Séance du vendredi 23 octobre 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 12e session - 42e séance

PL 7683-A
23. Rapport de la commission judiciaire chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi d'application du code pénal et d'autres lois fédérales en matière pénale (Réactualisation des compétences du Tribunal de police) (E 4 10). ( -) PL7683
Mémorial 1997 : Projet, 6036. Renvoi en commission, 6044.
Rapport de M. Pierre Froidevaux (R), commission judiciaire

Sous la présidence de M. Pierre-François Unger, la Commission judiciaire s'est réunie à trois reprises à partir du 7 mai 1998 pour traiter de la réactualisation des compétences du Tribunal de police. Les commissaires ont pu compter, comme à l'accoutumée, sur la clairvoyance de M. Duport, secrétaire-adjoint du département, ainsi que de Mme Arlette Stieger de l'administration fiscale et de MM. Bernard Bertossa, Procureur général, Benoît Chappuis, bâtonnier de l'Ordre des avocats et de l'Association des juristes progressistes.

Ce projet de loi du Conseil d'Etat, soutenu par le Ministère public, entend étendre au Tribunal de police certaines compétences poursuivies jusqu'ici par la Cour correctionnelle, rationalisant ainsi l'administration de la justice.

Audition de M. Bernard Bertossa, Procureur général

Pour le Procureur général, ce projet de loi a deux buts essentiels : rendre la loi genevoise conforme à la loi fédérale et étendre les compétences du Tribunal de police.

Mise en conformité avec la loi fédérale

Ce projet de loi n'est, en fait, qu'une mise en conformité avec la pratique actuelle du  Ministère public. Ainsi, l'article 4 de la loi d'application du code pénal (ci-après LACP) rend compétent le Tribunal de police pour toute une série de délits passibles de l'emprisonnement comme peine la plus grave. Sa dernière modification remonte au 18 janvier 1994 et concernait des dispositions nouvelles réprimant des infractions contre l'intégrité sexuelle. Depuis lors, est entrée en vigueur le 1er janvier 1995, la révision du code pénal du 17 juin sur les infractions contre le patrimoine et les faux dans les titres, affectant 15 des chiffres de l'article 4 de la LACP. Le Conseil d'Etat propose maintenant l'adjonction de 11 autres infractions dont le jugement paraît pouvoir être confié systématiquement au Tribunal de police. Toutes sont passibles de l'emprisonnement comme sanction la plus grave.

Extension des compétences

Ce changement de procédure permettra en outre de soulager le rôle de la Cour correctionnelle qui, elle-même, a été appelée à soulager la Cour d'assises. Ces mesures concourent toutes à améliorer le fonctionnement de l'ensemble de la justice en lui permettant de rendre ses arrêts plus rapidement que par le passé. Une surcharge de travail du Tribunal de police n'est pas à craindre, car la procédure y est plus simple que dans les autres juridictions.

Les autres demandes d'auditions : Me Benoît Chappuis, bâtonnier de l'Ordre des avocats et de l'Association des juristes progressistes

Les juristes progressistes ont précisé, par courrier, n'avoir aucune remarque à formuler pour ce projet de loi, pas davantage que le nouveau bâtonnier, Me Benoît Chappuis.

Conclusions

La commission a approuvé à l'unanimité cette extension des compétences du Tribunal de police.

Elle a cependant été heurtée par une modification de l'article 27 de la loi sur l'imposition à la source des personnes physiques et morales, en particulier par la proposition du Conseil d'Etat de créer un alinéa 3 nouveau. Celui-ci prévoyait une prolongation de 5 à 10 ans de la prescription de la poursuite pénale. L'audition de Mme Arlette Stieger de l'administration des finances a bien démontré que cette modification était conforme à la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID) et entrerait en force au plus tard dans 3 ans.

Cependant, si le fond se justifie pour un certain nombre de députés, la forme, quant à elle, les a tous heurtés. Le style ampoulé de l'alinéa "; Pour la prescription de la poursuite pénale, l'article 189 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct, du 14 décembre 1990, s'applique par analogie. " a fait même sursauter certains : "; ce texte est un camouflage " ; "; il s'agit bel et bien d'une manipulation " ; "; pourquoi ne dit-on pas expressément, ne serait-ce que pour le citoyen, que la prescription est fixée à 10 ans. Il y a là un calcul pour savoir à quel point le député de base est aveugle ! ".

La commission a refusé à l'unanimité cet alinéa afin de ne pas vouloir récompenser les autorités d'avoir commis cet impair.

Cette péripétie de procédure ne doit pas pour autant occulter la qualité du reste de ce projet de loi dont la commission en recommande sans réserve l'adoption à notre assemblée tel qu'il ressort de ses réflexions.

Premier débat

M. Pierre Froidevaux (R), rapporteur. Je n'ai rien à ajouter à mon rapport. Il s'agit en fait d'une remise à niveau de la pratique actuelle des tribunaux et je vous recommande de voter le projet de loi tel qu'il est sorti du travail de la commission.

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi(7683)

modifiant la loi d'application du code pénal et d'autres lois fédérales en matière pénale (Réactualisation des compétences du Tribunal de police) (E 4 10)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article 1

La loi d'application du code pénal et d'autres lois fédérales en matière pénale, du 14 mars 1975, est modifiée comme suit :

Art. 4 Compétence générale (nouvelle teneur)

Le Tribunal de police, outre les infractions mises dans sa compétence par l'article 28 de la loi d'organisation judiciaire, connaît des délits suivants prévus par le code pénal :

1. lésions corporelles simples (art. 123, ch. 1, code pénal) ;

2. omission de prêter secours (art. 128, code pénal) ;

3. rixe (art. 133, code pénal) ;

4. soustraction d'une chose mobilière (art. 141, code pénal) ;

5. utilisation sans droit de valeurs patrimoniales (art. 141bis, code pénal) ;

6. soustraction d'énergie (art. 142, ch. 1, code pénal) ;

7. accès indu à un système informatique (art. 143bis, code pénal) ;

8. dommages à la propriété (art. 144, ch. 1, code pénal) ;

9. détournement de choses frappées d'un droit de gage ou de rétention (art. 145, code pénal) ;

10. filouterie d'auberge (art. 149, code pénal) ;

11. obtention frauduleuse d'une prestation (art. 150, code pénal) ;

12. atteinte astucieuse aux intérêts pécuniaires d'autrui (art. 151, code pénal) ;

13. faux renseignements sur des entreprises commerciales (art. 152, code pénal) ;

14. fausses communications aux autorités chargées du registre du commerce (art. 153, code pénal) ;

15. falsification de marchandises (art. 155, code pénal) ;

16. détournement de retenues sur salaire (art. 159, code pénal) ;

17. violation du secret de fabrication ou du secret commercial (art. 162, code pénal) ;

18. violation de l'obligation de tenir une comptabilité (art. 166, code pénal) ;

19. avantages accordés à certains créanciers (art. 167, code pénal) ;

20. subornation dans l'exécution forcée (art. 168, code pénal) ;

21. détournement de valeurs patrimoniales mises sous main de justice (art. 169, code pénal) ;

22. délits contre l'honneur et violation de secrets privés (art. 173 à 179, code pénal) ;

23. écoute et enregistrement de conversations entre d'autres personnes (art. 179bis, code pénal) ;

24. enregistrement non autorisé de conversations (art. 179ter, code pénal) ;

25. violation du domaine secret ou du domaine privé au moyen d'un appareil de prise de vues (art. 179quater, code pénal) ;

26. mise en circulation et réclame en faveur d'appareils d'écoute, de prise de son et de prise de vues (art. 179sexies, code pénal) ;

27. soustraction de données personnelles (art. 179novies, code pénal) ;

28. menaces (art. 180, code pénal) ;

29. contrainte (art. 181, code pénal) ;

30. violation de domicile (art. 186, code pénal) ;

31. pornographie (art. 197, code pénal) ;

32. violation d'une obligation d'entretien (art. 217, code pénal) ;

33. violation du devoir d'assistance ou d'éducation (art. 219, code pénal) ;

34. enlèvement de mineur (art. 220, code pénal) ;

35. suppression ou omission d'installer des appareils protecteurs (art. 230, code pénal) ;

36. altération de fourrages (art. 235, code pénal) ;

37. atteinte à la paix des morts (art. 262, code pénal) ;

38. actes commis en état d'irresponsabilité fautive (art. 263, code pénal) ;

39. délits contre la volonté populaire (art. 279 à 283, code pénal) ;

40. bris de scellés (art. 290, code pénal) ;

41. rupture de ban (art. 291, code pénal).

Article 2 Modifications à d'autres lois

(D 3 05)

1 La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit :

Art. 342A (abrogé)

(D 3 20)

2 La loi sur l'imposition à la source des personnes physiques et morales, du 23 septembre 1994, est modifiée comme suit :

Art. 27, al. 2 (nouveau)

2 Le Tribunal de police est compétent.

Article 3 Droit transitoire

La présente loi ne s'applique pas aux causes déjà renvoyées en jugement lors de son entrée en vigueur.