Séance du
jeudi 25 juin 1998 à
17h
54e
législature -
1re
année -
10e
session -
29e
séance
IU 520
M. Luc Gilly (AdG). Mon interpellation s'adresse à M. Ramseyer, chef du département de justice et police. Monsieur Ramseyer, cette interpellation a pour objet la violation de la loi fédérale sur le matériel de guerre. Hier, un excellent journal de la place, «Le Courrier», a relaté et résumé un dossier particulièrement délicat et choquant concernant un grand avocat genevois; je cite : Me Schifferli. Cet avocat a été abusé par un faux acheteur d'armes mais il a démontré à celui-ci sa grande capacité à détourner la nouvelle loi fédérale, à peine née, sur le matériel de guerre. Je cite rapidement sept points de ce dossier sur les agissements révélateurs de Me Schifferli qui :
1. conseille ses clients sur la manière de contourner la loi fédérale sur le matériel de guerre;
2. se targue d'obtenir auprès d'employés «coopératifs de l'administration fédérale» le nom de pays vers lesquels l'autorisation d'exportation de matériel de guerre sera facilement délivrée;
3. se charge de trouver dans ces pays des fonctionnaires corrompus prêts à délivrer des certificats de non-réexportation ou end user certificates;
4. s'occupe de l'achat de ces certificats et en particulier du versement de pots-de-vin;
5. propose ses services pour établir des contacts avec des fabricants de matériel de guerre afin de fournir des armes destinées à un pays qu'il sait sous embargo;
6. indique avoir une longue expérience en matière de vente illégale d'armes;
7. précise avoir été mêlé à un trafic d'avions Pilatus en Thaïlande.
Toutes ces activités étant évidemment illégales.
Monsieur Ramseyer, vous connaissez certainement dans vos services Me Schifferli. Vous savez que Me Schifferli a aussi été membre ou appartient encore - je ne sais pas - à la WACL, la ligue mondiale contre le communisme, qui s'est mise un peu en veilleuse ces temps. Me Schifferli en fut vice-président au moment où Mme Aubry en était présidente. Cette douteuse association couvre de nombreux attentats.
J'avais déjà interpellé le Conseil d'Etat en son temps sur les pots-de-vin qui avaient été versés, plus de 60 millions de dollars, par Bofors pour emporter une commande de canons par l'Inde dont Me Schifferli était l'un des associés. Pour l'instant, j'en resterai là car la situation est assez grave, Monsieur Ramseyer. J'ai appris par le journal et par une partie du dossier que je suis en train de réunir que déjà, à Berne, Mme Carla del Ponte ne fera rien parce que ce dossier est anonyme. Il est étonnant de voir aujourd'hui, dans la «Tribune de Genève», par exemple, les difficultés de M. Kasper-Ansermet concernant un autre trafiquant d'armes. Ce dernier ne peut pas être accusé d'anonymat ! Par contre nous sommes à Genève, Monsieur Ramseyer. Me Schifferli habite Genève. J'aimerais savoir si avec M. Bertossa, procureur général, qui a reçu tout le dossier, vous allez engager vos services à poursuivre des investigations dans les affaires de Me Schifferli sur ses pratiques douteuses. J'attends votre réponse demain, Monsieur Ramseyer, et je vous en remercie.