescaze, la Commission législative a traité le projet de loi 7675 lors de ses séances des 12 décembre 1997, 9 janvier, 27 mars, 8 mai, 19 juin, 16 et 30 octobre 1998. Ont assisté à ses travaux M. le conseiller d'Etat Gérard Ramseyer, en charge du DJPT, M. Laurent Walpen, chef de la police et M. Eric Balland, secrétaire adjoint au DJPT.
Introduction
Suite au dépôt par le Conseil d'Etat du projet de loi 7661, relatif à la mise en oeuvre du projet ASM 2000 (adopté lors de notre séance plénière du 5 novembre 1998), les députés Christian Grobet, Jean Spielmann et Pierre Vanek ont adressé au Grand Conseil, en date du 4 juin 1997, le présent projet de loi, visant deux objectifs :
le premier à donner une base constitutionnelle à la délégation de pouvoirs de police aux agents municipaux des 45 communes du canton en ajoutant un alinéa spécifique à l'article 39 de la constitution genevoise (ci-après : Cst.). En effet le concept ASM 2000 ne peut actuellement pas s'appliquer à la commune de Genève car cette dernière bénéficie d'un statut constitutionnel distinct des autres communes prévu par les articles 154 à 156 Cst. Cette question a été traitée dans le rapport PL 7661-A auquel on pourra se référer pour de plus amples explications ;
le second à supprimer l'article 156, alinéa 2 de la constitution qui aurait dû être modifié quand l'Etat a restitué à la Ville de Genève ses compétences en matière de voirie et de constructions.
Travaux de la commission
Il y a lieu de rappeler que la commission a traité les projets de lois 7661 et 7675 ensemble pour ensuite décider de poursuivre séparément l'étude du projet de loi 7661 puis celle du projet de loi 7675.
Lors de la première séance, M. Balland a expliqué aux commissaires que le Conseil d'Etat n'avait pas proposé de projet de modification constitutionnelle avec le projet de loi sur la police (PL 7661), car le but prioritaire était de permettre la concrétisation rapide de l'accord intervenu entre l'exécutif cantonal et les communes genevoises autres que la Ville de Genève. L'absence d'une proposition de modification constitutionnelle ne relevait ni d'une lacune ni d'un oubli. A son avis l'article 146 Cst. est suffisant pour fonder les compétences des communes en la matière, cette norme étant le pendant de l'article 156 de la constitution lequel détermine les domaines de compétence de la Ville de Genève.
Ainsi, ce n'était que dans la mesure où il était décidé d'intégrer la Ville de Genève dans le concept ASM 2000 qu'il fallait modifier la constitution. Les explications du Conseil d'Etat ainsi que l'audition des représentants de l'association des communes genevoises ont permis de conclure au fait que les communes n'étaient pas hostiles à ce que la Ville de Genève adhère au projet ASM 2000 pour autant que ceci ne retarde pas l'entrée en vigueur des dispositions nouvelles de la loi sur la police. La commission a pris en considération les arguments des communes en dissociant l'étude des 2 projets de loi.
Les commissaires étant parvenus à un consensus sur le principe posé par ce projet de loi 7675 ainsi que sur la pertinence de donner une base constitutionnelle claire à l'unité du corps de police, ils acceptèrent d'entrer en matière.
L'examen du texte proposé comporte 3 volets : la nouvelle base constitutionnelle, l'abrogation de l'art. 156, al. 2 Cst. et la nécessité d'une disposition transitoire.
1. Base constitutionnelle de la loi sur la police
Pour ce faire, les auteurs du projet de loi 7675 proposent d'ajouter un nouvel alinéa g à l'article 39 Cst. lequel prévoit les domaines réglés par la loi. Toutefois cette disposition faisant partie du titre III qui traite des libertés individuelles, il est apparu que l'endroit n'était pas le meilleur. Après réflexion, M. Balland suggéra d'intégrer la disposition souhaitée dans le chapitre intitulé « organisation et attribution du Conseil d'Etat », contexte plus en adéquation avec le sujet qui est de fonder l'unité du corps de police et indiquer les délégations possibles.
C'est ainsi que l'article constitutionnel 125A (nouveau) dont la teneur fut arrêtée, après une intense discussion, a été adopté par tous les commissaires.
Cette disposition constitutionnelle spécifie que la police est exercée par un seul corps dans le canton, donne une base constitutionnelle à la loi sur la police et reprend les conditions dans lesquelles des tâches de police peuvent être déléguées aux communes.
La teneur en est la suivante :
Art. 125A (nouveau)
1 La police est exercée dans tout le canton par un seul corps de police placé sous la haute surveillance du Conseil d'Etat.
2 La loi règle ce qui a trait à cet exercice, notamment les attributions, l'organisation et les modes d'intervention de la police.
3 La loi peut aussi déléguer au personnel qualifié des communes des pouvoirs de police limités.
2. Abrogation de l'article 156, alinéa 2 Cst.
Cet article restreint les compétences de la Ville de Genève dans trois domaines : les établissements spéciaux d'instruction publique, la police municipale (à l'exclusion des gardes nécessaires à la surveillance des halles et des parcs) et le service des travaux (à l'exclusion de l'éclairage des voies publiques, de la gestion et de l'entretien des bâtiments et des promenades appartenant à la Ville), qui font partie de l'administration cantonale et sont placés sous la direction immédiate du Conseil d'Etat.
La suppression de l'alinéa 2 de l'art. 156 Cst. se conçoit dans l'optique d'un toilettage nécessaire de la constitution en raison du fait que certaines compétences, notamment la voirie, ont été progressivement déléguées par le Conseil d'Etat, au moyen de convention, à la Ville de Genève. Toutefois une suppression pure et simple de cette disposition ne peut se concevoir sans encourir le risque de générer des lacunes à savoir un manque de base légale dans les domaines concernés, attribués conventionnellement ou non encore attribués à la Ville de Genève. C'est pourquoi il y a lieu de prévoir une disposition transitoire afin que la suppression de l'article 156, al. 2 Cst. coïncide avec l'entrée en vigueur de la loi qui sera proposée en application de l'art. 125A (nouveau) Cst. pour régler les rapports entre l'Etat et la Ville de Genève en matière de délégation de pouvoirs de police.
En outre, les relations de l'Etat et de la Ville en la matière commandent de nouvelles négociations car, selon M. Laurent Walpen, la Ville ne peut pas actuellement encaisser le produit de certaines amendes d'ordre alors qu'avec le présent projet constitutionnel cette barrière serait levée et l'Etat ferait ainsi un cadeau à la Ville de Genève de l'ordre de 15 millions de francs. Par ailleurs les agents municipaux et les contractuels seraient mis involontairement en concurrence car ils interviendraient sur le même terrain.
3. Disposition constitutionnelle transitoire
M. .
Art. 182 (nouveau) Dispositions transitoires
L'abrogation de l'article 156, alinéa 2, n'entre en vigueur qu'au moment où la loi adoptée en application de l'article 125A, alinéa 3, a réglé les rapports entre l'Etat et la Ville de Genève concernant la délégation à cette dernière de pouvoirs de police limités.
Votes
Après avoir rappelé que la commission avait déjà accepté à l'unanimité l'entrée en matière de ce projet de loi et procédé au vote article par article, le président passa au vote d'ensemble sur le projet tel qu'amendé, lequel a été également accepté à l'unanimité.
Conclusions
Vous aurez constaté, Mesdames et Messieurs les députés, que le texte qui vous est proposé à l'issue des travaux de la commission a été amendé tout en conservant l'idée initiale du projet, dans le but non seulement de saisir l'occasion d'exprimer dans la constitution le principe de l'unité du corps de police mais encore de permettre à la Ville de Genève d'adhérer au concept ASM 2000 dès que les négociations avec le canton seront terminées. Ces négociations devraient aussi contribuer à éliminer certains doublons et permettre une meilleure répartition des activités entre les collectivités publiques.
Aussi, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés à suivre les conclusions unanimes de la commission (1 S, 2 AdG, 1 R, 1 L) et voter ce projet de loi dans la teneur a été amendée.
Premier débat
Mme Christine Sayegh (S), rapporteuse. Le but de ce projet de loi est de donner, dans la constitution, une base légale claire à la loi sur la police ainsi qu'à la délégation potentielle des pouvoirs de la police aux communes. Cette délégation a déjà été concrétisée par le projet de loi qui lui-même concrétisait «ASM 2000» mais il est apparu que cette délégation pouvait s'appliquer à toutes les communes sauf à la Ville de Genève qui fait l'objet d'un statut constitutionnel spécifique.
Cette base constitutionnelle englobe toutes les communes, Genève y compris, quand elle aura trouvé un accord avec le département concerné. C'est la raison de la disposition transitoire.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi constitutionnelle(7675)
modifiant la constitution de la République et canton
de Genève (A 2 00)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1947, est modifiée comme suit :
Art. 125A (nouveau)
1 La police est exercée dans tout le canton par un seul corps de police placé sous la haute surveillance du Conseil d'Etat.
2 La loi règle ce qui a trait à cet exercice, notamment les attributions, l'organisation et les modes d'intervention de la police.
3 La loi peut aussi déléguer au personnel qualifié des communes des pouvoirs de police limités.
Art. 156, al. 2 (abrogé)
Art. 182 Dispositions transitoires (nouveau)
L'abrogation de l'article 156, alinéa 2, n'entre en vigueur qu'au moment où la loi adoptée en application de l'article 125A, alinéa 3, a réglé les rapports entre l'Etat et la Ville de Genève concernant la délégation à cette dernière de pouvoirs de police limités.