Séance du jeudi 18 décembre 1997 à 17h
54e législature - 1re année - 3e session - 59e séance

M 1162
26. Proposition de motion de Mme et M. René Longet et Vesca Olsommer concernant l'apport de l'informatique à la concrétisation de la démocratie. ( )M1162

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le parcours de l'informatique à travers notre société se poursuit. Les générations montantes ont un tout autre rapport à l'ordinateur que les générations nées au milieu de ce siècle voire avant. Pour elles, travail, loisirs et espace relationnel sont pénétrés d'informatique. De plus en plus les possibilités interactives apparaissent et de nouvelles approches se dessinent en matière de consultation et de décision. L'informatique ne se limite en effet pas à l'enregistrement, à la comparaison et la gestion de données mais donne la possibilité d'intervenir en temps réel dans les processus et les débats, de réagir, d'amender. Il ne s'agit pas de plaider pour la démocratie cybernétique. Mais il est certain que les formes et modes institutionnels doivent profiter des meilleures techniques pour optimiser leur efficacité.

Dès lors, il est important de se préoccuper de manière active de ce que ces techniques pourraient offrir en termes de modes d'exercice des droits politiques, et d'interactivité démocratique en général. Il s'agit autant de baliser les risques, d'écarter les chimères, que de prévoir la réalisation de toute approche permettant de concrétiser la démocratie au quotidien, de la rapprocher du citoyen. En date du 14 août 1996, le Conseil fédéral refusait d'examiner la question de la «faisabilité de l'exercice des droits politiques par Internet ainsi que ses conséquences sociales» proposée par le postulatDe Dardel du 19 juin. La présente proposition s'inspire de ce postulat en l'inscrivant dans le cadre défini ci-dessus.

Au bénéfice de ces explications, nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir adopter la présente proposition de motion.

Débat

M. René Longet (S). Il n'est pas nécessaire d'expliquer très longuement ce que veut cette demande d'étude.

Nous sommes partis de l'idée que la Suisse a une des densités informatiques les plus fortes du monde et que c'est encore plus marqué à Genève que dans le reste de la Suisse. Nous sommes également partis de l'idée que l'informatique s'impose - non seulement nous en parlons beaucoup mais nous le vivons en tant que députés et nous en découvrons ces temps-ci les possibilités. Nous constatons que cette informatisation croissante du public ne saurait être sans effets et sans conséquences par rapport à l'exercice concret de la démocratie, à la fois en termes de communication, en termes d'interconnexion, en termes de documentation, en termes de réaction en temps réel.

Et ces perspectives nous paraissent devoir être analysées de manière plus fondamentale et non au coup par coup et de manière empirique. En revanche, il y a aussi un certain nombre de risques. Celui de l'exclusion, car de nombreuses personnes ne sont pas raccordées à ces technologies et ne le seront pas avant longtemps. Il y a ainsi le risque d'un certain nombre d'abus, en partant de l'idée que tout le monde doit tout savoir et que l'on ne communique plus par d'autres canaux. De plus, un langage propre à l'informatique ne doit pas être sans autre utilisé dans le discours juridique ou officiel.

Par rapport à cette réflexion, nous pensons que les chances d'augmenter l'accès à l'information, les risques d'exclusion, les possibilités d'exercer des modes démocratiques en temps réel, de soumettre en consultation un certain nombre d'éléments, de mettre en relation des citoyennes et des citoyens nous paraissent mériter une étude approfondie, préventive en quelque sorte, pour que la démocratie soit à la hauteur du potentiel informatique tel qu'il existe aujourd'hui. C'est en quelque sorte une contribution aussi au débat qui a lieu sur le plan technique par rapport à l'interconnexion et à l'informatisation dans notre cité.

En fonction de cela, nous vous proposons de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

motion

concernant l'apport de l'informatique à la concrétisationde la démocratie

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- que la forte densité d'équipement informatique dans le canton et les perspectives d'évolution sur ce plan,

- que les possibilités mais aussi les risques qu'implique une interconnexion informatique croissante pour la démocratie,

invite le Conseil d'Etat

à susciter une étude prospective permettant de mettre en évidence les possibilités techniques, les avantages escomptés et les risques à éviter pour la démocratie, résultant de l'informatisation croissante des citoyens et de la progression de leur mise en réseau.

Cette étude portera notamment sur:

- les innovations et facilitations possibles sur le plan de l'exercice des droits politiques (droit de vote, signatures d'initiatives et de référendums) et sur le plan de la gestion des processus de consultation et d'interaction (processus de planification en temps réel, interaction citoyens-administration),

- les risques d'abus notamment en matière de protection de données et d'exclusion et les moyens d'y parer,

- les moyens de mettre en oeuvre l'informatique pour activer et appuyer le dialogue entre citoyens, entre citoyens et associations, entre citoyens et collectivités publiques.