Séance du vendredi 20 février 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 5e session - 8e séance

R 359
6. Proposition de résolution de Mmes et MM. Luc Gilly, Fabienne Bugnon, Jeannine de Haller, Antonio Hodgers et Jean-François Courvoisier concernant les menaces de guerre contre l'Irak. ( )R359

Débat

Le président. Il nous reste à nous prononcer sur la proposition de résolution 359 que votre Grand Conseil a admis de traiter encore ce soir. Le texte de cette résolution se trouve sur vos tables. (Brouhaha.)

M. Michel Halpérin (L). Quelles que soient les circonstances, il ne me paraît pas raisonnable de commencer à faire de la politique étrangère à minuit. Je vous demande de renvoyer ce débat à la prochaine séance. (Applaudissements.)

M. Luc Gilly (AdG). Il faut les deux tiers des voix pour que cela soit accepté.

Le président. Je mets aux voix la proposition de renvoi de ce point à notre prochaine session de mars.

Mise aux voix, la proposition ci-dessus est rejetée (la majorité des deux tiers n'étant pas atteinte).

Mise aux voix, cette résolution est adoptée et renvoyée aux autorités fédérales.

Elle est ainsi conçue :

Résolution(359)

concernant les menaces de guerre contre l'Irak

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant:

- que cette guerre n'est pas une fatalité et que le Conseil fédéral doit agir !

- que depuis des semaines, le gouvernement des Etats-Unis d'Amérique concentre un imposant dispositif militaire dans le golfe arabo-persique dans le but de déclencher une nouvelle guerre contre l'Irak ;

- que sept ans après la première guerre dite "; du Golfe ", quatre porte-avions, des dizaines de bateaux de guerre et plus de quatre cents avions de combat s'apprêtent, une fois encore, à submerger la population irakienne sous un "; déluge de feu " ;

- que déjà soumise à un embargo criminel qui, selon la FAO, tue chaque jour quelque 250 enfants, déjà victime des bombardements et des destructions subies en 1991, déjà affaiblie par des privations de toute sorte, déjà soumise à une dictature criminelle, la population irakienne n'a pas besoin de cette nouvelle épreuve et qu'elle sera la première victime de la nouvelle guerre qui se prépare !

- qu'après sept ans d'humiliations imposées aux vaincus, de punitions collectives imposées à tout un peuple, de menaces de rétorsions militaires, les préparatifs actuels nous ramènent au point de départ. En ce sens, ils sont un cinglant aveu d'échec de la logique guerrière : la situation du peuple kurde en est la principale illustration ;

- que cette nouvelle guerre, activement voulue par le gouvernement des Etats-Unis d'Amérique, ne peut que renforcer la position de Saddam Hussein, assuré qu'il est d'obtenir la sympathie des autres gouvernements arabes ;

- que, de plus, force est de constater que ces préparatifs guerriers relèvent de la plus haute hypocrisie : n'est-ce pas en effet ce même gouvernement des Etats-Unis qui prétend intervenir pour anéantir les moyens de destruction massive tout en refusant de signer le traité sur l'interdiction des mines antipersonnel ? N'est-ce pas ce même gouvernement qui, par la bénédiction qu'il donne à la politique de M. B. Netanyahou, entérine la fin des accords d'Oslo sur la paix au Proche-Orient tout en se présentant, par cette nouvelle guerre, en "; champion de la paix et du droit " au Moyen-Orient ?

- que cette guerre n'est pas une fatalité. A Londres comme à Madrid ou à Rome, des gens commencent à descendre dans la rue pour manifester leur opposition à cette agression, pour empêcher qu'elle ait lieu. Dans tout le Moyen-Orient, y compris parmi les plus fidèles alliés des Etats-Unis, les gouvernements refusent cette guerre. Plusieurs pays européens manifestent également leur réprobation face à ces préparatifs guerriers ;

- qu'en ce sens la récente déclaration plus que circonspecte du Conseil fédéral n'est pas acceptable ;

- que toute autre attitude de la part des autorités fédérales constituerait un véritable désaveu de la volonté de rechercher des solutions civiles aux situations de crise affichée par la Suisse, notamment lorsque, dans le cadre de la présidence de l'OSCE, elle fut appelée à oeuvrer de manière importante en Bosnie,

invite les autorités fédérales

- à exprimer publiquement sa condamnation préventive d'une action de guerre que, à priori, rien ne justifie, à l'heure où des millions d'hommes et de femmes s'apprêtent à affronter de nouvelles et terribles épreuves ;

- à signifier clairement au gouvernement des Etats-Unis d'Amérique l'interdiction pour les avions militaires américains en route pour le Golfe d'utiliser l'espace aérien suisse ;

- à intervenir auprès du commandement de l'OTAN, avec laquelle la Suisse vient de signer un accord de partenariat dit "; pour la paix ", pour manifester ce désaccord ;

- à intervenir auprès des autorités irakiennes pour que celles-ci respectent les résolutions de l'ONU.

 

La séance est levée à 0 h.