Séance du
jeudi 5 novembre 1998 à
17h
54e
législature -
2e
année -
1re
session -
47e
séance
Points initiaux
54e législature
No 47/VI
Jeudi 5 novembre 1998,
soir
La séance est ouverte à 17 h.
Assistent à la séance : Mme et MM. Guy-Olivier Segond, Micheline Calmy-Rey, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : Mme et MM. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat, Martine Brunschwig Graf et Carlo Lamprecht, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Gilles Desplanches, Marie-Thérèse Engelberts, Dominique Hausser et Danielle Oppliger, députés.
3. Discussion et approbation de l'ordre du jour.
M. Antonio Hodgers(Ve). Je prends la parole pour demander que soit traitée de manière urgente, c'est-à-dire maintenant, la proposition de résolution annoncée ce matin, concernant l'aide aux populations d'Amérique centrale victimes du cyclone Mitch. Il n'y aura certainement pas de longs débats à ce sujet, car tous les partis ont signé cette résolution 388. Je propose donc qu'on la vote maintenant.
Le président. Bien, nous commencerons par ce point, Monsieur.
M. Charles Beer(S). Je propose de traiter ce soir encore une motion urgente concernant l'Académie de l'environnement.
Le président. Quel point de l'ordre du jour est-ce, Monsieur ?
M. Charles Beer. Il s'agit d'une motion que je vais déposer ; elle ne figure pas à l'ordre du jour.
Le président. Vous demandez que nous la traitions à cette session ? Je vous rappelle que nous avons plus de cinquante points à traiter...
M. Charles Beer. J'aimerais dire en deux mots de quoi il s'agit : au niveau fédéral, on a décidé la fermeture de cette académie ; au niveau cantonal, on a abaissé la subvention accordée à cette académie. Parallèlement, un rapport du Conseil suisse de la science demandait une évaluation des rapports pour fin juin, mais les licenciements ont déjà commencé. Il y a une certaine urgence par rapport à ces licenciements, décidés sur la base des décisions de fermeture et de réduction de la subvention sans tenir compte du résultat de l'audit escompté par le Conseil suisse de la science. C'est la raison de ma demande.
Le président. Je vous ferai remarquer que le Grand Conseil a décidé tout à l'heure d'achever ses travaux à 20 h; il reste plus de cinquante points à traiter, parmi lesquels beaucoup sont également urgents. Je soumettrai en fin de séance votre proposition de motion qui, pour le moment n'est pas déposée. Personne ne sait ce dont il s'agit. Il faut donc que votre texte soit sur le banc de tous les députés, afin qu'ils puissent en prendre connaissance. A ce moment-là, ils pourront décider ; pour l'instant, il n'en est pas question.
4. Déclarations du Conseil d'Etat et communications.
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je dois vous faire, au nom du Conseil d'Etat, une déclaration sur les décisions qui ont été prises concernant le projet Smart Geneva.
Dans le monde entier, les nouvelles technologies de communication déclenchent une révolution qui, par son ampleur et par ses effets, sera au XXIe siècle ce que la révolution industrielle a été au XIXe siècle.
Cette nouvelle révolution industrielle donne naissance à une nouvelle société, la société de l'information, qui modifiera fondamentalement notre façon de vivre, d'apprendre et de travailler.
Genève - qui abrite sur son territoire le siège mondial de nombreuses organisations internationales qui s'occupent de l'élaboration de normes réglementant la société de l'information - est donc au coeur de cette société.
Convaincu que les richesses et les emplois du XXIe siècle seront créés grâce à ces nouvelles technologies de l'information, le Conseil d'Etat entend donc que Genève entre de plain-pied dans le XXIe siècle et dans la société de l'information.
Pour le Conseil d'Etat, le rôle de l'Etat dans ce domaine est clair : l'Etat est le garant de l'intérêt général et le seul détenteur de la puissance publique. Et de même qu'il a été important de construire des réseaux ferroviaires lorsque le chemin de fer a été inventé, des routes lorsque l'automobile a été inventée, des aéroports lorsque l'avion a été inventé, il est important de construire des réseaux de communication à haute capacité pour permettre aux nouvelles technologies de l'information de se développer pleinement.
Tel est le sens profond de Smart Geneva - qui tire son nom du programme européen Smart Cities qui englobe toutes les villes engagées dans ce même programme - qui dotera Genève et ses habitants d'un réseau de véritables autoroutes de l'information.
Basé sur des prototypes réalisés à Genève - tel le réseau Geneva MAN qui est l'abréviation de Metropolitan Area Network - Smart Geneva porte techniquement un nom peu romantique : c'est un réseau numérique à intégration de services, à large bande passante et à haut débit, destiné aux utilisateurs professionnels - les entreprises - et aux utilisateurs résidentiels - les foyers.
Politiquement, c'est un véritable défi technologique, économique, financier, social... mais c'est surtout un projet démocratique.
Pour relever ce défi, de nombreuses études et enquêtes ont été conduites ces trois dernières années, de façon pluridisciplinaire, auprès de la population, des utilisateurs et des opérateurs de réseaux. Plusieurs études ont été effectuées sur les attitudes à l'égard des nouvelles technologies de l'information. Une évaluation des impacts économiques et sociaux a été réalisée.
Aujourd'hui, les choses sont claires : une partie de Smart Geneva existe déjà sous la forme des réseaux primaires, c'est-à-dire ceux qui vont des têtes de réseaux aux quartiers, en fibre optique, appartenant soit à Swisscom - pour les réseaux destinés à l'usage public ; soit aux Services industriels - pour les réseaux destinés à l'usage propre de cette entreprise.
Smart Geneva consiste donc principalement à amener, en cinq ans, la fibre optique dans les réseaux secondaires, c'est-à-dire du quartier à l'immeuble, et dans les réseaux tertiaires, c'est-à-dire de l'immeuble à l'appartement. Ce travail est en cours pour les principaux utilisateurs professionnels par Swisscom et par certains autres opérateurs actifs sur le marché. Il reste à le faire pour les utilisateurs résidentiels et pour les petites et moyennes entreprises.
Sur le plan financier, le coût de Smart Geneva, initialement estimé à 650 millions, est aujourd'hui évalué à 450 millions environ.
Même si ce coût va encore évoluer en fonction de la possibilité d'utiliser, à titre onéreux ou à titre gratuit, les canalisations existantes dans le sous-sol afin de minimiser les frais de génie civil, ce coût est important. Il devra donc être supporté, pour l'essentiel, par des investisseurs privés, et non pas par l'Etat, conformément à l'esprit et à la lettre de la libéralisation des télécommunications.
Pour faire cet investissement important, les investisseurs ont besoin d'un cadre juridique, sûr et stable, qui existe dans notre pays depuis le 1er janvier 1998 seulement, date de l'entrée en vigueur de la nouvelle législation fédérale sur les télécommunications. L'interprétation de ce cadre juridique par les instances administratives et judiciaires commence à être connue : les premières décisions, incidentes ou finales, sur les différents recours formés par les nouveaux opérateurs du marché sont tombées à la fin de l'été.
Nous sommes donc dans une situation où le nouveau droit et ses règlements d'application sont connus. Les différentes études techniques sont terminées. Le coût de construction a été estimé. Les besoins du marché ont été étudiés. Le Business Plan a été rendu. Le Conseil d'Etat a donc pu prendre les premières et les principales décisions de principe que je vais rapidement vous présenter :
1. Le Conseil d'Etat a confirmé sa volonté, annoncée dans le discours de Saint-Pierre, de doter le canton de Genève d'un réseau de véritables autoroutes de l'information. Il s'agit d'un projet démocratique : ce réseau mettra les nouvelles technologies de l'information à la portée de tous, des citoyens et des PME comme des institutions de recherche et des multinationales.
2. Le Conseil d'Etat a décidé de faire construire, sous le nom de Smart Geneva, se raccordant ainsi au programme européen de Smart Cities, ce réseau numérique à intégration de services, à large bande passante et à haut débit, destiné aux utilisateurs professionnels - les entreprises - et aux utilisateurs résidentiels - les foyers.
3. Le Conseil d'Etat a décidé que ce réseau serait construit en cinq ans, par une entreprise, suisse ou étrangère, existante ou à créer, choisie au terme d'un appel d'offres, conformément aux règles, internationales et nationales, en vigueur.
4. Le Conseil d'Etat a décidé que l'entreprise retenue devra assurer le financement de la construction du réseau. Afin de garantir le caractère démocratique du projet et l'égalité d'accès au réseau pour tous, l'entreprise bénéficiera d'une garantie financière de l'Etat donnée sous forme de loi votée par ce Grand Conseil, pour les crédits nécessaires.
5. Le Conseil d'Etat a décidé que l'entreprise retenue bénéficiera d'un accès aux infrastructures - canalisations et réseaux - de l'Etat de Genève et des établissements publics qui sont soumis à sa surveillance, à des conditions non discriminatoires.
6. Enfin, le Conseil d'Etat a décidé l'ouverture d'un appel d'offres, dont les conditions principales seront publiées dans la «Feuille d'avis officielle» du lundi 9 novembre 1998, le détail des conditions étant à la disposition des entreprises intéressées dès le 11 novembre.
Ces derniers mois, l'établissement du cahier des charges qui sert de base à l'appel d'offres a représenté une phase capitale du projet : en effet, il ne conditionne pas seulement le nombre et la qualité des réponses obtenues des entreprises, mais également la construction et l'exploitation du réseau.
La qualité du processus d'appel d'offres, sa capacité à prendre en compte les dimensions techniques, économiques, sociales et juridiques du projet et son aptitude à mobiliser au mieux l'esprit d'innovation et d'entreprise des opérateurs étaient donc des facteurs clefs de succès.
Pour garantir toutes les chances de succès de ce processus, une équipe de projet a été constituée. Elle se compose :
1. de consultants issus d'une société de conseil internationalement reconnue, qui apporte notamment son expérience de processus similaires d'appels d'offres en Europe et aux Etats-Unis. Elle garantit la crédibilité internationale et l'indépendance de l'appel d'offres, assurant également la neutralité des recommandations relatives au choix de l'opérateur ;
2. des représentants de l'Etat, impliqués de longue date dans le projet Smart Geneva, qui apportent leur connaissance des études réalisées et qui garantissent la continuité du projet ainsi que la prise en compte des spécificités genevoises ;
3. enfin, d'un représentant du monde scientifique et académique, professeur à l'EPFL, pour sa neutralité et son recul vis-à-vis du projet.
Le processus d'appel d'offres comprend les phases suivantes :
1. l'élaboration du cahier des charges pour l'appel d'offres qui a été terminé ;
2. la spécification des critères de sélection et de la méthodologie permettant de comparer objectivement les réponses reçues ;
3. les réponses aux questions relatives au cahier des charges ;
4. l'analyse et l'évaluation des offres, avec recommandations au Conseil d'Etat quant au choix de l'opérateur ;
5. la décision finale du Conseil d'Etat.
Ouvert en novembre 1998, le processus de l'appel d'offres se terminera dans les premiers mois de 1999 par la décision du Conseil d'Etat relative à l'entreprise choisie, puis par le vote par le Grand Conseil de la loi de garantie ; une première partie de Smart Geneva sera présentée en octobre 1999, lors de TELECOM 99.
Le Conseil d'Etat est conscient de l'importance de ce projet pour l'avenir de notre canton. C'est pourquoi il a veillé à ce que tous les aspects soient étudiés à fond.
Au début de 1999, le Grand Conseil recevra un rapport détaillé de près de deux cents pages, présentant :
1. la société d'information et ses réseaux ;
2. le rôle de la Genève internationale ;
3. les attentes et les attitudes de la population ;
4. le rôle de l'Etat ;
5. le cadre juridique ;
6. les finalités du projet ;
7. les applications, les services et les prestations possibles ;
8. les divers types de réseaux et leurs aspects techniques ;
9. les réseaux existants ;
10. les aspects financiers et le Business Plan ;
11. la procédure d'appel d'offres ;
12. le calendrier de réalisation.
Par la suite, le Grand Conseil sera amené à se prononcer sur un projet de loi donnant la garantie de l'Etat aux crédits obtenus par l'entreprise qui construira Smart Geneva.
En raison des connaissances particulières exigées dans le domaine scientifique et technique, mais aussi dans le domaine linguistique puisqu'une part importante du travail a dû être accomplie en anglais, l'élaboration du projet a suivi une procédure extraordinaire, ce qui a eu l'avantage d'éviter les fuites intempestives !
Cependant, au moment où le projet va entrer dans sa phase de construction, il est nécessaire de revenir à une procédure plus ordinaire. C'est pourquoi, pour suivre la réalisation de Smart Geneva, le Conseil d'Etat a créé une délégation formée de MM. Laurent Moutinot, responsable de l'équipement, Carlo Lamprecht, responsable de la politique économique, et moi-même, responsable de l'action sociale et de la santé. Cette délégation sera assistée de collaborateurs chargés des technologies de l'information et des collaborateurs du département des finances.
La construction de ce réseau n'est pas seulement un défi technologique : c'est surtout un projet démocratique tourné vers l'avenir. Smart Geneva n'est en effet pas seulement un réseau, c'est surtout la création d'un nouveau système de formation, d'information et de communication, permettant de sortir d'un certain isolement politique en dépassant les frontières. Ce réseau sera destiné à tous les habitants, toutes les entreprises, tous les instituts de recherche, toutes les multinationales. Ses applications sont infinies, de l'éducation, la culture et les loisirs, à la conception, la fabrication et la vente d'un bien ou d'un service.
Les nouvelles technologies de l'information ne sont pas comme le croient certains des fatalités : ce sont des possibilités dont la mise en oeuvre permet de créer les richesses et les emplois du XXIe siècle. C'est pourquoi ce projet - nous l'espérons, au Conseil d'Etat - est le symbole d'une Genève créatrice, créatrice d'innovation, d'art, de produits et d'emplois, mais aussi d'idées, d'intégration, d'espoir et d'audace. (Applaudissements.)
5. Annonces et dépôts :
a) de projets de lois ;
Néant.
b) de propositions de motions ;
Le président. J'annonce ici la motion :